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[RP] Boudinerie et grosse colère...

Colhomban
Bingley ! Je sais que j'ai maigri mais il est inutile de resserrer mes chemise comme si j'avais une taille de guêpe. On dirait les oripeaux d'une demoiselle en fleur. Charmant effet sur ma personne ! Borgne et aussi fin qu'une pisseuse...

Le brun ramena ses cheveux en arrière, essayant par ce geste de reprendre contenance. Son valet l'exaspérait tant et si bien qu'il lui arrivait parfois d'avoir des envies de meurtre. Des envies seulement... S'il n'avait jugé l'homme trop utile, il l'aurait congédié à plusieurs lieues de là. Lorsque ses mimiques obsessionnelles avaient commencé à conforter le nobliau dans l'idée qu'il s'était faite de l'anglais : ce bonhomme était cinglé ! Puis il y avait eu l'armée... Un face à face qui n'avait pas duré bien longtemps à vrai dire... Juste le temps de tirer l'épée au clair avant de se sentir disparaître dans les limbes de l'infini.

Vers l'infini et au delà...

Aristote avait eu l'air de vouloir le tirer de ce mauvais pas, et le nobliau avait été rapatrié en morceaux, mais vivant, sur Pontarlier pour une longue convalescence. Et après un sommeil de plomb, où le pronostic du brun avait été plus d'une fois engagé, il avait découvert à son réveil une tête ronde, que trop connue, qui n'avait cessé de chouiner jusqu'alors.


« Maîtwe Maîtwe ! J'ai eu si peuw de vous pewdwe ! » Combien de fois lui avait-il servi cette niaiserie ? 10, 20, 30 fois ? Colhomban avait arrêté de compter quand ils étaient sorti de Franche-Comté, le calcul devenant intolérable.

« Bingley ! Les « r » se prononce en bon françoys ! Cessez donc de mâcher tous les mots ! Je ne comprends que la moitié de votre baragouinage... » En même temps y avait-il quelque chose à comprendre dans les délires d'un angloys ?

Comme à l'accoutumée ils soupiraient tous deux de concert et continuaient leur route comme un vieux couple aigrie de trop d'amour. Ha ça ! Les bons sentiments n'émanaient pas de Colhomban... Mais bel et bien de son majordome. Il arrivait que le bougre se roule dans les habits de son maître dès que ce dernier avait le dos tourné. Il reniflait alors ses chemises, laissant traîner une narine aventureuse dans un bout de tissu plus sale... L'extase...!

Colhomban avait fini par fermer les yeux sur cette pratique plus que douteuse qu'il feignait d'ignorer. Au final avait-il vraiment eu l'envie de le congédier ? Voyager seul aurait été une sinécure fut un temps. Mais avec la cessité qui résultait de son attaque, il n'avait eu d'autre choix que de se remettre entier dans les mains de son valet. Et malgré ce qu'il pouvait en penser, il devait reconnaître que ce dernier n'avait jamais failli à la tâche et l'avait escorté de villages en villages jusqu'en Anjou. Chaque soir Bingley avait instauré un rituel minutieux, qui révélait là toute son obsessionalité : lorsque les chevaux étaient désellés, bouchonnés et nourris, le majordome s'occupait de son maître. Cataplasmes et crèmes prenaient le relais.

Ce fut avec les gestes rassurants d'une mère que Colhomban se fit bander les yeux tous les soirs. Au matin les compresses étaient retirées et un test de quelques minutes leur permettait de constater des progrès du blessé. Si la vue revint à un œil, l'autre demeura hermétique à toutes médecine, et s'est ainsi qu'en plus de son bras bandé, héritage d'une vieille guerre bretonne, le brun se retrouva avec un œil en moins.

Il s'était habitué au fil des jours à avoir une vision tronquée, et cela ne l'avait pas empêché de fouiller du regard tout Saumur lorsqu'ils avaient pénétré en ville pour la première fois. Car dans les ruelles du village, dans une des auberges du coin, une petite brune veillait sur un nouveau né.

Plus d'une fois le borgne avait mené des investigations en taverne. Il avait ouï, souri même, s'était prêté à moitié au jeu des confidences et avec le temps il avait fini par la retrouver.

Elle.
Sa brune.
Sa moitié.
Un visage mutin et une moue boudeuse.

Sorianne.
Et Nominoé.

Sa fiancée.
Et sa petite fille.


***

Ce fut d'un geste sûr que ce soir là il frappa à la porte de leur chambre...
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Sorianne
Les jours se suivaient et se ressemblaient.
La journée avait été chaude et étouffante, et la So guettait avec appréhension les nuages sombres et menaçants qui s'amoncelaient dans le ciel. Elle avait passé une bonne partie de son temps avec Gaelante, à en apprendre un peu plus au sujet des diverses plantes qu'avait la vieille femme dans sa roulotte et qu'elle vendait à qui le voulait. Des moments instructifs quoi.

Quand elle n'avait rien eu à faire, elle s'était occupé l'esprit, préférant éviter de penser de trop à son bras qui démangeait comme pas permis alors qu'il était en train de cicatriser sous la bande. Peut-être devrait-elle retourner voir ce chirurgien qui l'avait soigné, ne lui avait-il pas dit de repasser en cas de souci? Une légère teinte rouge lui colora les joues alors que l'esprit s'enflammait. Vilaine So... Elle coupa court, avant de virer pivoine.

Ce soir là, elle était dans sa chambre, à l'auberge, tranquillement installée, les jambes ramenées sous elle et à s'essayer à la broderie, chose qu'elle n'avait pas faite depuis des lustres. Tirage de langue de rigueur, concentrée sur chaque point. Oh elle pourrait être en taverne, pour sûr, surtout que ses nouveaux compagnons commençaient à lui manquer sérieusement... Après tout, ça faisait un bail qu'elle n'avait pas pu enquiquiner le blond borgne, et qu'elle n'avait pas croisé une Fourmi et le colosse... Vrai ça... Est-ce que la noiraude à antennes allait mieux? Il allait falloir qu'elle essaye de la croiser. Et Mal? So avait apprit pour Miss....


Aïeu...

Une ancienne tisserande pas douée pour les travaux d'aiguilles, sisi, cela existe, elle en était la preuve vivante. So avait déjà préparé ses quelques affaires, le plus gros étant déjà dans la roulotte de la vieille femme qui l'avait recueilli. Nominoée dormait pour l'instant, remise de sa mauvaise fièvre. Du moins la brune l'espérait...

Elle leva le nez en direction de la porte en entendant frapper. Visite surprise? Elle alla ouvrir, le doigt piqué en bouche, marre d'y coller des poupées. Si elle n'attendait personne, la jeune femme s'attendait encore moins à la personne qui se tenait là. Stoïque, elle resta plantée devant l'entrée, l'air de chercher qui cela pouvait être. Avant de réaliser que ce n'était autre que Colhomban... Son fiancé... Et la brune passa d'un coup par toutes les couleurs avant de se fixer sur le blanc... Et de le dévisager avant de refermer la porte aussi sec.


Va-t-en!

Elle avait reculé tout en fixant le panneau de bois, que faisait-il là? Pourquoi était-il là alors qu'il l'avait fui quelques mois plus tôt? L'air lui manquait, pourquoi là? Pourquoi maintenant alors qu'elle s'était faite à la vie en solitaire, qu'elle avait trouvé compagnie auprès de gens qu'elle appréciait malgré qu'ils soient recherchés dans tous le Royaume? Qu'elle s'était faite à l'idée de ne plus le voir... Aucune nouvelle pendant des mois... Rien depuis qu'il lui avait tourné le dos ce matin là à Paris... Et pourtant il était devant sa porte, juste là, à portée de main. Si elle n'avait pas été aussi rancunière et qu'elle ne lui en voulait pas autant, la brune se serait jetée dans ses bras... Mais il l'avait fui quand elle avait voulu le retrouver. Il l'avait laissé...

Toute couleur avait déserté son visage, où donc était passé l'air, elle avait l'impression de suffoquer... Mais elle finit par retourner ouvrir la porte, en rogne comme jamais. Il était là, c'était bien lui... Pourquoi était-il parti? Mais pourquoi??


Va-t-en Col! Laisse moi! ... Mais qu'est-ce que... Pourquoi tu es là??

Oh non, elle ne voulait pas savoir en fait... Elle allait de nouveau fermer la porte au nez du brun, préférant s'isoler à l'abri de la chambre. Les nerfs à fleur de peau, elle en tremblait, non non, elle devait rêver.
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Une belle bannière?
Colhomban
La porte s'entrouvrit et une petite brune, un doigt dans la bouche, lui fit face. Un éclair de tendresse traversa notre homme qui s'apprêtait à faire un pas en avant.

Va-t-en !

La porte se ferma sur lui.

Euh... Il leva à nouveau le poing et tandis qu'il s'apprêtait à toquer, Sorianne ouvrit la porte à la volée.

Va-t-en Col ! Laisse moi ! ... Mais qu'est-ce que... Pourquoi tu es là ?

La porte se ferma à nouveau, ce qui fut trop pour le brun qui glissa son pied dans l'entrebâillement avant que le battant de bois ne claque complètement sur le chambranle. L'acte lui arracha un grognement de douleur, et il pénétra dans la petite pièce visiblement fâché de la tournure que prenait la situation.

Pourquoi je suis là ? Elle se demande pourquoi je suis là !

Il rit.
Mains sur les cuisses.
Secoué de part et d'autre par un gloussement qui remontait de sa gorge.
Il finit par se redresser, se plaça devant elle, et la fixa un moment.


Tu voulais que je réagisse comment à l'envoi de ta lettre ? Comment ?! Tu m'excuseras du retard j'ai eu une prise de bec avec une vingtaine d'hommes. Comme tu peux le constater j'ai perdu quelque chose au passage... Il fit un sourire ironique en pointant du doigt son oeil. J'espère que sa gracieuse majesté me pardonnera de n'avoir pu la suivre plus tôt à l'autre bout des royaumes... C'est que quoi qu'elle en dise elle court vite... Il pinça les lèvres et se tourna vers la cheminée posant ses mains tremblantes à plat sur la poutre de cette dernière. Cela ne lui ressemblait pas. Mais il avait envie de lui dire tant de choses...

Tu m'en veux ? Tu me détestes ?
Dis moi que tu me détestes...


Ses poings se crispèrent et il se tourna vers la brune, colère contenue.

JE TE CROYAIS MORTE !
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Sorianne
Raté, porte bloquée dans son élan... Alors que Colhomban entrait, elle se reculait, le rouge de la colère revenant lui colorer les joues pendant qu'il semblait trouver son questionnement hilarant. Mieux valait qu'elle ne réponde rien. Elle fulminait, la brune. De plus belle en entendant la suite. Les poings se serrèrent et le teint virait au pourpre tandis qu'il en rajoutait. Que croyait-il?!

Un pincement tout de même en suivant ce qu'il lui désignait. Son œil... La colère fut oubliée l'espace d'un instant. Les souvenirs de regards échangés remontèrent mais elle les chassa aussi rapidement qu'ils étaient venus. Il était hors de question de retomber dans ce panneau. Elle s'était promis de ne plus se faire avoir, et comptait bien s'y tenir. Et ce qu'il dit ensuite ne fit que la conforter dans sa colère.

S'il n'y avait pas eu sa fille qui dormait dans un coin de la pièce, elle aurait prit la poudre d'escampette, s'en allant se planquer n'importe où, mais là où il ne la trouverait pas. D'ailleurs, So se demanda si elle n'allait pas aller la prendre pour s'en aller avec elle... La distance vers la porte fut rapidement évaluée tandis que Col était au niveau de l'âtre. Jusqu'à ce qu'il lui demande de lui dire qu'elle le détestait... Tremblante, elle pinça les lèvres, ne pas répondre, ne pas répondre... Enfin, résolution vite oubliée quand il haussa le ton et qu'il se retourna vers elle, réveillant bébé au passage.


Et tu as fui quand tu as vu que ce n'était pas le cas! Tu ne m'as même pas laissé t'expliquer!

La distance qui les séparait fut rapidement abolie et elle se retint fortement de frapper, essayant de contenir tant bien que mal ce qu'elle sentait venir.

Oui, je te déteste! Tu m'as abandonné, tu m'as tourné le dos, Col! Tu croyais que j'allais t'attendre bien sagement après ça?! Tu m'avais promis!

Elle lâcha le regard sombre du brun. Il lui avait manqué... Elle l'avait cherché pendant des mois dans l'espoir qu'ils puissent recommencer où ils s'étaient arrêtés, mais le destin en avait décidé autrement. Et le voilà qui était devant elle... Elle qui n'avait plus envie d'expliquer quoi que ce soit. Le brun avait choisi, elle s'était fait une raison et n'y reviendrait pas.

La So se recula, se plaçant de telle sorte qu'elle se trouve entre Colhomban et l'enfant qui faisait une démonstration de la puissance de ses cordes vocales, là, dans le panier où il se trouvait, et elle lui désigna la porte, les lèvres pincées et le regard détourné. On ne l'abandonnerait plus jamais.


Tu peux partir rassuré. J'ai des amis ici. Je ne suis pas seule. Le courrier... C'était uniquement pour que tu saches.

La penser en colère était pur euphémisme... Elle lui en voulait comme elle en avait rarement voulu à quelqu'un, attisée par le fait de le voir juste là, alors qu'elle ne s'y attendait pas le moins du monde.
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Une belle bannière?
Colhomban
Les mots lui cinglèrent le visage plus forts qu’aucune gifle. L’homme tituba un instant alors que sa compagne, celle qu’il avait aimée, qu’il aimait toujours, avouait le détester. Le dé-tes-ter. Le terme était cru, saisissant, tranchant même. Il lui découpait le cœur à l’endroit même où un trou béant avait été rebouché à la hâte, le jour où il l’avait su en vie. Combien de fois avait-il espéré la revoir ? Combien de fois avait-il rêvé à des retrouvailles passionnées, lui qui aurait donné son âme pour elle…

Et elle ?
Elle le détestait…

Son cœur rata un battement à s’entendant dire qu’il l’avait laissée. Comment oublier la promesse qu’il lui avait faite, elle, toujours abandonnée par les hommes. Il lui avait alors juré fidélité, amour et protection. Et bien plus tard ils avaient scellé ce « pacte » par des fiançailles. Par Aristote… Il l’avait tant aimé ! Il l’aimait encore tant… Alors qu’elle vitupérait il ne pouvait s’empêcher de remarquer son petit nez qui se retroussait de colère, ses yeux verts de miel se plissaient et ses cils ombreux battre la cadence des cris qui sortaient de sa bouche. Sa bouche… Combien de fois avait-il pu lui donner un baiser ? Des centaines de fois… Peut-être des milliers… Il était délicat de savoir avec exactitude le nombre de fois où leurs lèvres s’étaient rencontrées. Mais là, à cet instant précis, il ne fixait qu’une chose : une bouche rouge invitant à un baiser…


Je ne suis pas seule.

La phrase le tira de sa contemplation. Sourcils froncés ses yeux revinrent vers ceux de la demoiselle, étrangement noirs de colère.

C’était uniquement pour que tu saches.

La jeune mère faisait un rempart de son corps entre lui et l’enfant. Elle pensait ainsi qu’il s’en prendrait à la petite ? Dieu… Comment pouvait-elle avoir une image de lui si tronqué ? Le brun plissa les yeux, sentant un barrage céder en lui. Ne pouvait-elle donc pas imaginer ce qu’il avait ressenti ? Elle pensait peut-être qu’accepter la mort de quelqu’un était chose facile ? Creuser sa tombe ? Lire sa dernière prière ? Porter son souvenir comme un fardeau parce qu’on sait qu’on restera seul ? Seul. Terriblement seul. Et rongé par le chagrin. La nuit, le jour. A toutes les heures de la journée. En mangeant, en s’habillant, en chevauchant, en parlant et même en pensant. Une douleur continuelle qui avait fini par l’abîmer, l’épuiser, le ravager jusqu’au fond de son être.

Là. Devant la petite brune qui aurait du être sa femme la digue se rompit. Le brun durcit son visage et d’un geste mû par l’habitude il se pencha vers elle prestement. Son bras gauche se referma sur les cuisses de la demoiselle qu’il hissa sur son épaule, profitant de la surprise de cette dernière. Du bras droit il dégagea doucement l’enfant de la couverture dans laquelle elle était emmaillotée, et avec une infinie douceur il vint la lover contre son torse. Des yeux il mangeait Nominoé, si belle ; et de son bras gauche il resserrait sa prise sur une Sorianne très (très très) en colère.


Qu’importe les coups. Qu’importe la colère.
Elle pouvait bien le malmener toute sa vie.
Jamais. Jamais plus il ne la laisserait.


Hurle tant que tu voudras. Je suis encore ton fiancé, et le père de la petite. Je ne vais pas te laisser gâcher ta vie et la sienne. Tu me détesteras tant que tu voudras mais pour l’instant que décide à ta place.

Tandis que le discours était prononcé avec détermination il s’éloignait de la chambre où déjà Bingley s’affairait, rassemblant les affaires de la jeune femme.

Ce soir, nous serons une famille.
Et je compte bien qu’on le soit le reste de notre vie.
Un jour tu comprendras. J’en suis sûr.
Pour l’heure je t’aimerai autant que tu me détesteras.


Ce fut ainsi qu’une fois de plus Colhomban enleva Sorianne…
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