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[RP Privé] D'épître en épître...

Calixteconstantinm
Assise en tailleur dans sa chaumière à l'atmosphère alourdie par la moiteur d'un mince brasier, Calixte étudiait de ses yeux émeraudes une lettre au papier froissé par les intempéries d'un long voyage. L'enveloppe était cachetée à la va-vite, d'un cachet de cire impersonnel et de bon marché. Calixte ne devina pas immédiatement l'expéditrice, son amie ayant pour habitude de sceller soigneusement ses missives d'une cire agréablement parfumée. Une calligraphie aussi ordonnée que distinguée s'étirait pour former son nom ― mais encore une fois, c'est avec un sourire perplexe qu'elle examinait l'ensemble, ne reconnaissant guère plus l'écriture. Elle eut un sourire d'emportement, aussitôt brimé par la fatigue d'une journée de dur labeur. Elle décacheta hâtivement le courrier et ses yeux partirent à l'assaut des phrases dansant en harmonie avec le vacillement de la flamme. La lettre était confuse, l'écriture tremblotait. Ce n'était pas la même que sur le dessus de la lettre. Peut-être avait-elle été pliée et expédiée par un tiers quelconque. Cela n'était pas habituel à sa bonne amie. Et puis, ses lettres étaient toujours constituées d'une clarté presque stricte. Mais celle-ci était à peine intelligible. Les mots se dérobaient, ils sombraient, faisaient de leur mieux pour être aspirées par le louvoiement d'une pliure dans le papier. De ce qu'elle en comprit, sa chère amie lui souhaitait bonheur et succès dans la vie.

Calixte haussa, par habitude, un sourcil. Son engouement avait fait place à une vive inquiétude. Même le papier semblait d'une fadeur inhabituelle. L'encre semblait terne. Si elle eût été superstitieuse, elle s'eût dit que cela respirait la mort. Un soupir; elle rabattit les côtés de la lettre puis la plia afin que les rabats retrouvent la place qui leur était due. Une nostalgie s'empara d'elle; puis, laissant glisser ses longs cheveux noirs de son habituelle coiffure, elle accota la nuque contre le rebord de sa couche. Elle se rappelait son enfance et son adolescence. Tous ces bons moments passés à Paris...

Ce pensionnat, elle n'avait pas choisi d'y aller. Comme aucun enfant, présumait-elle. Elle avait accepté son sort les dents serrées, à contre-coeur. Ses parents disaient vouloir faire d'elle une femme respectable. Les histoires que l'on racontait sur les pensionnats de Paris étaient toutes fausses, ou presque. Les femmes qui oeuvraient à inculquer manières et pensées à tous ces tendres enfants n'étaient pas toutes rudes et mauvaises. Certes, il y en avait toujours une plus stricte et plus sévère que les autres. Ils lui donnaient un surnom... Si seulement elle pouvait s'en souvenir... Mais les souvenirs sont toujours brumeux. Elle se rappelait par contre de cette fille qui était chargée de lui apprendre les rudiments de la lecture. Elle était jolie; à cette époque, Calixte regrettait de ne pas être blonde. Elle admirait tant les cheveux couleur blé et les yeux céruléens de sa jeune instructrice personnelle. Avec elle, elle avait découvert les plaisirs de la lecture. Cette fille lui avait montré à s'évader et à voir le monde de mille façons différentes tout en restant bien assise au coin d'un feu... Puis, lorsqu'elles quittèrent toutes deux le pensionnat, elles se jurèrent de tenir une correspondance régulière, promesse qu'elles honorèrent avec dignité.

Bientôt, Calixte s'assoupit. L'alanguissement avait pris possession de son corps, et c'est au milieu de ces souvenirs florissants d'une enfance bercée par les mots et une passion inconsidérée pour la littérature qu'elle gagna l'univers infini des rêves. La lettre postée en équilibre sur une cuisse glissa au sol dans un bruit mat, presque indignée de n'avoir reçu qu'une aussi faible attention.
Grimoald
Dans la semi-pénombre qui régnait dans la taverne de sa maitresse, le nabot à bouclette blonde relisait la lettre de sa mère.
Elle lui disait Adieu, et lui souhaitait tout le bonheur du monde. Elle lui donnait ses derniers conseils de mère bonne et aimante : faire toujours le bien, être toujours poli même avec les vils personnes, ne pas oublier la prière du soir et aller à la messe tous les dimanches. Elle lui répétait aussi un dernière fois de ne pas en vouloir à son père, et de toujours garder un lien avec la famille. La Famille, chez les Lefebvre, c'était sacré. Tout comme le pouvoir et et l'argent...
Grimoald avait fuit cette vie là, il ne voulait point finir comme son grand-père : riche, puissant, seul et triste...
Grimoald était devenu un serviteur, un serviteur zélés et fidèle. C'était pas vraiment ce que sa mère et sa famille avait voulu pour lui. Non, il l'avait élevé dans le but dans faire un commerçant aussi redoutable que le grand-père. Il aurait du faire de la politique et du commerce... Mais le nain ne voulait rien de tout cela.

Il tenait à présent une autre lettre, pliée en deux et cachetée. Elle était adressée à une certain Calixte.
Comment cette lettre s'était-elle retrouvée dans ce paquet ? Ce paquet que le notaire de la famille lui avait envoyé et qui contenait quelques affaires ayant appartenu à sa défunte mère.
Intrigué, le nain ne pouvait se résigner à décacheter cette lettre. Ce n'était pas l'envi qui lui manquait, pourtant. Mais par respect, le nain n'ouvrira jamais cette lettre. Mais il l'envoya tout de même à sa destinataire...



Citation:

Ma très chère amie,


Voici longtemps que je ne t'ai pas écris. Mais je trouve enfin la force pour t'écrire en ces derniers instants. Je vais bientôt rejoindre le Très-Haut mon ange, et je ne veux point que tu sois triste. Tu ne dois point avoir de chagrin. Si Dieu le veut, je serais à ses côtés, et sache que j'aurais toujours un œil sur toi là-haut, comme, il y a si longtemps maintenant, lorsque nous étions ensemble au Pensionnat.
J'aimerai tant te prendre à nouveau des mes bras et te réconforter. J'aimerai pouvoir te dire encore à quel point les garçons sont idiots parfois et à quel point il faut s'en méfier souvent.
Mais tu es loin maintenant, voici bientôt quinze ans que j'ai quitté Paris, et nous nous écrivons toujours. Vois comme l'amitié peut être forte et comme je tiens toujours à toi même après toutes ces années.
Bientôt, je ne serai plus là pour te lire et pour t'écrire. Mais sache que je serais toujours avec toi.

Dans ma dernière lettre, je te contais mes inquiétudes à propos de mon fils, Grimoald. C'est un bon garçon, tu sais. Mais je ne l'ai pas préparer à cette vie là. Ais-je été une mauvaise mère ? Je ne sais. Je l'ai peut-être trop couver, je le reconnais. Mais je voulais seulement le protéger de toute cette souffrance qui imprègne nos vies, tu comprends.
Il n'est pas prêt à vivre dans le monde des adultes, je le sais bien. Ce n'est encore qu'un enfant et il a besoin de sa mère.
Dans sa dernière lettre, il m'a écrit qu'il vivait à Loches, en Touraine. Il avait l'air d'y être heureux. Il économise pour se lancer dans le commerce – c'est un Lefebvre ! –. Il trouvera une honnête femme, l'épousera, et fondera une famille. J'en suis certaine.
Mais comme je te le disais. Je ne l'ai pas préparer à affronter le monde des adultes. Aussi, il se pourrait bien qu'il soit un peu perdu dans les premiers temps.

Aussi, je te demande de veiller sur lui. Sois toujours de bon conseil pour lui, essaye de savoir ce qu'il fait et n'hésite pas à le remettre sur la bonne voie lorsqu'il s'égare. C'est un bon garçon, mais il a toujours eu tendances à s'attirer des ennuis.
Essaye de savoir ce qu'il devient. Je serais plus rassurés en partant si je savais que mon petit pouvait compter sur le soutient d'une vieille amie de sa mère.


Adieu ma petite puce,


Elena


Le nain y joignit un petit billet...

Citation:
Madame,

J'ai le regret de vous annoncer de décès de ma mère, Elena Lefebvre, parvenu il y a de cela deux mois.
Dans le paquet que m'a envoyer le notaire de la famille, j'y ai trouvé cette lettre qui vous est adressée. Je ne l'ai pas lu mais ma mère aurait voulu que je vous la remette en mains propres. Je ne puis malheureusement point. Aussi, je vous la fait parvenir.

Que le Très-Haut vous protège,

Grimoald, fils d'Elena Lefebvre

_________________
Calixteconstantinm
Les yeux tout écarquillés et la main tremblante, Calixte sentait son regard béryl se noyer peu à peu dans une vague fébrile d'émotions déchirantes. Elle avait lu et relu cette lettre et le billet qui l'accompagnait. Impossible... Elle ne pouvait pas être morte... La jeune femme s'assit brusquement devant l'âtre de sa chaumière, laissant choir les lettres à ses pieds. Les flammes semblaient la narguer. Elles léchaient la bûche comme pour lui rappeler que la vie use l'âme jusqu'à la mort. La mort... Ramenant les jambes vers elle, se tenant les tempes avec les paumes, elle clignait des yeux et secouait la tête négativement comme pour chasser un mauvais rêve. Et pourtant, un seul regard vers l'épître de la défunte suffisait à lui prouver que cette triste et affligeante nouvelle était tout sauf illusoire. Emportée par un geste de rage ou d'impuissance, elle se leva tout aussi promptement qu'elle s'était assise au sol pour se diriger en chancelant vers la table de fortune qu'elle s'était aménagée à l'aide de briques et de planches. Calixte saisit désespérément sa plume d'oie et griffonna quelques mots hachurés sur un papier de qualité modeste, le coeur palpitant.

Citation:
17 décembre ...

De Calixte Constantin Mahault à Messire Grimoald

Je vous remercie grandement, Messire, de m'en avoir informée. C'est avec une peine insondable et un respect empli de souffrance que je salue la complaisance dont vous avez fait preuve. Vous savez, après presque seize années d'une profonde et sincère amitié, la fatalité du sort que la réalité impose est presque insupportable. Votre mère était une femme au coeur d'oiseau. Ingénue et volage. Je ne sais que trop vous écrire. Mes pensées sont si confuses... Hier encore nous étions toutes deux assises sur nos lits aux couvertures encore fraîches d'une pimpante journée d'automne, tentant de camoufler la lueur vacillante d'une bougie subtilisée au réfectoire; inventant la suite de notre dernière lecture. Sous nos yeux prenaient vie des personnages tout aussi farfelus les uns les autres, certains s'apparentant avec une coïncidence suspecte aux Soeurs du pensionnat. Les yeux fermés, nous nous évadions afin d'explorer le monde, nous défiions le temps, les vents et les marées. Les frontières, les limites n'existaient plus. Nous pouvions être ce que nous désirions être. Nous étions là où notre coeur désirait vivre. Et, par un accès d'égoïsme et d'orgueil, pour rien au monde nous n'aurions voulu partager nos abîmes secrets. L'odeur moite de la poussière devenait la quintessence même de l'eau saline frappant la proue d'un navire reluisant. La chaleur de la cire âpre évoluait et devenait la douce et frappante réplique des rayons ardents appartenant de vastes et périlleux déserts. Ensemble, nous abattions plus d'armées qu'aucun Roi n'en ait jamais possédées. Nous devenions un soir dresseuses de chevaux, pour ensuite, un autre soir, incarner le rôle d'un vieux maître d'estoc bourru, ou encore de quelque personnage plaisantin. L'amère réalité devenait une douce et utopique rêverie. Que de souvenirs devenus par un simple décès plus précieux que la prunelle de mes yeux... L'ombre de ce jour si cruel me raille, palpitant encore de l'émoi de quelque amitié ancienne. Pardonnez mes égarements. Je ne puis me résoudre... Comment se fait-ce?... Pardonnez-moi. Merci encore une fois.

Je vous prie d'agréer, Monsieur, à mes plus sincères et amicales pensées.

Calixte


Pliant distraitement le courrier, puis appliquant un sceau quelconque, elle sortit prestement de sa petite maison, les joues toutes offertes au froid, porter cette missive au relais postier ― les yeux encore embués par la triste nouvelle.
Grimoald
Le nabot à bouclettes blondes essuyait quelques chopes en attendant les prochains clients lorsqu'un bambin lui apporta la lettre. Il espérait surement une petite pièce. Le nain réfléchit longuement, un petit sourire en coin en regardant le gamin haut, tout comme, comme trois pomme. Mais le nain n'était point avare, et il lança une pièce au petit coursier qui détala, tout heureux.

Prêt de la fenêtre, le nain scrutait la lettre. Qui était donc cette Calixte ?
Il repensait à sa mère et une vague d'émotion le prit tout d'un coup. Il se sentait coupable. Coupable de l'avoir abandonné. Il se sentait responsable de sa mort. Il aurait tant aimé serrer sa mère dans ses bras en lui murmurant "je t'aime, ma petite maman" à nouveau. Mais elle n'était plus de ce monde, et dans un monde où sa douce maman n'était plus, le jeune nain se sentait bien seul.

Il prit sa plume, la trempa dans l'encrier, et entreprit de répondre à cette Calixte. Mais qui donc était cette femme qui avait bien connu sa mère ?


Citation:
Madame,


Je ne sais pourquoi je vous écris, mais je ne puis m'en empêcher. Sachez d'abord que je ne suis point un Messire, ni un Monsieur... Je suis simplement Grimoald, le fils de celle qui, je l'imagine, était votre amie.
Ma douce maman me manque, et j'aimerai tant lui parler à nouveau.
Nous parlions peu de son enfance. Je savais qu'elle l'avait passé à Paris. Elle à d'ailleurs dut longuement négocier avec mon grand-père pour que l'on ne m'y envoie pas.
Ma mère aimait beaucoup les livres. Elle me contait, je m'en souviens, le soir avant de m'endormir toutes sortes d'histoires de héros, de preux chevalier, de belles princesses et de terrifiants dragons. J'aimerai tant à nouveau pouvoir l'entendre. Elle me manque tellement.
Comment avez-vous connu ma maman ? Vous a t-elle écris à propos de moi ? Pensez-vous qu'elle est morte par ma faute ?
Oh, je sais bien. Je n'aurais jamais du m'enfuir ainsi. On n'abandonne point ainsi sa tendre mère. Je sais ce que vous pensez de moi : que je ne méritais pas une mère comme celle-ci et que si elle n'est plus aujourd'hui, c'est de ma faute.
C'est vrai ! Il y a de cela bientôt huit mois, je me suis enfuis de la maison. J'ai abandonné ma mère et ma famille.
Mais j'ai pris soin de la rassurer, elle n'a jamais sut ce qu'il m'était réellement arrivé ni tout ce que j'ai vécut depuis mon départ.
Il est vrai que je l'ai laissé un certain temps sans nouvelle. Mais peu de temps avant qu'elle ne parte, je lui ai écris pour lui dire que j'étais vivant, à Loches en Touraine, et heureux. Je le suis.
Elle pensait que j'étais entrain d'économiser pour me lancer dans le commerce comme grand-père, et que j'attendais la femme avec qui je me marierai et avec laquelle je bâtirai une grande famille. C'est on ne plus compliqué, mais je ne veux point vous embêter avec ma vie.


Que le Très-Haut vous protège, Madame.



Grimoald Lefebvre

_________________
Calixteconstantinm
La carrière d'Albi était fermée depuis trois jours. Donc depuis trois jours, Calixte n'avait aucune autre occupation que de contribuer de mauvaise foi au service de l'église de la ville. Cela, elle ne pourrait jamais le nier: elle avait toujours détesté et fui comme la peste les lieux saints. Mais en ce temps frisquets où l'argent devenait nécessaire à la survie, Calixte savait qu'il fallait courber l'échine et préférer serrer les dents que s'éteindre de faim et de froid.

En cette journée du Lundi dix-neuf décembre, alors qu'elle revenait de l'église et se dirigeait à pas vifs vers la moiteur rassurante de sa chaumière, il lui prit la douce fantaisie de se plaire à passer chez le pigeonnier du village. Peut-être aurait-il reçu un épître lui étant adressé? Elle bifurqua promptement. Le petit commerce logeait à l'ombre de la rue adjacente. Quelques minutes de solitude plus tard, elle poussait la porte en bois recouverte d'un léger givre. Fin de la vingtaine, grand et portant honorablement la moustache, le faciès et la carrure du pigeonnier avaient toujours su plaire à la jeune femme. Secouant ses bottes sur l'épais tapis trônant dans l'entrée, elle laissa retomber le capuchon de sa cape sur ses épaules, s'avançant vers lui avec un de ces sourires avenants. Quelques répliques plus tard, il lui remettait une lettre qui avait, semblait-il, eu un voyage plus ardu que d'accoutumée.

**

Assise au bord de sa couche, Calixte décacheta d'un pouce habile le sceau et déplia prestement le courrier. À mesure que ses yeux parcouraient cette écriture d'homme, l'émotion étreignait impitoyablement sa gorge. Lire cette lettre n'était qu'une acceptation. Elle admettait que sa chère amie n'était plus. Cette lettre qu'elle se plaisait à lire et en détestait à la fois la vue ne pouvait que lui offrir le faible réconfort de savoir qu'il persistait encore, en quelque sorte, l'essence de la défunte en son fils. Il semblait inquiet, peut-être était-il plus rongé de remords que ce que cette écriture placidement étalée suggérait. Peut-être, aussi, se sentait-il plus apeuré à l'idée d'avoir, comme il semblait le penser, été la cause de ce décès. Le crime de la conscience est parfois le plus facile à commettre, et également le plus difficile à omettre. Calixte se saisit d'une plume et traça quelques lignes à l'endos de cette même missive.

Citation:

19 décembre...

De Calixte Constantin Mahault à Grimoald

Puisque vous ne semblez vouloir porter les marques de respect que le simple port du titre de Messire ou de Monsieur, je vais opter pour votre prénom. Grimoald, donc. J'écris donc ma réponse à l'endos de la vôtre; je suis actuellement à court de papier, comme vous devez vous en douter. Votre courrier m'a à la fois émue et troublée. Comment se fait-ce que vous vous sentiez coupable de son décès? Il est parfaitement acceptable qu'elle vous manque. C'était une femme formidable. Elle manquera à beaucoup plus de personnes qu'elle ne le croit. Qu'elle ne le croyait... Votre sort l'inquiétait grandement. Elle vous aimait tant. Sachez que ce n'est point votre fuite qui l'a menée au tombeau. Elle pensait que c'était la route qui vous était nécessaire d'emprunter afin de devenir un de ces riches commerçants qu'on rencontre se baladant sur de plus fiers destriers que ceux de l'armée elle-même. Elle m'écrivait souvent à votre sujet. Elle se complaisait à inventer, à tracer de toute pièce chaque éventualité qui pourrait se révéler être votre avenir. Passant des situations les moins souhaitables aux plus enviables, elle concluait toujours ses cocasses estimations en disant vous aimer inconditionnellement quoi qu'il arrive. Votre mère n'allait pas toujours très bien, vous devez vous en douter. Parmi les plus beaux sourires se cachent parfois les pires tourments. Ce n'est pas de votre faute. Je pense d'ailleurs que cette lettre que vous lui avez fait parvenir l'a rassurée. Elle savait peut-être qu'elle allait quitter ce monde. Elle s'y accrochait peut-être afin de ne point mourir sans savoir ce que vous étiez advenu? Vous connaissiez son insatiable curiosité... Je manque d'espace, cette feuille est malheureusement trop courte. Pardonnez mon écriture rétrécissant de ligne en ligne. Je vous salue avec tout le respect que je puis vous témoigner sans vous affubler d'un Monsieur ou d'un Messire. Oh! et tant que nous y sommes, ne me qualifiez donc pas d'un Madame. Je ne suis pas noble...

Veuillez agréer à mes plus sincères amitiés, Grimoald.

Calixte
Grimoald
Ces derniers jours avait été terrible pour le jeune nain.
Il avait bien failli tout perdre. Il faut dire qu'il avait le don de s’attirer des ennuis.
Il lisait et relisait la lettre de cette Calixte. Cette femme l'intriguait. Elle était l'amie de sa mère. Et le nain s'y était attaché. Il devait lui écrire. Sa mère avait entretenu une correspondance durant toutes ces années avec cette demoiselle. Il se devait de faire de même.
Il ne savait pas qui était cette femme, mais il lui écrivait. Si elle était proche de sa tendre mère, ce ne pouvait être qu'une bonne personne.
Le nain se sentait coupable de la mort de sa pauvre mère. Les mots de Calixte l'avait peut-être rassuré, un peu. Il n'en était pas moins persuadé que s'il n'avait pas quitter la maison, elle serait toujours en vie.
Mais le nain avait préféré ses rêves d'aventures. Ils l'avaient mené ici, dans cette taverne appartenant à sa maitresse, une taverne renommée de la capitale tourangelle dont il était le tavernier.

Sur le comptoir débarrassé, à cette heure avancée de la nuit, des ivrognes venus boire leur salaire journalier, il prit sa plume, la trempa dans l'encrier et commença à écrire :



Citation:
Calixte,


Je ne sais par où commencer tant je me sens coupable de la mort de ma douce maman. Nous étions très proche et si elle était mal, j'aurais du m'en rendre compte. Mais non, j'étais alors obnubilé par mes rêves d'évasion. Je rêvais d'aventures, de princesses à délivrer et de monstrueux dragons à combattre. Je rêvais de ce Mal à combattre de ce Bien à défendre. Je rêvais de ces aventures que ma mère me contait. J'étais alors naïf, c'est vrai. Et parfois, je me surprend à regretter ce temps où je n'avais à me soucier de rien. Ce temps où les jours s'écoulaient lentement aux rythmes des goûter, des dictées, des prières et des histoires du soir.
J'ai menti à ma mère. Je ne suis point à la recherche d'une honnête femme pour fonder une famille, je n'ai point l'intention d'économiser pour me lancer sur les traces de mon grand-père.
Je suis un simple serviteur, et je suis heureux auprès de ma maitresse. Mais voyez-vous, il n'y a plus de serviteurs chez les Lefebvre depuis quatre générations. Ma pauvre mère n'aurait pas compris.
Elle n'a pas su non plus pour les dettes que j'ai faites. J'ai beaucoup bu, et beaucoup joué. Je me suis même fait engagé dans une horde de mercenaire.
Mais ma maitresse m'a remis dans le droit chemin. Et même si je fais quelques bêtises, j'essaie d'être un homme bien.
Mais le monde des livres n'a pas grand chose à voir avec notre monde si dur et plein de danger.
Ma douce maman me manque...

Parlez-moi de vous Calixte. Ma mère avait peu d'ami, vous devez être une bonne personne.


Au plaisir de vous lire,


Grimoald

_________________
Calixteconstantinm
Citation:
Grimoald,

La raison pour laquelle vous ne recevez aujourd'hui qu'un bref épître aux lettres griffonnées est que j'ai commencé à devenir très occupée. J'ai décidé de travailler à mon instruction et de perfectionner certaines de mes connaissances. Il paraît également que la poste ralentit ces derniers temps. Avec la neige, les chevaux ne peuvent plus courir aussi rapidement. Passons du coq à l'âne ― je n'ai pas la tête à faire de longues phrases de transition. Je dois avouer qu'il arrive à tout le monde de rêver de ces histoires de princes et de princesses et de majestueux châteaux indestructibles. Tout le monde. Et ce n'est pas mal. Les rêveries aveuglent, oui. Mais peut-être avons-nous besoin de cet aveuglement. Parfois il faut qu'un évènement que nous ne puissions prévenir nous sorte de cet aveuglement et nous montre que la vie ne peut-être qu'illusions. Et puis, oui, vous avez menti à votre mère. Ne croyez-vous pas qu'il est plus heureux que le temps l'ait gagnée avant qu'elle ne se réveille de ses illusions? Elle a été réaliste et lucide toute sa vie. Elle a été désillusionnée tellement de fois qu'elle pensait que le monde n'était que tromperie. Elle était heureuse de savoir cela. La seule pensée de savoir que vous cherchiez une femme et économisiez pour vous procurer votre échoppe faisait d'elle la femme la plus heureuse sur Terre. Même si tout cela était faux, ne devriez-vous pas vous réjouir d'avoir créé ses moments d'ivresse illusoire? Tout le monde en a besoin. Imaginez le chagrin et le sentiment de traîtrise qu'elle eût éprouvé envers toute son existence si elle n'avait pas pu profiter de rêveries? Pensez-y... Et puis si vous êtes heureux dans votre mode de vie actuel, sentez-vous encore moins coupable. Parce qu'il n'y est qu'une chose, une seule, qu'une mère aussi attentionnée et aimante qu'elle fût veut: que son enfant soit le plus heureux sur Terre. Je suis franchement désolée de devoir conclure cette lettre sur une note qui peut paraître aussi clichée. Mais sincèrement, ne vous sentez plus coupable d'être heureux. C'est ce que votre mère aurait voulu, inévitablement. Souriez à la vie... Soyez heureux, pour elle.

Calixte
Grimoald
Le jeune nain à bouclette venait d'arriver à Loches le matin même. Il avait reçut la veille la lettre de l'amie de sa mère.
Il conservait précieusement toutes ses lettres. Elle était son dernier lien avec sa douce maman à qui il aimerait tant poser tout plein de question. Sa mère lui manquait et la lettre que lui avait envoyé Calixte lui avait du bien.
Il avait besoin qu'on lui dise qu'il n'était pas coupable. Il s'en voulait le blondinet. D'un côté, il était heureux auprès de sa maitresse. D'un autre côté, il aurait tant aimé revenir en arrière et ne jamais avoir abandonné sa douce maman. Mais voilà ! Ce qui était fait était fait. Il ne pouvait plus revenir en arrière. Il allait devoir continuer à avancer, vaille que vaille...

Assis en tailleur sur une chaise, près du feu qui brûlait dans l'âtre, il prit sa plume et un morceau de parchemin et se mit à écrire.


Citation:
Calixte,

Vos mots me touchent et me réconfortes à la fois. J'ai été bien naïf, et je le suis encore. La vie me faire peur et je la découvre chaque jour un peu plus. Je ne m'attendais vraiment pas à ça... J'ai fait des choses de mal. Je n'en suis pas fier.
J'ai toujours voulu faire le Bien. C'est ainsi que maman m'avait élevé, pour faire le Bien - et un peu aussi pour faire du commerce, ou de la politique, c'est vrai -.
J'ai tant de choses à raconter. Je vous dois la Vérité. Si j'ai été trop lâche pour la dire à maman, je veux vous la dire à vous. Elle n'aurait sûrement pas aimé que je vous mente. En vous racontant mon histoire depuis ma fugue, c'est un peu comme si je la racontais à elle. Vous étiez son amie. Probablement sa seule vraie amie...

Ma mère m'avait envoyé suivre ma pastorale à Thiers. Ce matin du 24 avril 1459, j'ai sauté du fiacre et j'ai pris mes jambes à mon cou.
J'ai fait quelques rencontres à Thiers... des bonnes, et aussi des mauvaises. J'ai passé le plus clair de mon temps à m’enivrer et à dépenser tout ce que je possédais et même plus au jeu. J'ai fait énormément de dettes. Aussi, un soir, alors que les hommes de Jojo le Borgne devait me faire la peau, une jeune femme est apparue. Elle m'appris la vérité sur mon père, et je la suivis. Elle appartenait à une horde de mercenaire qui ne tardât point à me confier ma première mission.
Je devais me rendre à Loches pour véhiculer de honteux mensonges à propos du maire en place. Ceci n'avait pour autre but que de lui faire du mal et de déstabiliser la ville.
Je me suis rendu en cette ville, et la bourgmestre ne tardât point à me mettre la main dessus.
Je ne vous embêterai point avec les détails. Mais au final, celle-ci fut bonne avec moi. Elle m'évita la prison, et me remis sur le droit chemin. Je devins son serviteur. Plus tard, elle devint même ma Marraine...
Je n'ai point à ma plaindre. Je suis en sécurité à présent. Et même si parfois je fais des bêtises, celle-ci ne sont jamais aussi graves que celle que j'ai pu commettre durant ces deux mois où j'ai être un "adulte".

Je ne veux plus être un "adulte" à présent. Je suis heureux auprès de ma maitresse et de mes amis...

Je vous souhaites un Joyeux Noël.
J'attends avec impatience maintenant de vos nouvelles.


Grimoald


Il posa sa plume et sécha une petite larme qui perlait sur son visage. Ce noël, c'était le premier noël sans sa maman...

_________________
Calixteconstantinm
Le mince tissus de la cape dont elle s'était enveloppée suffisait à peine à contenir l'humidité de cette froide journée de célébrations. Les portes étaient fermées, mais on devinait aux ombres qui allaient et venaient aux fenêtres qu'il s'agissait d'une journée de réjouissances. Sur le chemin du marché, le gueux qui était habituellement posté près du poteau servant à attacher les chevaux marchait avec reconnaissance dans les pas de quelque gentilhomme qui lui eût proposé de partager quelque repas. La chaussée mi-terreuse mi-gelée s'empreignait des pas des gens affairés et moins occupés qui allaient et venaient. Les commerçants aux joues rosies souriaient avec entrain et leurs yeux semblaient plus avenants que d'accoutumée. Des frissons gagnèrent bientôt la jeune femme; le cuir de ses bottes était mince et elle commençait à avoir les pieds gelés. Elle se hâta d'acheter sa miche de pain quotidienne ainsi qu'une tasse de lait puis se dirigea, ses courses au bras, vers sa chaumière qui était à quelques minutes de là. Elle avait reçu la lettre de Grimoald et songeait en marchant à la réponse qu'elle allait lui donner. Quelque trimard la dépassa en l'évitant de justesse d'un mouvement d'épaule de mauvaise foi, grommelant que tout le monde était bien trop joyeux et que tout n 'était qu'empreint d'attributs factices et utopiques dissimulant tant bien que mal la réelle nature humaine.

**

Calixte poussa la large porte en bois et, comme à son habitude, dégrafa sa cape et la laissa choir au sol. Lorsqu'elle eût verrouillé la porte derrière elle, elle déposa la miche de pain et la bouteille de lait sur un coin de sa table et s'assit sur l'unique chaise qu'elle possédât. Nouvellement approvisionnée en papier et en encre, elle trempât le bout de sa plume dans l'encre, sourire aux lèvres, et regarda le noir de l'encre s'imprégner avec une satisfaction aiguillonnée de délices.


Citation:
Grimoald,

Certaines personnes se plaignent de n'avoir personne avec qui célébrer en ce jour de Noël. Cela aurait pu être mon cas; mais votre lettre m'empêche toute possibilité de plainte. Qui n'a plus d'heureuse compagnie que les mots? Soit dit en passant, je vous renvoie également vos souhaits et vous souhaite un bien joyeux Noël. Ne vous laissez pas vous démoraliser par la sourde absence de votre mère. Je sais très bien ce que vous ressentez. Souriez, forcez-vous à sourire et à marcher avec allègrement dans les ruelles enneigées. La gaieté gagnera votre âme malgré vos réticences et vous trouverez de quoi vous réjouir. En lisant votre courrier, j'en suis arrivée à un seul fil de pensées: vous avez fait cela pour votre bien. Je me plais souvent, vous savez, à me dire que rien n'arrive pour rien. Certaines personnes commettent des erreurs tout au long de leur vie, mais tout cela n'a qu'un seul et même but; être au bon endroit au bon moment. Vous vous êtes trouvé au bon endroit au bon moment. Votre mère en aurait été heureuse, ne serait-ce que de savoir que vous l'êtes. Sur ce, la neige a cessé de tomber, je dois aller travailler. Je vous souhaite une heureuse journée.

Mes plus tendres salutations en ce jour de Noël,

Calixte
Grimoald
Une dizaine de jours s'étaient écoulés depuis qu'il avait reçu la dernière missive de Calixte.
Il l'a lisait et la relisait, ainsi que ses précédente lettre. Elle était l'amie de sa mère, la seule peut-être...
Et il avait tant de choses sur le coeur notre nabot... Il avait besoin de conseil...
Aussi, il prit plume et vélin et se mit à gratter.


Citation:
Très chère Calixte,

Voici longtemps que je ne vous ai point écrit. J'en suis navré. J'avais quelques affaires prenante ici, à Loches.
Car je suis enfin de retour à Loches, auprès de ma maitresse. Je n'avais revu cette ville depuis la fin du mois d'aout, lorsque j'ai rejoins ma maitresse qui commandait une armée dans la Capitale. Et puis, il y eu les premiers combats, et enfin la prise de Tours par les armées ponantaises. J'ai été grièvement blessé, laissé pour mort sur le champ de bataille. Les médicastre m'avaient prescrit quarante-cinq jours de repos. Me voilà complètement rétablis.
J'ai fait la guerre.... Chez les Lefebvre, on ne fait la guerre. Grand-père doit sans doute rager, et maman pleurer toutes les larmes de son corps. Elle n'avait jamais voulu que j'ai même une petite épée en bois. Elle refusait que je joue avec les autres garçons du village de peur que je me batte, et que je me fasse mal.

Mais je suis heureux ici, à Loches. Je me suis fait de nouveaux amis, de nouvelles rencontres.
En ce moment, je veille sur les remparts de la ville en attendant le retour de l'armée. Les nuits sont longues, et froides...

Il y a tant de choses que j'aimerai vous raconter. Dans mes prochaines lettres, je le ferai.

Et vous, comment allez-vous, Calixte ?



Que le Très-Haut vous protège,



Grimoald



Il posa plume et vélin... relit la lettre, l'accrocha à la patte d'un pigeon et vaqua à ses occupations...

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