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[RP] Le goût du voyage.

Aelaia



      [Juin 1467, orée du Mesnil]


    Boucles blondes savamment enroulées dans un chignon par les mains maternelles, robe de lin longeant les hanches et enveloppant ses formes de presque jeune femme, et ballot de cuir déposé sur l’épaule, elle était prête. Prête à quitter pour la première fois sa Bretagne natale. Autrement que par les mers et les océans. Prête à quitter ses parents, pour la première fois.

    A la patte d’un pigeon blanc, un vélin taché à l’encre noire annonçait l’arrivée de Circey aux premières heures du jour, à l’heure où les feuilles perlent la rosée du matin et le soleil transperce la brume. Ar Moraer accueillerait l’espagnole à la lisière de la forêt pour lui confier leur trésor et leur chair. Retrouvailles seraient fugaces. 17 années avaient filé depuis le départ de Llora vers les terres celtes. Quelques échanges épistolaires avaient maintenu le contact entre les deux sœurs. Demi-sœurs. L’envie de se retrouver, de retracer leurs histoires et de conter leurs souvenirs ne manquait pas. Non, c’était le temps qui manquerait, ce jour-là. Le navire larguerait les amarres avant la nuit et filerait au large de la cité Malouine pour plusieurs semaines. Le voyage s’annonçait périlleux et ne serait pas des plus adaptés pour une enfant. La châtaigne commençait à se faire femme, ses formes s’affirmaient et son sourire innocent en charmaient déjà quelques-uns. Ewann ne voulait pas l’exposer un peu plus aux matelots plus ou moins bienveillants. La solution s’était naturellement imposée à eux. Circey.

    Au fil des lettres, la gitane approchait les terres des légendes d’Arthur. Elle veillerait sur la demie catalane le temps d’un été. Le temps d’une aventure. Le temps de prendre son envol et d’immiscer en elle le désir de voyage. Comme l’avait fait Ewann, pour Llora, bien des années plus tôt.

    Entre appréhension de l’inconnue et excitation de la découverte, l’esprit de la chablousse* balançait. Elle connaissait les côtes de sa douce Bretagne et quelques rochers anglais. Les chemins seraient-ils sûrs ? Elle ne connaissait Circey que des histoires de sa mère. L’apprécierait-elle ? La peur de l’inconnu emplissait finalement ses pensées. Les questions par dizaines se bousculaient dans sa petite tête lorsque la silhouette espagnole apparut à la croisée des chemins.


      « Circey. Comme le temps a passé…Tu es toujours la même. Celle de mes souvenirs. »


    Les deux sœurs se retrouvèrent dans une étreinte sincère. Llora observa sa demie quelques instants, sourire aux lèvres.

      « Sois la bienvenue à Mesnil-Roc’h. Tu ne connais pas Ewann ? Mon marin de toujours. Et, notre aelig*, Aelaia. […] Viens ! »


    La jeune châtaigne poussée par la patte ferme de son père approcha, et offrit un timide sourire à l’inconnue qui partagerait ses journées à venir. Elle profita du court instant pour la détailler avant que la famille soit pressée vers le domaine familial. Elle était jolie, mais tellement différente de sa mère. Alors que l’une avait une légère tignasse rousse, l’autre arborait de longues boucles sombres. Des yeux aux nuances d’or face au regard argenté de Circey. Elle sonnait encore l’accent natal que Llora avait perdu après tant d’années en France. Il était difficile, sans le savoir, de les appeler sœurs. La presque blonde acceptait difficilement le départ parental. Un sentiment d’abandon avait d’abord empli son être. Un fardeau ? C’est ce qu’elle était pour eux ? Pourquoi maintenant ne pouvait-elle plus y aller ? Elle n’était pas et n’avait jamais été une enfant difficile. Discrète et bien élevée, elle avait toujours réussi à se rendre utile sur l’Aelaia. Et maintenant, on la collait dans les pattes d’une étrangère ?

    Bien que le temps soit compté, un moment fut pris pour déjeuner. Aelaia découvrait Circey au gré des discussions. Elle semblait avoir beaucoup vadrouillé, aux quatre coins du monde.


      « Où est-ce que nous irons ? On va voyager ? Beaucoup ? A pied ? Tu habites où ? On sera toutes les deux ? Tu as des enfants ? »


    Timidité adolescente s’évaporait pour laisser sa place à la curiosité enfantine de la chablousse. Ses lèvres laissaient échapper bien trop de questions en une seule fois. Une main posée devant sa bouche pour stopper le flux de paroles, elle haussa les épaules. La Cortez lui inspirait confiance et spontanéité. Finalement, le départ se faisait attendre. Impatience.

    Dernières étreintes, dernières recommandations. La nièce et la tía s’éloignent vers l’aventure, sous le regard à la fois soucieux et bienveillants des matelots celtes.


      « Prenez soin de vous. […] Devuélvemelo en una sola pieza...O serviremos tus entrañas en un plato. Vale ?* », dernières paroles de la Folguera chuchotées à l’oreille de la gitane.



*chablousse = mot imaginé un soir en taverne pour décrire une chevelure entre le châtain, le blond et le roux.
*aelig = petit ange (surnom affectif)
*Devuélvemelo en una sola pieza... O serviremos tus entrañas en un plato. Vale ? = Ramènes-là moi en un seul morceau... Ou je t'étripes. D'accord ?

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Circey
Circey avait été mandaté et envoyé pour venir chercher la petite. Elle ne la connaissait pas, et cela faisait bientôt deux décennies qu’elle n’avait plus vu Llora. Les lettres étaient envoyées, mais pour l’Espagnole, le contact avait toujours été important. Elle n’avait pas cependant voulu empêcher le départ de sa sœur. Elle n’avait pas ce genre de caractère là. Et c’était sans doute pour cela qu’elle se retrouvait souvent toute seule. Elle laissait trop de liberté à ses proches, à commencer par Eliza qui était partie bien tôt du nid pour retrouver un Corléone qui n’était autre que son père. Elle était une de ses mamans cool qui laisse à ses enfants le loisir d’être libre, de choisir leurs voies, sans jamais rien leur imposer. Et quand ils le peuvent, ces ingrats s’enfuient. Elle était si infernale que ça ? Non, simplement, ils vivaient comme elle. Au gré du vent. Au gré des envies. Tout cela, ils l’avaient bien compris. Alors vous vous doutez bien, lorsque Llora à demander si Circey était capable de faire découvrir des paysages à la jeune fille du couple. Au moins une qui devra rester avec la gitane.

Elle s’était vêtue d’un peu plus de tissus que d’habitude pour la rencontre, parce que la Bretagne n’est pas l’endroit le plus chaud du monde.

Et la voilà, qui arrive, tout sagement. Elle alla alors dans les bras de sa sœur, souriant lentement. Llora n’avait pas changé d’un poil. Elle était toujours aussi belle.

    - Si ! Une divinité ne change pas, tu sais ! Mais je suis contente de te voir.


Les yeux s’étaient tournés sur le fameux Ewann. Puis sur la jeune fille.

    -Magré dé dios, que ça grandit !


La main glisse alors dans les cheveux semi-rousse, semi-blonde de la petite. Elle est si jolie. Effectivement, si elle trouvait le père pas très attrayant, nul doute qu’il avait engendré une bien belle petite fille.

    - Elle a l’âge d’une de mes filles, d’ailleurs. Elles pourraient s’entendre si jamais nous les croisons.


Au final, et de discussions en discussions, Aelaia & Circey firent connaissance. Tout doucement, mais sûrement. L’Espagnole ne manqua pas de raconter ses petits déboires amoureux, quelques histoires rigolotes qu’elle a vécu avec ses clients pour les cartes. Mais toujours dans le respect, jamais dans la moquerie.
Puis vint le moment des adieux. L’heure de repartir, que Cortez à toujours connu comme un nouveau départ. Et si la phrase de sa sœur la fait sourire, elle n’en démord quand même pas qu’il fallait apprendre à vivre avant de voyager. C’était le crédo de l’hispanique.

    - Il faut savoir prendre des risques ma sœur. Mais elle sera en sécurité avec moi.


Les au revoir fait, les voilà qui commencent ce long périple. En marchant les premiers 100 mètre, les yeux de Cortez se pose sur la nièce, souriant un peu, presque fièrement.

    - Et un petit tour de France, cela te dit ? Nous allons aller au Nord, en Normandie, tout d’abord, puis nous allons continuer à monter. Il y a des paysages somptueux. Tu as déjà voyager ?

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♡ JD Auguste / @Dessin original de Selenada
Aelaia


    Alors que Mesnil-Roc’h s’éloignait lentement derrière elles, le bois se transformant en une masse ombragée au loin et les sentiers se déroulant sinueusement sous leurs bottes, les deux ibères se découvraient sous un soleil encore haut de début d’été. L’air de rien, et si naturellement, la jeune châtaigne trouvait peu à peu sa place auprès de la gitane. Il faut dire qu’il était aisé de se sentir en confiance à ses côtés, et par bien des aspects, Circey lui faisait penser à sa mère, bien que plus bavarde et expansive. Aelaia avait, depuis sa prime enfance, toujours eu cette première approche d’observation et d’analyse, cherchant, avant de se livrer plus entièrement, à cerner l’être qui lui faisait face. Temps parfois long, il n’avait cependant que peu duré en la compagnie de sa tante, et le moulin à paroles qu’elle pouvait être ne tarderait pas à s’emballer, délivrant un flux de paroles… étonnant. Eh oui, sous ces allures de timide enfant se cache une vraie pipelette dès lors qu’on en trouve la clé.

      - Partout ? On va aller voir toute la France ? Mais… c’est grand ? Tu connais tous les chemins ?


    La bretonne avait allégrement voyagé par-delà les mers en compagnie de ses parents lorsqu’elle était plus jeune, mais rarement elle avait foulé le « plancher des vaches » pour en découvrir tous les paysages. Mettez-la face à un quadrant ou à un astrolabe, et elle vous guiderait – à peu près, elle n’était pas non plus aussi douée que son père – vers les côtes anglaises sans trop de difficultés. Les routes maritimes étant bien plus dégagées que les sentiers hasardeux des sols poussiéreux, l’exercice était facile. Il suffisait de trouver l’étoile polaire, comme disait son père, « la bougie qui brille le plus fort dans le ciel en faisait de jolis clins d’œil », et de naviguer dans sa direction pour atteindre le Nord céleste. Sous les frondaisons fleuries de cette fin de printemps, il était parfois plus difficile de la repérer.

      - Ya, Tad ha Mamm aiment voyager, tout le temps. Mais on voyage en bateau, nous. Tu es déjà monté à bord d’un bateau, toi ?


    Les lieues s’accumulaient, et les jambes encore peu habituées à de trop longues marches de l’adolescente trahissaient sa fatigue, ralentissant par moment l’allure de leur marche rythmée. Les deux Cortez s’accordaient ainsi quelques pauses pour étancher soif, remplir les estomacs et souffler un peu sous la chaleur écrasante de ce début du mois de juin.

    Mesnil-Roc’h étant l’une des communautés bretonnes les plus proches de la frontière normande, les paysages de la Normandie furent atteints en quelques jours. D’abord, la jeune Aelaia fût presque déçue, trouvant que peu de chose ne changeait de ce qu’elle avait l’habitude de voir dans ses forêts qu’elle connaissait tant, puis lorsqu’elles atteignirent les côtes, son sourire s’illumina. La mer, cette grande étendue d’eau, se déployant à l’infini, lui faisait toujours cet effet-là ; et une fois encore, la magie opérait. Elle n’était pas une fille de l’Océan, la fille du Navigateur pour rien, c’était son élément. Ici, les rivages différaient légèrement de ceux qu’elle connaissait, ils étaient plus sauvages que ceux de la cité corsaire, les roches plus lissées, polies par le mouvement des eaux et les nuances océanes tiraient alors vers l’argent.


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