[RP] Rivet ~ Les Dortoirs "Marie couche-toi là"

"Les églises ne sont-elles pas des dortoirs des vivants aussi bien que des morts?"
J. Swift

Le dortoir est de ces lieux indispensables à un monastère. Repos des sens et de l'esprit, éveil de l'âme, soulagement des membres endoloris: il procure tout cela à la fois. Une lumière tamisée parcourt les murs de pierre lézardés, une douce chaleur procurée par une cheminée bouchée envahit la salle. L'endroit n'est que silence.

Du moins, c'est ce que la sage et candide Prieuse voudrait.

En vérité, le dortoir est de ces lieux où l'on ronfle plus que de mesure et où l'on se soulage de pets silencieux. Sombre, les pires mesquineries peuvent y avoir lieu sans qu'autrui ne le remarque. Repos? Pas pour ceux qui sont sur la première couche en partant de la droite -celle près de la fenêtre- qui est défoncée en de mains endroits. Ni pour ceux dont la paillasse est le nouveau nid des rats.

Puisque le Prieuré est récent, la salle n'accueille que peu de couches et n'est parsemée que de rares chandelles. Un épais rideaux sépare le dortoir en deux: à gauche les femmes, à droite les hommes... si Sainte Illinda le veut bien.
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[Pastorale en toute intimité
Sur couchettes usées...]


Comme les Marmandais le savaient, le Prieuré du Rivet était encore en grande partie en ruines. Heureusement, l'aile Ouest avait été savamment rebattit par quelques curieux maçons et autres étrangetés en tous genres.

Et c'était le dortoir qui avait été choisi par la Prieuse pour faire office de salle de pastorale. Pourquoi? Parce que la dite salle n'était encore qu'un amas de cailloux tranchants, de ronces abondantes et de bêtes grouillantes.
Ici au moins pouvait-on espérer trouver un peu de chaleur grâce à l'âtre fumant. Consciencieuse, Ellya avait rapporté les coussins de la précédente pastorale pour les éparpiller ça et là, donnant une fausse impression de confort.

Les chandelles furent allumées, l'encens mis à brûler, ... ambiance romantique assurée. Didactique, veux-je dire!

La grande porte du Prieuré avait été laissée ouverte pour que les désireux n'aient pas à attendre dehors. Bref, tout avait été prévu pour inciter les Marmandais et les étrangers à se faire pastoraliser! Holé!
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Emryn passa la porte du prieuré pour venir à la rencontre d'Ellya. Il était bien temps qu'il fasse sa pastorale...

Il erra un moment dans les couloirs de l'aile Ouest, puis aperçu du mouvement dans le dortoir. Il héla :

- Soeur Ellya, êtes-vous ici ? Je viens pour ma pastorale.

Sashah débarqua par un matin d'un lundi de janvier 1460, le 23 exactement. C'était justement ce jour là précisément qu'elle décida de devenir Marmandaise. Grande première pour elle, mais elle n'oubliait pas de se rendre au prieuré par faire sa pastorale.

Emryn était déjà là et elle le regarda avec un sourire.

- Bonjour Bourgmestre, déjà prêt ? Moi pas trop, enfin si, ça fait 6 mois que j'attends de faire ma pastorale, mais à vrai dire, j'ai un peu la trouille. Soeur Ellya n'est pas là ? Dis on va pas dormir là hein ?

Un peu perdue la Sashah là, en plus elle n'avait aucune envie de dormir dans le prieuré, ça lui faisait un peu peur et encore moins pas loin d'un maire, ça aussi ça lui faisait peur ! Ça ronflait un maire ?
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Voilà elle était revenue de voyage et se rendit au Rivet comme prévu au dortoir, où elle posa son baluchon plein de poussières. Tendant le cou, cherchant du regard, elle appela :

- Soeur Ellya ! Soeur Ellya ? Vous êtes là ? C'est moi Sashah je viens pour ma pastorale.[/quote]
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[ Dortoir des hommes, côté gauche. Retour en enfer. ]



Marche funèbre jusqu'aux dortoirs du Prieuré.
Le pas traînant, l'oeil vitreux et la boule au ventre, notre ancien duc traînait sa paillasse et son humeur noire jusqu'à la chambrée. Le visage solennel marqué par tous ces mois de règne, ce retour au beau milieu du tas de gravats à peine reconstitué en murs, marquait définitivement en lui la fin de son état de grâce.
Il s'assit sur la première planche qu'il jugea assez solide pour ne pas s'effondrer sous son poids et y installa ses affaires.
Boarf, après une bonne sieste, nul doute qu'il ressortirait d'ici d'humeur joyeuse.

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Βουλγρούχε... Βουλγρούχε...

Ombre parmi les ombres, la défunte gémit, écho au vent tempétueux. Elle glisse dans les couloirs sombres, sur les pierres froides, dans les murs épais. Comme les autres ombres, elle cherche la Lueur. Seule la Lueur permettrait de...

Elle se coule dans le faîte du Prieuré du Rivet, plus loin, encore, encore, pour parvenir sous terre. Elle embrasse d'un souffle délicat son effigie, geint que plus personne ne vienne la contempler.

La Lueur. Elle remonte, traîne dans un nouveau couloir, se dirige vers l'étincelle palpitante qui l'a tiré de sa mélancolie. Elle doit rappeler. Elle doit alerter. Elle frôle imperceptiblement le visage masculin avant de revenir, en un son strident. Le vent souffle.
Réveille-toi.

Βουλγρούχε!

Il coulait lamentablement vers un sommeil lourd, noir et sans rêve. Ainsi ronflait notre Kro depuis son plus jeune âge : Une coquille vide en tête. Lorsqu'un vent glacial parcourut le dortoir miteux au fond duquel il sombrait.


Βουλγρούχε... Βουλγρούχε... Semblait-il entendre au fond de son coma. Βουλγρούχε!

Lointaine réminiscence, une appellation déjà entendue.


[Ferme des Kronembourg, vers les années 1435, images oubliées ]

Le chien avait disparu. Boulgrouche était à sa recherche depuis plusieurs jours, les braies crottées, petites jambes poilues trottinant dans le froid, livre des Vertus à la main comme le lui avait ordonné Cistron, tuteur de l'enfant. Il fallait prier, beaucoup prier pour que Snoopy revienne le temps que " les grands " préparent le repas. A la tombée de la nuit, une épaisse fumée s'échappait par la cheminée de la ferme familiale.


Boulgrouche !!! Hurla la poissonnière. Ramène-toi à table, je t'ai réservé la truffe du boeuf ! Et si tu la boucles, tu auras même le croupion !


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Le vent glacial caressa son bras. Au réveil, sa première pensée fut pour Noirlac. La seconde pour Sainte Illinda.
Le Kro se leva comme un seul homme ( un peu normal puisqu'il était seul ) et alluma une bougie. Voix rocailleuse d'un barbu mal réveillé, il demanda :

Il y a quelqu'un ?
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La lueur vacille. Faible & éphémère.
L'ombre souffle un rire venteux qui se répercute sur les pierres humides. Cette lueur n'est pas la Lueur. Il n'a pas compris. Pas encore.
Défunte, elle observe le Vivant, tournoyant en volutes invisibles autour de lui, à travers lui.

Ἐγώ...

Elle se coule vers le visage masculin, frôle ses oreilles.

Ἐγώ...

Plus vite. Encore plus vite. La défunte est pressée. D'une ombre, elle engloutit la pauvre lueur. L'homme a les yeux ouverts mais ça ne suffit pas.
Réveille-toi.

Βουλγρούχε...

... Et la flamme s'éteignit, aussi rapidement que les souvenirs.
Pas de réponse, évidemment. On a rarement vu un assassin ou un rôdeur se présenter lorsqu'on demande " s'il y a quelqu'un " dans l'obscurité.

Tendant les bras et marchant à tâtons, Kro fut soudain pris par un mal de crâne. La voix, la chose, quelque chose pénétrait en lui. Il tomba à genoux. Le temps de reprendre ses esprits il prononça à travers le vent ...


... Luciona ? Kamazone ? Léa ?


... Car son défunt amour experte en explosifs et en pillages d'églises et de châteaux au nom du Lion, ne lui avait laissée que ces trois noms d'emprunt. Ainsi que l'image d'une statue, dans un passé lointain.
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Lorsque, dans un moment de curiosité, la Sainte statue s'égare dans le monde humain, elle libère un moment les Âmes et les Esprits qu'elle a dévoré de sa folie jadis. Ce soir était un de ces instants trop brefs, où les esclaves engranités retrouvaient un moment Esprit et âme.

Ainsi, une Âme nouant avec son Esprit reprenait forme tangible dans les couloirs déserté du Prieuré du Rivet : Safranne LaFiole.

Enfin, ce qu'il en restait. Elle se souvenait à peine de son nom, de sa vie de nonne mais...

Mais c'te couloir, c'est l'Sans Nom qu'veut m'perdre dans ses boyaux! Fait-y trop noir. Et c't'odeur, ça sent pas l'odeur d'saint'té d'Noirlac! Ca pue le...

Oui. L'odeur. Elle connaissait cette odeur de poule mouillée mâchonnée par un chien gâleux. L'Esprit de Safranne communique vivement avec l'Âme de LaFiole cherchant un souvenir. Soudain, la Safranne, vaporeuse apparition, flotte vers la flatulence (car elle en était sûre, ça venait du derrière d'un bougre et pas n'importe lequel) : Frère Kronembourg.

Frère 'Nembourg? susurre le fantôme dans le couloir. Elle ne sait même pas si elle peut être entendue. C't'encore vot' soup' de poireaux qu'votre ventre tourne en odeur d'marécage? J'm'en va vous donner un d'mes remèdes à la fiante de moine.. ou d'mmoineau. Ché plus.... Kro? Frère Kro?

Ombre des ombres animées, elle gémit avant de se retirer.
Sa victime s'est coulée hors du Néant, elle doit lui laisser la place à présent.
Elle souffle un instant en direction de La Fiole, hume l'âme de ce qui reste de La Folle.
L'esprit cherche et se rappelle, Safranne réapparaît, immortelle. Car la mort l'a déjà embrassée, et à jamais elles sont liées.

Λευκή...

Du mur, du plafond, du ciel et de la terre, la Défunte observe ces retrouvailles inattendues, voulues. L'Âme doit prévenir ou une autre sombrera avant l'heure.