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[RP] Quand on veut s'attaquer à plus fort que soi

Astana
Noir charbon. Noir ténèbres.
Telle est la couleur de la nuit, ce soir.


Noyée parmi la foule grouillante de la ville, la Danoise déambule de pavés en pavés, avec cette expression indéchiffrable qui lui sied si bien. Une palette d'expressions qui se succèdent, sans queue ni tête, assombrissant un regard, illuminant une esquisse de sourire, en un soupir, un battement de coeur. L'âme erre sans réel but, jusqu'à s'éloigner des rues fréquentées, sans même s'en rendre compte. Simplement marcher, aussi longtemps que ses jambes pourront la porter. Les minutes défilent à une vitesse faramineuse ; aussi se fait-elle fantôme d'un futur déjà perdu. Bientôt, elle franchit les portes de la ville, ramenant alors la capuche de sa pèlerine sur le sommet de son crâne blond, d'une main opaline. Ombre.

Inspirer. Expirer.
Inspirer. Expirer.

Emplir ses poumons d'air, profiter de sa pureté, en quelque sorte. Et continuer à marcher, toujours.
Jusqu'à se fondre dans le décor, et se trouver suffisamment éloignée de la ville pour ne plus y voir grand chose.


Là. Quiétude retrouvée.
Le sommeil manqué et les nuits passées à cheval avaient eu raison de la "bonne" mine de la jeune femme. Sans compter la sous-alimentation, pour une raison X. Aussi, son visage s'en trouvait marqué, les joues creusées, le teint blafard. Rien de grave dans tout ceci. De squelette ambulant à cadavre, il n'y a qu'un pas, de toutes façons. Néanmoins, au fil des rencontres - et des retrouvailles pour le moins inattendues -, la fatigue s'était évaporée ; et pesait lourd, désormais. Sournoise fatigue, qui choisit bien le pire des moments pour frapper.

S'arrêter alors. Auprès du premier arbre venu en bordure du chemin. Le chêne est massif, ce qui la fait sourire légèrement, et penser à Lhyra dans le même temps. Ah ! Nul doute que Lhyra trouverait quelque phrase de circonstance à dire, face à tel arbre. Une de ces phrases qui paraissent vides de sens, incompréhensibles, et qui sont pourtant tellement parlantes. De l'être au paraître, il y a une multitude de détails, de nuances : une abysse, en somme. Mais ça…
Ses mains viennent bien vite fouler la terre pour en chasser les brindilles et autres cailloux inconfortables, avant de venir y échouer son corps tout entier. Oh bonheur éphémère. Finalement un endroit loin du tumulte de la Vie, où se retrouver. L'éphémère a son charme que l'éternité n'a pas. Astana déteste tout ce qui est figé.

Presque instinctivement, elle porte la main à sa besace, en quête d'une quelconque bouteille pour l'accompagner.
On reste dans l'éthylisme… ou pas.
Nulle bouteille à l'horizon, non, non. Rien. Le néant.


Mais qu'est-ce que j'fous là… ?

Grognements.
Sans alcool, la fête est moins folle. Et puis, c'est un peu sa boisson de base, ça, l'alcool. L'eau, il paraît que ça augmente les risques d'étouffement, d'après la Colombe.
Alors quoi ? Attendre ? Faire demi-tour ? Dans le genre butée : Astana, modèle 1460. Hors de question qu'elle bouge sans alcool. Il ne reste plus qu'à attendre, donc. D'ici le lendemain, y'aurait bien une âme charitable - ou mal intentionnée, voire sans intentions tout court - qui passerait par là pour lui donner de quoi s'abreuver. Quitte à ce qu'elle la lui arrache à coup de dents.

Rha, et dire qu'elle avait osé dire un peu plus tôt dans la journée que l'espoir était une vertu d'esclave...
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Khal
I'm dying.

Le feu dessine les courbes des femmes à moitié nues, la poitrine dansante, le corps possédé par le rythme fou des tambours. Leur cri, unique, s'élève et claque l'air comme les mains sur le cuir des tamtams. Le rythme ralenti. Les corps se détendent, tombent à terre et se lient à la poussière. Elles avancent semblables à quelques lionnes en chasse. Sur leur visage rien de commun aux femmes de ce monde. Les traits séculaires semblent figés dans le temps. Descendantes d'une longue lignée de guerriers, de sorciers, de femmes esclaves, leurs sangs coulent dans leur veine, et ce soir leurs esprits se lient aux leurs pour ne former qu'un. Leurs griffent se plantent dans la terre, leurs genoux effleurent la caillasse tandis que des arabesques prennent forme sur le sol.
Marquant le rythme, les hommes les observent, leurs talons soulevant quelques gerbes de poussière, leurs mains caleuses jouant des instruments au rythme des ouhous féminins. Nul enfant parmi eux. Seulement des corps enflammés, de danseuses, de musiciens et d'hommes s'occupant de femmes. Les grognements emplissent les lieux, halètements, souffles courts et sons inarticulés tandis qu'ils les besognent sans vergogne aux yeux de tous. Ce soir ils ne font qu'un. Eux tous. Et les hurlements s'élèvent, rejoignant un ciel d'ébène.*

Et l'atteignent de pleins fouet, le laissant pantelant, assis sur sa couche, le corps brûlant, couvert de sueur. Ses poings se referment, sa mâchoire se crispe. Il se force à inspirer profondément et se lève. Dans l'air sa chevelure s'agite et dessine sur le sol quelques ombres serpentes et dansantes... Il ne prend pas la peine de s'habiller. Comme bien souvent par ailleurs. Pour seul vêtement, des braies noires, ses cicatrices et les peintures sur son torse. Qu'il soit libre de tout mouvement. Vivant.
Il s'avance vers sa jument noire, immense, aux muscles saillants qui se redresse aussitôt à son approche. Une main se pose sur le cou noir qu'il flatte machinalement, et saute sur l'animal non scellé. Et talonne sa monture d'un claquement de talon. Le paysage se fait progressivement tâches d'ombres, ses yeux se glacent, le froid glisse sur sa peau mais ne l'atteint pas. Il quitte cette ville morte. Cet enfer. Il laissera ses légumes pourrir. Il laissera leur maire prendre place et les rares pintes se consommer sans lui. Qu'importe. Il n'est pas homme du monde. Il n'est pas comme eux. Sauvage, indomptable, il ne vit que pour se battre. Les usages, les coutumes, les courbettes, les je tu il nous vous ils. Aux oubliettes. Il leur laisse volontiers. Un YA! claque tandis que l'animal accélère encore et qu'il se penche davantage sur sa monture. Ne faire plus qu'un avec elle, que le vent les traversent et ne ralentisse leur allure. Les remparts ne sont déjà plus depuis longtemps que ses oreilles bourdonnent et reprennent le rythme des tambours qu'il a du abandonner bien malgré lui. Il vomissait cette terre. Il haïssait ces lieux, sacrés à leurs yeux. Pitoyables pour lui. Il fallait qu'il s'éloigne, qu'il mette de la distance entre eux. Un terme à tout ça.
Et claquer plus fort l'animal, le pousser jusqu'à ce qu'il s'écroule d'épuisement. Qu'elle lui montre ce qu'elle a dans le ventre, qu'elle se batte et s'envole. Jusqu'à ce que le souffle sortant de ses nasaux se fasse sonore et que sa vitesse ralentisse d'elle même même si il ne l'accepte pas. Il ne l'acceptera pas. Pas ce soir. Pas maintenant. Pas au moment où ses frères de sang fêtent la naissance d'un enfant, le mariage d'un chef, la mort de l'un d'entre eux. Il commande. Il entend bien être obéit. Mais elle est tout ce qui lui reste de son chez lui. Alors il la ménage. Et ralentit l'allure tandis que d'autres remparts se profilent à l'horizon. Calmer l'animal d'un claquement de langue, qui s'agite, tourne quelques secondes en rond alors qu'il ne cesse de fixer les lueurs vacillantes de la ville. Deux claquements de langue. Elle se met au pas. Ensemble ils avancent sous la lueur froide de la lune qui illumine sa route. Il glisse une main sur sa barbe, pensif. Hésiter à traverser cette ville inconnue. La contourner? Éventuellement. Lentement, ils avancent, jusqu'à ce qu'il entende une voix de femme résonner à ses oreilles. Il fait cesser sa monture et se redresse, attentif, cherchant à détecter sa provenance. Et semble repérer un mouvement. Il ne cherche pas à atteindre sa lame. Il a ses mains. Cela suffira. Au cas où c'est un piège, il saura parfaitement se défendre, seul et sans arme. Il dirige sa jument vers l'inconnue, méfiant jette un regard alentours, puis s'arrête à quelques mètres de la femme. Son visage caché dans l'ombre de l'arbre est invisible. Seuls ses pieds apparaissent sous la lumière glaciale de l'astre blanc. Une femme donc. Seule.
Son regard ne cille pas. La surprise n'effleure même pas ses traits. Étrange pays que celui ci ou les femelles se revendiquaient libres...


Femme, montre toi.


La voix est grave. L'ordre claque dans la nuit, sans appel. Sans détour. Il attend, sur sa monture, qu'elle veuille bien sortir de sa cachette....

*Ambiance inspirée du livre premier de "Trône de fer"
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Astana

Bien vite, l'oreille se dresse, par réflexe. Si son corps ne bouge pas, et qu'elle continue à contempler l'horizon, du moins semble-t-il, tout n'est au contraire qu'attention, et écoute. Les routes ne semblent pas si désertes que ça, finalement. Une aubaine pour elle. Ses paupières se ferment, sereinement. L'Attente ne sera plus très longue, à présent. Un, deux, trois, quatre ; comme les sabots de la monture qui foulent la terre. Cinq, six, sept, huit ; et le cheval s'arrête tout net. Ainsi a-t-on repéré la Femme près de son Chêne. Etrangement, son rythme cardiaque accélère, elle sent l'afflux de sang cogner contre ses tempes et serre les dents. Mauvais présage. Ses sourcils se froncent légèrement lorsque l'animal souffle bruyamment, et elle imagine alors ses naseaux massifs s'élargir. On l'observe, avec minutie, et prudence, certainement. Lorsque l'on vous épie de la sorte, la sensation est loin d'être agréable : vous vous sentez nu, et le regard posé se fait fardeau, bourreau serrant votre gorge dans un étau. C'est alors que le coup de tonnerre surgit, il fend l'air nocturne pour frapper sa cible si vite qu'elle ne voit rien venir. La voix est rauque, animale, catégorique. Son sang se glace, et elle ouvre les yeux, brusquement.

La Peur ; c'est bien cela, qu'elle ressent à cet instant précis. Juste par ces quelques mots. La peur (et les hommes les plus hardis peuvent avoir peur), c'est quelque chose d'effroyable, une sensation atroce, comme une décomposition de l'âme, un spasme affreux de la pensée et du coeur*. Ce dernier fait un bond en sa poitrine. Pourquoi maintenant ? Depuis quand n'a-t-elle pas ressenti, éprouvé, de la peur ? Elle qui fait figure de bloc de glace, insensible, intouchable, se fissure de seconde en seconde, pour la ramener des années en arrière... Non ! Tu ne laissera pas un Inconnu te mettre en miettes, Astana. Reprends tes esprits. Tu as trop d'imagination. Ravales cette peur, fais-en une force. Lutte ! Voilà. Comme ça. Respire. Et maintenant : debout.

Elle rassemble alors ses jambes, et puise dans ses forces pour se mettre debout, toujours masquée par l'arbre. Remettre son masque, ne montrer aucune faiblesse, ne rien laisser au Hasard. Attendre que ses jambes cessent de trembler. Peu à peu, Astana redevient maitre d'elle-même. Aussi, jugeant que sa condition physique est acceptable, elle fait son apparition, baignée par le clair de Lune ; la figure dissimulée sous sa capuche. L'Astre caresse la silhouette masculine haut perchée, tout aussi massive que la monture qui l'accompagne. La scène est effroyablement inquiétante, son rythme cardiaque s'emballe de nouveau, mais elle reste stoïque. Les azurées prennent quelques instants pour détailler l'Étranger à la peau hâlée qui la domine, tout chez lui n'est qu'abondance couplée d'excès : posture, taille, membres, musculature, chevelure noire de jais ne faisant qu'un avec la nuit. Il lui fait penser à ces Dieux des anciens temps, dont on lui avait souvent parlé, mais qu'elle n'avait guère pu que peindre, tracer les contours, intérieurement.

C'est son âme qui se déchire, à cet instant précis. Mais elle est plus forte qu'il n'y paraît. Jamais elle ne laissera sa peau avant de s'être battue. Aussi fait-elle un pas en avant, veillant tout de même à rester à bonne distance du Colosse, et décide de jouer franc-jeu. La maitrise de soi et les mots, voilà bien tout ce qu'il lui reste. Tragique. De ses deux mains, elle fait tomber le dernier rempart qu'il reste entre eux, sa capuche retombe sur ses frêles épaules, libérant une crinière blonde abondante. Quitte à jouer à ce jeu-là, autant qu'il sache à qui il a affaire. Bien que de toute évidence, le fait d'être une femme n'y changera rien, vu le ton acerbe précédemment employé. Iris bleus teintés de gris qui viennent s'accrocher à ceux de son adversaire, froidement.


Qui êtes-vous pour oser me parler ainsi ?

Le ton est glacial, hautain. Invitant presque au conflit. En finir, et vite.
Il est déjà trop tard pour de quelconques regrets.



*Maupassant.
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Khal
Khal.

L'animal s'impatiente, ils s'agitent et attendent, jetant autours d'eux quelques regards avertis. Le vent se lève. Ses yeux se fixent. Légère caresse sur l'animal qui s'immobilise. Il attend. Un mouvement. Elle se lève, enfin. Fier sur son destrier, il n'esquisse pas un mouvement. La capuche s'abaisse et dévoile à ses yeux d'un bleu profond, le visage de l'Improbable. Il ne cille pas, se contente de la jauger, examinant chaque trait de son visage comme il étudierait quelconque adversaire. Son regard s'attarde sur le doré de sa chevelure qu'il ne peut que deviner en ce clair obscur. Chez lui, les femmes sont toutes brunes aux yeux sombres, la peau matte, le sein lourd, les hanches rondes et graciles. Sauvages et soumises. Celle ci différait en tout point de vu. Bien que drapée de sa cape, il devine que les formes sont moins maternelles que celles qu'il avait pour habitude de malmener. Ses cheveux pâles habillent avec grâce ce cou gracile et agité de spasmes. Il ne reconnait pas la couleur de son regard mais devine qu'il est clair, plus clair que le sien. Bien.
Elle semble furieuse. Sa bouche crache les mots tandis que son regard se fronce. Impassible, il continue de l'observer, fier et droit sur son perchoir. Insondable. Insensible. Une lueur amusée traverse cependant son regard sans que son visage ne change pour autant. Dans son pays, il l'aurait fait fouetté. Il l'aurait prise de force. Ou l'aurait tué tout simplement pour avoir osée lui parler de la sorte. Mais il n'est pas chez lui. Ne l'est plus depuis bien trop longtemps et certaines manières se sont érodées. Bien que présentes, elles se montrent plus discrètes, latentes. Ça n'est pourtant pas l'envie qui lui manque, bien qu'il serait regrettable d'abîmer le modèle sans même l'avoir vu au grand jour. Lentement, il parcourt son corps des yeux. Ce qu'il peut en voir tout du moins. Et laisse les secondes silencieuses s'écouler. Seule la respiration de l'animal est audible. Le reste semble mort.
Lentement, il descend de son cheval pour se retrouver face à elle. La dominant de deux bonnes têtes, il ne prend pas la peine de baisser le visage, les yeux suffiront. Sur son corps, la lune joue avec la courbe de ses muscles et dessinent sur son torse de nombreuses ombres. Lentement, une main se perd dans sa barbe avant de venir se poser sous le menton de la blonde pour qu'elle lève son visage. Le geste est doux bien qu'impérieux. Il maintient quelques secondes le bas de son visage tandis qu'il plonge son regard dans le sien. Y déceler avec satisfaction un soupçon de peur, de colère, d'hésitation. Il relâche la pression en lui laissant sa mâchoire et écarte machinalement une mèche rebelle venue jouer avec ses cils. Que rien ne vienne perturber son examen. Si elle souhaitait se rebeller, il faudra qu'elle attende qu'il dorme. Ici, comme ça, elle ne pourra rien lui faire. Et le lui fait comprendre en un battement de paupières. Bien entendu, elle pourrait tenter... Mais cela sera à ses risques et périls.

Sans un mot, il se retourne et rejoint sa jument. A peine un regard pour elle, pas de main pour flatter l'encolure que déjà il est sur elle et jette un regard à l'horizon. Il reporte son attention sur la blonde, l'examine de nouveau puis lâche sans plus de fioritures:


Khal.

Le cheval s'agite à nouveau, pour la calmer, il talonne sa monture qui s'envole au galop et s'éloigne des lieux. La laisser planter là. Seule. Il savoure le vent giflant son visage et sa longue tresse volant dans l'air. Il savoure le calme retrouvé. Il n'aime pas parler. A la limite écouter. Et encore, cela dépend des circonstances.
Puis il pousse sa monture à faire demi tour. Cela n'a prit que quelques minutes, cela a du ressembler pourtant à une éternité. Ils s’arrêtent à nouveau prêt de l'inconnue qui n'a semble-t-il pas bougée. Les tamtams se sont tus. Il savoure le silence apaisant d'une longue nuit calme à venir. Quelques secondes à peine. Posant un regard sur elle, il se questionne. Et laisse ses réflexions à plus tard. Il se penche légèrement, plonge son regard dans le sien et lui tend la main.


Viens.
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Astana

Tel un prédateur guettant sa proie qui réfléchit à la meilleure tactique pour venir y planter ses crocs, l'Étranger l'observe. Elle ne cille toujours pas, bien que sa panique intérieure soit presque palpable. Si ses yeux sont emplis de fureur, son corps trahit un profond malaise. Sa poitrine se soulève par à-coups, c'est à peine si elle ose respirer à pleins poumons, appréhendant d'ores et déjà la suite. Habituellement, c'est elle qui domine la danse macabre, pas l'inverse. Le conflit interne est de taille ; lorsque l'âme lui crie de se maitriser, le coeur s'emballe et cède sous le coup de l'émotion. Lequel des deux prendra le dessus ? Etrangement, lorsqu'il descend de sa monture pour s'approcher au plus près d'elle, le calme se fait sentir. Il ne semble pas agir sous le coup de sombres desseins. Le sang-froid revient, et quelque part la raison avec. Ça ou... la colère, l'indignation... pour cette main posée sous son menton, qui l'oblige à le regarder droit dans les yeux, tandis qu'il poursuit son examen, impuissante. Une marchandise, voilà ce qu'elle est. Elle se raidit et serre la mâchoire à ce contact qui n'a rien d'agréable. Un objet, rien de plus. Si elle le pouvait, elle frapperait. Mais il broierait sa main en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Elle est au pied du mur et n'a aucune échappatoire.

Sans crier gare, il se retourne et chevauche sa monture. Ce qui la déstabilise grandement. Comment est-ce possible ? Non, il ne partira pas comme ça. Impossible. Et puis, la réponse à sa question précédente vient finalement. La voix est plus douce. Son prénom, la consonance qui va avec. Et... son ombre qui file à toute vitesse vers l'horizon. Un soupir s'échappe de la barrière de ses lèvres, presque imperceptible. Astana n'a pas bougé d'un poil, les yeux fixés sur sa silhouette défilante. Perdue. L'incompréhension est totale face au mystère de cette rencontre. C'est une sorte de déchirement qui la traverse de part en part, avec un goût amer dans la bouche. Celui de l'inachevé. D'un Inconnu touché du doigt s'étant évaporé si vite qu'elle n'en connaîtra jamais la saveur. Un mirage : un brin d'herbe dans le désert ayant le toupet de faire croire que l'espoir existe encore. Le coeur parle, l'âme se tait.

L'improbable survient. Le voilà qui refait son apparition, toujours aussi fier. Instable personnage. Mais elle l'est tout autant. Il a joué avec ses nerfs. Elle s'est oubliée. C'en est trop. Le cour des choses reprend sa place. Lorsqu'il tend la main et lui propose de venir, une étrange lueur passe dans ses yeux. Ce n'est ni de la colère, ni de la haine. Elle redevient roc, et rétorque :


Peut-être que dans votre pays, c'est ainsi que vous traitez les femmes. Mais je ne suis pas à vendre, ni une créature à dompter, et j'apprécie encore moins que l'on joue avec mes nerfs.

Sur ses mots, ses mains ramènent sa capuche sur le sommet de son crâne. Signe qu'il n'y a plus d'échange à espérer. Dans le même mouvement, elle lui tourne le dos et rejoint l'arbre d'un pas rapide pour y prendre sa besace. Il ne bougera pas. Une fois dans l'ombre et ses affaires ramassées, elle se retourne pour l'observer. La conclusion finale étant qu'une partie d'elle regrette déjà ce qu'elle s'apprête à faire, tandis que l'autre la pousse à agir. Sauver ce qui peut être sauvé, puisqu'elle a déjà perdu une partie de sa dignité cette nuit. Grognements. Soupir. Et la voilà qui se met en marche, la tête haute, sans lui accorder ne serais-ce qu'un regard. Direction la ville, où les tourments ne sont pas aussi éprouvants qu'ici.
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Khal
Et que sonne le glas.

Léger froncement de sourcils tandis qu'une vague de fureur monte en lui. Ainsi elle ose. Autre monde. Autres habitudes. Autres petites gens et fortes femmes. Il crache son mécontentement mais la laisse s'en aller. Pour le moment. Ses paroles le laisse songeur. Avait-il seulement l'air de l'un de ces batteurs de cartes, à la fine moustache et aux dentelles froufroutantes? A ces buveurs de vin aux papilles frémissantes? Qu'ils arrivent à soulager leurs besoins primaires le décontenançait. Payer? Pour une femme? Qu'est ce cela... Leurs princesses, leurs femmes de joie. Il les leur laissait volontiers. Pour le moment il avait bien d'autres chats à fouetter.
Ne la quittant pas des yeux il observe le léger roulement de ses hanches et le pas pressé. Sans un regard en arrière. L'ayant déjà oublié. Il repense au mouvement de ses mains qui drapaient sa chevelure de sa capuche, de l'ombre enveloppant la blonde. Son arrêt. Son regard. Ainsi, il l'avait offensé. Il n'était pas homme à se faire pardonner. Ni même à le souhaiter. Il la prendrait de force si il le fallait. Et lui ferait ravaler ses paroles acerbes et son ton accusateur. Mais même si il est vrai qu'il n'imagine en l'instant que la cambrure de ses reins et sa main empoignant ses cheveux, l'autre son sein, il constate avec amusement qu'elle l'intrigue.
Elle n'avait rien d'ordinaire. Jusqu'à présent, les femmes qu'il eut rencontré écartaient les cuisses juste pour le plaisir d'imaginer pouvoir le faire leur, ou au contraire s'enfuyaient en hurlant, pleurnichant lorsqu'il les rattrapait pour calmer ses pulsions. Celle ci au contraire....
Son visage impassible continue de rester braqué sur elle, ses yeux ne la quittent pas. Elle n'est plus qu'une vague silhouette à peine visible dans la nuit. Rêve ou réalité. Peu importe. Claquements de langues. L'animal se met au trot et rattrape en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire l'encapuchonnée. Léger mouvement de reines, ils ralentissent et avancent au même rythme qu'elle. Il a les yeux fixé sur l'horizon et ne bronche pas. Les contours de la ville deviennent plus nets, un léger grondement, à peine perceptible remonte de son torse. Pourquoi faut-il que ce royaume soit si petit. Ou que les villes soient si nombreuses. Quelle place restait-il aux hommes pour les batailles et autres chevauchées?

Lentement, il tourne son visage et l'observe à nouveau. Sombre comme le ciel. Elle se mariait parfaitement aux ténèbres. D'un geste, il place son cheval devant elle et lui coupe ainsi la route. Il ne bouge pas, se contente à nouveau de la regarder. Bien entendu elle pourrait toujours essayer de contourner l'animal. De passer en dessous. De planter une lame dans son poitrail sombre. Bien entendu. Mais elle paraissait suffisamment saine d'esprit pour ne pas prendre d'aussi mauvaises décisions. Un éclair dans le regard, il lance:


Khal ne paye pas. Khal ne dompte pas. Khal prend.

Regard glacial et clair tandis qu'il redresse davantage le torse. Qu'elle contemple. Qu'elle tremble. Qu'elle fasse comme toutes ces autres femmes. Qu'elle se fasse quelconque et qu'elle cesse de lui répondre ou il lui en cuira. Il hésite encore à descendre de son cheval et à faire en sorte qu'elle lui obéisse mais l'animal recule de lui même, sans qu'il ne fasse rien pour l'en empêcher. Quelques pas seulement. De quoi libérer le passage. Il reporte à nouveau son attention sur cette ville inconnue. Laisse le sable s'écouler lentement, puis guide son cheval dans cette direction. Un regard pour elle. Un geste de la main pour désigner la route. Sa main fend l'air et pointe les bâtisses lointaines. Un léger froncement de sourcils interrogatif. Il l'observe et aperçoit la lune caresser la pointe fine de son nez de femme. Sa décision prise, il met l'animal en marche et dit, catégorique:

Allons.

Et tandis que la jument avance au pas, résonne dans la nuit les cloches de sa chevelure. Et que sonne le glas....
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Astana

Elle avance, le pas pressé. Ses bottes foulent la terre dans un mouvement régulier. Il faut s'éloigner de cet endroit le plus vite possible, du moins autant que sa jambe gauche le lui permet. Certes, elle ne boite plus, mais la douleur est toujours présente, lancinante. Le vent se lève et vient fouetter son visage, rafraichissant l'atmosphère ; il se glisse partout, passant à travers les mailles de ses vêtements en lui arrachant quelques frissons. Un rapide coup d'oeil est jeté sur le ciel, qui semble s'être voilé en l'espace de quelques minutes, car les étoiles n'apparaissent plus. Ses mains se resserrent autour de ses bras, tout en continuant de marcher, malgré le fracas des sabots qui se rapprochent. Elle ne s'arrêtera pas, même s'il en vient à la menace. Qu'il trace son chemin, loin d'elle ! Et emmène avec lui le souvenir étrange de cette entrevue. Puisque tout semble être inversé, désormais. Astana n'est pas une de ces femmes qui s'accrochent au souvenir d'une nuit torride passée dans les bras d'un inconnu qu'elles ne reverront jamais, elle n'est pas non plus femme à se taire lorsqu'on lui donne des ordres. Lorsque l'on se construit seul, certaines barrières se mettent en place d'elles-mêmes.

Mais bien entendu, l'Homme ne continue pas son chemin comme il était prévu. Lui et sa monture ralentissent tous deux à sa hauteur, au pas. Pas un regard ne leur est adressé. Un profond grognement de mécontentement est émis, cependant, leur signifiant qu'elle ne veut pas d'eux. Personne. Elle n'aspire qu'au calme. Bien vite, ils lui coupent la route, et une fois encore, la voila gagnée par la colère. La danoise lève les yeux pour venir les planter dans ceux de l'étranger. Sa mine s'assombrit, si bien qu'elle en ignore la réflexion faite. C'est un duel silencieux. A qui cèdera le premier. Entre l'espèce de brute épaisse et la Carnivore montrant les crocs. Des prédateurs tous deux, finalement. Il cherche à l'impressionner, croyant très certainement qu'elle finira par se radoucir et courber l'échine. Et c'est vrai, qu'il est impressionnant, imposant, avec cet air peu amène ; mais la peur insufflée au premier abord a déserté. Cette manche-ci est gagnée. L'animal recule. Un sourcil s'arque, interrogatif. Ça paraît si simple qu'elle se demande où est le piège. Décidément, Astana oscille entre colère, surprise, incompréhension et curiosité. Étrange mélange que voilà. L'être en face d'elle est si complexe qu'il en devient un paradoxe à lui tout seul.

Haussements d'épaules.
Elle s'apprête à se remettre en marche quand il lui intime d'aller dans la direction choisie, en talonnant sa monture.
Les sourcils se froncent.


Je n'ai pas besoin d'escorte.

Le ton, bien que froid, est contrasté par un mince sourire, presque imperceptible. Juste à la naissance des lèvres.
Amusée si bien par cette réplique que par l'agacement que cela doit provoquer chez lui. Intérieurement, il doit bouillonner. A ses yeux elle n'est qu'une simple femelle, après tout. L'insolence doit lui être proprement intolérable. Mais comme il ne dit rien, et n'esquisse pas un mouvement pour s'arrêter, elle les rattrape en pressant l'allure. Bien décidée à jouer avec ses nerfs autant qu'il a pu jouer avec les siens. Elle laisse quelques minutes s'écouler, avant de briser le silence d'or qui les unit.


Puisque vous n'êtes pas parti... et ne semblez pas comprendre... laissez-moi votre monture.

Risqué.

Je suis fatiguée de marcher.

Archifaux. Mais quitte à pousser...
Elle s'arrête tout net, en posant les azurées sur lui.


J'attends.
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Khal
Chamboulement...

Les mots coulent et glissent de ses lèvres sans difficulté aucune. Il se les prends en pleine gueule sans sourciller. Ainsi elle ose. N'a-t-elle donc aucune conscience de la situation? Est-elle à ce point folle qu'elle risque tout pour ne pas avoir à perdre la face? Aime-t-elle à ce point le danger? Son regard impénétrable ne quitte pas la blonde des yeux, l'analysant. Curieux mélange entre l'agacement, la colère, l'admiration et la curiosité. Il n'a guère l'habitude de ressentir tout cela à la fois. Elle le perturbe, le dérange et l'attire. Il se redresse, reporte son regard vers la ville. Même chemin, même direction. Il repose ses yeux sur elle et fait son choix. Il n'est personne en ce monde qui fera plier l'échine de Khal, encore moins une femme. D'un bond il saute à terre et se redresse, croisant les bras contre son torse. Il s'avance, menaçant, le visage inexpressif et lâche:

Femme! Gardes tes paroles pour les hommes de ton peuple. Je ne suis pas de ceux là.

Il gronde fortement, la dévisage quelques secondes, tend la main et ôte sa capuche pour qu'il puisse voir son visage. Nul mouvement de sa part, il hoche la tête d'approbation en contemplant cette femme fière qui ne bronche pas. Pour être différente des autres, elle l'était. Plus grande déjà. La langue taquine et insolente. Le buste fier et droit. Il poursuit:

Je suis Khal, Seigneur de mon Pays, Frère de mes hommes.
Mon pays est d'ocre et d'aridité, chez moi les animaux sauvages s'animent à la pleine lune. Les hommes sont des fauves, les femmes sont soumises.
Je ne dompte pas, Je ne paye pas. Je prends.
Je suis Khal, Seigneur de mon Pays éteint, Frères des hommes sous terre.


Il hésite quelques secondes puis se détourne d'elle et remonte sur sa jument qui trépigne d'impatience. Une légère caresse sur l'encolure, il pose son regard sur elle. Grave son visage ou plutôt ce qu'il en voit dans sa mémoire et grogne. La retrouvera.


Marche.

Fait claquer deux fois sa langue, sa jument s'élançant pour rejoindre la ville de Saumur. Et tandis qu'il se laisse griser par la vitesse de l'animal, repense à cette rencontre fortuite, inattendue, et gronde. Elle l'avait perturbé. Il en était dérangé. Il n'appréciait que peu qu'on le prenne comme un égal dans ce royaume, mais celle ci, bien qu'étant une femme, se rapprochait plus des gens de son peuple, que des autres de ce pays. Il en était sûr. Le sentait. Talonnant sa monture pour qu'elle prenne davantage de vitesse, il file dans la nuit, avalant les kilomètres pour mettre davantage de distance entre elle et lui. Il lui fallait de l'air, réfléchir, analyser tout cela.
Mais tandis qu'il songea au prénom encore inconnu de la blonde, il sut qu'il la ferait sienne....

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