--Berthilde_la_nourrice
Des semaines qu'ils sont arrivés à Dijon. A l'aube, inquiets de savoir s'ils avaient été suivis ou pas.
Des semaines qu'elle a du faire leurs malles en vitesse, en pleine nuit.
Des semaines qu'ils ont fui, laissant derrière eux cinq années d'une existence paisible, abandonnant la propriété.
Des semaines qu'elle a peur.
Du mot qu'elle a laissé sur la table, à l'attention de la mère.
De la réaction de la mère.
L'enfant, lui, ne semble pas vraiment se rendre compte de ce que sa bêtise implique. Des conséquences.
Pour lui.
Pour elle.
Pour sa mère.
Déos lui sait à quel point Berthilde appréhende la prochaine fois que la jeune femme viendra visiter son fils.
En attendant, elle a réorganisé leur vie.
Se réappropriant une maisonnette discrète, acquisition rapide, un champ pour remplacer celui qui avait brûlé de l'autre côté de la frontière.
Il fallait retrouver une existence normale, comme si rien ne s'était passé cette fâcheuse nuit...
Et surtout ne pas se faire remarquer.
Aussi exerçait-elle une vigilance plus accrue que jamais, veillant à ce que le garçonnet ne s'éloigne plus. Même lorsqu'il allait au verger, il n'était désormais plus jamais seul un instant.
Terminées les promenades forestières avec le chiot.
Terminées les escapades dans les ruelles.
Ils allaient devoir fournir des explications à la mère. Jusque là, elle ferait en sorte qu'il n'arrive rien, quitte à ce que l'enfant s'indigne. Il était reclus à demeure, à travailler sa calligraphie. Et elle n'en démordrait pas.
Bon sang ce qu'elle peut avoir la frousse.