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C'est quand nous obtenons ce que nous désirons que nous souffrons du froid de la Mort et c'est en voulant se réchauffer trop fort au soleil de la Vie que l'on se brûle les ailes.

[RP] Ensemble séparement.

Samsa
    "Où es-tu passée ?
    Tu me manques tellement.
    C'est comme si c'était depuis toujours,
    Que tu es partie."*



Chinon. L'éternel point de départ et de retour, là où tout avait commencé, là où la fin avait débuté, là où les choses, depuis, continuaient de revivre et de mourir successivement. Avec les années, les pavés des rues s'enfonçaient peu à peu dans le sol, se brisaient, comme les pierres des murs, et puis l'autre face, c'était les murailles qui s'élevaient, de nouveaux bâtiments qui apparaissaient. Comme dans toute vie, des choses apparaissaient et disparaissaient.
Samsa était assise au bord du lac, sur un rocher, celui-là même où, dans un rêve, elle avait parlé à celle qu'elle était avant la mort de Zyg. Elle lui avait raconté ce qui l'attendait, elle lui avait apprit à ne pas faire les mêmes erreurs qu'elle, elle l'avait libéré d'une ignorance apparemment agréable mais ô combien destructrice. Ses gantelets de combat étaient posés sur ses genoux et les doigts nus jouaient avec un brin d'herbe qui caressait machinalement la cicatrice sur sa main gauche par instant. Cerbère le regardait faire d'un œil distrait, absorbée dans ses pensées.

Mahiro.
Zyg.
Rodeur.
Lou.
Smir.

Autant de noms qui dansaient dans son esprit. Depuis la mort de Zyg, son but avait été de la retrouver, que ce soit en faisant revenir le passé ou en allant la rejoindre. Elle avait échoué par deux fois à la deuxième solution et continuait d'échouer à la première. C'était normal, elle y était vouée, on ne revenait pas en arrière et tout était condamné à mourir un jour. Viendrait son tour à elle aussi et Samsa était sereine à cette idée, loin d'être comme la grande majorité, à craindre pour sa vie. Étrange comme l'être humain peut abolir son instinct de survie par la force des sentiments, qu'il soit Amour, Regret, Cupidité, Haine ou autre. Elle avait beau être aimée et aimer en retour, rien n'allait dans ce gouffre, rien ne le remplissait et il restait l'indicible besoin de combler ce vide monumental.
Les yeux sombres de Cerbère se relevèrent du jeu de ses doigts et se tournèrent, aiguisés, vers l'horizon, la ville derrière des remparts peu solides. Elle songeait à ce rêve où elle avait revu Zyg, cet au revoir accordé à celle à qui elle n'avait jamais parlé sincèrement, cet instant où elle n'avait plus eu de fardeau, de regrets, où elle avait pleuré comme une enfant dans les bras de la cambrésienne brune qui l'avait consolé en l'étreignant simplement. Vainement, Samsa cherchait un pardon qu'il était impossible d'avoir parce qu'il n'y avait qu'elle qui pouvait se pardonner et qu'elle refusait de le faire, qu'elle n'était pas capable de le faire. Comment aurait-elle pu ? Les années n'y changeaient rien, les cicatrices non plus, la gloire de l'oubli pas plus. Elle souffrait comme personne en son fort intérieur et elle avait arrêté de le montrer depuis deux ans. Samsa se laissa glisser au bas du rocher pour s'y adosser et remonta lentement la manche de sa main gauche scarifiée d'une longue cicatrice prenant la paume et le dos de la main, promesse faite sur la tombe de Zyg d'avancer. Oui, avancer, mais sur le chemin s'était dressée Mahiro, autant pour le plus grand bonheur que pour le plus grand malheur de Samsa.

Mahiro, figure du passé, membre de la petite bande qu'ils formaient à l'époque où de tous, elles n'étaient plus que les dernières survivantes, hélas pour elles. Condamnées à avoir vu ceux qu'elles aimaient mourir, condamnées à vivre avec, condamnées à ne pas oublier. Elles avaient toutes les deux tourné dans le côté sombre de l'existence, de l'être humain, et, si Samsa ne connaissait pas toute la vie de Mahiro qui s'était écoulée depuis la dernière fois où elles s'étaient vues, elle entendait et devinait quelles avaient suivi à peu près la même voie.
Le bras rape doucement la pierre avant de s'y appuyer. Le rocher brûle la peau, l'écorche, la met à vif et fait couler un peu de sang mais Samsa s'en fiche, elle apprécie même, d'exprimer concrètement cette douleur ignoble, infâme, tromper la souffrance intérieure pour la concrétiser à l'extérieur. Les paupière se ferment, abattent sur la vue bordelaise un voile noir qui devraient la détendre mais qui échoue.

"Où es-tu passée ?"


-Et merde pardi !

La lumière envahit de nouveau la vision, brusquement, et un gantelet est projeté avec force au loin alors que le visage de Samsa est déformé par la rage. Plus rien ne fonctionne, plus rien ne la soulage, elle sombre de nouveau et se trouve là, impuissante. Lentement, la Prime Secrétaire Royale soupire et se relève pour aller récupérer son gantelet. Devra-t-elle retourner en ermitage dans les ténèbres ? Est-elle vouée à mourir ainsi, à petit feu ? Le Très-Haut lui refuserait-Il encore le suicide ? Elle ne veut pas mourir. Elle veut juste retrouver Zyg, encore une fois, elle est sa drogue, son sang, son air, ce dont Samsa ne peut se passer quand bien même elle le voudrait. Et pourtant, elle est en hémorragie perpétuelle, en étouffement continu. Elle a besoin d'une bouffée d'air comme le Très-Haut lui a donné la dernière fois, elle en a besoin sinon elle en mourra. Il faut à Cerbère un coup de collier et elle sait soudainement où le trouver.

"Tu me manques tellement."

Son corps se traine, presque absent, jusqu'au campement de l'armée, jusqu'à la tente qu'elle occupe avec Shawie. Les yeux fatigués au blanc quelque peu rougis la trouvent de dos et la Cerbère s'approche, passe ses bras autour du corps espagnol avec tendresse alors que le dos se tend pour permettre au visage bordelais de venir se nicher dans le cou de Shawie.


-Ne bouge pas pardi...

Le souffle de Samsa glisse sur la peau plus mate de Shawie, les yeux sombres se sont clos pour savourer sa chaleur, son odeur, ses cheveux qui la caressent et la chatouillent doucement, sa présence entière. Malgré elle, Samsa sourit et ses mains glissent sur les hanches espagnoles, ses lèvres embrassent amoureusement la peau de la désormais Blanche et ses bras se resserrent un instant sur elle.

-Je t'aime té..

Samsa tend le cou pour atteindre les lèvres de Shawie, partager avec elle un baiser emprunt de sentiments qui vont de la délicatesse à la passion avant que Cerbère ne la relâche et ne vienne devant elle, dévoilant ainsi son visage marqué par la fatigue et la douleur, l'ombre du passé. Ses mains viennent caresser les traits espagnols alors que Samsa prend conscience qu'elle n'a jamais paru si faible devant Shawie, si mal en point mentalement. Ses yeux habituellement si fiers, si confiants, si luisants de fougue, sont aujourd'hui habités de la peur de replonger dans les Enfers et la folie. Dans un sens, ils le sont déjà.

"C'est comme si c'était depuis toujours..."


-J'ai... Besoin d'un truc pardi...

Elle a honte. Bien sûr qu'elle a honte. Elle sait ce qu'elle s'apprête à demander, une dose ou deux de mandragore, puissante drogue qui se prend tant en poudre qu'en jus, rare et chère s'il en faut puisqu'on ne la trouve pas en France. Shawie ne lui a jamais dit qu'elle en avait mais Cerbère aux trois paires d'yeux et d'oreilles le soupçonne plus que fortement; elle ignore simplement si l'Espagnole lui en donnerait un peu vu le prix et la dépendance que cela peut offrir, plus forte encore que l'alcool disait-on. La Prime Secrétaire Royale baisse les yeux et détourne la tête, comme un refus d'admettre la faiblesse qui la tient, sursaut d'orgueil qui s'écrase contre la vague de la souffrance qui semble la plus forte.

-J'sais que t'as... Un truc pour soulager les douleurs m... mentales pardi... Est-ce que... Est-ce que tu m'en donnerais un peu té... ? Je te paierai si tu veux pardi, je sais que ça coûte cher té...

Les murs ont des oreilles et Samsa y a prit garde en n'explicitant jamais le mot de drogue ou de mandragore mais le regard lancé à Shawie ne laisse aucun doute sur ce qu'elle demande, une dose de répit, une dose de repos, une dose de paix, une dose pour repartir du bon pied puisque revoir Mahiro a perturbé sa marche droite et égale pour la faire chuter de nouveau et que se relever n'est guère une chose aisée puisque Samsa n'est pas forte. Non, elle n'a pas toute cette force qu'elle démontre au quotidien à travers sa fierté, son panache, cette force soutenue par ses principes et ses valeurs, cet entêtement de dévotion, car sans sa capacité à simplement se taire et endurer la souffrance, tout ceci n'existerait pas. Elle n'existerait pas. Elle n'existerait plus, comme Zyg n'existe plus que dans des souvenirs qui n'appartiennent qu'à elle.

"... Que tu es partie."



* = refrain traduit de Fort Minor - Where'd you go ?

_________________
Shawie
Quand quelque chose ne va pas, ça se renifle à dix lieues à la ronde. Comme si tous les éléments essayaient de vous faire comprendre que en effet, tout est parfait mais que quelque chose cloche. L'atmosphère change, au départ dans un cocon de bien être, un vent glacial traverse la tente au moment même où Sam lâche l'impensable "je t'aime". Oh, celui là fait mal, très mal car il sort du cœur et qu'il laisse penser à un "mais" destructeur derrière. Sam est marquée physiquement mais surtout moralement. L'Espagnole ne dit rien, ça serait presque déplacé de l'ouvrir et de tout briser. Sa main vient donc se déposer doucement sur la joue Cerbertienne sans rien dire, un simple geste pour lui dire "que je suis là ?"

Quand, enfin, la Prime ouvre le bouche pour parler, c'est une véritable gifle qu'elle prend en pleine poire. Mais elle ne bronche pas. Elle sait au fond d'elle que de toute façon, si ce n'est pas elle qui lui fournit, Sam s'en ira le chercher seule pour trouver sans doute pire. Alors quoi ? Vaut il mieux lui donner ce qu'elle veut et fermer les yeux, connaissant parfaitement les effets sur une personne non habituée ? Vaut il mieux l'envoyer balader, avoir la conscience tranquille et finalement savoir au fond d'elle que Samy s'en procurera quand même ?



Sam.


La douleur peut se manifester sous différentes formes et au pire moment. Ça peut être un petit pincement, une légère irritation, une crampe, une douleur lancinante, une douleur que l’on supporte tous les jours. Et il y a le genre de douleur que l’on ne peut pas ignorer. Une douleur si grande, qu’elle bloque tout le reste. Et fait disparaître le reste du monde ! Jusqu’à ce que la seule chose à laquelle on pense, c’est à quel point on souffre ! La façon dont on gère notre douleur dépend de nous. On l’anesthésie, on la surmonte, on l’étreint, on l’ignore ... Et pour certains d’entre nous, la meilleure façon de gérer la douleur, c’est de foncer tête baissée. On doit arriver à la surmonter. Espérer qu’elle disparaisse d’elle-même, espérer que la blessure qui la cause se referme. Il n’y a pas de solutions, pas de remèdes miracle. On doit respirer à fond et attendre qu’elle s’estompe.
La plupart du temps, on peut gérer la gérer. Mais parfois, la douleur s’abat sur vous quand vous vous y attendez le moins. Elle vous attaque en traître et ne vous lâche pas ! On doit juste continuer à vous battre parce que de toute façon vous ne pouvez pas l’éviter. Et la vie en fournit toujours plus.

La main s'en vient chercher son homologue et cherchant son regard qu'elle connait si bien, l'oblige à la regarder.



Un truc pour soulager les douleurs ... j'en ai. Jé t'en donnerai. Mais tu né sais pas dans quoi tu mets les pieds. Jé ne vais pas té faire la morale, simplement té mettre en garde. Les effets peuvent être dévastateurs, en plus, jé suppose qué tu n'en as jamais pris auparavant. Ça té soulage un peu, au départ tu té sentira comme avant et tu pensera que cela n'a pas marché. N'en reprend surtout pas. L'effet va arriver et tu vas plonger dans ... jé ne sais pas expliquer ... dans le vide ? Ça va té soulager mais tu né sais pas cé que tu vas voir.


C'était tout ou rien avec cette merde. Et pourtant, l'Espagnole quitta déjà la main de Sam pour s'en aller fouiller dans sa sacoche. Un sachet est sortit, pas très gros, quasiment déjà vide. Elle en sort plus de la moitié et n'y laissera qu'une légère dose, juste assez pour une première fois. Elle se doutait que son blabla d'avant prise n'avait eu aucune importance aux yeux de la Prime. Elle même, n'écoutait plus personne en état de manque. Sam était au niveau au dessus. Il n'y a pas de solution miracle, simplement des mirages. Ils soulagent un temps puis frustrent ensuite. Mais ça, elle s'en rendrait compte toute seule.

Le petit sachet est tendu.



Tu l'avales et tu vas te coucher.

Les champignons dé l'autre fois, tu te rappelles ?



Montrant d'un signe de tête la couche. Sur ça, il n'y avait aucune négociation possible.


Avec ça, tu auras tout l'inverse. Ca té ferra mal et pourtant, tu auras l'impression d'être mieux.

Jé né vais pas rester sous la tente avec toi, jé crois qué tu as besoin dé le faire seule. J'attendrai juste devant, au cas où.

_________________
Samsa
    "Et les bisons disaient "Sois fier de ton nom".
    Les bisons disaient "Sois toi-même".
    Les bisons disaient "Va où tes pas te mènent".
    Les bisons disaient "Fais comme tu le sens"."*



Les petits yeux sombres fatigués s'abaissent d'abord sur la main espagnole avant que le menton ne soit relevé pour que les onyx croisent les émeraudes. Ils sont fouillés à la recherche d'un quelque chose qui l'apaiserait, qui lui ferait dire "non c'est bon, je vais bien en fait" mais ses yeux ne voient pas, ils ne voient plus, oppressés de douleur et de chagrin, de cette folie perdue qui a, jadis, pleinement étreint celle qui se transformait en Cerbère. Samsa écoute sa compagne mais les mots ne trouvent aucun sens dans sa tête. Savoir dans quoi elle met les pieds, quelle importance ? Rien ne peut être pire que ce qu'elle ressent maintenant, elle n'a pas le choix, elle ne veut pas mourir et la drogue de Shawie est, présentement, son seul salut. Elle la regarde aller chercher le sachet, s'étonne presque et perd finalement pied avec la réalité pour ne plus avoir l'impression que de vivre un rêve, quelque chose d'irréel, une simple pièce de théâtre qu'elle regarde depuis le premier rang d'un étrange public qui n'est qu'elle.

Et les bisons disaient "Sois fier de ton nom."

Une main gantelée récupère soigneusement le sachet qui focalise l'attention des yeux ne semblant pourtant toujours pas le voir. Dans la tête bordelaise, les mots de Shawie ne trouvent plus qu'un écho limité et c'est au bout d'un certain temps que Samsa redresse la tête, détaille encore ces traits espagnols qu'elle connait si bien, qu'elle caresse pourtant encore une fois comme pour s'assurer qu'elle les connaît bien par cœur; "je ne pars pas vraiment seule dans l'aventure dans laquelle je m'apprête à me lancer. Tu seras mon ancre, mon repère réel, tu ne seras plus mon présent pour quelques instants mais tu seras mon futur, comme tu l'es déjà".
La tête cerbérique vient se loger sous le menton de Shawie, puisant en sa présence les dernières forces nécessaires à ce voyage inéluctable. La chaleur est inhalée doucement, les battements de son cœur sont écoutés, apaisants, le sang sous sa peau imprime sur le front de Samsa son rythme régulier et la Prime Secrétaire Royale finit par lâcher, dans un souffle, un simple "merci" profond de sincérité et de reconnaissance. Elle s'écarte et regarde l'Espagnole sortir, devenir Cerbère à son tour alors que le vide et le silence envahissent soudainement l'espace. La couche est rejointe avec docilité et Samsa observe le sachet; qu'est-ce que Shawie voulait dire par n'en prendre qu'une fois ? Une feuille ? Une bouchée ? Un sachet ? La Prime Secrétaire Royale retire ses gantelets de combat et prend du contenant toutes les feuilles s'y trouvant qu'elle se met à mâcher telle un bovin. Lentement, les molaires extraient le jus qui passe dans le sang, la salive, l'estomac entier. Allongée sur la couche, elle attend mais pourtant, la réalité lui est toujours aussi lourde, pesante et affreuse. Plus le temps passe, plus la douleur lui tord d'ailleurs les tripes et l'estomac, ses muscles deviennent froids et durs, il semble à Samsa qu'ils vont se déchirer d'être si tendus et contractés à la fois. Les traits de son visage se déforment d'efforts inutiles et sans origine, d'une douleur entièrement physique. Les larmes échappent aux yeux sombres en même temps que l'esprit se libère, que le corps gémit pour exprimer une souffrance qui se meut de physique à psychique.

Les bisons disaient "Sois toi-même".


-Humpf... !

Les paupières se ferment, les couleurs éclatent dans le noir, des sons de ruisseau et d'oiseaux apparaissent sans explication et Cerbère chute, tombe dans un gouffre sans profondeur. Dans le noir néant de son âme, elle hurle, pousse un cri déchirant qui se répercute seulement contre les parois de son crâne. La poupée de chiffon qu'elle est devenue s'écrase sur un sol immatériel, se fait tordre en tout sens par une force invisible qui lui coupe le souffle plus d'une fois, lui fait cracher tant ses poumons que ses tripes jusqu'à l'épuiser parfaitement, jusqu'à ce que son corps soit rompu. Alors seulement, elle peut rester étendue, fusionner avec ce noir inexistant dans la réalité, cette matière sombre qui s'insinue en elle et l'étouffe, la brûle encore comme si elle avait atterri aux Enfers et que sa souffrance n'était plus qu'une routine. C'est finalement une douce chaleur qui semble fraicheur qui se pose sur son ventre, remonte dans tout son corps devenu froid et tendu pour délier les muscles et chasser la douleur.

-Sam... ?

"Respire ma fille, respire. Allez !".
Cerbère émerge de la matière noire comme on sortirait la tête de l'eau, comme la mer recracherait un naufragé sur une plage abandonnée et c'est ainsi que la Prime Secrétaire Royale se sent, pauvre petite chose insignifiante complètement vidée et épuisée qui ignore où elle trouve l'énergie pour encore exister consciemment.
Lentement, Samsa ouvre les yeux qui s'offrent au monde, moins sombres que d'habitude à cause d'une pupille totalement rétractée. La lumière l'aveugle et elle ne parvient pas à distinguer la silhouette qui est assise au bord de la couche, qui a la main apaisante posée sur son ventre douloureux. Cerbère referme ces yeux qui la brûlent, prématurément exténuée. Elle ne veut plus que garder cet état plus confortable et s'endormir, rejoindre des contrées dont elle ignore pourtant tout; avec cette présence près d'elle, elle se sent en sécurité et se dit que rien ne peut lui arriver. "Reste avec moi... Ne me laisse pas...". Samsa lève une main lourde pour la diriger à tâtons vers celle qui la soulage mais tout semble loin, désorienté, plus rien n'a de sens ou de logique, plus rien n'est réel et pourtant rien n'est autre que cela.

Les bisons disaient "Va où tes pas te mènent".


-Sam ? Réveille-toi.

"Je ne sais pas."
Une main irréelle vient saisir la sienne pour la guider lentement et délicatement jusqu'à la destination initialement prévue. Malgré ses efforts, la Bordelaise ne parvient pas à la tenir parfaitement, elle ne semble pas totalement solide, lui échappe par instant et pourtant elle seule maintient la main royale, elle seule la guide pour la déposer sur celle qui empêche la douleur d'enflammer le ventre canin. Tout se fait plus léger alors, plus doux et agréable et la bordelaise entend de nouveau l'écho de la voix comme avec un temps de retard, une répétition irréelle et œuvre seulement de son imaginaire. Elle n'en connait d'ailleurs plus la frontière, à la fois consciente de l'irréalité de ce qui se passe et pourtant convaincue de leur réalité. Quelle meilleure drogue existe-t-il que l'espoir ? Les feuilles de Shawie ne sont que le coup de pouce, le déclic pour achever de basculer dans la folie. Une vague d'espoir la traverse, elle pourrait l'écraser si seulement Elle n'était pas là mais Sa présence repousse tout extrême, toute chose désagréable et Samsa tord un instant ses traits et les muscles de son visage pour avoir la force d'ouvrir les yeux, encore une fois, découvrir encore ces pupilles rétractées qui voient ce que personne ne voit comme les oreilles ont entendu ce que personne n'a entendu. C'est la question ultime qui s'impose alors à elle, la dernière qu'elle aura de pertinente dans ce temps de conscience pas encore achevé avant que la drogue ne la submerge parfaitement et totalement : peut-elle y croire ?

Les bisons disaient "Fais comme tu le sens".


-Zyg pardi...


* = paroles traduites de Moriarty - Jimmy

_________________
Samsa
    "Ça me fait mal au bide sa belle gueule cassée
    Comme une étoile livide à deux doigts de tomber.
    Elle tire sur un mégot cent fois rallumé
    Quand je lui tend la main à travers la fumée.
    Elle était si belle la poupée, elle que les anges avaient oublié.
    Et si on l'avait un peu regardé,
    Peut-être que l'hiver ne l'aurait pas brisé."
    (Christophe Maé - La poupée)



-Salut. Qu'est-ce que tu fais là ?
-Je... Je voulais te voir pardi... J'ai... Retrouvé Mahiro té... Tu te souviens pardi ?
-Oui, je me souviens. Qu'est-ce qui t'arrives Samette ? Tu es toute pâle.
-J'ai un peu mal pardi... Mais ça va.


Zyg rit et les yeux fous de Samsa la regardent sans comprendre, craquent soudainement en laissant couler un flot de larmes que la main cambrésienne vient essuyer avec quelques paroles réconfortantes. Immédiatement, la douleur de Cerbère commence à s'estomper et elle appuie sa joue contre la main tant aimée sans parvenir à stopper ces reniflements enfantins mais ô combien libérateurs. Elle n'a jamais si bien senti la présence de Zyg depuis le rêve où elle lui avait dit au revoir et cette fois, elle n'est pas là pour cela. Cette fois, il lui semble qu'elle a le temps, tout le temps qu'elle veut, l'éternité si elle le souhaite. Au Diable les promesses de vivre, les valeurs, les principes, les ambitions, les projets ! Au Diable la considération des autres, elle pourrait penser à elle cette fois, rien qu'à elle, elle pourrait cesser d'être là pour tout le monde pour oublier sa souffrance, elle pourrait simplement se laisser porter par elle et trouver cela doux.

"Ça me fait mal au bide sa belle gueule cassée comme une étoile livide à deux doigts de tomber."


-Il y a six ans déjà, tu disais toujours que tu allais bien, même quand ce n'était pas le cas. Tu disais que le bonheur des autres faisait le tien.
-C'est toujours le cas tu sais pardi...
-Non, bien sûr que non. Tu as perdu ton bonheur et tu sais qu'il ne reviendra pas, tu te nourris de celui des autres.
-Je voulais pas que tu partes Zyg pardi, je... Je t'aimais tu sais té, j'aurais dû te le dire plus souvent mais j'avais peur pardi. Toi, toi tu n'avais pas peur, tu étais la plus courageuse de nous deux pardi, et tu es partie en ignorant combien je t'aimais té.


Zyg pose sur la Prime Secrétaire Royale ses yeux gris et ce même petit sourire qu'elle a toujours eu; elle n'avait jamais su être vraiment sérieuse et sous ce regard d'une ancienne jeunesse, Samsa retrouve le sien, ses yeux moins sombres s'allument d'étincelles disparues telles que la curiosité ou la naïveté; l'innocence. L'illusion se rapproche de sa tête et glisse la main à sa nuque pour la redresser assise sur la couche. La main apaisante sur son ventre se retire mais la douleur ne revient pas et Cerbère suit ce manège irréel. Lentement, elle lève sa main gauche scarifiée et l'appose contre celle de Zyg. Sans surprise, elle l'a légèrement plus grande, elle avait toujours été un peu plus grande et imposante que son amie. Le spectacle de ces deux mains accolées paume contre paume devient le sujet d'étude de Samsa qui écoute Zyg du même temps.

-Je t'aimais aussi, je t'aurais suivi au bout du monde. Je n'avais que toi. Tu te souviens la dernière fois que tu m'as vu ? Je pleurais parce que les nonnes m'avaient traitées d'idiote et tu m'as consolé.
-Tu m'as dit "toi au moins tu es gentille" pardi...
-C'est un bon souvenir tu ne trouves pas ?
-Non té. Parce que c'est le dernier que j'ai de toi pardi.
-Justement ! Non ?
-Non pardi. Je ne cesse de me dire que je n'aurais pas dû te laisser partir, que j'aurais dû faire plus pour toi té.
-Tu m'étonnes que tu sois si pâle si tu ressasses toujours ça ! Viens avec moi, on va marcher un peu.


"Elle tire sur un mégot cent fois rallumé..."

D'un bond, la cambrésienne est debout mais il en est bien autrement pour Samsa qui doit basculer sur le ventre pour réussir à se relever en prenant appui sur la couche. Elle ne sait pas par quel miracle elle a réussi à se mettre sur ses deux jambes avec son équipement militaire en plus de cette torpeur dont elle ne comprend pas l'origine. La tête lui tourne violemment, le monde devient flou autour d'elle et elle ne voit plus Zyg. Samsa la cherche mais ses mouvements de tête ne servent qu'à la rendre plus mal encore. Luttant pourtant pour son équilibre, elle titube, cherche à se rapprocher d'un pan de tente pour s'appuyer dessus, croyant à tort qu'il s'agit d'un mur mais elle chute un peu avant de l'atteindre, s'écroule dans un fracas de métal et de chair sur le sol terreux qui couvre une partie de son visage et de ses cheveux semi-roux de terre. Étalée sur le ventre, elle tousse violemment, grimace de cette douleur au ventre et à la tête maintenant. Elle ne parvient pas à réfléchir, à se demander pourquoi elle a mal, où elle est même, elle oublie ce qui se passe en même temps qu'elle le vit.

"...Quand je lui tend la main à travers la fumée."


-Tu viens ?

Cerbère ouvre un oeil drogué pour découvrir Zyg qui, de l'autre côté de la tente, dehors, lui tient soulevé un pan de tissu pour que Samsa passe en dessous. Le simple fait de la voir fait rire la Cerbère et elle roule pour se retrouver dehors. Elle aurait dû s'attendre à trouver la plaine du campement mais c'est une colline fleurie qu'elle dévale maintenant en roulant dans l'herbe sous un soleil d'été et accompagnée du rire de Zyg. Putain ce que c'est bon. En bas de la colline, elle retire des herbes folles et des fleurs prises dans les cheveux noirs de Zyg, s'amuse à faire des cabrioles qui, dans la réalité, ne sont que des mouvements désordonnés sans le moindre sens. Elle a retrouvé ses vingt ans, celle qu'elle était alors, elle a retrouvé le premier sens du mot "jouer" et cela la rend heureuse alors qu'avec Zyg, elles se jettent des poignées d'herbe à la figure, s'amusent comme des chiots ou des chatons le feraient en se taquinant des mains, se sautant parfois dessus avec une fougue perdue. Combien de temps ? Combien de temps dans ce délire sans sens pour quiconque la verrait ? Une demi-heure facilement et ce n'est qu'une toux étrange qui force la Cerbère à s'interrompre, l'allongeant sur le dos dans une herbe plus verte et plus haute qu'elle ne l'est réellement. Zyg rit et vient se coucher contre elle, posant sa tête au creux de son épaule, levant vers elle ses doux yeux gris qui s'amusent de la situation royale.

"Elle était si belle la poupée, elle que les anges avaient oublié."


-Tu te fais vieille Samette !
-Oui je vieillis moi pardi !
-Pour moi tu ne vieillis plus depuis longtemps.


Les petits yeux bordelais s'abaissent en coin sur l'illusion aimée qu'elle croit bien réelle. L'esquisse d'un sourire nait sur les lèvres fines devenues violettes et une main se glisse sur la chevelure noire rangée en un chignon qui ne se défait jamais. Un instant, elle les caresse avant que la joue royale ne vienne la remplacer en s'apposant contre la tête de Zyg, étrange tête qui lui semble ineffable, sans nature propre, comme la main qu'elle a tenté de serrer quelques temps plus tôt.

-Merci pardi. Je suis contente de l'entendre té.

Le silence s'installe entre elles qui n'en ont pourtant jamais eu, leur nature jadis animée ne les faisant jamais taire mais pour cette fois, elles semblent avoir compris que pour mieux profiter de quelqu'un, il n'est pas besoin de mots. Cerbère pourrait fermer les yeux de bien-être mais elle a peur de ne pas retrouver Zyg lorsqu'elle les rouvrira, c'est pourquoi le ciel devient son nouveau sujet de contemplation alors que ses narines, étrangement nerveuses, hument tout l'air ambiant et l'odeur féminine qu'elle a oublié depuis bien longtemps.

-Tu ne te sens pas seule ?
-Non, tu es là té.
-Mais quand je ne suis pas là. Avec les autres, tu te sens seule.
-...Ce n'est pas pareil pardi...
-Pourquoi ?


Samsa sourit avec amusement et la regarde. Elle admire les traits de son visage, si nets, l'éclat de son regard, si clair, les nuances de son sourire, si réelles. Ses doigts dépourvus de gantelets glissent sur le profil disparu et pourtant la Bordelaise s'étonne d'en connaître encore les formes alors qu'elle ne se souvient pas l'avoir particulièrement caressé avant. En cette parenthèse du temps qu'elle croit éternel, tout est redevenu comme avant, exactement comme avant; la situation, Zyg, elle aussi, un peu.

-Il y a six ans déjà, c'était ta question préférée !
Ce n'est pas pareil parce qu'ils ne comprennent pas pardi. Ce n'est pas leur faute té, je ne leur en veux pas pardi, mais c'est ainsi; ils ne pourront jamais pardi. Ils ne pourront jamais m'aider non plus té. Je vivrai toujours un peu seule maintenant pardi.
-Je les vois. Ils t'aiment beaucoup. Toi aussi tu les aimes beaucoup.
-Oui pardi, mais ça n'empêche rien té.
-Tu es triste ?
-Oui pardi.
-J'aimerais que tu ne le sois plus.
-Je ne pourrais jamais té.
-Pourquoi ?
-Parce que tu n'es plus là té.
-Pourtant tout ceux qui traversent un deuil ne finissent pas tristes pour toujours.
-C'est qu'ils ne t'ont pas perdu toi pardi.


Zyg affiche un sourire attendri auquel Samsa répond par le plus grand sérieux. Ce n'est pas une figure de style qu'elle offre là, une quelconque phrase enrobée de poésie, c'est bien plus que cela. C'est une sensation réelle, un avis très concret qui ne mérite pas d'y laisser un doute quelconque. Comme si Zyg l'avait compris, elle se blottit un peu plus contre Samsa qui resserre son étreinte en retour. Combien donnerait-elle pour avoir droit à dormir un peu, là maintenant tout de suite ? Simplement rêver aux côtés de Zyg, goûter le repos le plus serein du monde, juste une fois, juste une dernière fois. Si elle s'endormait, peut-être que ses vertiges s'en iraient car présentement, même couchée, elle ne se sent guère en forme. Quelque chose commence même à l'empêcher de respirer correctement, comme une gêne au niveau de son nez et c'est en le frottant d'un revers de main après avoir reniflé qu'elle découvre ensuite une légère traînée rouge sur sa peau. Zyg semble s'en apercevoir car elle se redresse, intriguée mais guère inquiète.

-Tu saignes ?
-Oui j'ai dû me cogner le nez en faisant la folle tout à l'heure pardi.
-Toujours aussi maladroite !
-Mhmoui pardi.

-Attends laisse-moi faire.

"Et si on l'avait un peu regardé, peut-être que l'hiver ne l'aurait pas brisé."

Zyg tend la main, essuie délicatement du pouce les jeunes et légères rigoles écarlates provenant du nez et passe sa main sur celui-ci dans une caresse apaisante. La gêne disparait, le saignement s'arrête, comme si l'illusion était douée de pouvoirs de guérison miraculeux. A aucun moment cette étrangeté ne frappe Samsa qui, complètement droguée et en plein délire, prend ça pour quelque chose de presque naturel même. Elle se relève ensuite et invite la Cerbère à faire de même qui n'y parvient qu'avec, de nouveau, grande peine. Elle manque de chuter et se rattraper de justesse à un arbre qu'elle croit être son amie fantomatique. Est-ce l'émotion de retrouver Zyg qui la rend aussi faible et fragile ? Pourquoi tant d'équilibre précaire ? Cerbère, habituellement si solide, fiable et forte ne comprend pas. Elle tousse plus de colère que de besoin et se redresse, le visage émacié et pâle commençant à se tacheter de légères touches violettes par endroit décidé à rester debout.


-Tu me suis ?
-Je te suivrai toujours té.


La cambrésienne a ce petit rire pur et cristallin qui n'appartient qu'à elle, ressemble sans négativité à un petit gloussement d'enfant et elle prend la main plus caleuse de la combattante dont les doigts viennent presqu'immédiatement se croiser à leurs homologues pourtant intouchables, invisibles, inexistants pour toute autre personne qu'elle.
"Emmène-moi où tu voudras, loin au Nord ou au Sud, emmène-moi là où se lève le soleil, là où il se couche. Emmène-moi au Paradis céleste ou aux ténébreux Enfers; la destination m'importe peu tant que c'est avec toi."


* = paroles traduites de Moriarty - Jimmy

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Samsa
    "Tu me manque même là
    Où avant toi je suis allé seul.
    Tu me manque même là
    Où avant toi je suis allé...
    Toi, tu ne te doutes pas
    Que la nuit je veille;
    J’attends ton réveil
    Pour revoir tes yeux
    Se lever sur moi."
    (Marabu - Tu me manques)


Samsa ignore où elles marchent, elle se laisse simplement guider par Zyg dont la présence la berce d'une torpeur tranquille. Elle est fatiguée mais elle lutte contre ces genoux qui ploient, ces épaules qui s'affaissent, ce souffle qui se raccourci, indignes de la solide combattante qu'elle est. Ses yeux se sont vus cernés de noir et le blanc des yeux est devenu rouge, ils recommencent à la brûler et le monde autour de la Cerbère se brouille, Zyg semble parfois s'évaporer et la sensation de sa main dans celle de la Bordelaise s'atténue. "Non, pas maintenant, reste encore, s'il te plait, ne me laisse pas, ne m'abandonne pas... !". Force est puisée pour resserrer les doigts, sans grand succès, et c'est donc quelques mots poussés hors de la gorge par un souffle haletant et rauque qui se fait entendre, trahissant ainsi la peur de tout perdre.

-A... Attends... Moi pardi...

L'illusion se retourne, curieuse de cet appel dans leur marche où c'est la cambrésienne qui mène. Elle offre un sourire attendri à la Prime Secrétaire Royale qui s'est appuyée à un arbre de sa main libre, essoufflée, et la rejoint d'un pas léger, flottant. Plantée devant Samsa, elle détaille de haut en bas cette carrure affaiblie et fatiguée, déformée par la couleur de son visage, de ses yeux, de ses lèvres, de ses mains aussi. Elle lui pose une main sur l'épaule, semble prendre conscience de quelque chose et se met à rire sous le regard indifférent d'une Cerbère aux limites de son physique.

-Combien pèse ta cotte de maille ? Et ton épée ?
-Je... Je ne sais pas... Pardi...
-Je parie que ça pèse autant que moi. Tu devrais la retirer, tu te sentirais mieux.
-Je... Je ne la retire... Jamais té...
-Je sais, mais ici avec moi, tu ne risques rien, n'est-ce pas ?
-Et si... Quelqu'un... Te... Voulait du... Mal té ?
-Personne ne viendra, je te le promets Samette. Il n'y a rien à craindre, retire ta cotte.


Zyg pose sa main sur le haut de la poitrine royale, geste qui rend immédiatement à Cerbère un souffle précieux. Lentement, elle commence par retirer son tabard en damier noir et bleu, à ses couleurs personnelles, où est brodée une fleur de lys d'or sur le côté gauche de la poitrine et dans le dos. Penchée en avant, c'est ensuite sa cotte de maille qu'elle abandonne, qui tombe à terre dans un bruit caractéristique sur le tabard au sol, tâché de terre et d'un peu de sang dus aux chutes de sa propriétaire et de son léger saignement de nez où la main, premier mouchoir, fut ensuite essuyée sur le côté. Un pied cambrésien en réalité bordelais pousse le tout avec négligence sur le côté et Zyg s'assoit dos à l'arbre, en tailleur, invitant de quelques tapotements sur ses genoux Samsa à y poser sa tête. La respiration récupérée, et donc quelques forces retrouvées, la Prime Secrétaire Royale parvient à s'assoir sans trop choir avant de s'allonger et de poser sa chevelure semi-rousse au croisement des jambes de Zyg. Elle expire longuement en signe de son bien-être et s'autorise à fermer les yeux pendant que les fins doigts de Zyg passent dans ses cheveux, en démêlent quelques nœuds pour mieux les caresser ensuite. "Tu vas rester. Je sais que tu vas rester". Elle n'a plus peur que Zyg disparaisse, il lui semble percevoir son envie de rester à elle aussi, et puis elle ne peut de toute façon pas se lever. Par une harmonie inexplicable, les souffles féminins s'accordent, les cœurs battent ensemble et le sang coulant dans leurs veines circulent en parallèle. Celle qui, en chemise de lin, ne ressemble plus à Cerbère que grâce encore à son épée, vague et divague dans ce monde qui n'appartient qu'à elle, se lance plus loin encore en levant une main à l'aveugle pour prendre l'une de celles de Zyg, la ramène près de son visage et se laisse ainsi caresser sans retirer sa main de son homologue pour autant. La voix de Zyg la tire de cet état de bonheur parfait, lui arrache un long sourire.

-Tu te sens mieux ?
-J'aimerais rester là tout le restant de ma vie pardi.
-On n'est pas obligées de bouger.
-Alors ne bougeons pas té...


Samsa sent Zyg ployer l'échine pour venir embrasser son front et ses yeux coulent de nouveau, laissent échapper des larmes généreuses qui roulent sur ses joues et ses tempes à cause de sa position horizontale. Tant d'années écoulées depuis ce tragique 16 mars 1459... Avait-elle survécu pour cet instant uniquement ? Elle mourrait déjà en paix mais elle vivrait désormais plus librement. Ou plus douloureusement encore. Elle ne comprend toujours pas d'où vient la sagesse de Zyg, cette sagesse qu'elle entend dans sa voix et ses paroles et qu'elle n'avait pas avant, comme elle. Elle ne comprend pas mais cela lui est égal car alors la brune prend le rôle ascendant, celui de protectrice et Cerbère accepte de lui laisser son rôle pour être choyée à son tour. Son pouce caresse tendrement la main invisible, s'assure chaque seconde de sa présence qui n'est jamais absente, et c'est Samsa qui rompt cette fois le silence avec une éternelle question qui s'exprime pourtant d'une voix posée.

-Pourquoi tu es partie pardi ?
-On choisit rarement quand on s'en va.
-Pourquoi toi té ?
-Et pourquoi pas toi, c'est ça ?
-Pas forcément pardi.
-C'est amusant que tu continues de poser la question alors que tu y as déjà répondu.
-Comment pardi ?
-"Il y a des choses qui sont vouées à disparaître".
-Mais pourquoi pardi ?
-Pour la même raison que le ciel est bleu, que l'herbe est verte, que les chiens vont sur quatre pattes et les Hommes sur deux, pour la même raison qu'on nait et qu'on meurt.


Le silence succède à la réponse de Zyg et la frustration bordelaise se ressent de ne pas avoir de réponse peut-être parce qu'il n'y en a simplement pas. L'air s'emplit de pesanteur et celle qui ressemble désormais plus à Samsa qu'à Cerbère adopte dès lors la technique de protection qu'elle avait jadis : la fuite. Les yeux bruns clairs se rouvrent. Ils sont moins rouges mais des tâches vives subsistent, vaisseaux sanguins éclatés comme si elle avait été étranglée et que l'air lui avait cruellement manqué pendant un temps donné. Elle redécouvre le visage de Zyg qui lui sourit comme une mère sourirait sereinement à son enfant qui vient de se réveiller et Samsa tend la main vers la toque rose de celle qu'elle aime. Gentiment, la cambrésienne se laisse faire, abandonne sa toque aux mains joueuses et tendres de la Prime Secrétaire Royale. Si seulement elle savait qu'en réalité, il ne s'agit que de sa toque grise à elle... Mais en l'instant, il s'agit là de son nouveau trésor qu'elle amène vers son nez, hume pour s'emplir de l'odeur familière et signifie d'un sourire à Zyg qu'elle la gardera, pour l'instant.

-Existe-t-il un autre monde pardi ?
-Bien sûr.
-Emmène-moi alors pardi.
-Non, je ne peux pas t'emmener là-bas, tu n'es pas prête, tu y serais malheureuse, mais je peux t'emmener à ses portes.
-Je veux y aller té, avec toi pardi.


Zyg glisse ses mains sur les omoplates de Samsa et la redresse lentement, pas assez cependant pour lui éviter une soudaine pâleur au visage qui ne fait que renforcer le contraste avec le noir, le rouge et le violet qui a élu domicile sur lui et lui redonne un saignement de nez intempestif. La cambrésienne se glisse devant la bordelaise, accroupie, et caresse de nouveau son nez pour ne laisser derrière qu'une trace rougeoyante mal essuyée. Les joues sont caressées et retrouvent quelques couleurs avant que Zyg ne tende ses mains qui se font saisir par celles de Samsa, aide indispensable pour qu'elle se relève même si ses épaules et son dos ne supportent plus le poids de la cotte, abandonnée avec le tabard.

-Alors allons-y. Tu me parleras de tes braies.

Samsa rit et, toque cambrésienne en main, elle reprend de l'autre celle de Zyg, allant jusqu'à s'accorder de poser sa tempe sur son épaule en marchant. "Sur un malentendu, peut-être que je passerai de l'autre côté", paradoxe de pensée royale qui s'est droguée justement pour ne pas y aller mais qui oublie en l'instant tout ce qui devrait la retenir.
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Samsa
    "En rouge et noir, j'exilerai ma peur,
    J'irai plus haut que ces montagnes de douleur.
    En rouge et noir, j'afficherai mon cœur
    En échange d'une trêve de douceur.
    En rouge et noir, mes luttes mes faiblesses
    Je les connais, j'voudrais tellement qu'elles s'arrêtent.
    En rouge et noir, drapeau d'mes colères."
    (Jeanne Mas - En rouge et noir)


-Tu es toute habillée de noir et de gris mais tes braies sont blanches. Et vu leur état je dirais qu'elles sont même vieilles.
-Hé ! Six ans, est-ce si vieux que ça pardi ?
-Pour des braies oui !


C'est Samsa qui rit la première, suivie de Zyg et ainsi résonnent dans le bois de l'hallucination leur rire de jeunesse. Où sont-elles en réalité ? Elles se sont éloignées du campement, elles ont prit la direction de Saumur qui n'est pas encore franchisée et marchent hors des sentiers battus d'un pas lent, inconsciemment hasardeux, presque en zigzag. La Prime Secrétaire Royale ne le ressent pas mais son état se dégrade sévèrement et elle ne fait que s'appuyer aux arbres alentours pour ne pas chuter. La tête sur l'épaule de Zyg en marchant, sa main dans la sienne, elle évoque des anecdotes que la cambrésienne connait pourtant déjà puisqu'elle sait dorénavant tout.

"En rouge et noir, j'exilerai ma peur..."


-Shawie les trouve moches pardi.
-Et toi tu n'aimes pas sa chemise verte.
-Non té. Mais tu sais pardi, c'est quand on bataille sur ce genre de futilités que je l'aime le plus pardi. Les grands sujets sérieux comme ma fonction et la sienne pardi, c'est une impasse té, il n'y a rien à discuter, il suffit de vivre pardi, se laisser porter par ce qu'on veut bien vivre pardi, c'est le reflet de notre vie té, mais ce genre de piques sur de simples couleurs pardi, de petits détails té, c'est complice pardi.
-Je vous sens fébriles en ce moment. C'est à cause de ces grands sujets ?
-Je ne sais pas pardi. On a tous un moment de fébrilité de toute façon, n'est-ce pas pardi ? On est jamais au plus haut, ni au plus bas té. Ma route à moi est claire et dégagée avec elle pardi, mais la sienne semble pleine d'obstacles contre lesquels elle bute té. Je crois qu'elle n'a jamais été douée avec les sentiments té, j'lui en veux pas pardi, j'aimerais juste qu'elle démêle tout ça, pas pour moi, mais pour elle pardi; j'ai vécu avec toi la douleur extrême de ce genre de choses pardi, je ne veux pas qu'elle y goûte de près ou de loin té. J'aimerais l'aider mais je ne crois pas qu'elle veuille pardi, je ne sais même pas comment faire té, je ne peux qu'être là et lui dire que je l'aime déjà ainsi pardi. Parfois, je me sens dépassée pardi, j'ai l'impression de ne pas être à la hauteur contrairement à d'autres et qu'elle le sait té.
-Tu as peur ?
-Pardi.
-Pourquoi tu ne lui dis pas ?
-Parce que ça ne sert à rien pardi, on a tous peur quand on aime té. Elle est fondamentalement bonne pardi et les gens fondamentalement bons ne sont pas aussi libres qu'ils aimeraient le croire pardi. Ils ont des instincts altruistes pardi.
Non tu vois pardi, je ne lui dirai pas té, je lui dis plutôt que je lui fais confiance té, c'est bien plus utile pardi. La confiance efface tous les problèmes pardi, tous les obstacles té, elle donne de la valeurs aux gens et à leurs principes pardi, elle leur donne de la force pardi. Je sais ce que traverse Shawie pardi et elle a besoin de cette force té, pas d'inquiétudes qui sont normales pardi.
-Et tu as encore confiance en l'état de tes braies ?


"...J'irai plus haut que ces montagnes de douleur."

Un petit rire émerge de la gorge bordelaise. Comme elle, Zyg n'avait jamais aimé s'étendre sur les sujets compliqués ou en tout cas autres que simples, elles avaient partagé cette insouciance de vivre au jour le jour. Pourquoi s'embêter de ce genre de problèmes quand on pouvait rire et jouer ? Pourquoi les choses avaient-elles dû changer ? Il n'y avait que ces braies qui ne changeaient pas, toujours blanches bien que ternies et recousues à quelques endroits, elles avaient toujours la même signification, le même cri de ralliement qui restait sans réponse, elles portaient toujours le même espoir qui restait vain. Certaines personnes ont chez elles des portraits ou des bibelots pour se rappeler du passé, des souvenirs matérialisés, elles gardent des lettres, des cheveux, des bracelets. Samsa n'a rien de tout cela, elle n'a que ces braies blanches achetées un jour à Chinon dans une période heureuse complètement en ruines aujourd'hui, elle n'a que ce vêtement pour prouver son identité à elle-même, aux autres; elles sont ce sur quoi la Prime Secrétaire Royale peut compter dans tous les instants. Fatiguée par sa marche et nécessitant courage et introspection, Samsa s'arrête, s'appuie à un arbre et, le regard au loin, elle parle enfin.

"En rouge et noir, j'afficherai mon cœur..."


-Je pensais que tu reviendrais pardi. Que ce n'était pas arrivé, qu'un jour je te verrais repasser la porte de la taverne avec ton beau sourire té, je t'aurais dit "hé Zygui pardi ! Bon sang tu m'as manqué té ! Où étais-tu pardi ? Je t'aime té, j'ai eu si peur que tu sois partie sans le savoir pardi, j'ai tellement eu peur que tu sois partie à cause de ça pardi. Heureusement tu es là té, m'aimes-tu toujours pardi ? Parce que moi aussi je t'aime pardi, pardonne-moi d'avoir eu peur pardi. Ne repars plus pardi, restons ensemble pour toujours pardi", et je t'aurais embrassé pardi. Je t'aurais embrassé jusqu'à ce que le monde se sente obligé d'arrêter de tourner, jusqu'à ce que toute l'Humanité entière ne regarde plus que nous, jusqu'à ce qu'on oublie les peurs, jusqu'à rire du drame qui aurait pu se jouer pardi.
A l'époque, je n'avais que mes braies blanches pardi, tu te souviens té ? Mes braies blanches et un bâton, et c'est moi que tu suivais sur les routes pardi ! On faisait fuir les brigands en chantant pardi... Je chante toujours aussi faux té. Je me disais que tu pourrais croiser plusieurs Samsa, plusieurs Sam, peut-être même une autre cultivatrice de Bêtise pardi, alors j'ai gardé mes braies blanches pardi; je pensais qu'elles te permettraient de me reconnaitre pardi. J'ai gardé mon titre de cultivatrice de Bêtises aussi longtemps que j'ai pu té, pour que tu me retrouves pardi.

Pour moi, tu n'étais pas morte pardi.
Pour moi, tu n'es toujours pas morte té.


"...En échange d'une trêve de douceur".

Samsa a senti le regard de Zyg posé sur elle alors qu'elle se tenait à sa droite et les petits yeux bruns voient le champ de vision se remplir de sa présence. Ils essaient de décrypter l'expression de son visage mais celui-ci est brouillé d'une hésitation qui n'est pas réelle, oscillant entre le sérieux de l'illusion et l'émotion que Zyg aurait ressenti si elle avait véritablement été là, devant la Cerbère, en chair et en os. La Prime Secrétaire Royale pourrait détourner le regard de honte mais elle le soutient au contraire et c'est là l'expression la plus pure et sincère de sa conviction, de la détermination de ses paroles. La cambrésienne abaisse ses yeux gris sur la ceinture de la bordelaise, affiche un sourire léger et avance les mains pour la défaire. Le cliquetis des boucles se fait entendre avant que l'épée rengainée ne soit portée à hauteur des yeux de Zyg qui, sans se départir de ce sourire, l'augmentant même, finit par la jeter plus loin. Samsa regarde son arme écartée, gisant à terre comme le cadavre de sa combativité, sans comprendre pourquoi. Elle se sent plus nue que légère à présent, fragile, fébrile, il lui semble que le moindre coup de vent pourrait la briser, que toute sa fougue est partie avec cette simple lame. Elle ramène ses yeux aux pupilles rétractées sur Zyg qui a retrouvé un sourire qui lui ressemble, un sourire d'innocente satisfaction.


-Samsa non plus n'est pas morte; Cerbère ne l'a pas tué.

Et elle a raison. Samsa n'est plus Cerbère sans sa cotte, sans ses gantelets, sans son épée, sans tout cet armement qui lui assure particulièrement l'énergie de combattre, d'aller de l'avant. Elle se sent redevenue celle qu'elle était à l'époque, cette jeune femme faible qui n'a pas pu défendre celle qu'elle aimait, qui n'a pas pu se défendre elle-même de l'horreur de la vie puis de sa propre personne. C'est fini. Face à Zyg, elle n'est plus cette enragée perpétuelle, cette combattante qui a la folie de vouloir devenir reine pour changer le monde, elle n'a plus la force de rentrer dans tous les murs pour les briser, il ne devrait plus lui rester que la possibilité de se recroqueviller et de pleurer de honte et de chagrin sur sa vie, sur ses actes, sur son orgueil et sa violence. Psychologiquement nue, elle se met à trembler, le regard paniqué, visage blanc parsemé de violet, de bleu, de rouge ou de noir. Zyg pose ses mains sur les joues royales avec un sourire tendre. Doucement, les pouces cambrésiens caressent la peau, effacent les frissons de froid et de peur pour préparer le terrain à la chaleur à venir.

-Je t'aime. Ce fut toujours le cas, depuis le commencement, et ça le restera, jusqu'à la fin.

Comment est-ce, un baiser avec une illusion ? Intense. Irréel tellement c'est puissant, au-delà de tout ce qui est imaginable, difficilement descriptible. Les lèvres de Zyg, d'abord simplement posées sur celles de Samsa, s'écrasent un peu, appellent des sentiments qui répondent présents sans mal chez la Prime Secrétaire Royale. Les yeux fermés, celle-ci inspire autant qu'elle le peut alors que dans sa tête, elle est projetée dans tous les sens tant les émotions provoquées sont fortes; c'est comme perdre la tête alors qu'on l'a déjà perdu. La douceur cède à la tendresse qui s'éclipse elle-même face à l'amour. Les bouches se cherchent en s'étant déjà trouvées, les mains se croisent et se décroisent, se lancent dans une course retenue dont le départ est le visage aimé et l'arrivée, les hanches; parcours balisé des aspérités des tempes, du cartilage souple des oreilles, de la douceur des cheveux -qui restent disciplinés malgré tout dans le chignon de Zyg-, de la fragilité de la nuque, de la grâce des épaules, de la vie du dos et de la courbe des reins avant de parvenir à destination. Il y a quelque chose de chaste pourtant, autant dans leur baiser que dans leurs gestes, le respect, sans doute, de leur statut à chacune; l'une est morte, l'autre vivante. Et si dans le délire bordelais, l'air n'est plus que le jouet de leur corps et de leur bouche, il en est bien autrement dans la réalité où Samsa est simplement stoïque.
Elles s'embrassent mais le monde ne s'arrête pas de tourner, l'Humanité ne les regarde pas, le temps passe, les souffles perdus se retrouvent et les lèvres s'effleurent sans plus se saisir, encore hébétées. Il n'y a qu'elles dans ce bois, entre ces arbres dont certains n'existent même pas dans la réalité et s'il pouvait n'y avoir qu'elles qui existent... ! Le froid se saisit de nouveau de Samsa qui recommence à trembler, contraste avec Zyg dont les joues se sont vivement colorées.


-J'ai... J'ai froid Zygui pardi...
-Viens, aux portes de l'Autre Monde il fait plus chaud !


Zyg lui prend la main et va pour l'entrainer mais Samsa ne bouge pas, complètement rigide. Ses muscles ne lui obéissent plus et, contractés, ils tremblent de manière incontrôlable de plus en plus fort. Un goût de fer se dépose sur les lèvres de la Prime Secrétaire Royale là où, quelques instants plus tôt, c'est le goût délicieux de celles de Zyg qui y était. Malgré l'immobilisme qui la saisit, les spasmes qui s'installent, Samsa parvient à entrouvrir la bouche et aussitôt du sang glisse sur sa langue. La légère gêne respiratoire est revenue et la Bordelaise comprend qu'elle s'est remise à saigner du nez. Comme un réflexe violent, elle tourne la tête vers Zyg qui s'éloigne en sautillant dans sa jupe rose, ses petites chausses habillant ses pieds menus, et toujours cet indéfectible chignon d'ébène. Les yeux de la Bordelaise sont redevenus plus sombres, la pupille se dilatant progressivement jusqu'à envahir tout l'iris auréolé non plus de blanc mais de jaune et de rouge; malgré tout, on y lit la terreur, la terreur de perdre Zyg de nouveau.

"En rouge et noir, mes luttes mes faiblesses..."


-A... A... Att... Tt... Tends p... P... A... Rd... Di !

"...Je les connais, j'voudrais tellement qu'elles s'arrêtent."

Hélas. Hélas, la vision de Samsa s'évapore, la douleur la saisit violemment à bras le corps et c'est après un dernier effort pour rester debout que les spasmes viennent à bout d'elle. Comme un tas de cendre reposant sur un support en équilibre, elle s'effondre soudainement, se ramassant sur elle-même tant son ventre la brûle. Obstinément, tout son corps refuse de lui obéir et reste dur, froid et tremblant. Sa bouche est bientôt remplie d'un mélange de sang et de salive qui lui retourne l'estomac quand elle l'avale. Celui-ci lui signifie en rendant tout son contenu dans un immonde bruit caractéristique et bientôt, il interdit à la gorge de lui livrer le sang et la salive qui est devenu mousse, décore le pourtour de la bouche royale. Le monde est noir, il l'assomme à la fois de sa chaleur et de son froid et c'est par instinct que Samsa tente de se trainer quelque part, n'importe où, elle s'en fiche, comme si quitter cet endroit pouvait lui permettre d'aller mieux. Elle serait bien optimiste de penser qu'elle a réussi à bouger d'un mètre mais elle laisse derrière elle bave, vomi, et sang qui refuse de s'arrêter de couler de son nez. Après que le coeur et la respiration se soient brusquement emballés, ils s'apaisent, se freinent mutuellement jusqu'à ne plus devenir tout deux qu'imperceptibles, jusqu'à ne plus donner aux muscles de quoi se mouvoir qui tentent pourtant de récupérer ne serait-ce que de l'air en rendant la respiration légèrement rauque, comme un supplice.

Étendue sur le ventre dans l'herbe dans un coin perdu, la Prime Secrétaire Royale tâchée de sang et de terre ferme les yeux aux pupilles totalement dilatées et parsemés de rouge et de jaune. Les violentes cernes noires décorent son visage blanc et violacé de la couronne de la défaite, désignent sans pitié celle qui perd le combat contre la drogue, contre elle-même, contre la vie. Malgré tout pourtant, il y a cette main gauche scarifiée dont les doigts sont crispés sur une toque grise que Samsa imagine encore rose, cette toque qu'elle aime et à laquelle elle s'accroche dans son agonie. Une dernière toux secoue violemment le corps vide, expulse de la bouche le mélange visqueux et c'est peut-être là le seul réflexe qui l'empêche de mourir immédiatement.

"En rouge et noir, drapeau d'mes colères."

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Shawie
Et elle, pendant ce temps la, elle avait fermé l’œil. Juste quelques minutes qu'elle pensait, histoire de se reposer l'esprit. Au départ, elle pensait même entrer aussitôt dans la tente pour ne pas laisser Samy trop longtemps seule, puis elle c'était posée et le résultat était logique : dodo.

Elle repensait alors aux conversations qu'elle avait eu avec Azz. La violence, l'impulsivité toussa toussa. Elle devait se canaliser ... que ce n'était pas bien de réagir à chaud. Pourquoi y en aurait-il autant sinon ? L'Espagnole entamait alors une conversation rêveuse bien plus calme que celle de Sam et Zig.



Elle est en nous. Elle vient dé nous. Elle est encore plus naturelle pour nous que lé simple fait de respirer. Nous déclenchons des guerres. Nous faisons des sacrifices. Nous pillons, nous déchirons la chair de nos frères. Nous remplissons de cadavres pourrissants d’immenses champs de bataille. Et tout cela pourquoi ? Pour lui montrer que nous avons retenu ses enseignements. Lé Très Haut nous a offert les tremblements dé terre, les ouragans, les tornades. Il nous a offert toutes ces montagnes qui déversent sur nous des torrents de feu. Tous ces océans qui engloutissent les navires. Il nous a offert la nature, cette meurtrière au sourire fallacieux. Il nous a offert la maladie pour qu’au moment de notre agonie, nous pensions qu’il nous a dotés d’orifices uniquement pour sentir la vie s’en écouler. Il nous a offert lé désir, la fureur, la cupidité et un cœur souillé pour que nous puissions répandre la violence en son honneur.


Et comme c'était son rêve à elle et bien, elle avait la possibilité de ne pas faire répondre Azz. Ça se passe comme ça dans ses songes, elle se permet de ne pas être contrariée. Contrariée quand même car elle vient de se réveiller, le cœur palpitant, la main sur son arme. Parce qu'au moment où elle entre dans la tente, elle percute desuite qu'elle a fait une grosse connerie en filant le sachet de drogue à Sam. Oh oui, grosse connerie. La culpabilité, c’est un énorme sac plein de briques, tout ce qu'on doit faire, c’est le poser. Le Très Haut aime regarder. C’est un farceur. Il accorde à l’homme les instincts, il fait ce cadeau extraordinaire et ensuite, qu’est-ce qu’il s’empresse de faire ? Pour son propre divertissement, sa propre distraction cosmique, personnelle, il établit des règles en oppositions. C’est d’un mauvais goût épouvantable ... Regarde, mais surtout ne touche pas. Touche, mais surtout ne goûte pas ! Goûte, n’avale surtout pas !

Ha ha ha ! La culpabilité, c'est vraiment de la merde.

L'apprentie en dehors de la tente, elle cherche du regard une ombre noire sur le sol car oui, possiblement, en toute logique, Sam serait inconsciente quelque part. C'est donc une chasse à la femme qui s'engage. Elle trouve quelques bribes de l'armure de Sam comme si elle c'était foutue à poil. En plus, pour que la Prime retire son armure, il en fallait. Quiconque la connait ne pouvait que confirmer. Bon, gueuler n'était pas non plus la chose à faire. Hein, un camps de militaire, une Secrétaire Royale, de la drogue, ça faisait pas bon ménage.



Samy putain si jé te trouve, jé te bute.


Elle aurait peut être pas besoin de la tuer d'ailleurs.

A la recherche de la Prime. Petite petite. C'est moins souriante qu'elle bloqua sur cette chose plus loin alors qu'elle esquive rapidement les bribes de l'armure. D'ailleurs, elle y choute dedans, d'énervement contre elle même.



Jamais j'aurai du té filer ça, merde !


Elle se précipite sur le corps inanimé de la Cerbère et tout ce qu'elle pense c'est de se barrer mais alors le plus rapidement possible. Mais à l'inverse de cette pensée négative, elle la retourne et ne peut que constater les dégâts. Sans attendre, elle lui ouvre la bouche essayant que le fluide puisse sortir rapidement et qu'elle ne s'étouffe pas dans sa propre agonie. Son premier réflexe est de venir écouter si le cœur de sa belle, bat encore. Rassurée sur ce point, elle n'a que pour objectif de laisser la tête de Sam relevée.

Réfléchis bordel.

La toute première fois qu'elle avait goûté à ça, on l'avait fait vomir en lui faisant renifler un truc immonde dont elle a oublier le nom. Vomir, faut la faire vomir.



Sam réveille toi, reste avec moi sinon jé te rejoins !


Aussitôt dit, elle plaça Sam en position de PLS -si seulement cela existé à cette époque- et lui ouvra la bouche et fit ce qu'elle pensa être bon pour expulser toute la substance ingurgitée. Elle lui fourra ses doigts au fond de la gorge et s'en excusa presque aussitôt.


Promis, jé te tiens les cheveux.
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Samsa
    "Dans ton histoire,
    Garde en mémoire
    Notre au revoir,
    Puisque tu pars."
    (Jean-Jacques Goldman - Puisque tu pars)


On ne devrait jamais avoir aussi froid de sa vie, c'est inhumain. Samsa a la sensation d'être au bord du néant, de tomber dedans même. C'est donc ça, mourir ? Elle imaginait que ce serait plus doux mais même là, c'est terriblement douloureux et dans ce gouffre noir, il n'y a rien qui lui permette de se raccrocher à une quelconque forme de vie. Même Zyg n'est pas là pour l'accueillir, elle qui avait toujours été présente dans ses moments d'agonie. Adieu ô monde ! Ô vie ! "Je ne serai pas reine, je ne connaitrai pas la gloire, je n'exterminerai pas l'Anjou, je ne verrai pas mes filles grandir, je ne ferai pas d'au revoir à Shawie..." Dans la réalité, l'Espagnole peut bien tourner et retourner la Cerbère, celle-ci n'en a cure, complètement inconsciente et agonisante. Elle ne saigne même plus du nez tant elle est vide, vide de sang, vide de vie, vide d'âme. Il reste pourtant son estomac qui ne s'est pas totalement vidé et c'est un violent réflexe qui réagit en réponse aux doigts de Shawie dans sa gorge.
Immédiatement, la Prime Secrétaire Royale est agitée de nouveaux spasmes qui font remonter dans sa trachée ce qu'il reste mais celle-ci est plus encline à avaler et Samsa commence à s'étouffer. Quel comble de mourir à cause de réflexes de survie qui entrent en conflit ! Heureusement il s'agit des doigts de Shawie qui sont à l'origine du premier et lui permettent de l'emporter. Sur le flanc, Samsa vomit un mélange verdâtre, jaune et rouge, mélange des feuilles de drogue, de bile, de salive et de sang. C'est sans problèmes qu'elle se purge entièrement jusqu'à laisser sa tête retomber mollement sur l'herbe. Elle sent son coeur tenter de s'emballer mais en être incapable, comme sa respiration, comme son esprit. Si c'était encore possible, son visage est devenu plus blanc, les tâches plus violettes et les cernes plus noires. Pourtant, Samsa comprend que cette fois, elle va s'en sortir. Il reste dans son sang des restes de drogue et quand elle ouvre ses yeux aux pupilles encore dilatées, elle voit bien Shawie mais croit entendre la voix de Zyg venant d'elle. Son front se plisse sous l'incompréhension, se sens sont désorientés et le raisonnement, absent. Qu'à cela ne tienne.


-Je savais que tu me laisserais pas pardi...

Qu'importe que la réalité soit Zyg ou Shawie, la remarque était valable pour les deux. Samsa toussa et referma les yeux. Lentement, sa main libre s'aventura à l'aveugle pour trouver celle de Shawie qu'elle serra faiblement, presque pas même. En l'instant, elle était tout ce qu'il y avait de plus réel et Samsa s'y raccrochait comme elle avait prévu de le faire en caressant le visage de sa compagne avant de plonger dans la drogue. La voix rauque et à peine audible de Samsa se fit de nouveau entendre, simple filet menaçant de se briser chaque seconde.

-J'veux rentrer à la maison té...

Retrouver la maison de Bordeaux qu'elle avait construit de ses mains, retrouver la tranquillité des matins sur la colline, retrouver le terrain vide où l'élevage d'ânes et de moutons n'avait jamais vu le jour, retrouver la chambre de Zyg qui ne l'avait jamais vu, retrouver l'omniprésence de l'insigne de la Cultivatrice de Bêtises et de son apprentie, retrouver le vent qui avait un goût de sel quand il venait de l'ouest, retrouver les cloches des bateaux au port. "C'était beau tu sais, tu n'as pas connu ça toi; c'est dommage".
Elle tousse encore, crache encore de ce mélange visqueux et répugnant, continue de trembler par intermittence sans plus ouvrir les yeux, comme résignée, surtout épuisée. Il faut se raccrocher à ses mains, à celle qui tient la toque -quelle toque déjà ? Elle commence à oublier mais sait qu'il ne faut pas la lâcher- comme à celle qui tient faiblement la main de Shawie.


-J'ai froid pardi...

"Mets-moi dans un bac de neige, je te jure que j'aurais plus chaud."
Samsa ouvre de nouveau les yeux, un peu, et si ses pupilles refusent de retrouver une taille normale, elles brillent cependant d'un peu de conscience, d'un peu de lucidité qui affirme maintenant qu'elle ne confond pas -plus- les gens, un peu de lucidité qui lance un appel à l'aide parce qu'à la base, elle s'en souvient, elle ne voulait pas mourir. A la base, elle voulait juste une bouffée d’oxygène. A la base, elle voulait juste vivre comme tout le monde.

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Shawie
Et puis s'en vient le soulagement. Elle a ouvert les yeux, tout le reste n'a plus d'importance. Enfin si, une seule question :


Porqué tu as tout pris ?


Quel amer sentiment que le regret. Se lamenter d’une chose perdue pour toujours conduit à la nostalgie, à la peine, au chagrin. On est parfois frustré de n’avoir su agir à temps : à cela, les audacieux diront qu’il vaut mieux vaut avoir des remords plutôt que des regrets. Les moins bravaches préféreront éviter une possible déception. Lors d’une dispute, il est souvent difficile d’admettre que l’on regrette les mots lancés, mais quand la contrariété est passée vient le temps des excuses, du repentir.

Nul doute que Sam s'en était allée loin dans les méandres du passé. Du temps de Zyg et compagnie. Elle n'en parlait pas plus que ça avec l'Espagnole. Simplement, il y a des choses qui n'ont pas besoin d'être dite. La vérité c'est que pour surmonter le passé, tu dois d’abord accepter qu’il est révolu. Peu importe combien de fois tu le revisites, tu l’analyses, tu le regrettes … C’est terminé, il ne peut plus te blesser. En théorie.



Dis moi porqué ? Tu es partie la retrouver ?


Sa veste est retirée pour terminée sur la droguée. Sans trop attendre une réponse, l'Espagnole se tente de soulever sa moitié. Fort heureusement pour elle, la Cerbère a eu la riche idée de semer son armure, sans quoi, elle aurait pu roupiller dans le froid toute la nuit. C'est donc deux femmes qui se baladent non loin d'un campement militaire, l'air de rien. C'est jamais bon l'après hallucination. La durée de la convalescence dépend de la gravité de la blessure et de la quantité. Et il reste parfois des séquelles. Malgré tous les efforts, certaines blessures ne guérissent jamais complètement. Il faut alors s'adapter à un tout autre mode de vie. Le changement peut être radical. Trop radical pour espérer un retour à la normale. Il peut même arriver qu'on ne se reconnaisse pas. Comme si on avait vécu une métamorphose plutôt qu'une guérison. On est devenu une toute autre personne, avec une toute autre vie.

Le tout étant de ne jamais être en manque.

La "maison" est retrouvée, Samy est déposée sur la paillasse, couverture en plus dessus. C'est une gourde d'eau qui est apportée aux lèvres de la Cerbère, histoire de purifier le corps. Quant à l'esprit, cela viendra plus tard. Une main sur la chevelure mi rousse mi brune.



Tu bois boire de l'eau, beaucoup. Jé peux t'assurer qué plus jamais tu mangera ça. Jé suis désolée qué tu subisses ces effets.

Parle moi.

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Samsa
    "Et pourtant dire
    Que j'ai cru
    A tes baisers,
    Et à ta peau écrue.
    Tu as du fuir,
    Bien entendu,
    T'en aller,
    Comme tu étais venue."
    (Jérémy Kisling - Dire)



Tout prit ? Tout prit quoi ? De quoi parle Shawie ? Sa voix est un peu lointaine et sa silhouette tourne. Samsa se raccroche un peu plus fort à sa main pour l'enjoindre à cesser de tanguer ainsi parce que ça lui donne vraiment mal au cœur. Du même temps, son front se plisse quand elle essaye de se concentrer sur la question de sa compagne, sans succès; elle n'y gagne qu'un mal de crâne encore plus affreux. Ce qu'il y a de terrible avec les migraines, c'est que contrairement à quelque chose de mal digéré, on ne peut pas l'évacuer. Ça reste, ça cogne, et on ne sait pas comment s'en débarrasser, on ne peut pas même.
L'Espagnole pose sa veste sur Samsa qui ne se trouve pas autant réchauffée qu'elle l'aurait voulu; ses dents continuent de claquer, ses membres de trembler par intermittence et sa pâleur reste effrayante. Elle ne comprend plus Shawie, elle ne l'a jamais comprise depuis qu'elle l'a trouvé en vérité, toutes ses paroles arrivent avec un temps de retard et tournent dans sa tête. Sans explications, c'est la première question qu'elle s'est posée qui s'exprime, celle qu'elle n'a pas posé à Shawie avant de prendre la drogue :


-C'est... quoi... une dose p... pardi... ?

Les erreurs tuaient plus de gens chaque année que toutes les guerres. Monter sur un toit gelé, se pencher en avant au lieu d'en arrière sur un cheval apeuré, se mettre sous un arbre en cas d'orage, parer en quarte au lieu d'en sixte... Et se tromper dans la quantité de quelque chose à ingérer.
La Cerbère est relevée et sa nuque, incapable de supporter le poids de sa tête, ploie et roule. Son corps entier est plus porté que soutenu, elle ne sait plus comment faire pour marcher, ses jambes sont lentes et désordonnées. Shawie la ramène sous la tente et l'allonge, la recouvre avec une couverture bien plus efficace que sa veste; retour au point de départ. L'Espagnole aide Samsa à se tenir un peu assise pour lui donner à boire, quand bien même la Prime Secrétaire Royale peine à avaler et que la moitié de l'eau lui coule sur le menton. L'effet est cependant bénéfique, les pupilles commencent lentement à se rétracter pour tendre de manière hésitante à une taille normale. C'est seulement maintenant que la question de la brune compagne est comprise et Cerbère y répond bien que difficilement, la bouche pâteuse et les paupières lourdes.


-Je voulais... juste la... revoir té... Tu sais... comme... Mahiro pardi... Pourquoi j'aurais... pu revoir Mahi et pas... Zyg té... ?

Pourquoi la seule survivante du passé était Mahiro et pas Zyg ? Pourquoi aurait-elle eu le droit de la retrouver elle et pas celle qui manquait à sa vie depuis sa mort ? Elle n'en voulait pas à Mahiro d'être en vie, elle était heureuse de cela même, elle avait juste voulu étendre son statut de survivante à la cambrésienne et elle avait réussi; à quel prix et de manière plutôt ratée concernant l'après, mais elle avait réussi.
Elle n'avait jamais raconté à Shawie, ni à personne, le rêve qu'elle avait fait quand elle avait dit au revoir à Zyg, quand elle avait enfin pu lui faire ces au revoir qui lui avaient tant manqué. Si elle en avait parlé, peut-être alors que l'Espagnole aurait mieux compris de quoi elle parlait, de cette sensation si particulière que tout soit faux mais si réel; si réellement faux. Elle commence à en prendre conscience maintenant, c'est un éveil léger à la réalité, à ce qu'il vient de se passer sans qu'elle ne parvienne pourtant à l'expliquer. Soudain, les choses lui semblent ridicules sans l'être vraiment. Elle regarde la toque qu'elle tient dans sa main, si serrée que ses articulations en sont blanches bordées d'un mélange de rouge et de violet caractéristique, se souvient vaguement de ce qu'elle signifie et la Prime Secrétaire Royale se met à pleurer comme une enfant, librement, sans barrières ni retenue. Des pleurs qui durent peu et se transforment soudainement en rire, un rire lent mêlé de larmes. C'est étrange un rire au ralenti, c'est un peu lugubre même, surtout quand le visage est détrempé et marqué de larmes. Les petits yeux sombres de Samsa cherchent sa compagne un instant avant de se focaliser dessus et de lui expliquer l'explication de son rire soudain et inopiné.


-On a... parlé de... mes braies blanches té... Et... de ta... chemise verte aussi té... C'est dommage elle... n'a pas dit... ce qui était le... plus... moche pardi...

Sa voix va un petit mieux grâce à l'eau qui s'est écoulée dans sa gorge et a remplacé la drogue dans son estomac. Pourtant elle a soif et cherche instinctivement à chasser de sa bouche ce goût de terre, cette nausée et cette migraine l'empêchant de toute manière de réfléchir alors que son visage peine à retrouver une couleur normale. La Cerbère se cale contre le soutien qu'est Shawie, incapable de se maintenir seule puisque ses muscles sont ou complètement contractés ou complètement mous.

-Je peux... ravoir de l'eau s'il... s'il te plait... pardi... ?
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