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[RP] Bourgeon, babil et mélancolie... Acte Deux

--Le_fourmilion



Lui, il serinait le nom que sa mère lui avait donné. Son chagrin temporairement évincé par ce simple fait, comme si elle venait d'ajouter une pièce au puzzle de son existence.

De thunes, de Thunes, de Thunes...

N'en finissait-il pas de répéter, sourire aux lèvres lorsque la porte de la chambre s'ouvrit sur sa nourrice.
Il sauta de son lit, rassénéré, et la suivit jusqu'à la pièce à vivre où l'attendait sa mère.
Un coup d'oeil et il vit rapidement que son chien n'était pas là. Un regard interrogateur à Berthilde qui resta sans réponse. La nourrice s'était mise en retrait.


Maman ? Où est l'alan ?

Petit minois tout étonné, même si quelque part il se demande si parler du chien en cette heure est tout à fait approprié.
--Juste_une_fille.



Elle finissait tranquillement de boire son godet d'eau. L'air naturel et dégagé et pourtant bon sang ce que ça cogitait dans sa petite tête. La jeune femme savait que ce qui allait suivre serait cruel, et que son fils n'y verrait peut-être pas la leçon dans l'immédiat. Mais elle ne savait comment faire d'autre. Alors comme chaque fois dans ce cas là, elle imaginait ce que le père du Fourmilion aurait fait, ce qu'il aurait bien pu dire. Mais elle savait aussi qu'elle pouvait se tromper complètement. Et cela la terrorisait. Comme nombre de parents sans doute, qui espéraient faire les bons choix pour leurs enfants.

Elle détailla longuement le visage de son fils. Si fin, si innocent. ET serra les dents en songeant au mal qu'elle allait lui faire.


Il est dehors. Suis moi !

Le ton est sans appel.
Rapidement ils sont dans l'arrière cour, et s'arrêtent à distance du jeune chien enchaîné.


Ne bouge pas !

Lui intime-t-elle encore, tandis qu'elle même retourne vers sa monture et extrait une arme de belle facture et de petite taille d'un fourreau provisoire accroché à l'arrière de la selle. Garde en main, elle fait luire la lame sous le soleil hésitant, cherchant encore d'un regard acéré l'éventuel défaut de l'arme.
La jeune femme prend son temps, surveille d'un oeil l'enfant dont le regard inquiet passe du chien à l'épée, puis sans se presser revient à ses côtés.


Tu vois... Il est malade !

Elle envoie un caillou en direction de l'animal qui se met à aboyer, grogner, hors de lui.

Tu n'as pas le choix ! C'est à toi d'y remédier !

En lui tendant l'épée, appuyant ses propos du regard. Alors que le chien n'en finit plus d'aboyer, bave aux lèvres.

Je te laisse un quart d'heure pour le faire... Après je le détache et advienne que pourra. S'il s'échappe et répand la maladie... ou s'il te mord...

C'est dit d'un ton sec. Elle refoule tout sentiment d'empathie. Il doit apprendre. Quel qu'en soit le prix.
Talons tournés sans rajouter le moindre mot ni même un regard d'encouragement.
Et le bruit de la porte qui se referme en ultime réponse qui pourrait se poser.



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--Le_fourmilion



Et sa bonne humeur retrouvée se brise en mille morceaux éparpillés dans cette arrière cour. Son sourire s'efface et revient l'envie de pleurer. Un regard implorant se pose sur le visage fermé de sa mère.
Il fait un pas en arrière, jamais encore il ne l'avait vu aussi résolue, dure.

Mais le voilà, épée en main, face au jeune chien. Désespéré. Incapable du moindre mouvement.
Tétanisé.
Seul.

Il approche, d'un pas, puis d'un autre, démarche hésitante, et le bras tenant l'arme peu assuré.
L'enfant s'arrête.
Et reste un temps qui lui semble une éternité devant le chien.
Puis, après avoir pris une longue inspiration il lève le bras pour frapper l'animal. Et le bras s'arrête, en l'air, avant de retomber sans avoir porté le moindre coup.

Il reste là, le bras ballant, alors que le chien aboie, grogne et menace de ses crocs.
--Juste_une_fille.



Après être rentrée, elle s'était resservi à boire. Subterfuge illusoire afin de ne pas penser à ce qui se passait, l'espace d'une seconde. Vaine tentative s'il en est.

Durant le délai qu'elle a accordé à son fils, elle reste à la fenêtre à l'observer. Souhaitant secrètement qu'il le fasse, puis qu'il ne le fasse pas. Son raisonnement est si confus. Et quand le moment vient de se résoudre à le rejoindre, elle reprend ce rôle si difficile, bottes qui ne sont pas les siennes...

Arrivant à ses côtés, elle le regarde sans complaisance, puis s'avance en tenant le chien à l'écard à l'aide d'un rateau saisi devant la remise. L'animal se tapit, grognant toujours, prêt à bondir à la moindre occasion. Elle prend la chaine en main, lâche un peu la tension, et l'animal profite pour sauter en direction de l'enfant immobile devant lui.

A son grand desarroi elle voit son fils toujours incapable de la moindre réaction tomber en arrière. La jeune femme tire d'un coup sec et violent sur la chaîne, étranglant presque le chien. Elle oublie son coeur dont les battements résonnent à ses tempes. Campée dans le rôle dont elle s'est impartie, si pesant soit-il, si loin d'elle soit-il. Chaîne replacée, serrée à l'extrême, le clebs n'a plus aucun moyen de mordre qui que ce soit, à moins de le vouloir.

Elle attend. Regard sombre sur l'enfant à terre.


Vas-tu te lever ?...

Imagine ce que dirait ton père de te voir si faible...


Bon sang ! Que même prononcer ces mots est douloureux et pourtant, elle ne perd pas son objectif de vue. La fin justifiant les moyens. Une dure leçon.


____________________________
--Le_fourmilion



[De la peur...]


Il était resté là, comme statufié, en incapacité totale de faire ce qu'on attendait de lui, de tuer d'animal. Il avait voulu pourtant faire plaisir à sa mère, mais c'était trop dur. Mettre fin aux jours de son seul ami était inconcevable.

Et maman avait fait ça...

Il avait cru sa dernière heure venue lorsque le chien s'était élancé vers lui. Méconnaissable, l'animal avait une lueur insane dans les yeux. Tombé à terre, il lui semblait avoir crié.
Et la situation avait été maîtrisée par maman. Qui était fâchée, bien plus que par la bêtise comtoise visiblement.


Et ses propos atteignirent l'enfant en plein coeur. Les yeux remplis de larmes, il se releva :

Pardon maman...

J'ai pas pu...


Il continue de sangloter, attendant un signe de sa mère. N'importe quoi sauf ce qu'elle lui présente depuis quelques minutes.
--Juste_une_fille.



La jeune femme continue de masquer la moindre émotion et lui offre toujours ce visage impénétrable. Se laisser aller à l'empathie maintenant réduirait à néant l'effort fourni.
Elle fait l'impasse sur la boule qui lui noue la gorge et continue de le regarder alors qu'il se relève. Il lui semble que la peur qu'elle a lu est leçon suffisante pour l'heure.
Mais lorsqu'elle l'entend s'excuser, l'irritation qu'elle ressent de voir qu'il lui ressemble autant l'oblige à renchérir. La gifle tombe, cinglante, sur la joue de l'enfant. Surpris il retombe le cul à terre.
Elle se penche sur lui, et lui prend l'arme.


Ne t'excuse jamais d'être tel que tu es !

Qu'il comprenne maintenant ou plus tard. L'idée ferait son chemin, du moins l'espérait-elle. Retour au chien, dont la gorge est tranchée d'un coup net et précis. Sans plaisir aucun. Un mal nécessaire.

Elle ne se retourne pas. Trop perturbée par tout ce qui venait de se passer pour faire face à son fils.


Tu ne dois pas craindre de blesser ceux qui te sont proches. Si c'est le prix à payer pour rester en vie, tu dois te faire à l'idée de devoir sacrifier ce qui t'es cher.

De ne t'attacher à rien.

Même pas à moi. Surtout pas à moi.


Les derniers mots sont soufflés, à peine audibles. Le naturel regagne du terrain sur la résolution. Elle est pressée de mettre fin à tout cela.

Rentre maintenant !

Elle sait qu'il va obéir. Et qu'elle peut faire relâche. Tout en nettoyant la scène. Délaissant l'épée, elle s'affaire à emballer le cadavre de l'animal dans une vieille couverture, puis le faire regagner le panier dont elle l'avait sorti au départ. Les gants souillés rejoignent le corps, comme elle effacerait les traces d'une faute inavouée. Plus tard elle ira enterrer le panier dans un coin désert du cimetière, qu'importe. Un seau d'eau nettoie le reste de sang que la terre n'a pas encore absorbée, un peu de vieille paille vient parfaire l'illusion... Comme si rien ne s'était passé.
Les battements de son coeur se sont calmés. Elle reste dans l'idée qu'elle a fait ce qu'elle devait. Avec les moyens du bord. Fourmiesques.

Maintenant elle peut rentrer à son tour. L'épée est ramassée, et le chiot, l'alan de son fils est libéré de la remise, porté jusqu'à la demeure. Et lorsqu'elle entre et que la nourrice la regarde soulagée, elle lui adresse un sourire triste. Libérant le jeune animal qui se rue dans la chambre rejoindre son petit maître en jappant joyeusement.
Elle plonge l'épée dans la cendre de l'âtre de la cuisine, puis va s'asseoir. Epuisée. Vidée.



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--Le_fourmilion



Petite main posée sur la brûlure cuisante de sa joue, larmes aux yeux il écoute sa mère. Durs et froids sont les propos qu'elle lui tient. Qu'il entend sans vraiment comprendre. Complètement largué.

A reculons il retourne dans la maison, traînant les pieds après l'exécution du chien.

Dans la cuisine, sans dire un mot à Berthilde, il plonge ses mains dans un seau d'eau, se rafraichit le visage avant d'aller dans sa chambre. Là, assis sur le lit, il essaye de comprendre.

"Quand je fais une bêtise je m'excuse et c'est bien... et là je m'excuse et c'est pas bien.."

A n'y rien comprendre. Il n'a pas saisi encore que sa façon d'être n'était pas une bêtise, simplement un trait de caractère.

"Sacrifier... blesser... tenir à rien... j'comprends rien maman..."

Il est encore en train de retourner ça dans tous les sens lorsqu'un jappement joyeux fait son entrée dans la chambre et se jette sur lui, lui léchant le visage. Alors il rit... Même s'il ne comprend plus rien du tout.

Sourire revenu sur un visage las d'avoir tant pleuré, il retourne dans la cuisine, silencieux. Debout, il reste un instant à regarder cette femme, si petite à côté de la sculpturale nounou, si fragile, et pourtant il vient de découvrir combien elle pouvait être dure. Et là, elle a l'air tellement douce à nouveau, tranquille, le regard perdu sur les braises de l'âtre. Il s'approche doucement et dépose sa main sur celle de sa mère.


Maman...

Il hésite et pourtant...

Parle moi de lui...

Il sait qu'il n'a pas besoin d'en dire plus. Qu'elle comprend. Un petit sourire, à peine contrit, et un regard qui implore réponse.
--Juste_une_fille.



Certes son regard se perd, cherche certainement réponse dans le rougeoiement de ce feu mourant. Il l'apaise.
Un sourire discret vient se dessiner sur ses lèvres pâles sous la caresse légère de son fils, puis il se fige lorsqu'il parle enfin. Elle se crispe.

Elle se lève, prend l'épée par la garde, fouaille un instant les braises puis la ressort enfin de l'âtre et la plonge dans le même seau que celui où s'est rafraîchi son fils quelques minutes auparavant, avant de la ressortir à nouveau après un léger bruissement de l'eau, infime.
La jeune femme continue, comme si la question devait rester en suspens, aussi longtemps qu'elle le désirerait.
L'épée vient tapoter les briques, se défaisant ainsi de sa croûte de cendre collée.


Va jeter cette eau souillée et remplir le seau.

Elle retient le "S'il te plaît"... parce qu'il le faut. Sourire aux lèvres de le voir s'exécuter sans rechigner. Puis elle retourne s'asseoir, pose l'arme sur la table, et farfouille dans sa besace posée là. Chiffon et graisse viennent achever de décorer la table. Et quand il reparaît chargé du seau d'eau claire, elle a commencé d'astiquer méticuleusement l'objet.

Assied toi !

Elle cherche encore quoi lui dire au sujet de son père. Qu'il est grand, berrichon, bûcheron à ses heures, taciturne, et qu'il lui a légué sa silhouette et son regard en héritage, tout ça son fils le sait déjà. Lui dire qu'il est l'homme le plus troublant qu'elle ait jamais rencontré ne l'avancerait guère. Non plus que les demoiselles se pâmaient devant lui, certaines n'hésitant même pas à venir lui dire à elle... Un petit sourire ironique apparait subrepticement. Et disparait aussitôt.

Horkos...

Ton père est comme une fontaine de jouvence. Il est toute la lumière de ce monde et à côté de lui, les autres ne semblent être qu'ombres sans vie.

Et chaque jour qui passe, il me manque.


Son regard s'est planté dans celui de son fils, celui du père. Parler de lui est si douloureux. Comme mettre son coeur sur la table et le décortiquer à l'aide de pinces chauffées à blanc.

Regarde cette épée... Elle est tienne désormais. Tu dois apprendre à la manier, mieux que ce jouet de bois avec lequel tu t'es entraîné jusqu'à présent.

Je reste encore un peu... Nous aurons le temps de voir comment tu te débrouilles avec.

Maintenant file jouer, Berthilde doit faire le repas et nous encombrons la place.


Lasse de parler, elle coupe court à tout et se lève pour aller dans la chambre. Porte close sur elle et sur l'extérieur.


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--Le_fourmilion


Il avait bu les paroles de sa mère comme un nectar divin. S'imaginant un père immense, sage, étincelant dans une armure flamboyante, chevauchant libre épée au poing...
Il en voudrait plus, mais il sent bien que cette fichue croisade qui garde son père loin d'eux fait mal à sa mère.
Et quand elle change de sujet, lui montrant l'arme forgée pour lui, il se jette à son cou, la serrant du plus fort que peuvent ses petits bras.
Puis, il court hors de la maison en direction de leur petit champ, combattre les épis en riant.

Il remet les questions à plus tard. Il a une belle épée, brillante et aiguisée, gravée en son pommeau d'argent à ses initiales. HdT, les lettres ciselées semblent danser pour lui sous le soleil lorsqu'il la bouge.

Le Fourmilion est heureux. Sa mère est à ses côtés.
--Juste_une_fille.



Les jours avaient coulé, au rythme de la douceur printanière qui s'installait.
Les leçons d'escrime venant prendre une place entre les études studieuses auxquelles elle soumettait son fils.

Ils n'avaient pas reparlé de l'épisode du chien. Elle espérait que le moment venu ses propos auraient fait leur chemin et qu'il saurait de lui-même en tirer les leçons.

Puis, vint le moment de la séparation. Encore.
Elle avait fait séjour bien long.
L'avait encouragé à ne jamais se renier, à suivre ce que son coeur lui disait... Quel qu'en fut le prix.
Et à régler ce problème d'ennemi de Bourgogne.

A l'instant de partir, un dernier présent est glissé au cou de l'enfant, jolie chaîne d'argent dont le médaillon finement ciselé est glissé dans le col de la chemise.
Un dernier baiser frôle le front du garçon, et comme de coutume c'est le coeur lourd qu'elle reprend la route.


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