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[RP] Petite balade en eau trouble

Sorianne
Sa sœur. C'est ce qu'elle avait trouvé comme excuse pour pouvoir s'échapper de son quotidien et venir retrouver une fourmi et un chirurgien inquiet. Il ne lui fallait plus que la bénédiction du curé sous la coupe duquel elle se trouvait, ne serait-ce que pour avoir la conscience tranquille. Oh elle lui avait promis ce qu'il voulait s'il la laissait filer les quelques jours qu'il lui faudrait. Aider sa sœur... Une excuse comme une autre, puis s'il les voyait toutes les deux, il ne pourrait pas vraiment trouver à redire... Petite taille, des cheveux de jais... C'était faisable...

So sortit de nouveau le courrier caché au milieu des plis de ses jupes. Les pommettes rougirent à nouveau à la lecture. Il fallait bien dire que le souvenir du Maure était des plus chaleureux... Non content de l'avoir plongé dans du coton pour la recoudre, il avait su lui tourner les sens rien qu'avec un regard... Ce jour là au bord du lac, si elle n'avait pas été retenue par les liens qu'elle essayait de maintenir avec Colhomban, par le souvenir cuisant d'un prêtre au dessus d'elle et par le fait que LUI il soit parti... Pouf, elle s'empourpra. Si le prélat arrivait maintenant et qu'il la voyait ainsi, nul doute qu'elle aurait droit à une remontrance... Peut-être pire. Elle préféra éviter de penser à quoi s'en tenir s'il mettait la main sur le pli d'ailleurs...

L'Asile. Petite taverne discrète de Craon. Elle s'y glissa et ce ne fut pas une surprise de n'y voir personne. Le jour où elle verrait quelqu'un dans ces tavernes... Un soupir et plongeant dans sa besace, elle en ressortit de quoi rédiger une réponse. Le zoizeau magique qui lui avait amené le courrier se trouvait au pigeonnier, il suffirait de remettre la main dessus. Accoudée à la table devant un vélin propre et pas trop froissé, la noiraude relut une énième fois le courrier. Elle avait cherché aussi à en savoir plus sur ces Princes qu'elle ne connaissait point. Et ça ne semblait pas rassurant... On lui avait toutefois apprit une chose plus qu'utile : c'était à Paris!




Achim al Qasim ibn Farad


Fiou...

Oué, ça c'était du nom. Et elle prit bien soin de relire un nombre de fois incalculable tout en comparant avec la signature, afin d'être sûre de ne pas avoir oublié une lettre ou de ne pas s'être trompée dans l'ordre de celles ci.



Voilà un nom bien dur à prononcer, et encore plus à écrire! Pardonnez moi de l'avoir ébréché la fois dernière... Je n'ai pas vraiment eu l'occasion de... Enfin non, oublions.

Vous me parlez de moi, vous me parlez de Fourmi. Mais et vous? Racontez moi!

Je ne vous en veux pas pour la dernière fois à Montauban. A dire vrai, je crois même que c'était bien mieux ainsi. Et si la dernière fois que je vous ai écris, je vous ai dit regretter (ce qui n'est pas foncièrement faux), c'était surtout parce que mon fiancé venait de m'annoncer qu'il valait mieux mettre un terme à nos liens. Seulement, même si vous étiez resté et que j'avais été aussi libre que le vent à ce moment, je ne suis pas sûre que tout ce serait déroulé comme dans un rêve... Peut-être serait-ce différent maintenant. Je n'en ai aucune idée en fait...


Oui, comment serait-ce maintenant? Avait-elle encore ce maudit blocage qui lui avait valu la perte de son fiancé? Fuirait-elle encore un contact trop rapproché? Elle n'en savait rien, se contentant de se débattre vainement et avec de moins en moins de conviction, sous les assauts de son bourreau... Une moue perplexe s'afficha, et le nez se fronça en un air contrarié et dégouté. Comment pourrait-elle s'épancher sur ce sujet? Comment pourrait-elle penser une chose et faire le contraire, ou vis versa...? Impossible...



Concernant Dieu et les péchés qu'il tolère ou non... Je vous avoue que je préfère ne pas m'étendre. D'autres ont tenté de m'ouvrir les yeux à ce sujet, mais il a le don de m'embrouiller l'esprit au point que j'en oublierai presque mon nom. Je sais d'ores et déjà que je suis condamnée à la Lune pour des millénaires, aussi je fais de mon mieux pour que mon enfant ait sa place au Soleil. Du moins je m'y emploie... Du mieux que je peux... Même si j'ai bien du mal à écouter les conseils prodigués pour ce faire.


Et bien du mal à obéir. Et du mal à se soumettre. Et du mal à se laisser manier comme une vulgaire poupée... Au grand Dam du Père Scopolie qui allait bientôt trouver un remède à tout ceci à l'insu de la noiraude.



Fourmi... Je ne connaissais pas ces Princes de Saint Martin dont vous avez parlé. J'ai cherché de mon côté et comme vous, j'ai deviné que ce n'était en rien rassurant. Ainsi c'est là qu'elle se rendait. Elle m'avait parlé de... Frères? Si ma mémoire ne me fait pas défaut? J'ai naïvement pensé que ce n'était rien... Même si son au revoir sonnait comme un A Dieu...

Je vais être bien impuissante à la protéger malheureusement... Et je me sens des plus inutiles maintenant. Je peux essayer d'écrire au colosse dont elle a parlé. Essayer de le convaincre... Et je vais essayer de me libérer afin de monter à Paris... Y êtes vous? Je n'y suis allée qu'une fois et ne connait rien de la capitale. J'aurai tôt fait de me perdre et de disparaitre dans un quelconque trou à rat.

A deux, nous pourrions peut-être la convaincre de ne pas faire de choses qu'elle pourrait regretter... Au pire je la distrairai pendant que vous en profiterez pour l'assommer. Attachée pieds et poings liés, elle ne pourra pas aller bien loin. Encore moins dans les griffes de Princes quel qu’ils soient...

J'espère vraiment pouvoir venir rapidement...
Et peut-être même recroiser votre route...
Et qu'elle ne fasse pas de sottises...
Et... Je vais stopper là.

A bientôt.

So


Inutile de rajouter ses fonctions, ce serait pitoyable... Bergère, tisserand... Ex toussa bien sûr... Oui oui, évitons. Mais d'écrire tout ceci avait un impact curieux sur la demoiselle... Une angoisse qui lui montait dans la poitrine. Un mauvais pressentiment qu'elle sentait enfler malgré elle. Rassemblant les affaires éparpillées autour d'elle, la petite boiteuse se couvrit rapidement avant de sortir de la même façon. Il fallait que le courrier parte, ça n'avait que trop trainé.
_________________
Achim_al_quasim


Paris.

Sorianne… Il y pensait depuis l’Anjou. Depuis cette brève rencontre sous la tente en bordure de champ de bataille. Petit bout de femme, battant le chaud puis se glaçant soudain lorsque s’était profilée une situation plus sensuelle à Montauban.
Il l’avait laissée partir. Pour mieux lui revenir peut-être. Et il songeait à répondre à sa dernière lettre depuis des semaines. Mais accaparé par ses allées et venues dans la noirceur parisienne, il avait repoussé à chaque fois.
Pas cette nuit où la chaleur soudainement tombée sur la ville l’écrase. Pas ce soir où la puanteur remonte et agresse encore plus ses sens.



Citation:
Sorianne,

Malak,

C’est sans doute Manat* qui fut à l’origine de notre rencontre. C’est ainsi. Et je n’y puis rien. Je rêve du jour où vous me permettrez de vous souffler à l’oreille quelques vers de poésie, où je pourrais sans vous effrayer déclamer ainsi :

Laissons là, ô mon cœur les promesses, jouissons de l'instant.
Hier n'est plus, demain est indistinct, dans l'instant est la félicité.**


Votre fiancé était un sot, et aucun homme digne de ce nom ne vous aurait abandonné. Je n’en dirais pas plus, il m’est étranger et tant mieux. Vous seule m’importez.

Vous semblez résignée à ce qui pour vous apparaît comme l’enfer ; je ne puis me résoudre à penser qu’une créature d’une telle délicatesse y soit condamnée. Quant à votre fille, elle tracera elle-même sa destinée n’ayez aucun doute à ce sujet.

Avez-vous écrit à ce sinistre individu auquel Fourmi semble tellement tenir ? Saurait-il l’arrêter dans son projet insensé ?

Pour ma part, je passe mon temps à étudier cette faune crasse et répugnante des bas fonds de ce que vous autres appelez capitale. Il règne une telle misère dans ces quartiers que l’un serait capable d’égorger son voisin pour une vieille paire de chausses ou un pain à demi moisi.

Vous me dites avoir pris quartier dans une zone plus respectable. Tenez-vous-y. Ne vous risquez pas à tenter l’improbable et courir au devant du danger dans un vain sauvetage. J’en serais très fâché si je devais m’inquiéter pour vous deux en même temps.

Il fait nuit noir et ma chandelle commence à faiblir.

Je vous fais la promesse, ma tendre aux yeux d’émeraude, de vous écrire plus longuement la prochaine fois.

Et rappelez vous, ces mots pleins de sagesse du poète Nassimi, à qui j’emprunte pour l’occasion :

Chacun saura qu’il n’y a de Dieu que nous le jour où nous dévoilerons notre face.***

Votre serviteur,

Achim al Qasim ibn Farad


Il clos le pli, soudainement las. Cette chaleur humide et moite l’indispose légèrement, tout ici n’est que laideur et pourriture. Il est resté délibérément vague dans son courrier, évitant de dire que s’il espère qu’une gigantesque brute vienne assommer la fourmi pour lui remettre les idées d’aplomb, il espère tout autant s’en débarrasser par la même occasion et tirer les honneurs à lui. Il n’est qu’un homme après tout. Et l’idée est séduisante de pouvoir se défaire des importuns afin de conserver toute l’attention des deux brunes.
Le regard perdu dans l’immensité du ciel depuis qu’il a refermé la porte sur l’enfançon en charge de porter la missive contre deux piécettes, il fume, tirant sur son shamshir pour en recracher de longues volutes opaques.




*: Déesse du Destin
**/*** : Saiyid Ali Imad-ad-din Nassimi 1369-1417
Sorianne
Il faisait une chaleur moite, insupportable, et la noiraude s'était cloitrée dans la chambre de l'auberge parisienne, hésitante encore quant à aller trouver ce quartier des pires que l'on pouvait trouver en la capitale. C'était là que comptait aller se perdre la Fourmi puisque c'était là que le prélat lui avait dit que ce trouvaient ces Princes... En attendant de savoir ce qu'il convenait de faire, la So relisait le courrier du chirurgien, étendue en travers du lit loué et essayant de se rafraichir à l'aide d'un bout de parchemin fichu.

Se retournant, elle attrapa de quoi écrire, bougeant le moins possible et se lança. Aucune réflexion, à quoi bon... Puis elle dirait ce qui lui passerait par la tête...




Achim,

Je ne sais pas ce que ces surnoms veulent dire, mais j'imagine que ce sont de doux mots à entendre. Vous avez réussi à me faire sourire, et pourtant le Très haut sait que c'est difficile maintenant... Merci.

Les vers sont très beaux. Et si seulement ils pouvaient être vrais... Et m'effrayer... A dire vrai, si je suis résignée pour la Lune, je le suis pour beaucoup de choses... Je ne suis pas certaine que la prochaine fois se déroule comme à Montauban où j'étais toujours liée à mon fiancé même si ce n'était qu'en paroles... Lui aussi avait eu à subir une fuite de ma part... Je sais ce que ça pouvait bien faire... Et je préfère ne pas y penser...

Notre rencontre... Je ne sais pas ce qu'est un manat, mais s'il a été à l'origine de notre rencontre, la guerre n'y était pas non plus étrangère. Je rougis encore au fait que vous m'ayez fait lever chemise, et admire encore votre dextérité et votre délicatesse quand vous avez soigné Fourmi. J'ai du mal à croire qu'un homme puisse-t-être à ce point... Le mot m'échappe, la chaleur sans doutes. Je redoute les orages à venir... Sans doutes que je détaillerai mieux le dessous de la table de la chambre quand ils éclateront...

L'auberge est coquette, simple et dans un coin calme de la Capitale. Je ne vous cacherai pas que j'ai cherché à savoir quel était ce quartier que vous étudiiez. Qu'y apprenez vous d'ailleurs? Qu'y a-t-il à voir? J'avoue que je me trouve bien lotie d'être née dans un village loin de Paris, même si je m'aperçois dépareiller totalement ici. Peu importe... Je ne mentirai pas non plus... J'hésite grandement à aller voir de visu. Ne serait-ce que pour essayer de vous y trouver. Cela ne peut pas être si terrible... Sans doutes pas autant que ces "princes" à la sinistre réputation...

J'ai écris au Géant... J'ai écris à Crokie... Je l'imagine au courant, mais jamais il ne prend la plume, sans doute trop fragile dans ses mains gigantesques. Je me souviens encore du coup qu'il m'a donné... Il serait capable de vous arracher la tête d'un coup de ces battoirs, pour sûr! Je me dis que je devrais lui demander de recommencer... Peut-être même devrai-je lui demander de ne pas s'arrêter... Vrai... J'ai parfois envie que tout s'arrête, ce serait tellement plus simple...

Je me rends compte écrire des choses que je devrais taire... Je vais arrêter là, le temps délie la langue il faut croire... Pensez vous que nous nous reverrons bientôt? ... A errer seule ici, je me rends compte que la solitude est pesante... Et que je suis entreprenante... Heureusement que personne ne lira ce courrier, sinon sans doutes aurai-je écoper de mille ans de plus sur la Lune... Oh il faut que j'arrête là, c'est mieux...

"Chacun saura qu’il n’y a de Dieu que nous le jour où nous dévoilerons notre face."
... Ils sont gravés.

J'espère ne pas trop vous fâcher si jamais je venais à aller chercher un chirurgien à la peau sombre dans des rues miséreuses... C'est que je commence à me demander pourquoi je suis montée ici, à part pour échapper au quotidien trop pesant...

En espérant....

So.


Avec difficultés à s'extraire de la paillasse, écrasée par la lourdeur ambiante, la jeune femme prit tout de même sur elle de se vêtir un peu plus décemment pour aller porter son courrier au gamin à qui elle avait demandé de revenir... Retour à l'envoyeur...
_________________
Ny.x



Là.

Omnisciente.
Omniprésente.

Elle règne au dessus des nuages, par delà le visible et l'invisible.
Sélène et Hélios qui s'inclinent devant elle au moindre battement de cils.
Créatrice de vie, destructrice de mondes, elle contemple l'Univers et ses palpitations, s'amuse à contempler ses Enfants dans leurs joies, leurs peines, leurs erreurs...

Il y a toujours ses Enfants...
Et les autres.

Telle l’Arachnide qui ourdit, comme toujours, pavant sa route, damier de terre et de sang avec une ardeur sans cesse renouvelée, presque émouvante de naïveté.

Dans son sillage, ils suivent, certains croient même lui commander, pauvres fous, pauvres pions sur l'échiquier.

Les régnants passent et se suivent, embrassent le pouvoir et s'y vautrent jusqu'à se perdre dans la cacophonie ininterrompue des courtisans prêts à se vendre pour une once d'autorité...

Corruption des cœurs et des âmes, immuable constante de cette humanité vagissante qui s’extasie pour quelque poudre aux yeux pourvu qu’elle brille.

Orgueil et cupidité battant pavillon haut, signes précurseurs d’une décadence presque recherchée tant elle en est rampante, sinueuse comme les méandres d’un cloaque infect et savamment saupoudré de cliquant.

Parodie burlesque, succession de ducaillons en haillons, caquetant clair le temps d’un battement de cils avant que de s’illusionner sur leur gloire passée, si futile.


Plus loin, dans l’ombre silencieuse Léthé glisse peu à peu, laissant l’étau étreindre son cœur de ne savoir se dessécher, l’oreille attirée par le chant de ses Frères, cherchant à retrouver la douceur de bras accueillants, la chaleur d’Hypnos, l’ivresse du souffle de Thanatos.

Là bas, les Princes balbutient, hésitent, peinent à reprendre leur place, tâtonnent dans cette Cour agonisante, surannée pantomime du Mal aux acteurs superficiels et


Qu'importe le temps,
Qu'importe les hurlements silencieux et le fracas des armes,
Qu’importe le courage ou le renoncement,

Un à un, ils oseront traverser le feu et l’eau,
Un à un, ses Enfants affronteront les abîmes,
Un à un, ils contempleront leur étincelle s’amenuisant, jusqu’à vaciller avant de disparaitre,

Et un à un, ils viendront,
Reviendront,

Au chaos originel,
Au Primat,

A Elle.
Sorianne
A l'abri de sa chambre Saumuroise, au coin d'une cheminée où brûlait un feu joyeux, la noiraude se trouvait allongée en travers du lourd fauteuil qui trônait là. Les genoux soutenus par l'accoudoir, le dos par l'autre, elle avait sur ses genoux, de quoi rédiger un courrier. Oh elle ne s'attendait guère à une réponse, bien que...

Citation:
Achim, (j'ai réussi à l'écrire sans erreur je crois)

Voilà longtemps que je n'ai pas eu de nouvelles de vous.
J'espère que vous vous portez bien et que Paris vous sied mieux qu'à moi.
La vie n'est pas trop dure, à la Capitale?

Je m'ennuyais...
Je me suis dit qu'apprendre les plantes pouvaient être utile, et Gaelante, la vieille femme qui m'a recueillit un temps en connaissait beaucoup, mais nos routes se sont séparées avant qu'elle ne m'ait appris réellement.

Je n'ai pas encore commencé vraiment.
Il faut dire que le domaine est vaste et que l'homme chargé d'accueillir les futurs apprentis m'a laissé me démener seule pour aller trouver un herboriste...
J'avoue avoir un sens de l'orientation deféctueux mais heureusement, l'herboriste est venue à moi.
Je n'ai aucune idée de ce que cela va pouvoir donner.
C'est à tenter tout de même.
Au moins, c'est apaisant.

Depuis plusieurs semaines, je suis seule...
Libérée, si je puis le dire de cette façon.
Un fiancé qui m'a écrit qu'il ne voulait plus entendre parler de moi...
Ma fille qui a été confiée à ses bons soins...
Le prélat qui m'a chassé...

Je retrouve une certaine quiétude... Même si c'est difficile.
En tous les cas, j'espère vous revoir un jour.
Peut-être m'apprendrez vous à tenir les instruments que vous m'avez fait tenir quand il avait fallu soigner une Fourmi mal en point.

Que le Très haut vous garde.

So.

_________________
Achim_al_quasim




Paris.


Des mois qu’il est là, à observer la fange parisienne, lie de l’humanité qui se vautre dans sa crasse immonde et puante. Il s’oublie dans les volutes épaisses de son shamshir autant qu’il a perdu celui dont il pensait pouvoir tirer avantage. Rien d’autre que des allées venues sordides, bécasses sordides et braillardes escortées de brutes décérébrées dont il sautait aux yeux qu’ils étaient tous soudés par une conscience limitée de leur environnement. Ceux là, bien que bruyants, ne l’intéressaient que fort peu.
Un rond de fumée s’envole au dessus de sa couche où il se tient, alangui le regard posé sur les courriers de Sorianne. Le dernier, plus qu’un appel au secours est un cri de détresse. Et son instinct reprend lentement le dessus. Gestes lents, il se lève pour aller à la fenêtre. Une autre bouffée vient remplir ses poumons, longue, calculée comme il en connait chaque effet ; avant d’être expulsée en un trait fin et qu’un grondement léger ne résonne dans sa gorge.
Ecume posée sur le bureau, une main brune va reprendre la lettre. Il relit et gronde encore avant de reposer le vélin d’un geste sec, son poing heurtant le bois et faisant tressauter l’encrier. Signe du Destin… Plume prise, il avise et pèse ses mots.



Citation:


Malak,

Ma tendre, ma douce gazelle… Je ne sais ce qui a provoqué pareil émoi en vous. Il est plus que temps que Manat enfin permette à nos âmes de se rejoindre. Le temps s’est assez joué de nous, et il n’est plus question que vous soyez seule et effrayée.
Une fois encore je vais vous citer poète de mes contrées dites barbares et vous serez seule juge.

J'entends dire que les amants du vin seront damnés.
Il n'y a pas de vérités, mais il y a des mensonges évidents.
Si les amants du vin et de l'amour vont en Enfer,
Le Paradis doit être vide. *

Il n’y a pas de vie sans amour et peu importe leur durée tant qu’ils sont sincères. Epousez moi… Osez risquer de vivre. Nul ne vous atteindrait plus à l’abri de mes bras. Epousez moi… Et prenez à loisir tout ce que je pourrais vous offrir de caresses, réconfort et apaisement de l’âme. Nous brûlerons d’un même feu, quitte à ce qu’il nous consume. Epousez moi. Je ne puis croire plus longtemps que Manat avait un autre but lorsque nous nous sommes rencontrés que celui-ci.

Je vais attendre votre réponse, languissant, ma flamme solitaire résignée… A s’éteindre ou à s’illuminer.

Votre dévoué,

Achim al Qasim ibn Farad.



Il a pesé ses mots en dépit des apparences. Même s’il craint de l’effrayer il sait qu’il est temps pour elle de se sauver la vie.
Le pas décidé il ouvre la porte de sa chambre et appelle d’une voix grave l’enfançon qui sert de messager en ce lieu de décrépitude totale. Velin roulé, pièces glissées en main et menace à peine voilée de lui couper et d’en faire payer le prix surtaxé à ses logeurs de parents si le courrier n’arrivait pas. La porte claque et il retourne à la fenêtre observer les étrangetés de la Cour des Miracles. Bientôt il lui faudrait sortir et se révéler.



*Omar Khayyam
Sorianne
La chambre louée, dans un piteux état, So, calmée, avait retrouvé la froideur du mur contre lequel elle s'était de nouveau laissée glisser. Il lui fallait trouver les mots pour répondre à Achim. Était-elle seulement prête à ça? Le chirurgien était doux, attentif, il veillait... Elle pourrait l'aimer si elle le voulait ou réapprendre à le faire. Est-ce que le sort allait de nouveau s'acharner? ... Elle s'était attendue sans doutes à tout... Mais point à cela. Fatiguée de trop chercher, lasse de lutter et de voir un tas d'idée lui tourner la tête, la noiraude se lança dans la réponse qui devait maintenant se faire attendre depuis trop longtemps...

Citation:
Achim...


... La pointe restait en suspend au dessus du vélin qu'elle avait posé sur les genoux. Que dire? Le dernier courrier qu'elle lui avait envoyé avait été rédigé dans un moment de détresse. Tout juste si elle se rappelait ce qu'elle y avait mis. Quelle réponse apporter? ... Elle ferma les yeux et eut une pensée émue pour Colhomban. Il ne comprendrait sans doutes pas et elle ne pourrait lui en vouloir... Mais au point où elle en était... Mieux valait pour elle trouver une nouvelle vie à vivre, aussi hérétique soit-elle. Un soupir à fendre l'âme s'éleva. Il lui fallait apporter une réponse.

Citation:
Je ne sais pas si le chemin que vous avez choisi est le bon.
D'autre s'y sont essayés et des embûches interminables se sont dressées.
Je suis roturière... Souillée de bien des façons par des hommes aux pouvoirs importants...
Je ne veux pas être le boulet que vous traînerez.
J'ai peur... Le Très Haut ne me le pardonnera pas.

Si toutefois vous étiez sincère... Et que je ne vous rebute pas... Que vous y tenez réellement... Alors...
Que votre flamme se résigne à s'illuminer...

So.

...
Je veux vous voir... J'ai besoin de vous voir... J'ai besoin de vous, je vais devenir folle...


Penchée sur le vélin, la jeune femme ne savait quelle conduite tenir. Elle sentait la raison lui faire défaut, mais luttait contre ça. Il fallait qu'elle s'en sorte, ne serait-ce que pour tenir cette promesse faite à celui qui était Avarice... Seule, elle ne le pourrait jamais... Achim à ses côtés, tout serait plus facile... Elle en était certaine...

Ô Trés Haut, Ô Seigneur, je t'en prie... Je t'en supplie, ne place rien sur notre route, je t'en prie, pas cette fois...
_________________
Achim_al_quasim



Le geste empreint d'une nervosité à peine voilée, le chirurgien avait presque arraché le vélin de la main tendue. Le gamin n'avait même pas attendu la piécette en retour, trop heureux de retrouver ses vieux en vie et de détaler dans l'escalier...
Le pas lourd sur le plancher de bois qui crie à chaque enjambée, il retourne scruter la rue. Il a vu silhouette s'infiltrer dans l'antre infernal, sans pouvoir être certain que c'était bien elle. Autant dire qu'il enrage. Des semaines d'attente pour rien.
C'est presque machinalement qu'il déroule le parchemin avant de trouver l'attention nécessaire pour le lire. Au fil des mots l'irritation fait place à une sorte d'impatience chaleureuse dans les reins et c'est avec un grondement satisfait dans la gorge qu'il achève sa lecture.
Il se passe des heures avant qu'il ne réponde, pesant moins ses mots que la fois précédente.


Citation:
Sorianne,

Ma douce, ma tendre malak, vous ne pouvez savoir combien votre réponse a fait éclater mon coeur d'un bonheur sans fin. Bien que je craigne de sentir derrière vos mots une once de doute.

Dois-je encore vous répéter que je me moque du passé, que je m'emploierais seulement à travailler pour notre présent et notre avenir ?
Vous vous demandez si la route que j'emprunte est bonne. Elle n'est que celle du coeur, sincère.

Mais je refuse d'être votre choix par dépit ou par défaut.

Epousez moi. Faites ce choix librement sans penser à hier ou à vos cicatrices. Epousez moi pour tout ce qu'il y a de bon en ce monde. Epousez moi vraiment.

Je reste votre dévoué serviteur, en attente de vous.

Achim al Qasim ibn Farad.


Il beugle dans l'escalier et n'a même pas besoin de réitérer ses menaces au gamin, son visage peu amène suffit à faire comprendre que son état d'esprit est inchangé. Il glisse cependant quelques écus pour la route dans la mimine tremblante, pour s'assurer en outre que le coursier arriverait en vie.

La mine sombre, il retourne à sa fenêtre, tirant sur son shamshir de longues bouffées agacées.
Sorianne
So déambulait sans but aucun, à travers ces venelles Saumuroises. Tout juste si elle faisait attention à ce qui l'entourait, toute à ses pensées. Plus tôt, la noiraude avait reçu réponse à ces courriers échangés. Un soupçon de culpabilité l'avait envahi. N'était-ce pas là l'occasion de se sortir de ce gouffre qui l'avalait petit à petit? C'était également aller à l'encontre de tout ce que lui avait rabâché le clerc avec qui elle avait vécu. Rejeter tout ce pour quoi elle avait subit. Que de temps perdu, et que de gâchis... Faire de mal à Col, d'autant plus... Une grimace douloureuse vint prendre place sur le visage fatigué...

Les pas de la jeune femme la menèrent finalement à l'auberge d'où elle était partie. Elle en poussa la porte avant de remonter doucement à la chambre où elle logeait. Refermant derrière elle, So se baissa afin de ramasser l'un des morceaux de ce qui fut un broc et qui avait crissé sous la porte. Ils retrouveraient sans doutes encore longtemps, de ces morceaux éparses.

Le lourd manteau fut retiré et posé en douceur sur un coin de lit, les bracelets le rejoignirent et les bottes également, après avoir prit le temps de les délasser. Elle prit de quoi écrire, et le confort moelleux des oreillers de plumes fut délaissé, au profit de celui plus rustre du fauteuil qui trônait devant la cheminée.

Assise en travers du fauteuil, la jambe tendue et posée sur le bras du siège, sa hanche se faisant douloureuse avec le temps qui se refroidissait, la brune réfléchissait à la réponse à apporter. Elle ne voulait blesser quiconque. Les yeux furent clos un instant tandis que la tête roulait doucement sur le dossier. Pourquoi tout était-il si compliqué...? Rouvrant les yeux, So commença sa rédaction. Elle avait tant de fois lu les courriers, que le nom, si compliqué soit-il, fut écrit sans même un nouveau regard sur les courriers précédents.



Citation:
Achim al Qasim ibn Farad.

Choix par dépit? Choix par défaut?
Vous êtes pratiquement le seul en qui je puis encore avoir un tant soit peu confiance. Le seul qui ne m'ait jamais trahi...

Je doute... Par peur.
Chaque fois qu'ont été prononcé ces mots, un malheur est arrivé. Et j'ai peur que cela ne recommence, encore, et de vous perdre vous aussi parce que le Très Haut se sera mis sur notre route...
Le Très Haut ou quelqu'un d'autre...

Je ne veux surtout pas qu'il vous arrive un quelconque malheur...

Je doute... Par méconnaissance.
Mais je veux apprendre. Je veux Réapprendre...
Combien s'épousent sans se connaitre vraiment? Parfois, ils se découvrent un amour sans faille et sans limite...

Je ne veux plus aimer. Aimer est trop douloureux.
Mais comment expliquer ces sentiments que vous savez faire naître au creux de mon ventre? Le Père Scopolie parlerait de luxure, et d'envie. Je ne sais plus...

J'ai fais une promesse à un Démon, cachée à l'ombre du Dolmen de Saumur. Je suis résignée, mon âme est damnée. Mais j'ai promis de vivre. J'ai promis d'être heureuse et de ne plus penser au passé. Je n'y arriverai pas seule... Le passé refaisant surface sans prévenir.

Vous voulez que je vive... Que je sois bien.
Je veux faire taire ces voix et ces pensées.
Il n'y a qu'à vous que j'ai fais appel lorsque ces dernières allaient gagner.

Je doute... Parce que je ne me sens pas digne de vous.
Je doute... Parce que c'est faire souffrir un homme qui en a fait beaucoup pour moi, et ce même si j'ai perdu son amitié elle même...

Et pourtant, je veux réapprendre, je veux revivre... Vous êtes le seul en qui j'ai confiance, le seul avec le Diable incarné.
En dépit de ces Dieux différents, de ces couleurs de peaux qui ne se ressemblent guère...
En dépit de tout ce que pourrait penser le prélat qui me donnait ces leçons et de tous les autres qui jugeront...

Je n'ai aucune idée de comment tout va pouvoir se passer, où? Quand? De quelle manière?
Je n'ai aucune idée de l'avenir qui nous est réservé. Ni de ce qu'il pourra se passer.

Sans penser à hier, sans penser à tout ce qu'il peut y avoir eu. En ne pensant qu'à aujourd'hui, oui.
Oui, j'ai besoin de vous.
Oui, je veux unir mon âme à la votre.
Oui.

Parce que je sais qu'auprès de vous, je ne serai pas jugée.
Parce que je sais qu'auprès de vous, je saurai être courageuse.
Parce que je sais qu'auprès de vous, je trouverai paix et calme.
Parce que je sais qu'auprès de vous, je pourrai peut-être réapprendre à m'attacher réellement.

Parce que j'ai confiance.

Ne croyez pas que ce soit par dépit... Ni part défaut...

A vous.

Sorianne.



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