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[RP] Posséder sans jouir n’est rien

Scath_la_grande
    « Quelle étoile nous vit donc naître, nous qui sommes
    Les voleuses de vos coeurs charmants, Enfants-rois ?
    C'est nous qui vous faisons la cour, ô jeunes hommes,
    Et vos légèretés nous sont d'atroces croix. »     - G. Nouveau


A vesprée, Paris est atteint, non sans une certaine animosité au sein du comité restreint que mène de sa poigne d’airain la rousse dans son écrin de cuir et de velours noirs.
Tant de petits retards cumulés, de péages onéreux à honorer, et de rues populeuses encombrées que tout le vocabulaire vulgaire regorgeant de termes les plus incivils les uns que les autres fut mis à contribution par la Musteile, de quoi lui susciter une lassitude prématurée.
L’agacement de l’esprit côtoie l’harassement du corps et c’est l’humeur saumâtre qu’elle avise une auberge dans un populeux quartier.
Le dormir et le manger sont bien suffisants pour les deux hommes qui l’accompagnent mais la Frayner ne peut se résoudre à se glisser dans ces draps pesants d’humidité qui semblent abriter à eux seuls toute la populace de parasit’land de la capitale.

Il lui faut trouver lieu approprié à sa personne.
Hors de question d’aller se montrer chez le Balbuzard par les temps qui courent, pas l’envie à subir la froide arrogance du tonton Charly, ne reste que lui, et pour sûr qu’il se trouve en la Cité, c’est le mariage de son frère, il ne peut qu’y être.
Réflexion concise qui amène à un choix, et tandis qu’elle s’abrutit de mauvais vin, la plume pare de cramoisi le parchemin en écriture voluptueuse.


Citation:
A l’époux de contrefaçon qui est mien,

    Monsieur, à la faveur de la nuit qui s’annonce, je vous honore de mon pli et bientôt de ma présence. Votre épouse en toc, sans tique ni puce, se trouve en la capitale, réjouissez-vous et préparez-vous à l’accueillir.
    Faites mander de quoi me récurer en vos appartements, eau chaude en baquet ou en bassine, qu’importe, pourvu que je puisse me dé-souiller et avec vous je partagerai mon vin, peut-être un peu plus, suivant nos humeurs.

    Donnez-moi où vous rejoindre ou venez me cueillir dans la taverne où j’écluse sans vous un picrate des plus déplorables (et juste pour ça, vous devriez me porter secours !), sis non loin du Châtelet, demeure de la prévôté royale dont apparemment la piétaille vient gaspiller sa solde en boissons.

    Vous devez me trouver bien cavalière mais ainsi toujours j’agis et quand bien même vous n’auriez cœur à me répondre car je sais que vous vous trouvez en la Cité de toutes les illusions, j’irai solliciter à la porte de Son Altesse mon oncle, la chambrée pour la sorgue. Toutefois, préférant nettement votre compagnie à la sienne, je me permets d’insister afin que vous acceptiez en votre garde votre épouse d’un temps, en ayant soin à vous rappeler que notre union –bien qu’usurpatoire- ne s’est jamais consommée et qu’il serait temps d’y remédier.

    A Dieu seul la Gloire, à moi le reste !

Madame votre rousse épouse

A.S.


Il n’y a plus qu’à attendre dans le bruyant, dans les rires gras et la picrate coupée qu’on vienne lui porter assistance dans cette cité maudite.

Hrp : Titre tiré d'une citation d'Esope
_________________
Gautier.de.vaisneau
- Ah ! L'effrontée ! L'imprudente ! L’impertinente ! La prétentieuse ! Mais quelle vilaine insolence ! "Ne s'est jamais consommée et il serait temps d'y remédier". Dieu que je ris ! Mais quelle arrogance tout de même. Elle se fourvoie bien, cette devergoigneuse là, en pensant se poser ainsi et embrasser ma couche. Je te créant, Acelin, qu'elle n'y abandonnera pas un seul de ses cheveux.

- Qui est-ce ? Le valet savait poser des questions sans trop s'étendre et alimenter la colère misogyne du maître.

- Tout juste si je me souviens de son nom ! Diablesse à la crinière de feu. Une Von Frayneur, je crois. Je ne sais comment j'ai pu souffrir qu'elle se montre être mon épouse. Entre cette femme qui se joue mariée à ma personne et la véritable damoiselle qui m'est promise, je suis bien servi ! Elle me baille de la retrouver et m'ordonne de faire chauffer eau.

- Comment ? Elle ordonne ? Faute de moyens, Acelin se retrouvait l'homme à tout faire et la vue d'une tache en plus ne le réjouissait guère.

- Je ne puis pourtant pas refuser. Ma foi elle le mériterait bien mais c'est une question d'honneur. Je trouverai bien moyen de mettre à profit cette nuitée qui se promet désagréable.

Vélin et plume sont attrapés, le Vaisneau se met à écrire. Autant dans l'intimité de l'appartement il pouvait s'emporter, autant sa lettre traduisait plutôt une froide et distante hypocrisie.


Citation:
A l'épouse de contrefaçon qui est mienne,

    Heureux de vous savoir en la capitale, tout sera organisé pour vous accueillir dignement.
    Rejoignez moi à l'hôtel Arnvald où je séjourne quelques temps à Paris.

GdV

PS : Et nul besoin d'emmener votre piquette, j'ai de quoi vous satisfaire ici.


S'il y avait bien un avantage conséquent accordé aux avocats du dragon était bien celui de posséder un appartement sur Paris. Celui du Vaisneau était composé d'une pièce réception-bureau et d'une petite chambre. Simplement et sobrement décoré. Un messager fut payé pour apporter réponse et Acelin s'affaira pour rendre présentable l'appartement et faire chauffer l'eau tandis que Gautier préparait une douce lettre à l'encontre d'Elisabeth. La tête se relève.

- Et si elle ne se hâte pas, je prendrai bain à sa place.

La tête replonge quelques instants dans la lettre puis se relève à nouveau.

- Nous serions bien, tout de même, sans femmes !
_________________
Scath_la_grande
    « Mais nous nous déclarons d'avance les sujettes
    De votre règne aimable ou non, sans nul souci
    Que celui d'approcher vos mains ; sommes-nous bêtes
    De vous bercer, de vous enorgueillir ainsi ! »     - G. Nouveau


~ Hôtel Arnvald ~


Trois coups.
Trois coups, espacés et nonchalamment jetés sur l’huis comme autant de possibilités à cette soirée.
Le feu de l’insolence d’un côté, la glace indifférente de l’autre.
Ils sont l’antithèse l’un de l’autre… et pourtant sous bien des aspects, si similaires.

Le messager n’avait pas tardé à la trouver et à lui remettre le pli, arrachant au museau morgue un de sourires carnassiers.
La route fut prise à l’immédiat, abandonnant ses piètres compagnons pour rejoindre d’une brève chevauchée l’adresse donnée.
La monture confiée, la cavalière fut guidée jusqu’aux appartements du jeune avocat où tant pour lui que pour elle, l’inconnu de ce tête à tête, loin des politesses parisiennes avait quelque chose d’intriguant.

Trois coups et l’attente.
Tout comme au théâtre, où le brigadier frappe le plancher de la scène et avec impatience, le spectateur et l’acteur ont hâte de voir le rideau se lever, l’intrigue et la farce se déployer au fil des actes.
Le pan de bois s’ouvre sur la rousse sobrement vêtue d’une tenue de voyage sombre constituée d’une cape de velours noir bordée de poussière recouvrant une brigandine légère de cuir sombre et jetées sur l’épaule, les sacoches qui trônaient sur sa camarguaise.
Le cuivre de sa chevelure est enserré dans un chignon austère qui rehausse la noblesse de son trait, et lui rend l’élégance perdue dans sa mise.
Le valet se découvre à elle et avec grâce la lippe soyeuse de la Musteile s’étire dans un léger sourire.

« Je suis attendue par monsieur mon époux. »

Elle a du charme, elle a du chien cette Belette là et sans vergogne, la rousse en use dans son regard animal sur le pauvre Acelin.

« Venez à moi, mon époux, et dans mon giron tiède, vous gagnerez mon royaume et je vous érigerai Roy »
_________________
Gautier.de.vaisneau
[Hôtel Arnvald]

Mille ratures, les cheveux en pagaille tant il y avait passé ses doigts, l'esprit fatigué, la colère et l’irritation renforcée. Parfois, il s'accoudait au bureau, reposait sa tête sur sa main, jouait avec sa plume et ses azurs se fixaient sur le vélin. Puis il reprenait ses cogitations, écrivait à nouveau, s'énervait. Annoncer son mariage et sa perte de libertés à une femme était la chose la plus difficile qui soit; et le Vaisneau bloquait complètement. Ne pas parvenir à quelque chose de convenable l'agaçait au plus haut point.

Tandis que sa concentration était entièrement dédiée à la lettre, le valet épiait à la fenêtre et lui jetait parfois un regard. Observateur impuissant et peiné.

- Elle arrive.

L'esprit sort de sa mélasse et de sa réflexion stérile. Il se lève, les papiers s'éparpillent et glissent sur le bois du parquet, la chaise s'apprête à tomber. Acelin est là pour la maintenir et la garder en équilibre.
Sa venue lui était complètement sortie de l'esprit. Il aurait été aisé pour elle de trouver un amant plus affectueux mais, toutes les forces de la nature se liguant contre lui, elle s'était tourné vers Gautier. Étrangement, le cœur du jeune homme se serra, comme pris par la peur. La conviction que tout se trouvait lié : son mariage, la rousse, les femmes. Et à nouveau cette contraction dans sa poitrine : plus aucun doute, la peur.

Les deux hommes se faisaient silencieux mais régnait dans la pièce une atmosphère pesante de retraite désordonnée après la bataille. Instant de lucidité dans l'absurdité misogyne; comme si la surprise avait fait reprendre un sens logique à ses pensées. Il s'était confondu dans la colère et la force de ses reproches envers la gente féminine.

- L'eau est prête ?

Acelin désigna du menton la pièce d'à côte pour lui répondre puis ramassa les papiers. Gautier restait statique, à l'observer. Le seul qui supportait son ressentiment au quotidien. Le seul qui le soutenait sans porter aucun jugement. Le seul qui savait garder le silence quand il était nécessaire. Le seul qui lui était fidèle et en qui le Vaisneau avait toute confiance. Si cet homme n'était pas son valet, ils seraient amis. Leur relation dépassait depuis longtemps le stade du maître-serviteur, bien que tous les deux savaient qui dominait.

- Merci Acelin, tu pourras profiter de la nuitée pour te divertir.

Trois coups, la porte fut ouverte, le valet laissa entrer la femme puis se retira en fermant derrière lui.
Les azurs croisent le regard féminin. Aucune expression ne gagne sur l'autre. Partagé entre ce corps pouvant si facilement être en possession, la colère et l'éclat de lucidité non encore noyée dans le courroux.
Le jeune homme s'approche pour dévêtir la Musteile de ses habits d’extérieurs. On est sincère ou ne l'est pas.
Scath_la_grande
    « Mais quand nous vous tenons, Coeurs trop pleins de silences,
    Nous ne savons, pleurant à vos torts expiés,
    Que faire du tissu de vos obédiences
    Un tapis pour la plante exquise de nos pieds. »     - G. Nouveau


On s’accueille du regard dans une salutation tacite, jaugeant de cette méfiance déguisée l’autre, le sourire en façade.
En bon galant homme, le Vaisneau la déleste de ses remparts, cape et brigandine mises à l’index et à elle d’ôter le cuir de ses mains, de délacer de ses gestes languides l’ultime bastion censé amoindrir un coup de lame. Un corset de cuir rigide qui lui enserre buste et hanches, bien loin des affolants corsages de dentelles, il lui prodigue une sensation de sécurité depuis que la Musteile a failli finir tripes à l’air à Montauban.
L’expérience forge une consciencieuse prudence.
La rousse apparait dès lors dans ses apparats les plus humbles, braies et bottes encrassées, le pinacle pourvu d’une fine chemise de lin dont l’encolure laisse deviner l’ivoire de son épaule et les premières morsures de la guerre.
Deux cicatrices polies par le temps ornent à la verticale et en parallèle l’immaculé de son cou.

Sur lui, l’animal relève son regard frondeur.
Tout s’est fait dans un silence consenti, comme si parler briserait la maigre intimité installée. Bancale, et incertaine.
Les fauves sereins s’accaparent en prédateur la silhouette du jeune Gautier et pour bris de silence, la rousse se compromet dans une de ses habituelles phrases piquantes.

« Vous avez changé… l’on vous dirait presque homme à présent ! »

Elle porte l’insolence comme se porte un parfum, indissociable de sa peau, de son être.
Démarche de mustélidé, souple, quelques pas à peine pour réduire la distance à un souffle.
Les prunelles de la bête arrimées à son écrin de l’âme fait de clair azur, limpide et pourtant si dissimulateur.
Les fines phalanges affleurent sa joue, suivent la courbure de son cou lentement.

« Bien des femmes doivent se damner pour ces yeux là. Non ? »

La lippe se rehausse dans un sourire furtif, les doigts s’affermissent sur la nuque masculine. La distance devient néant, juste un contact soyeux de ses lèvres sur la commissure vaisnienne. Baiser délicat qui se prolonge dans la cueillette de la pulpe veloutée.
La Frayner goûte sans en être intrusive.
Ses vermeilles s’agitent en mots prononcés à mi-voix, le regard amusé.

« Vous me plaisez, monsieur mon époux… »
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Gautier.de.vaisneau
Quand la rousse, peut être, songe intimité, le silence du brun traduit simplement l'enlisement de ses pensées et sa réflexion. A la fois cette rousse lui plait, assurément, son humour, son insolence, sa manière d'effleurer son cou et la fois tous ses gestes et ses manières attisent sa colère. C'est bien là la faiblesse de ses résolutions : il les prend quand aucune femme ne se trouve dans les parages. Un cercle sans fin. Les femmes sont tentatrices donc on ne les touche plus mais comme elles tentent bien, on ne résiste pas donc elles sont tentatrices donc on ne les touche plus mais comme elles tentent bien...

Et au final Gautier arrivait même à se trouver en colère contre lui même et sa nature.

« Vous avez changé… l’on vous dirait presque homme à présent ! »

Bien vrai qu'il avait changé. En avance, son corps était déjà pratiquement celui d'un homme et ses traits durcis formaient un visage angulaire. Quant à ses yeux, 'ils participaient effectivement à une grande part de son charme. La taquinerie le fit sourire, comme si, au final, la nature, qui était d'être séduit par cette femme, reprenait le dessus du profond agacement.
Il se laisse faire, simplement. Elle veut se faire entrepreneuse, apparemment. Tant qu'à avoir une femme qui s'offre à lui sans passer par la case séduction, autant en profiter n'est ce pas ? Elle marche ainsi, la logique de Gautier, quand il goutte les lèvres d'une belle rousse.
Le baiser est apprécié, savouré, le jeune homme y répond, se faisant plus doux que fougueux. Assurément, il n'était pas question pour l'instant d'aller plus loin sans même avoir prononcé une parole.

Le baiser est donc rompu, sans brusquerie. Un léger sourire barrait son visage. Sourire qui ne signifiait rien. Il était simplement destiné à ne pas paraitre sec.
Une bouteille de vin Bourguignon est attrapée, un verre au passage et le brun sert l'alcool à la Frayner.
Il avait bien saisi qu'elle aimait cela.

Le Vaisneau ne boit pas. Il n'a jamais apprécié les alcools ou les sucreries.
Il se contente de poser son séant sur un confortable fauteuil, s'y enfonçant tranquillement et reposant sa tête en arrière. Elle s'en offusquerait peut être mais qu'importe, ce n'était après tout pas lui qui l'avait invité.

- Vous n'aurez malheureusement plus très longtemps le loisir de me nommer comme vous le faites.
Scath_la_grande
    « Donc, homme, errant de créature en créature,
    Tu viens et tu t'en vas, sans comprendre beaucoup
    Tout ce que nous mettons de céleste imposture
    A te sourire avec deux longs bras à ton cou. »     G. Nouveau


Offenser la Musteile alors qu’un verre de vin prolonge sa main ?
Impossible ! Et pour ajouter à sa sérénité, le carmin est bourguignon, il n’y a donc rien à réclamer !
Les fauves couvent le Vaisneau, suivant son douloureux pèlerinage jusqu’au fauteuil.
La rousse sait, le sent, quelques tracas s’enlisent sous les boucles noires, d’ailleurs ses dires la confortent dans son prime sentiment.
Elle se rapproche, ponctuant son déplacement par quelques lampées rassurantes et vient caler son séant sur l’accoudoir.

« D’après ce que vous me confiez, mon ami, soit vous allez passer calotin, ce que je doute fort, et de prendre un instant de pause pour s’humidifier le gosier, soit vous allez prendre épouse… quoiqu’il en soit… vous ne semblez pas des plus enchantés. »

Se trompe-t-elle ?
Rarement à vrai dire, et la Belette est comme sa congénère la fouine, toujours l’oreille à l’affut et le museau qui traîne dans les affaires des autres.
Elle laisse un instant de silence mis à profit pour détacher son regard sur la pièce, sans appréciation ni dépréciation, qu’une simple curiosité sans avis.
Puis avec son air de rien, elle lâche d’un ton froid une proposition.

« S'il est question de mariage et que l’épousée vous gêne de trop, je puis m’en occuper… les accidents, vous savez, sont si vite arrivés.
Il est bien évident qu’il est plus sain d’attendre que l’anneau foule son doigt nuptial, ainsi vous reviendront avec légitimité ses biens. »

Esprit pratique made in Musteile !
A sa lippe s’accroche un sourire, point carnassier mais bien pire, d’une douceur exquise et maternelle comme si elle venait de parler avec tendresse des exploits de sa progéniture.
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Gautier.de.vaisneau
Elle l'effrayerait presque. Le brun avait peur des fous car la folie ne suivait pas de logique et il était par conséquent difficile de les raisonner. Gautier maniant mieux l'esprit que la force, avait donc peur des fous. Mais la rousse pouvait être simplement un peu dérangée.

Les boucles ténèbres sont secouées.

- Pourquoi ? Elle n'est encore coupable de rien.

C'est l'esprit de juge qui prend le dessus. L'éphèbe veut tout juger. Et comme un bon juge est l'objectif, il ne se lie à rien ni à personne. Sauf à Maureen. Il faut toujours une exception.
Même le mariage ne signifie pour lui rien et ne l’empêchera pas de juger en toute objectivité. Du moins tant qu'aucun sentiment ne l'attachera à Elisabeth. Oui, le mariage n'est qu'un pacte de fidélité.

- Je ne serai pas contre les biens mais...

Mais il trouvera bien une autre manière de s'en procurer.

Comme s'il marchait sur la crête d'une montagne en hésitant de quel côté descendre, il y a toujours cette oscillation entre colère et relâchement dans le plaisir. Simplement profiter de cette rousse qui, même dans son extravagance, le séduit. Le baiser avait choisi pour lui le chemin du plaisir mais à présent, le Vaisneau ne savait plus.
Finalement cela le fatigue d'être si intransigeant avec lui même. Dans quelques semaines il serait marié, il aura tout le temps d'être sage.

- Il est vrai que notre mariage est bien pitoyable, ainsi vêtu.

Le jeune homme quittait cette conversation pour en revenir à la lettre. La Musteile comprendrait peut être. Surement.
Pour s'en assurer, il clôt sa phrase sur un nouveau baiser. Il est cette fois ci d'avantage celui d'un conquérant que celui d'un époux qui doit embrasser sa femme parce qu'elle le désire. De la fougue et une main qui vient maintenir la tête dans la chevelure de feu. Le Vaisneau ne regrette pas d'être descendu de ce côté. Le paysage y est remarquable et la balade savoureuse.
Scath_la_grande
    « Pour atteindre aux baisers graves de votre bouche,
    Il nous plaît de braver, dans votre embrassement,
    Jusques à toi, Baiser déchirant, et toi couche
    Où le sang violé s'éperle obscurément. »     - G. Nouveau


Si l’un reste cloisonné dans son raisonnement de juge, l’autre s’emploie dans l’exécution.
Musteile est –de son propre avis- le couperet avec lequel Dieu applique sa sentence.
La rousse ne juge pas, jamais, elle tue simplement avec froideur, sans état d'âme et si elle méprise la vie, elle respecte la volonté de son Créateur si celui-ci épargne la vie qu’elle tente de soustraire.

« Nul n’est innocent dès le prime souffle de vie. »

Une gorgée de vin salutaire pour ravaler d’autres amères paroles tout droit sorties de son éducation en couvent durant son prime âge.

- Je ne serai pas contre les biens mais...

Mais… ?
Mais quoi ?
Le museau de la rousse Musteile se plisse dans un instant de curiosité qu’elle aurait aimé épanché.
Savoir, connaître ce qui le rebute dans cette méthode, ma foi, assez usuelle pour se débarrasser des encombrants indésirables, le tout en gardant les mains propres.
La mercenaire, elle, les préfère sans conteste de couleur carmines.

Piqûre de rappel, le Vaisneau sait lui remémorer le but prime de sa visite.
Quelques mots suffisent pour que les fauves se révèlent dans tout leur éclat et que la Frayner pose l’impudent regard sur Gautier.
Il se fait conquérant, démontre à l’impérieuse qu’il n’est nullement le gamin que semble laisser supposer quelques uns de ses traits encore juvéniles.
Il la capture d’un baiser, affermit sa prise, de proie il devient prédateur.
Dans toute cette eau limpide qu’inspirent les iris céruléens du noble, brûle un feu, sans compromis, impétueux.

L’étreinte se prolonge, les doigts fins de la rusée caressent la chape de boucles sombres, glissent le long du cou sans emprise, légers comme un souffle sur la peau du Vaisneau.
Elle savoure sans vergogne son presque dû, frôlement des pétales, on happe le souffle de l’autre, le corrompt dans un métissage succulent de goûts et de langues.

« Vous êtes dans le vrai monsieur mon époux. »

Docilité joueuse qui étire ses lèvres dans un sourire voluptueux et désarmant de candeur. La belette sait se revêtir de la pelisse de l’innocence la plus blanche.
Battement de cils, la rousse plante son regard dans le sien, tente d’y apercevoir s’il est à sa merci.

« Nous ferrions mieux de nous séparer de cette mise qui ne fait aucunement honneur à nos épousailles, toutes éphémères qu’elles soient. »

Désinvolte créature qui fend son museau d'une lippe mutine et gourmande.

« Avez-vous pu pourvoir à mes ablutions ? Et si la place le permet, me feriez-vous l’heur de votre présence ? »

Savoure Vaisneau cet instant où la Reyne Rouge s’offre à toi, elle te couronnera de plaisir, te fera Roy dans son Royaume.
Fugace et intense règne dont elle te sacre d'un baiser, d'une étreinte tiède et douce.
_________________
Gautier.de.vaisneau
Elle croyait avoir gagné. Parfait. Il ne restait plus qu'à l'emmener jusqu'à l'entrée en se faisant passionné et brûlant. Oui. La plaquer ardemment contre la porte, glisser ses mains derrière elle pour trouver la poignée. Ouvrir puis la pousser soudainement dehors et refermer. Se laisser le droit de sourire, ensuite.

Oui, cela aurait très bien pu se dérouler ainsi. Avec un peu plus de résistance de la part du Vaisneau, c'est effectivement ce qu'il se serait passé. Et il aurait beaucoup ri, assurément. Un désir insatisfait entre les jambes, certes ; mais le chemin qu'il voulait suivre tracé avec plus de force.

Plus Gautier y pensait, étendu sur le dos, dans le grand lit, Scath nue, à moitié allongée sur lui, tous deux complètement enlacés et les cheveux de feu caressant son buste ; plus il regrettait. Comme si le contact de leurs peaux le brûlait, il voudrait qu'elle soit loin. Alors le brun ferme très fortement les yeux. Il suffit de le vouloir très fort, ce n'est qu'un rêve, il s'est endormi sur la lettre. Les yeux sont rouverts, prudemment. La Reyne rouge est toujours là, éclairée à la lumière du matin filtrée par les rideaux. Pourtant, la seule Reyne c'est la brune, Maureen. Gautier a trahi.

N'importe quel homme affirmerait que la nuit en avait valu la peine. Véridique. En matière d'amante, la rousse n'était comparable à aucune autre. Le jeune homme n'était pas un demi-puceau, comme certaines s'amusaient à le prétendre et pourtant Scath n'avait cessé de le surprendre. Elle ne possédait pas l'innocence de Maureen mais c'était tout autre chose, non moins affriolant.

Gautier s'extirpa doucement du lit pour se revêtir, espérant qu'elle se réveillerait. Il ne pouvait pas partir en la laissant seule ici mais ne souhaitait pas non plus qu'elle reste indéfiniment. Alors il lâcha sciemment une de ses bottes qui alla cogner contre le sol, lui donnant au passage tout ce dont il avait besoin : un bruit assez fort et soudain pour lui faire ouvrir les yeux.

- Peuchère !

Il ne savait pas bien ce que cela signifiait, à vrai dire. Une expression provinciale, qu'à force de l'entendre à longueur de journée dans la bouche de Maureen, lui venait toute seule à la bouche. Bon, si Scath ne se réveillait pas, c'est qu'il était tombé sur l'amante au bois dormant. Et aucune envie de lui donner un baiser pour qu'elle daigne ouvrir les yeux !
Scath_la_grande
    « Bien qu'offrant à vos nuits ce qu'il faut à ces luttes
    Où s'exerce le coeur irritable, âcreté
    Des Baisers, et soupirs rieurs comme des flûtes,
    Et ventre glorieux de sa stérilité,
    … »


[Et la nuit porte en elle Scath…]


Contre un bain, sa nudité. Contre la solitude nocturne, son art.
Ainsi sans pudeur, elle se découvre, voluptueuse dans la courbe, l’écrin charnel pâle se dévoile avec tout ce qu’il comporte en grâce et en morsures implacables que la guerre a infligé à son corps tel une cartographie de ses douleurs.
Les fauves s’approprient le Vaisneau avant que la pulpe de ses lèvres n’envenime la situation et ne s’entame la querelle des corps.
Impérieuse créature que la Musteile qui règne sur l’homme comme sur un domaine.
Les doigts déliés glissant sans ambages dans les boucles sombres, s’accaparant la nuque et dénudant la peau qui sans abri ne peut échapper aux vermeils habiles.
Sa main affermit l’appétence du mâle, la lippe est généreuse en baisers qu’elle niche dans les vallons et les cimes du Gautier, recherchant la moindre aspérité qu’elle soumet avec gourmandise à son vice.

Tout son talent réside dans la manière dont elle joue tour à tour tant la docile enfant soumise au joug souverain du cadet Vaisneau que la maîtresse femme, féline dans son mouvement, jugulant l’ardeur masculine au gré de son cruel caprice pour mieux le décupler, le prolonger, l’intensifier.
Lentement, avec l’infinie délicatesse d’une Aphrodite, la Frayner tisse le filin pernicieux et létal de la petite mort.
Qu’il agonise, qu’il s’étiole à petits souffles cet époux usurpé, qu’il languisse dans un délictueux et exquis tressaillement.
« Meurs en moi, mon Roy. Offre ton dernier soupir à celle qui te couronne. »
Les corps enlacés, revêtus de leur habit d’odorante rosée, frissonnent une dernière fois avant l’hallali et ne s’annoncent vaincus, terrassés du même mal.

Après la lutte, l'armistice.
Elle a écouté son sommeil. Longtemps.
Le souffle léger de l’homme repu par l’étreinte qui s’écoule avec régularité et emplit la pièce, bousculant le silence.
Ce souffle, la Musteile aurait voulu qu’il appartienne à un autre. Son autre à elle.
Les fauves sont restés bâillant l’obscurité, longuement, avant que ne s’engourdissent les paupières sous l’harassement.
Durant le reste de la nuit, elle a dormi enclavée contre son corps, se nourrissant de cette tiède promiscuité tant agréable, trompant sa sordide solitude.
Douce torpeur peuplée de rêves occitans d’où l’on la tire de manière brutale.

- Peuchère !

Grognement.
Pis quoi encore ! Mon joli, j’t’ai dit que c’était gratuit.
La courbe de mustélidé s’étire, exhibant à nouveau les graciles volutes albescent entre les draps, et tranchant nette, la chevelure cuivrée s’agite sur l’oreiller.
Position semi-verticale amorcée laborieusement, les jambes sont balancées en bas du lit, le temps que la Frayner glisse sur son impudeur sa chainse de lin et ne se lève sans mot, sans un regard.
Le premier geste salvateur pour cette outre percée sur pattes, calancher un verre de vin en fond de gosier afin de renouer avec la réalité et de lâcher en réponse à son interjection matinale coupable de son réveil.

« Oui, pauvres pécheurs nous sommes ! »

La lippe s’étire dans un sourire carnassier, et un baiser aviné s’échoue sur son front avec une candeur maternelle.
Nul regret ni remord ne l’habitent, le Gautier est bon amant, et ce genre de considération n’effleure que rarement la rousse Musteile.
Hâtivement, elle s’habille et tout en laçant ses braies, elle relèves ses iris d’effrontée sur lui.

« J’ai à faire, quelques… hésite un peu sur le terme adéquat, négociants à voir. »

Et je ne compte pas rester là à te leurrer de sentiments que je n’ai pas à ton égard.


    « …
    Nous vous perdons, malgré nos deux mains maternelles,
    Mais vous n'emportez pas, pour vos futurs exils,
    L'orgueil d'avoir éteint nos fécondes prunelles
    Et bu notre âme humide aux pointes de nos cils. »     - G. Nouveau

_________________
Gautier.de.vaisneau
Gautier détestait que l'on exerce une quelconque domination sur lui et il fuyait en conséquent toute forme d'autorité. Ce pourquoi il avait de plus en plus de mal avec Enguerrand qui ne l'avait annobli, pensait Gautier, uniquement pour lui trouver femme à l’effigie Vaisneau. Elisabeth en était-elle une ? Le brun n'en savait fichtrement rien mais un "il ne savait pas quoi" lui soufflait que oui. Mais ne prenez pas cela pour la voix du narrateur car souvent le "il ne savait pas quoi" se trompait. Et à contrario, je ne me trompe jamais !

Pour reprendre ma première idée, la rousse avait, cette nuit là, entièrement dominée Gautier. Dès le moment où il a cédé, la prédatrice l'a pris et emprisonné dans les serres dont seul (à la limite), un eunuque aurait pu s'extirper. Affirmer qu'il n'en avait pas profité eût été faux mais dire qu'il ne regretterait pas n'eût pas été davantage vérité.

Il y avait une chose qu'il détestait encore plus qu'être dominé : trahir une parole. Son honneur, après ses couilles peut être, était ce qu'il possédait de plus cher. Et là Gautier avait fait les deux en même temps. Les mois passés, le jeune homme avait œuvré pour être le moins assermenté possible. Le problème avec les serments c'est que l'on jure à son père, à son frère, à sa femme, à son aimée, à son suzerain, à son Roy. Mais si le frère n'apprécie pas la femme ? Et si le suzerain méprise le Roy ? On finit toujours par rompre son serment. Le cadet Vaisneau ne gardait alors que le serment à la femme et à l'aimée, le reste serait guidée par l'honneur et la conscience, et il risquait déjà d'avoir assez de problèmes avec tout cela.

Les yeux sont posés sur la Frayneur. Elle est agréable à regarder et les pensées se perdent, s'envolent. Étrangement, il apprécie qu'elle lui donne un baiser comme les femmes offrent aux enfants. Mais cela passe que ce soit Scath qui lui donne, car elle a gagné, elle a vaincu, Gautier le reconnait et parvient même à l'apprécier, c'est une inconnue. Si Maureen ou sa future épouse commettaient pareille impudence, jamais le Vaisneau ne l'accepterait. Pour ces deux dernières, l'homme serait dominant, point définitif.

Léger sourire. D'amusement. Plissement des commissures des lèvres sans dessein particulier, comme le sont rarement ses sourires.

« J’ai à faire, quelques… négociants à voir. »

Piqure de rappel au Vaisneau : ce jour était le dernier délais pour payer l’orfèvre à qui il devait une petite fortune. Parfois Gautier se demandait comment il se débrouillait pour se retrouver autant endetté.
Bon, ma mignonne, tu es ma dernière issue.

- En parlant de négociants...

Comment demander ? Il s'approche, pose doucement une main sur la joue féminine dans un geste parfaitement calculé et lui souffle, les lèvres rapprochées au plus près du cou, comme s'il allait lui susurrer quelques mots parfaitement romantiques. Sauf que non, il lui souffle juste qu'il a besoin d'argent et la somme demandée. Après cela, un sourire est offert, dans un but bien précis cette fois ci. Le sourire le plus charmant et angélique qu'il possède.
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Scath_la_grande
    « Aussi trop tôt, mon Dieu ! Redoutant quelque fraude,
    Comme un chien, autour des pacages timorés,
    Notre âme tristement s'en va tourner et rôde
    A la porte par où vous nous êtes entrés. »     - G. Nouveau


Il l’aurait giflée, que la réaction récoltée n’en aurait pas été plus violente.
Mue par une force invisible, la Musteile s’écarte brutalement de son joug mielleux échappant au dard vénéneux de son regard limpide et à son sourire si faussement brodé d’innocence.
A son murmure que la rousse trouve obscène par le propos -demander du pécune à une huguenote reviendrait à arracher un enfantelet au sein de sa mère- la voix se hisse froidement et domine la pièce.

« Combien ?!? Ô rage, ô désespoir. Combien dites-vous?!? »

Elle s’offusque la bestiole, elle en est outrée de cette indécence pécuniaire qu’il lui réclame avec une audace angélique.
Les prunelles mercantiles s’attachent férocement à la frimousse encore juvénile. Les ans ne marquent pas encore ce visage et pourtant il n’est que fourberie en cet instant.
La Frayner se recule légèrement pour darder un regard qui s’est assombri en une seconde de manière bien effrayante.
La parole se fait sévère, tranchant nette avec l’humeur badine du lever.

« Croyez-vous que me glisser quelques cajoleries nocturnes font de moi une greluchonne ? Prête à entretenir la jean-foutrerie d’un jeune écervelé ? Car écervelé vous devez bien l’être pour débourser pareilles folies !»

Le museau se ferme dans une attitude maussade, elle ne comprend guère ce genre de dépense inutile –bien qu’adepte de belles étoffes, la rouquine préfère les dérober que de les payer- le poitrail se soulève rapidement, la religionnaire encore sous le choc de l'effronterie de la supplique.
Un sou est un sou ! Et si aucun bénéfice ne se profile, il n’y a aucun intérêt pour elle de mettre en péril son pécule dûment escro… gagné !
L’avis de tempête se rassérène, et les mots se détachent non sans mal de la lippe sanguinaire.

« Que me proposez-vous en dédommagement mon bel ami ? On n’a rien sans rien dans la vie… »

Pesantes se font les prunelles habillées de bistre lorsque implacables elles s'accaparent le Vaisneau sans l'once de pitié.
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Gautier.de.vaisneau
Bon. D'accord. C'était peut être un peu trop... surjoué. Gautier aurait du deviner que celle ci n'était pas du genre à se laisse prendre aussi simplement.

- Ce n'est que de l'argent ! Rien qui justifierait que l'on réveille les avocats les plus talentueux du Royaume. Pouvez vous baissez d'un ton je vous prie ?

Le jeune homme vient d'abonner toute tentative douceâtre qui ne mènerait à rien. Alors il prend un air sérieux et froid qui se veut accompagner beaucoup d'hommes quand ils parlent d'argent. Le cadet Vaisneau n'est pas de ceux là mais son attitude rassurera peut être la rousse sur la gravité avec laquelle il utilisera son or précieux.

- Mais il se trouve que pour beaucoup, l'argent possède énormément de valeur. Pour certains, plus qu'une vie. Et j'espère que malgré tout, vous n'aimeriez pas que mon épouse assiste à mon enterrement tout juste après notre union.

Idiot ! Ne repars pas sur la piste du charme puisqu'elle ne fonctionne pas.

- Du moins moi, l'idée ne me réjouit guère.

Un sourire légèrement gêné de s'en remettre à une presque inconnue (du moins pour la partie spirituelle...). C'est le moment de mettre toute sa force de persuasion, en évitant quelque rapprochement physique qui risquerait de s'apparenter à une séduction hypocrite.

- Pardonnez mon attitude mais vous restez ma dernière issue, Scath. Naturellement, vous n'accepterez pas cette demande par pitié ou par... affection, bien par intérêt. Car j'escompte bien devenir riche et, assurément, je le serai avant la fin de l'an !

Non non, ce ne sont pas des paroles en l'air et il avait déjà quelques idées derrière la tête. Il ne pouvait décemment pas, dans sa noblesse, se donner à quelque activité à but essentiellement lucrative mais il avait réfléchi à un autre moyen. Ce pourquoi sa voix résonnait de sincérité, bien qu'avec son art de la dissimulation, elle ne le croirait peut être pas.

- Je vous rembourserai intégralement, avec les intérêts nécessaires. Et je ne suis pas de ceux qui oublient leurs amis.

En même temps pour l'instant, il n'en possédait pratiquement pas, donc ça allait.
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Scath_la_grande
    « Aux enchérisseurs les plus forts
    Je vendrai ton âme et ton corps,
    Et ton coeur, s'il est recherché,
    Sera par-dessus le marché. »     - G. Nouveau


Comment faire plier le cœur de la pécheresse ?
Simplement faire tinter à son oreille la promesse de quelques gras intérêts que la vénale créature savoure par avance d’un coup de langue sur la lippe comme pour en jauger mentalement le pécule à venir.
Toute entière à sa réflexion, la Musteile relace avec soin le corset de cuir lui enserrant la taille et termine sa préparation, avare de ses mots.

« Bien, soit, je m’incline, vous avez gagné la partie mais ne me décevez pas sinon vous subirez mon courroux. Les fauves sévères remontent jusqu’à son tendre azur et s’y plantent dedans. Et je vous garantis que je ne fais pas commerce de ma miséricorde, vous payerez et dans les temps ! »

Le ton annonce la menaçante sentence sous adjacente.
A nouveau, un verre de vin est grappillé et sans demander l’autorisation au propriétaire des lieux, la Frayner s’assoit devant l’écritoire et prépare encrier et parchemins.
Deux parchemins à l’identique, garnis d’une écriture au délié agréable, rond dans sa lettre et d’une certaine esthétique à sa lecture.
La Belette ne s’interrompt que pour boire quelques lampées avec régularité, ainsi avec minutie la corde pour pendre s’enlace au joli col du Vaisneau, bien innocent qui ne voit pas le péril venir.
Le contrat d’usure en double exemplaire, un pour elle comme preuve, et un pour lui tel un douloureux rappel.
La date, la somme baillée en prêt, et les noms du créditeur et du crédité inscrit en tout premier puis vient le paragraphe concernant les intérêts formulé en ces termes.

Une rousse bien vénale a écrit:
« Ainsi il a été décidé dans notre grande bonté d’âme de bailler un taux préférentiel de vingt-deux pour cent au lieu du coutumier trente trois pour cent que nous accordons aux non-huguenots en qui nous n’avons guère fiance. En parfait accord avec notre décision, séhner Gautier de Vaisneau s’engage sur l’honneur qui fait de lui un Seigneur de nous rembourser au moins la moitié de la somme ainsi prêtée (sans en compter les intérêts) dans une période impartie de trois mois, et le reliquat dans une période de quatre mois après la première échéance.
Ce délai ainsi écoulé nous serons en droit de réclamer un intérêt supérieur de trente-trois pour cent et il sera alors banni de toute notre estime.
Nous nous réservons le droit de réclamer la dite-somme par tous les recours possibles. »


Les dernières gouttes de carmin calanchent entre les vermeilles qui esquissent un léger sourire carnassier. Et de lui tendre les deux parchemins après les avoir elle-même signés.

« Datez, approuvez, signez et scellez je vous prie ! Le ton bien qu’aimable tient plus de la directive que de l’invitation. Je vous demanderai de ne pas briser le contrat qui nous unit, je serai bien marrie de devoir sévir à votre encontre. »

Et enfin de son écriture sèche et serrée, sa coutumière, elle inscrit un mot et une adresse qu’elle signe de nouveau.

« Ici je vous ai inscrit l’adresse d’un spinoziste italien de ma connaissance qui tient les cordons de ma bourse parisienne et est au fait de mes affaires à la Capitale. Donnez lui ce billet de ma part et montrez lui le contrat-ci présent, il vous baillera la somme que vous m’avez mandée.
Je vous prierai d’ailleurs d’effectuer vos remboursements à lui-même. Il me tient régulièrement au courant des mes avancées financières. »

Ainsi réglée l’affaire, la rousse achève de se préparer, n’oubliant pas au passage de prendre un des contrats et de baisoter les charmantes lèvres pour un « au-revoir » des plus concis.
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