La jeune femme était seule ces temps ci. Oh non, entouré en taverne, elle ne pouvait dire le contraire, mais seule, à l'intérieur. Ses amis les plus proches partis en voyage, elle se retrouvait a Muret, a faire des rencontres très intéressantes et divertissantes, mais sans vraiment d'affinité déjà créée. Dex et kauka, pat et ela, veronne et alba et surtout kayth lui manquaient... Certains pourtant étaient encore à Muret, d'autres sur les routes, depuis plusieurs jours, ou depuis peu. Mais sans eux, la jeune femme se sentait seule. Surtout après les derniers événements.
Elle aurait aimé voyager un peu elle aussi. Elle avait même eu la proposition d'un garde du corps. Pourtant elle n'était pas prête alors, a refaire confiance a un homme. Même à un garde du corps. Tous les mêmes se disait-elle. Alors, pour se changer les idées elle s'était dirigé vers le lac.
Sur le chemin, elle avait laissé ses pensées vagabonder au gré des dernières rencontres, des derniers événements, et des bourrasques de vent. Puis, en arrivant près du lac, elle ralentit son allure de marche, comme toujours. L'eau au loin était calme. Le soleil se couchait lentement a l'horizon. Elle s'approcha du bord de l'eau et retira ses chausses. Les laissant là, sur le sol, elle marcha un peu, pied nu, longeant la rive du lac, contemplant l'horizon.
Puis, après quelques pas, elle s'assit sur le sol. Le soleil descendait, laissant peu a peu place a la lune. En croissant. Une lune a croquer. Ana s'allongea alors sur le sol, genoux repliés, et laissa son regard admirer les étoiles qui apparaissaient lentement. Des points brillants au loin. De petites larmes lui montèrent aux yeux, qu'elle parvint a retenir. Non, plus jamais elle ne pleurerait la brunette. Plus pour personne. La décision était prise. Sortir son coeur de son enveloppe corporelle, et l'enfermer dans une boite en métal, fermées a quadruple tour. Elle ne voulait plus souffrir. Oh, des hommes, elle en croiserait, elle en embrasserait surement. Mais aimer, alors ça... non. Elle voulait se servir d'eux comme ils se servaient souvent d'elle. Prendre, utiliser, consommer, et jetter. Sans cérémonie, sans doute, sans émotion.
Sa décision était prise. Elle serait plus sauvage que jamais. Toujours aussi taquine, aussi joyeuse, du moins avec un sourire de façade permanent. Ce sourire qu'elle savait si bien utiliser. Ce sourire qui lui allait même bien. Elle serait toujours aussi attentive, mais plus distante. Le choix était fait. L'apprenti jeune femme rejettait son maître la douleur sans nulle autre interrogation. Se protéger. Elle devait se protéger. Personne ne la protégerait de toute façon. Elle constatait toujours que les Hommes étaient bien étranges. Ils aiment être écouter, mais n'aiment pas écouter les autres. Les hommes étaient a sens unique. Et c'était toujours le même qui donnait a l'autre. Sauf rares exceptions. Elle avait une amie fidèle, partit hier en voyage, qu'elle savait différente. Une amie sensible qui avait vécu nombres désillusions également. Pourtant souvent, elles se disaient beaucoup de choses les deux femmes. Pas de mensonges, pas de jugements. Une amitié comme Ana en recherchait.
Elle resta allongé, a regarder les étoiles qui lui donnait des inspirations philosophiques, frissonnante, en attendant que peut être quelqu'un la découvre là, ou que la nuit passe et que le jour suivant se lève. Elle attendait en chantant, doucement, de sa voix fluette, sa berceuse d'enfance, comme pour retrouver ses racines, sa nature:
La nuit est limpide,
L'étang est sans ride,
Dans le ciel splendide,
Luit le croissant d'or.
Orme, chêne ou tremble,
Nul arbre ne tremble,
Au loin le bois semble
Un géant qui dort.
Chien ni loup ne quitte
Sa niche ou son gîte,
Aucun bruit n'agite
La mare au repos.
Alors, dans la vase,
Ouvrant en extase
Leurs yeux de topaze
Chantent les crapauds