[RP] Aveuglément orangée

Delta.

Une main, ferme, mais douce, s'attacha au bras de l'aveugle pour l'attirer hors de la fosse aux politiques. Elle ne se doutait pas encore, la propriétaire de la main, qu'Historis y replongerait d'elle même peu de temps après. Mais là n'était pas le sujet...

Elle la mena à l'Hydromélide, seul lieu de réelle tranquillité qu'elle appréciait totalement, elle ne parla pas, ou très peu, durant le trajet, laissant les pieds de la non-voyante mémoriser un tant soit peu le chemin.

Une fois arrivées, elle l'installa à une table, leur servit un verre de son hypocras maison et s'assit en face d'elle. Que la jeune femme boive de l'alcool ou non, la question n'était pas même posée.

- Ainsi, Damoiselle, vous cherchez un emploi ? Il se trouve que nous pourrions avoir besoin de vos services...

Léger sourire, sans doute perceptible dans sa voix, elle ne masquait en rien le plaisir qu'elle éprouvait à proposer un poste à Historis.

- Voyez-vous, nous recherchons une dame de compagnie, et, en vous entendant tout à l'heure, nous nous sommes dit que vous seriez parfaite pour cette place.

Parfaitement aveugle, surtout, mais elle n'allait pas le dire ainsi. Elle continua néanmoins, ne laissant guère le loisir à son invitée d'en placer une.

- Vous êtes fort jolie, avec quelques éléments supplémentaires à votre garde robe, vous serez effectivement parfaite. Bien sûr, vous seriez rémunérée à hauteur de vos services, logée, blanchie, nourrie. Nul souci là dessus.

Elle se pencha vers son interlocutrice, souriant toujours.

- Connaissez-vous le travail de dame de compagnie ?

Puis passant du coq à l'âne, après avoir bu une gorgée de son cher hypocras.

- N'est-il pas délicieux ?
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Historis

Aveugle elle l'était sans nul doute et si la Comtesse y voyait déjà un potentiel intérêt pour elle, elle ne se doutait pas que bientôt elle en verrait un encore plus utile sans doute.

Pour le moment, en revanche, Historis se laissait bercer par le ton doucereux faussement sincère de la dame qui lui faisait face. Un verre lui fut servie et elle osa y tremper ses lèvres pour découvrir avec ravissement le goût où se mélait la douceur du miel et le pétillant des épices.
Elle ne put s'empêcher d'entendre en pensées les mots que Monseigneur Drak avait prononcé durant sa pastorale. Elle comprenait enfin réellement que Sainte Boulasse ait été aussi sereine lorsqu'elle se faisait torturer. En effet être saoulé jusqu'à la mort pouvait être terrible mais cela rester un moindre mal lorsque le vin était bon.

Si la douceur du vin l'avait amenée à rejoindre un instant ses pensées, elle fut très vite rappelée au monde par une proposition de la comtesse. Être aveugle n'était guère facile pour gagner son pain : cultiver son champs lui était impossible, elle devait embaucher mais n'avait pas toujours de quoi payer les salaires ; travailler à la mine était épuisant et même si elle le faisait sans rechigner elle se doutait au ton du superviseur qu'elle rapportait parfois avec elle des cailloux au lieu de minerais.

L'idée d'être dame de compagnie la séduisait et la Comtesse semblait tellement aimable, tellement dénuée de vice qu'elle aurait dit oui sans hésiter si elle n'avait pas douter de ses propres capacités à assumer cette charge. De plus, elle fut extrêmement surprise par le dernière question de son interlocutrice. Comment pouvait-elle à la fois lui demander si elle connaissait ce métier et s'il était délicieux ?

Euh... je ne saurait dire s'il est délicieux... Je ne connais pas du tout ce métier.

Et oui non seulement elle était aveugle, mais en plus elle était naïve la marseillaise. Ne serait-ce pas là un nouvel atout pour la comtesse ?
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Delta.

Un rire léger, tout frais sorti de la bouche de la Comtesse s'égrena dans l'air en notes douces. Jehanne riait face à tant de fraicheur. Pas tout à fait calculatrice sur ce coup, juste amusée, appréciant la naïveté de son interlocutrice à sa juste valeur. Le rire n'avait rien de moqueur, il sonnait juste, naturel. Un bref instant Jehanne avait laissé la place à Delta, et pour une fois, cela n'avait rien de lubrique.

Une envie de caresser la joue qui lui faisait face la prit, tendrement, comme on l'aurait fait à un jeune enfant qui viendrait de se mélanger dans l'apprentissage des mots. Elle n'en fit rien, bien entendu, la chère enfant aurait pu mal le prendre. Quand elle reprit la parole, ce fut d'une voix douce, sincère, qu'elle formula ses propos.

- Nous parlions de l'hypocras, du vin qui est délicieux... Il est de notre fabrication, notre péché mignon...

Elle ponctua d'ailleurs ses paroles d'une gorgée goulue, pour le plaisir, et puis, elle était aveugle en face, non ?

- Quant à ce métier... Une dame de compagnie est, comme son nom l'indique, la personne qui tient compagnie à sa maitresse. Elle est payée pour lui faire la conversation, pour l'accompagner partout où elle le désire... D'ordinaire la dame de compagnie aide à la mise en plis de la tenue... Ici ce sera sans doute l'inverse. Si vous acceptez ce poste, vous mangerez à notre table, logerez en notre castel ou notre hôtel, vous nous accompagnerez partout... Mais rassurez-vous, vous aurez aussi du temps libre...

Elle laissa ses mots en suspend afin qu'Historis les intègre bien, puis ajouta, plus bas, sur le ton de la confidence.

- Une dame de compagnie est aussi la gardienne des secrets de sa maitresse...

Jehanne était de retour...
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Historis

Oh ! laissa échappé Historis se rendant compte de sa méprise. Fort heureusement la douceur et la chaleur dans la voix de son interlocutrice eurent vite raison de son embarras pour laisser place à un sourire.

Percevant le léger son d'un breuvage qui s'écoulait dans le gosier de la Comtesse (aveugle mais pas sourde la marseillaise), elle crut bon de prendre à son tour une gorgé d'hypocras. Tant par politesse face à une femme qui semblait fière de sa cave que par gourmandise. La femme avait raison d'être fière de sa cave.
Ce faisant, elle eut tout loisir d'écouter avec attention la description du métier de Dame de Compagnie.

Manger à leur table... loger en leur Castel... l'accompagner partout... Elle se demandait si elle saurait faire honneur au rang de la Comtesse. Il s'agirait si elle acceptait de ne point lui faire honte.

Garder les secrets... ce passage lui semblait plus simple. La confiance est une valeur qui lui avait été inculqué dès son plus jeune âge. Bien mal lui en prenait, elle était naïve !

Madame... euh enfin Comtessa...

Sourire mal à l'aise

hmm... ce qu'il fallait dire !
Je ne sais rien du protocole et de la bienséance. Si votre proposition est fort alléchante, je crains de ne pas être à la hauteur pour vous servir en société...

Plus bas à son tour.

Ce ne sont pas les secrets qui m'arrêtent bien au contraire, c'est important la confiance mais... comment ferai-je si je ne sais pas m'adressser à vos pairs ?

Elle reprit une lampée de son verre avant de continuer sur un ton moins discret.

Ne pensez-vous pas pouvoir être mieux servie par une personne de meilleure éducation et qui ne soit pas... aveugle ?
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Delta.

Jehanne s'interrogea un instant. Jehanne... ou plutôt Delta... Fallait-il jouer de franchise ? Dire les choses clairement ? Peut-être...

- Nous vous apprendrons, ça n'est aucunement un problème...

Elle sourit à la jeune femme qui lui faisait face, celle-ci ne pouvait voir ses lèvres étirées en une jolie moue amusée, mais nul doute qu'elle entendait la douceur et l'amusement présents dans sa voix.

- Nous sommes persuadée que vous apprendrez très vite, votre esprit est vif, votre soif d'apprendre, importante... Notre époux nous a conté que vous vous intéressiez aux lois, que vous vouliez connaitre les règles qui régissent la vie au sein de notre Comté...

Elle leur versa une nouvelle rasade d'hypocras.

- Nous vous confierons aux bons soins d'un page, un être charmant toujours prompt à aider son prochain. Il sait lire et écrire, il vous accompagnera, si vous le souhaitez...

Elle laissa sa phrase en suspend et reprit, sur le même ton qu'elle avait utilisé pour parler des secrets...

- Quant à la vue... Vous savez, pour garder des secrets, il faut parfois savoir fermer les yeux...

Tout était dit... Quoi de mieux qu'une aveugle pour ne pas voir les évidences ? Elle leva son verre, geste invisible pour celle qui lui faisait face, cette jolie femme au regard éteint... Et pourtant si vivante, étonnante de vivacité.

- À notre association !

Lui forcer la main ? Elle ? Noooon...
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Historis

Historis était émue par l'insistance de la Comtesse. Elle trouvait flatteur d'avoir été choisie elle pour être Dame de Compagnie et la générosité de Jehanne semblait sans limite ; un page pour l'aider rien que ça !

Elle leva son verre à son tour tout en se perdant dans ses pensées.
Cette femme semblait si douce, si généreuse, si vertueuse... Oser ou se taire ? Telle était l'hésitation de l'aveugle.

J'accepte alors !, dit-elle en ne cachant pas son sourire et en portant le verre à ses lèvres.

Comtessà..., ajouta t-elle hésitante après que le chaud liquide se soit écoulé dans son gosier. Je ne sais comment vous remercier, et même... j'aurai une demande à formuler auprès de vous en priant pour que cela ne soit pas malvenu...

...accepteriez-vous d'être ma marraine lorsque j'aurai terminé la pastorale dont Monseigneur Drak a bien voulu s'occuper ?

La question était posée. Historis ne cherchait pas la noblesse dans ses liens elle était très clairement éblouie même aveugle, par les qualités humaines qui se dégageait de son interlocutrice. Car être aveugle si on a de l'intuition n'est pas un mal mais si c'est doublé de naïveté, il est alors aisé de faire erreur et justement, Historis nageait dans la naïveté.
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Aveuglément orangée

Historis

Delta.

Historis

Delta.

Historis

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