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[RP] Le lac, l'ondine, l'intrus.

Breiz24
Il faisait froid, il faisait beau, temps parfait pour une chevauchée. Chevauchée irréelle s'il en était. Les herbes cristallisées pas le froid craquaient sous les sabots du palefroi, de la buée s'échappaient des naseaux de l'animal, tout comme de son propre souffle et de celui de l'enfant, ravi comme toujours d'être sur le dos du frison, lié à sa mère.
Aux écuries, elle avait hésité un instant, et avait finalement laissé la selle au crochet. A cru, le hongre réagissait mieux à ses directives. Les devinant souvent.
La fine équipe se baladait, donc. Après tout, la messe, c'était long, fallait bien se dégourdir les jambes quand on en sortait!
Le soleil était aussi haut qu'il puisse l'être en hiver, et chauffait légèrement le dos de la rouquine, vêtue de noir.
Elle laissa le palefroi décider seul du chemin. Après tout, l'important, c'était de sortir, de profiter du soleil, pas de but, juste l'errance. Vite. Elle avait talonné le hongre dès les portes de la ville passées, et l'avait laissé prendre le mors au dents. Le cheval galopait avec une joie farouche, la rouquine accrochée à sa crinière, laissant derrière lui un sillage de cris de joie poussé par le bébé pelotonné dans l'écharpe de lainage soyeux qui le liait à sa mère.
Libre de toute entrave, Sombrelance filait droit devant lui, le pied sur évitant les flaques gelées. Sa cavalière, cramponnée, regardait filer le paysage, sourire ravi aux lèvres. Et finit par se redresser légèrement, pour mieux observer le lac qu'ils avaient fini par longer. Le palefroi, répondant instinctivement aux mouvements de la Rusée, ralentit son allure jusqu'à repasser au pas. La rouquine avait toujours été attirée par l'eau, et elle venait de découvrir un lac qu'elle ne connaissait pas. Incroyable qu'ils aient filés aussi loin...
Effleurant les flancs de l'animal de ses talons, elle entreprit de lui faire faire le tour de la pièce d'eau. Pas vraiment gigantesque, mais assez grand pour pouvoir espérer trouver un coin en retrait du chemin. Le mouflet, recru de fatigue, avait fini par s'endormir contre sa mère. Bien ennuyée, du coup, quand elle finit par trouver l'endroit qu'elle cherchait.
Elle ne laissait jamais l'enfant seul. Elle ne laissait jamais l'enfant à quelqu'un. Le petit garçon était en permanence dans son champ de vision, quand il n'était pas calé sur sa hanche ou blottit dans son dos, dans son écharpe.
L'eau l'appelait. L'endroit était féérique. Le froid avait solidifié l'eau sur les berges, mais il ne gelait pas assez fort pour prendre tout le lac. Un léger brouillard montait du lac, preuve que l'eau était plus douce que l'air.
Elle se laissa glisser du dos du frison, et libéra l'enfant endormi de son écharpe, dans lequel elle l'emmitoufla. Elle dénoua ensuite sa cape et la laissa choir au sol, au plus près de la berge. Et y allongea l'enfançon, avant d'ôter le reste de ses vêtements. Froid ou pas froid, gel ou pas gel, l'eau l'attirait. Vêtements déposés en tas près de l'enfant, cheval garé à côté du mouflet, voir au dessus de lui si l'envie lui en prenait, le palefroi croyait encore parfois être un étalon dont le devoir est de protéger sa horde.
La rousse s'avança dans l'eau, brisant la fine pellicule de glace à petits coups d'orteils, pour le plaisir de l'entendre craquer. Et, une fois de l'eau aux genoux, s'élancer et plonger. Elle n'allait pas rester longtemps. Elle ne pouvait pas laisser Gauvain. Mais diable, que sentir les légers courants du lac glisser sur sa peau était agréable! Quelques instants sous l'eau, les yeux clos, juste le temps de quelques battements de cœur.
Elle se redressa, de l'eau jusqu'à la taille, et se tourna vers la berge.

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Milo
[Quelque part... Allez savoir]

Le hongre marche d'un pas lent, comme si le fait réveiller son propriétaire est la dernière chose qu'il souhaite au monde. Le géant, lui, émerge peu à peu des limbes de Morphée, dont les brumes matinales semblent se matérialiser sur le chemin traversant la forêt. Azurs à demi-éveillées qui scrutent le sentier, à la recherche d'une bifurcation parmi les arbres aux branches vêtues d'une fine pellicule de glace. Qui dit brumes vaporeuses matinales, dit eau pas très loin.

Faire un brin de toilette ne lui déplairait pas, au moins pour enlever le sang qui macule ses bras, fruit de la chasse au lapin menée un peu plus avant. Un mâle, pour ce qu'il en sait, au pelage épais et roux. Un peu maigre pour lui, mais les temps de disettes existent aussi ici-bas. La peau a été soigneusement retournée, la viande soigneusement empaquetée dans un carré de peau tannée par les ans, accroché à sa selle.

Se laissant guider par le hongre alezan, luisant légèrement lorsque les rayons du soleil viennent frapper sa robe noisette, le blond laisse vagabonder son esprit sur ce qu'est devenue la blonde. Elle a maigri, trop à son goût. Elle a vieilli, trop pour lui. Le pincement au cœur ressenti lorsqu'il l'a vu après tous ces mois passés sur la route a laissé une trace plus profonde qu'il ne l'aurait cru. Ho, elle n'est pas éternelle, il le sait. Mais à la voir ainsi, percluse de courbatures, il a vu les ravages que le temps a causé, cette mante infatigable et immuable, bien que la blonde voulait lui faire croire le contraire.

L'arrêt du cheval le tire de ses songes. Ses pas les ont mené vers un plan d'eau responsable du brouillard alentour, s'étiolant à mesure que le soleil prend pleinement ses droits sur le jour. Mettant pied à terre, bride en main, il fait plusieurs mètres avant de s'arrêter, laissant tomber les rênes le long du sol.

Il hésite entre plonger les bras complètement quitte à mouiller sa chemise et grelotter de froid ensuite, ou enlever sa chemise pour se retrouver au sec peu de temps après.

La seconde option sera prise, il n'est pas si riche que ça pour se permettre de gâcher du tissu, même si, selon la blonde, un petit pécule l'attend en Rouergue, héritage de Maharet. Lentement, il défait les liens retenant sa chemise noire, avant de la poser sur le dos de Grani. Tremblant doucement sous la bise. Libérant aux yeux d'une nature silencieuse un fardeau qu'il lui est parfois difficile de porter. Vestiges d'une guerre passée, mais qui le hante encore parfois.

Dans son dos, aux tranchées plus ou moins incertaines, plus ou moins creusées, là où les lambeaux de chair ont cédé. La note du maître de guerre, triomphant alors, un "L" majuscule gravé au fer rouge sur son épaule gauche. Sur son torse, une large cicatrice argentée, prenant sa source sur son épaule dextre, pour finir par se perdre sur sa hanche senestre. Rejointe par une autre cicatrice sur le flanc droit, acquise tout récemment.

Le gant est également ôté le plus délicatement possible, ses doigts devenant rouges, indignés de se voir infliger tel traitement, eux si fiers d'avoir un endroit chaud où loger. Jetant un regard qui semble intimer au hongre de rester icelieu sous peine de réprimandes spectaculaires, le géant se dirige vers l'eau finement auréolée de son amante glaciale, il se met à genoux au bord, sortant sa dague de sa botte gauche, pour casser le fragile accord passé entre les deux éléments. Plongeant à la suite ses bras, Azurs fermées, frémissant de plus belle, il les laisse plongés quelques minutes, avant de les ressortir, mains en coupe, pour s'asperger le visage, finissant ainsi de se réveiller.

C'est lorsque ses deux mains finissent de lui révéler le monde qu'il le repère. Un superbe frison, majestueux sous les lueurs solaires. Geste suspendu, il le détaille, un peu comme une bête fabuleuse. Et c'est lorsqu'il baisse enfin complètement les yeux qu'il la voit. Assez proche pour qu'il devine la couleur de ses cheveux. Trop loin pour en apercevoir plus. Une rouquine, entièrement nue.

Un sourcil se hausse. Comment se fait-il qu'une femme se baigne de si bon matin, gelé, de surcroît. S'il était homme à se laisser berner par les contes et légendes, il la prendrait pour une créature surnaturelle de son peuple. Une ondine. Et il a beau dire qu'il croit aux elfes pour passer pour l'idiot de service, il n'en est rien en réalité. Vieille habitude prise avec cette Opale rêveuse, pour faire fuir les démons qui les entouraient en ce temps. Il se frotte les yeux, se demandant si, finalement, il ne rêve pas encore. Mais non, elle est bien là, de profil.

Alors, toujours sur les genoux, un léger sourire amusé esquissé sur ses lèvres, Azurs moqueuses rivées sur la femme, il brise le silence de sa voix grave, resserrant par la même occasion sa lanière de cuir bleue, quelques mèches blondes virevoltant devant lui.


- Fait p'tet un peu frais pour goûter au baiser glacial d'l'hiver d'si bonne heure, croyez pas ?
Breiz24
[Gné?]

Voix grave flottant sur le lac. D'où venait-elle? Peu importait, son corps avait bougé par réflexe, se tendant vers la berge, l'enfant et les épées, tandis que ses yeux cherchaient du regard la voix intrusive. Là! Sur sa gauche.
Continuer à scruter les environs. Est-il seul? Rapide scrutage d'horizon avant de reposer son regard d'acier sur le blond. Trop loin pour qu'on puisse discerner véritablement ses traits.
Cheval alezan non loin, rien, ni personne d'autre dans les environs. L'homme, tout comme elle, semblait voyager seul.
Elle se tourna vers lui, de l'eau toujours jusqu'à la taille, et poings sur les hanches, oubliant, dans sa colère d'avoir été surprise, sa semi nudité.


Si y fait si frais qu'ça pour vous, allez donc vous prélasser au bains publics, l'eau y est plus chaude et les filles peu farouches!

Rosissement des pommettes. De colère, surtout, et aussi parce que causer de filles faciles à un inconnu quand on est soi même nue comme en ver et ruisselante de flotte, c'est un peu antinomique. Si si.
C'est qu'elle avait beau adorer les sensations de l'onde sur sa peau, la rouquine était prude. Du moins, elle évitait de se balader à poil n'importe où. Chez elle, à Mâcon, elle savait où et quand aller se baigner pour qu'on ne la surprenne pas. Elle était furieuse de s'être laissée avoir. Furieuse après elle même. Donc, par extension, furieuse après l'homme qui la mettait en si fâcheuse posture.

D'autant plus fâcheuse qu'elle hésitait. Bouger encore, se précipiter hors de l'eau en exposant sa nudité un bref instant, courir vers l'enfant et les lames protectrices, ou bien rester dans l'eau, s'exposer plus encore éventuellement, et ne surtout, surtout pas attirer l'attention de l'homme sur le bébé endormi?

Dans le doute, elle resta dans l'eau, les poings toujours sur les hanches, les yeux lançant des éclairs. Faisant fi des mèches d'or rouge collées dans son dos, qui dégouttaient désagréablement le long de sa colonne vertébrale. Prête a bondir vers l'enfant et les précieuses épées au moindre mouvement du blond.

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Milo
[La dame du lac et le nordique]

Le sourire s'agrandit, passant d'amusé à railleur, alors que la donzelle le toise de toute sa nudité, poings sur les hanches, dans l'attitude parfaite de celle qui, outrée, en oublie complètement sa position. Azurs goguenardes qui détaillent la jeune femme, sifflant son destrier pour qu'il vienne le rejoindre, tandis qu'il remet sa dague en place. Sait-on jamais, il n'a pas envie de lui tourner le dos.

Un léger coup donné sur son épaule lui fait chercher à tâtons les rênes de Grani, avant de les empoigner d'une main ferme. Il s'approche de la jeune femme, d'une démarche nonchalante, espérant secrètement qu'elle ne prendrait pas son initiative pour une quelconque marque d'hostilité. Il s'arrête sur la berge, la belle à quelques mètres de lui. La détaillant plus avant, sondant les eaux, des fois qu'une autre personne ai eu l'envie de se cacher derrière elle.

Mais il n'en est rien, aussi fait il avancer légèrement l'équidé, puis, ne quittant pas la rouquine des yeux, entreprend de défaire le petit paquetage qui ne l'abandonne jamais. Deux couvertures, un petit fagot de bois sec, surtout en hiver, son briquet, une outre d'eau, et son épais mantel, mis de travers. Il défait lentement les liens retenant les couvertures, dépose les deux sur sa chemise, en prend une puis se tourne vers la rouquine, Azurs rivées dans les Hématites, sourire ironique dessiné sur les lèvres.


- Z'avez vos saign'ments pour et'si peu jouasse ? Coup d'oeil jeté autour d'elle, des fois qu'il ai mal regardé. Vu la couleur d'l'eau non. Il penche la tête sur le côté, cet air narquois ne quittant pas son visage. Z'en faîtes donc pas, y en faut plus pour m'mettre au garde à vous, même si j'dois adm'ttre qu'vous avez d'belles formes !

Il déplie lentement la couverture, observant cette fois-ci d'un oeil le frison. Aucune selle en vue, il a eu bien fait. Des vêtements roulés en boule, formant un monticule volumineux. Il écarte les bras, tendant par la même occasion le tissu contre ses jambes, faisant montre de bonne volonté.

- Dites belle rouquine, pas qu'bavasser sur les berges en plein hiver torse nu m'embête, mais si vous sortez pas rapid'ment, z'allez vous cailler l'fond'ment. Son nez se plisse alors qu'une légère brise vient lui caresser le visage. Et j'doute qu'd'voir m'déshabiller pour v'nir vous chercher vous plaise, surtout qu'j'ai qu'deux couvertures, et qu'j'vais pas vous laisser crever d'froid en mouillant vos vêt'ments. Puis, clignant des deux yeux et affichant un sourire banane sur le visage. C's'rait dommage, faudrait qu'on s'serre tous les deux sous les couvertures parc'qu'une seule suffira pas.

De loin, la scène est plutôt cocasse. Un soleil timide aux rayons blancs chauffant peu à peu l'atmosphère, chaleur insuffisante toutefois pour se balader nu sans tomber malade. Un lac à moitié gelé, au milieu d'une clairière, à l'écart d'un sentier tout proche. Deux chevaux, gardiens tout deux de vêtements plus ou moins chauds. Une rousse entièrement nue, se prenant pour une divinité hantant les légendes de son peuple. Un blond en position d'offrande, une couverture couvrant à moitié le sol. Et un géant qui se retient pour ne pas laisser les tremblements naissant dans son ventre éclater en un rire tonitruant.
Breiz24
[Mêmpopeur!]

Pas de chance, la rousse interprétait tout mouvement vers son mouflet comme une menace. Elle bondit.
Elle n'était pas si loin de l'enfant, après tout. En deux trois mouvements et autant de gerbes d'éclaboussures, elle était accroupie, toujours dans l'eau, près du bébé, un bras plongé sous son corps endormi et l'autre sous les vêtements, la main refermée sur le pommeau de son épée.

Le blond finit de s'approcher, azurs moqueuses détaillant ce qu'elle ne dissimule plus vraiment. Il y a longtemps que la rousse ne considère plus sa poitrine comme objet de désir. Depuis qu'elle la déballe plusieurs fois par jour pour nourrir un rouquin vorace. La remarque sur ses formes n'atteint même pas son cerveau. L'acier de yeux ne quitte pas l'homme du regard, tandis que l'acier de l'épée se niche parfaitement au creux de sa paume.
Qu'est-ce qu'il lui veut, avec sa couverture? L'étouffer? Ah, non. La réchauffer. Elle prit le parti de lui rire au nez.


J'ai jamais eu froid d'ma vie, le blond. Si l'hiver te crispe les bourses, rhabille toi donc, et laisse moi me préoccuper de mon fondement!

Certes, c'était risqué. Il était si près d'elle qu'en un bond il pouvait la transpercer. Et il n'avait pas l'air d'en être à son premier combat.
Attendant une réaction de l'homme, elle le détailla. Son corps portait les stigmates d'une vie de combats. Et quelle étrange couleur, pour une cicatrice!
Une moue ironique vint orner les lèvres rosées de la rouquine. Elle était prête. Ses orteils ancrés dans la vase, les muscles de ses cuisses bandés, elle pouvait s'élancer vers l'avant en un instant. Après tout, l'homme avait les mains prises.

Un nouveau paramètre vint interférer avec ses rapides calculs. Un mouvement sur son bras droit, un geste d'éveil. Et la tension, dans sa poitrine, qui indiquait, aussi surement que les courtes ombres que le soleil traçait au sol, qu'il allait bientôt être la midi.
Acier planté dans les Azurs, elle ajouta, un peu trop vite :


Et puis tourne toi donc! T'a pas appris à être poli?
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Milo
[Et Dieu créa la chieuse, heu la femme]

Une carpe qui bondit. Enfin, non. Plutôt une rousse qui bondit. Laissant le géant un peu abasourdi et dans une position... Pas vraiment à son avantage, il faut le dire. Parce que regarder les gestes désordonnés d'une femme qui fait des sauts de cabri dans l'eau, une couverture contre les genoux, avec un air narquois qui devient pantois, ça fait très con.

Il penche la tête sur le côté, Hématite devenue Ilménite et observe son manège. Jusqu'à ce qu'elle plonge la main sous les vêtements posés en tas et en soutien une grosse partie. Volumineuse. Azurs qui se plissent alors qu'elles prennent peu à peu conscience que le tas n'est pas un tas, mais un bébé. Un soupir s'échappe de ses lèvres. Elle pourra le remercier, son rejeton. Sa présence l'empêche de continuer ce petit jeu, dont l'issue aurait été toute trouvée.

Il pose la couverture à terre puis lève les deux mains, paumes verticales et doigts tendus. Exceptés le majeur et l'annulaire de sa senestre, qu'il ne peut ni tendre ni plier complètement, lequels restent à mi-chemin entre l'affront et l'asservissement.


- Poli ? Possible. J'ai pas envie. Et mes bourses vont bien rouquine, c'est gentil d't'en inquiéter. Même si j't'trouve culottée d'me faire une proposition aussi indécente alors qu'on s'connaît à peine. Un sourire railleur, il prend le même ton qu'elle tandis qu'il montre du menton son pantalon de cuir noir, puis la peau nue de la donzelle. J'me ballade pas à poil contrairement à toi, s'tu vois c'qu'j'veux dire. Nouveau geste en direction de sa main gauche. Et c'pas avec une main handicapée qu'j'pourrais t'faire grand mal. Haussant les épaules, il replie le carré de tissu, le posant près de la berge, se moquant bien de ce qu'elle pourra faire à présent. Tiens, j't'laisse ça là. Quand tu t's'ras d'cidée à sortir ton joli f'ssier d'c't'eau g'lée, tu pourras la prendre pour t'réchauffer, plutôt qu'tes vêt'ments.

Azurs bienveillantes qui jettent un dernier regard sur la rousse, avant de se tourner vers son cheval, puis de se rhabiller. D'abord la chemise, ensuite le gant. Soulagé de cacher ce que peu ont vu. L'autre couverture rejoindra la première, des fois que la rouquine ai froid. Il ouvre ses fontes et fouille à l'intérieur, extirpant son briquet, un peu d'amadou, son outre à eau, quelques fruits, principalement des pommes et le paquetage contenant le lapin fraîchement tué. Le tout sera posé à terre, à quelques mètres de la couverture, pas assez cependant pour que la rouquine ne veuille le menacer si elle le souhaite.

Il retire le fagot de la selle, le posant à côté du reste, prenant quelques pierres éparses afin de faire le foyer qui accueillera le repas du midi. Puis, le bois disposé en tas concentrique au centre des pierres, l'amadou enfoui en son sein, toujours face à la rouquine, l'observant parfois, il entreprend de frapper l'acier contre le silex. La douleur dans sa main l'oblige à s'y reprendre à plusieurs fois, lorsqu'enfin un éclat plus téméraire que les autres s'aventure sur la masse spongieuse et l'embrase rapidement.

Enfin, laissant Grani gratter le sol gelé à la recherche d'herbe tendre, il s'assied en tailleur, ne quittant pas des yeux la jeune femme, pensif, tandis que sa dextre masse sa senestre. Un silence qui dure, jusqu'à ce que les Azurs se plantent dans les Ilménites, avec toutefois un clignement qui les cachent toutes deux un instant. Sa voix profonde de basse aux accents suaves et chauds reprend un peu le dessus, pour un temps, alors qu'un sourire sincère et doux prend place sur son visage.


- Ne tarde pas trop quand même, ta fierté n'a rien à craindre. Toi par contre, tu risques de tomber malade, et j'm'en voudrais pendant longtemps d'avoir fait un orphelin.
Breiz24
[A n'y rien comprendre!]

Ma fierté?

Il se passait quoi, là? Il se foutait d'elle, il la reluquait sans vergogne, et maintenant il se préoccupait de sa santé? Elle n'y comprenait plus rien la rouquine.
Elle avait vu le regard changer quand il avait enfin remarqué l'enfant. Et sa main s'était crispée sur le pommeau de son épée, toujours enfouie sous la robe noire. L'enfant, c'était le seul a tenir éveillée son âme. Et sa mère ne vivait que les armes aux cotés depuis qu'une folle avait menacé de le tuer par la torture.
Tout le temps que le blond regarda le bébé, bien réveillé maintenant, la jeune femme ne le quitta pas des yeux.
Que voulait-il? Qui était-il?

Perplexe, elle le regarda se tourner vers son cheval et se rhabiller. En oubliant de sortir de l'eau, fascinée par le jeu des muscles de son dos, et cette lettre comme gravée dans sa peau.
Il l'avait surement prise pour une... fille du village voisin, avant de remarquer le palefroi et le bébé. Qu'allait-il faire, maintenant? Continuer à jouer avec elle? L'enfant était un bon moyen d'obtenir d'elle ce qu'il voulait. D'autant qu'il n'avait pas encore remarqué les lames, enfouies sous la robe noire. Pas la plus luxueuse des deux, mais assez noire pour que l'on voie qu'elle portait haut son deuil. Et que le disparu avait été assez riche pour permettre à sa veuve de s'offrir de la teinture noire.
Le blond aussi, portait cette négation de couleur. Etait-il riche? Bourgeois? Noble? S'il était noble, il allait essayer de lui trousser les jupes... qu'elle ne portait déjà plus. Mais s'il avait été noble, il n'aurais pas voyagé seul.

Captivée, les yeux rivés sur chacun de ses gestes, elle le regarda déballer son paquetage, le petit bois, l'amadou, le silex. Et le feu qui prenait. Et elle, pendant ce temps, poursuivait son bain de siège, la main serrant toujours le pommeau de la mérovingienne. Son autre bras passé autour de la taille de l'enfançon, assis désormais, qui n'allait pas tarder à ouvrir la bouche pour réclamer son repas. C'est qu'on est vorace à dix-huit mois.


Ma fierté?

Besoin de répéter le mot, le temps de rassembler ses idées. Ma fierté, ça fait bien longtemps que j'ai pris l'habitude de la voir piétinée, crétin. Voila en théorie ce qu'elle aurait voulu pouvoir répondre.
La chose lui semblant dangereuse, elle se résolut à se censurer, surtout vers la fin.


Fait longtemps qu'elle a été foulée aux pieds, ma fierté, l'blond!

Voila, l'essentiel du message était le même.
Et, pour preuve qu'elle se fichait de sa fierté bafouée, elle finit par se relever. Attrapant son mouflet, toujours emmitouflé, et surtout la cape qui lui avait servi de nid douillet. Et surtout, surtout, priant pour que la dite cape retombe à peu près correctement devant elle, pour cacher enfin un peu mieux son corps aux yeux azurs.
Gagné! Ravie, mais sans le montrer, elle finit de draper le lourd tissu noir autour de sa taille et en rabattit un pan sur son épaule, protégeant son fils et sa poitrine du froid ambiant.
Le mouflet avait faim, il le lui faisait clairement comprendre en gigotant contre elle. Et la tension dans son sein devenait désagréable.
Coincée, la Breiz. Allaiter en public ne la dérangeait pas, son travail de tavernière ne lui laissait pas trop le choix. Mais allaiter son mouflet, nue, même sous sa cape, devant un inconnu potentiellement dangereux, c'était une autre affaire.

Machinalement, elle se pencha, ramassant la robe noire et la robe de dessous, de lin écru, pour les poser en travers du dos du palefroi. Révélant, ainsi, le baudrier qui retenait habituellement à ses hanches l'antique mérovingienne reforgée, et sa jumelle, toute neuve.
Ramassant les armes de sa main libre, elle passa le ceinturon en travers du dos du cheval, impassible pour une fois.


Mon fils est déjà orphelin, il ne le sera pas une seconde fois. Et me prends pas pour une truffe, l'homme, la gauche est celle du bouclier, la droite fonctionne, et ton corps porte des traces de batailles.

Elle resta près du cheval, encombrée par son fils gigoteur, mais prête à grimper sur le dos du frison si la fuite devenait nécessaire. Les azurs avaient beau se vouloir rassurants, la veuve ne relâcherait pas son attention.
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Milo
[Et les Athéniens s'atteignirent]

Il n'a de cesse de l'observer, fasciné. Dignité faîte femme, fière sous le froid glacial et implacable de l'hiver naissant. Aussi ne bouge-t-il pas. Pas plus lorsqu'elle lui renvoie la balle, pas plus lorsqu'elle se drape dans sa cape, pas plus lorsqu'elle pose ses vêtements en travers de son de son destrier, pas plus lorsqu'elle révèle les armes, rayons du soleil accrochant le tranchant de leur lame. Ce n'est que lorsqu'elle se tient près du cheval qu'il se réveille, se levant à son tour, ramassant une couverture au passage, et s'arrête à quelque pas.

Un rire transperce le silence ambiant. Désabusé, amère. Un rire emplit de regrets, de tristesse. Un rire terne. Azurs plantées dans les Ilménites qui ne veulent redevenir Hématites, le géant parle d'une voix légèrement rauque, aux sonorités mélancoliques, dénuée de cet accent roturier qu'il aime prendre la plupart du temps.


- Il porte des traces de batailles, oui... Mais pas celles que tu crois. Eclats bleutés qui deviennent amusés, comme toujours lorsqu'on lui prête des actions et intentions qu'il n'a pas. A moins que tu ne considères effectivement que rester attaché à un poteau pendant que l'on s'amuse à t'écorcher vif à coup de fouet soit un combat comme un autre, que l'on te plante un clou dans la main sous la menace de tuer un proche ne soit un combat comme un autre, que l'on inscrive une marque au fer rouge sur ta peau pour que jamais tu n'oublies tes tortionnaires soit un combat comme un autre. Il s'est approché, peu à peu. Se foutant bien de se savoir à portée de ses lames. Haussant les épaules, comme si cela a peu d'importance. De toute façon, j'sais pas me servir d'une épée, uniquement d'un bâton. Ajoutant après un silence, comme un aveu. Et j'suis gaucher... Les gauchers se battent aussi de la main droite ?

Il est à présent si proche qu'il peut sentir les fragrances dégagées par la rouquine, malgré sa douche. Odeur âcre de l'équidé, mêlée à celle sucrée du miel, plus suave des épices, et plus entêtante du lait. Il se contente de poser sa couverture sur son bras tendu. Tête penchée sur le côté, quelques mèches venant parer sa vision des mèches flammes de dorures clairsemées. Il laisse errer ses yeux sur l'enfant, se demandant quel âge peut-il avoir, et surtout, depuis quand son père est mort.

Faisant fi du danger teinté de reflets argentés, la toisant de toute sa hauteur, sa senestre gantée vient prendre avec douceur le menton de la veuve, chose qu'il n'a remarqué avant, et la force à le regarder.


- Ta fierté a peut être été foulée, mais elle n'est pas enterrée. Si tel était le cas, ton fils serait orphelin, sans mère pour le protéger. Il se penche vers elle, son souffle se mêlant au sien, Azurs toujours rivées dans la pierre aux reflets acier. Ta fierté n'est pas morte, belle rouquine. Elle a été bafouée, tu as peut-être été humiliée, ça oui. Mais regarde la. Ta fierté est née il y a peu, te ressemble mais ne peut vivre sans toi.

Un autre sourire sincère vient se river sur les lèvres du géant, qui se recule et déplie enfin la couverture pour la poser comme il peut sur les épaules de la veuve, enfonçant les bords dans les interstices que ses bras laissent apparaître, se moquant bien d'une quelconque réaction. Puis, comme pour s'excuser du dérangement, il dépose un baiser tendre sur son front, avant de se reculer et de cligner des deux yeux, accent retrouvé.

- Faut-il qu'les rouquines aient l'tempérament en tout point identique à leur ch'v'lure ! Garde c'te couverture sur l'dos, t'vas attraper froid. Tête d'lard...Lui tournant, le dos, il retourne vers le feu qui laisse éclater sa joie de vivre, avant de s'accroupir au dessus du paquetage contenant la viande, commençant à l'ouvrir. T'as faim ? J'ai trouvé un lapin prit dans un collet c'matin. J'ai quelques pommes et un peu d'eau aussi.

Dos en offrande, délicieuse invitation à le tuer. Il le sait et se moque bien de savoir ce qu'elle va faire. Après tout, elle est libre de ses choix.
Breiz24
Bien sur que les gauchers aussi se battent de la main droi...

Il s'approchait, il s'approchait, et elle se taisait. La main gantée sur son menton lui fit ravaler ses derniers mots.
Les yeux dans les yeux. Muette, elle l'écoute faire sa leçon de morale.
L'enfant s'est tu, comme toujours lorsqu'il sent la tension qui habite sa mère.
Et le voila qui la borde dans sa couverture. C'est qu'il y tient, à croire qu'elle a froid! Et qui l'embrasse.
Et elle, muette, encore, incapable de se mouvoir, incapable d'ouvrir pour protester. Pourtant, ils sont peu, ceux qui l'ont touchée depuis son veuvage.
Ses rusés. Théo. Et... lui.
Où était passé son accent? Pourquoi lui parlait-il ainsi? Etait-ce vrai? Avait-il réellement vécu ce qu'il disait? Et... Et... Et puis, pourquoi la regardait-il ainsi? Certes, elle avait été nue sous ses yeux, mais tout de même, elle était plus de couverte maintenant!
Et... Ah. L'accent gouailleur était revenu.
Et il lui tourna le dos. Délibérément, se baissant, même, pour mieux s'offrir. Désirait-il la mort? Ou bien simplement lui montrer qu'il ne craignait pas une rouquine nue comme en ver?
La mérovingienne sortit enfin de son fourreau, sans un bruit. Puisqu'il s'offrait...

Puisqu'il s'offrait, elle s'accroupit dans son dos, l'épée reposant dans l'herbe gelée, à ses cotés. Ne le touchant pas, mais presque.
Et, lentement, l'index traça, sur la chemise, la lettre incrustée dans la chair. En retrouvant le tracé, sans hésitations, malgré la fine couche de tissu qui l'en séparait.

Elle ne parlerait pas.

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Milo
Il laisse une fois de plus les souvenirs affluer, sachant que jamais il ne pourrait les oublier, la rouquine laissée dans son dos. Trop de témoins aux paroles muettes inscrites dans sa chair, à la douleur fulgurante qui perce sa main gauche à intervalles réguliers. Une sinécure impossible à laver.

Sa main gauche descend le long de sa jambe pour venir prendre sa dague, planquée comme à son habitude sous ses braies, ancrée dans le fourreau ceint à la botte. A peine l'air libre retrouvé, elle se met en branle, débitant l'animal en morceaux plus ou moins égaux. Il les laisse sur le carré de tissu, avant de prendre ceux dont les abats sont restés liés, les séparant du reste et les balançant beaucoup plus loin. Les charognards sauront bien quoi en faire.

Puis, les morceaux sont enfilés un à un sur quelques branches extirpées du fagot de bois qui ne ressemble plus à grand chose. Les brochettes sont ensuite déposées sur l'emballage, en attente d'être rougies sur les braises qui naîtront de l'extinction. Le géant prend ensuite l'outre, la débouche et nettoie consciencieusement sa dague.

Il ferme les yeux, surpris par son contact, laisse ses gestes en suspens, dague laissée à terre. Un frisson le parcourt lorsque la main de la jeune femme trace du bout des doigts cette lettre infâme. Peut-être le pire souvenir de tous. Celui qui lui rappelle combien de fois il a du obéir à ce soldat, si sûr de lui et de sa force. Celui qu'il a tenté de repousser chaque fois qu'il le pouvait, préférant souffrir que se laisser aller à ses sirènes mensongères.


- Il disait que je lui appartenais... Accent de nouveau abandonné, comme chaque fois qu'il est inquiet, ému, ou qu'il réfléchit trop. Alors un soir... Il... Il a pris le tison terminé par cette lettre, qui était aussi la première de son prénom. Un silence lorsqu'il repense encore au regard dénué d'humanité de cet homme soit-disant bardé d'honneur. Trois soldats m'ont retenu. Et ont déchiré ses guenilles, dévoilant aux yeux des flammes son dos en charpie, méfais déjà présents depuis longtemps. Fallait pas que je me débatte. Sa dextre masse sa senestre, Azurs perdues dans les flammes léchant l'air glacial. Il voulait que la lettre soit propre, que je me souvienne longtemps après de lui. Un sourire satisfait étire ses lèvres.Y en a un qui s'est quand même pris mon poing dans la gueule, juste avant que moi, je m'en prenne un sur la nuque. A moitié sonné, torpeur qui quand il y pense, lui a été salutaire. Il a sorti le tison du feu. Et s'est approché en parlant de cette voix mielleuse qu'il abhorrait au plus haut point. Son genou s'est posé dans mon dos, sa main sur mon épaule. Et son souffle trop proche de son oreille. J'ai dû m'évanouir quand le tison a rencontré mon épaule. A moins que ce ne soit avant. Quand je me suis réveillé... Il a hurlé pendant longtemps, se jetant parfois contre les murs de son cloître, terrassé par la douleur, maudissant tout ce qu'il pouvait le soudard. J'avais ce « L » sur l'épaule, et j'ai su que jamais je ne pourrais oublier. Ni ça, ni le fouet...

Ni le reste. L'Opale aux reflets carmins, le vieux soldat, son sauveur, sa lanière de cuir bleue serrant avidement la chair tendre de son cou dans une étreinte mortelle, les cris d'agonie des prisonniers, le goût rance et amer emplissant sa bouche à chaque lever de soleil.

Sa main gauche se referme sur son arme, tandis que la droite attrape une pomme au hasard, ce geste ramenant une partie de sa queue de cheval sur son torse. En silence, machinalement, le géant commence à découper un quartier, lequel se verra planté sans plus de cérémonie et offert par dessus son épaule, à cette étrange ondine survenue de nul part.
Breiz24
Elle se taisait toujours, tandis que l'effleurement de ses doigts sur la lettre honnie ouvrait les vannes. L'homme parlait. Et les tressaillements qui agitaient imperceptiblement les muscles de son dos avouaient à la rousse tout ce qu'il taisait.
Elle ne disait rien. Elle absorbait. Il y avait longtemps qu'elle le savait. Elle était une éponge a souffrance.
La douleur l'attirait comme un aimant. Pas pour rien que son époux, trépassant, l'avait nommé Meyre du mouvement. Absorber la souffrance des autres, c'était son travail, l'essence même de son être. Toutes. Du chagrin d'enfant aux genoux écorché au cœur brisé, en passant par celle, écarlate, qu'endure l'homme qu'on ampute.

Lentement, l'homme recommença à bouger. Se saisit de la dague.
Elle, elle avait laissé retomber sa main, glissant comme un souffle le long du dos meurtri, pour aller se reposer dans l'herbe froide, près de l'épée.
Et se relever, à nouveau, pour prendre le quartier de pomme tendu sans cérémonie.
Laissant son fondement choir, elle s'assit en tailleur, là où elle était, et croqua dans l'offrande avant de se dégager à demi de la cape, dévoilant un sein. La tension s'était mue en douleur, et la mère savait que cet élancement était équivalent à celui qui rongeait l'estomac vide de l'enfant.
L'épée toujours à portée de main, elle déplaça donc son fils, le passant de sa hanche à ses genoux. Le bébé, impatient, se lova contre sa mère et s'attaqua à son repas, arrachant à la rousse un grimace. La faim lui faisait oublier qu'il n'avait pas besoin de ses dents pour téter.
Les yeux rivés sur le blond, elle finit par lâcher, platement :


Si tu la hais, la marque, pourquoi ne la transformes-tu pas?
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Milo
Un léger sourire sur le visage lorsqu'il sent la dague légèrement trembler, preuve que le quartier offert a été saisi. Sourire qui s'élargit lorsque le froissement d'un tissu se fait entendre, puis le bruit de la tétée. Il ne répond pas à sa question. Pas encore du moins. A dire vrai, il n'y a jamais pensé. Peut-être parce que, pour lui, cela fait partie de son passé. Et que rien ne peut l'effacer.

Toujours accroupi, il découpe un autre quartier de pomme qu'il se met à mâcher lentement, savourant l'acidité mêlée au sucré. Bercé par les bruits de succion émanant de la bouche de l'enfant, plutôt vorace, apparemment. Il déglutit une dernière fois pour finir son morceau, et pose la dague à terre. Fruit dans une main, il se saisit une à une des brochettes pour les mettre sur les braises rougeoyantes, prenant garde à ne pas faire tomber l'un ou l'autre des pics sous la chaleur du foyer.

Alors, seulement ceci fait, il se retourne, plongeant son regard dans celui de la jeune veuve. Rompant la fragile trêve établit tacitement entre eux, mais il veut comprendre. Sa main droite se tend pour venir effleurer comme une plume le contour de sa pommette, esquissant le menton, pour finir par le lui relever, prenant garde que ses mouvements ne viennent heurter le bébé.


- Et toi, petite mère ? Pourquoi tu ne laisses personne prendre soin de toi ? Il penche la tête sur le côté, Azurs curieuses d'entendre la réponse. Pourquoi tu refuses de vivre ?

Il la retient quelques instants, sondant les Hématites, à la recherche de réponse qu'il ne trouvera que si elle veut bien les lui donner. Mais qu'importe, il connaît le mal qui la ronge, pour l'avoir traîné dans son sillage durant tout ce temps. Et, pour ne pas la gêner plus lors de ce moment intime avec son enfant, il revient à ses brochettes, lui offrant à nouveau son dos, mèches blondes s'élevant sous la caresse de la légère bise.

Les branches décorées sont ainsi retournées, faisant frémir les brandons lorsque le peu de graisse contenue dans la viande se laisse attirer par la chaleur. Il hume avec délice les odeurs de viande cuite venant jusqu'à lui, et reprend sa dague. Coupant une dernière fois la pomme en deux, pour en offrir encore un bout à cette rouquine qui n'est, au fond, peut-être pas si différente de lui.
Breiz24
Toujours la même question. Toujours posée par des hommes. Curieusement, depuis un certain temps, depuis... Depuis qu'elle avait finit par accepter de vivre, il n'y avait plus que des hommes pour poser cette question. Etait-ce parce qu'elle refusait d'offrir son corps qu'elle ne vivait pas?
Elle ne repoussa pas la main qui une nouvelle fois venait effleurer son visage. Laissa les azurs forcer la barrière de son regard. Que me veux tu? Pourquoi es-tu là? Pourquoi fais-tu ça? Me désires-tu? Vas-tu me tuer? Qui es-tu?
Et à nouveau, il se détourne, la laissant pantelante, après que les azurs aient fouaillé son âme.
Et elle, elle se tait toujours. Pourtant, c'est rare. Elle a vite fait de cracher sa haine, la rousse. C'est tellement plus facile de cacher sa douleur quand on se fait détester.
Elle prend la pomme, à nouveau, et la mange en silence. Elle, elle n'avait pas l'impression de ne plus vivre. Elle allait tellement mieux, depuis quelques semaines.


Je ne refuse pas de vivre, l'blond.

Pas vraiment. Pas tout à fait. Il y avait trop de choses à faire pour qu'elle puisse se permettre d'oublier de vivre.
Elle ne rajouta rien. Si son fils n'avait pas été là, elle aurait surement plongé la dague en argent du défunt droit dans son cœur. Elle ne l'avait pas fait. Elle ne le regrettait pas.

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Milo
Un autre sourire timide vient étirer ses lèvres, lorsque l'autre quartier est pris. Au moins ne lui en a-t-elle pas voulu, pour avoir rompu l'espace de quelques battement de cœur l'armistice passée en silence. Ses doigts continuent de s'agiter au dessus des braises, tournant le bois pour éviter de faire rôtir le repas de ce midi.

Il rince de nouveau sa dague, autant pour éviter que le jus du fruit ne lui colle après les doigts que pour la reprendre pleine de terre, avant de se rincer le gosier à son tour, puis de mettre l'outre à son côté, des fois que la veuve ai une petite soif. Il attrape la couverture restée non loin pour la mettre sous ses fesses et s'assied enfin en tailleur. Azurs qui observent les braises pendant quelques minutes, en silence, après qu'elle lui ai répondu.


- Vraiment ? Alors pourquoi laisse-tu les autres fouler ta fierté ? Il frissonne lorsqu'un courant d'air glacial vient lui fouetter le visage, tandis qu'il remet sa dague dans son fourreau. En ce cas, pourquoi dis-tu que ton fils est orphelin ? Il jette la tête en arrière et observe un instant le ciel, plissant les yeux sous les rayons du soleil. Pourquoi est-ce que tu culpabilises ? Il est mort. Rien ni personne ne pourra te le faire revenir. Ton fils portera peut-être ses traits, son caractère... Mais il ne te reviendra pas.

Il fronce les sourcils et revient à sa nourriture, la tournant encore une fois, se penchant pour souffler un peu sur le foyer qui perd de sa vigueur. Il ne comprend pas, pourquoi la sonorité de sa voix lui paraît rauque. Non, décidément, il n'est plus habitué à utiliser cette voix sans manger les « e », chose que le soldat détestait au plus haut point.

- Il remonte à quand, le matin où tu t'es levée sans cette chape de plomb sur le cœur ? Il remonte à quand, ce soir où tu as su que tu pouvais t'endormir sans peine, où tes démons te laisseraient tranquille ? Elle remonte à quand, la dernière fois où tu as ris, peut-être jusqu'à en pleurer ?

Toute ces questions, il se les est posées. Le doute, la tristesse de se lever chaque matin sans l'autre à ses côtés, il connait. Ce poids qui parfois amène jusqu'à des pensées morbides, il l'a effleuré. Trop souvent. Et puis, il s'est souvenu de cette demande, tandis que les Emeraudes au ventre rond se ternissaient. Vis ta vie, même sans nous, autre chose est possible. Même sans elle... Même sans leur enfant.

- Il ne reviendra pas, rouquine... Mais peut-être ne souhaiterait-il pas te voir dans cet état...
Breiz24
J'ai ri pas plus tard que ce matin, l'homme. Oui, ce matin, en voyant le regard torve de mon cheval quand mon fils l'a réveillé par une grosse claque sur les naseaux suivie d'un tambourinage absolument cocasse sur son ventre. Le regard qui dit "heureusement qu'il est à toi, sinon d'un coup de sabot je l'envoyais entre les poteaux du terrain de soule".

Je n'ai pas non plus dit que je laissais ma fierté se faire piétiner, et je n'ai pas non plus dit que je culpabilisait. j'espère bien que c'est lui qui culpabilise, il est en train de reluquer le cul des anges pendant que je me dépatouille avec le merdier qu'il m'a laissé!
Tu vas vite à tirer des conclusions, l'homme...


Elle se tut. La chape de plomb, elle connaissait. Que trop bien. Le sentiment de ne vivre qu'avec la moitié d'une âme, tronquée, bancale, presque surprise de marcher sans pencher sur le coté. Cette affreuse souffrance causée par la négation d'une présence.
Oh, oui, elle l'avait fait, son deuil. ça avait été long, ça avait été lent, mais elle avait fini par admettre sa mort. Et surtout, elle avait fini par admettre qu'elle pouvait continuer à vivre même sans sa présence rassurante.
Certes, tout était plus difficile, plus incertain, plus sombre, comme marcher seul une nuit sans lune. Mais elle avait fini par accepter de se cogner à la vie à nouveau.

Le silence, à nouveau, s'installa entre eux, troublé seulement par les bruits de succion de l'enfant et la graisse qui grésillait sur le feu. La veuve, penchée sur l'enfant, offrait son épaule nue au vent qui se levait. Elle n'avait jamais froid. La légère bise hivernale soulevait les mèches rousses, achevant de les sécher.
Le bébé s'endormait, mais sa mère, courbée vers lui, s'en rendait à peine compte. Son attention était rivée au blond, et à ce silence, entre eux. Silence qu'elle ne se décidait pas à rompre.

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