Afficher le menu
Information and comments (3)
<<   <   1, 2, 3, 4   >   >>

[RP Fermé] - II . A une Passante.

Della
Vite, tout va vite, trop vite !
Aux côtés de Maud, il faut cacher Béatrice, personne ne doit savoir qu'elle est là, personne ne le sait d'ailleurs qui pourrait les attaquer ainsi.
Assurément, on les prend pour des riches voyageurs mais il est impossible que le voyage de la Reyne ait été connu ! Impossible. Impossible...Oui, c'est ça, ils vont demander les bijoux, les bourses et ils s'en iront.
C'est si facile de prendre ses cauchemars pour la réalité...
Della, tu rêves couchée sur ta Reyne et tu sais que l'attaque ne vise pas tes bagues ou ton bracelet ni même ton escarcelle, tu as la trouille, Della, tu te revois devant l'épée qui t'as ouvert le ventre et tu trembles de peur. Pour peu tu chialerais comme un gosse. Mais tu serres les dents et tu serres le manche de la lame parce que tu ne peux pas faillir, ton honneur ne te le permet pas. Ah, sacré honneur qui te sauveras encore une fois, ou pas !


La porte est ouverte avec violence. Normal, à quoi s'attendre d'autre ?
Alors l'espace d'une seconde, Della reste bouche bée...La Belladona...Non ! Pas elle...ce n'est pas possible ! Elle ne peut pas faire ça, pas après ce qu'il s'est passé, dans cette taverne glauque de Paris, avec la Blanche Colombe !

Non ! Arrêtez ! Allez-vous en...Je...personne ne dira rien...
Est-ce une prière ?
Est-ce une supplique ?
Mais pourtant, la Corleone semble hésiter en la voyant. Lui aurait-elle fait peur ?
Alors Della se lève, tentant dans un mouvement vain de faire fuir la Belladona, dague levée, semblant vouloir frapper.
Si seulement tu savais, Della, que c'est elle qui a failli tuer ton époux, peut-être la rage et la colère seraient-elles encore décuplées. Mais tu ne le sais pas, tu vois juste la menace sur la vie de celle que tu aimes plus que toi et tu te jettes, pauvre proie, dans la gueule de celle que rien ne retient.

Une douleur à la tête, cheveux arrachés et crâne cogné, corps malmené, brutalisé par la femme qui s'acharne à faire sortir la Blonde qui s'agrippe de toutes ses forces tantôt à son adversaire tantôt au carrosse, qui lance dans le vide sans doute des coups de lame avant de la laisser tomber...

Noooooooon ! Ne touche pas à Béatrice, je te tuerai, saleté !
La voix est forte, elle ne tremble pas, la haine fuse dans les paroles crachées, éructées...Saleté...un mot qui résume tout...L'ennemi est une saleté, saleté d'Angevin, saleté de Belladona, saleté...qui ose menacer sa Reyne...

Et dans tout ce fracas, un nom, un deuxième. Ils se balanceront au bout d'une corde, les assassins ! Et Della rira de les voir sursauter, les mains sur la corde qui les étrangle.
Rester en vie...pour les voir mourir.

Mauuuud ! Sauvez la Reyne !
_________________

Baronne de Seignelay - Blason en travaux.
Maud
Mais pourquoi est-elle montée dans ce carrosse?
C'est un piège, une nasse dorée dont les parois la coincent dans ses mouvements.
Ce qui devait les protéger se retourne contre elles.

Elles sont telles des poules face au renard qui se glisse la nuit dans l'enclos. Et voilà la bête sauvage, échevelée . Une furie qui se rue vers Della et l'empoigne comme une vulgaire voleuse.

Elle agrippe la robe de Della, voudrait la retenir. Ses phalanges deviennent blanches à craquer. Maud est musclée mais une rage semble habiter l'intruse et elle doit rester près de la Reyne. Elle lâche Della à regret:


Mordez-la m'dame Della! Mordez cette chienne! Arrachez-lui une oreille.

C'est toute la sauvagerie de Maud qui remonte. Celle des bagarres de villages. la vie rude où on ne combat pas avec l'épée mais avec ses mains, ses dents et ses genoux. Un autre nom est donné: Finn.

Et là, elle comprend que ce ne sont pas de simples brigands.. qu'ils n'en ont pas à leurs écus. Ils sont là pour tuer celle qu'elle défendra jusqu'au bout. Incrédule encore que l'on puisse en vouloir à la Reyne de France.


Mauuuud ! Sauvez la Reyne !

Della par une ouverture.. L'autre côté.. Vite.. L'autre porte.. Prenant la Reyne par la main:

Suivez-moi Majesté.. Collez-vous à moi!

Une issue.. et se retrouve face.. lard ou cochon?
_________________
--L_araignee..




Sourd à tout, sauf cette musique qui résonne à ses oreilles, portée par le vent, et les feuilles, par l’esprit et le souvenir. Sa voix comme une complainte, comme un murmure, de ces chants religieux qui étaient sa passion. Aveugle à tout, sauf ce rai de lumière dans la futaie, crevée naturelle d’entre les arbres, étincelle de vie, la lumière qui guide à la mort qui perce le noir. D’ombre et d’or, Elle est belle qui danse à côté de lui, dans cette robe qui faisait sa fierté parce qu’elle était la dernière.

Camarde lumineuse.

Plus rien ne compte que ses pas guidés par un souvenir, il danse à ses côtés. Elle est belle qui tourbillonne, les chevilles délicatement dévoilées par le velours noir rehaussé de dorures, et lui, avance patiemment à ses côtés, à découvert et qu’importe puisqu’Elle sourit, en coin. Le grand mantel s’écarte d’un mouvement ample, révélant les fioles et aiguilles, les dagues de toute taille, l’une d’elle qu’il sort avec emphase, dans un geste qui La fait tourbillonner. Un sourire, en réponse au sien, un rire comme un grincement pour embrasser le sien qui carillonne quand sonne le glas des gardes royaux.

Camarde étincelante.

La tête qui se joue des coups et des hurlements, passe d’un accord à l’autre, d’un sourire au rire, du rire au fredonnement sifflant, quand le poignard vient s’enfoncer dans le genou dextre d’une monture. Petits pas à droite, petits pas à gauche, la branle des dames qu’Elle esquisse avec grâce, dans un flot de jupons, et de sang équin. Animal déséquilibré, hennissement de douleur qu’on tait dans un mouvement droit qui vient s’enfoncer dans la gorge pour offrir un dernier sourire à l’animal. Saisir son cavalier d’un geste grand, d’un geste beau, comme on prendrait une femme et l’arbalète qui mettrait trop de temps à être rechargée, est utilisée comme arme de poing qui vient s’écraser contre l’arête du nez de l’infortuné garde royal. Plusieurs fois, parce que ce sont les dernières notes et que déjà, Elle repart dans un rire. Dans un cri.. Près du carrosse.

Camarde aux allures d’Italienne.

Qu’il cherche du regard dans ce coche, qu’il observe en silence avant que de remarquer le dernier garde encore en état de se battre, de la tuer. Pas elle. La rage, la haine. Ils ont pris sa raison de vivre, ils ne prendront pas sa folie d’aimer. Cours petit garde ou affronte la Camarde arachnéenne.

_____________
Finn.
Un appel, limpide et sans équivoque. On lâchait son nom aux chiens comme un os à ronger avant de pouvoir l'empaler, lui, l'Irlandais. Peu lui importait puisqu'il envisageait d'y rester. Mourir au champ d'honneur, quelle aubaine. Bien fou celui qui pensait pouvoir réchapper de pareil entreprise. Lui, ne l'était pas suffisamment. Alors il se hâta, pressa la marche chaotique et désarticulée vers le coche. L'Italienne venait d'éventrer le flanc opposé au sien, bataillant avec les occupants l'attention de Sa Majesté. A qui la gardera. L'amour inconditionnel la disputait à la folie vengeresse. Cette femme déchaînait les passions, on ne pouvait le lui soutirer.

La haine pour seule offrande, l'Irlandais progressait vers une mort certaine. La sienne, ou celle de la Reyne, Dieu seul en détenait le secret. A cet instant, la porte s'ouvrit, rejetant deux occupantes visiblement affolées, de l'habitacle. Il ne pouvait rêver meilleure opportunité de mettre fin au carnage. Une ombre vînt pourtant couvrir l'idyllique tableau. La jeune capitaine s'était arrachée à sa captivité et agitait sa lame comme badine à son encontre. Increvable. La jeunesse n'excuse pas tel entêtement. Finn empoigna son large coutelas, vestige de son rocher, et l'employa à écarter la nuisible. Affaiblie par la profonde faille lui creusant l'omoplate, personne n'aurait donné cher de sa peau avant de constater avec quelle rage celle-ci s'échinait à lui barrer la route. Coup après coup, elle revenait sans cesse à la charge. Finn se surprit à se demander s'il existait un être dans ce monde temporel pour lequel il démontrerait pareille ténacité dans le désir de sacrifice. Trêve de rêverie, le temps fuyait à en perdre haleine, il restait tant à faire...

- « Ecarte-toi! », s'impatienta-t-il.

Petit à petit, l'Irlandais revendiquait un peu plus de terrain. Tenait-elle tant que cela à devancer sa Reyne?


- « Tu ne fais que retarder l'inévitable. »

Il s'épuisait, peut-être était-ce là son but. Parant, repoussant les assauts stériles de l'agonisante. Comment tenait-elle encore debout? Elle devrait renoncer et la chute serait d'autant plus douloureuse. Massacrer inutilement ne comptait pas parmi ses ambitions. Tout juste une option regrettable. Il ne désirait qu'une tête, celle-ci plus que tout et il l'aurait. Pressé par les hennissements de cavalerie au loin, l'Irlandais captura le poing armé de sa vis-à-vis et se hissa contre elle afin de désarmer l'acharnée. La fatigue avait englouti ses forces avant les siennes. Le coude osseux du gaélique stoppa toute résistance d'une rude bourrade à la gorge de sa victime. Il fila avant qu'elle ne s'effondre, accaparé par la tâche à venir. Le carrosse à portée de main, Finn s'y engouffra avec l'avidité du miséreux. Le plan avait omis d'intégrer un comité d'accueil armé, l'Italienne s'en mordait déjà les griffes.

Sans sommation, un brusque matraquage lui fit regagner la terre ferme avant qu'il n'ait pu s'y soustraire. Pénétrer l'enclos à brebis n'était pas chose aisée. La femelle aperçue plus tôt voulant filer à l'angloise avec sa Reyne s'apprêtait à réitérer l'attaque depuis la fenêtre du carrosse. La roulade poussiéreuse aboutit sur la javeline dont la capitaine s'était débarrassée. Heureuse trouvaille que voilà. Dès lors, L'Irlandais se releva, tâchant de rester à l'écart des violentes tentatives paysannes de le pourfendre. Le dard se fit dévastateur, perforant l'insipide cocon avec frénésie. Il finirait en miette s'il le fallait. Exalté par la proximité de celle dont il réclamait la mort, Finn s'en donnait à cœur joie, puisant dans les ressources du désespoir afin de transformer ce nid douillet en gruyère funéraire.

_________________
--Sadnezz..


Mais personne ne sortira de ce carrosse, c'est un violent coup de pied asséné à la jeune paysanne braillante qui le lui ordonne. Les mains ont lâché Della, se sont agrippées à l'encadrement du portillon pour faire contrepoids et mettre toute sa verve dans les jambes encore assez tonique pour faire taire celle qui la traite de chienne. C'est un "ferme-la", plus convainquant que toutes les menaces, c'est rouer de coups de pieds les deux femmes pour mieux imposer son courroux. Elle est entrée, comme le loup dans la bergerie, assise face à elles Corleone s'acharne comme les vautours sur une bête qu'ils sentent sur le déclin, les battre comme plâtre, que leur fesses ne se posent plus jamais sur un coussin sans les faire hurler de douleur, qu'elle lâchent leur Reyne et cette emprise qui l'enfièvre. C'est une revanche, pour elle qui n'a posé son cul que sur le bois à écharde et sur les caillasses des routes.

Qu'elles sont stupides, si elles se figurent que leur frêle carcasse peuvent protéger un si grand personnage. Elle est belle, Béatrice. Belle comme le sont les fleurs sauvages, en bouquet que l'on offre aux courtisées... Belles, transcendantes, mais pourtant déjà mortes. Roland sera fière d'elle. La garde de son épée frappe le crane de Della, Sad la pousse dehors avec véhémence. Tout file, à une vitesse terrible, vertigineuse. Elle en a la nausée. Une main vient enserrer le cou de la Majestueuse, et c'est la dague de la Concèze qui vient sournoisement se planter dans la couche d'étoffe précieuses qui fait presque office d'armure. C'est donc ça, tuer une Reyne... ça a un gout particulier, une saveur inédite. Elle ravale sa salive en croisant le regard d'une passante, d'une mourante, tout se passe si vite.

Lorsque la dague félonne revoit la lueur du jour, c'est un flot timide qui s'échappe d'une entaille souillée, carmine. Fontainebleau pleure, comme cette plaie béante qui a soudain plongé le carrosse dans un silence endeuillé. L'instant s'est trouvé suspendu, une poignée infinitésimale de millisecondes, infinie pourtant. Béatrice, que ton nom soit sang-tifié, que ton règne s'achève, que ma volonté soit faite sur la terre comme au ciel. Tu es belle, froide souveraine, toi qui te meurs entre mes doigts impurs, n'as tu jamais été aussi belle qu'à ton dernier soupir? C'est une revanche, des représailles dont les motivations les dépassent tous.

Une violente douleur vient la chasser de ce moment intemporel, la sortir de cette contemplation furtive. Béatrice respire encore.

____________________
Beatritz
Dans ce fracas, le premier à comprendre, le premier à fuir et sauver sa peau, ce fut le chat blanc. Ou peut-être fut-il aidé par la Belladone, et jeté hors, par la peau du cou... Qu'importe, en vérité ? Les faits étaient bien trop rapides, les cris trop forts, le temps de comprendre, insuffisant, la Reine, guérie mais faible encore, son poids et sa vivacité ayant fondu. Sa garde se bat, mais qu'importe ? Béatrice, elle, ne sait pas se battre. Elle n'a pas vu les champs de bataille, elle n'a pas brandi l'épée, elle n'a pas appris les gestes qui sauvent. Pas plus que ceux qui tuent. Elle sait que la vie et la mort, c'est affaire de bougie et de bourrasque, ça s'allume, ça s'éteint, comme ça, d'un claquement de doigts. Elle sait que lorsqu'on voyage en pleine nuit, on s'expose à toutes les surprises, elle l'a vécu, elle a été touchée, et elle a guéri. Elle n'en garde pas de souvenirs... Elle dormait, tant bien que mal, quand tout était arrivée, à cette époque.
Elle a continué à faire confiance à la garde royale. Ils ne voyagent plus que de jour. Ils voyagent incognito. Quel danger plus grand pourrait donc arriver ? Des tire-laines seraient vite mis en déroute par la garde...

La tornade qui s'abattit sur eux, ce jour-là, à Fontainebleau, laissa peu de place à la compréhension, s'il en était besoin d'une. Le coeur de Béatrice ne s'emballa pas comme l'aurait dû celui d'une biche aux abois ; elle ne palpita pas assez vite pour réagir, pour bondir, pour s'abriter. Elle était bercée de Bourgogne, dont Della venait encore de parler. Tornade et stupeur. Elle voit la furie qui méticuleusement tente d'écarter les obstacles qui la séparent de sa proie, elle voit Della lutter, elle sent la main de Maud, le tournis la prend. A quoi bon, à quoi bon, et pourquoi ? Comment ? Tuer un roi, qu'est-ce que cela change ?

Et dans ses voiles et draperies de veuve, elle tâche de suivre Maud hors du carrosse. Peine perdue ! La Belladone sait son art. Avec une savante brusquerie, elle tient Béatrice mieux qu'avec toutes les chaînes ; car sous ses yeux, elle malmène, maltraite, violente ces femmes qui l'entouraient, ces braves, celles qui ont eu l'énergie, celles qui ont lutté. Béatrice sait que la Corleone vient pour elle, et elle ne crie pas. Elle n'a pas lutté, elle n'a rien fait ; mais elle pleurait, elle pleura dès l'instant où elle vit Della subir le retour de sa bravoure, brave comme tant de femmes qui l'avaient entourées ! Le mirage fugace d'une Baile passa devant ses yeux, qu'elle plissa en regardant ces femmes, ces femmes ! Ces amies aux coeurs de lionnes, défendant leur petit, défendant leur protégée, cette Reine faible, tétanisée par la vitesse, l'oppression, par l'étroit carrosse, par la culpabilité. Voilà ce qui l'empêchera de fuir, plus que les voiles de veuve, plus que la poigne de la régicide : elle les voit lutter, et elle n'est capable de rien, elle ne se défend pas elle-même, elle ne sait pas même haranguer leur assaillante, remercier ses protecteurs, supplier Saint Michel, elle ne sait pas même... crier.

La dernière chose qu'elle vit fut la chevelure de Della, au moment où, jetée dehors, sa tête traversa une gloire de lumière baignant la foret.

    « Un éclair... puis la nuit ! - Fugitive beauté
    Dont le regard m'a fait soudainement renaître,
    Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?

    Ailleurs, bien loin d'ici ! trop tard ! jamais peut-être !
    Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
    O toi que j'eusse aimée, O toi qui le savais ! »


La main qui vint serrer son cou scella son destin avant la lame.
Cette main se resserrait puissamment sur des larmes.
Suffoquant sous cette emprise, elle eut le temps d'un raclement de gorge...


-« Vesti te... »

Lorsqu'une lame déchire votre cœur, c'en est vite fini... La devise seule demeure inachevée. Vesti te... Non, Béatrice, non. Il n'y a plus d'honneurs. La seule chose qui te recouvre, c'est le sang, Béatrice. Couvre-toi de sang... Le tien est bleu, n'est-ce pas ? Bleu comme les manteaux de tes feus parents pairs, bleu comme tes yeux, bleu comme ton herbe du Lauragais, bleu comme le ciel qu'on aperçoit tout là haut, et dans lequel ton âme monte, Béatrice. La vois-tu quitter ton corps ? Tout est fini, Béatrice. Ce sera l'or du Soleil ou l'argent de la Lune, mais il n'y aura plus de bleu ni de Bourgogne, ni de Della. Mais tu les verras, tu les verras enfin, Béa. On t'a tant dit que tu leur ressembles, que tu as le nez de l'un, les cheveux et les yeux de l'autre... Qu'importe que tu respires encore, tu sais que c'est fini. Tu ne penses qu'à cela, désormais. C'est peut-être que cette douleur d'être arrachée à la vie n'est pas plus grande que celle soufferte toute une orpheline enfance... Tu les verras enfin, Béatrice.
--.gontran
Le convoi s'est ébranlé depuis de longues minutes maintenant, et le pas chaloupé de l'équidé berce doucereusement notre cher Gontran, encore embrumé d'opium. Sa tête dodeline au rythme du quatre temps nonchalant. Puis, peu à peu alors que la forêt se présente, sombre et envoûtante à l'horizon, l'allure s'accélère, envoyant le Gontran de droite et de gauche quand son fidèle destrier part dans un aérien deux temps sauté.
Ultime réflexe de survie, la dextre se porte au pommeau de la selle, le temps de dégriser un peu et de retrouver son assiette de virtuose chevaleresque. Enfin, le virtuose, c'est uniquement dans la tête de ce cher Gontran, qui ne fait que subir lamentablement le trot inconfortable de son malheureux destrier (bah oui malheureux, faut supporter de se faire casser le dos de la sorte !)

Sous les secousses, les excès nocturnes se font ressentir ... La mousseuse cervoise et sa cousine bière flirtent avec les lèvres pincées du Gontran, qui tente de faire bonne figure aux œillades de ses supérieurs. Sourire légèrement désabusé, sous la noirceur inquisitrice du Capitaine ...
Alors le ,corps de redresse fièrement. "Courage Gontran ! La Germaine est pô loin ! Elle saura te consoler va ..." Le garde reprend de la contenance tandis que l'orée de la forêt est dorénavant pesante. Les arbres se dressent devant eux, autant menaçants que protecteurs ... Paradoxe de la Domaniale Fontainebleau.

L'allure s'est adaptée au terrain rendu glissant par les racines qui affleurent la fine couche d'humus. Gontran lève la tête un instant et plisse les yeux sous la myriade de papillons lumineux, jeu de lumière du soleil dansant avec la parure végétale ... Plus le convoi avance et plus l'ambiance s'assombrit, la forêt devient maître et le soleil s'incline ... Long frisson qui parcourt l'échine du garde sous ce manque de chaleur qu'apporte l'astre rayonnant.
La trogne se secoue légèrement, pas le moment de se comporter en fillette, il a une mission à accomplir, et bien !

Tout à l'air calme, les oiseaux se manifestent joyeusement ... Puis un léger silence à peine perceptible, un sifflement suivi d'un choc sourd. Celui du fer contre le crâne du cocher. Le renâclement des chevaux que la perte de contact des rênes perturbent. Ils avancent encore un peu avant de s'arrêter totalement.
S'enchaine alors un second sifflement et là c'est le bruit sourd d'un corps qui rejoint le sol.
Gontran, le regard affolé, cherche le tireur tandis que devant lui le corps git au sol.

Tout s'enchaine alors très vite. La Panique. Les cris. Les ordres ... Ce qui devait être réglé comme du papier à musique n'est plus que confusion et brouhaha.
Et voilà le Capitaine touché et projeté violemment contre le bois royal du carrosse. Dans la cohue, le Gontran dégaine son épée, non sans mal puisqu'il a bien sûr oublié d'en lustrer la lame et que celle-ci adhère au fourreau de cuir. Il livre alors sa bataille personnelle contre celle qui ce doit d'être sa meilleure alliée.
Enfin, elle daigne céder aux ordres de son Maïtre, et voilà notre Gontran qui brandit furieusement sa lame, beuglant aussi fort qu'il peut :


Sus à l'ennemi !!!!!!!

Eperonnant son cheval, il fonce dans le tas, mais sa course est bien vite ralentie ... Trop vite même. Les six cent kilos de muscles s'affaissent sous lui, tout comme le ferait un château de cartes.
Puis une poigne féroce l'arrache de la carcasse qui manque de l'écraser. Il tourne la tête pour remercier son sauveur, mais aucun mot ne franchira ses lèvres ... Sa dernière vision sera cette arbalète qui vient violemment s'écraser sur son visage. Il frissonne une dernière fois sous le craquement de son nez et la douleur fulgurante que le carreau à bout-touchant provoque en lui transperçant le cerveau.

Les deux billes azurs restent rieuses d'avoir été sauvées d'un douloureux écrasement, tandis que la bouche reste ouverte de stupeur sous le choc. Pas même un gargouillis n'en sortira, tandis que la dernière pensée du Gontran s'envolera vers la germaine. Tout comme la matière grise s'écoule par le trou béant à l'arrière de son crâne, orifice de sortie de la pointe mortelle.
Le corps est alors libéré pour venir rejoindre le linceul de mousse ...
Della
Un coup, plus brutal, plus douloureux que ceux encaissés jusque là, eut raison de la Blonde qui vacilla, perdit l'équilibre, tomba et roula hors du carrosse...Pas vraiment assommée, pas vraiment lucide non plus, la tête qui résonnait, le coeur qui battait trop fort, le pouls qui sifflait aux tempes...Un tourbillon, un trou, un haut-le-coeur...Noir.

Combien de temps resta-t-elle sur le sol, avec cette vague impression de nausée ?
Une minute ? Plus ? Moins ? Comment savoir ?
Lorsqu'elle sortit de sa torpeur, elle passa la main sur son front où s'écoulait un liquide visqueux, son sang...

La rage la ravagea alors, elle se releva, tenta de dompter le vertige qui voulait la remettre à terre, attrapa la dague tombée près d'elle et fonça vers le carrosse d'où venaient des cris, des bruits sourds, le chaos.
Agrippant de toutes ses forces la portière, elle se hissa à l'intérieur et frappa le dos courbé de la Belladona penchée encore sur sa victime, pauvre fatras de soie...
Frappe, Della, frappe ! Une fois...de toute la colère qui explose en toi, de tout l'espoir qui t'anime, de tout ton instinct de survie, frappe ! Sens comme la lame entre avec une facilité entre les côtes, c'en est trop simple, presque injuste, le châtiment est trop doux.
Un violent spasme de plaisir parcourut la Blonde sur le visage de laquelle un rictus s'étira doucement alors qu'elle murmure à la femme :


Crève, saleté ! Mais crève donc !

Les doigts frêles serrés sur le manche de la dague, le souffle court sur des lèvres pincées...Della, la jeune femme bien sous tous rapports, venait de frapper pour tuer et elle en éprouvait du plaisir...
Peu lui importait la vie de la Gitane, sauver sa Reyne était ce qui martelait son cerveau à cet instant.
Sauver Béatrice !


_________________

Baronne de Seignelay - Blason en travaux.
--Hubert_
[Cours petit garde ou affronte la Camarde arachnéenne.]

Discret, le bâillement.
Hubert se fait chier comme un rat mort. Mais le garde n'en montre rien, gardant un visage stoïque, un regard concentré sur le chemin, un regard fier et confiant lorsque celui-ci vient croiser celui de ses frères d'armes.
Il a hâte d'arriver, hâte de se défaire de cet uniforme qu'il exècre, hâte de balancer son arme à terre et de poser sa main sur une cuisse charnue.

Sa fausse concentration fait partir son esprit vers les bordels parisiens, vers la Rose pourpre, vers ses catins sensuelles. Il n'entend pas le premier sifflement d'arbalète, mais il entend les cris qui s'enchainent.

Ça s'affole, ça crie à l'attaque, ça hurle.
Il ne comprend pas vraiment ce qui se passe, ce voyage devait être si paisible, une simple formalité. Le regard perdu se pose sur la forêt alentour, d'où jaillissent les assaillants. Les trois ne font pas dans la dentelle. Déjà des hommes sont au sol, les bêtes sont attaquées, un chat s'enfuie toutes griffes dehors du carrosse de la reine.

Et le jeune Hubert se met à trembler de tous ses membres.
D'abord les mains, sur les rênes.
Le tremblement court sur les bras, les jambes, les lèvres.
Il ne veut pas mourir, pas lui, pas si jeune.
A cet instant, il se contrefout de cette foutue reyne, de son putain de père égoïste, de sa femme moche incapable de lui donner un héritier. Mais héritier de quoi, d'ailleurs. Héritier d'une épée ? Il se promet à l'instant que s'il en sortait vivant, il balancerait tout et irait travailler dans ses champs.

Lui, se contrefout de la royauté, de la loyauté, de la fidélité qu'il a promis. Il ne veut pas crever. Pas là, pas comme un chien.

Tremblant, le jeune garde royal se glisse au bas de son cheval, essayant de détacher sa main des rênes, enroulée comme une traitresse. On fait confiance à son propre corps, et voilà comme il nous trahit.
Il dégaine son arme tout de même, en voit le bout secoué de sursauts.
Une première larme brulante vient couler le long de sa joue.

Telle une prière, un murmure sort de ses lèvres blanches :


Maman maman, ne les laisse pas me tuer
Maman maman ne les laisse pas… me tuer

Enfin il se détache.
Il recule, sent les branches craquer sous son poids. Dans ses braies collantes d'avoir trop cavalé sous le soleil de juillet, les humeurs de son corps apeuré se déversent en grandes vagues incontrôlables.
Le pauvre Hubert se fait dessus de peur, de couardise. La trouille de mourir, d'avoir mal.

Il entend un des gardes hurler. Sus à l'ennemi, sus à l'ennemi… Mais vas-y toi même imbécile, idiot ! Mourir pour défendre, quelle connerie monstrueuse !
Restant sur ses gardes, Hubert recule encore, de quelques pas. Avec un peu de chance, ils ne l'auront pas. Avec un peu de chance…

Mais il croise ce regard. Un regard froid, glaçant.
Pétrifié, il compte sur sa bonne étoile. Il n'est qu'un garde, un minuscule, un insignifiant, un tout petit garde.
Je ne t'apporterai rien, toi qui a jeté ton dévolu sur moi.
Laisse-moi m'enfuir…
--Sadnezz.


ça fait mal. Prise par surprise Corleone accuse le coup. Della, il est trop tard Della! Ta reyne agonise, et moi j'exulte. La blonde, Sadnezz la connaissait assez. Tout d'abord chez son amant, baron d'Arquian à l'époque, le temps du mercenariat simple... Puis plus tard pour le contrat du Von Frayner, Della qui négocie. Oui, l'ainée la connaissait assez... Assez mais point assez pour l'imaginer la planter dans le dos. Elle se cambre l'Italienne, et de surprise et de douleur elle laisse échapper un cri du fond de ses tripes. Comme un cheval qui se rue c'est un réflexe, presque spasmodique qui la fait s'écarter et envoyer un grand coup du plat de l'épée.

Ha Pute! Pour ça elle pourrait la tuer, mais elle la blesse, avec fracas, la longue épée comme un gourdin vient frapper de coté son agresseur en jupon. D'agressivité d'ailleurs il est sujet lorsqu'elle vient se ruer sur elle pour mieux la maitriser. Comme un homme c'est du fin fond de ses entrailles que la mercenaire se défend, ou se venge, c'est une question de point de vue... Cette gourgandine l'a détournée de son méfait, mais soit! Finn s'en occupera, fusse-t-il la mettre en lambeaux pour être sûr qu'elle n'en réchappera pas. Délaissant la Reyne donc, elle assène un coup de poing presque viril à la blonde.

Retourne à ton coma Della! Foutredieu je t'avais dis de t'écarter!

Les mains marbrées viennent enserrer le cou gracile et clair de la victime, et s'y attardent, longtemps... Jusqu'à ce que les lèvres purpurines bleuissent, car le sang Bleu est à l'honneur ce jour! Le sang Bleu alimente ses envies assassines. Non loin, le guet arrive à leur rencontre, mais Belladone ne le sait pas encore. C'est la fin. Et tout s'est passé en un éclair, le temps a filé si vite... Comme dégoutée elle lâche Della, inerte au sol, et ses yeux trahissent la douleur qui lui transperce le dos. L'ampleur de sa blessure lui vient soudain, lorsque ses genoux tentent de supporter son poids, de la redresser, en vain.

Essoufflée, la Belladone cherche l'Arachnide. Où est-il? Que fait-il? Sa tête lui tourne, ses yeux s'embuent. Ce n'est pas de peine, c'est d'effroi. Elle vient de poser les yeux sur un massacre sans nom, là , qui s'est joué au dehors de la voiture Royale. Et le spectacle a dû être à la hauteur de ce charnier qui lui brûle les yeux, qui accentue sa nausée. Elle va vomir, son estomac se tord. Dieu permet des choses bien laides... C'est en entendant l'Amahir hurler à la mort, souhaiter qu'elle crève. Saleté a-t-elle dit. Oui, Corleone réalise combien elle est sale. Mais le comble est qu'elle l'accepte, fatalement.

Intercepté le manège du jeune garde, et le regard de Roland. Intercepté la lueur folle dans les yeux de Finn, et ses gestes à venir. L'issue est toute révélée. Sad n'interviendra pas. Agenouillée sur la terre battue du chemin de la mort, elle souffre.

____________________
--L_araignee..


La vie n’est qu’une grande partie de chasse, lente, qu’on entreprend comme on peut, selon la position qu’on y exerce. Prédateur ou proie. Une chambre d’auberge, une forêt, une toile tendue dans une encoignure, un traquenard en travers d’un chemin, une chandelle, cette reine. Et eux, pauvres moucherons, pauvres gardes aveuglés par cette reine à l’aura lumineuse. Lentement, l’épeire se rapproche de sa proie, nul besoin de se presser. Les ailes s’agitent, sursaut désespéré, instinct de survie ou peur ancestrale, la Camarde vient et la victime le sent. Il est temps de faire son office, l’arbalète et le poignard long sont lâchés sur le sol détrempé du sang des autres, et dans les deux mains viennent prendre leur place, deux dagues sorties d’un fourreau hermétique, deux dagues enduites de venin. Paradoxe bestial que celui qui pousse l’homme à chasser comme l’aragne, à tuer avec le fluide létal du reptile, et les pointes viennent s’enfoncer droites des deux côtés du cou de l’infortuné avant que de se rejoindre dans un ultime sourire en travers de la gorge. Pas de sourire, plus de sourire. Il n’a plus le temps, il l’a entendue qui crie. Pourtant, il se justifie pour cette peur naturelle et bien plus logique que le sacrifice stupide des autres.

_ Tu n’y étais pour rien. Ca ira vite.

Car déjà, les lames sont essuyées sur la tunique du soldat, alors que le pied vient faucher ses jambes pour le faire basculer en arrière, la dextre rattrape l’épaule avant que d’atténuer la chute. Adieu moucheron. Ca ira vite, parce qu’il rejoint déjà le carrosse, indifférent au drame qui s’y joue, seules occupent son esprit les deux femmes, la blonde et la brune. Elle souffre.

Ni femmes, ni enfants, jamais. Les premières parce qu’elles ne méritent pas la peine qu’il se donnerait en les tuant, les deuxièmes, parce qu’il y a plus de charme à espérer une vengeance qu’à contempler une mort. Ni femmes, ni enfants, jamais. Pourtant .. Il rêverait de crever la femme aux pieds de la sienne qu’il rejoint sans mot. Ne sont-ils pas pathétiques ainsi.. Qu’importe le reste. Qu’importent les autres, finalement. Une vengeance en vaut une autre, et si la sienne doit entraîner la mort du seul être qui lui reste, alors il ne sert plus à rien de se battre pour survivre. Rester à ses côtés et attendre la mort, aussi se laisse-t-il glisser à ses côtés. Devra-t-il se trancher les veines comme Elle l’a fait ? Plus si loin que cela, le galop de cavaliers se fait entendre, la cavalerie arrive toujours trop tard. Finn agira, un sourire qu’il esquisse en y pensant. Ils ont réussi.

La main couturée de cicatrices vient se saisir de celle porteuse de l’anneau de la Corleone qu’il porte à ses lèvres. Pas de baiser, pas de promesses, un contact silencieux dépourvu de tout ce qui gangrène les relations.


_ Merci.

Pas de mot doux, pas de serments. Rien de ce qui a pourri l’amour courtois. Et fixant le carnage qui s’étend à leurs pieds, soudain, il réalise que la Corleone, que la terrible et vénéneuse Belladone n’est pas née pour donner la mort. Culpabilité qui le fait redoubler de hargne à l’égard de celle qui se trouve à l’intérieur du coche. Qu’importe puisqu’elle est déjà morte dans son esprit depuis un froid jour de novembre en la Sainte Chapelle. Ne reste vivante que celle à ses côtés qu’il berce comme on bercerait une enfant alors qu’elle est plus âgée que lui, mais quand on a pris tant de vies, en a-t-on vraiment vécu une seule soi-même ? Et attendre la mort pour ne pas la laisser partir seule.

    « Moi, je sais tous tes sortilèges,
    Tu sais tous mes envoûtements,
    Tu m’as gardé de pièges en pièges,
    Je t’ai perdue de temps en temps.
    Bien sûr, tu pris quelques amants,
    Il fallait bien passer le temps,
    Il faut bien que le corps exulte.
    Finalement, finalement,
    Il nous fallut bien du talent,
    Pour être vieux sans être adultes »
    Jacques Brel – La chanson des vieux amants.


_____________
--Hubert_
Il l'a vu. Il l'a vu et son regard ne le lâche désormais plus.
Et le fou prend son temps. Lâchant tour à tour arbalète et poignard, se saisissant d'autres armes, encore. L'espace d'un instant, le jeune garde se demande bien pourquoi autant d'acharnement. Pourquoi autant de mort, autant de cris, autant de sang.

Alors qu'il avait réussi à faire quelques pas en arrière, voici que son corps entier se pétrifie en croisant encore une fois son regard. Le garde se sent incapable de lutter contre une telle détermination. Fermant les yeux l'espace d'un instant pour reprendre contenance, essayer de calmer les battements de son cœur affolé, il les rouvre pour le voir plus près, encore plus près.

Enfin ses deux jambes lui répondent, lui permettant de faire un pas en arrière puis deux. Mais pas assez vite. Il lui faudrait courir. Courir pour sauver sa peau, là, au milieu des fourrés. S'il arrivait à les atteindre, l'homme n'essaierait pas de le poursuivre, il en était sûr.
Ses hanches vont enfin esquisser un demi-tour lorsque il sent le souffle de l'autre arriver sur son visage.

La douleur qui le transperce alors l'irradie de part en part. Il ne sait si c'est la peur, la douleur, ou le poison qui fait effet. Son cœur s'emballe, son sang gicle sur son uniforme alors impeccable quelques heures auparavant. Un gargouillis s'échappe de sa gorge. Son cœur veut exploser dans sa poitrine. Le venin s'écoule dans ses veines, encore plus vite que la mort qui vient le chercher, inexorablement.

Ses mains essaient de monter le long de son corps, espérant encore un instant pouvoir refermer la plaie béante qui fait maintenant office de gorge.
Mais le produit mortel est fatal. Son cœur ne répond plus, les battements assourdissants emplissent sa tête, avant que la vie ne quitte définitivement ce corps.

Poupée de chiffon, il devient. Un coup de pied de son meurtrier et le pauvre Hubert est envoyé valser au sol. Il ne sent pas la douleur de la chute, il ne sent plus la douleur de la plaie.
Son regard apeuré fixe le ciel bleuté.

La danse continue, ailleurs. Lui, n'est plus.
--Sadnezz.


"Et plus le temps nous fait cortège
Et plus le temps nous fait tourment
Mais n'est-ce pas le pire piège
Que vivre en paix pour des amants
Bien sûr tu pleures un peu moins tôt
Je me déchire un peu plus tard
Nous protégeons moins nos mystères
On laisse moins faire le hasard
On se méfie du fil de l'eau
Mais c'est toujours la tendre guerre."
Jacques Brel – La chanson des vieux amants.

Au creux de lui, au sein de celui qui, par pure indifférence l'a rendue dépendante; Corleone est secouée. De soubressauts, de nerfs qui lâchent, c'est un rire qui l'ébranle et la fait siffler de douleur. L'éclat s'envole, perçant au delà des cris, au delà d'eux et de leur folie, de leur passion tumultueuse pourtant toujours restée silencieuse. Elle l'a fait, pour l'ultime fois elle l'a fait. Elle se croit sortie d'affaire, à cet instant tragique où elle s'est couchée parmi les corps abimés, où elle a écouté geindre les mourants. Elle se croit bénie, touchée par le doigt de dieu au moment ou les bras en étau de son terrible amant viennent se refermer sur elle. Terre d'asile, no man's land. Corleone réalise le dramatique de sa vie au milieu de cette pantomime dont tous les acteurs ont vu le rideau leur tomber dessus en linceul. Son suaire à elle est là, chaud et pourtant si froid, il l'écoute respirer et elle l'écoute rêver sur le champs de mort.

Quel avenir pour ces deux là? Il faut s'en aller, il faut partir... Il faut courir, c'est un beau jour pour mourir. Mais le corps ne veut pas, le corps refuse, il se trouve des excuses. La carcasse a tremblé pour rappeler qu'elle vit encore, et son rire ne s'éteint pas, elle rit la chienne, elle rit. Ils y sont parvenus. ils ont vaincus. Le visage de Béatrice revient. Et ses gants, ses blancs gants, que cachaient-ils?

Recroquevillée, l'ainée pense à Baile. Vois-tu mon amie, je n'étais pas faite pour rester dans le rang. Je n'étais pas faite pour m'assagir avec le temps. J'ai tué ta Reyne, celle que tu protégeais comme un trésor, j'ai tué ta Reyne. M'aimeras-tu encore... ....?

Trève.

____________________
Fildais
[Partir au hasard des mauvaises directions*-Le Guet arrive, la vie se retire…]


Le guet quitte bien vite les rues insolentes de Paris et leurs bruits mercantiles pour gagner enfin la paix des frondaisons de la forêt de Fontainebleau.
Doucement, les paupières de la Compostelle papillonnent avec cette langueur que lui apporte le réveil du pavot qui se dilue dans ses veines. Elle se trouve encore dans l’ignorance de ce qu’elle fait là, bientôt… oui bientôt elle saura, ce n’est qu’une question de temps.
La journée est chaude mais Fildaïs n’en ressent pas les effets, l’été enveloppe sa silhouette imperméable à sa douceur, prisonnière d’un hiver qui siège dans son âme depuis quelques années.

Sa bouche est pâteuse, une soif terrible la tenaille, de celle qui donne envie de boire des rivières entières, foutue thériaque.
Sa main se dirige vers l’outre d’eau, les doigts cherchent malgré le balancé du mouvement de l’équidé à faire sauter le bouchon en liège.

Une lampée et ses paupières plissent de plaisir, le regard plongé dans le ciel à s’en cuire la rétine de ces bris de soleil qui lui traverse l’œil au gré des absences de branches.
Vague sourire, vague plaisir, ses azurines se reportent sur les reflets d’argents de la crinière de sa camarguaise, puis à la brèche d’ivoire fragile qui se trouve entre le cuir de son gant agrippé à la longe et l’étoffe sombre de son uniforme du guet.
La blonde capte chaque détail avec une ampleur disproportionnée, les volutes d’opiacés qui s’agitent dans son sang surement en sont les responsables.

Une autre lampée, et son iris est frappé par le vol subit d’oiseaux, comme effrayés par quelques choses.
L’instant se suspend et l’esprit de jeune femme s’évade, pense à Elle.
La blafarde…
La Grande en noire…
La Faucheuse…
Elle ne sait pas, ça vient de ses tripes, ça ne se commande pas, et son cœur se serre à l’en étouffer pris dans un étau d’effroi.

Dans l’oreille ça claque, des cris, des appels, de la peur en son, palpable, déraisonnable…
Le bruit des sabots qui frappent âprement le sol, célérité dans le mouvement, l’outre est abandonnée, il n’y a plus que ce point au loin qui importe.
La lame sera bientôt sortie, rutilante au soleil même si elle en ignore encore les raisons...


-Cette fois la vieille, nous ne te raterons pas ! Nous allons être du voyage !
-Hey les filles ! Moi j’veux pas clamser, hein !



    « Viens
    Allons ensemble
    C'est un joli soir pour mourir
    Et si ta main tremble
    Dis-toi qu'il faut juste partir »**





*Céline (Voyage au bout de la nuit) **Saez (Jours étranges)
_________________

En deuil ! Ouais ça change pas beaucoup de d'habitude...[En rouge : ses voix pensionnaires dans sa tête...]
Finn.
Le chaos régnait à l'intérieur de la coquille royale. Ses offensive extérieures n'arrangeaient rien. Des cris. L'escorte féminine semblait mise en échec par la tempête Corleone. Un instant d'inattention vit son oreille gauche perforée par l'arme rudimentaire que représentait le bâton affûté de la paysanne. L'écho des combats s'éloigna brutalement, comme si le cauchemar était sur le point de prendre fin. Les actions qui suivirent s'accomplirent avec une conscience en demi-teinte. Le revers de fortune subit à l'instant signa l'arrête de mort de la robuste femelle. Tranchant de coutelas décapita pointe d'aiguillon, le dépouillant de toute fin mortelle.

Appelé à plus haute distinction, le gueux abandonna son adversaire désarmé et s'éleva au sommet du carrosse non sans adresse. Unique obstacle à la réalisation de sa terrible ambition, une simple couche de tissu protégeant la tête couronnée des intempéries. Plus rien ne la protégera, à présent. Le courroux venait d'en haut. Il se tailla un chemin à la dague, éventrant le modeste abri. Modeste car la couronne dispense d'inquiétude quant à ce qui vient du Ciel. La couronne ne craint que ce qui rampe, jusqu'à ce que ça grimpe. Le vermisseau ne vole pas. Et la chrysalide ne le peut lorsque piégée dans son cocon doré.

    Rassure-toi, je te ferai papillon.

Juché sur le toit percé du coche, Finn assistait, impuissant à l'agonie de l'Italienne. Elle était parvenue à enfoncer sa lame aux tréfonds de la royauté. La cible bavait de rouge alors que la poitrine palpitait encore ses derniers soubresauts. Elle lui parut si faible, si fragile, là, à portée de lame. Belle aussi, malgré la fièvre et les dégradations subies. Peut-être se trompait-il. Et ce depuis le début. Sans doute n'était-il pas trop tard pour reculer, emporter l'Italienne et son double afin de fuir cette histoire. On connaissait son nom, il ne pourrait trouver ni refuge ni répit. Mériter cette triste gloire sembla la seule issue viable.

S'accrochant désespérément à ses maigres principes, ceux l'ayant conduit à ce drame, l'Irlandais arracha le rideau dissimulant la scène qui se jouait. Le spectacle ne faisait que commencer. Tétanisées, les deux complices ne purent s'opposer à la manœuvre visant à l'enrouler solidement autour de la gorge de leur Reyne. Cette dernière commença à suffoquer, comme prévu. L'air manquait dans cet espace comprimé par le linge qu'il s'attardait à nouer fermement. Ainsi donc, ils respiraient tous deux le même air. Et ce sang qui coulait, n'était-il point tout aussi rouge que celui qui gouttait sur sa cuisse?

La mort ne tarderait plus. Tout comme ce petit point à l'horizon qui ne cessait de croître sans relâche. La cavalerie arrivait. Juste à temps pour assister au dernier souffle de son idole couronnée. Le corps royal fut hissé hors de l'habitacle, abandonnant la richesse du compartiment, visible à la vue de tous. Pendu au bout d'un rideau, il remua un temps, sans que les mains de l'étranger ne relâchent ce tissu dont on ferait sans doute relique. L'ultime arme qui étouffa la royauté. Du moins celle-ci. L'Irlandais s'était fait potence, il réservait à son Dieu la tâche du jugement. Personne n'y échappait. Ni elle, ni lui. Tous ni plus ni moins que des passants.


- « Souris, le Roy des Canards te salue. », souffla-t-il à l'oreille encore attentive de sa victime.

Plus pour très longtemps. Les yeux révulsés, prêts à bondir hors de leur orbite, anticipaient l'imminente échéance. Lorsque ses pieds cessèrent leur danse aérienne, Finn laissa retomber la dépouille sur le dos avec comme ultime faveur à celle à qui il venait de tout prendre, la vue du ciel.

    Envole-toi à présent, ton règne s'éteint.
    Dieu reprend ses droits. Il te confisque ce pouvoir dont tu as fait mauvais usage, privant Ses créatures des droits qu'Il leur avait prêté. Retourne chercher pénitence auprès de l'Eternel et accepte Son jugement, si tu l'aimes.

      D'un passant à une autre.

Les gants immaculés sont ôtés et conservés, sans volonté particulière. Peut-être celle de mémoire. Ou ne serait-ce que la curiosité d'apercevoir les mains de celle qu'on disait à toujours gantée. Comme un dernier outrage. Les mains à jamais nues, elle sera. Sans un dernier regard à ses acolytes, Finn s'en détourna. La haine s'était effritée sans qu'il n'y prenne garde. Plus rien ne les liait, si ce n'était l'infamie commise. Le passé s'en accaparait déjà. Ils avaient œuvré à trois comme un seul homme. S'ils vécurent heureux, personne ne le savait, mais lui au moins allait vivre.

Vivre à en mourir.

_________________
See the RP information <<   <   1, 2, 3, 4   >   >>
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)