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[RP] La plume et le Vélin

Cevanne
Plusieurs jours s'etaient écoulés apres sa promenade a la sainte chapelle. Non il ne gardait de ce jour aucun souvenir des chants si réputés qu'il lui tardait d'entendre.
Il y avait le souvenir de cette femme endormie sur le dallage froid, les yeux gris plein de malice, les levres agitées de questions, un prénom. Davia *.

Le renart soupira comme a son habitude.


- Allons y Maturin...

Une fois de plus il prit place dans sa voiture pour etre conduit a la Sainte Chapelle. Une fois de plus le renart fit les meme gestes, les memes prieres, et s'assit au meme endroit les yeux furtivement rivés sur la dalle.
Alors que les chants s'elevaient, le renart en fit autant, et sortit.
Pourquoi ?
Il ne se sentait pas en phase avec le lieu, avec l'instant, avec sa foi.
Aux yeux hagards de son valet, le melancolique repondit par une main levée avant de s'engouffrer dans la voiture.

Au louvre, le melancolique attrappa son chapelet et tenta dans la pénombre de sa chambre de se rattraper quand il remarqua sur un gueridon un pli a son attention.


Citation:
Loches, le 28 avril 1459

A Séverin de Volvent, mon sauveur de la Sainte Chapelle.

Bien cher Severin,

Sans doute serez-vous étonné de recevoir cette missive, une envie subite, la plume qui me démange, bref, l'envie de vous écrire tout simplement, prendre de vos nouvelles, apprendre à vous connaître un peu mieux...

Enfin, je cherche des excuses, je crois!

J'espère que depuis notre rencontre, vous vous portez bien. Ma monture m'a fidèlement conduite en terre tourangelle et, c'est sans encombre que j'ai retrouvé les miens, enfin une partie des miens, l'autre étant partie combattre l'hérétique à Genève.

Etant quelques peu désoeuvrée ces temps-çi, il est vrai que je cherche occupations, vu les nouvelles du front et des progrès de l'hérétique, je me demande si je ne vais pas aller rejoindre mon père au combat. Peut-être pourrions nous avoir besoin de vos connaissances? Vous y connaissez-vous en tactique militaire?

Loches est assez ennuyeuse depuis mon retour, je ne passe plus en taverne, autant de bon temps qu'avant, à croire que vous aviez raison, mon cher!

Mais, vous, que devenez-vous? Avez-vous retrouvé votre soeur? Etes vous rentré chez vous? Votre fidèle Maturin vous suit-il toujours?

Donnez-moi de vos nouvelles si vous en avez le temps et l'envie, il me tarde de vous lire.

Que le Très-Haut vous garde, vous et les vôtres.

Bien à vous.

Davia Corsu de Villandry



Un leger sourire eclaira la visage pale.
Pourtant il ne se laissa pas aller a l'impulsion de répondre.
Il reposa le vélin le caressant d'un doigt puis se reconcilia avec le chapelet pour prier.

Ce n'est que bien plus tard qu'il s'installa au secretaire et écrivit lui meme, de sa fine ecriture longue et penchée.
Le premier mot se fit hésitant, bien longtemps qu'il n'avait écrit... qu'il s'impliquait personnellement.


Citation:
A Damoiselle Davia Corsu de Villandry, a l'endormie de la sainte chapelle,
De Severin Anatole de Volvent,

Ma dame,

C'est avec autant de surprise que de plaisir que j'ai reçu votre lettre.
Je suis fort aise de vous savoir saine , je dois avouer que je me suis inquété et qu'il m'est arrivé de me demander si vous aviez fait bonne route.

Je séjourne pour ma part toujours au Louvre chez ma cousine, et ce matin je me trouvais encore a la sainte Chapelle.
Je songe partir bientot, aussitot que j'aurai trouvé une famille pour m'accueillir en precepteur, je dois dire que je m'ennuie de cette vie trop calme. Je n'ai aucune nouvelles de ma soeur, et ma cousine est fort prise par ses responsabilités au sein de la maison royale.

Loin d'avoir votre attrait pour la guerre, je n'ai aucune connaissance pour les choses militaires . Je sais manier l'épée comme tout noble bien eduqué mais je ferai sans aucun doute un piètre soldat et un pauvre stratège.

Si jamais vous decidez de rejoindre votre père, ce qui m'apparait admirable, je ne saurais que vous demander de prendre soin de vous et de vous premunir de tout danger...

Je vous laisse sur ses mots et dans la paix.

Severin.


Les mots furent lus et relus. Etaient ils trop formels ou trop familiers ? appropriés ou indécents ? Corrects ou déplacés ? trop de questions, et une envie, l'envoyer au plus vite.
Une fois le grain de sechage soufflé ,le vélin fut plié et confié a un valet.

_________________
Davia_corsu
Elle était revenue juste à temps à Loches pour le mariage de sa mère. Taya se mariait... et oui, tout peut arriver en ce bas monde! La jeune blanche était heureuse que sa mère d'adoption ait enfin trouvé le bonheur. Dorénavant, elle pourrait partir tranquille, Hans veillerait sur elle.

Étrangement, depuis la rencontre de la Sainte Chapelle, elle ne trouvait plus aucun plaisir à aller en taverne et elle travaillait avec acharnement sur son savoir-vivre, tentant de perdre ses vilaines manières de soldat. A peine arrivée, déjà repartie. Direction l'Anjou et ses coupines de toujours. Elle allait retrouver un peu d'enfance et pouvoir raconter tout plein de choses à Trella et Caca. Elle ne savait pas trop si elle parlerait de Séverin. Elle avait déjà hâte de le revoir mais avait presque envie de garder leur rencontre comme son secret, rien qu'à elle.

Elle s'habillait de sa houppelande blanche lorsque la missive du Sieur de Volvent lui arriva. Assise à la table de sa chambre, lissant ses cheveux ondulés, elle ouvrit le vélin dont elle ne connaissait pas l'écriture et rougit en voyant la signature. Ainsi, il avait pris le temps de lui répondre! Un sourire éclaira son visage et fit pétiller ses yeux. Elle suivit gouluement les mots, savourant les pleins et les déliés.

Ainsi, il était heureux de la lire! Une chance, elle pensait avoir été un peu cavalière de lui écrire ainsi sans autre raison valable que l'envie de garder le fil tendu entre eux. Au moins, il ne lui en faisait pas reproche. Il s'était inquiété! Il avait pensé à elle! Son visage devient rouge comme un fard. Il était plus prolixe la plume à la main que la verve à la bouche!

Elle posa un instant son visage dans sa main se demandant qu'elle était sa vie. Le Louvre... la vie de précepteur. Dans quelle famille serait-il accueilli, à qui enseignerait-il? Elle sourit, pensant à Magaline, sa petite soeur qui avait trouvé précepteur. Il ne devait certainement pas ressembler à Séverin, personne ne ressemblait à Séverin.

Elle poursuivit la missive et sourit à nouveau aux derniers mots: la paix... si seulement, elle pouvait la trouver... Soupirant, elle plia consciencieusement le velin, hésita à le posser dans une petite cassette, pour finalement le glisser dans son corsage. Elle pourrait le relire à souhait et selon son envie.

Elle ne répondit pas de suite, se sachant trop impulsive, la plupart de ses erreurs étaient liées à son côté sanguin qu'elle tentait de tempérer tant bien que mal. Elle répondrait à son arrivée à Saumur. Impatiente, elle rejoint donc sa meilleure amie pour faire route vers la ville angevine.


Saumur, deux jours plus tard.

Deux jours que le parchemin la démangeait, mais elle avait tenue bon. A peine arrivée chez Trella, elle s'isola dans un coin, velin et plume à la main et s'installa sur une table. Trouver l'inspiration...

Citation:
A Séverin Anatole de Volvent, précepteur d'ici et d'ailleurs,
De Davia Corsu de Salières de Villandry.

Bien cher ami,

Merci de tout coeur de votre réponse. A croire que les courriers ont quelques choses de miraculeux chez vous, car, le vôtre m'est arrivé fort prestement! J'en étais ravie!

Me voici depuis peu à Saumur où j'ai retrouvé mes amies d'enfance, car l'une d'entre elle se marie sous peu. Il est dit que c'est la période des mariages, car après avoir marié mon père, puis ma mère adoptive, voici que c'est le tour de mes amies.

J'ai du interrompre ma formation de diaconesse en raison de mon départ prochain pour la Helvétie. Le voyage se prépare et s'annonce mouvementé. Je ne sais ce qu'il en ressortira. J'attends impatiemment que la Reyne mobilise ses troupes pour prêter main forte aux OMR. C'est sans doute la première fois que je prie pour partir en guerre.

J'ai reçu des nouvelles de mon meilleur ami, qui, même s'il se porte bien, est très inquiet. Une fois pour toute, il nous faudrait extirper le Lion de son emprise sur ces terres. Que le ciel m'entende!

Pardonnez-moi à chaque fois, je ne vous parle que de guerre!! Bien malgré moi! Il est vrai que la guerre est le coeur de ma vie. Et pourtant... comment ne pas aspirer à la paix! Un jour peut-être la trouverai-je! Vous semblez l'avoir trouvé et je vous envie. Vous, si calme, si silencieux. Un jour, il vous faudra me confier votre secret!

Avez-vous trouvé une maison pour vous accueillir? Enseignez-vous à des enfants turbulents qui mettent à mal votre patience? A moins que vous n'ayez trouvé une douce élève aux milles qualités? Quoiqu'il en soit, prenez soin de vous et que le Très-Haut vous garde sur votre route.

Dans l'attente de vos nouvelles, mes prières vont vers vous.

Davia


Elle relut sa missive tout en dénouant ses cheveux. Il était tard et elle était bien fatiguée. Elle fit mander un valet et lui remit le pli cacheté à la cire et portant les armes des Corsu.

S'allongeant sur sa couche, elle se prit à réfléchir. Un poème qu'elle avait appris dans son enfance lui revenait en mémoire et machinalement, elle se mit à le réciter.




Je suis le Ténébreux, – le Veuf, – l’Inconsolé,
Le Prince d’Aquitaine à la Tour abolie :
Ma seule Étoile est morte, – et mon luth constellé
Porte le Soleil noir de la Mélancolie.

Dans la nuit du Tombeau, Toi qui m’as consolé,
Rends-moi le Pausilippe et la mer d’Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon cœur désolé,
Et la treille où le Pampre à la Rose s’allie.

Suis-je Amour ou Phébus ?… Lusignan ou Biron ?
Mon front est rouge encor du baiser de la Reine ;
J’ai rêvé dans la Grotte où nage la sirène…

Et j’ai deux fois vainqueur traversé l’Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre d’Orphée
Les soupirs de la Sainte et les cris de la Fée.*


Ce texte correspondait parfaitement à l'image qu'elle se faisait de Séverin. Mais était-ce réellement ce qu'il était? Un mélancolique, poète maudit au sourire triste et au teint blême. Elle ne put s'empêcher de sourire: Amour, Phébus, Lusignan, Biron... courant après des chimères... Elle s'endormit dans les bras de Morphée, bercée par un monde mythologique où cerbères à trois têtes côtoyaient nymphes séductrices et faunes mystérieux. Et dans sa course aux dieux et aux diables, elle cherchait Séverin.

* Le Desdichado de Gérard de Nerval - 1854

_________________

Blanche un jour, blanche toujours
Cevanne
[ Celui qui cédait ... ]

Le renart était plus sombre qu'a l'accoutumée.
Il y avait des jours ou ses démons revenaient le titiller.
Des jours ou coulaient dans ces veines le poison des regrets, du remords et du désir mélangés.
Des jours ou a prière ne suffisait a le soulager et ou les pulsions faisaient de lui un animal pris dans la cage d'un corps malade.

A chaque clignement d'yeux il voyait un visage, chaque silence pesant se substituait a un rire sensuel, un rire taquin, moqueur, joueur, comme dans l'air un parfum venu sans doute des abysses de ses maudites réminiscences.
Et aux derniers restes d'un hiver depuis longtemps passé se substituait une chaleur étouffante.

De son regard métallique, adossé au mur qui subissait sa rage il scrutait la coupe au rebord béant du vin qu'elle venait de cracher sur la tapisserie telle une tache de sang.
Ce calice qu'il buvait depuis de longues années, la lie n'ayant plus que gout de cendre entre les lèvres tremblantes de la faiblesse qui le parcourait alors que frémissait sa chair.

La nausée venait se rajouter au tableau, cette envie de se vomir, quand le parfum se transforme en odeur de chair calcinée... Quand ses blessures lui brulent comme au premier jour quand il voudrait être mort et que la vie désespérément court en lui.

- Maturin !

L'au secours qu'il lance, le seul qu'il peut se permettre. Car si la solution le répugne, elle est la seule a pouvoir lui laisser du répit.
Alors que le valet apparait, le maitre se releve péniblement, blême, les yeux en soucoupe, fébrile.

- Emmène moi... J'en ai besoin!

Point besoin d'autres explications le valet a compris.
Il n'aura le temps que de poser une missive que le renart ne verra pas tout de suite.
Une cape sur les épaules, c'est en toute discrétion que le renart s'éclipse du Louvre .


*************************************

Plusieurs jours étaient passés depuis la crise du mélancolique.
Enveloppé dans les ombres il avait su se débarrasser de ses pulsions et même si la souillure lui brulait encore la peau, il se sentait plus libéré.
C'est donc a ce moment seulement qu'il découvrit la lettre de Davia qu'il parcourut des yeux.

Jolie contradiction que cette jeune femme. A parler de ses amies, des mariages avec l'excitation des jeunes printemps et d'attendre dans un même temps presque fébrilement la violence de la guerre...
Il la découvrit plus religieuse qu'il n'aurait pensé, une formation de diaconesse, lui qui n'était jamais allé au bout de ce chemin...

Enfin un sourire narquois se dessina sur les lèvres cyniques alors qu'elle parlait de la paix...
La paix n'est qu'illusion, elle n'est que le calme quand dans les eaux noires s'affrontent les bêtes du sans nom...
Véritablement a cette paix il aurait préféré la mort...

Il abandonna un soupir las...
Plus tard il répondrait.

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Davia_corsu
["Notre vrai tombeau n'est pas dans la terre, mais dans le coeur des hommes." - Proverbe persan]

La jeune blanche avait du quitter l'Anjou en toute hâte. Guerre, guerre... le mot résonnait dans sa tête mais avec la guerre, les fièvres étaient revenues et une fois à Loches, elle avait craint de ne plus pouvoir partir tant elle était au plus mal. C'est fichues fièvres qui régulièrement la terrassaient et qu'elle haïssait en tout point, cette fois, elle ne les laisserait pas l'abattre.

Courageusement, elle avait repris contact avec Lladrane, avait préparé sa besace, organisé ses affaires en ôtant tout ses effets de blanche étant donné qu'elle partait, cette fois-ci, en son nom propre, embrassé sa grand-mère qui, elle aussi prenait la route de la guerre, fait ses adieux à sa mère, espérant qu'elle se porterait bien.

La veille de son départ, elle avait reçu missive et c'est les mains fébriles tant pas la maladie que par l'émotion de la lire qu'elle l'avait ouverte, un léger sourire sur ses lèvres: Séverin...


Citation:
A Davia Corsu de Salière de Villandry
De Severin Anatole de Volvent,

Chère Davia ,

Veuillez me pardonner le retard de ma réponse, J'ai été quelque peu souffrant, mais rassurez vous, je me porte bien.

Je suis heureux de lire a travers vos mots que malgré votre attrait pour la guerre et ses tourments, vous trouvez à profiter de la vie auprès de votre famille, vos amis. Il est important de se divertir et de profiter de ce que la jeunesse offre de plus réjouissant tout en prenant garde a ne s'égarer et s'éloigner de trop du bon chemin.

Vous semblez cependant empressée et déterminée à rejoindre le front aussi comme le ferait un ami, je ne peux que vous recommander une nouvelle fois la prudence. Je n'aurai de cesse de m'inquiéter si je ne reçois plus de vos nouvelles. Vous voilà à présent mon obligée.

Vous parlez d'une formation de Diaconesse. Vous destinez vous a la voie de l'église plutôt qu'a celle de l'armée ? La question m'intrigue.

Je suis quant à moi, encore au Louvre, j'ai échangé maintes correspondances avec des familles en Empire, au Languedoc et en Bretagne. Non pas que je soie paresseux, mais je préfère donner l'avantage a la famille avec le moins d'enfants, car je crois que l'enseignement ne profite réellement que s'il est exclusif et dirigé a une fin précise qu'est celle de l'éveil des jeunes esprits aux réalités du monde.

Mais je ne voudrais vous ennuyer, s'il plait à Aristote que quelque chose se concrétise, je vous en informerai si vous le souhaitez.

La paix chère Davia est une notion tellement subjective, plait au ciel que nous ayons un jour l'occasion d'en débattre de vive voix.

Je vous laisse à présent, que le ciel vous garde.

Severin.


Elle reposa le vélin et prit une grande inspiration. Elle était trop faible encore pour lui répondre et elle se devait d'être tout à la préparation de ce long périple qui l'attendait. La peur lui rongeait les entrailles, pourtant, elle n'était pas d'une nature froussarde, mais cette fois, il y avait quelque chose de différent, un pressentiment peut-être. Elle se prit à relire la missive, à nouveau. Les mots de Séverin lui faisaient du bien, elle appréciait en tout point d'avoir de ses nouvelles.

Elle caressa le vélin et le glissa rapidement dans son corsage. Elle n'avait malheureusement pas le temps de répondre, elle le prendrait plus tard, sur la route.

_________________

Blanche un jour, blanche toujours
Davia_corsu
[Quelque part sur les routes de France]

Depuis combien de temps cavalait-elle sur les routes? Trois, quatre jours, peut-être plus. Elle ne savait plus vraiment, la notion du temps devenant aléatoire. Ses compagnons de route était tout aussi silencieux qu'elle. Elle avait emboîté le pas à Lladrane, la fille des suzerains de son père et depuis Loches, ne l'avait plus quittée.

Le vent faisait danser leurs cheveux et les journées passées au soleil du printemps hâlait leurs visages. Davia était exsangue mais elle n'en montrait rien. La dernière missive écrite par Séverin était sagement rangée dans son corsage et souvent le soir, épuisée, lorsqu'ils faisaient une halte de quelques heures pour reprendre des forces et reposer les chevaux, elle passait sa main en souriant sur le vélin se disant qu'elle brûlait d'envie de répondre.

Ils approchaient de leur destination, si bien que la halte de ce soir là fut bien plus longue. Emmitouflée dans sa cape pour se protéger de la fraîcheur du soir, à la lueur du feu de camp, installée sur une paillasse de fortune, elle avait prit une plume et tentait, tant bien que mal, de rédiger proprement la missive qu'elle adressait à son ami de la Sainte Chapelle.


Citation:
A Séverin Anatole de Volvent,
De Davia Corsu de Villandry.

Mon cher Séverin,

Pardonnez-moi de n'avoir pu répondre à votre lettre plus tôt. Etant sur les routes de notre beau royaume, je n'ai malheureusement pas pu prendre le temps de vous écrire.

J'espère que vous vous portez bien, que vous êtes tout à fait rétabli maintenant et que vous pouvez, avec bonheur, vous adonner à votre soif de connaissance.

Pour ma part, je chevauche depuis quelques jours déjà, avec quelques compagnons de route qui vont, tout comme moi, prêter leur épée à la Croisade contre l'Hérétique. La route est longue, et il me tarde d'arriver. Là-bas, je sais que je vais retrouver mon meilleur ami, frère en Aristote mais aussi frère d'armes et le Capitan Namay qui lève une armée royale pour prêter main forte aux OMR. Je ne sais, malheureusement, si mon père et mon parrain sont avec eux, ni même s'ils se portent mieux, mais je compte en être avisée au plus vite.

La guerre est étrange. C'est terrible de devoir occire pour que la paix revienne ensuite et pourtant, lorsque l'on part pour combattre, il y a quelque chose d'exaltant et d'attirant, comme une séduction implicite entre le guerrier et la guerre qu'il va faire. Je sais combien est amer le goût du sang et de la poudre, une fois la bataille terminée et pourtant, avant chaque combat, la tension est la même, ce désir de lutter, cette attente si intense d'enfin laisser libre court à sa foudre guerrière.

Je ne sais quand seront les premiers combats, je ne sais si j'en réchapperai, même si je le désire, ne serait-ce que pour vous revoir un jour, mais sachez que vous ne quittez pas mes prières.

Avez-vous trouvé une famille à enseigner? Et si oui, qui sont-ils et comment cela se passe-t-il?
Tenez-moi au courant et surtout, prenez soin de vous.

Qu'Aristote vous protège.

Davia.


Elle se relut hâtivement. L'écriture était légèrement tremblante et quelques ratures tâchaient le parchemin. Les conditions pour envoyer cette missive n'étaient pas les meilleures mais elle espérait que Séverin ne lui en tiendrait pas rigueur. Elle le plia consciencieusement après avoir séché l'encre et le glissa dans la besace qu'un courrier irait conduire à destination dès le lendemain avec les lettres des soldats.

La route serait encore bien longue...

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Blanche un jour, blanche toujours
Cevanne
Le mélancolique avait pris connaissance des mots de Davia alors qu'il terminait de libérer les appartements du Louvre ou il venait de sejourner chez sa cousine.

Il prendrait la direction de la Bretagne ou il avait enfin fixé son choix.
Quoi de mieux qu'une terre que l'on disait froide et tranchante comme ses falaises decoupées au couteau divin, quoi de mieux que l'etranger pour lui qui ne se sentait chez lui nulle part, quoi de mieux que la grisaille pour un coeur qui avait perdu ses couleurs.

Apres les embrassades de rigueur des aurevoirs chaleureux, le renart prit place a l'arriere du coche.
La route serait longue et il ne se sentait pas chevaucher.
L'air serieux il accorda son temps a lire et relire la missive de Davia.

Elle était pour l'heure la seule de ses correspondances.
Bientôt il recommencerait à écrire a Della aussi.
Quand a Ode il n'avait guère de nouvelles.

Davia donnait des noms qu'il ne connaissait.
Elle décrivait des choses qu'il n'avais pas vécues.
Sa guerre a elle ne ressemblait en rien a la guerre qu'il se faisait contre lui même, La guerre contre ce qu'il avait pu devenir au gré des perditions.
Cette guerre creusait un fossé entre lui et le monde, et sa guerre a elle agrandissait ce fossé.

Il ferma les yeux un instant, l'imaginant difficilement, elle cette frêle demoiselle aux yeux gris, l'épée a la main au milieu d'une cohorte éclaboussée de sang...
Ce n'était la qu'une échappatoire comme une autre sans doute... bien moins tranquille que sa stupide quête, bien plus noble, bien plus courageuse.
Le renart se mordit la lèvre, peut être est ce cette voix qu'il aurait du emprunter, celle des armes, du sang, celle d'une violence qui aurait pu le libérer, le consumer plus vite, le racheter.
Au lieu de cela il revenait a de jeunes personnes pleines d'avenir telles que Davia de se sacrifier a une paix que les individus tels que lui ne savaient réellement apprécier.

Le renart soupira.
La pensée qu'elle puisse renforcer son instinct de survie sur la perspective de le revoir lui arracha un sourire sincère, son inquiétude ne s'en trouva que croissante.
Que cela pouvait il bien signifier ? Qu'il la voulait en vie ? Qu'il avait envie de la revoir ? Qu'il la voulait ?
Des questions que le mélancolique se posait tentant se rationaliser ses sentiments, ses sensations.

A force de relecture, et le cahotis de la route aidant, le renart fut pris d'une nausée qui lui fit abandonner sa lecture et son introspection égocentrée.
Son esprit n'arreta cependant pas, reconstituant le visage clair et chaleureux d'une brune aux yeux gris et au rire cristallin.

Plus tard dans l'auberge qui les hébergerait pour la nuit, le renart s'assit a son pupitre, et écrivit.
Les mots se posèrent hésitants, retenus et pourtant sincères.


Citation:
A Davia Corsu de Villandry
De Severin Anatole de Volvent

Chère amie,

Je vous écris d'une auberge de l'Orleannais sur la route de la Bretagne ou j'ai pris la décision de me rendre.
En effet,j'ai porté mon choix sur une famille bretonne.
Je me rends donc a Vannes ou je dois rencontrer la Duchesse Lalie Ap Maelweg et sa fille la jeune Tualenn qui sera mon élève pour le temps qu'il sera nécessaire a son éducation.
C'est la première fois que je me rend en Bretagne, mais de ce qu'on m'en a dit, je pense qu'il ne me sera pas difficile de m'adapter.

J'ai croisé en entrant dans la ville une cohorte armée, et un instant j'ai figuré que vous seriez peut etre la.
Je me suis demandé ce que je pourrai vous dire, si vous étiez la, en chemin pour une guerre dont je ne sais rien, dont je ne peux qu'admirer le cause mais qui reste une guère.
Quel serait mon discours dans cette circonstance ? Essaierai je de vous dissuader ? Vous encouragerai je ?
Je ne le pense pas. Qui serai je pour vous arracher a un devoir que vous avez délibérément choisi ou pour vous envoyer au danger, tandis que moi, loin des champs de bataille je profiterai d'une paix payée de votre sang ?
Non. Il m'est difficile Davia de vous associer a la violence d'une guerre, d'imaginer que vos blanches et fines mains puissent se salir de sang, que vous puissiez vous trouver blessée ou pire... trépasser.

La conclusion de ce raisonnement retors est qu'il m'est difficile de penser que je puisse vous perdre...
Je prierai pour vous, chaque jour, afin qu'il ne vous arrive rien et que cette guerre prenne fin rapidement.
Je doute qu'il vous soit possible d'entretenir quelconque correspondance, mais j'attendrais de vos nouvelles.

Bien a vous...

Severin.


Si dans cette lettre le renart s'abandonna a l'aveu d'une certaine affection, c'est extrêmement perturbé qu'il la confia a Maturin pour l'envoyer.
_________________
Davia_corsu
[Bourgogne]

Elle était arrivée. Après avoir retrouvé son père en de furtives retrouvailles, elle avait fait route jusqu'à la capitale où l'armée de la Reyne, j'ai nommé La Beatriz, se constituait petit à petit. Sa première joie fut de revoir son meilleur ami, frère d'armes, frère de baptême, frère de parrain et Archange au doux nom. A peine arrivée qu'il lui proposait déjà de jouter.

Le regroupement des troupes avançait petit à petit. Le jeune fille prit ses quartiers dans un coin de tente. Au moins pour son premier soir, elle serait en paix. Elle avait d'autant plus besoin de tranquillité qu'elle avait reçu, à son arrivée, une lettre dont l'écriture reconnue l'avait fait rougir.

Fébrilement, avide de le lire, elle avait décacheté la cire et parcourait les lignes, ravie. Son visage souriait ou prenait une expression grave en fonction de ce qu'elle lisait, jusqu'à devenir pourpre. Elle fit un "Oh" de surprise et posa la missive sur ses genoux, les yeux brillants, regardant un peu partout comme si on aurait pu la surprendre.

Une phrase, une seule, mais qui d'un coup, faisait que son coeur battait la chamade. Elle aurait été chez elle, il est probable qu'elle se serait levé d'un bond en sautant un peu partout en criant de joie, mais là, en pleine guerre, il lui fallait être discrète. Qui plus est, mis à part Trella personne n'était au courant de son secret. Elle se mordit donc la lèvre pour ne pas se trahir et sauta de joie en elle-même. Dure intériorisation.

Ainsi, il était plus démonstratif par missive que lorsqu'elle l'avait en face d'elle. Elle lut, relut et rerelut la lettre jusqu'à ce que, rompue de fatigue, elle finisse par s'endormir, toute vêtue, sur une couche à moitié défaite. Ses rêves, cette nuit là, furent peuplés de gentil précepteur aux connaissances infinies, au regard triste et doux qui murmurait entre ses lèvres qu'il ne voulait pas la perdre.

Demain... demain, elle lui répondrait...

_________________

Blanche un jour, blanche toujours
Davia_corsu
A demain s'était succédé après-demain et puis les jours s'étaient suivis. Davia avait retrouvé la vie de campement. Les ordres et les contre-ordres. Elle avait retrouvé aussi l'Archange, avec qui elle passait de délicieux moments, entre taquineries et jeux d'enfants. Malgré le temps qui passait, elle n'oubliait pas.

Lorsqu'après la mort du pape, le Capitan en furie avait annoncé le départ imminent, elle avait sagement préparé son paquetage et les soldats avaient rangés le campement. Sur les routes, elle était toujours plus encline à écrire. L'inspiration venait lorsqu'au soir, à la chandelle, retrouvant sa solitude, son imagination se mettait en marche et l'emmenait vers des histoires d'aventures, de cape et d'épées, de héros flamboyants et courtois, de belles superbes et enamourées.

Assise en tailleur, au pied d'un arbre, à quelques mètres du campement, elle réfléchissait, la plume au bout des doigts.


Citation:
A Séverin Anatole de Volvent, précepteur de Bretagne,
De Davia Corsu de Villandry, soldate au service de la Reyne.

Mon bien cher Séverin,

Pardonnez mon silence, les tourbillons de la guerre et du campement militaire m'ont emmenés à des lieues de vous. Trop loin, beaucoup trop loin! Mais cependant, je vais bien. J'ai retrouvé mon meilleur ami et nous passons notre temps libre à nous entraîner et à jouer comme deux enfants que nous ne sommes presque plus.

La guerre à l'est aura été de courte durée pour moi puisque déjà je suis sur la route du retour. Je n'aurai pas combattu, encore une fois et je rentre chez moi, troublée par tant d'indécision, d'incompréhension. Les choses de la guerre sont aussi compliquées que celles de la politique, je crois. J'aspire à autre chose, il me semble.

Je rêve de paix, Séverin, de trouver un lieu qui serait mien. Je me sens inutile. Ma mère est mariée, mon père aussi. Chacun réside en son domaine. Mes amies d'Anjou se font femmes de politique et j'avoue que cela m'inquiète! Quand à Céraphin, mon meilleur ami, mon goût pour l'aventure n'est pas aussi prononcé que le sien.

Alors, je rentre heureuse, même si, encore une fois, c'est pour faire la guerre. Heureuse aussi car je me rapproche de vous. La Bretagne dites vous? Je ne connais pas, mais j'aimerais! On en parle beaucoup, en mal et en bien, surtout depuis que des bretons ont pris le château d'Anjou, rompant ainsi le traité de paix du Mont Saint Michel.

Mais qui sait, si la paix se profile un peu à l'horizon, pourrais-je venir vous voir! Si vous le désirez et si vous en avez le temps. Vous avez un très beau métier et j'envie la damoiselle à qui vous enseignez. La connaissance n'a pas de prix, mais je ne sais pas si je serais capable d'apprendre avec vous sans être déconcentrée!

Je suis heureuse que vous ayez trouvé un but, une voie, et que la Bretagne vous ouvre ses portes. J'espère maintenant vous revoir. Peut-être que j'en demande trop, peut-être aussi que j'en veux trop. Vous dites qu'il vous est difficile d'imaginer me perdre, mais moi je suis effrayée à l'idée de ne plus vous revoir. Cela revient au même? Oui, peut-être...

La route du retour n'en est que plus longue. J'aimerais vous écrire plus souvent, vous dire que je vais bien, que j'aimerais que vous m'attendiez, que, du moins, j'en entretiens l'illusion.

Prenez soin de vous mon cher Séverin, et si le coeur vous en dit, racontez moi la Bretagne, que je puisse vous imaginer.

Qu'Aristote vous garde et que le Très-Haut vous protège.

Davia.

Post Scriptum: Il paraît qu'on fait en Bretagne, une boisson nommée Hydromel et qui fut la boisson des dieux anciens. En avez-vous goûté?


Elle relut attentivement, constatant avec effroi les horribles pattes de mouches qui constellaient le parchemin. Foutue installation précaire. A Loches, elle tâcherait de lui écrire proprement! Elle rêvassa un instant, l'imaginant ouvrir la missive, une fenêtre ouverte sur la mer, l'odeur de la marée envahissant sa chambre, une légère brise soulevant une mèche sur son front. Elle rougit un instant, s'il se livrait dans sa lettre, elle en disait beaucoup trop, mais tout ce qu'elle écrivait était sincère et puis pourquoi le cacher. Elle l'appréciait, beaucoup. Elle aimait l'air mystérieux qu'il avait. Que cachait-il sous son front soucieux, sous sa mélancolie? Elle voulait en savoir plus et puis, elle aimait sa compagnie, son côté taciturne, elle avait envie de le faire sourire, voire même de le faire rire. Présomptueuse? Peut-être, elle verrait bien.

Elle plia consciencieusement le vélin qu'elle estampilla au sceau des Corsu et le confia avec empressement à un courrier, le pressant de faire vite et d'être précautionneux. Idéaliste, rêveuse, elle espérait trop sans doute mais c'est les yeux rivés sur les étoiles que ce soit là, elle s'endormit paisiblement.

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Blanche un jour, blanche toujours
Cevanne
[ CéSuRe.]

Le vélin froissé entre les mains le renart fixait le vide.
De relais en relais la lettre avait fait son chemin jusqu'à lui, jusqu'à ce que ses prunelles fatiguées se résolvent a abandonner l'écriture fine et gracieuse.
Combien de fois l'avait il lue ? Peu importait.
Aussi cérébral qu'il l'était a son habitude, le plaisir des mots couchés laissait place a une réflexion tordue que la fatigue n'aidait pas.

Elle se confiait avec une facilité effrayante et bâtissait des espoirs sur la simple preuve d'affection qu'il lui avait donnée, ah jeunesse, ah fraicheur... étaient ce la du baume sur les plaies d'un cœur las ou les prémisses de nouvelles coupures?

Dans un soupir, le renart mit fin a son questionnement intérieur.
Il eut juste le temps de faire arrêter la voiture pour rendre sur le bas coté les restes d'un repas frugal.

Maudites soient les routes de Bretagne.
Si l'expression avoir le mal de mer, s'appliquait parfaitement, elle se trouvait renforcée par cette odeur entêtante de sel dans l'air qui achevait de blanchir le teint du mélancolique qui semblait a présent avoir des yeux aussi grands que des soucoupes d'un bleu terni de fatigue.

Le corps en peine, cela changeait de l'âme et Séverin accueillait presque cette douleur comme une bénédiction.
Le soir, entre les murs du château de Kergroadès à Ouessant, la demeure qui serait la sienne pour le temps qu'il faudrait a l'éducation de sa jeune élève, il gouta un peu de repos avant de s'installer a son secrétaire, la plume et le vélin, prêts a l'emploi.

Plusieurs fois il commença à écrire .
Plusieurs fois les mots lui parurent laids et vides de leurs sens ou au contraire beaucoup trop bavards.
L'agacement devenait colère contre lui même, l'impatience devenait fureur et l'encre sur ses mains, l'encre sur ses mains lui parut souillure, sang coagulé, noir et sale.
Alors que sa main tremblait d'une agitation familière, le renart se laissa surprendre par son valet.


- Ecris ...

Aussi se leva t'il fuyant vers la fenêtre dont il tira le rideau pour découvrir un mince rayon de lune. La lettre fut dictée d'une voix absente et indifférente.

Citation:
A
Davia Corsu De Villandry

Chère Amie,

C'est avec plaisir que je reçois de vos nouvelles.
C'est un soulagement que d'apprendre que cette guerre aura été d'assez courte durée pour vous épargner la violence du front.
Je vous souhaite un bon retour chez vous. Puissiez vous trouver la paix a laquelle vous aspirez.
Je suis arrivé en Bretagne, je vous écris du château de Kergroadès , demeure des Ducs d'Ouessant.
Le climat breton est frais, et j'ai été quelque peu mis a mal sur les routes caillouteuses et accidentées.
Je n'ai point encore rencontré ma jeune élève qui est malheureusement souffrante. Je prie pour son prompt rétablissement.
Nous avons discuté avec la mère du programme d'apprentissage de l'infante et je suis ravi de trouver des parents ambitieux et soucieux de l'éducation de leur fille.
Je vous laisse sur ses quelques mots.
Prenez soin de vous et qu'Aristote vous garde.

Severin Anatole de Volvent.



Autant de "Je" pour une lettre si impersonnelle au final.
Impersonnelle comme il pouvait l'être lui, adepte du politiquement correct, a cheval sur des valeurs qu'on lui avait inculquées comme vraies et immuables, coincé, fermé, indifférent.
Était ce la le personnage qu'elle avait envie de revoir ? Lui qui n'avait su lui offrir des moments échangés que l'image d'un homme si sombre face au rayonnement qui était le sien ?
Assurément, elle se fourvoyait.
Lui avait passé le temps de l'innocence et des jeunes années, il y avait bien longtemps que le printemps se verdissait plus dans ses veines.
C'était l'hiver dans le fond de son cœur.
Elle elle était la fraicheur des ruisseaux, le chant excité des oiseaux en fête, elle était l'herbe verte quand il était l'ivraie, et bientôt elle retrouverait les siens, rirait et jouerait avec d'autres.

Le renart relut et autorisa Maturin a l'envoyer, amer.

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Davia_corsu
[Déception: le coeur en berne mais la tête haute]

Elle l'avait attendue cette lettre, guettée, espérée. Où enverrait-il la missive? Loches, Villandry, domaine de la baronne de Grand-mère, Chavonnière, petite seigneurie du père? Elle n'en savait rien et pour éviter de tourner en rond avait finalement décidé de se rendre à Saint-Aignan voir ces coupines angevines et leurs coupines, juste pour se changer les idées, pour ne plus penser à Séverin et à la réponse tant attendue, bref une soirée chainse, comme on les aime!

Et la lettre était arrivée. La douche froide avait été à la hauteur des espérances, largement! Déjà, ce n'était pas lui qui écrivait, bizarre... Ensuite, la missive était... glaciale. Enfin, Davia la trouvait glaciale. En parcourant les lignes d'une écriture qu'elle ne connaissait pas, elle blêmit, puis devint rouge de colère. Mais, elle ne fera pas de caprice la déchirant en pleurant et en affirmant qu'il se moquait d'elle. Elle apprenait la tempérance, enfin, elle essayait!

Dans un calme olympien, elle déposa donc la missive sur la table de sa chambre à Chavonnière, regarda négligemment le vélin puis dévisagea sa nourrice qu'elle ne quittait plus.


Quoi? Qu'est-ce que tu attends?


Mais, damoiselle Davia, n'est-ce pas la lettre que vous attendiez tant?

La lettre que?.. Pas du tout... rien à voir! ceci est... une lettre administrative! Et puis ça ne te regarde pas, Beetista! Va donc me faire des gâteaux à la canelle, en tout cas, rends toi utile!

Pas du tout en colère la Blanche, pas blessée non plus, encore moins déçue. Une fois tranquille, elle regarda à nouveau le parchemin. Vu la froideur de sa réponse, elle allait le faire poireauter, de toute façon vu l'intérêt qu'il lui portait, elle se demandait même pourquoi il lui répondait! Elle ne put réprimer un grognement mécontent. De toute façon, elle avait bien évidemment mille choses bien plus importantes à faire que de répondre à cet homme qu'elle ne connaissait pas finalement.

Pas de panique ma bique, tout baigne! Elle finit donc ses ablutions matinales, prépara une besace, enfila braies et chemise, attrapa au vol Sognir, la fidèle épée, et une fois sur sa monture, elle prit la route de Loches pour retrouver Céraphin et les joutes qu'il lui avait promis.

Elle galopa à bride abattue - on se calme comme on peut - fermement décidée à oublier tout ça, de toute façon, c'était insignifiant - tu parles - Quoiqu'il en soit, elle lui répondrait, un jour, peut-être, si l'envie la prenait et si elle en avait le temps et même si sa main la démangeait déjà.

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Blanche un jour, blanche toujours
Cevanne
Comme un remord.
Un sentiment d'avoir fauté.
Alors qu'il pense a cette lettre qu'il n'a pas écrite.
Ces mots vides de tout qu'ils pourraient avoir été écrits par n'importe qui.

Soupirs.
Regrets.
Difficile en fait d'être.
Paraître encore moins.
Avec toute la bonne volonté du monde, il n'y avait qu'a lire l'expression torturée de son visage pour deviner les affres d'une vie passée.
Il est des gens qui transpirent le bonheur, qui le crachent dans leurs rires, et d'autres qui vous noient dans la profondeur du chagrin dans leurs yeux.
Non il ne voulait pas la noyer.
Serait ce égoïste que d'admettre qu'il voudrait pouvoir profiter un peu de sa joie naturelle ? se l'accaparer pour sortir de l'emprise froide du dégout qu'il s'inspire a lui même?
Sans doute l'était ce plus de la priver de joie en lui assenant une lettre pareille.

Soupirs.
Regrets.
Et puis...
Il ne méritait sans doute pas plus d'attention que cela.
Peut être au travers des mots verrait elle qu'il n'est que vide, cet inconnu qui avait juste le mérite d'avoir des sucreries dans le creux de sa poche.
Il ne voulait pas croire que ce fut du hasard, non, le hasard ne pouvait plus exister depuis qu'il était resté en vie, depuis qu'il lui fallait vivre.
N'est pas cela que de vivre ? Ressentir au lieu de fuir toute émotion ?
La main sur la poitrine, ce n'est pas celle la qui serre, qui étreint le cœur qui bat d'une énergie étrange.
Il a déjà connu ça.
Peut être est ce parce qu'il l'a déjà connu qu'il sait...
ça finira mal...

Fébrile il se lève. La nuit n'est pas finie et déjà sa main tremble saisissant le vélin et la plume.
Quand l'encre nerveusement touillée éclabousse les doigts le renart sourit.
Pas de ces sourires rassurants qu'on aime a voir naitre sur son visage. Un sourire absent, venu d'ailleurs.
Le renart écrit.


Citation:
A vous
Succube,De l'enfer ou vous brulez...

Vous me manquez, mais tous les jours, je renie jusqu'à votre existence.
Elle ne vous ressemble pas. Je l'espère pour elle... et aussi pour moi.
Il y a son sourire, sincère et pur dans lequel ne transparait aucun calcul, aucun dessein sordides et cruels.
Elle me plait, je crois. C'est votre faute si je ne sais plus.
Mais vous savez maintenant.
Ne soyez pas jalouse, c'est auprès de vous que je finirai. Nous brulerons ensemble vous le savez.
En attendant... Dormez bien.

Celui qui...


Sordide, le renart se surprend a se moquer de lui même.
Correspondance outre tombe ou comment exorciser le mal au fond de lui. Quoi qu'il fasse, il y a cette ombre, et le vélin bientôt périra.
Trop pres de la chandelle, la flamme le goute, pourlèche l'encre noire, odeur de peau brulée...
Le renart se leve, la lettre en main.
Il la laissera mourir dans les cendres de l'âtre qui chauffe la pièce.
Est il soulagé ? Sans doute pas
Mais maintenant elle sait, et lui aussi.

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Davia_corsu
[Guéret: pause forcée.]

Les jours avaient passé. Davia suivait son meilleur ami vers le sud. Malheureusement, un imprévu était arrivé. Avant Guéret, deux vils brigands s'étaient acharnés sur les jeunes gens et après leur avoir fait les poches, ils les avaient un peu malmenés. L'Archange et la Tourangelle étaient pourtant habiles à manier l'épée, mais entre la guerre et la fourberie d'un attaque de malfrats, Céraphin et Davia étaient donc arrivés dans la ville en piteux état.

Allongée sur le lit de l'auberge où ils s'étaient réfugiés, la jambe gauche suturée, le vélin froissé auprès d'elle, la jeune fille avait les yeux rouges. Le vélin n'était autre que la dernière missive de Séverin. Depuis qu'elle l'avait reçue, elle ne cessait d'y penser. Pourquoi était-il si froid? Pourquoi semblait-il à ce point indifférent?

Elle avait tourné et retourné trente six mille scenarii dans sa tête de jouvencelle, mais en vain. Mourrant d'envie de lui répondre, obligée de garder le lit le plus souvent, elle se fit monter parchemins et plumes.


Citation:
A Severin Anatole de Volvent,
De Davia Corsu de Villandry,

Cher Séverin,

Me voici au coeur du Limousin, en route pour le Périgord avec mon meilleur ami, Céraphin d'Azayes, seigneur de Bourdeille. Nous avons fait quelques mauvaises rencontres et nous voici, immobilisés quelques jours, le temps que ma jambe soit rétablie, et que nous nous fassions quelques provisions.

Votre dernière lettre était très froide, Séverin, elle m'a glacé le coeur. Allez-vous bien? Est-ce le climat breton qui vous rend si indifférent? Je pensais qu'au moins nous pouvions être amis, que cette relation épistolaire en était la preuve, mais cette lettre, si vide de vous, si creuse, même pas écrite de votre main.

Après ce qui m'est arrivé sur les routes limousines, j'avoue avoir peur de ne pas vous revoir avant de perdre la vie. Si tel était le cas, je ne me le pardonnerais pas.

Je pensais venir vous voir en Bretagne, cette terre que je ne connais pas, et puis, suite à votre missive, j'ai changé d'avis et maintenant, je sais que je viendrai. Je suis changeante? Certainement. Le fiancé que j'ai eu autrefois me l'a reproché, et l'une de mes soeurs blanches aussi.

Me pardonnerez-vous d'être aussi franche avec vous?

Je continue ma route vers le Périgord, en pensant à vous. N'ayez crainte, j'ai eu très peur, mais je vais bien et ma jambe sera remise d'ici peu. Il faut croire que je suis plus à l'aise sur un champ de bataille que face à deux vauriens! Dès qu'il me sera possible, je vous écrirai de nouveau, en espérant que ça ne vous indispose pas. J'aime vous lire, j'aime savoir vos envies, vos peines, vos rencontres, vos activités. J'ai cru qu'il en était de même pour vous, me suis-je trompée?

J'espère, quoiqu'il en soit, avoir une réponse de votre part. Dans l'attente de vous lire, je vous envoie mes prières et que le Très-Haut vous garde.

Davia.

Fait à Guéret, le 20 juin de l'an de grâce 1459.


Elle souffla sur l'encre fraîche, passant la poudre fine pour la fixer sur le vélin, lentement, regardant l'écriture pleine qui ornait le parchemin. Elle se sentait étonnamment calme, étonnamment sereine d'avoir écrit cette missive. Advienne que pourra, elle avait foy en cette rencontre à la Saincte Chapelle.
Apposant le sceau des Corsu, elle envoya chercher un coursier et lui remis la précieuse missive. Vite, vite, vers le ténébreux mélancolique; vite, vite, qu'il la reçoive le plus promptement.

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Blanche un jour, blanche toujours
Cevanne
Le renart grelottait.
A peine emmitouflé dans une couverture, le regard perdu au travers de la fenêtre, il avait froid.
Le château d'Ouessant était aussi froid qu'un tombeau en plein hiver et les tentatives vaines pour le chauffer ne faisaient guère augmenter la température qu'au plus près du feu.
Or le renart se loin de cette source de chaleur, le froid s'était insinué dans les os fragiles et le renart loin de chercher a se couvrir supportait . Il savait qu'il ne tarderait pas a sentir sur sa santé les effets d'un tel traitement. Il mangeait peu, la nourriture bretonne n'était pas a son meilleur gout.
Cependant de ce sombre tableau, le renart tirait satisfaction de sa présence en Bretagne et il appréciait son nouveau métier qui lui laissait le loisir d'entretenir un esprit trop souvent malmené.

Lorsque Maturin entra dans la pièce, le renart ne lui accorda aucun regard.
Son regard bleuté ne se défit pas de la vue sur la cour du château.
Il n'entendit que le mot " lettre".
Lorsque le valet fut sortit, il avisa le pli posé sur un guéridon.
Qui pouvait lui écrire ? Della ?
Il ne lui avait donné aucune nouvelles depuis son arrivée.
Ode ? Il ne savait même pas ou elle se trouvait.
Davia ?
Un soupir rompit le silence.
Certainement pas, après sa dernière lettre, comment pourrait elle encore lui écrire.
C'est donc dans cette optique que le renart abandonna la lettre a son guéridon, reportant le regard dans le vague jusqu'à l'heure du diner.
Alors qu'il se levait tant bien que mal , articulations douloureuses pour se rendre a la salle de banquet, il attrapa au passage la lettre et fut surpris d'y reconnaitre l'écriture de Davia...

Blême, il sentit cogner dans sa poitrine un cœur endormi. Lui écrivait elle pour lui signifier son mépris, son mécontentement , sa déception, sa tristesse?


- Maturin... va présenter mes excuses, je ne descendrai pas diner...

Non il ne descendrait pas.
Il ne voulait pas ouvrir cette lettre mais brulait d'en connaitre le contenu.
Apres une longue respiration il la décacheta et la lut fébrile.
Lorsqu'il en lut et relut les moindres mots il se sentit minable et pourtant dans sa lettre, tellement d'espoirs, de compassion et au travers des mots plus que tout, il voyait le pardon.
Le pardon...
Un fin sourire étira les lèvres du mélancolique, il lui fallait répondre.

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Cevanne
Enfin le renart écrivit.
Après une longue introspection, une longue réflexion et enfin il se laissa aller a la simplicité de la plume glissant sur le vélin.


Citation:
De Severin Anatole de Volvent,

A Davia Corsu de Villandry
A ma chère Amie,

Permettez moi à l'occasion des premiers mots de la présente missive, de vous présenter mes plus sincère excuses pour ma précédente lettre.
Je ne vous pardonne pas votre franchise, je vous en remercie, c'est la qualité des vrais amis.

Je n'ai pas le talent d'entretenir des relations autres qu'avec les membres de ma famille et même, je ne compte guère plus qu'une cousine aussi aimante qu'indulgente a mon égard. J'ai aussi pu me laisser gagner par une peur de ne pas être ce que vous auriez pu attendre de moi, un ami.

Je me rend compte en lisant vos mots que je m'étais trompé.
Je vous remercie pour votre incroyable bonté , votre compassion et la patience dont vous faites preuve en redonnant à un vieux renart solitaire tel que moi une chance de se racheter, chance que je saisis en espérant ne pas vous décevoir à l'avenir.

Je ne m'étalerai pas en vous expliquant les circonstances qui ont fait de moi l'homme que je suis, mais vous me confortez dans le faible espoir qui subsiste en moi qu'un changement est possible et je veux croire que je peux devenir un homme meilleur.

Il me tarde a présent de fermer cette parenthèse égocentrique et de recevoir de vos nouvelles. J'espère que vous vous portez mieux et que vous êtes remise de cette rencontre malencontreuse.
Promettez moi de prendre soin de vous.
Vous etes bien plus douée que moi au combat, même si je le souhaitais, je ne saurai vous offrir qu'une piètre protection, Cependant, sachez que mes prières vous accompagnent a chacun de vos pas.
Savez vous déjà ce que vous comptez faire en Périgord ? C'est la une belle contrée que j'ai eu le plaisir de visiter, en été on y passe de douces nuits. Profitez en pour prendre un peu de repos.

La Bretagne est vivifiante, il y fait frais, un peu trop pour un homme de ma constitution, mais je ne m'en plains pas. N 'oubliez pas de vous munir d'un manteau lorsque vous viendrez. J'ai eu l'occasion de chevaucher sur les terres bretonnes, celles ci offrent un paysage aussi riche que surprenant, je pense qu'il vous plairait.

Pardonnez moi Davia et s'il vous plait, écrivez moi encore.
Qu'Aristote veille sur vous.

Severin.


Un soupir ponctua la lettre. Un leger sourir y succéda.
Le renart se sentit bien alors que la lettre était envoyée.

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--Gab_le_renardeau
(Une missive bien lourde de consequence...)
Alors que je me réveillais ce matin, la sensation de sa main douce sur ma joue, je cherchais du regard les yeux bleu de ma mère...Comme tout les matins depuis bienot 6 mois, je ne rencontrais que du vide. Le mur blanc de ma chambre.

Je m'appelle Gbriel Eldunaris de Volvent et j'ai 5 ans. Je sais compter jusqu'a 10 et je chasse le lapin.
Depuis le printemps, je ne fais que regarder par la fenetre, me faire changer les pnsements et demander apres mes parents.
La dame, elle dit qu'ils sont loin mais proche de moi et moi je comprends rien.



A Messire Severin De Volvent
Orphelinat sainte Lucille
normandie


Sire,

Je ne saurais vous dire si c'est avec peine ou apaisement que je vous écris enfin.
Il me fus long et laborieux de retrouver trace de vous à travers le royaume. Toute fois il me fallais vous prevenir.
je suis porteuse de deux nouvelles.

Votre soeur et son mari ont été retrouvés non loin de murs ce printemps.
Morts dans ce qui semble etre une attaque qui à mal tournée.
Ils ne sont pas mort seuls mais a en jugé par les effets que l'on a retrouvé, leurs agresseurs ont vaincu.
On a aussi retrouvé, sous le corps de votre soeur, un petit garçon. Il dit s'appeler Gabriel. Il portait autours du coup un médaillon argenté. Un miracle qu'il ne lui fut point volé.
Le pauvre petit à lui aussi été bléssé et semble toujours choqué de ce qu'il s'est passé.

Etant son oncle, je souhaiterais savoir si vous souhaiter en prendre la garde? Ou si vous preferez le laisser à nos bons soins.

Esperant une réponse de votre part.

Mere Therese


La lettre fut envoyée et le petit gabriel continua de sombrer dans le mutsime
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