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[RP] Les courriers de la châtaigne.

Aelaia


D'une meilleure copine à son meilleur copain.



Citation:
    Le 9 janvier 1470
    Boule (de neige).

    Jhoannes,

    J'avais dit que je t'écrirai. Je t'écris, donc. Logique, jusque là, non ? Non, en réalité, j'ai mis un peu de temps à tourner mes mots avant de te les écrire, et j'ai gaspillé un peu de papier. Au moins, alimentera-t-il le feu qui s'agite devant moi. Finalement, je me suis dit que cela servait à rien de chercher à tourner des phrases de six pieds de long pour dire une chose pourtant simple.

    Je suis désolée, Jho.

    Te dire que je regrette, ce serait probablement mentir, parce que malgré mon exemplaire sobriété - oui, oui, et ne me contredis pas - j'étais parfaitement consciente de ce que nous faisions. Merde. C'est pire, de le dire comme ça ? Genre. Ouais, je sais ce qu'on fait, je sais que c'est pas bien, mais allons-y gaiement, parce qu'on est fichtrement bien, là. Je ne t'en veux pas non plus, parce que c'était pas calculé, Non, je dirais plutôt que je culpabilise. Je culpabilise vis-à-vis de Rose. Quand bien même j'agis souvent, très souvent, sur des coups de tête, je n'aime pas blesser ou agir au détriment des gens. Lui diras-tu ?

    J'aurais probablement dû te renvoyer sur ton côté de banquette. Mais j'ai pas eu envie, c'est con. C'est con ? Dans trente-neuf jours, on aura oublié tout ça, ou aura oublié qu'on a eu envie et qu'on a dérapé. Un tout petit, petit peu. Parce que c'était complètement débile. C'est bien trente-neuf jours. Ca laisse du temps. Et de nouvelles histoires à raconter. Tiens, d'ailleurs. Tu m'en racontes une, une histoire ? Un truc marrant. Un machin mignon. Une chose idiote. Ou les trois à la fois. Une histoire de printemps, ou une d'été. Je suis pas trop difficile sur la marchandise, et suis souvent bon public.

    Ventadour, c'est comme la semaine dernière. C'est calme. Mais c'est différent. Sans doute le poids de la couronne estompé, ça. Je ne réalise pas tout à fait, encore, que je quitte le Limousin, en vrai. J'y avais ancré mes bottes depuis plus de sept mois ; et je crois que ça m'est rarement arrivé, de rester si longtemps au même endroit. Il était grand temps que je parte en vadrouille, le plancton commençait à s'accrocher.

    Fais attention à toi, Recteur,
    Ecris un peu,
    Je t'aime fort beaucoup (et ne le dis pas avec ton air salace).

    Ael


Citation:
    Le 11 janvier 1470
    Flocon dérapé.

    Ael,

    Tu joues les devineresses à partir du principe que je raconterais cet épisode à Golshifteh. Ou tu me connais suffisamment bien. Je lui ai dit que tu t'en voulais, vis-à-vis d'elle. Je crois que votre relation n'est pas prête d'atteindre le beau fixe pour autant. Ce qui est compréhensible, mais un peu dégueulasse pour toi aussi. S'il fallait poser une faute sur des épaules, ce serait les miennes seules. Dans ma mémoire — certes embrumée — j'ai creusé d'un élan, à deux mains, la pente pour qu'on y dérape. Et c'était bon. Je n'ai pas de regret non plus, ni de poids coupable, sinon que je n'aime pas rendre la perse triste. Mais ce sont des histoires qui ne regardent qu'elle et moi. Ne te mets pas misère en tête, s'il te plaît. Trente-neuf jours, c'est long et court, mais suffisamment long tout de même pour que le temps fasse son œuvre. Et s'il altère le souvenir d'un dérapage (contrôlé, tu noteras, ça aurait pu être pire, bien pire, je veux dire, on s'est pas non plus totalement vautrés ensemble sur le tapis d'herbe en bas), j'espère qu'il n'écorchera pas un fil de notre amitié.

    C'est l'histoire d'une taupe qui n'avait jamais senti le soleil. Un jour elle abandonna sa famille souterraine, pour creuser long tunnel, sous la terre, vers le ciel. Creusée fut laborieuse, mais finalement elle perça vers le jour, dans le verger d'une paysanne, entre la mûre et le poirier. La paysanne, fille angoissée, pour ses fruits et pour ses sous, planta sa pique dans la bouille touffue. La taupe sur le coup mourut. La paysanne, l'esprit pratique, servit la chair de la bête en ragoût, le soir même, à son époux. Le matin suivant, une grosse moustache lui avait poussé sous le nez. L'aube ensuite, il avait perdu la parole. Les jours d'après, il ne voulait plus sortir, et restait terré sous le lit, dans l'ombre, à boire des fioles. La paysanne crut à un mauvais sort, et de rage retourna toute la terre de son jardin, en maudissant les taupes. Le lendemain, pourtant, rien n'avait changé, et son époux se transformait en bête. Impuissante, elle lui vit monter des poils aux joues, puis au front. Ses yeux se mirent ensuite à rapetisser jusqu'à adopter la taille d'une tête d'aiguille. Lorsque…

    … je te raconterai peut-être la suite un jour.

    Prends soin de toi.
    Je rajouterais bien : et de ton boule, mais je crois que c'est encore un peu trop tôt.

    J


Citation:
    Le 13 janvier 1470
    Taupe-la.

    Patate,

    Trente-cinq jours. Et je te promets que rien de ce dérapage ne viendra effilocher le moindre fil de notre amitié. Parce qu'elle est vraiment bien, cette amitié. Et que t'es vraiment chouette, comme meilleur copain. Je propose que l'on voit cela comme une simple façon de se dire au revoir (tu noteras que je ne parle nullement d'adieu, parce que moi non plus, j'aime pas ça), stratégie tout à fait typique de la Bretonne sauvage un brin trop tactile. Les pires, il paraît. La première fois, Aurore m'a cogné le nez. Elle est pas trop habituée aux câlins. Moi j'aime bien. Enfin, pas à n'importe qui tout de même. Mais je suis à peu près certaine que contre une bonne bouteille de vin italien, elle ferait bien quelques efforts.

    Je crois surtout que je te sais sincère, et que, quand bien même je craignais que tu lui en parles, je me doutais que tu ne le lui cacherais pas. Elle m'en veut, forcément. Il ne pourrait en être autrement. Mais, à toi ? Comment l'a-t-elle pris ?

    Je ne me mettrai pas misère en tête à une seule condition, Jhoannes-chéri. Je veux la fin de cette histoire de taupe. Aussi perchée soit-elle, elle m'intrigue. Lorsque... ?

    J'ai, moi aussi, une histoire à te raconter. C'est l'histoire d'une jeune femme que l'on appellera Marie Mancini, pour des raisons évidentes d'anonymat. Marie, donc, avait grand besoin de souffler ; oui, parce qu'à force de gonfler ses poumons à inspirer, il faut un jour expirer, vois-tu. Non, je m'égare. Déjà. Bien. Marie avait besoin de prendre l'air, alors un matin d'hiver, elle prit la route, avec son petit ballot sur l'épaule et sa fidèle paire de bottes. Les villes passèrent, et se ressemblèrent, sans grande surprise. Alors, un soir, à quelques lieues de la bourgade voisine, lui vint l'idée, avec son comparse de voyage, de se cacher derrière un buisson pour surprendre le premier printanier qui passerait, et lui voler son goûter. C'est qu'elle avait une petite fringale, la Marie. Marcher, ça donne faim. Et oui, elle se cherchait quelques excuses. Quelle ne fut pas la surprise de Marie lorsqu'elle tomba sur une mine d'or. Ou plutôt une mine de goûters. Soixante sacs de maïs prêts à être grillés. SOIXANTE FOUTUS SACS DE MAÏS. C'est ainsi que Marie inaugura la première soirée à gober du maïs soufflé devant le spectacle d'un feu crépitant. Enroulée dans une peau de bête avec une coiffe sur la tête. Parce qu'au racket de goûter, Marie pouvait ajouter l'emprunt non temporaire d'une coiffe toute rouge à ses méfaits. C'était l'histoire de Marie. (Et les prémices des premières soirées que nos contemporains appelleront "Chill & Nez te fixe". Va savoir pourquoi. Ça me dit vaguement quelque chose.)

    Je prends soin de moi. Et de mon boule. Et de tout le reste.

    Tu manques.

    Ael


Citation:
    Le 15 janvier 1470
    Suite de l'histoire.

    … lorsqu'au même instant, à plusieurs centaines de lieues de là, une autre taupe surgit du sol, dans l'ombre de Marie Mancini. C'était une vieille taupe, qui portait une moustache grise ainsi qu'une paire de binocles. Et la taupe dit à Marie, que ce serait heureux, peut-être, qu'elle cesse de chier dans la colle. Que c'est mal de voler le goûter des autres, sans même demander avant, et que Marie a, manifestement, suffisamment de brioches à bouffer dans son escarcelle pour se passer du besoin de chiper le maïs des printaniers qui écument les routes. Et sur la peau, et sur les boucles, assez de fringues de rechange, et de fort bonne facture qui plus est, pour ne pas avoir nécessité de s'emparer d'un couvre-chef qui n'est pas le sien. Marie a déjà les oreilles au chaud, et la provende nécessaire pour se faire péter la panse. Marie déconne. La taupe n'est pas heureuse de l'apprendre.

    J



    Au courrier, est jointe une rosette. La fameuse de Lyon. Enroulée dans un petit torchon. Et un pochon de maïs soufflé. Pour les fameuses soirées inventées par Marie.


Citation:
    Le 15 janvier 1470
    Made in Lyon.

    Jho-chéri,

    La taupe a raison. C'est vilain. Je lui dirais, un jour. À Marie. Si je la croise. En plus, la brioche, c'est tout de même bien meilleur que le maïs.

    Je suis arrivée à Lyon, ce matin. Je pensais qu'il y faisait meilleur qu'en Limousin, c'était faux. Une véritable publicité mensongère. Il fait froid, et c'est tout aussi humide. Mais j'ai revu Aurore. Elle m'a fait un câlin, sans que je ne lui demande rien. Et sans tenter de la soudoyer à base de quelques bouteilles de chianti. Il va falloir que je creuse. Il doit y avoir quelque chose. C'est probablement Maximilien, ou bien Lyon. C'est une ville qui fleure la bonne humeur.

    On va y rester quelques jours, parce que la suite de notre périple a quelque peu changé. Nous devions aller en Artois, pour ramener, en Limousin, la fille de Mélissandre, mais nous n'irons finalement pas. J'ai cru entendre que Limoges était vide de son peuple. Ce doit être bizarre ? Quoique reposant.

    Repose-toi bien, parce que je serai de retour dans trente-trois jours moins l'Artois.

    Je t'embrasse,
    Ael

    PS : Tu n'as pas répondu au reste de mes questions.


Citation:
    Le 15 janvier 1470
    From le Limousin.

    Ael,

    Merci pour la bouffe, mais je t'en renvoie une part, parce que je sais pas trop d'où ça vient. Peut-être de la poche de Marie. Et Marie n'est clairement pas ma copine. Par contre Hazel a mordu dans le saucisson avant que j'ai fini de lire ta lettre, alors je n'ai pas pu décider de son sort. Tu peux te dire que tu auras fait une heureuse ce soir.

    Je n'ai pas répondu à une question, sciemment. Et je n'y répondrai pas dans le détail, par pudeur pour elle, moi, nous. Sache que notre écart n'a rien brisé. Au reste, cette nuit-ci, je me pensais bien plus libre que je ne l'étais en réalité. Sinon je n'aurais pas approché mes lèvres des tiennes ou glissé mes mains s

    Le visage de Limoges a radicalement changé. J'ignore si c'est en mieux. Je dirais que non, car Vran y traîne ses bottes. J'ai confié ma fille à la garde du château d'Aixe pour les nuits. Je reste moi, en ma demeure, mais je vois souvent la fin de la bougie cramer avant de m'endormir. Je vais, au reste.

    Profite bien de Lyon,

    J


Citation:
    Le 15 janvier 1470
    From le Limousin.

    Jho,

    Pour la petite anecdote, la bouffe vient du marché de Lyon. D'une marchande plutôt loquace mais tout autant agréable répondant au doux prénom Esmée. Elle élève elle-même ses cochons qu'elle chérit et gave de maïs, production artisanale. Tant pis pour toi, c'est moi qui en profiterai.

    Encore une fois, Jho. Je suis désolée. Vraiment. Parce que j'ai pas réfléchi. On devrait oublier, on va oublier. On n'en parlera plus. Et puis de toutes façons, rien ne change, entre nous. T'es mon meilleur copain, et j'y tiens.

    Vran. Il tente quelque chose ? Vous vous êtes croisés ?

    A.


Citation:
    Le 16 janvier 1470
    Pour A.

    Ael,

    Je tirerai la tronche tant que, dans ton histoire, Marie n'aura pas rendu son goûter à sa proie.

    Et arrête de t'excuser parce que j'ai eu envie de toi. C'est passé. Tout le monde va bien. Aucun drame n'est né de cet épisode. Je reste ton meilleur copain.

    Je suppose, mais j'ai peut-être tort, que Vran est passé à autre chose. Ou bien qu'il attend le retour d'Andréa. Je l'ai vu une fois, mais ne suis pas resté. Je préfère continuer mon chemin dans une droite parallèle à la sienne.

    Je t'embrasse aussi (mais toujours pas Marie).
    J


    A la suite de ce pli, bouffée de culpabilité - si si -, elle aura envoyé un petit pli, bref, à la victime de son racket de goûter.

Citation:
    Le 16 janvier 1470
    Retour de goûter.

    Eliothine,

    Charrette & monture ont été confiés au palefrenier de Lyon.
    Une partie du goûter aussi.

    Une âme culpabilisée.


Citation:
    Le 16 janvier 1470
    Retour de goûter.

    Aelaia,

    Dois-je vous dire merci ?
    J'ai averti les autorités mais comme vous m’avez certainement sauvé la vie, je ne porterais pas plainte comme ils me l'ont demandé.
    Nous sommes quittes.

    Elie

_________________
Aelaia


Rebondie surprise.



Citation:
    Le 17 janvier 1470
    Rebondi(ssement).

    Jho,

    Marie a dû culpabiliser. L’on m’a conté la suite de son histoire, et je crois qu’elle a bon fond. Tu vas pouvoir arrêter de la bouder. Même si tu ne la connais pas.

    Les jours passèrent, encore, et encore, et une petite voix dans la tête de Marie se faisait plus entendre jour après jour. Dans la caboche de Marie, c’était un éternel conflit entre le petit locataire angélique, et l’autre cornu. Par chance, elle était tombée sous le charme de la petite taupe apparue par surprise sur son chemin, si bien qu’elle eut envie de l’adopter. Mais une taupe, c’est tout de même encombrant, et puis ça ne voit rien. Et ça juge. Un peu. Beaucoup. Mais c’est mignon, alors la petite voix blanche eut raison d’elle. Marie prit sa plume pour écrire quelques mots, anonymes, tout de même, pour annoncer qu’elle rendait ce qu’il restait du goûter à sa propriétaire. Soudainement, elle se sentit un peu plus légère. Probablement parce qu’elle commençait à être en surdose de maïs, mais ça, l’histoire de le dit pas.

    Tu fais bien, pour Vran. Reste loin de lui. Même s’il était passé à autre chose, il n’est jamais bon de tenter le diable et de remuer la fange. Je n’arrive pas à lui faire confiance, moins encore depuis que je sais ce que tu m’avais confié. Andréa rentre ?

    Trente-et-un,
    Ael

    PS : J’ai cru à une mauvaise blague. Je suis enceinte. C’était pas prévu, c’est trop tard. J’ai peur.


Citation:
    Le 17 janvier 1470
    Rebondi(ssement).

    Ael,

    La suite de l'histoire est plus belle, mais tu m'excuseras d'y répondre une autre fois. Trop tard comment ?

    J


Citation:
    Le 17 janvier 1470
    Rebondi(ssement).

    Jho,

    Trop tard, dans le sens où je peux assurer sans ciller qu'il est de Kriev. Aurore estime l'arrondi à plus de quatre mois. Oui, l'arrondi. Il est apparu, là. Comme ça.

    Je voudrais que ce soit faux, Jho. Je voudrais me réveiller...

    A.


Citation:
    Le 18 janvier 1470
    Rebondi(ssement).

    Ael,

    Quatre, c'est jouable, mais oui, tard. Plus dangereux qu'à trois. Moins qu'à cinq. Mais ne te mets pas en danger pour sortir d'une situation qui a des allures de cauchemar. Tu as traversé bien pire que ça. Et tu n'es pas seule.

    J


Citation:
    Le 19 janvier 1470
    Rebondi(ssement).

    Quatre mois. Approximatifs.
    Sans doute suis-je égoïste, mais seule Paola m'importe. Et moi, auprès d'elle. Ai-je plus de risque d'y rester à la délivrance, ou à agir maintenant ?

    Je ne suis pas seule, mais je n'en veux pas, seule.

    A.


Citation:
    Le 21 janvier 1470
    Rebondi(ssement).

    Ael,

    Et sans détours : tu mettrais davantage ta vie en risque à vouloir te débarasser les entrailles maintenant. Et tu peux boire litrons de tisanes à cet effet, m'est avis que rien n'y changera ; à quatre mois, la graine est plus accrochée qu'il n'y paraît. Si vraiment tu y tiens, certaines gens voudront bien essayer de te la déraciner quand même, mais ces rendez-vous là ne se terminent pas forcément bien. Peut-être les derniers jours auront commencé à éclaircir tes pensées. Je te le souhaite.

    J


Citation:
    Le 25 janvier 1470
    Sus aux nuages.

    Jho,

    Le temps, et la raison, probablement, auront su éclaircir mes pensées. Je vais essayer d'apprendre à l'accepter ; je crois avoir encore quelques mois devant moi.

    J'ai revu Kriev, en Franche-Comté. Ce n'était pas vraiment une surprise, je savais que je l'y trouverai, mais j'appréhendais le moment, je dois dire. J'appréhendais mes propres réactions, et j'avais un peu peur de flancher ; il n'en a rien été. C'est étrange d'écrire la fin de cette histoire parce que je ne m'en pensais pas capable, mais je crois que le temps a fait, peu à peu, son affaire et il effacera les blessures, jour après jour, pour n'en laisser que des souvenirs intouchables. Je vois les choses comme ça. Des souvenirs lointains, que l'on perche quelque part où l'on ne pourra pas les toucher ; ni pour les raviver, ni pour les abîmer. Il sait qu'il ne peut être que de lui. Il se veut présent, et se dit prêt à prendre toute place que je lui laisserai à ses côtés, plus tard, ou à mes - nos - côtés, maintenant. Je ne sais pas encore ce que je déciderais. J'ai peur qu'il se complaise d'espoirs, et qu'il refasse valser ma vague stabilité à peu près retrouvée, à essayer, encore, d'agiter ces souvenirs, justement. Il semble aller mieux, d'ailleurs, il ne boit ni ne fume plus. Plus depuis qu'il a retrouvé celle pour qui il sombrait ; la fille de Leffe, revenue d'entre les morts. J'ai... du mal à concevoir que cela puisse arriver sans contrepartie. Parfois, cela ne devrait pas se produire. Vran n'aurait jamais du revenir. D'ailleurs, est-il toujours à Limoges ? Rassure-moi, dis-moi qu'il ne t'approche pas ?

    Vingt-trois.
    Je t'aime, Jho-li copain.

    Ael.

    PS : tu es autorisé à râler de mon humour affreux. Mais tu peux aussi le voir comme une façon de chasser les nuages gris. Je recherche un peu de soleil.


Citation:
    Le 28 janvier 1470
    Pour A.

    Ael,

    Certaines personnes ne devraient jamais revenir, je partage cet avis. C'est mauvais pacte fait avec la nature, que de renaître de la terre. Et je préfère ne pas savoir ce qui doit être échangé lorsqu'on troque mort pour vie, car le prix doit être bien trop lourd. Peut-être morceaux de l'âme. Le nom de Vran n'apparaît plus sur les cahiers des douanes depuis trois jours. Aussi Hazel est enfin revenue à la maison. Elle était un chouille patraque, mais n'a pas eu de fièvre. Je me demande si ça n'est pas le contre-coup nerveux de tous les derniers mois qu'elle a passés. Sadella, le marin et leurs filles sont en ville aussi. C'est agréable de retrouver quelques moments doux, même si souvent le souvenir de la danoise se rappelle à moi, j'apprends à vivre avec, et pas contre.

    Tu prendras la décision la plus juste pour l'enfant, tout comme tu l'as fait avec Paola. Et si le soleil est absent du paysage — qui j'espère s'est encore redoré depuis ta dernière missive, il reviendra, tu le sais. Et tu as raison de le forcer à coup de mauvaises blagues (elle n'était pas si mauvaise, elle était même un peu flatteuse. Quoique je me demande si les gens ne me répètent pas que je suis beau uniquement pour consoler mes quarante ans. Ce qui est con, parce qu'il me semble qu'ils en sont bien plus chagrinés que moi-même. Bref. Et : les gens, pas toi.) Je suis content de lire que Kriev se porte mieux, même si les causes de son retour à plus de calme semblent elles, relativement incertaines sur le long terme. J'espère me tromper.

    Je t'embrasse, Aile d'Armoire.

    J


Citation:
    Le 1er février 1470
    Soleil.

    Jho,

    J’espère que depuis ton dernier courrier, la petite Hazel se porte mieux. A Nevers, hier, j’ai dévalisé l’étal d’un artisan qui fait de ces gourmandises à se damner. Ils appellent ça de la nougatine, ici. C’est dur à croquer, ça colle aux dents, mais on ne s’en lasse pas. Dis à Hazel de ne pas tout manger en une fois. Et de partager avec son adorable Papa.

    Sadella et sa famille restent-ils un peu ? Il me ferait plaisir de croiser Edenaé. Il est normal que le souvenir d’Astana se rappelle à toi. Il le fera toujours ; seul sa saveur changera. Quel goût a-t-il, encore aujourd’hui ?

    Les gens, pas moi. Parce que moi, je trouve que tu le portes bien, ton grand âge. En plus, tu as encore tous tes cheveux, et toutes tes dents (je crois, je n’ai pas pris le temps de les compter), à défaut de phalanges. Je te taquine. Un peu. C’est parce que le soleil se lève. Un peu. Pour ce qui est de Kriev, j’espère pour lui qu’elles sauront durer ; cela fait du bien de le voir comme ça, mais j’ai peut-être apporté quelques ombrages en mettant point final et clarté à ce qui était « Nous » à l’époque.

    Comment est la météo, à Limoges ? Tu vas bien ? Comment se passe le Conseil ? Je rentre (très) bientôt.

    Fais-toi bien ca-jho-ler.
    Je t’embrasse aussi.

    Ael

    PS : il me tarde de voir ce que tu peux trouver d’autres comme jeux de mots avec mon nom.

    [Un GROS sachet de bonbons de nougatine est joint à la lettre.]

_________________
Aelaia



Belle Parole & Confidences.



Citation:
    Le 27 janvier 1470
    Une Brève Parole.

    Belle Parole,

    Excuse-moi de ce silence si long. Tu dois me savoir peu habitué à prendre la plume si ce n'est pour le strict minimum. Et c'est ce que je fais d'ordinaire. Je me laisse bercer par la vie, et par des rencontres qui me sont souvent éphémère, bribes de joies et d'amitiés comme quelques lucioles vieillissant en une nuit. Pourtant, ces derniers jours m'ont été à la manière d'un marin perdu sur l'océan apercevant un phare. Et j'ai découvert que la route que je me traçais, à renier ma vraie compagnie à tous si ce n'est ma famille et Lili, comme une erreur de jeunesse de plus.

    Tu ne mérites pas ça. Et je dois l'avouer. Tu es mon amie, et j'ai été un très mauvais ami ces derniers temps. J'étais sans doute aveuglé par mes propres quêtes, et sourd à ta tristesse car je me disais que nous nous entendions juste bien. Que tu étais l'amie de Lili avant la mienne. Que nous n'avions sans doute pas besoin l'un de l'autre. Et si ce dernier point a un fond de vérité, j'aurai dû offrir à l'amie que tu es le soutient que tu mérites. Alors, excuses donc les silences d'un idiot qui vient seulement de réaliser que la vie ne se résume pas à seulement avancer seul dans le noir. Que parfois, l'on peut voir des chemins différents, et les emprunter avec ceux croisant notre route.

    Ces derniers jours m'ont été salutaire car j'ai réalisé l'idiot que j'ai été. Tu me répondras sans doute que tu vas bien, ou que je n'ai pas à m'inquiéter. Et si je suppose que tu n'as pas besoin de moi. J'aurai dû voir bien avant que sous tes sourires et tes tons enjoués, se révélaient les craquements d'une vie difficile. Comment porter une couronne, et le destin de tant de gens, quand l'on lutte soi-même contre quelques démons ? Je l'ignore, et je t'admire pour cela.

    Alors Belle Parole, s'il n'est pas trop tard pour être ton ami comme il se doit, comment vas-tu ? Que fais-tu ?
    Crois bien que je regrette mon comportement détaché au moment où j'aurai pu être le plus utile. Peut-être aurais-je l'occasion de faire amende de ces manques. En attendant, sache que je pense à toi et te souhaite le mieux à toi et à Paola.

    Puisses-tu trouver un semblant de paix dans ce royaume.

    Ferdi


Citation:
    Le 6 février 1470
    Une Longue Parole.

    Mon Ferdi-chéri (il faudrait que je songe à te trouver un surnom qui claque !),

    Inutile de t’excuser quand moi-même je ne prends pas la plume. Je suis la première à réclamer quelques plis et attentions de la part des gens que j’aime, et je suis pourtant rarement la première à en livrer. Sache que même si Helvie nous a permis de nous rencontrer, et j’en l’en remercie pour ça, tu as, par la force du temps et de nos instants partagés, pris une véritable place d’ami pour moi. Un ami qui compte indubitablement. Un ami qui se fait parfois éphémère amant, tout simplement parce que j’ai suffisamment confiance en toi pour que ces charnels moments partagés ne viennent entacher ce qui n’est pas éphémère : notre amitié. (Et qu’en plus, t’es un excellent amant.)

    Tu es entré dans ma vie à un moment où déjà, je subissais quelques-uns de mes démons, et par ta bonne humeur, ta fausse innocence, et ta simplicité, tu avais déjà su les éluder un peu pour me redonner l’envie de sourire et d’avancer plus sereinement. Tu as été l’allégorie de cette luciole quand j’avançais dans le noir, pour me guider vers un jour de soleil. Et il y en a eu finalement, au milieu des orages. Te souviens-tu de cette première soirée ? Je t’avais promis une danse dès lors que j’irais mieux. Ai-je tenu promesse, depuis le temps ? Ma mémoire me joue quelques tours.

    Aussi, je t’interdis, Ferdi, de dire que tu as été un très mauvais ami. Parce que c’est faux. C’est moi, alors que j’étais en train de nager dans un océan agité, qui ait refusé l’aide d’amis. J’ai refusé d’avouer quelques faiblesses, et je me suis refugiée dans le travail – pire idée qui soit, au passage. J’ai menti à beaucoup de monde ces derniers mois. J’ai caché à Helvie la vérité en refusant de lui avouer que Kriev était parti. J’ai offert pléthore de sourires à qui n’y saurait lire entre les lignes, pour masquer ce qui se délitait. J’ai omis la vérité quand on me demandait si tout se passait bien au Conseil, alors que j’ai dû prendre sur moi pour ne pas tout envoyer valser à chaque nouvelle lettre de démission que je recevais. J’ai maintenu que tout allait bien à ceux qui comptent alors que le soir, je trouvais refuge avec ma bouteille. J’ai clamé à Kriev, et aux autres, que j’étais passée à autre chose et que j’allais de l’avant, alors qu’il m’a fallu le revoir une dernière fois, il y a quinze jours à peine, pour pouvoir enfin le dire sans tromper. Et encore maintenant, je vais devoir mentir, cacher sous d’épais jupons l’héritage de ce que je vois comme une trahison qui grandit sous mon nombril parce que je ne veux pas l’assumer. Ne le dis pas à Helvie, s’il te plait. Je voudrais, plus tard, le lui dire, de vive voix. Alors, tu m’admires vraiment ? De refuser les mains tendues, les bras ouverts par pure fierté mal placée ? Vraiment ? Le pire, c’est que je me le suis infligé toute seule, tout ça.

    Alors, je vais tenter de répondre sans mentir, cette fois, à ta question. Comment je vais ? Je crois, après tout cela, que je vais sincèrement bien, et ce ne sont pas de nouveaux faux-semblants pour rassurer. Après avoir rendu la couronne, j’ai enfin tenu ma promesse auprès de Sieg, et nous sommes allés passer quelques jours en rase cambrousse pour aller observer les étoiles, et pour souffler. Nous en avions besoin, tous les deux. Après cela, je suis partie du Limousin en compagnie de Hector – l’avais-tu rencontré ? – pour aller rendre visite à Aurore, ma cousine, et surtout pour me rendre en Franche-Comté et repasser sur mes pas pour trouver quelques indices sur ce qu’il m’est arrivé, l’an passé, juste avant que nous nous rencontrions, tous les deux. J’ai voulu trouver quelques pistes à Dôle dans l’espoir de découvrir qui m’a voulu tant de mal au point de me faire enfermer dans une cave, et j’espérais pouvoir affronter ainsi mes démons. Je n’y ai trouvé qu’un vieux sous-sol et l’envie de vomir.

    J’ai posé le pied, ce matin, en Limousin, pour rentrer à la maison. J’appréhende comme j’apprécie d’être de retour ici. Hector a, à chaque instant, été à mes côtés, et de fil en aiguille, j’ai fini par m’y attacher. Je ne sais pas si je suis prête à l’aimer correctement, mais nous allons essayer. J’envisageais, en mars, de partir soit vers Genève, pour le Tournoi, mais cela dépendra de mon état de santé, sinon, ce sera un voyage vers l’Italie. J’ai acheté un bateau que je dois aller chercher. Peut-être que nous naviguerons au large des côtes méditerranéennes ensuite. Je ne sais pas trop, encore. Voudrais-tu te joindre à moi ?

    Je crois que j’ai un peu abusé sur le papier, et que tu vas recevoir beaucoup (trop) d’informations à la tronche en un seul pli. Tu m’en excuseras ? Je crois que j’avais besoin de me confier un peu. Et puis, qui de mieux placé qu’un ami ?

    Et toi, mon Ferdi ? Tu dis avoir été, ces derniers jours, comme un marin perdu sur l’océan. Qu’y a-t-il ? Où es-tu ? Que fais-tu ? Nous reverrons-nous bientôt ?

    Tu me manques,
    Ael

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