A destination de Hadrien Marcus de Sparte, Empereur.
A son habile secrétaire Thomas de Spartes aussi, qui aura la charge de préparer la réponse pour Sa Majesté, peut être ?
Le bon jour à vous. Je prends la plume ce jour au nom, je le sais, de la vision commune qui anime les élus du conseil ducal et des institutions de Lorraine depuis huit mois, pour ne parler que de cette période. Je prends la plume, pour vous parler franchement, sans faux semblant, le cur sur la main, sans utiliser de supports ou de moyens puérils* qui à mon sens ne devraient pas exister ici, puisqu'ils interfèrent sur le sain déroulement de la vie dans les Royaumes.
Nous sommes conscients vous et moi, de ce que vous et vos obligés pensez de la communauté lorraine. De ce que la communauté lorraine dans son ensemble pense de vous et de vos obligés.
Ce sont nos opinions personnelles, et à ceci je dis : soit. Ainsi va la vie. Mais en tant qu'élus, vous savez également bien que nous avons le devoir de nous dépasser, d'être plus et mieux que nous-mêmes, et parfois de mettre nos intérêts, nos blessures , notre ego, opinions et ceux de nos proches de côté pour non pas faire ce qu'on aimerait faire, mais ce qui est juste, ce qui est bon pour l'avenir de nos États respectifs.
Vous n'êtes pas sans savoir que la Lorraine se meurt lentement mais sûrement depuis l'ouverture des élections impériales. Vous n'êtes pas sans savoir qu'en Lorraine nous n'avons aucune richesse naturelle, rien In Gratibus parlant qui puisse intéresser qui que ce soit dans les Royaumes. Depuis nos origines, c'est très simple, nous n'avons que l'engagement politique et les projets collectifs décalés, différents de la masse, pour tenter d'exister.
Depuis quelques mois, face au choix collectif que nous avons fait pour la vie des lorrains et de la Lorraine, vous n'êtes pas non plus sans savoir toute la distance qui nous sépare plus que jamais des structures et des choix du trône impérial et de sa bureaucratie dominante. Malgré le fait qu'il soit continuellement combattu par le trône impérial et sa bureaucratie qui perdure depuis lors, c'est précisément ce système, le plus « progressiste » et libre d'Europe qui nous permet de maintenir voir de légèrement grossir la quantité de notre population cette année autour de 250 âmes après 4 années sans discontinuité où nous perdions chaque fois près de la moitié de nos habitants tous les ans.
A la lumière de notre situation, je veux donc vous dire ceci : le divorce définitif entre la Lorraine et le trône impérial est inéluctable.
S'il n'est pas « demain » (c'est une façon de parler), ce sera dans un, deux ou six mois. Lorsque les lorrains seront prêts en tout cas, tôt ou tard. La question est de savoir si l'on s'y prépare tranquillement dans la paix et l'acceptation mutuelle sans ingérence, ou si vous nous balancez « vos armées ».
On peut se cacher les yeux, feindre l'étonnement, vous pouvez brûler de nous « exterminer » avec « vos centaines d'hommes » comme vos amis qui utilisent des Fesses-de-Bouk*, ou ceux qui autour de vous ne peuvent s'empêcher de s'en répandre, vous y poussent. Vous pouvez lâcher ces séides pour qu'ils nous insultent d'abominables monstres, et autres joyeusetés qui, si elles nous blessent l'âme, pour autant nous finissons par être habitués depuis de nombreuses années, tant c'est excessif.
Vous pouvez tenter de récupérer les lorrains les plus conservateurs, les revanchards, les plus faibles et manipulables par leur goût immodéré des titres ou ceux encore qui aiment baisser la culotte devant le bruit des bottes étrangères. Ce sont souvent les mêmes, bien qu'il y ait des exceptions. Ainsi est également la nature humaine, et comme partout ailleurs nous n'y échappons pas. Vous le pouvez donc, et en retour nous ne ferons rien contre leur intégrité In Gratibus, car ils sont libres et nous ne persécutons personne chez nous.
Mais réfléchissons ensemble une minute : qu'allez vous y gagner ?
Des clous. Des cailloux sans valeur. De la haine immodérée de la cinquantaine d'actifs réguliers qu'il nous reste.
Verdun pour tranchée éternelle entre vous et nous.
Mais ensemble nous pouvons aussi décider et agir comme des adultes responsables, n'écoutant pas les voix les plus extrémistes de nos camps respectifs qui veulent une pétaudière innommable jusqu'à votre disparition.
Nous pouvons ainsi montrer à l'Europe entière que depuis que vous êtes élu vous êtes fait d'un meilleur bois que vos deux prédécesseurs. Vous pouvez au delà de tout ce qui nous séparera toujours, tous les infâmes mensonges colportés sur les lorrains, forcer néanmoins le respect en montrant que dans le cas précis de la Lorraine, il est bon pour notre duché et sa population, puisqu'en situation de vie ou de mort, de laisser notre communauté décider par elle-même son avenir, chez elle.
De manière libre, sans ingérence de votre part, avec si possible votre parole signée qu'il n'y aura jamais aucune condamnation ou destitution, d'aucune sorte, contre celles et ceux qui manifesteront le courage par leur banal droit de vote de vouloir faire quitter la communauté lorraine de la zone empire pour aller chercher ce que nous désirons plus que tout à savoir le respect de notre liberté sans remise en cause perpétuelle par une "magna carta" et une "noblesse impériale" qui se croit supérieure à nous. Que cette liberté soit encadrée par des institutions neutres de seconde instance modérées par le Droit Divin* et pas les outils entre les mains d'un monarque ou de ses bureaucrates pour (tenter d') éliminer tous ceux qui ne mangent pas dans la main du régime impérial dans les provinces.
De même, vous avez d'ors et déjà la parole et la garantie absolue, qui sera scellée, que jamais le gouvernement élu de Lorraine, tant que j'aurai quelque modeste influence ici-bas, ne persécutera, condamnera ou destituera un électeur au motif qu'il a voté en votre faveur et celle de l'empire. Il me semble que c'est un équilibre minimum mutuel qui doit être respecté de manière absolue.
En sommes, laissez faire le déroulement naturel des choses, sachez limiter vous-même votre pouvoir théorique absolu pour le bien de tous en Lorraine et chez vous, voici mon ardent conseil à votre endroit.
Que pouvez vous y gagner pour votre État ? Au delà du fait que vous éviteriez de provoquer une guerre ici, qui, malgré votre immense avantage militaire par rapport à nos modestes forces, ne trouvera jamais d'aboutissement qui vous soit favorable, à l'instar de ce qui a pu se voir, comme l'a rappelé le Duc de Lorraine sortant Gertruden, en confédération helvétique, en Provence, en Bretagne ou en Anjou, parce qu' In Gratibus parlant, non seulement nous ne partirons pas de notre terre, mais notre détermination ne ferait que se renforcer à mesure que nous subirions vos troupes chez nous, et pour sûr ! n'oublierions jamais la « cerise sur le gâteau » que constituerait une invasion faisant suite à tous les outrages subis par notre communauté depuis plus de 4 ans.
Alors qu'y gagner ? La Grandeur. Si laisser une marque dans l'Histoire des Royaumes en tant que bon monarque a une quelconque signification pour vous, alors vous devinez intimement au fond de vous que c'est la seule façon pour que ce sourd conflit, ces vieux démons qui brûlent de surgir, cette boite de Pandore prête à exploser de la haine pure entre les différentes identités que ni vous ni moi ne serons ensuite capable de refermer, s'achève une fois pour toute avant qu'il ne soit trop tard et ce de la meilleure façon qui soit. Ce choix vous fera rester comme l'homme qui a su laisser un peuple écrire son avenir librement, alors que cet homme aurait pu nous pourrir In Gratibus gratuitement, sans que jamais ça n'y change quoi que ce soit à nos curs & nos idées.
De grâce ! au contraire de ce que votre prédécesseur sur le trône a été incapable de faire lorsque je lui ai tendu la main en présence de son père et de Chlodwig von Frayner, acceptez ce « gentlemen's agreement » adapté, je le crois, à cette inextricable situation : aujourd'hui, je vous conjure de garder, sans que l'on n'y interfère plus jamais, votre trône impérial, vos innombrables principautés, votre langue anglaise et vos coutumes inspirées d'une culture qui nous est tellement vide de sens & étrangère, ainsi que tous vos courtisans autant que vous voulez pour vous, chez vous, et en échange, laissez nous déterminer librement de notre avenir,
sur des bases saines et ensuite respectez la forme que prendra l'expression de notre liberté, quelle qu'elle soit, même si ça vous en coûte.
Elle se limitera à notre petite communauté dans notre territoire qui est tout sauf gigantesque : tout ceci n'a donc pas de quoi vous empêcher de dormir la nuit et pas de quoi vous voir persister dans votre volonté d'uniformisation qui ne correspond à rien chez nous.
Bouleversons les habitudes surannées et les réflexes pavloviens : au lieu de perdre notre temps à nous battre de manière stérile, continuons notre vie sans ingérence mutuelle, dans la paix, chacun chez soi et Dieu pour tous !
Salutations les meilleures.
Zé, élu de Lorraine.