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[RP] Catin, subt. masc.

Evroult
CATIN, subtantif masculin ; péjoratif ;
Homme de mauvaises mœurs.
Synonyme : prostitué, gourgandin.

[ÉTÉ 1463]


    L’orage grondait bien plus qu’on se l’était figuré. Quelques heures plus tôt, pourtant, on avait vu les bêtes s’agiter & les oiseaux s’abriter, fuyant un ciel lourd de grisaille & de pluie. On avait tout rentré : des linges tout juste lavés claquant encore au vent, aux tapineuses des remparts qui viendraient renforcer les rangs des précieuses des lupanars ; & les volets de bois avaient été fermés pour éviter au papier huilé d’être trempé. Seulement, ce soir, le tonnerre & la foudre qui tombaient un peu plus bas faisaient trembler les murs.

    La salle commune, de fait, était pleine de catins. Un vrai capharnaüm de rires & de voix grasses, d’étoffes élimées & de froufrous trop riches, de timbales déjà pleines & des couverts maniés. On finissait tout juste de manger, & les clients se pressaient sans violence pour trouver un abri à leurs vices. L’été ne faisait pas le bonheur des maisons closes, & il fallait attendre que l’orage éclate bien pour qu’ils ramènent leurs bourses & leur moiteur lubrique.

    Surmontant un petit escalier de bois qui menait aux chambres réservées, le chef d’orchestre, puisque c’était un homme, surveillait jalousement les manières de ses petits protégés. Immobile & sérieux, il s’arrachait parfois à sa contemplation pour se décaler sur sa droite, près du mur, laissant passer une ou deux catins bien accompagnées, & leur adressait à chaque fois un bref mouvement de tête. C’était une manière de les autoriser à disposer des chambres, prétendant saluer le client au sourire conquis. Sa dextre était posée sur une épaule plus fine appartenant à celui qui, rasant le mur, se tenait une marche plus bas. La mèche folle & l’onyx luisant, ce jeune éphèbe-là semblait un peu crispé, ce qui détonnait étrangement avec l’apparente nonchalance dont il faisait preuve habituellement. Tous deux formaient un duo étrange, comme un père & son fils malgré que l’un, blond, particulièrement poilu, & bedonnant, contrastait beaucoup trop avec l’autre, brun, imberbe & fin comme une allumette. On aurait donné une cinquantaine tassée au tout premier ; le second, aux joues hautes & lisses, était encore en pleine adolescence.

    Le maquereau, parfois encore, se penchait à l’oreille de l’adonis tendu, murmurant quelques mots rassurants ou chaleureux ; à chaque fois, un sourire mutin venait éclairer le minois de son protégé, dévoilant l’éclat de quelques nacres pures & adoucissant sa silhouette dure de s’être planté là trop longtemps. D’autres fois, c’était la senestre du poulain qui se levait pour pointer, sans grande discrétion, une des femmes bien mises qui entraient en ôtant leurs capuches pleines d’eau. Et toujours, en ces instants, une sorte de grognement désapprobateur échappait à son maître, assurant, soit qu’elle était trop pauvre, soit qu’elle était trop « femmes ». Le manège dura un temps certain. Loin d’en être épuisés, ces deux-là ne bougeaient presque pas, à peine, toujours, pour laisser place aux collègues qui montaient.

    Et puis, enfin, alors que le premier service était presque fini & qu’on redescendait, au compte-goutte, payer son dû, prendre un dernier verre, laisser la place à de nouveaux clients, une femme entra. Loupiot la désigna comme il avait désigné les autres, avec un manque de pudeur digne de ces lieux-ci, &, une fois n’est pas coutume, aucun grognement n’écorcha la gorge grasse du maquereau veillant. Il prit le temps d’observer la nouvelle, & tapota l’épaule qu’il n’avait pas lâché. Une grande inspiration précéda la descente du jeune homme de l’escalier de bois, & il parcourut sans se presser les mètres qui le séparait d’elle. Et là, rassemblant son courage & desserrant les mâchoires crispées d’une angoisse première, il dit :

    - Bonsoir.

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Sulpicia
La pluie puis l'orage... Il était beau cet été et la chaleur était de mise. Une jeune fille traversait la ville pour rentrer chez elle. Prise au dépourvue la jeune blonde courut se réfugier chez elle, puis dans sa chambre, en proie à ses réflexions profondes.
Plusieurs heures passèrent jusqu'à ce qu'elle se décide à se lever, revêtant une robe bleu assez simple alors qu'elle venait de prendre son bain. Une cape enfilée, une bourse attrapée et la voici filant dehors sous la pluie.

Capuche sur la tête, la jeune femme arpentait les rues à la recherche d'un lieu bien précis. Au bout de quelques minutes, elle arriva enfin devant la bâtisse. Assez imposante face à la jeune fille, la maison close avait ses volets fermés. Qu'est ce qu'il l'amenait ici? Elle ne savait pas trop... Certaines paroles blessantes, une influence. Elle hésitait à entrer lorsqu'elle fut bousculée par un homme gras à la sobriété douteuse un "Dégage d'là petite" lui parvint alors qu'elle retrouvait équilibre et par la même occasion courage. L'air déterminé elle poussa la porte avant de perdre toute consistance en pénétrant les lieux. Inspirant pour se donner un air moins angoissé elle baissa sa capuche, laissant voir à quoi elle ressemblait.

La jeune femme était blonde, les cheveux long et ondulés, le visage juvénile, délicat, elle semblait néanmoins plus âgée -de quelques années- que le jeune homme. Frêle mais l'allure gracieuse. Ni sa peau diaphane ni ses yeux verts, ne parvenaient à cacher le rouge qui lui montait aux joues à la vue de toutes ces femmes et hommes ni son regard fuyant.Elle ressemblait plutôt à un animal effrayé en ces lieux. Senestre jouant nerveusement avec un lien de cuir.
Elle pensait aller prendre un verre pour se détendre et chasser son angoisse lorsque le jeune homme s'avança vers elle et lui parla. Un regard autour d'elle lui affirma qu'il s'adressait bien à elle, et c'est une blonde érubescente qui lui répondit.

Hum..je..Bonsoir..

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Evroult
    Elle rougit : il rougit. Ce mécanisme de défense s’était développé dès les tous premiers mois de son existence, & aujourd’hui encore, à la moindre émotion un peu forte, ses pommettes hautes du sortir de l’enfance se teintaient immédiatement. Il ne le contrôlait pas ; en fait, il en était incapable. Une senestre fine & aux ongles soignés de peu connaître les travaux manuels s’avança jusqu’à elle, & déjà, d’un sourire coincé, il l’entrainait à l’autre bout du comptoir, à l’écart de la foule, louvoyant entre les obstacles de chair avec une facilité déconcertante. Certes, il rougissait beaucoup ; soit, il semblait un peu jeune. Mais il eut fallu être aveugle pour ne pas voir combien il était tel un poisson dans l’eau.

    Un regard fut lancé au maquereau qui, déjà, ne les regardait plus. Il avait passé la semaine, si ce n’est plus, à disperser bonne parole & conseils avisés : désormais, Evroult se débrouillerait seul. Le jeune loup inspira, & prit un temps trop long à observer sa demoiselle.

    - Je suis Evroult…

    Il la dépassait d’une bonne tête mais la finesse de leurs corps, à tous deux, & la tête haute qu’ils semblaient chacun porter naturellement rendaient imperceptible la différence à l’œil non affiné. Du reste, c’était là les seuls points comparables. Elle était aussi blonde qu’il portait la mèche sombre, ses émeraudes jolies se heurtaient au mutin d’onyx agités, & le cuir qu’on lui disait clair fonçait ostensiblement comparé au diaphane de cette blonde-là. C’était Loupiot contre Agneau, au détail près que cet agnelle-ci semblait toute disposée à passer sous ses crocs de lait.

    - Je… vous voulez boire quelque chose ? Je suis tout à vous.

    Si sa voix, suave & douce, ne tremblait pas d’un pouce, l’hésitation perçait dans ses phrases & ses gestes. Elle était plus précieuse que les filles qu’il sautait, & même bien plus jolie que sa dernière conquête. Pire ! elle était sa cliente. Sa toute première cliente.

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Sulpicia
Un brin surprise de le voir rougir à son tour, la jeune fille pinça les lèvres, ne sachant que dire ou quoi faire. La tentation de s'enfuir lui trottait dans la tête alors qu'elle était face à lui mal à l'aise et hésitante. Un regard vers la main qui s'avançait et elle le suivit, heurtant quelques corps en même temps. L'un était poisson dans l'eau, l'autre était totalement étranger à ce mode de vie. Elle l'observait, faisant face à son dos alors qu'il l’entraînait. Il était plus grand, plus.. plus tout qu'elle en fait, plus foncé capillairement parlant, plus à l'aise, plus audacieux...

Un sourire de soulagement surtout vint étirer les lippes rosées alors qu'elle constatait qu'il l'avait éloignée du monde. La gêne revint alors qu'il l'observait, ne sachant que faire, elle tortillait ses mains à mesure que ses joues se teintaient. Elle leva les yeux vers lui à l'entente de sa voix et lui adressa un petit sourire.

Je...Hum...Sul...Sulpicia...


Elle mordillait sa lèvre, hésitant et l'observa à son tour, détaillant les traits du jeune homme. La jeune fille se redressa un peu et sourit, essayant de se donner du courage alors qu'elle se remémorait ce pour quoi elle était là. Après tout, c'était elle qui était venue ici, alors elle assumerait jusqu'au bout. Et puis, elle ne connaissait pas ce jeune homme et ne ils ne se reverraient jamais non?
Un rire nerveux lui échappa alors qu'il annonçait être tout à elle. Ce qui en soit n'était pas un mensonge puisqu'elle le payerait plus tard. Elle acquiesça et lui sourit timidement.

Le plus fort que vous ayez...s'il...s'il vous plaît...

Sa voix ressemblait plutôt à un murmure parmi le brouhaha joyeux des uns et des autres. Elle sourit à nouveau, alors qu'elle prit un peu plus d'assurance, relevant sa tête pour affronter ses onyx.
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Evroult
    - Sulpicia… c’est un joli nom, souffla-t-il, amusé de voir qu’elle était bien plus mal à l’aise que lui. L’angoisse ne disparaissait pas, & s’amuser d’un rien relevait d’un effort conséquent. Adonc, il se fit servir deux timbales d’eau-de-vie, bien décidé à l’accompagner pour ce verre. On lui avait conseillé de garder ses esprits ; toutefois, quelques gouttes d’alcool lui rendraient du courage.

    - Voilà, fit-il en déposant la timbale au creux de la main fine, observant sa cliente avec un profond intérêt. Alors dites-moi, Sulpicia… qu’est-ce qui vous ferait plaisir ?

    La question n’était pas aussi évidente qu’on aurait pu le croire. Après tout, ce lieu de débauche-ci proposait autant d’hommes que de femmes, autant de drogues que d’alcools, autant de vice que de tendresse. Certains venaient ici par simple curiosité. D’autres, à cette heure, pour s’abriter de l’orage. En somme, elle pouvait tout vouloir ; & s’il se retrouvait incapable à répondre à ses moindres désirs, un autre pourrait bien prendre le relais.
    Tout le but de la manœuvre, ici, était finalement de toujours garder la main. Dès lors, il saisit la sienne & y déposa un baiser appuyé, l’onyx aussi sombre que brillante fléchant sa demoiselle d’un sourire léger.

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Sulpicia
Merci...

Elle sourit doucement au compliment et le regarda servir les timbales. Une fois servie elle prit le temps de boire une gorgée, grimaçant à la brûlure de l'alcool, alors qu'elle se laissait le temps de réfléchir à sa question. Elle resta un instant à le regarder surprise, alors qu'il baisait sa main et que ses joues se teintaient une énième fois. Pensivement, elle serra sa main doucement, la gardant dans la sienne.

Oh si vous saviez..

Justement, il ne savait pas et attendait sa réponse. Elle rougit de sa bêtise et essaya de se reprendre en bafouillant quelques mots. Elle but une nouvelle gorgée et inspira avant de répondre au fur et à mesure qu'elle pensait.
Je sais ce qu'est ce lieu.. Mais.. A vrai dire je ne sais pas ce que je suis venue chercher..., avoua-t-elle. De la tendresse sûrement..De la douceur...Me libérer, me lâcher...Savez vous faire cela Evroult?

Elle l'observait, à mesure qu'elle énonçait ce qu'elle pouvait désirer, appréhendant le fait qu'il ne soit en mesure de lui offrir cela. S'il venait à refuser, alors elle rentrerait sûrement. La jeune fille était incapable d'aller d'elle-même vers un inconnu. Elle lui sourit, ancrant son regard au sien avant de lui poser une simple question. Enfin...Simple...

Ou bien..Qu'êtes vous capable de m'offrir ce soir Evroult?

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Evroult
    Et lui, tandis qu’elle l’observait en attendant, restait prostré dans un silence songeur. Pas qu’il hésitait à la réponse, oh non ! il se posait la question de l’attitude à adopter. Sous ses cils épais, un instant, il tenta de retrouver les traits rassurants de son maître à penser. Celui-ci pourtant, encore une fois, semblait plongé dans des pensées bien au-delà des préoccupations d’Evroult. L’aide ne viendrait pas d’ici. En fait, l’aide ne viendrait de nulle part, sinon de cette timbale d’argent & de son contenu, épais & lourd, piquant le palais & réchauffant le corps.

    - Sulpicia, je peux… je peux tout vous offrir. Tendresse, douceur, libération… ça, & bien d’autres choses encore… Je suis à vous. Tout à fait à vous.

    Et s’il en semblait persuadé, il ne faisait en fait que répéter, presque mot à mot, les paroles avisées de son maître à penser. Ses doigts se mêlèrent aux siens alors qu’un sourire se dessinait sous le charbon de son œil. S’il s’était inquiété de ce à quoi ressemblerait sa première cliente, il se rassurait désormais en dévorant des yeux le minois fin & délicat qui lui faisait face. Ça irait bien. Tout irait bien. Tout allait bien dans le meilleur des mondes.

    Loupiot alors, assuré de sa prise, vint poser ses lèvres au lobe de l’oreille délicate, soufflant, d’un filet de voix, la réponse qu’elle attendait tant :

    - Le moindre de vos désirs. Un mot, & je vous suis réservé. Un autre, & nous avons une chambre. Dites-moi Sulpicia… me voulez-vous ?

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Sulpicia
Un énième rougissement fit son apparition alors qu'il lui confirmait être capable de réaliser ses désirs. Elle baissa les yeux. Le voulait-elle? Ce n'était plus le moment de reculer. Elle irait jusqu'au bout, quitte à lui donner toute sa bourse. Elle vida la timbale et la posa avant de le regarder et de lui sourire. Elle glissa un regard à leurs mains avant de le regarder à nouveau. Un sourire encourageant, pour lui comme pour elle vint orner ses lèvres.

Elle mordit sa lèvre alors qu'il se penchait, et posait ses lippes contre son oreille. Les émeraudes se fermèrent alors que sa peau se hérissait. La jeune fille se serait achevée de réagir aussi rapidement à son contact. Agrippant sa main comme ancrage alors qu'elle souffla timidement en réponse.

Je..Je vous veux Evroult...Mais plus qu'être à moi... Ce sera sûrement l'inverse ce soir..


Un mordillement de lèvre et elle sourit doucement rajoutant dans la confession de l'instant: Je n'ai jamais mis pied dans un tel lieu..Mais je crois que cela se voit à des lieux à la ronde. Elle rit, doucement, d'un rire léger et cristallin. Plus détendue qu'à son entrée, la jeune femme reprenait de l'assurance et lui sourit, prête à le suivre, qu'importe où il l'emmenerait.
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Evroult
    Un imperceptible pincement de lippes répondit à la confidence. Loin d’être encore capable de juger d’un coup d’œil la cliente, Evroult n’avait pas un instant pensé qu’elle en était à son premier essai. En fait, il ne s’était pas même posé la question, trop nerveux de répondre convenablement & d’éviter le faux pas. Il inspira, hocha la tête vaguement, & finissant son verre d’un mouvement similaire à celui de la blonde, l’attira vers l’escalier de bois.

    Il pensait, d’une part, que cette innocence-là jouerait en sa faveur, puisque, de fait, Sulpicia n’aurait aucune idée de la manière dont les courtisans devraient se comporter. Elle pourrait mettre son hésitation sur le compte de la prudence, & sans doute même l’en remercier plus tard. D’autre part, toutefois, elle lui donnait les rênes d’une passe qui lui échappait tout à fait, se laissant guider là où il ne savait pas vraiment où mettre les pieds.
    Certes, il voulait être courtisan. C’était une évidence à laquelle il n’avait souffert aucune critique, aucun jugement, aucun commentaire désobligeant. Déjà, il pouvait compter plus de conquêtes qu’il ne possédait de doigts - & il les possédait tous, fichtre ! – & se savait suffisamment doué pour arriver à faire plier une femme. Né d’une puterelle grasse, élevé des catins de rempart aux courtisanes de roi, bien taillé, beau parleur, & même joli minois, Loupiot avait déjà tout pour plaire, & tout pour réussir. En bref, il avait tout d’un grand. Et si, un instant, il hésita encore, il se le fit probablement confirmer par le sourire graveleux & l’acquiescement silencieux du gardien des escaliers. Oui, il avait tout d'un grand.

    Ils avaient leur chambre. Sobre & dénudée, il fallait quatre pas de la porte à la fente du mur qu’une paillasse obstruait, couche confortable à qui l’on avait rajouté quatre piliers de bois pour soutenir une tenture épaisse & d’assez mauvais goût. Les lits à baldaquin, en fait, étaient à la mode dans tout le royaume, & les maisons closes elles-mêmes s’y mettaient, souvent avec les moyens du bord. Le lit ainsi posé restait coincé entre les trois murs, & il restait à peine la place pour une cuvette nécessaire à la toilette entre chaque passe, & un petit guéridon de bois, garni de quelques chandelles, sous la large fenêtre de gauche. Si tous les volets n’avaient pas été clos, la petite pièce aurait été tout à fait agréable ; en cet instant précis, rajouté à la nervosité & à l’humidité évidente de la soirée, elle en était étouffante.

    Sans s’en effrayer pour autant, jeune Loup s’occupa à allumer les chandelles qui traînaient pendant qu’elle prenait possession des lieux. On entendait, comme des murmures étouffés, les babillages du rez-de-chaussée & les soupirs du premier. Enfin, parce qu’il n’allait pas la faire attendre plus longtemps & parce que, sans doute, son appréhension allait finir par transparaître dans la lenteur qu’il mettait à allumer les mèches, il se redressa pour faire face à la blonde. La naïveté qui transpirait de ses émeraudes finit par lui faire esquisser un sourire mutin, alors que ses onyx s’attardèrent sur sa gorge, là où il détacha le lien de la capuche qui glissa dans un froissement sourd.

    - Alors dites-moi… qu’est-ce qui vous fait ce soir franchir les portes d’un bordel ? lâcha-t-il, presque badin, en glissant dans son dos pour dénuder une épaule & y apposer un fugace baiser.
    Discuter encore, pour le moment, semblait être la meilleure attitude à adopter, alors qu’il sentait l’alcool lui réchauffer les tripes. Il fallait combler ce silence gênant, oublier les ébats des autres, si proches, faire semblant de se connaître pour mieux faire semblant de s’aimer. Et puis, surtout, pour mieux la déshabiller.

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Sulpicia
Elle ne perçut aucune réaction et tenta de ne pas s'inquiéter de cela. Après tout, si il ne disait rien, c'est que tout allait bien non? Elle ne se doutait pas un seul instant d'être sa première cliente tant il semblait à l'aise parmi toutes ces personnes. Puis il hocha la tête et elle respira avant de le suivre jusqu'à l'escalier, puis la chambre.
La jeune blonde tâchait de ne croiser aucun regard ou quoi que ce soit, elle n'avait aucune idée de comment il fallait se comporter dans un tel lieu. Sa démarche cependant n'en restait pas moins gracieuse, tandis qu'elle attrapait la main de son courtisan pour ne pas le perdre. Et, il fallait l'avouer, pour se rassurer. Ils marchèrent ainsi jusqu'à arriver dans la chambre.

La pièce était assez petite, du moins le lit prenait une grande place, oppressante par une telle chaleur et la blonde étouffait tandis qu'elle tâchait de ne rien montrer.
Elle tournait sur elle même, observant la chambre, alors que la dextre se tendait pour toucher la tenture et découvrir le tissu, pour finir par se retourner vers le loupiot. L'observant plus attentivement alors qu'il allumait les chandelles. Leurs lueurs se reflétant sur le minois plus qu'agréable. Il avait le visage doux, et beau, celui d'un adonis, aux lèvres appelant pour être embrassées, le corps a découvrir sous la caresse des doigts. Elle avait cette chance au moins, il était plutôt jeune, séduisant et il la mettait peu à peu en confiance. Tout ce qu'elle espérait, tandis qu'elle avait imaginé mille une fois à quoi il pourrait bien ressembler si elle mettait les pieds dans un bordel. Elle était naïve certes, mais elle avait surtout peur. Peur que cet instant qui semblait agréable ne finissent en cauchemar. Alors elle inspira. Encore. Fermant ses yeux pour les rouvrir sur un noiraud aux yeux brillant de malice. Elle lui sourit alors qu'il vint défaire sa cape, pour finir par passer dans son dos.

A vrai dire... Je ne sais.. L'orage sûrement..L'envie de découvrir..
répondit-elle, fermant ses yeux à nouveau, alors qu'un frisson traversait son corps sous la sensation de ses lippes contre son épiderme. Sa voix, sensuelle avait quelque chose de réconfortant. Et lui parler, était une des meilleures choses qu'il pouvait faire en cet instant, alors que la blonde se laissait aller contre lui. Soupir discret s'échappant des lèvres féminines.
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Evroult
    Voilà, on y était. Ils y étaient. L’envie de découvrir était, sans doute aucun, la toute première raison au peton passant les portes lourdes & licencieuses des bordels du royaume. Ensuite, seulement, venaient les besoins viscéraux, les tortures à oublier, les ennuis à combler. Mais d’abord, en tout premier, était le goût de l’aventure, l’innocence mêlée à la curiosité, l’envie de connaître dans ses tréfonds l’inconnu indicible. Souvent, on lui avait répété qu’il fallait se faire pédagogue consciencieux, amener l’autre à un apprentissage maîtrisé sur le bout des doigts par ceux de sa condition.

    Un lupanar, finalement, était tout autant un cabinet de curiosités qu’une école de la chair, un défouloir de frustrations qu’une université de l’extase. Toute la difficulté, pour un jeune premier comme pour d’autres plus expérimentés, résidait en cette constatation. Baiser & faire jouir ne pouvait pas suffire : tout l’intérêt était dans cet apprentissage. Evroult, de fait, devait s’avouer chanceux : novice, Sulpicia ne pouvait qu’apprendre & n’irait pas se révéler exigeante. C’était sa première certitude.

    La seconde tenait en une chose plus triviale & mainte fois répétée : elle était aussi bonne qu’il pouvait l’espérer. Il n’aurait nul mal à la bien la désirer, & de fait, se persuadait qu’il pouvait aisément la contenter. Et tout en se disant qu’il était bien loti, & tout en se confortant à l’idée qu’elle frémisse de ses caresses légères, Loupiot bien entrainé libérait sa promise de son carcan d’étoffe ; & tel le Chasseur qu’il deviendrait bientôt, repoussait sa proie contre la couche tout près.

    L’objectif premier fut de la mettre dans de bonnes dispositions, & d’oublier l’étape de la conversation pour offrir ses lèvres à des délices plus inavouables & sans doute condamnables en dehors de ces murs. Bien préparé, il avait reçu un entrainement solide dans chacune des prestations qu’on pouvait proposer à ces dames, & comptait bien les mettre à profit sur cette première cliente. Agenouillé aux pieds du lit, il faisait valser ses doigts & ses caresses sur la moindre parcelle de peau à sa portée.

    Elle était de ces corps ronds & fermes qui savent donner la vie mais qui n’aiment pas le faire savoir à tous. Si quelques cicatrices parsemaient ses formes douces, elles s’atténuaient sans difficulté aux lueurs estompées des bougies, & restaient invisibles aux onyx frivoles du tout jeune adonis. La désirer n’était pas difficile. De plus, il était fait pour ça. De plus, il était fait de ça. Les chairs & les courbes, les cuirs & les corps. C’était sa vocation, n’est-ce pas ?

    Et pourtant. Pourtant, les joues coincées entre ces cuisses fermes rougissaient à vue d’œil. La mâchoire tendue d’être trop concentrée laissait venir la crampe, & même lorsqu’il sut qu’il lui fallait remonter, se mettre à nu à son tour & lui offrir la raison d’être de sa venue ici, il ne le put pas.
    Rien n’y faisait, non. Evroult, en fait, était aussi mou que s'il avait pensé à sa mère.
      Gertrude. Grasse, laide, & difforme morue de remparts.

    Bref. Ils y étaient. Enfin, sauf lui.

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Sulpicia
Enfin, il la découvrait. Enfin, il la dénudait. Enfin, frêle petite blonde, petite agnelle entre les bras du loupiot, elle était nue. S'allongeant sur la couche assez confortable alors qu'il se préparait à s'affairer entre ses jambes. Une inspiration, une bouffée de courage. Une deuxième et... frisson.. plaisir. Il s'affaire et elle ne peut le nier. Il est doué le bougre. Elle inspira, haletant déjà alors qu'elle se laissait aller à ses attentions exquises.

Elle eu envie de lui rendre la pareille, et le fit se redresser. Ses lèvres vinrent chercher les siennes dans un baiser passionné avant d'entreprendre le le dévêtir à son tour. Goûtant chaque parcelle de peau se dévoilant pour finir par l'avoir contre elle, dans le plus simple appareil. Un sourire vint étirer les lippes avant de finir par se rendre compte que quelque chose n'allait pas...

Mais... quelle réaction avoir alors que verge n'est que limace dans un moment de plaisir charnel?

La jeune blonde leva vers l'adonis des yeux perdus, ne sachant que faire. Elle baissa la tête et fixa les draps, peu habituée à ce genre de situation. Elle ne pouvait se vanter d'avoir connu beaucoup d'homme, mais jamais aucun n'était resté aussi froid face à elle.

Je...

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Evroult
    - Ce… ce n’est pas ce que vous croyez !

    Ah ? & que pouvait-elle donc croire ? alors qu’il était là, mou & flasque, ridicule & fripé, sans orgueil, sans superbe, sans fierté, bien incapable de réveiller la flamme chez lui quand il avait si bien su la raviver chez elle. Les pivoines elles-mêmes n’avaient pas des couleurs aussi vives que celles qui le prenaient des pommettes aux oreilles, & il vint même à couvrir des deux mains l’objet de sa honte & d’un échec certain.
    Il fut bien incapable, les premières secondes, de trouver autre chose à dire que de répétitifs « non, non, ce n’est pas ce que vous croyez » en pensant à chaque fois à ce qu’elle pouvait bien vouloir croire de cette affaire-là. Il en allait de sa survie que de trouver une réponse plus satisfaisante que celle-ci, de débloquer la situation comme n’importe quel courtisan digne de ce nom se devait de savoir faire.

    Fuir. Se carapater en quatrième vitesse, dégringoler les escaliers en remettant ses braies, passer devant le maquereau qui l’arrêterait sûrement & à qui il balancerait un merveilleux coup de tête, avant de sauter dans la salle, de monter sur les tables, de faire rouler les bouteilles & les catins trop girondes pour rejoindre la porte. Et là, sauvé enfin, disparaître dans la nuit noire & ne plus jamais revenir.
    C’était, un tantinet sans doute, rocambolesque. Alors, quoi ?

    S’évanouir. Feindre le malaise, qu’en toute honnêteté il n’était pas loin d’approcher, baver un peu, se retenir de respirer, & attendre qu’elle hurle à la mort pour qu’on la sorte, elle, qu’on l’éloigne, lui, & qu’on se concentre bien plus sur des saignées que sur son incapacité à bander & sur une passe foutue.
    C’était, un tantinet sans doute, sanglant. C’est que comme tout un chacun, il n’était pas vraiment adepte de cette lubie des médicastres. Alors, quoi ?

    Assumer. Se rattraper. Lui faire oublier.

    - Oubliez-moi.
    Voilà.
    - Sans doute me plaisez-vous un peu trop, & j’en… perds mes moyens.
    Quelque chose comme ça.
    - Je vous offrirai cette passe…
    C’est le moins qu’il puisse faire.
    - Si à l’issue de l’heure vous n’obtenez pas ce que vous êtes venue chercher.

    Il en eut un sourire, presque vainqueur déjà, convaincu qu’il pourrait rattraper sa faiblesse, dusse-t-il en avoir des courbatures à la langue. D’un mouvement souple, il l’invita à se rallonger, venant baiser son cou & caresser sa gorge, jouant de la peau humide de la moiteur de la pièce.
    Il se surprit, un instant, à invectiver son entre-jambe pour lui ordonner de se reprendre.
    Peut-être, alors, aurait-il dû fuir. Ou s’évanouir.

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Sulpicia
Je..Je ne sais pas quoi penser..

Elle l'observa, regardant son visage tandis qu'elle n'osait baisser les yeux. Pas ce qu'elle croyait? Donc..Il n'était pas face à elle, sans la désirer, mou comme une limace?
La blonde tendit la main, venant frôler une joue rouge avant de la caresser doucement. Sans rien dire.

L'Agnelle était gênée, sûrement moins que lui, mais sa confiance en elle s'ébranlait. Ainsi, elle n'était pas assez désirable pour le Loupiot. C'était certain, il avait du connaître bon nombre de femmes, plus jolies les unes que les autres. Pensive, elle vint se blottir contre lui avant de finir par prendre la parole.

Je..Non Evroult... C'est à moi de payer... Quoiqu'il se passe...


Elle se mordit la lèvre alors qu'il la faisait se rallonger à nouveau, hésitant quant-a comment se conduire. Devait-elle le repousser? Essayer de raviver la flamme chez lui? Sûrement...
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Evroult
    C’était une catastrophe.
    Plus il tentait de s’exciter, de raviver son entre-jambe & d’assurer un afflux sanguin suffisant pour contenter sa belle, & plus celui-ci se concentrait sur ses joues pour le rendre pivoine, & plus il pendait lâchement. Toute vigueur avait déserté, & ne restait plus là qu’un jeune premier penaud tentant de rattraper sa passe.

    C’était une catastrophe.
    Les minutes s’écoulaient lourdement, appesantissant la pièce dont la moiteur n’avait plus d’égal que le front frémissant d’un loupiot désespéré. Et plus il tentait de relancer sa cliente, & plus elle semblait s’éloigner, lui qui mettait plus de cœur à se morfondre sur son sort plutôt qu’à arranger la situation.
    Mais que restait-il à arranger ?

    C’était une catastrophe.
    Il avait mis tant d’espoirs dans cette première cliente, celle qui lui ouvrirait les portes d’un avenir glorieux d’où il brandirait sa fierté au nez & à la barbe des plus grands de ce monde, en fréquentant les cours, en dormant chez les dames, en baisant des princesses, lui qui s’était imaginé favori des baronnes & des reines voilà qu’il se retrouvait, là, bras – & tout le reste – ballants, violemment ramené à sa réalité. Trop jeune encore, il s’était cru infaillible & trop bon.

    C’était une catastrophe.
    Il entendait déjà les rires gras & méchants de madame sa mère, Marie-Gertrude de son très joli nom, secouant ses bourrelets à coups d’éclats de rires & pointant un doigt gras & rongé sur le minois du fils. Il la voyait déjà, pavanant comme la reine truie qu’elle incarnait si bien, écraser de sa lourdeur l’ambition du rejeton, qu’elle avait méprisé comme elle les méprisait tous, elle morue de remparts à qui rien n’avait réussi, & sûrement pas ses mioches. Il la sentait déjà, soufflant son haleine putride & suant de tous pores son inaptitude maternelle & son incompétence professionnelle aux narines du jeune loup, finissant de lui rappeler de quelle fange il venait.

    C’était une catastrophe.
    Lui, le fils de catin qui voulait être catin, mais catin de grand nom, mais catin de belles nobles, voilà qu’il ne faisait que suivre indignement le chemin de sa mère. Une première passe ratée & il ne valait rien de plus.
    C’était une catastrophe.

    Il avait pris un instant pour souffler tout contre la peau moite, & y imprimant un baiser de pardon il s’assit sur la paillasse défaite. Des deux mains, parce qu’il ne savait pas où les mettre, il se tint le visage, le dos rond & recroquevillé sur la honte & le malaise qu’il éprouvait alors. Son orgueil avait pris un coup si violent qu’il semblait ne jamais pouvoir s’en remettre.

    - Je..., commença-t-il, d’une voix brisée & rauque. Je suis désolé… je… je n’y arrive pas. Ce n’est pas que… Il ne faut pas que… vous me plaisiez… plaisez ! vous me plaisez beaucoup… mais je suis trop… trop…

    Trop ignorant. Trop jeune. Trop inexpérimenté.
    Trop faible aussi. Trop pas assez bien. Trop peu. Trop.
    Il était trop tout, & ses tempes même menaçaient d’exploser.

    - Pardonnez-moi… me pardonnerez-vous ? Pardonnez-moi. C’est que… c’est… la première fois. Enfin, la première fois que cela arrive. La première fois.

    C’était la première fois d’une vie de courtisan, en somme.
    Et c’était une catastrophe.

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