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[RP]De la maîtrise des éléments et d'un atelier clandestin..

Cymoril
Aube...

Elle aime le calme de ces premières heures du jour où le soleil semble hésiter encore à se lever. Déjà debout ou pas encore couchée, la petite demoiselle tire sa charrette sur le pavé d’un pas lent. Çà et là les volets commencent à s’ouvrir, les odeurs des premières fournées de pain chaud viennent recouvrir celles plus âcres des marais alentour.
De banalités échangées sur le cours du maïs en rapides bonjours à l’attention des journaliers croisés en partance pour les champs, et elle poursuit dans le dédale des faubourgs de la capitale.

Elle a abandonné ses jupons au profit d’habits plus pratiques et pourtant l’habitude perdue de porter braies sans rien dessus fait qu’elle se tortille par moments, dès qu’il n’y a plus personne en vue.
Heureusement il n’y a pas long de la taverne à la bâtisse à demie écroulée qui l’intéresse. Et lorsque enfin elle arrive devant, un sourire satisfait se dessine sur son visage mutin. Une longue inspiration est prise, comme pour se dire "Quand faut y aller" ou "C’est parti la Fourmi". Les derniers mètres ont abolis, faisant passer cheval de trait et charrette sous le porche pour gagner l’arrière cour.

Et tandis qu’elle commence à s’activer, déchargeant ce qui devait l’être avant de pénétrer dans le bâtiment, elle laisse son esprit vagabonder, se demandant où les anciens proprios avaient bien pu échouer, ce qui avaient bien pu leur arriver pour abandonner tout derrière eux de la sorte… La guerre peut-être, une épidémie.. La mort ou une fuite précipitée.. Elle ne voyait que ça pour faire qu’on laisse ses outils à la décrépitude.

Porte et fenestrons sont ouverts sur l’arrière pour laisser entrer un peu de lumière du jour et que l’occupation se fasse discrète depuis la rue, même si les jours prochains, bruit et fumée rendront la chose bien moins évidente.
Les heures défilent plus rapidement qu’à l’ordinaire et la corvée de nettoyage qu’elle s’impose n’a pas cet arrière goût de contrainte du quotidien. Elle qui déteste les tâches ménagères et dépense sans regarder en lavandières et gouvernante. Tout cela n’est que le prélude à une tâche à laquelle elle s’adonne avec passion.

Les poussières volètent doucement dans la pièce, myriade pailletée sous les rais de lumière qui filtrent par les ouvertures. L’âtre profond est vidé, chaque outil soigneusement nettoyé, gratté, débarrassé de traces de rouille, l’enclume rendue presque brillante et le soufflet testé afin de s’assurer que rien ne viendra dysfonctionner le moment venu.
Stères de bois empilées pour le lendemain et barres de fer laminé rangées. Même les bacs de trempage et refroidissement ont pris la place qu’elle veut pour travailler. Chaque outil rangé avec soin… Tout est prêt lorsqu’elle s’arrête enfin, l’obscurité gagnant.

Un minois recouvert de traces de poussière et de suie passe la porte furtivement pour se rendre compte que le soir est déjà là…
Derniers actes, et non des moindres pour elle, avant de s’en retourner, angélique brûlée dans le foyer et une branche de sorbier accrochée au dessus. Le sourire en esquisse alors qu’elle jette un dernier coup d’œil à l’ensemble, relativement satisfaite du travail accompli, inspirant longuement les fumées dégagée par la plante bénie des anges avant de sortir et reprendre d’un pas presque léger l’enchevêtrement de ruelles jusqu’à la taverne…

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Cymoril
Etrange rituel mis en place depuis quelques jours… Sa petite silhouette traversant les rues alors que l’aube pointe à peine le bout de son nez, pour se rendre à la forge clandestine, œuvrant tout le jour sans que toutefois le moindre coup de marteau ne résonne ; s’arrêtant à la nuit tombée pour un saut à la Part de l’Ange, tout juste pour profiter du baquet, passer sa bure avant de se rendre à l’église où elle finissait par s’endormir d’épuisement sur un livre emprunté à l’université, au plus sombre de la nuit.

Rite ascétique où elle picore à peine, parfois trop lasse parfois trop concentrée sur les efforts à fournir pour ne pas céder à l’envie de courir chercher le réconfort de sa pipe et les bienfaits d’un oubli fugace.
Pourtant, elle ressent à peine la fatigue. Trop inspirée, trop portée par la tâche qu’elle s’est assignée. L’esprit centré autant que possible.. ou l’art de vouloir rendre le caractère sacré à cet acte dont l’aspect particulier échappe au plus grand nombre.

Le temps pourtant n’est pas encore à rendre grâce aux divinités en participant à la Création, parfaisant le vivant en l’accouchant d’une nouvelle dimension.
Pour l’heure ou plutôt pour ces journées passées, elle effectue un long travail de charbonnier.

Dans l’arrière cour, les rares dalles posées sur la terre battue ont disparu et de petites fosses ont été creusées, bien vite comblées par les empilements de bois. Combien elle avait été satisfaite que le sol berrichon recèle d’autant de cette précieuse argile nécessaire à la bonne élaboration de ces fourneaux primitifs.

Méticuleuse, elle avait calculé la part de bois qui serait sacrifiée, consumée pour atteindre la température propre à transformer le reste en charbon. Mieux, la température idéale pour obtenir le charbon parfait, d’un noir pur, sonore et dur, tâchant à peine les doigts…
Elle surveille ces feux dormants, encore et encore, durant les longues heures de ces journées écoulées, tandis qu’une partie de son esprit dessine avec soin forme et structure de l’arme qui verrait le jour bientôt.

Le dernier jour, alors qu’elle laisse les ultimes soupirs des fours s’échapper des dernières fumerolles, une nouvelle fosse est creusée, et un chargement de bois d’aulne vient y prendre sa place. Autre charbon pour un autre usage. Peut-être…
En attendant elle remise le tas de charbon durement acquis, s’épongeant le front en laissant quelques traînées noirâtres sur son visage, marquant encore plus le bleuté léger sous ses yeux… Avant de reprendre le dédale des ruelles…

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Cymoril
*Ceci est un communiqué du Comité contre les posts inutilement longs et autres membres du club des Autistes Anonymes Auteurs de topics absolument sans intérêt et chiants.*

Nouveau jour.

Le plus important peut-être. Non parce que l’arme serait faite ce jour, mais parce qu’elle allait préparer chaque élément qui en constituerait la lame qu’elle voulait unique.
Comme un pari avec elle-même, qui en forge déjà si peu.

L’idée a germé d’avoir observé l’arme si particulière du maure pendant sa convalescence en Alençon. Certes, ce n’est pas la forme qui l’intéresse. Mais le métal en lui-même, de par sa beauté esthétique et son incroyable solidité.
Elle avait tellement harcelé le chirurgien de questions sur le sujet qu’ils en avaient brûlé de longues soirées en discussions. Elle dont la curiosité poussée, en bon maître du feu, épuisait chaque détail technique dont il avait souvenir, l’écoutant avec passion lui dire les récits et les légendes qui couraient sur les armes fabriquées de la sorte…

Pourtant tout reste tellement théorique, tellement soumis à la qualité du travail, à l’attention accrue dont elle devrait faire preuve… Que forcément ça lui rajoute une pression supplémentaire à la petite forgeronne. Comme si faire les armes pour un colosse n’était pas déjà suffisamment stressant comme ça.

Aussi commence-t-elle par rendre grâce à la Terre Mère, matrice du minerai, trésor endormi en ses entrailles accouché par le dur labeur des mineurs.
Et d’en brûler un pied d’Archangelica pour la protection du lieu, qu’il apporte l’équilibre, l’énergie et l’harmonie à chaque étape de la réalisation.

Le charbon vient remplir le foyer et la forge enfin s’anime. Volets et porte sont clos, qu’aucune lumière extérieure ne vienne parasiter la surveillance du feu de forge. Elle ne cesse de la nourrir, de jouer du soufflet jusqu’à ce que ses muscles en soient brûlants alors que les mèches échappées de sa lourde tresse collent à son visage en sueur.

Les sept creusets cylindriques viennent prendre place au milieu des braises incandescentes. Chacun garni de la même quantité de minerai alors que dans trois d’entre eux elle a rajouté du charbon de bois réduit en poudre. Une quantité presque infime pour le néophyte ; avant de refermer e four pour porter le tout au point de fusion attendu, lorsque les rouges et les orangés se sont effacés, que même les jaunes ont pâlis pour ne laisser que la blancheur de forge se révéler.
Un revers de manche vient éponger le front, alors que la sueur pique et agace jusqu’aux cicatrices de son dos, sa chemise devenue une seconde peau et que les bandes en dessous en sont trempées sous le tablier de cuir.

Les mains gantées secouent délicatement chaque creuset à l’aide des longues pinces. Les gestes sont sûrs et précis, le regard acéré, et un léger sourire passe sur ses lèvres, furtivement lorsqu’il lui semble avoir obtenu ce qu’elle recherchait.
Le soufflet s’active toujours, allant ralentissant. Une nouvelle fournée de charbon vient pourtant nourrir le feu entretenu et qu’elle fait retomber le plus lentement possible.

Le soir venu, les braises brûlent toujours dans le four refermé où les creusets patientent. Le refroidissement s’achèvera tard dans la nuit, peut-être même au matin. Elle laisse le feu s’endormir et mourir doucement, souriant encore en refermant la porte alors que la nuit est déjà là.

Demain elle saurait si elle a réussi, ou si elle doit se résoudre à concevoir une arme plus normale. Pour l’heure, un bain et la douceur d’un lit l’attendent dans le grenier aménagé de la taverne. Peut-être même qu’elle s’offrira un peu de paradis artificiel pour évacuer la pression qu’elle s’impose.
Dans les ruelles obscures, seul le bruit de ses bottes qui claquent doucement sur les pavés vient perturber la silencieuse quiétude de la nuit…

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Cymoril
A chaque jour suffit sa peine…
Ou l’épreuve du feu..



Si la veille a laissé quelques courbatures adoucies par la courte nuit de repos, elle sait d’expérience que le vrai travail physique est pour aujourd’hui. Elle n’a rien pu avaler au lever, l’appréhension et l’impatience lui nouant l’estomac.
Le pas est empressé ce matin dans les ruelles désertées et le visage fermé déjà concentré lorsqu’elle arrive enfin à la forge.

Une longue inspiration est prise et une main traine sur la branche de sorbier, cherchant sans doute un réconfort avant d’oser ouvrir la trappe. Une douce chaleur s’échappe du foyer et se répand dans l’air alors qu’elle sangle son tablier et passe méticuleusement les gants de cuir pour s’armer des pinces et sortir un à un les creusets de terre cuite sans s’attarder encore sur leur contenu.

Nouvelle inspiration, longue, et elle retient son souffle la petite forgeronne en retournant un à un les creusets sur l’établi, ferme même les yeux un court instant avant d’oser les ôter pour révéler les galets d’acier obtenus ; quatre d’un fer encore doux et souple, les trois derniers, source d’inquiétude légitime, d’un fer dur carburé, décoré de cercles concentriques.

Un soupir de soulagement lui échappe alors, le travail de la veille semble réussi. Pour tant seul le travail véritable du martellement dévoilerait si oui ou non le résultat était à la hauteur de ses espérances.
Les pelletées de charbon viennent remplir le foyer et le soufflet s’active sous son œil exercé, nourrissant cette matrice où bientôt l’embryon viendrait se développer, guettant les variations de couleur avant de remettre les galets de métal dans la fournaise et leur faire subir cette lente transformation sous la semence ignée qui les anime peu à peu.

Lorsque le rouge se fait plus tendre il est temps de célébrer la noce. Chaque pièce martelée, étirée ; durant des heures la symphonie du marteau et de l’enclume résonne pour préparer la renaissance du métal. Deux longues tiges de fer blanc pour absorber les chocs, deux de ce nouvel acier plus riche et noir pour en garantir le tranchant et la solidité. L’ensemble maintenu par les pinces est remis au feu rouge pour les souder avant de retravailler la pièce obtenue au marteau.
Elle est en nage, littéralement, les muscles en feu, et pourtant ni la main resserrée sur le marteau ni le bras qui ne cesse de se lever pour asséner ses coups ne faiblissent.

La difficulté physique de son travail a toujours beaucoup amusé son entourage, peu enclin à penser qu’avec une nature si menue presque chétive, elle soit suffisamment solide. Pourtant, jamais elle n’a songé à en exercer un autre. Dans la forge, tout est simple, clair et limpide ; les odeurs, les couleurs, les sonorités, tout contribue à la satisfaire.

La pièce martelé est torsadée ; dans les gants de cuir les mains souffrent encore plus de cet exercice, mais elle poursuit, ne cède pas, continuant de l’étirer jusqu’à obtenir une pièce quasiment aussi grande qu’elle.
Et ça la fait marrer alors qu’elle la remet une nouvelle fois au feu un instant, inspirant longuement avant de la retirer encore. Le moment est venu de donner enfin la dimension nouvelle au métal éveillé par la flamme ardente, que la magie s’opère et l’accouchement se produise afin qu’il trouve sa vocation et se révèle.

Muscles tendus et rivière de sueur au front, elle frappe à coups redoublés. Le métal rougi n’a pas le temps, Chronos joue du sablier dans l’affaire ; décomptant chaque seconde. La partition sacrée entre le marteau et l’enclume démarre, le rythme imprimé au tempo régulier, la musique est si claire dans la fumée et le grésillement du charbon qu’elle s’oublie, prenant simplement sa place à l’intérieur de la Création.

Convenablement martelée, la lame encore grossière est trempée, et elle se marre à nouveau en allant chercher un seau d’eau pour se rafraichir dans l’arrière cour, réalisant que la nuit est déjà là, offrant à ses yeux émerveillés son ciel d’encre piqueté de centaines d’éclats argentés, la réconfortant de sa chaleur enveloppante et de son silence soudain.
Sourire résolument accroché en coin de lèvres elle retourne à sa lame travaillée sur presque toute sa longueur ; la soie s’amincissant vers l’ébauche de pommeau serait habillée plus tard par la garde et le pommeau choisis par le futur propriétaire de l’épée.

Elle est songeuse, entendant presque la voix du chirurgien lui narrer cette anecdote au sujet de la trempe dans son pays lointain : "Il faut chauffer le métal jusqu’à ce qu’il ne brille plus, tout comme le soleil s’élève dans le désert. Puis il faut le refroidir à la couleur pourpre royal en le plongeant dans le corps d’un esclave musclé qui transmettra sa force à la lame…"
Pas vraiment mécontente d’avoir omis d’en parler au grand, des fois qu’il lui soit venu à l’idée d’appliquer la tradition orientale et de lui ramener un pauvre hère attrapé dans une ruelle pour célébrer l’avènement de son arme..
Si elle accorde un caractère sacré à son travail, ces superstitions lui semblaient plus que discutables, proches d’une sorcellerie vouée à effrayer les esprits faibles ; aussi avait-elle effectué une trempe normale dans un bain d’eau huilée laissée sur un feu léger pour apaiser le métal sans le faire souffrir de sa transmutation.

Tablier et gants de cuir sont ôtés, sans trop de hâte. Elle laisse les feux mourir lentement et ne finit par ressortir la lame que des heures plus tard, lui accordant une nuit de repos, qu’elle se fasse à sa nouvelle condition, la caressant du bout des doigts, comme on le ferait avec un nouveau né, avant de s’en aller.

Le pas las sur le chemin du retour. On le serait à moins, sauf les prétentieux ou les exceptions de la nature. Elle s’écroulera probablement sur une table de la taverne, tentant de picorer quelque chose avant de s’endormir dans un baquet d’eau chaude pas démérité, en songeant à toutes les finitions qu’elle effectuerait le lendemain…

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Cymoril
Finalement, elle s’était accordée la veille une journée de repos. Laissant le temps à ses mains d’épuiser les ampoules, à ses bras et son dos sollicités comme rarement de se dénouer un peu, et surtout à son esprit en ébullition de se tempérer un peu. L’empressement à la réalisation étant trop souvent source d’erreur, et elle ne voulait prendre aucun risque.
Elle avait donc une fois de plus joué avec les nerfs du rectorat en se faufilant jusqu’à une salle de classe, et c’est le corps et l’esprit plus sereins qu’elle arrive à la forge ce matin là, emmitouflée dans son col, une petite bise froide soufflant en cette aube à peine naissante.

Un feu léger est relancé, plus pour lui apporter chaleur et luminosité nécessaire à l’ouvrage d’ailleurs qu’autre chose, alors qu’elle inspire longuement avant de passer son tablier de cuir.

La lame ébauchée sera longuement travaillée encore. Meulée au grain de plus en plus fin, polie, avant de trouver une première forme, qui serait presque normale avec son profilé triangulaire et ses larges tranchants, si elle n’avait pareilles dimensions. Au fil du travail, l’éclat particulier de l’acier s’était révélé sous yeux…
Un sourire flottant aux lèvres, elle poursuit, l’ouvrage demandant de plus en plus de précision, alors qu’elle lime longuement les tranchants déjà effilés, imaginant presque les regards effrayés des soldats adverses lorsqu’ils verraient cette arme brandie devant eux par le colosse.

Dehors les heures s’écoulent au rythme régulier des travaux des champs, d’une messe dite. Sans doute les clameurs des mineurs qui s’en vont déjà guillerets dépenser leur solde en beuverie doivent résonner dans les rues..
Hors du temps, hors du monde, concentrée sur sa tâche, elle ne s’en soucie guère voire pas du tout. Les quelques autochtones croisés depuis son arrivée lui ont paru bien trop étranges et prompts à se soumettre à une sorte de peur déraisonnée leur faisant interpréter chaque propos de façon… sans doute berrichonne. Entre le gaillard qui réclame qu’on le serve et prend la mouche, le sorcier qui déboule pour lui dire qu’elle lui a piqué son travail réservé rien qu’à lui, le simple qui s’offusque qu’elle n’aie nulle envie de raconter l’histoire de son nom…
Oui, elle en a soupé…
Et elle est gavée.

Chaque tranchant est vérifié et revérifié, sur toute sa longueur, aiguisant encore çà et là, un doigt allant se poser sur les pointes des quillons séparant le tranchant du fort de la lame, s’y piquant même en laissant échapper un soupir de satisfaction.
L’aiguisage terminé, restent quelques menus détails ; insignifiants pour le commun, elle leur apporterait autant de soin et de méticulosité qu’au reste. Comme la ciselure de ces runes, en pattes de fourmi, sur le fort de la lame, alors qu’elle les nomme en les gravant dans l’acier, à voix basse et éraillée : "Kenaz, Hagalaz, Elhaz, Fehu, Sowilo, Tiwaz"… Souriant encore en les effleurant du bout des doigts, avant de passer à l’ultime décapage du métal qui est loin d’être un moment qu’elle affectionne particulièrement ; la fiole d’"acidum salis" est en main, et quelques gouttes sont déposées à l’aide d’un chiffon de peau.. Chaque once de la lame est nettoyée de ses impuretés, l’acide parachevant d’en affiner encore le grain et d’en révéler la beauté.

Après cette opération, le besoin de prendre l’air dans l’arrière cour se fait sentir, et ce sont de longues inspirations de cette atmosphère aux relents douceâtres des marais environnants qui viennent emplir ses poumons, comme pour évacuer l’acide respiré qui lui irrite la gorge et le nez et la fait tousser. Dans la foulée, le chiffon est balancé au tas d’ordures à brûler…
Quelques minutes de pause avant qu’elle n’y retourne, une légère démangeaison venant agacer la chair de sa cuisse, mais elle n’y prend pas garde pour l’instant, gratouillant légèrement dans l’espoir de faire passer la sensation désagréable, trop désireuse de poursuivre et d’achever enfin l’espadon.

La garde est posée. Simple. Composée de deux larges quillons aux bords légèrement torsadés pour suivre les courbes et le mouvement de la lame.
Puis la poignée de bois d’ébène, essence rare apparue récemment sur les marchés les plus luxueux de Paris… Les deux demi coques creusées viennent habiller la soie ne laissant désormais que le lourd pommeau à découvert, suivies par les longs filigranes d’orichalque qui viennent sertir et enserrer le tout.
Si ses calculs sont justes, et elle l’espère ardemment, le large pommeau en flamme torsadée équilibrerait la dynamique de l’épée, lui transmettrait son énergie tout en allégeant la charge pour le poignet et l’avant bras…

Assise, accoudée au bois, le menton posé dans une paume, elle examine encore longuement l’arme sur l’établi après l’avoir nourrie à l’huile de girofle. Sa main libre la faisant pivoter doucement alors que ses yeux traquent inlassablement le moindre détail de l’espadon dont la lame ondulée rappelle les oscillations d’une flamme ; finement polie, l’aspect moiré et changeant de la lame parait absorber la lumière d’une façon étrange et semble flamboyer par moment et s’animer d’une vie propre…

Nul doute que pour la plupart, ce ne serait là qu’une lame aux dimensions monstrueuses et aux ergots menaçants, semblant déchirer l’air de sa lumière noire. Cym, elle, y voit tant de choses, un monde ; destruction et création, ténèbres et Lumière, matière et esprit, menace et protection… Dans le double tranchant le symbole de l’union des contraires, l’équilibre parfait des opposés unis pour se révéler dans leur sens le plus abouti.

Ils ne verront pas non plus que de sa trempe était née l’union forcée des éléments ; du minerai arraché au ventre de la Terre Mère, forgé par le feu et le marteau avant son immersion baptismale.. Née de la Terre et du Ciel, devenue axe reliant le monde souterrain au divin au travers de la terre…

Non.
Personne d’autre ne verrait tout cela. Ils ne verraient qu’un formidable outil de mort…

Mais peut-être auraient-ils vu, eux, les moins rêveurs, la petite goutte d’acide tomber sur la braie ? Peut-être se seraient-ils attardés à regarder ce point de démangeaison ? Alors qu’elle se contente de gratter un peu plus en songeant encore à ces aspects que seuls les initiés savent voir…

Un peu plus tard, elle charge l'immense épée soigneusement recouverte d'un linge dans la charrette et reprend les ruelles aux pavés chaotiques jusqu'à la taverne où elle effectuera sa livraison.

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Cymoril
*Ceci est un communiqué stipulant la dérogation obtenue, afin de raccourcir l’action en condensant toutes les informations en une seule et unique fois… Et même que tout le monde s’en tape en fait…^^*


Nouvelle aube.

A croire qu’elle n’apprécie les déplacements qu’à la faveur d’une lumière ténue. Après une courte nuit sans véritable repos, où elle avait découvert, après moult séances de grattouillages intempestifs en taverne, la peau de sa cuisse brûlée par l’acide. Ses braies foutues aussi, mais ça, c’est un peu l’équivalent du dernier de ses soucis, comme si elle en avait une bonne vingtaine encore en stock. Un cataplasme de natron recouvrant la brûlure relativement légère, le tout soigneusement maintenu par un bandage serré sous une paire de braies qu’elle étrenne pour l’occasion et une tisane de coquelicot avait atténué légèrement la douleur apparue.

C’est ainsi qu’elle arriva à la forge sous les ultimes scintillements argentés d’étoiles séniles dont l’argent s’altérait pour laisser place à un nouveau jour.
Elle avait songé de longues heures à ce nouvel instrument qui allait prendre naissance. Hésitant entre le bois de houx blanc dont la beauté combinait à l’efficacité nécessaire et l’ébène à la noirceur si parfaite, si lumineuse. Et c’est en posant les yeux sur les derniers galets de métal que se dessine soudain la solution.

Une longue inspiration vient emplir ses poumons de cet air empreint de poussière de charbon, de pierre et de métal alors qu’elle étire sa nuque avant de passer son habit de cuir et d’envoyer les pelletées de charbon dans le four de la forge.
Au fil des heures, les trois galets sont chauffés, martelés, étirés, soudés et torsadés entre eux pour ne plus former qu’une seule pièce dont elle plie une dernière fois l’extrémité pour l’épaissir avant de commencer à lui donner forme plus proche de sa finalité. Ecrasant, martelant la boule formée pour la séparer doucement, donnant à l’un de cotés un fer large triangulaire…

Dans la ruelle des éclats de voix lui parviennent, perturbant la sérénité froide de son labeur. La faisant même sursauter et soupirer d’agacement lorsque la porte de bois est heurtée violemment dans un bruit plus que dérangeant alors qu’elle vient d’achever de donner à l’opposé du taillant sa forme grossière.
C’est donc un poil agacée qu’elle repose la pièce dans les braises ardentes avant d’aller ouvrir la porte d’un seul coup sans prévenir. Un individu titubant, se raccrochant autant au montant qu’à elle pour ne pas tomber, une jaqueline en main. La scénette est rapidement balayée du regard. Vulgaire querelle de poivrots à laquelle elle ne se risquera pas à prendre part. Du moins c’est ce qu’elle pensait juste avant que l’apparente victime ne se mette à lui dégobiller sur les bottes.
Un rictus écoeuré passe furtivement sur le visage de la petite forgeronne en même temps qu’une lueur cornaline vient éclairer son regard…
Elle houspille les autres pour les chasser avant de faire entrer l’individu, comme pour lui offrir l’abri de la forge, et de refermer la lourde. Un sourire neutre flottant sur ses lèvres alors que le poivrot à demi comateux s’adosse contre l’huis pour porter à nouveau la bouteille à ses lèvres en baragouinant quelques mots d’excuses et de remerciement qu’elle n’écoute même pas.

Retournée au foyer, sa main gantée reprend doucement la longue pièce de métal en main pour en contempler l’extrémité avant de lentement revenir vers lui, l’ébauche d’arme tenue fermement de ses petites paluches. Et d’un large mouvement circulaire puis tangentiel (un swing quoi) vient perforer la bedaine du mécréant qui écarquille ses yeux déjà vitreux de beuveries répétées et glisse contre le bois, crachant sang et bile alors qu’elle offre à l’arme son baptême de sang. Finalement la trempe n’est pas si mal et l’arme dégagée pivote rapidement après être ressortie de cette masse molle qui gémit à ses pieds, abattant cette fous l’opposé plus petit sur le crâne qui se fend provoquant quelques soubresauts désarticulés du corps, presque amusants, avant de rendre son dernier souffle.

Sans même un dernier regard, elle va glisser l’arme trempée dans le bac de sable pour qu’elle finisse de refroidir. Et elle d’aller en arrière cour tirer un seau d’eau au puits pour nettoyer ses bottes de la souillure immonde. Marrant. Si aucun sentiment de remord ne vient la perturber, c’est presque une moue dépitée qu’elle arbore. Que ce fut l’un de ces pathétiques autochtones alors qu’elle aurait tant de plaisir avec quelques bourguignons de sa connaissance.

Enfin, c’est pas le tout mais faut bosser encore.

Peu à peu, la forge se remplit de particules poussières qui volètent. Elle passe de meule en aiguisoir, lime encore et encore pour donner à la hache sa forme définitive.
L’arme toute en acier en est presque élégante. Son tranchant de fer très large est prêt à fendre n’importe quel bouclier ou haubert. Os et chair ayant déjà prouvé leur faible résistance sur le sujet. Son manche torsadé lui procurera encore plus de résistance et le bec de Corbin à l’opposé du taillant perforera n’importe quelle plaque d’armure se présentant à lui.

Sous son plus fin ciseau les runes prennent naissance sur la lame, alors qu’elle les nomme toujours comme pour imprégner l’acier miroitant de leur pouvoir : Kenaz, Hagelaz, Sowilo, Tuwaz à nouveau… Eihwaz, Perthro…. Les rejoignent.
L’arme est débarrassée de ses impuretés et cette fois elle effectue ses gestes avec encore plus d’attention. Une brûlure pour cause d’inattention, ça passe. Deux seraient preuve d’incompétence manifeste.
Et une longue poignée d’ébène vient habiller le bas non torsadé du manche et à nouveau les fils d’orichalque s’entrelacent et emprisonnent le tout pour ne plus former qu’un ensemble compact et harmonieux.

Sous son œil une nouvelle fois, les symboles s’imposent. L’arme est celle de la foudre et du tonnerre, emblème de force et de pouvoir. Elle entrouvre et pénètre la Terre, figure son union au Ciel et sa fécondation. Aussi ambivalente que l’épée, elle est porteuse de colère et de destruction autant qu’elle est civilisatrice. Elle fend l’arbre et le délivre…

Et fait un formidable hachis de poivrot au demeurant.

Huilée avec soin, elle prend place dans la charrette au côté de l’épée toujours là finalement… Peut-être même que ce soir elle osera les montrer à leur futur propriétaire après les avoir montées au grenier… Histoire de savoir une bonne fois pour toutes si elle doit tout refaire de façon plus.. ordinaire.

Le corps, lui… Ne risque pas de s’envoler. Au pire les rats et chiens errants auront tôt fait de la délivrer de cette corvée…

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Stephen.
Sympathique de votre part de me régler mes affaires.

Qui dit querelle dit plusieurs personnes. La Fourmi ne l' a peut-être pas reconnu dans la froideur du matin, mais notre feignasse national n'était pas très loin des poivrots en question.
Adossé à la porte, toisant la forgeronne prête à partir dans sa charrette, il désigne du menton le bâtiment.


Il est juste dommage que vous gâchiez par vos emportements une denrée aussi précieuse. Je n'ose espérer un remboursement, ai-je tort ?
Parmi les effluves écœurantes et métalliques s'élève lentement une fragrance incongrue en ce lieu : le sac contenant son précieux cumin, volé par les ivrognes qui se le disputaient avant l'intervention de Cymoril.

Il n'en rajoute pas plus et ne fait pas mine de la retenir.
Bras croisés, il se contente de mâchonner un clou de girofle en la fixant de son regard morne. Que peut-il bien ajouter d'autre, de toute manière... l'épice est irrécupérable.

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Cymoril
Hors de l'espace et du temps... Un truc quasi levanesque..


Tiens, une voix... C'est tellement peu ordinaire qu'en premier lieu elle pense même l'avoir rêvée...
Sauf que la voix poursuit et elle se résout à laisser son regard suivre le chemin des sonorités traînantes avant d'inspirer longuement pour saisir tout le message contenu.

Ses papilles caressées à leur tour par la fragrance si particulière du cumin.. Alors qu'elle hausse un sourcil railleur.


Et vous êtes resté là tout ce temps ?

Diantre, fichtre, carabistouille.. C'est qu'il n'avait vraiment rien d'autre à fiche l'écrivain public... Un sourire se dessine en esquisse légère sur le minois de la forgeronne...

Je puis.. songer à vous le remplacer.. si vous n'êtes pas trop empressé..

Le sourire se prolonge alors qu'elle le fixe un peu plus longuement avant de tirer sa blague d'un pan de sa cape... En extrayant quelques feuilles pour lui tendre.

En attendant.. un peu de datura vous satisferait-il ?

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Stephen.
Je suis du genre patient. En particulier lorsque le mal de crâne et la nausée lui retirent toute envie de bouger.

Avec un soupir, il se redresse et l'écoute faire ses propositions pour le moins... dangereuses.


Pensez-vous que j'ai besoin de votre aide pour obtenir de la datura ? N'importe quel herboriste peut en fournir, et toujours avec la même mine de conspirateur en prime.
Ça et le filtre d'amour, ça fait fureur. Ou celui de fécondité, il a oublié. Boah, peu importe.

Il a à son tour un sourire railleur en jaugeant la frêle forgeronne.

Et je doute que votre fournisseur puisse fournir des épices d'aussi bonne qualité que mon frère, mais sait-on jamais.

A vrai dire, j'ai tendance à m'ennuyer, et vous avez des occupations divertissantes. J'en aurais presque envie d'élargir mon champ d'activité pour me faire troubadour et chanter des anecdotes à votre propos.

Qu'elle se rassure ainsi, elle sait qu'il n'ira pas courir à la maréchaussée. Lui est juste blasé de voir à nouveau une femme qui n'hésite pas à faire couler le sang.
Et ensuite...

Il la fixe. Pas d'un air canaille, ni blasé, ni même malade, non. Il la fixe juste, simplement et sérieusement.

Juste, évitez de faire n'importe quoi et vous mettre en danger, je ne voudrais pas penser que je suis un chat noir.
Et peu importe le temps, sachez juste que vous m'êtes redevable.


Sacrément culotté le Stephen. Mais elle le savait déjà.
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Cymoril
Les mains tout juste posées sur les rênes, elle l'écoute presque patiemment. A dire vrai il l'amuse avec cette fausse nonchalance créée par les mélanges qu'il consomme. Jusqu'à ce qu'elle hausse un sourcil, furtivement, à l'évocation de son frère fournisseur et qu'elle se mette à scruter les traits de son visage plus attentivement dans la pénombre... Le laissant confirmer à demi mots son silence sur l'affaire.

Je.. ne suis pas...

Elle adopte à son tour un ton monocorde. Autant par lassitude que par conviction.

... divertissante. Encore moins...

La voix éraillée se fait de plus en plus traînante alors que son regard se perd un instant dans cette voûte étoilée qui s'offre comme chaque soir en lui procurant cette chaleur trompeusement réconfortante.

Intéressante.

Ca c'est dit.
Et la dernière phrase prononcée par Stephen, comme l'écho d'un déjà entendu, lui fait serrer les mains un peu plus fort sur les lanières de cuir. Une longue inspiration s'en suit alors que ses yeux quittent définitivement leur contemplation du panorama céleste pour revenir plus durement sur lui...


Dites sur le champ votre prix... il n'est pas question que je vous sois redevable, même d'un vulgaire sac de cumin...

Vulgaire elle sait que ça ne l'est pas. Bien au contraire. Mais elle est troublée par ses pensées et les traits du jeune homme.
Au point d'en risquer le questionnement, même si elle craint la réponse.


Votre... frère... tient boutique... à Paris.. c'est bien ça ?

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Stephen.
Amusé, il hausse les épaules. Pas un instant le jeune homme ne se doute qu'elle ne mentionne pas Paris par hasard.
Ce n'est pas bien dur de deviner où l'on peut trouver de tout comme marchandises.

Je veux une dague.
Ouaiiis, Stephen se rebelle! Rien de bien ostensible, je vous rassure. Ah, non. Zut.

Juste que...
Précautionneusement, il sort une petite bourse en cuir de sa chemise, et la déplie devant Cymoril, de telle sorte qu'elle puisse bien distinguer le précieux objet renfermé. Une mèche de cheveux.

Je suis plutôt sentimental, et j'aimerais assez incorporer ces cheveux au manche, si c'est possible.
Sinon, ce n'est pas la peine, je ne voudrais pas les abîmer. Vous n'imaginez pas le mal que j'ai eu à me les procurer.


Aller de la Guyenne jusqu'au fin fond du Poitou pour aller chercher une personne, déterrer du cadavre, faire une coupe d'été à la donzelle, repartir en laissant tout comme avant, non, vraiment, ce n'était pas une sinécure.
La couleur châtaigne ne se voit pas dans la pénombre, mais il avait bien fait attention à prendre une mèche d'en dessous, parmi celles que son ancienne pseudo-protégée ne teintait pas : "Ben ça se voit pas, c'est pas utile!"

Sans attendre la réponse, l'homme flegmatique donne la petite bourse et son contenu à la forgeronne, et s'éloigne de son pas tranquille.


Je prendrai une chambre dans votre auberge, cela vous évitera d'avoir à me chercher longtemps.
Il n'y a désormais plus que sa voix qui flotte dans les ombres.
La bonne nuitée.
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Cymoril
Les sourcils se froncent de plus en plus et le regard se durcit encore alors qu'il répond à l'évasive. Loin de savoir qu'il n'imagine pas les raisons de son questionnement elle pense plutôt qu'il joue au chat et à la souris en pensant la tenir par ce tour...

Et elle tique, légèrement lorsqu'il parle de dague à lui faire, avant de resserrer encore plus ses doigts sur les rênes à en faire blanchir les jointures déjà pâles en le voyant extraire avec tant de soin la petite bourse pour lui montrer le contenu.. Et Cym de se raidir encore plus, inspirant longuement pour éluder le malaise, le frisson glacé qui court le long de son échine.

"Non.
La ressemblance avec Lance, c'est la fatigue, ça ne peut être que ça..
Et les cheveux... ne peuvent... pitié..."
Le minois se relève vers le ciel et son encre pour y puiser un peu de force alors qu'une douleur sourde commence à taper insidieusement dans sa poitrine et que son esprit réfute en bloc ce que sa raison lui souffle malgré tout.
C'est blême qu'elle se penche pour prendre possession de la petite bourse de cuir et de son contenu, la main tendue presque fébrile, mais la pénombre la protège, il ne verra rien de la détresse soudaine dans son regard. Presque religieusement la bourse est rangée dans un pan de son vêtement et la voix encore plus éraillée qu'à l'ordinaire articule lentement... presque mécanique.


Quelques jours.. deux.. peut-être trois...

Le temps qu'elle s'en remette. Que la douleur s'apaise à nouveau et qu'elle se prépare à avoir une longue explication avec lui...
Le regard vague elle le regarde disparaitre au coin de la ruelle, avant d'inspirer longuement pour restaurer un calme tout relatif.
Pas le tout, mais des armes à livrer hein...

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Eikorc
Bourges. Bourges et ses habitants invisibles… Bourges et ses ruelles désertes… A part la gigantesque carcasse qui se promène dans les allées les plus sombres, cherchant de l’occupation, des rumeurs… Laissant traîner les oreilles ici et là, bousculant le peu d’ivrognes qui traînent dans les parages, mais rien ne se passe… Et à part quelques infos captées à la volée qui le font grommeler encore plus, rien pour lui arracher un sourire, mais tout pour le faire froncer encore plus les sourcils.
La trogne se secoue plusieurs fois et le de Nerra pivote pour rejoindre les faubourgs en soupirant longuement, direction le fauteuil qu’il s’est attribué dans la taverne fourmiesque pour étudier une fois de plus les cartes qui lui permettront de trouver une porte de sortie à ce piège berrichon… S’il y en a un.

Les portes sont ouvertes à la volée, le bois claquant derrière lui quand il les refermes.. Et les marches sont montées alors que les grommellements montent crescendo. Comment se sortir du bourbier dans lequel ils sont ? Frontières fermées de tout les côtés, bannissement toujours à l’ordre du jour dans les duchés… Le nez se plisse et la porte du grenier est ouverte d’un coup d’épaule qui la fait presque sauter hors de ses gonds…
Avant qu’il ne s’arrête net en découvrant deux immenses paquets déposés sur le bureau où s’entassent les courriers… Les sourcils se froncent et la trogne se penche légèrement sur le côté alors qu’il s’approche, laissant une de ses larges pognes venir caresser un bout de garde qui dépasse… Jouant du bout des doigts sur l’ébène alors qu’un petit sourire se glisse au coin de ses lèvres : apparemment les armes commandées sont terminées…

Et lentement ses doigts viennent se refermer sur le bois, s’enroulant autour de la garde pour tirer la lame hors de sa protection, la dévoiler à ses yeux qui se mettent à briller… Le sourire s’élargit et il admire l’épée forgée avec soin, passant le pouce de son autre main sur le fil de la lame en hochant la tête de sentir la chair cédée… Beaucoup plus longue que celles dont il a l’habitude, mais tout aussi bien équilibrée…
Le poignet tourne, pour faire siffler l’arme dans les airs avant de la reposer sur le meuble, s’emparant dans la foulée de l’autre, libérant la large lame de sa nouvelle hache qui subit les mêmes attentions… Un autre doigt sacrifié sur le fil alors que les yeux glissent sur les motifs et il hoche la caboche. Un forgeronne doit sans doute attendre ses critiques…
Mais rien ne lui vient à l’esprit, les armes sont parfaitement adaptées à ses pognes et lui semble même plus légères que celles dont il a l’habitude… Les yeux se plissant tout de même quand il perçoit l’éclat d’une flamme qui se reflète dans la lame… Pas de critiques, non, mais des questions, ça il en aura à lui poser… En attendant, le voilà fin prêt à reprendre du service, plus qu’à trouver le moyen de se sortir de cette presque prison…

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"Pour toujours... Et à jamais."

Zoko & Fablitos
Cymoril
C'est une fin d'après midi presque ordinaire, calquée à nouveau sur une routine telle qu'elle en regrette presque la fatigue du travail de la forge. La chaleur moite des derniers jours la dérange et fait ressortir encore plus les relents nauséabonds des marais qui encerclent la ville.
Elle est passée à la bibliothèque de l'université, emprunter un livre comme presque chaque jour depuis leur arrivée contrainte et forcée. Portant à nouveau vesture et tresse de la sage étudiante qu'elle est.

Taverne toujours déserte, mais ça ne la dérange pas plus que ça. Quand on a passé autant de temps à l'écart de ses contemporains, c'est plutôt l'inverse qui est dérangeant. Et comme elle n'est jamais vraiment à l'aise à force de s'imposer le masque de la Fourmi et sa carapace de tempérance, le vide autour d'elle, finalement en est presque rassurant lui aussi.
Un détour en cuisine, pour y récupérer une poignée de fruits et un verre de son précieux St Estèphe, avant de prendre lentement l'escalier, le lourd livre relié de cuir coincé sous le bras pour monter au grenier siroter tranquillement et peut-être ouvrir cette foutue bourse à laquelle elle n'a pas retouché depuis la veille.

Le front légèrement plissé, l'esprit occupé sur cette pensée, les mains pleines, c'est d'un petit coup de derrière qu'elle pousse la porte pour se glisser dans la mansarde réaménagée. Se rendant compte de la présence du Colosse alors qu'elle pivote pour diriger ses pas vers la table y déposer son livre. Rapidement le regard passe du grand assis dans le fauteuil à la table et aux armes débarrassées du tissu qui les recouvraient. Exit de la tête bourse et cheveux supposés de sa quasi soeur. Bonjour nervosité qui s'installe à la place. Elle abolit la distance qui la sépare encore de la table d'un pas presque résolu pour y abandonner le lourd volume, la tête baissée et le regard d'une gamine qui s'attend presque à être rabrouée quand elle laisse échapper quelques mots de sa voix éraillée:


Si elles... conviennent pas.. ou ne sont pas à ton goût... je t'en ferais d'autres...

Parce qu'après tout, elle n'a fait que suivre son instinct pour la création et la réalisation de ces armes et que rien ne dit qu'elle ne s'est pas trompée. Elle les a imaginées pour ses mains uniquement. Comme toutes les armes qu'elle a fait jusqu'à présent, sur commande, sur mesure.. Mais il y'a tellement longtemps qu'elle n'en a fait aucune, peut-être que ce n'est plus là, qu'elle n'a plus cette petite étincelle qui faisait qu'elle trouvait ce qui s'adapterait le mieux à chacun...
Aussi pour faire encore semblant de se donner une certaine contenance, elle porte son verre à ses lèvres d'une main fébrile, s'efforçant de n'en prendre qu'une petite quantité tant sa gorge est nouée avant de le poser à côté du livre.

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Eikorc
A peine était-il installé dans le fauteuil qu’il s’est octroyé que des bruits de pas se font entendre à l’étage inférieure… Et pourtant il ne bouge pas d’un pouce, les sourcils froncés, la tête penchée sur une carte qu’il vient de déployer devant ses yeux… Les doigts se promenant sur le vélin, pointant ici ou là les frontières dites à risque en grommelant, avant de laisser échapper un long soupire. Le parchemin est abandonné sur ses cuisses et il se penche pour attraper la flasque dissimulée dans l’un de ses paquetages, s’envoyant une longue gorgée de liquide ambrée en soupirant d’aise.
Juste avant que la porte ne s’ouvre sur une fourmi bien chargée… Comment une aussi petite femme aura-t-elle réussi à façonner des armes à la mesure d’un colosse comme lui ? Question qui vient flotter dans son esprit alors que son visage reprend l’air neutre et sombre que tout le monde lui connait… Abandonnant la flasque sur le plancher alors qu’il observe la forgeronne qui semble tout à coup plus que nerveuse.

Rien ne lui aura échappé, des regards qui passent de lui à ses armes à ce regard qu’il commence à connaître… Une fois de plus elle a peur d’avoir raté ou fait quelque chose de travers. Et il profite que les yeux soient baissés sur le bout de ses bottes pour esquisser un sourire narquois… Avant de secouer la trogne quand il l’entend.


« Arrête ça. De suite. »

Elle devrait le savoir qu’il n'aime pas quand elle se prépare à l’avance à bredouiller des excuses dont il se fout alors qu’il n’a pas encore ouvert la bouche… Surtout qu'elle l'oblige une fois de plus à employer le ton sec dont il n'use normalement que pour donner des ordres...

« Surtout que tu as fait un magnifique travail… Elles sont parfaites. Même si… »

La phrase est laissée exprès en suspens, parce qu’il s’amuse toujours autant à l’effrayer en laissant un doute planer… Et parce qu’elle est tellement peu sûre de ses talents, qu’il ne peut pas s’empêcher d’appuyer là où ça peut déranger.

« Même si j’vais devoir porter la hache à la ceinture et plus dans le dos… Sinon l’épée trainera au sol. Et ça serait dommage d’abîmer une aussi belle lame non ? »

Et cette fois-ci, il ne cherche même plus à dissimuler le sourire amusé qui se glisse au coin de ses lèvres alors qu’il s’arrache à son fauteuil, pour aller s’emparer de ses armes… Attrapant l’épée dans sa main anciennement brûlée, tandis que la hache vient reposer dans la dextre, soupirant presque de sentir à nouveau le poids des armes dans ses mains… Comme si elles étaient un prolongement de ses bras qu’il avait oublié…

« C’est malin… Maintenant j’ai hâte de partir pour m’en servir ».
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"Pour toujours... Et à jamais."

Zoko & Fablitos
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