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[Rp] Demeure des Saunhac

Aymeric_de_saunhac




Un lien incompris (...)


Beaucoup de gens disent bien se connaitre. Pour qualifier leurs liens, ces personnes utilisent bon nombre d’expressions « (…) comme si je t’avais fait » ou bien « nous nous connaissons depuis toujours ». A la vérité, ces expressions ne conviennent à aucune autre personne aussi bien qu’à Eliandre et Aymeric de Saunhac. Aussi loin que l’on puisse remonter ; du fameux jour où leurs parents consommèrent leur mariage dans une petite alcôve du château de Voiron, à aujourd’hui, il ne s’est passé un jour sans que les deux enfants ne soient ensemble.

Dés leur naissance, leur entourage ne pu que constater le lien indicible qui unissait les deux enfants. Ensemble pour le meilleur et pour le pire, Eliandre et Aymeric l’étaient. À dire vrai, pour leurs parents et pour d’autres, il s’agissait bien plus souvent du pire que du meilleur. Unis dans les plus malsaines mais ô combien amusantes aventures frauduleuses dans le domaine familiale ; les méfaits des deux enfants valurent bien plus d’une fois des réprimandes à l’adresses d’innocents serviteurs. Et lorsque l’on essayait alors de les séparer ne serait-ce que quelques instants, un drame ingérable éclatait.
Ainsi, on laissa tranquille, du moins pour un temps les deux garnements. Car bien entendu, il était hors de question de les laisser aussi proche l’un de l’autre lorsque les nécessités de leur âge se feraient sentir.

De cet accord tacite, Eliandre et Aymeric n’en étaient guère conscients et vécurent ainsi des jours heureux. Jusqu’à ce que leur tranquillité soit mise en péril par de sombres projets d’ordre familiaux.
Les changements arrivèrent doucement, et bien que bougons, les deux enfants s’y plièrent, enfin (…) plus ou moins. On commença à les séparer lorsqu’il leur fallait choisir de nouveaux habits. Mais les choix des tissus, de la matière, des couleurs, de la coupe ne leur importait peu. Ainsi ils s’arrangeaient pour en finir au plus vite en acceptant tout ce qu’on pouvait leur proposer du moment que se puisse être rapide. Par la suite, mais se fut rare, on initia Eliandre à certaines activités pendant que son frère était occupé à d’autres affaires. Généralement alors, l’un comme l’autre tentait de s’éclipser discrètement pour rejoindre l’autre… C’est ainsi que l’on retrouvait Aymeric à attendre derrière la porte de la pièce ou Eliandre était occupée à quelques exercices, et inversement.

Ainsi il passait la majorité de leur temps ensemble, le jour comme la nuit. Car bien que leur chambre à couché soit dotée de deux couches, Eliandre et Aymeric n’avait jamais dormi séparément. Ô leurs parents avaient déjà bien souvent essayé de les y contraindre, mais les deux petites têtes brulées n’avaient jusqu’alors jamais pliés.

C’est sur cette histoire de couche que la situation devint dés plus délicate pour Eliandre et Aymeric. Alors qu’ils ne pouvaient dormir que tout les deux, qu’ils ne trouvaient sommeil sans être l’un à coté de l’autre, l’un contre l’autre, leurs parents tentaient de les priver. Pour couronner le tout, ils osaient qualifier leur geste de « bien veillant », et, « d’indispensable » à leur bien être. Comment cela se pourrait-il alors que « bien », ils ne pouvaient l’être qu’ensemble !

Les deux enfants comptaient bien ne pas se laisser faire sur le sujet, et pour cela, il avait une alliée de taille(…)



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--Eliandre_de_saunhac





La vie de château, celle qui de dehors fait rêver. La vie de château, celle qui de l’extérieur semble dorée. La vie de château, celle qu’il nous fallait assumer. Comment aurait-il pu en être autrement, lorsque que l’on est rejeton d’Umiko de Prume et de Phelipe de Saunhac ?

Deux parents nobles, l’un de naissance, les deux par la force d’un travail acharné. Alors depuis tout petits, nous avons l’habitude d’être entourés de gens de maison. Depuis tout petits, on nous inculque les valeurs que la noblesse se doit de défendre. Que nous ne comprenions toujours pas l’intégralité de celles-ci est accessoire, on nous éduque en ce sens… A notre plus grand damne.

Pourquoi a-t-il fallu que nous soyons l’opposé pendant l’un de l’autre ? Pourquoi es-tu garçon et moi fille ? C’eut été tellement plus simple autrement. Nous aurions pu toujours rester ensemble, à chaque moment. Mais il n’en est malheureusement pas ainsi. Alors parfois nous sommes séparés. Plus nous grandissons, plus les adultes sembles gênés de nous voir toujours tant liés. Est-ce si difficile pour eux de comprendre que nous partageons la même âme ? Il semblerait hélas…

Ainsi, ils trouvent divers excuses et prétextes pour nous éloigner. Lorsque l’on va chez le tisserand, ce n’est pas le même pour toi et moi. Lorsque l’on doit apprendre à nous comporter « noblement ». Toi on t’apprend le maniement des armes, moi celui de l’aiguille… Si une flèche et une aiguille sont pointus, c’est bien leur seul point commun… Je t’envie lorsque tu parles des cibles, de la tension de la corde de l’arc à ajuster… je sais que tu me racontes tout cela pour me faire partager cette partie de toi qu’on voudrait distincte de moi. Moi je suis incapable de te parler avec enthousiasme des divers et ennuyeux points de borderie que l’on me fait faire.

Tout cela, nous le supportons. Parce qu’il le faut. Et puis après nous savons que nous nous retrouverons dans notre chambre, notre petit royaume à nous.. mais même lui est menacé. Avant, on nous laissait dormir ensemble, l’un contre l’autre… Puis un jour, ils ont décidé que nous étions « trop grands » pour cela. Alors nous avons eu droit à un lit chacun. Cela nous a laissé perplexe. Nous ne comprenions pas à quoi cela pouvait servir, c’était une fantaisie des adultes… Jusqu’à ce que le soir, on nous mette d’office chacun dans un lit différent.

Ce soir-là Ida me borda alors que tu n'étais pas encore rentré. Quand je lui demandais si tu arrivais bientôt, elle me répondit froidement que cela n'avait pas d'importance, car tu dormirais dans ton lit désormais. Je m'enfermais dans le mutisme alors, quoiqu'elle me dise ensuite, je tournais le dos à tout, surtout à toi. J'avais tellement peur que tu me vois brisée ainsi, tellement peur de te briser en te dévoilant l'étendue de la douleur qui m'étreignait à l'idée ne de pas pouvoir être dans tes bras.
Je me figeais en t'entendant enfin rentrer dans notre chambre, paradis déchu par la volonté de nos parents. Le bruit des vêtements qu'on change, des draps que l'on ouvre, dans lesquels tu te glisses, sans moi. J'avais envie de crier,de pleurer... je restais immobile et aucune larme ne sillonna mon visage.

Pesant silence quand Ida nous laisse.. plus ou moins. Elle repasse régulièrement s'assurer que nous sommes toujours séparés. Comment ne pas l'entendre alors que je ne peux dormir sans toi? Parfois, je sombre dans un mauvais et léger sommeil, bien vite interrompu par le vide qui s'engouffre en moi, que tu ne peux combler.

Enfin les visites d'Ida semblent finies. J'attends encore, pleine d'appréhension. Je crains leur réaction, pourtant je ne peux pas faire autrement. Aussi silencieusement que possible, je sors de mon lit, je m'approche de toi, hésitante. Tu ne dors pas non plus. Je me glisse à tes côtés et tu refermes tes bras autour de moi. Je suis enfin libérée. J'ai retrouvée ma place auprès de toi. Je m'endors tout contre toi, épuisée de larmes.



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Aymeric_de_saunhac






Ce matin, papa et maman nous attendaient dans la salle à manger. Bien entendu ils nous attendent toujours, mais ce matin c’était différent. Alors que nous arrivions tout deux joyeusement main dans la main, une chose étrange semblait se dérouler. Nos regards se croisèrent comme si l’on cherchait à valider notre sentiment mutuel dans les yeux l’un de l’autre. Du regard hésitant que tu m’adressais je compris que la tension ressentie n’était pas que le fruit de mon imagination. Ainsi, d’un pas moins assuré nous nous approchâmes de la grande table dressée pour nous installer comme à notre habitude cote à cote. Sur ces évènements, papa serra les poings, mais nous ne l’avions alors pas remarqué.

Alors que les servantes s’apprêtaient à servir les mets, papa leva le bras ce qui eu pour effet de toutes les renvoyer à la cuisine. Je n’avais alors jamais vu papa aussi contrarié, ou du moins je ne m’en souvenais pas.
Au bout d’un long silence maman pris parole. Elle nous annonça que papa et elle avaient quelque chose d’important à nous demander, et qu’il fallait avant tout que l’on comprenne que c’était pour notre bien. À son ton, on comprenait qu’ils n’avaient rien à nous demander mais plutôt à nous imposer. En fait, ces paroles n’annonçaient rien d’agréable pour nous(…) La dernière fois qu’une conversation avait commencé ainsi, je m’étais retrouvé toute une après-midi dans la cour en compagnie de mon maitre d’arme alors que tu te voyais assignée à des leçons de broderie cloitrée dans une pièce. Ainsi je m’apprêtais à ce que l’on nous trouve une quelconque activité pour nous éloigner encore davantage. De peur de lire sur ton visage la même expression de désarroi que je devais moi-même afficher, je m’évertuais à regarder droit devant, tout en serrant un peu plus ta main que j’avais gardée précieusement liée à la mienne.
Ce fut alors au tour de papa de se faire entendre. Il nous fit un long discours sur l’enfance et le passage à l’âge adulte, ainsi que les responsabilités qui s’y attachaient. Tout ça pour conclure après nous avoir assommés de toutes ces choses qui nous semblaient bien lointaines, qu’il fallait que l’on s’habitue à ne plus dormir ensemble. Tout d’abord je ne fis tout comme toi, aucune attention aux dernières paroles. Elles semblaient si inopinées par rapport à ce que l’on venait de nous dire. Alors que la situation s’éclaircissait peu à peu, je fronçais les sourcils prêt à protester (…) Mais papa nous fixant d’un regard froid insista sur le fait qu’une jeune fille et un jeune garçon fussent-ils frère et sœur n’avaient pas à dormir dans la même couche. La cloche retenti alors, signifiant par le même son affable, que l’on pouvait servir la table et que la conversion était terminée. Furieux je refusais la plupart des mets que l’on me servait.

Le reste de la journée n’arrangea à vrai dire en rien mon humeur. Dés qu’il fut décidé que nous nous étions assez sustentés, papa m’envoya à la cour pour mes leçons d’arme. La tête baissée et le pas trainant je rejoignis mon maitre sans oser t’adresser un regard à toi ma sœur tant aimée(…) Bien que je me doutais que ton moral n’était aucunement en meilleur état que le mien, je refusais que tu me vois ainsi frustré et en colère, si faible (...)

Si mon maitre d’arme avait décelé en moi un air maussade, il n’en fit guère la remarque. Nous nous saluâmes formellement, puis il m’assigna l’arme du jour. Aujourd’hui, c’était le maniement de l’arc. Ô d’ordinaire j’aurais été assez enjoué par la nouvelle. L’arc était une arme assez agréable en comparaison à la rapière encore un peu lourde pour moi. Depuis que mes leçons avaient commencé, j’avais relativement bien progressé, j’étais devenu plus souple et mes flèches n’en étaient que plus précises. En tout cas, c’est ce que me disait mon maitre. Pour ma part j’étais encore déconcerté de voir que je loupais plus de la moitié de mes cibles. Mais aujourd’hui, ce ne fut pas la moitié, non, aucune de mes flèches ne se planta ni même n’effleura la cible. Le maitre ne s’en formalisa pas, quoi qu’en y repensant (…) Voyant que je ne parviendrais pas à de bons résultats avec mes quelques flèches, il alla chercher deux rapières, m’en offrit une et se mis en garde face à moi. Le résultat n’en fit que plus désastreux. Après moult pas, pointes et parades, ainsi qu’une dernière mauvaise chute qui me valut un certain nombre d’écorchures, mon tortionnaire reprit froidement ses armes, et non s’en m’accorder une dernière pic « On m’a dit que vous vouliez devenir chevalier jeune Aymeric, alors à l’avenir soyez plus attentif à vos leçons(…) », il prit congé.
Etalé par terre, des larmes commençant à perler le long de mes joues, je le regardais s’éloigner. Me relevant lentement, j’essuyais d’un revers les perfides qui trahissaient mon chagrin. Et s’en prendre la peine de m’épousseter, je regagnais la demeure familiale l’esprit en pleine confusion. Oui je voulais devenir chevalier ! Mais uniquement pour toi, uniquement pour être à tes cotés et te protéger ! Mais voila que l’on fait tout pour nous séparer. Que faire alors si l’ennemi se cache même derrière nos parents(…)
Passant le perron, papa m’a interpellé : « Alors mon fils, tes leçons se sont-elles bien passées ? ». Que croyait-il alors, qu’il suffisait de me faire la conversation pour que je lui pardonne ? D’autant plus que j’en étais sûr, il n’avait pas loupé un instant de ce qui c’était passé dans la cour. Sans répondre, j’ai pris le chemin de la chambre en espérant te retrouver, toi, celle qui me manquait(…) Et tu y étais comme je m’y attendais, à ceci prés que tu n’étais point seule. Non, Ida était là, elle venait de te coucher, et s’apprêtait à faire de même pour moi dans le lit opposé. Je te regardais, tu tournais nous tournais le dos (…) Ô petite sœur qu’allons nous faire si même le soir nous ne pouvons nous retrouver, si même nos nuits nous ne pouvons les partager.
J’ai suivit Ida sans rien dire. Dans le silence elle m’a aidé à me changer puis m’a mis à la couche, cette couche si grande et si froide lorsque tu n’y es pas. Me voilà à présent allongé sur le dos, fixant d’un regard vague le plafond. Tu ne parles pas, moi non plus d’ailleurs, que peut-il y avoir à dire de tout cela(…)
Alors que je me remémore sans cesse cette journée, mes larmes se remettent à couler. Je ferme les yeux et essaye de me raccrocher à mes plus beaux souvenirs. Évidemment, mes plus beaux souvenirs sont avec toi, toujours… Je me souviens d’un soir où Ida venait tout juste de nous coucher, nous étions l’un à coté de l’autre. Sous la couverture nous nous étions refugiés et avions parlé plusieurs heures jusqu’à nous endormir(…) Alors que je m’étais éveillé un peu avant toi, je t’avais trouvé blotti dans mes bras comme bien souvent. Un sourire aux lèvres, je t’avais observé de longues minutes. Ton visage était si calme, si paisible(…) Du fond de mon lit je soupire en repensant à ces moments. Ô petite sœur, comme j’aimerais en cet instant t’avoir à mes cotés.
On nous surveille, on nous épie, du moins une partie de la nuit. Alors qu’il n’y a plus de bruit dans les couloirs, que les allers retours ont cessé, je sens les couvertures de ma couche se détendre. Tu te glisses à coté de moi, mais bien que j’en sois heureux je ne parvins à sourire. Alors que je te prends dans mes bras, mes larmes ne cessent de couler. Je te serre un peu plus fort comme pour être sûr que tu resteras là, avec moi. Mon corps se réchauffe petit à petit en même temps que mon cœur, je te fais un léger bisou mouillé de mes larmes puis ferme les yeux(…)



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--Ida



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Le lendemain matin (...)


- (...) Oui maitre, je vais voir s’ils sont réveillés.
- Je vous remercie Ida… Ha ! et veillez à ce qu’ils soient prêts pour leur leçon d’écriture, un peu d’exercice leur fera du bien… Surtout à Aymeric, il semble avoir un peu de retard par rapport à sa sœur. Seigneur, que cet enfant est distrait !
- Bien maitre, je m’en occupe …

Ida prit congé de son maitre pour se diriger à vive allure vers la chambre des enfants. En chemin, elle se mit à penser à sa vie avec la famille de Saunhac, et bien avant ça avec sa maitresse Umiko.

Ida était entrée au service d’Umiko bien avant la naissance des enfants et bien avant le mariage avec le maitre d’ailleurs.
La vie était si simple à l’époque, Umiko n’avait que peu de besoins, et il y avait si peu d’allers et venues que la demeure restait en ordre sans trop de travail. Puis vint le mariage et le début des voyages entre le Languedoc et le Lyonnais Dauphiné. Au grand soulagement d’Ida, bien que les voyages fussent devenus alors fréquents elle n’avait pas beaucoup plus de travail. Le maitre n’était pas homme à se laisser servir plus que nécessaire, tout comme la maitresse. Ida n’avait alors jamais eu à se plaindre, ses maitres étaient plutôt gentils et surtout honnêtes et généreux envers elle.

Non, en fait le plus gros changement arriva lorsqu’Umiko accoucha. Oh Ida avait longtemps redouté le moment où il lui faudrait s’occuper du nouveau né de la famille. Mais jamais elle ne s’était imaginée avoir à faire à deux nourrissons du même coup. Quel malheur lorsqu’on lui apporta la première fois les jumeaux. Elle espérait qu’ils soient calmes comme leurs parents. Mais bien vite elle comprit que la belle vie était finie.

Les premiers jours elle ne crut jamais pouvoir s’en sortir, les deux petits ne cessaient de gémir dans leurs berceaux… On comprit heureusement bien vite que tout ce qu’ils voulaient, c’était être ensemble. Mais Ida le sentit, ceci ne présageait rien de bon pour l’avenir. Et jusqu’ici rien ne l’en avait dissuadé, d’autant plus que la situation avait été de mal en pis avec la croissance des deux enfants. Jamais elle n’avait vu des enfants être aussi complices, et surtout, jamais elle n’avait vu deux êtres inséparables à ce point. Il était impossible de les tenir éloignés sans endurer les foudres de leurs mauvaises humeurs.

Bien qu’ensemble ils puissent se montrer bornés et irresponsables, Ida préférait de loin les avoir tous deux qu’un à la fois. Car bien qu’elle ne soit pas responsable de leur séparation, elle savait qu’ils la lui feraient payés à elle avant tout. Si bien qu’elle ne fut pas particulièrement enchantée lorsque ses maitres décidèrent d’imposer aux enfants des couches séparées. Les emmener séparément chez le tailleur ou à toute autre activité était chose déjà bien assez compliquée.

Pourtant, hier soir, le premier soir où la nouvelle loi parentale a été appliquée, les choses ce sont relativement bien passées. Ils n’étaient pas ravis certes, mais au moins s’étaient laissés couchés sans discuter. Pour Ida, il y avait forcement quelque chose de louche derrière tout ça. Dés les enfants couchés, elle avait été rapportée ses doutes à ses maitres qui lui avaient demandé de surveiller la chambre de près le temps que les enfants s’endorment. Durant plusieurs heures, Ida avait alors fait des allers-retours dans les couloirs pour s’assurer que tout se déroulait comme il le fallait.

Revenant à l’instant présent lorsqu’elle arriva devant la chambre des enfants, elle entra et se figea en fronçant les sourcils. Les deux enfants étaient réunis, dans les bras l'un de l'autre, le visage serein, endormis. Évidemment, ça aurait été trop simple autrement. Leur feinte soumission la veille n'était que façade. Ils avaient dû attendre tard dans la nuit... Elle avait pourtant fait nombre de rondes pour s'assurer qu'ils restent chacun de leur côté... mais non…

Soupirant, elle alla les réveiller, un air sévère sur le visage. Les deux garnements s'étirèrent, se frottant les yeux pour en chasser le sable du sommeil. Yeux rougis et anormalement gonflés d'ailleurs, sans doute que leurs pleurs nocturnes y étaient pour quelque chose. Il fallu un moment aux jumeaux pour que la réalité les rattrape, qu'ils se rappellent qu'ils avaient enfreint un édit parental cette nuit... Tant pis ! C'est en silence qu'ils laissèrent Ida les aider à se préparer pour cette nouvelle journée. Ils savaient très bien que ce qu'ils avaient fait serait rapporté à qui de droit, mais ne souffraient pourtant d’aucune culpabilité. On voulait leur dénier le droit d'être simplement ensemble pour une stupide histoire d'âge et par-ce-que l'un était garçon, l'autre fille, alors que fondamentalement ils n'étaient qu'un. Ce n'était pas si dur à comprendre ! Il semble toutefois que les adultes voient le monde à travers un autre schéma de règles et convenances qui leur promettaient bien des maux...

Une soubrette entra avec un plateau garni de tranches de pain et d'un pot de confiture, ainsi qu'un pot d'infusion de verveine encore fumant. Leur petit déjeuner. Ils le prendraient dans leur chambre aujourd'hui, les parents étant occupés ailleurs. Cela leur convenait très bien, et retarderait surtout l'inévitable ...

Ils mangèrent en silence, se regardant l'un l'autre. Puis vint l'heure de la leçon d'écriture. Plumes qui crissent sur le papier, taches d'encre sur les doigts et le bois des pupitres. Regard outré de leur professeur en constatant cela. Leurs yeux se croisent, une idée germe dans leur tête. Écrire, c'est pratique ! Pour envoyer des lettres, par exemple. Il faudra qu'ils y pensent… plus tard.

Puis libérés, ils se dirigent dehors pour apprendre à monter comme il se doit... Enfin pour l'instant ce sont des poneys qu'ils ont. Mais on leur apprend à s'occuper de leur monture, à la guider, se faire obéir d'elle, chose qui leur sera sans doute bien utile par la suite. Quand ils auront l'autorisation de voyager par eux-mêmes. Complices, ils se coursent l'un l'autre, puis font chemin côte à côte, selon leur envie du moment. Et la leçon d'équitation prend fin... il faut rentrer... déjà ...

Aymeric_de_saunhac


Une journée ensemble


Dans la nuit tu m’as rejoint, sans toi, je me sentais bien seul, incapable de m’endormir.
Dans la nuit tu m’as rejoint, l'un contre l’autre, toi dans mes bras, nous nous sommes endormis.
Dans la nuit tu m’as rejoint, car comme toujours nous avions besoin l’un de l’autre pour nous sentir bien.

Quelqu’un frappe, c’est le matin déjà. Je m’étire, te regarde puis te souris. Tu es là, à coté de moi. Quoi de plus normal, il en a toujours été ainsi. Les cheveux en pagaille, les yeux encore endormis je te fais un bisou et te souhaite un bon matin. Guilleret je me lève puis laisse Ida me préparer sans prêter attention à son visage réprobateur. Il n’a fallut qu’une nuit à tes cotés pour effacer tous les mots de la veille. Cette journée nous allons la passer presque entièrement ensemble et je n’ai besoin que de cela pour me sentir bien.

Je regarde Ida t’apprêter. À ses mouvements secs et son visage crispé, elle semble agacée. Je repense alors à ce que je croyais être un mauvais songe. Et si on nous avait vraiment interdit de dormir ensemble ?
La brume matinale s’évanouie, mon esprit s’éclaircit. C’est bien cela, nous n’étions pas sensé dormir ensemble. Tout me revient, le petit déjeuner, la discussion de papa et maman, la journée sans toi, le couché sans toi.
Qu’importe, comment pouvaient-ils espérer nous séparer ainsi ?

On frappe à nouveau, cette fois c’est le petit déjeuner. Ida nous informe que nous devons manger seuls, papa et maman sont occupés. À vrai dire ça ne pouvait mieux tomber. Nous échapperons au moins pour le moment à leurs remontrances.

Nous mangeons tranquillement bien qu'Ida tente par tous les moyens de nous presser. Nos leçons d'écriture vont commencer dans peu de temps nous prévient-elle. Qu'importe, nous poursuivons notre petit déjeuner en nous taquinant. Une seconde inattention et je te pique une tartine (...)

Le plateau est vide, plus rien ne nous retient. Plus une miette de pain à grignoter, plus un morceau de fruit à croquer, nous sommes contraints de quitter notre chambre pour aller manier la plume.
L'exercice est long et fastidieux. L'encre goute, la plume glisse mal. Résultat, mes lettres sont tordues et mes mots coupés par d'énormes pâtés. Rien ne va, je m'énerve après ma plume, la pose brusquement sur mon pupitre puis te regarde et réfléchis… À quoi peut bien servir l’écriture?
Tu lèves les yeux vers moi, un sourire t'illumine, tu essayes de me souffler quelque chose, je n’entend pas mais pense avoir compris.
Le maitre m’aperçoit inattentif et m’ordonne de reprendre l’exercice. Je reprends ma plume. Ce n'est pas une si mauvaise chose finalement. D'autant plus que ça pourrait nous être utile, enfin, nous en parlerons plus tard.
Au bout de quelques heures, mes doigts commencent à se figer. Mon bras droit se tétanise, je n’en peux plus. Comme pour répondre à mes souhaits, le maitre nous dit que nous en avons terminé pour aujourd’hui.
Rester ainsi assis à écrire et à lire sans pouvoir parler était une véritable torture. Je lâche ma plume et mes parchemins…

Enfin un moment de liberté, un moment rien qu’à nous, avant l’heure du repas et des leçons d'équitation. Sans prendre le temps de ranger convenablement mes affaires, je te prends par la main puis t'entraine dehors en courant. Il est tellement plus agréable d'être dehors sous le soleil du printemps, lorsque les arbres fleurissent, que les fleurs prennent vie. À l’écart de notre demeure, à l’abri des regards de ceux qui nous surveillent, de ceux qui nous épient, je t’emmène et de bon cœur tu me suis en riant.
Au pied d’un grand arbre je m’arrête puis m’affale sur le dos en poussant un long soupire, un soupire de bonheur. Du coin de l’œil je te regard, un sourire malicieux aux lèvres.
Alors que tu t’allonges à coté de moi, je bondi pour t’attraper et te faire subir la plus fourbe des tortures, celle des chatouilles. Riant à n’en plus finir tu me supplies d’arrêter, ce que je fais lorsque j’estime que le supplice a suffisamment duré.
Je ne te chatouille plus mais te retiens prisonnière. Une vengeance est si vite arrivée… Ton sourire et tes yeux pétillants ne me laissent que trop présager ce que pourrait être mon sort si je te laissais libre de tous mouvements… Maitre de la situation, je profite de l’instant présent pour te serrer dans mes bras et rester ainsi contre toi… Au fond de moi, une peur grandit je le sens… La peur de ne plus pouvoir être aussi proche de toi… La peur de te perdre.

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--Eliandre_de_saunhac





Une journée ensemble

J'aime le son de la plume sur le papier. Pourtant ce n'est pas si simple d'écrire soi-même. Je préfère lire, en tout cas pour l'instant, d'autant que lorsque je compare mes pattes de mouche aux ouvrages de la bibliothèque de la maison je me rends bien compte des progrès qu'il reste encore à faire dans l'art de l'écriture.

Tu sembles agacé de ton côté, je te souris. La plume peut-être plus si nous arrivons à la maîtriser, je ne sais pas pourquoi je prends conscience de cela maintenant, sans doute que la situation dans laquelle nous sommes y est pour quelque chose. Me comprends-tu petit frère? Surement, je ne me rappelle pas qu'il y ait déjà une occasion où ce ne fût pas le cas.

Écrire... tremper la plume dans l'encrier, essayer de doser l'encre pour éviter de faire des tâches, l'appliquer sur le papier et la faire glisser, cela sans trop la serrer entre les doigts parce que sinon les lettres le sentent et ne sont pas harmonieuses mais saccadés, crispées. Je la connais la théorie, le maître l'a assez ressassée... Si seulement la pratique était moins fastidieuse.. mais il faut bien apprendre, je m'y emploie, toi à mes côtés.


Enfin la leçon se termine et nous sommes un instant libres. Avant qu'Ida ne puisse venir nous chercher, déjà nous nous sommes enfuis dehors pour profiter du temps printanier. Main dans la main, comme toujours, nous déambulons dehors jusqu'à ce que tu trouves un endroit qui te plait, que tu t'étales de tout ton long et que je m'installe près de toi... trop tard je me dis que c'est une erreur en remarquant ton air narquois. J'ai du mal à respirer tellement je ris sous tes chatouilles. Traître que tu es à profiter de la moindre faille pour me torturer ainsi! Enfin tu t'arrêtes après maintes supplications entrecoupées de larmes de rire, mais tu ne me libères pas pour autant.


Puis ton regard se voile, quelque chose change dans ton humeur, je le sens. Je tremble tandis que tu me serres tout contre toi. Ainsi liés je t'embrasse sur la joue, pour essayer vainement d'apaiser ce qui te trouble. Je sais que ça ne suffit pas, et un sentiment d'impuissance m'envahit. Aymeric, souris-moi, ne soit pas triste, nous sommes ensemble maintenant, ne pense pas au futur, pas quand je suis dans tes bras petit frère. Je n'ai pas envie de briser ce moment et pourtant il le faut. Il vaut mieux que ce soit de mon fait plutôt qu'en serviteur qui soit envoyé pour nous trouver. Je murmure à ton oreille "il faut rentrer petit frère, avant qu'ils nous cherchent pour le midi". A contrecœur nous nous relevons, mais nos mains ne se sont pas séparées.


Après avoir mangé quelque chose, nous allons nous changer pour l'équitation. J'aime être dehors avec toi, apprendre à m'occuper de mon poney, rêver d'avoir un jour un grand cheval. Aujourd'hui nous montons avec des selles légères, celles qu'on peut porter nous, pas les bien lourdes en cuir dur et tout. Alors on selle nos poneys, ne prenant soin de bien sangler le tout, il serait quand même fâcheux que l'on chute à cause de ce genre d'inattention dont on nous a maintes fois mis en garde. Entêtés nous voulons monter tout seul dessus. Le professeur nous laisse faire avec un air légèrement narquois. Certes il nous aura fallu plusieurs infructueuses tentatives mais finalement nous sommes à dos de poney par nos propres moyens. Rire, libres ! nous faisons la course, faisons "valser" nos poneys, ou plutôt les faisons tourner l'un autour de l'autre. L'heure avance insidieusement et déjà il nous faut remettre pied à terre, au sens propre comme au figuré.

Nous étrillons et bouchonnons nos poneys, pas trop vite pour pouvoir rester encore ensemble sans qu'on ne nous ennuie.


En théorie, nous devrions rentrer de suite après.. mais il fait si beau et doux. Enfin le manteau de l'hiver est tombé et tout redevient d'un lumineux vert. Nous restons dans les jardins du domaine, trouvons un arbre aux racines arrondies et accueillantes, recouvertes de mousse. L'un a côté de l'autre, adossés au tronc, nous regardons les cotonneux nuages blancs défiler dans le ciel. Je caresse doucement tes doigts, naturellement sans en avoir réellement conscience. Ta mains saisit la mienne et ne la lâche pas.

Ce petit monde à nous est brisé par un éclat de voix qui retentit... Ida nous cherche. Petite moue ennuyée et soupir. Nous nous relevons pour la rejoindre.


En fait ce n'est pas une catastrophe telle que nous le craignons. Elle nous cherche, c'est l'heure du bain. C'est vrai qu'après l'équitation, cela s'impose un peu. Nous nous retrouvons dans notre chambre après nos ablutions. Je suis en train de m'énerver avec un peigne pour démêler mes cheveux quand tu reviens. Trop occupée à pester contre les dents du peigne je ne t'ai pas entendu et sursaute légèrement quand tes mains se posent sur les miennes, me reprennent mon instrument de torture et que tu me souris avant de me coiffer avec délicatesse.



Aymeric_de_saunhac



La journée touche à sa fin, encore quelques instants de liberté à partager ensemble et il faudra rentrer. Ida a certainement eu le temps de rapporter notre manquement à la consigne. Résultat, papa et maman vont être en colère. Espérons qu’ils ne trouveront pas pire punition. Enfin… Que peuvent-ils faire de plus que ce qu’ils font déjà. Nous ne passons presque plus aucune journée ensemble. Quant aux nuits… elles ne seront désormais plus entières.
Perdu dans ses tristes pensées, je sens tes frôlements, tes caresses sur mes doigts. Par réflexe je saisis ta main et la garde précieusement…

Un cri nous fait sursauter et nous ramène brusquement à la réalité, Ida nous appelle. Je te regarde le visage assombri. Je me lève lentement en gardant ta main pour t’aider ensuite et surtout, par ce que je refuse de perdre ce contact devenu si rare ces derniers jours. Debout, je t’attire dans mes bras, il nous faut du courage à tous les deux pour affronter ce qui ne manquera pas d’arriver.

Un second cri nous force à presser un peu notre retour vers la demeure, je t’embrasse sur la joue et nous voilà partis en courant. Ida nous attend de pied ferme devant la porte. À peine arrivés, elle nous prévient qu’un bain a été préparé pour notre toilette, la plus jeune des servantes s’en occupera pendant qu’elle-même dressera la table pour nous deux. L’idée de la toilette nous fait perdre raison et nous n’écoutons qu’à peine la suite.
La jeune servante nous sourit puis s’éloigne sans regarder si nous la suivons. Elle n’en a pas besoin, nous connaissant elle sait que nous sommes sur ses talons.
La toilette est encore une activité que ne faisons à deux. Heureusement pour nous, personne n’a encore eu l’idée de la remettre en cause. Nous devons probablement ceci au fait qu’elle n’est pas régulière et surtout, à l’effort qu’elle demande au personnel. Préparer le baquet de bois, le napper d’un drap, faire chauffer de l’eau pour le remplir puis préparer d’autres seaux d’eau pour le rinçage nécessite beaucoup de travail, il est certainement plus pratique pour tout le monde que tout soit fait en une seule fois.
En soit, ce n’est pas une activité très intéressante, seulement, elle est parfois nécessaire. Nous nous chargeons toutefois de rendre la chose amusante et même très agréable, du moins pour nous… Quoi que la jeune servante ne s’en est jamais plainte non plus jusqu’à présent. Généralement ses rires se mêlent aux nôtres lorsque nous l’aspergeons à son tour.

Le bain a été préparé dans notre chambre comme d’habitude. Des draps jonchent et protègent le sol en prévision des éclaboussures qu’il y aura à coup sûr.
Devant le baquet fumant, nous gesticulons pressés d’y entrer ou plutôt, de nous y jeter. La jeune servante nous aide tant bien que mal à enlever nos habits malgré notre impatience qui ne fait que rendre la chose plus délicate.
Le dernier lacet dénoué, mes braies tombent. Je me débarrasse du reste en m’emmêlant les bras avec les manches étroites. Excité, je me débats sans grand résultat. La servante termine de te dévêtir et vient à mon secours.
Enfin délivré, je t’aperçois déjà installé dans l’eau un grand sourire aux lèvres l’air de me dire que tu as gagné. Je rentre rapidement et m’installe en face de toi pendant que la jeune servante apporte le matériel fraichement acheté chez le savonnier.
Arrivant à nos cotés, elle nous demande de mouiller nos cheveux avant d’y appliquer le savon. Pour cela, elle n’avait pas besoin de le répéter, je t’envois aussitôt une bonne quantité d’eau avec mes mains. Vraisemblablement, le réflexe a été le même pour toi car aussitôt l’eau envoyée, j’en reçois tout autant sur la tête. La servante prend un air faussement fâché en nous demandant de rester calme au moins le temps que l’on soit propre sans quoi, il n’y aura plus assez d’eau avant qu’elle n’ait eu le temps de nous savonnés. Ainsi, la bataille acharnée se termine aussi vite qu’elle a commencé.
Alors qu’elle s’apprête à te savonner les cheveux, je l’implore de me laisser faire. Il n’en faut guère plus pour que tes supplices se joignent aux miens. Résignée, la servante nous laisse le savon en nous demandant d'en prendre soin.

Me rapprochant de toi, je commence à masser lentement tes cheveux en y appliquant un peu de savon.
La servante nous observe souriante, non sans nous signaler que lorsque c’est elle qui savonne nous ne cessons de bouger.
Une fois les cheveux bien savonner, je poursuis en te frottant délicatement le cou ainsi que les épaules et le haut du dos sans oublier de t’en mettre sur le nez et de t’embrasser sur la joue, pendant que les yeux clos tu tentes de te débarbouiller.
Tu te rinces les yeux et je me retourne afin que tu puisses à ton tour me savonner. Je sens tes mains passer à travers mes cheveux, tes doigts me masser la tête, un frisson me parcours. Tes mains descendent le long de ma nuque pour finir sur mes épaules. Bien sûr, tu n’oublie pas de te venger en me barbouillant la figure de savon.
Là, s’achève notre toilette commune. Chacun de notre coté nous nous levons et terminons de nous savonner comme il se doit avant que la servante apporte deux seaux remplis d’eau tiède pour nous rincer. Une fois cela fait, nous recommençons à nous taquiner en nous envoyant de l’eau à la figure ainsi qu’en nous chatouillant. La jeune servante nous regarde amusée jusqu’à ce que l’on frappe à la porte. Ida levant les yeux au plafond en voyant le carnage entre dans la chambre les bras chargés de plateaux repas.

L’arrivée d’Ida met fin brutalement à notre bain et surtout à notre petit jeu. Alors que la jeune servante nous apporte de quoi nous sécher et nous habiller pour la nuit, Ida dresse notre petite table de chambre et y dispose nos repas en nous expliquant que comme ce matin et ce midi, il nous faudra manger seuls.
Un sourire illumine un instant nos visages, une chose est sûre, nous n’aurons pas de nouvelle discussion avec papa et maman ce soir.
Enroulé dans mon drap de bain, je m’approche de toi pour te sécher les cheveux. Je frotte vigoureusement et regarde le résultat ravi, des cheveux ébouriffés comme je les aime, une vraie petite sauvage. Nous nous essuyons ensuite mutuellement le reste du corps, puis enfilons nos vêtements de nuit.
Ida et la jeune servante nous laissent seuls le temps du repas. Je me redresse fièrement comme papa me l’a montré puis t’offre mon bras pour t’accompagner jusqu’à notre table en tentant de retenir un rire. Je n’oublie pas de disposer convenablement la chaise pour que tu t’y asseyes puis rejoins à mon tour ma place à coté de toi. Heureux, nous dînons en silence(…)

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--Eliandre_de_saunhac





Nous avons diné en faisant comme si nous étions grands, enfin disons que nous avons tenté d’imiter leur manière. Un jour nous devrons nous y plier, de bonne ou mauvaise grâce, mais pour l’instant c’est toujours un jeu pour nous.

Pas encore l’heure de nous coucher. Nous avons encore un peu de temps avant que l’heure redoutée n’arrive. Alors nous nous installons sur mon lit, côte à côte. Toi tu étales ce qu’il faut pour écrire, moi je m’occupe les mains plutôt que je ne me concentre sérieusement sur un quelconque ouvrage de broderie sans intérêt. Ainsi installés, nous discutons à voix basse.

Nous savons qu’ils vont recommencer, tout comme il est évident qu’il nous faut trouver une ruse pour échapper à leur plan si raisonné, si incompréhensible pour nous. Nous sommes peut-être jeunes, mais il est des choses que l’on comprend tout de même. Il nous faut de la patience, et de l’ingéniosité. Faire des esclandres parce qu’on ne nous couche pas ensemble, nous l’avons instinctivement compris, cela ne nous mènera à rien. C’est pour cela que la veille nous n’avons pas résisté. Seulement Ida nous a surpris ce matin, nous savons qu’il ne faut pas que cela se reproduise, pas trop en tout cas ..

Mais comment faire alors ? L’idée de réellement ne pas dormir ensemble ne nous effleure pas même l’esprit, c’est quelque chose d’autre que nous cherchons. Quand nous dormons ensemble, il faut que nous puissions regagner nos lits avant qu’Ida vienne nous chercher… Là réside un problème.. elle est toujours levée aux aurores alors que seuls les oiseaux sont déjà debout…

Les oiseaux.. si seulement eux pouvaient nous prévenir.. idée qui germe dans nos petites cervelles. Et si nous demandions des oiseaux ? Nous sommes encore assez petits pour que cela passe pour un caprice… Les grands ne se doutent sans doute pas de ce que leur idée est en train de faire.. Nous changeons, nous allons apprendre à user de ruse.. nous sommes bien trop conscients que ce que nous ourdissons ne peut nous engendrer que soucis mais pourtant nous ne pouvons faire autrement. L’acceptation et la soumission à ce projet, nous la rejetons en bloc.

Certains ont des oiseaux en cage, nous allons en demander aussi, au pire, on peut toujours prendre des moineaux. C'est petit et pourtant ça fait du bruit, et puis on en voit toujours vers, si ce n'est dans le pigeonnier de la maisonnée. Nous ne sommes pas mécontents de notre idée. Mais cela ne règle pas notre souci pour autant. Il faudra aussi que la cage soit dans notre chambre, pour que le pépiement des volatiles nous réveillent assez tôt. Enfin un peu plus ou un peu moins de chose dans notre chambre ne devrait pas être un si grand obstacle. Nous pourrons dire que nous nous occuperons de la cage, après tout on nous apprend bien à nous occuper de chevaux, donc on peut étendre cela aux animaux.. peut-être.

Reste l'autre idée qui m'a trotté dans la tête pendant la leçon. On apprend à écrire, j'aime, mais pourquoi apprend-on cela .. si on ne s'en sert pas? On peut envoyer des lettres.. mais à qui? quelqu'un de la famille déjà ... peut-être elle, cette tante qui vit en Toulouse. Nous l'avons peu vue, il faut dire que les souvenirs de nourrissons ne comptent pas vraiment, mais peut-être .. Il faudrait voir si on essaie de lui remettre une missive. Ou peut-être lui parler.. elle a des terres en Languedoc il parait. Nous décidons de voir ce qui se passera si on lui écrit pour commencer. Pas le temps de creuser plus avant ce projet... il est l'heure, Ida vient nous coucher. Cela se voit que nous ne sommes pas heureux. Nous sommes bien trop silencieux, renfrognés, mais on obéit bien qu'Ida ne soit sûrement pas dupe de notre feinte soumission.

Cela ne rate pas, elle recommence ses rondes. Et nous nous subissons les longues heures, minutes, secondes qui s'écoulent avec une lenteur exacerbée. Nous chuchotons à voix basse tout en nous concentrant pour entendre les si caractéristiques bruits de pas annonciateurs d'un nième contrôle ida-esque. Nous sommes parfois emportés par de mauvais rêves, toujours réveillés avec cet étau glacé sur le cœur en constatant l'absence de l'autre. Enfin les rondes cessent, en tout cas cela fait un moment que l'on attend patiemment, mais même Ida doit dormir quelque quand.

C'est toi qui me rejoint cette fois. Nous essayons de parler, tout doucement, protégé par un cocon de couverture. Mais à peine avons-nous décidé de ce qu'il nous faudrait prendre le lendemain pour exécuter notre projet, nous sombrons dans les bras l'un de l'autre, bercés dans les bras de Morphée qui cette fois éloigne les mauvais rêves, à moins que ça ne soit ta présence qui les empêche d'avoir prise sur moi.




Aymeric_de_saunhac





À peine t'avais-je rejoint que nous nous étions déjà endormis dans les bras l'un de l'autre. La nuit ne dura que quelques instants, il faut dire que les gens de la maison s'étaient couchés tard, nous obligeant à attendre davantage pour nous retrouver.

Dans mon rêve, nous étions ensemble, en fait, c'est le cas dans tous mes rêves. Nous étions tous deux sur nos poneys et faisions la course, moi te poursuivant. Tu te retournais alors pour voir quelle distance nous séparait. Surprise, j'étais juste derrière toi te souriant, tu te mettais à rire et talonnait un peu plus ta monture.

La course semblait ne jamais s'arrêter, nous n'étions pas fatigués et nos poneys non plus. Au loin, commençaient à se dessiner deux silhouettes. Nous nous rapprochions à vive allure. Sans ralentir, nous croisions Maurin et Ida qui à force de grands cris nous priaient de nous arrêter. Qu’importe, nous nous engagions sur l’aller menant à la demeure poursuivies par les deux servants. Les voir ainsi nous poursuivre tant bien que mal nous amusait beaucoup. Sans nous retourner, nous pouvions entendre Ida affublée de ses lourds sabots piétiner le sol.

IDA ! Je me réveille en sursaut entendant les pas d’Ida dans le couloir. Je me glisse hors de la couche t’embrasse sur la joue sans prêter attention au fait que tu sois sorties ou non de tes songes puis rejoint ma couche en hâte afin de me rouler dans les draps encore bien trop soignés pour que quelqu’un y ai passé une nuit complète.

Installé, j’entends la porte s’ouvrir. Il s’en est fallu de peu, il est certain que cette fois-ci nous aurions eu le droit à un sermon. Ida ouvre les rideaux et nous demande de nous lever. Je force un étirement devenu inutile avec cette petite course matinale et observe les yeux mis clos Ida qui nous regarde l’un et l’autre. Si elle se doute de quelque chose, elle ne fait en tout cas aucune remarque. Une chose est sûre, nous pouvons bénir mon teint qui ne rougi même après effort.

Aucune remarque de la part d’Ida, nos regards se croisent, un air amusé illumine ton visage. Visiblement les pas d’Ida t’avaient également réveillé, à moins que se soit mon empressement à rejoindre ma couche. Je te souris et te fais un clin d’œil discret. Pour cette fois, nous l’avons échappé de justesse mais il nous faudra mettre nos plans à exécutions au plus vite. Je doute que nous ayons autant de chance si cela devait se renouveler ainsi.

Après le petit déjeuné, Maurin m’accompagne dans la cours pendant qu’Ida te conduit à tes leçons. Mon Maistre d’arme est déjà là, détaillant l’état de son matériel. Trop occupé à examiner la lame effilée d’une de ses épées, il ne m’entend arriver. Maurin agacé d’attendre que l’homme prête attention à ceux qui l’entourent tente un raclement de gorge qui me fait tout autant sursauter sinon plus que le Maistre d’arme. Maurin gêné bredouille quelques excuses et retourne à ses occupations sans demander son reste.

- Jeune Aymeric, vous voici ! Pardonnez mon… inattention. Je m’assurais que le forgeron avait bien fait son affaire afin de rendre ces quelques armes non tranchantes. Un accident serait regrettable.
- Adissiats Maistre, quelle arme va-t-on utiliser aujourd’hui ?
- Il m’a semblé qu’un peu d’exercice à l’épée ferait le plus grand bien. Ho, je sais qu’elles sont lourdes pour un jeune garçon, c’est pourquoi j’en ai fait préparer une tout spécialement. Elle vous permettra de faire quelques exercices et de vous habituer au maniement de cette arme en attendant d’être en âge et assez fort pour en porter et en brandir une plus… conventionnelle. Nous n’avons jamais vu de chevalier ne sachant pas manier épée n’est ce pas. Vous savez donc ce qu’il vous reste à faire.

La journée ne pouvait plus mal commencer. Après un réveil précipité, voila que je devais subir l’arme tant redoutée. Celle qui pèse si lourd sur les épaules et rend les mouvements difficiles. Mon Maistre le sait, je ne l’apprécie guère et l’évite autant que je le peux. C’est certainement pour cela d’ailleurs qu’il ne me laisse plus le choix de l’arme d’entrainement depuis quelques temps.

La rapière est déjà plus agréable. Sa légèreté la rend plus maniable. Seulement, elle n’est que peut utilisée par chez nous. Mon Maistre n'en connait la pratique que par ce qu’il vient du Sud, par-delà les montagnes et frontières du Languedoc, là où l’arme a vu le jour selon lui.

La matinée se promet d’être longue. Des parades qui feront vibrer tous mes membres, des coups de plat d’épée sur la tête, des chutes qui me feront mordre la poussière… Enfin, le Maistre a su attirer mon attention en me rappelant ce que doit faire un chevalier. Je te l’ai promis petite sœur, je serai un jour ton chevalier pour te protéger.

Les heures passent, les égratignures se multiplient tout comme les bosses sur ma tête mais je tiens bon. Il n’est pas question que le Maistre me pense faible. Tout ce temps, je n’ai qu’une idée en tête, te rejoindre. Je m’accroche à cette idée et frappe de toutes mes forces sans prêter attention aux vibrations douloureuses qui parcourent mes bras à chaque nouveau coup. Le Maistre surpris recule subitement et effectue une parade pour que je m’arrête. Quelques instants, il me m’observe, nos regards se croisent. Il repousse mon fer puis se recule. Sans me regarder, il m’annonce que la leçon est terminée pour aujourd’hui. Je lui rends l’arme le salue et me dirige vers la demeure où j’espère te retrouver, lorsque dans mon élan le Maistre m’interpelle.

- Aymeric ! Vous avez fait de gros progrès aujourd’hui… J’espère que vous continuerez ainsi…
- Merci Maistre, je ferai de mon mieux.

Reprenant ma route, je presse le pas pour te rejoindre au plus vite. Malheureusement, à peine le perron franchit, je croise Maurin qui m’informe que tes leçons ne sont pas encore terminées. Râlant pour moi-même, je retourne dans la cours et observe en vain chaque fenêtre quelque fois que je puisse te trouver. Décidément, cette journée ne me plait que peu. J’envoie valser une pierre sur mon passage qui va se nicher au milieu de quelques fleurs fraichement écloses. Des fleurs! une idée me passe par la tête. Je me baisse et cueille toutes les fleurs rouges et blanches que je peux trouver. Un petit bouquet en main, je décide de regagner notre chambre. Passant par les cuisines, je rencontre une jeune servante qui me salue et observe mon bouquet avec insistance.

- Ce sont des fleurs... pour Eliandre.
- Ho ! C’est adorable ça mais… Ne crois tu pas que mélanger les couleurs auraient pu être une bonne idée ?
- (regardant mon bouquet rouge et blanc, puis désignant mes armoiries sur mon pourpoint) Ce sont mes couleurs, je suppose qu’elle ne pourra penser qu’à moi en les voyants non ?
- (me regardant un sourire forcé aux lèvres) Pour sûr elle ne pensera qu’à vous, ces couleurs… vous correspondent parfaitement…

Ravi, j’adresse un grand sourire à la servante qui bien qu’au fond d’elle, se disait que ces couleurs ne me correspondaient que trop, préférait ne pas m’expliquer ce qu’elle avait voulu entendre par là, pensant que j’en souffrirai bien assez tôt. Je poursuis ainsi ma route la laissant dans ses pensées qui n’étaient en fait qu’inquiétudes à mon égard.

Alors que je m’apprête à monter à l’étage, la jeune servante me rattrape un petit pot d’eau à la main pour que je puisse y glisser mes fleurs. La remerciant, je grimpe en vitesse avant que tu n’arrives. Entrant dans la chambre, je dispose le bouquet dans son pot sur une petite table à coté de ta couche puis, m’allonge sur la mienne reposant ainsi tous mes membres endoloris par les leçons du matin.


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--Eliandre_de_saunhac








Mes yeux s'ouvrent subitement lorsque d'un coup tu te réveilles et me quittes. Un court instant je ne comprends pas pourquoi tu me fuis ainsi.. Aymeric reste.. et puis le sommeil est bien vite chassé de mon petit esprit et la froide compréhension qui s'en suit achève de m'éveiller. Pourtant je me force à refermer les yeux, Ida arrive. Une nouvelle journée commence... Nous préparer, déjeuner.. et cette fois être séparés. Ce n'est pas des leçons d'écriture pour ce matin, mais celles qui sont "différentes" uniquement parce que tu es garçon et moi fille.


Sans enthousiasme aucun, je me fais conduire vers mon instructrice. On commence par des révérences et des courbettes. Abjects ronds de jambes ... enfin je n'en suis pas encore aussi avancée dans mon jugement sur ces choses que d'aucun dise "nécessaires" mais mon sentiment les concernant est tout sauf bon. S'en suit une ennuyeuse lecture sur la façon de tenir une maisonnée... comment juger le travail des domestiques, ce à qui il faut faire attention. Régulièrement regarder l'état des stocks de provisions de la demeure. C'est très important quand l'automne arrive .. là mon attention dérive vers l'extérieur et son radieux printemps. Je n'ai que faire de l'automne pour l'instant. C'est le printemps là alors pourquoi me parle-t-on de provisions...

Un léger coup de règle sur le haut du crâne me fait sortir de mes pensées. Morose, je regarde l'instructrice qui me toise avec un air clairement désapprobateur. Soupir...

Cette matinée semble interminable ...elle dure, dure.. et se termine en apothéose. Je me retrouve avec un stupide ouvrage de broderie à faire. Innocemment j'avais pensé que je pourrai le ramener dans notre chambre pour le faire à tes côtés, mais la sentence était tombée avant même que je ne puisse exprimer cette pensée.



" Vous ne quitterez pas la salle avant d'avoir terminer le bord de votre ouvrage jeune fille"


Baisser la tête. Cela ne sert à rien d'exposer mon mécontentement alors que tout dans mon attitude le crie déjà. Se concentrer sur le fil, l'aiguille, le bout de tissu tendu entre ce fichu cadre. Je progresse doucement, laborieusement. Mon doigt trouve l'aiguille, à moins que ça ne soit le contraire et une goutte de sang fleurit à son bout, tachant le blanc tissu que je dois travailler... Rouge sur blanc.. soupir en pensant à toi.

Un instant je regarde dehors, le soleil qui déjà a bien monté dans le ciel. Haut, trop haut. Encore combien de temps vais-je rester ici, à m'escrimer sur cet odieuse broderie? J'essaie vainement de libérer mon esprit tandis que mes mains elles s'occupent de ce déprimant ouvrage. L'instructrice ne cesse de répéter que c'est une activité qui permet de penser librement tout en s'occupant à quelque chose.. d'agréable, selon le point de vue.

Piquer l'aiguille dans un sens, puis dans l'autre, former des points en forme de minuscules croix, recommencer... c'est long... et inintéressant au possible...

Rien il n'y a rien qui puisse rendre cela supportable, rien ! .. sauf toi. Si je le fais pour toi.


Ma frustration vis à vis de cette jusque là idiote tâche s'effrite. L'aiguille n'est plus un objet de torture subtil, mais se mue en complice me permettant de faire quelque chose pour toi. Comme il est plus simple ainsi de me concentrer sur ce que je dois faire, d'y faire attention, je veux que ça soit parfait, sans défaut ou accrocs. Toute absorbée que je suis, je ne remarque pas la surprise pourtant bien visible sur le visage de celle qui me garde. Celle-ci semble ne pas comprendre ce qui se passe ni pourquoi j'ai si soudainement changé d'attitude, pourquoi au lieu d'être comme d'habitude renfrognée je suis maintenant concentrée. Étrangement, le cours du temps se fait ainsi bien moins sentir, enfin je termine la bordure de ce que je vais t'offrir. Je regarde le tout d'un œil critique, je suis bien loin d'avoir fini, mais cela viendra. On me libère et je cours vers notre chambre.


J'ouvre la porte à la volée.. et tu es là, étendu sur ton lit. Je me dirige vers toi quand quelque chose m'arrête. Je reste un instant interdite en regardant les fleurs vers mon lit. Mes yeux passent du petit vase à toi au petit vase... Si j'avais pu avoir des doutes quant à la provenance de ce bouquet, le sourire sur ton visage les effacent avant même qu'ils ne puissent se former. Arrivée près de toi je passe mes bras autour de ton cou et t'embrasse doucement sur la joue, te chuchotant un "merci petit frère" à l'oreille ensuite. Je m'installe à tes côtés et nous restons un moment ainsi, main dans la main, sans rien dire. Puis à voix basse je te fais part de cette idée que j'ai eu hier pendant la leçon d'écriture. On apprend à manier la plume, donc on peut... communiquer, parler avec d'autres personnes... on pourrait peut-être se servir de cela... mais comment exactement, cela nous échappe encore. Et puis à qui envoyer une lettre? Nous réfléchissons... peut-être à tante Vanyel. Enfin on ne peut pas exposer ainsi ce qui nous tracasse à une inconnue.. de la famille certes mais on ne peut pas dire que nous la connaissions vraiment, pourtant aucune autre idée ne nous vient. C'est toi qui trouve un sujet que nous pouvons aborder. Elle a des terres en Languedoc, et bientôt il y aura les allégeances, nous le savons, on peut lui demander si elle viendra nous rendre visite, peut-être. A peine nous sommes nous mis d'accord et réjouis de cela qu'on nous apporte notre collation de mi-journée.


Après avoir mangé plutôt silencieusement, occupés à bien pouvoir nous demander comment nous pourrions écrire, nous rassemblons ce qui nous semble nécessaire à notre projet. Tandis que tu prends plumes et feuilles, je cherche de l'encre et une planche fine pour support, puis nous allons dehors, profiter du printemps et surtout partir avant que quelqu'un ne prévoit quelque activité pour nous alors que notre après-midi est encore libre. Dehors dans les jardins de la demeures, nous prenons place sous un arbre, l'un près de l'autre...




--Eliandre_de_saunhac





Nous avons tranquillement pris place dehors. Le temps est agréable, le vert du printemps lumineux sur le feuillage des arbres. L'air est doux et le ciel azuré sans nuage. Cadre presque idylique... et restons perplexes devant les feuilles blanches que nous avons apportées avec nous. Écrire, oui c'était l'idée. Mais en pratique, finalement ça ne semblait pas du tout simple. D'abord il fallait commencer par les noms, c'était quand même le plus évident "d'Eliandre et Aymeric de Saunhac, à Vanyel de Saunhac".. première rature. Tante Vanyel, est une Prume, comme maman, on le sait pourtant... Forts de cette première leçon, nous décidons de faire un brouillon, ce qui est quand même bien plus raisonnable.


C'est moi qui écris, et nous qui sommes plongés dans une intense réflexion. Déjà, nous décidons de simplement l'appeler "tante Vanyel", parce que nous ne sommes plus sûrs des titres, qui nous sont trop peu familiers. Nul doute que notre précepteur nous aurait fait une remarque comme quoi c'est un de nos devoirs de connaitre les nobles et leur titre, à plus forte raison quand ils sont de la famille... on fera plus attention une prochaine fois, c'est certain.


Un feuillet avec les deux premières lignes de correctes, les noms en somme, le poser à côté avec un petit caillou dessus pour éviter qu'il ne s'échappe, et se concentrer sur l'ébauche. "bonjorn tante Vanyel" .. mais après ? il existe une formule d'usage pour demander simplement comment on va ? s'il y en a une compliquée, nous ne la connaissons pas.. alors autant faire simple.
La suite.. que lui raconter d'autre? Nous vivons maintenant à Montpellier. Et que nous avons nombre de leçons... Et est-ce qu'elle connait Lakhdar, Madja ou Liloie?
Et ensuite.. lui parler des allégeances prochaines, et lui demander si elle y serait? Si oui, peut-être qu'ils pourraient se voir.


Ca semblait ridiculement peu finalement ce qu’on pouvait lui dire. Mais rien de plus ne nous vint à l’esprit, et il fallait déjà coucher cela proprement sur le papier.
La feuille d’essai est barbouillée de tâches d’encre, de ratures. Il me faut m’appliquer pour la vraie lettre. Ne pas faire goutter l’encre, ne pas laisser la plume trop longtemps au même endroit pour que le papier n’absorbe pas plus de liquide coloré qu’il ne faut, le tout en prenant garde à bien former mes lettres, en soignant leur courbe…
Je fais de mon mieux pour m’appliquer, m’immerger dans l’écriture.. pourtant le premier essai n’est pas convaincant, il nous faut bien nous l’avouer. Recommencer… ma main glisse…


Je regarde le tout avec un air frustré, un peu rageur et dégoûté. Pourtant ce n’est pas si dur d’écrire, enfin d’habitude on a un modèle sous les yeux, alors c’est plus facile de visualiser l’enchaînement de lettres. Là c’est comme s’il fallait que je l’invente pour essayer de faire en sorte que le tout soit harmonieux…
Ta main se pose sur ma joue et détourne ma tête des feuillets. Ton front vient doucement contre le mien tandis que mon regard plonge dans tes yeux rouges si particuliers. Tu as bien senti que je m’énervais et tu m’apaises à ta façon, comme toi seul peut le faire. Tu ne me relâches que lorsqu’un petit sourire naît enfin sur mes lèvres. Rassérénée, je me remets à écrire.. enfin la lettre est finie !
Si nous avons déjà vu des sceaux pour clore une missive, nous n’en possédons pas, pas encore en tout cas. Alors c’est un ruban que nous utilisons.



Après avoir repris nos affaires, nous nous dirigeons vers le pigeonnier dans lequel les pigeons sont bien évidemment rangés par ordre alphabétique. Ainsi nous prenons celui désigné pour se rendre chez tante Vanyel, lui attachons la lettre et le relâchons, en priant pour qu’il ne se perde pas en chemin, ni qu’il ne perde notre lettre d’ailleurs.
Le tout est envoyé, il n’y a plus rien que nous puissions faire d’autre qu’attendre de ce côté là maintenant.
Reste l’idée des oiseaux…



Aymeric_de_saunhac




Tu écris pendant que je te parle, parfois de ce que l’on peut mettre dans la lettre, bien souvent, de tout autre chose, tout ce qui me passe par la tête que je ne peux partager qu’avec toi.

Tu te fâches après papier et plume, tu semblais pourtant si bien partie. Je me rapproche tente de te divertir de mon regard flamboyant qui en incommode semble t-il plus d’un. Pas même tu ne scilles, un léger sourire se dessine sur tes lèvres. Il n’y a que toi pour soutenir ainsi mon regard. Un bref instant où nous échangeons en silence nos pensés, nos doutes, nos sentiments et te voila repartie.

Je te regarde concentrée, suis ta main avec attention alors que tu prends soin de tracer chaque boucle, chaque accroche. Le résultat, je le trouve très bon. Une chose est sûre, je n’aurais fait mieux. Je me relève d’un bond prêt à m’élancer vers le pigeonnier. Bien sûr, je ne pars sans toi et prends le temps de te tendre la main pour t’aider à te relever puis de te glisser un furtif baiser sur la joue.

Nous regardons le pigeon s’envoler. Arrivera t-il jusque chez notre tante, parviendra t-il à délivrer le précieux message sans le perdre(…) Autant de question que l’on préfère éviter de se poser.

En observant cet oiseau prendre son envol, nous repensons à notre discussion de la veille au soir. Nous nous regardons et cherchons à qui nous pourrions demander. Ida, il en est hors de question, elle s’empressera de citer tous les inconvénients qu’elle aura en tête pensant probablement qu’une nouvelle tâche, celle de s’occuper des oiseaux, lui serait assignée. Maurin, nous doutons qu’il apprécie les petits oisillons, lui qui ronchonne toujours à l’idée de se rendre au pigeonnier. Quant au cuisinier, il se demandera pourquoi nous voulons des oiseaux en cage plutôt que dans notre assiette, plus habituer à les déplumer et les faire mijoter, il est peu probable qu’il les attrape vivant.

Toute en réfléchissant, nous marchons cote à cote vers la demeure lorsque nous voyons la jeune servante, celle qui nous fait prendre notre bain, donner quelques miettes de vieux pains aux petits moineaux qui s’empressent de venir picorer jusque dans sa main. Je te regarde avec un grand sourire, voilà la personne que nous cherchions. Nous nous approchons doucement puis gardons une certaine distance pour ne pas effrayer les petites bêtes volantes. La jeune servante nous ayant entendu, lève les yeux vers nous puis nous fait signe d’approcher davantage. Les oiseaux s’envolent mais ne s’éloignent que de quelques mètres, bien trop intéressés par la nourriture à portée de leurs becs.

- Vous voulez essayer de leur donner à manger ?
- On peut vraiment ?
- Mais bien sûr ! (répond-elle amusée) Prenez quelques miettes de pains. Lancez en quelques une puis garder le reste dans votre main ouverte. Si vous ne faites pas de mouvements brusques ils viendront jusqu’à vous.

Au bout de quelques instants, un petit oiseau ose s’approcher de ta main. Quant à moi, aucun ne vient. Tant pis, je t’observe tout souriant, heureux de voir que cela ai marché avec toi. Tu es sans doute plus patiente que moi.

Le petit oiseau tente de te prendre une miette en donnant un petit coup de bec. Surprise, tu bondies lâchant tout ce que tu avais dans la main. Nous rions tous les trois en cœur…

Reprenant un peu notre sérieux et repensant à notre mission, je m’adresse à la servante :

- Nous aimerions beaucoup avoir de petits oiseaux dans notre chambre! Ils sont… amusants puis… jolis!

Bien que mes justifications soient pour le moins hésitantes, la jeune servante ne semble pas y prêter attention et parait même heureuse de nous découvrir un intérêt commun. Si elle savait en quoi de petits oiseaux pouvaient nous sembler si intéressant elle ne serait aucunement ravie.

- C’est une très bonne idée ça! Je pourrai vous en attraper si vous voulez! Tenez, regardez celui-ci comme il est mignon! (nous montrant un petit oisillon au ventre orangé) Puis il y a de vieilles cages à la réserve. Sans doute ont-elles servi pour transporter de jeunes pigeons. Elles seront parfaites pour vous faire une petite volière.

D’une même voix nous la remercions en sautillant sur place. Seulement, il ne fallait pas crier victoire si vite. Il nous fallait des oiseaux rapidement, en fait, d’ici la fin de journée ce qui ne laissait plus beaucoup de temps.

- On pourrait en attraper maintenant s’il-te-plaitttttttttttttttttttt?

La jeune servante ne pue s’empêcher de rire en nous voyant la supplier ainsi.

- Et bien je suppose que oui, mais il faudrait préparer l’une des cages, la nettoyer (…)

S’il n’y avait que cela pour pouvoir passer nos nuits ensemble sans risquer de se faire prendre, nous étions prêts à le faire immédiatement. Sans lui laisser le temps de terminer sa phrase :

- Nous pouvons nous occuper de la cage! Alors que les oiseaux ils s’enfuiront si nous essayons de les prendre.
- Très bien, allons voir ce qu’il y a dans la réserve. Vous choisirez celle qui vous plaira pour votre chambre puis nous en prendrons une autre pour que je puisse attraper et y déposer les petits oiseaux en attendant que vous finissiez de préparer la votre.

Nous choisissons notre cage avec grand soin, plus elle sera propre, moins nous aurons de travail pour la nettoyer. La servante s’empare quant à elle de la première en vue puis nous laisse à notre choix.

Après avoir tout remué, dérangé tout ce qui pouvait être rangé, nous trouvons enfin notre bonheur. Il ne nous manque plus que de l’eau et de quoi frotter, chose que nous nous empressons de faire. Nettoyer un objet c’est amusant, un peu comme lorsque l’on prend notre bain. Il y a de l’eau alors nous pouvons jouer avec, il serait dommage de s’en priver.

Au bout d’un long moment, la servante nous rejoint, la cage remplie de 4 petites oiseaux. Voyant notre état pour le moins trempé, elle nous regarde amusée. Alors qu’elle s’approche, nous lui envoyons toute l’eau que nous pouvons. Visiblement, les oiseaux n’apprécient pas tellement, voyant leur excitation, nous nous calmons aussitôt.

La cage est prête, les oiseaux sont là et le soir arrive, nous poussons un petit soupire de soulagement. Cette nuit, nous pourrons nous endormir ensemble sans risque.


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