Afficher le menu
Information and comments (0)
<<   1, 2   >   >>

Info:
Unfortunately no additional information has been added for this RP.

[RP] Ainsi soit-il

Anaon
    La mie nuit est passée. L'air est sirupeux, poisseux de cette brume qui envahit les dédales de la villes. Elles ont troqué le crachin de Saumur pour la brouillasse de Craon et ses gouttes perdues qui s'échouent dans les torchères en retombées chuintantes. A leurs pied, c'est le ballet des spectres vaporeux qui leur baisent les chevilles et dépose sur leurs manteau une fine poussière liquide. Les jours en Anjou ne sont rythmés que par le bruine céleste ou la danse monotone de la brume lancinante. Jours gris et sombres nuits. La lune se voile à demi, bien lovée dans l'écrin de nuages opaques qui lui font une paupière d'ombres. Et sous le couvert des arbres qui bordent la battisse, à l'abri du halo chatoyant des torches murales, les azurites guettent, immobiles.

    Ce n'avait été qu'un délire. Des parole ivres issues d'un ressentit commun. Blasphèmes lâchés dans un rire, des mots aux relents d'hypocras et aux accents d'amertume. Une pensée sans porté, mais le sommeil qui avait succédé la beuverie n'avait sut les effacer. L'ivresse avait gravé dans les âmes des stigmates tenaces. Une lubie folle, au parfum de délivrance. Et de vengeance...

    Sous la cape, les doigts aguerris se resserrent sur le bois de l'arbalète. Ça avait été comme une démangeaison. Puis çà devint une obsession. Ça lui picotait les doigts, lui titillait l'âme. Pareille à une entaille sur le palais. Il suffirait de cesser de la lécher pour la faire cicatriser... Mais on ne peut pas. Plus on y pense plus, plus çà irrite. L'exacerbation d'une haine. L'idée avait occupé ses pensées et hanté les leurs. C'est alors que de mot en mot, la lubie devint acte.

    Un regard se lève brièvement dans l'embrun du ciel avant de retourner se river sur le flanc de l'Eglise. Elles n'agissaient pas à l'aveuglette. A la leur du jour, elles avaient repéré le terrain, mais c'est à la faveur de la nuit qu'elles se feront Sacrilèges. Bref frisson qui vient ébranler la peau martyrisée. Rien d'agréable, mais de viscérale. Au regard des pierres, c'est autant de cicatrice qui se ré-ouvrent et qui suintent leur humeurs purulentes. Elle avait laissé les plaies s'envenimer sans jamais chercher à en crever les abcès, cadenassant sa haine au lieu de l'épancher. Et si son aversion ne s'était jamais tari avec le temps, l'Anaon n'avait jamais cherché pour autant à déverser son fiel sur ces pierres grises qu'elle a en horreur.

    Peu savent la raison d'être de la mercenaire. Pour ne pas dire personne. Ce n'est qu'une armure fêlée, animée par la seule mécanique de la haine. Elle dirige ses pas, ses gestes, la femme lui est esclave malgré elle. Si elle avait toujours ardemment cherché à retrouver les mains coupables de sa torture, elle s'était inconsciemment détournée de la prime responsable de sa déchéance. L'Église et son Inquisition.

    Au nom d'un Unique, on a violé son visage et profané sa peau. On lui a arraché ce quel avait de plus cher, on l'a battue et saccagé sa maison. Au nom de l'Unique elle a été détruite. Une injustice des plus impardonnables aux yeux de la païenne qui avait toujours fait selon les lois, embrassan sa foi uniquement dans le privée. L'Église avait pourtant bafoué son droit. Alors aujourd'hui, l'hérétique se fera Outrage. La culpabilité viendra après le châtiment.

    Doucement, elle souffle sur une mèche d'un châtain foncé qui lui chatouille le nez puis la balafrée se tourne calmement vers ses deux comparses. Un regard se porte tour à tour sur Cerdanne et Eliane. Chacune motivée par leurs propres raisons, mais toutes deux animées de la même motivation. Sous la cape, les doigts s'activent, bandant l'arbalète dans un cric des plus significatifs.

    _ Par la porte du transept, comme prévu. Je te couvre.


    Murmure audible seul des deux femmes. A cette heure tardive, le plus fidèle des croyants dort déjà sur ses deux oreilles, la maréchaussée est passée un peut plus tôt pour sa ronde... Hors de question pour autant de s'attaquer à la porte principale.

    Un pas et la balafrée vient déchirer le voile vaporeux qui drape leur chevilles. De la fente de la cape se révèle le métal. A demie-couverte, à demie révélée, l'arbalète se tient prête à cracher son carreau.

    Cette nuit, les femmes se feront l'égale de Dieu. Au Miséricordieux d'expier ses infamies. Aux profanes de punir, au divin de payer. Cette nuit, la haine sera maitresse.

    Soumettons-nous à nos tentations
    Et délivrons-nous du mal.
    Amen.
Scopolie
A cette heure où la plus fidèle des croyantes, la plus fidèle de mes fidèles, est avec moi dans le fin fond de l'église pour se confesser, où le milicien payé huit écus et le chef maréchal -bénévole à l'origine- se baladent dans les rues sombres à l'autre bout de Craon, je pensais que cette nuit serait une nuit comme les autres, avec son lot de péchés quotidiens, de démons enfouis et de haine échangée. Moi et ma suivante étions assis sur le banc face à l'autel, nous venions de finir de prier. Égoïstement, j'ai demandé à être nommer officiellement très bientôt par l'évêque qui avait encore certains doutes me concernant dont j'ignorais la nature. Ma patiente était mise à rude épreuve, moi qui voyais aussi les jours défiler avant l’élection du prochain bourgmestre.

Depuis combien de temps ne n'es-tu pas confessé, ma fille ?

Lorsque je ne vais pas bien, tourmenter les gens me remonte le moral. Tant pis pour Sorianne, je n'ai aucun hérétique sous la main, c'est elle qui allait y passer. A la confession, et plus si affinité. Les mains jointes sur ma crosse, je tourne lentement mon regard vers elle. Mes yeux brillent d'une lueur malsaine : je la sens apeurer, et cela me plait. Avoir le contrôle sur autrui est la chose la plus plaisante que je connaisse. Avec un léger sourire mielleux, je l'incite à parler ; car la connaissant, elle ne me dira rien.

Je peux paraitre brutal et intolérant dans mes propos, parfois, mais c'est pour le bien de tous. Le laxisme gangrène l’Église et l'affaiblit : les prêtres de campagne sont trop proches du peuple pour avoir une vision objective et sanctionner les péchés ; les hauts dignitaires de Rome finissent doucement leurs jours avec leurs petits privilèges et ne se soucient pas du peuple. Moi, j'ai été des deux bords ; aussi, je pense être juste dans mes jugements. Néanmoins, je te sens douter, de moi ou du Très-Haut, je ne sais pas. Je te sens nourrir une colère sourde à chaque fois que je te réprimande. N'oublie pas que la colère est un péché, ma fille, et qu'un père aimant ne lève la main sur ses enfants que pour leur faire comprendre qu'ils font une bêtise.

C'est pourquoi je suis aussi agressif avec cet hérétique de bourgmestre spinoziste. Il s'imagine que l’Église est un tyran, et en plus il est un bourgmestre pitoyable, il suffit de voir sa "grille des prix conseillés" ou son programme municipal. Toi aussi il t'agace, n'est-ce pas ?


Et à chaque fois que je la prends dans les draps froissés, que ma crosse vient sanctionner sa maladresse et que je la traite comme une esclave, comprend-t-elle que c'est pour son bien ? Plutôt que de la laisser libre d'aller se casser le cou je ne sais pas comment, je lui trouve une utilité à mon service et je l'empêche de faire n'importe quoi. J'ai donné un sens à sa vie, elle qui vivait sans but, ne trouvant son plaisir que dans les péchés. En parlant de péchés...

Ne nourris-tu pas une certaine tristesse depuis ta séparation avec ton fiancé ? Parle, ma fille, soulage ton âme si tu veux l'élever vers notre Seigneur.

Rougis et pleure, sens comme tu es faible, comme tu étais perdue sans moi ; et vient te protéger contre moi, laisse moi faire. Sois Nous entièrement dévouée. Ainsi soit-il.
_________________
Cerdanne
D’une gorgée à une autre.
D’une bouteille à une autre.
Juste ce qu’elles savaient faire…Le minimum.

Cerdanne enroula une mèche brune autour d’un doigt et resta songeuse un instant.
Les pupilles fixées sur ses comparses, elle contemplait leur haine qui débordait par tous les pores de leur peau.
La sienne était elle aussi luisante sous la lune…Peut-être bien.
L’ivresse libère parfois les démons enfouis.

Elle commençait à entrevoir ceux de la Roide.
Le sillon de sa balafre paraissait plus rouge sous la lumière des étoiles. Fallait qu’en dedans la blessure soit plus grande pour qu’elle ait le regard aussi métallique.
Ainsi, en dehors de Judas, elles avaient un point commun.
Un sourire ironique étira brièvement ses lèvres avant que son regard se pose un instant sur la blonde qui complétait le tableau.
D’elle, elle ne connaissait pas grand-chose, et se méfiait de sa présence ici. Trop blonde entre les deux brunes.
Trop blonde et pourtant si opaque.
Son envie de participer semblait sincère, mais elle offrait, à son gout, des yeux bien trop clairs pour les réjouissances.
Elle saurait la tenir à l’œil.

L’ivresse qui toute la soirée lui avait procuré une douce euphorie ne valait pas une bonne pipe d’opium, mais l’avantage était que le voyage mirifique était de courte durée.
Ne subsistait qu’un étau qui peut à peu se resserrait autour de sa tête.
Couronne douloureuse qui décuplait sa détermination à agir lentement, proprement, pour un résultat éclatant d’opprobre.
L’église se découpait devant elle et La Provençale laissa échapper un petit rire.
Son visage se leva vers le clocher qui pointait sa flèche en offrande au ciel.

Offrande…

Se pourrait-il qu’ensuite, elle puisse se sentir libérer de tout ce qu’elle avait accumulé de rancœur et de haine et poursuivre sa route plus légère, d’avoir à son tour posé sa marque sur eux…

Le murmure de la roide la ramena du ciel à la terre humide et noire qui étouffait les pas.
Un seul hochement de tête, un seul regard qui semble dire. « Je sais que tu me couvres. ».
Le mouvement est à peine perceptible.
Les mains fines de la Provençale s’ouvrent brièvement et laissent entrevoir les crochets qui violeront le sanctuaire, avant de les refermer avec douceur.
Un dernier regarde à ses sœurs d’un soir et la brune disparait dans l’ombre de l’église..


…..



Elle l’avait déjà constaté, autour des pierres d’une église, rien ne pousse vraiment. Rien ne vit vraiment en fait.
Comme si toute vie était déjà suspendue à la parole supérieure, divine et autoritaire des serviteurs de ce Dieu Unique.
Le silence amplifiait chaque mouvement métallique des crochets. Etrangement, il lui semblait entendre ses propres hurlements comme autant d’échos.
Un seul claquement résonna pourtant dans la moiteur de la nuit.

La serrure avait avouée.
La porte s’ouvrit lentement et l’odeur âpre de l’encens l’agressa immédiatement.
Tapie contre l’épaisseur du mur, elle laissa la lune l’éclairer une fraction de seconde.
La silhouette fine sonnait l’heure de la curée…

_________________
Sorianne
Étrange. Oh oui c'était étrange. Tout paraissait calme. Même le prêtre à ses côtés. La soirée s'était passée et étirée en douceur. Elle était peu bavarde mais suffisamment. Elle avait même retenu ses sarcasmes. Envie d'un peu de paix. C'était donc ça que voulait Colhomban? Cette paix qui fait que vous n'avez à penser à rien, que le temps s'écoule doucement mais sûrement, sans heurts d'aucune sorte?

Les mains croisées sur les genoux, elle jouait distraitement avec le petit anneau doré qui ornait un de ses doigts. Dire qu'elle avait failli le rendre au tavernier lorsqu'il l'avait apporté sur une petite montagne de crème... Pas un bruit, pas un mot... Qu'il était bon de savourer le peu de tranquillité qu'il pouvait y avoir entre son bourreau et elle... Durant tout le temps où ils demeurèrent silencieux, la noiraude avait détaillé la petite église. Ils l'avaient retapé, ils l'avait nettoyé et lui avait redonné ce petit éclat perdu depuis sans doutes longtemps.

La demande claqua dans le silence, comme une sentence et la fit frissonner et tendre le dos. Combien de temps? Elle ne le savait plus. Mais elle n'était pas dupe sur la signification de la demande et la finalité qui en découleraient. Plus cela allait, et moins elle avait envie de lutter. Après tout, à quoi bon? Il avait ce qu'il voulait quoi qu'il arrive... Les lèvres pincées, elle ne comptait pas répondre à la demande, et il dût s'en douter puisqu'il enchaina... Douter de lui... Un euphémisme qui lui arracha un sourire en coin l'espace d'une seconde avant que la tête ne se baisse, et que la brune trouve un intérêt certain à ses mains. Le calme apparent dont il faisait preuve aurait presque réussi à lui délier la langue. Elle avait envie, elle avait besoin de parler, elle qui trouvait à s'isoler du monde pour ne pas avoir à répondre à des questions qui auraient pu la gêner... Une certaine tristesse? Doucement elle pencha la tête de côté, comme attendrie par le souvenir du brun nobliau au catogan impeccable qui l'avait demandé en mariage... Souvenir teinté de tristesse à l'idée que le prélat avait réussi à les séparer sans même être présent auprès d'eux... C'est doucement qu'elle se lança.


Le bourgmestre ne me dérange pas. Je ne lui ai pas beaucoup parlé. Il ne me dérangera que s'il me fait quelque chose de mal, ou qu'il s'en prend à moi sous prétexte que je suis auprès de vous. Sinon je n'en vois pas l'intérêt.

Ça, c'était fait. Elle porta ensuite le regard sur l'anneau en soupirant.

Et pour mon fiancé j'essaye de ne pas y penser. Bien sûr que ça me rend triste à l'idée qu'il soit parti... Il avait toujours été là pour moi. Il m'aimait, il me protégeait. La voix se vrilla légèrement et la petite brune porta une main à son visage pour essuyer cette fichue larme qui voulait s'échapper. C'est injuste qu'il soit parti... Mais je le comprends. Comment est-ce que j'aurai pu lui expliquer le fait que je ne veuille pas qu'il m'approche? Ce serait encore pire maintenant. Je suis contente qu'il soit au loin. Un autre mouvement en direction de son visage, en partie caché par la mèche qui s'était échappée de la natte lâche qu'elle portait. Je lui en veux aussi. Parce qu'il n'a pas tenu sa promesse. Il m'avait promis de ne jamais m'abandonner...

Un léger reniflement ponctua la phrase et elle redressa la tête.

Et je doute du Très Haut. Je doute de vous. Parce que... Parce que... La lettre dans sa poche la brûlait presque. A force de la lire, elle en connaissait la moindre ligne, et certaines l'interpellaient et faisaient écho en elle... Quel Dieu voudrait que nous renoncions à toute passion pour vivre comme de simples moutons jour après jour? Oh oui, quel Dieu...? Le Trés Haut prône l'amour et l'amitié... Pas la peur et la souffrance...

Elle savait déjà ce qui allait arriver. A quoi bon retenir ses paroles? Pour faire beau?... La jeune femme ne tourna pas la tête vers le prélat. Elle imaginait déjà l'expression qu'elle pourrait lire sur son visage. Ce qui lui passait en tête? Juste de savoir où il allait mettre sa sentence à exécution... Enfin... Sa pénitence... Banc? Autel? Pavés?
_________________

♥♥♥ Crokiiiiie
Scopolie
C'est le calme avant la tempête, mais qu'est ce que le calme fait du bien, même pour un râleur comme moi. Le repos des sens et de l'esprit, la simplicité d'une discution entre un prêtre et une fidèle, les petits bruits nocturnes d'une vieille église qui tombe en ruine. La sobriété de la pierre de l'autel. J'aurais cru que rien ne serait venu perturber ce doux moment, pas même ce bourgmestre hérétique qui ne le serait pas éternellement, foi de Scopolie. Lui aussi abjurera dans la souffrance de ses erreurs et ses fausses croyances, il goutera sueur et sang à mes pieds et seule ma crosse pourra le libérer de ses chaînes. Je... Ah, le silence qui ne cesse que pour laisser la place à une chaste confession. Pour un peu, j'en oublierai de regarder sous ses jupons. Pour un peu plus, je deviendrais un curé comme les autres, doux et aimant. Les traits de mon visage radoucis, mon regard perdu dans le monde spirituel, je souris doucement, légèrement.

Tu ne vois pas l'intérêt de sauver l'âme de ceux qui se fourvoient ? Si un voyageur empruntait un chemin le menant à une mort certaine, j'ose espérer que tu irais jusqu'à l’assommer pour lui épargner un sort si peu envieux, et lui faire prendre le bon chemin. Moi, oui. Et c'est de même avec les hérétiques. De grès ou de force, que ce soit leur corps ou leurs cendres, nous ne pouvons pas les laisser aller à la Lune. C'est pourquoi je ferai tout ce que je peux, même si cela doit enfreindre la loi des hommes, pour empêcher les craonnais de suivre un de ces voyageurs égarés.

Ni haine ni colère dans mes propos, juste une vérité claire et limpide, comme la description du mécanisme d'un moulin. Ni discorde ni débat. Juste un noble but qui demande des moyens détournés. Nullement obstiné comme j'aurais pu l'être plus tard ou plus tôt, j'écoute ses problèmes avec attention.

L'incompréhension. Qu'on soit jeune demoiselle ou vieux prélat, on s'y heurte. Elle cause colère et tristesse. Parfois les deux. C'est une maitresse jalouse et possessive : à la moindre contrariété, elle se dévoile. Elle est dans ton cœur aussi, ma fille, derrière ce sentiment d'abandon. Tous deux, vous vous aimez encore, vous voudriez continuer de vous protéger mutuellement, mais quelque chose s'est cassé, ou plutôt s'est immiscé et plus jamais ne repartira : ce sentiment que l'autre ne nous comprend pas et ne nous comprendra jamais, qu'il a changé définitivement, qu'il a pris un chemin différent et que jamais vous ne referez route ensemble. L'incompréhension que je lis dans le regard des fidèles et de certains prêtres, aussi. Nous faisons avec. Si ton fiancé n'a pas compris que consommer le mariage avant de l'avoir célébrer est un péché, tu n'as pas à t'en vouloir. Tu peux seulement continuer de pleurer sur son image et lui en vouloir de ne pas te comprendre, car le Très-Haut nous a permis de souffrir autant que d'être heureux, et a placé sur notre route des événements pour mettre à l'épreuve notre foi en lui.

Mon regard revient dans ce monde, attiré par ces petits reniflements significatifs. Elle pleure. J'en aurais presque un pincement au cœur ; mais moi, ne pleurant jamais, je n'ai aucun mouchoir à lui tendre. Alors je l'écoute pleurer. Je tends l'oreille à ces larmes qui coulent. Puis c'est le doute que j'entends. Je l'entends derrière ce masque de foi, je la reconnais.

L'incompréhension. Le doute est une incompréhension, sa forme la plus vile car elle s'attaque directement à la source de l'âme : la foi. Ainsi, tu ne comprends pas pourquoi notre Créateur a demandé à Christos de fonder une institution qui obligerait Ses enfants à ne pas se perdre ? Ma fille, tu devrais pourtant comprendre mieux qu'aucun homme : demandes-tu à cet Anglais de céder au moindre caprice de ton bâtard ? Non, car il est captif, comme un simple mouton, on l'empêche d'exprimer ses passions, comme aller gambader loin de toute surveillance ou manger quelque chose trop gros pour qu'il n'y ait aucun risque qu'il s'étrangle. La même incompréhension habitude la plupart des gens, celle qu'ils ont eu toute leur enfance, car ils ne voyaient pas le danger. La peur de la punition, la souffrance d'une claque bien sentie, ne sont que des barrières pour t'épargner un mal plus grand : celui de perdre ton âme au profit du Sans Nom.

Avec tendresse, ma main vint se poser sur sa cuisse, pour appuyer ses dires. Je ne voudrais pas qu'il arrive quoi que ce soit à sa chair ferme, sa peau douce et parfumée. Le banc.
_________________
Anaon
    Les azurites couvrent les gestes feutrés de sa comparse qui s'élance en silence, mais bien vite le regard retourne embrasser les ténèbres des alentours. Le cerf est aux abois. L'œil se fait alerte, gardant pour seule ligne directrice le corps de l'arbalète qu'elle tient sous son visage. Si elle veux éviter tout grabuge inutile, la carreaux lui ne manquera pas de bénir le premier inopportun qui se montrerait un peu trop curieux.

    Le silence décuple les bruissements, galvanise même la perception du monde. Ça vous colle le cœur dans les oreilles et l'adrénaline au sang. Mais si au fond d'elle la Géhenne s'éveille, rien ne vient perturber l'impassibilité de ses traits. Immuables. L’émotion n’y a pas encore sa place. Elle porte pour visage un tombeau qui se garde bien d'exhiber les cadavres qui lui ronge les tripailles. Trop de sang-froid, trop de glace. L'Anaon a la haine muette... mais le silence des plus éloquent. Et pour seul traitre, un regard d'une intensité marmoréenne qui farfouille sans pudeur les entrailles de la nuit.

    Cliquetis dans l'ombre. La balafrée fronce imperceptiblement les sourcils. La prudence grimpe d'un cran. Quelque instant à retenir son souffle. Elle ne répond pas de suite au signal de Cerdanne, préférant attendre un peu que le bruit se fasse oublier des oreilles qui aurait put trainer. Puis le souffle reprend son ampleur avec précaution. Sans décrocher son regard du voile des rues et leur danger, la mercenaire se tourne légèrement. Eliane va devoir rejoindre l'édifice, la balafrée suivra en dernier.

    Si l'Anaon sait pourvoir compter que les compétences combatives du Chardon en cas de pépin, elle en ai bien moins sûr en ce qui concerne la Piccolini. La blonde a des talents, çà elle le sait bien, mais le combat et la torture sont deux choses relativement différente. Et cette incertitude contrariait légèrement l'esprit paranoïaque de la mercenaire. Si elle ne la regarde pas, l'attention se porte un instant sur le souffle dans son dos. Au vu de l'âge de la blonde, l'Anaon pourrait bien être sa mère, et pourtant cette "gamine" est bel et bien sa patronne en d'autre lieu et circonstance. Ironie. Drôles de bourreaux que ces deux donzelles qui s'apprêtent à profaner la dignité divine.

    Une bref œillade vient accrocher le regard de la blonde. Un rapide signe de tête pour commander le départ et le regard de l'ainée retourne bien vite à sa surveillance. Eliane n'a plus qu'à courir maintenant.

    Le temps s'écoule, précieux.

    Patience Très-Haut, patience. Toi qui m'a façonné à l'image de tes préjugés, je m'en viens bien vite te prouver l'échec de tes laquais.
    En voulant crever une Foi, tu l'as ravivé.
    En voulant crever un monstre, tu l'as engendré.

_________________

Images originales: Victoria Francès, concept art Diablo III - [Clik]
Sorianne
La noiraude se raidit au contact de la main sur sa jambe. Mais résignée, elle eut un temps de latence avant de faire un mouvement, avant de finalement essayer de repousser doucement la longue main posée là de la sienne. So avait bien conscience que de toutes façons il ne servirait à rien de lutter, et elle était fatiguée depuis quelques jours, le sommeil la fuyant.

Quelque chose qui s'était immiscé... Quelque chose qui avait cassé le lien qu'ils avaient noué au partir d’Angoulême... Quelqu'un plutôt... Oui, si quelqu'un était responsable de tout ceci c'était lui... Lui et ses méthodes étranges. Lui et ses Pardons des plus chers... Sa faute si elle n'avait jamais pu se laisser approcher de trop près par celui qui était son fiancé, de peur de fauter, mais plus encore de peur de ne faire que repenser au prélat.... Et elle était aussi responsable et elle le savait bien. Pourquoi ne pas se laisser aller tout simplement?

Il avait raison, même si elle s'estimait suffisamment grande et adulte pour ne pas avoir à être guidée comme une enfant que l'on éduque. Sans doutes avait-elle tort... Bientôt elle sentirait ses mains sur elle, la barbe rugueuse et piquante sur sa peau... Elle ne put retenir un frisson avant de pencher doucement la tête de côté avec un soupir.


Je ne suis pas un mouton... Je veux être mon propre guide et je ne suis plus une enfant à qui l'on se doit de dire de faire ci ou ça...

Voix blanche, nullement haussée, presqu'un murmure, une confidence... Fais vite ton œuvre que je puisse aller m'endormir... Ma conscience soulagée de ce peu de chose, cela ne devrait plus être un souci... Goûtons donc le bois de ce banc et ne t'attardes pas...
_________________

♥♥♥ Crokiiiiie
Eliane_
La force ne vient pas des capacités physiques, mais d'une volonté invincible. Gandhi.

Arbalète en main pour l’une, expérience du terrain pour l’autre. Eliane ne dit rien face à ses regards en coin, à moitié inquisiteur, à moitié douteux, perplexes et juges. Elles sont habituées au combat, cela se voit dans leur aisance, dans leur assurance et pourtant, peut être que leur esprit se limite à tort à l’apparence. Blonde mais loin d’être sotte, femme mais loin d’être frêle. Sa force n’est pas dans les coups de poings, dans le maniement d’une épée ou dans sa capacité à armée une arbalète, non, sa force est de celle qui ne se mesure pas aux hommes touchés mais à la détermination. Et à ses regards inquisiteurs et voilés, elle se fait muette, un brin amusée et hautaine.

Sa volonté est là, ferme et saisissante, entourée d’un voile de folie. Elle s’était alliée à ses femmes quasiment inconnues pour assouvir sa Vendetta, pour retrouver une trace d’humanité ou au contraire, franchir un nouveau pas de plus vers sa propre perdition. Elle veut apaiser son âme, rééquilibrer la balance entre son passé marqué par le fer et le présent qu’elle marquera par le feu.

Loin de Saumur, à quelques pas de l’Eglise de Craon, siège du Très Haut et des abominations, de ces paroles manipulatrices et si ensorcelantes. Le Malin est combattu et pourtant il y règne à travers l’intolérance et la torture, masque si fourbe qu’il est à peine visible. Ils sont fous ces hommes qui agissent au nom d’un Très Haut, ils sont puissants ceux qui se prévalent de ce Nom pour asservir et tuer…Propagandes et Violences…

Eliane inspire doucement, croisant un instant le regard de Cerdanne qui se dirige vers une porte à l’abri des regards. La blonde sait très bien pourquoi elle est là et il serait bon que sa consœur s’occupe désormais de sa propre mission au lieu de la lorgner ainsi, pareillement pour Anaon. Eliane n’a aucun doute, c’est une volonté inébranlable qui envahit ses veines et anime son palpitant. Elle veut redonner au Malin ce qui lui appartient, rendre aux flammes purificatrices ces paroles, ces parchemins et ces Pardons trop couteux et perdus.

Elle sort enfin de ses songes pour se concentrer sur la brune au loin qui semble avoir réussi à décrocher la serrure. Un bon point et c’est le temps alors pour elle et pour Anaon d’avancer et de rejoindre cette antre. Sa main droite se pose alors, sur la dague à son ceinturon, sur ces deux torches fermement lacées et à ses deux bourses contenants quelques pierres de feu. Elle n’en fera certainement pas usage, c’est le feu qui l’attire même si l’odeur de chair brûlée est de celle qui la touche le plus.

Prudente, elle attache sa chevelure blonde et la range dans son capuchon. Sa folie est certaine, on la disait même destructrice et pourtant, face à la Raison, elle savait se faire moindre. Eliane avait des obligations au sein du Purgatoire et si elle désirait poursuivre sa vie et tuer en toute innocence des hommes de foi, elle allait devoir cacher au mieux son visage, pour chacun de ses actes.
Quelles appellent cela, couardise, si elles désirent se faire langue de vipère, Eliane sait simplement qu’il vaut mieux avoir un peu d’esprit de temps à autre, que se faire repérer et brûler deux jours après. Elle remonte alors son col qu’elle serre au niveau de son nez. Ne reste alors de visible que ces prunelles noires, déjà bien assez à ses yeux. Elle sera certainement prise pour une brigande, une apparence de plus sous laquelle il était bon de se lover…

Attendant le signal de l’Anaon, Eliane s’avance donc, le pas pressé, foulant cette brume qui se reforme après son passage. Etroit sillon brisé par la détermination et simplement recouvert par l’insouciance de la Nature, c’est une soirée comme une autre après tout…Sauf pour ceux qui seront prisonniers des flammes. Arrivée enfin à la hauteur de Cerdanne, sa main se pose sur son épaule et elle lorgne doucement à travers ce fin rideau de lumière. Scène à moitié aperçue de ces deux entités présentes qui leur tournent le dos. Un homme et une femme, dont la voix portée de l’un, ne lui semble pas inconnue.

C’est l’heure de s’immiscer, discrètement et furtivement. Un passage qui alors se fait plus large pour qu’elle puisse s’avancer en première. Prudente aux pas de velours qui finit par se glisser derrière un mobilier. Aucune personne n’était là pour troubler leur insertion, leur dessein…
D’un geste, elle lui fait comprendre qu’elle peut la suivre en toute quiétude. La soirée débute…Et l’appréhension n’a aucune place en elle…Elle fera payer à ces hommes, le prix de ses marques, le prix de ses coups…

Trois femmes sont là, unies par le même désir de Vengeance…Loin de toute humanité, simplement guidée par le goût délicat du Châtiment.

_________________

Envie d'un RP ? Envoyez un MP précis, sans tabou.
Scopolie
Prenez les mêmes et on recommence. J'ai l'impression que la patience ne mène à rien, qu'il faut contraindre les gens la plupart du temps. Christos a été un exemple de patience, et tout le monde sait ce qui lui est arrivé. La patience est une vertu, mais ce n'est pas en étant vertueux qu'on lutte efficacement contre les hérétiques qui usent, eux, de tous les moyens possibles. N'est-ce pas la troisième ou quatrième fois que Sorianne me rétorque ne pas être un mouton, et autant de fois que je vais lui donner une explication à chaque fois reformulée comme autant d'embouts pour trouver celui qui irait au plus profond de sa Raison ? Ma main se crispe sur sa jambe. A chaque fois elle arrive à me couper toute envie, elle et ses protestations infondées. Je prends une profonde respiration et je réponds le plus calmement possible, c'est à dire avec un certain agacement dans la voix.

Il n'y a qu'un chemin acceptable, celui tracé par les enseignements d'Aristote et Christos. Un chemin sinueux et étroit, bordé de fruits appétissants, les péchés, là pour te détourner du chemin.
Il y a une multitude d'êtres dans l'erreur, qui se goinfrent de ces fruits, laissent couler leur jus sucré sur leur gorge grasse, et narguent ceux qui suivent le bon chemin sans montrer les os dans les buissons.
Il n'y a qu'une seule et unique façon d'arriver au bout de ce chemin : suivre un de ces bergers qui connaissent le chemin, qui voient les dalles que les autres ne voient pas.


La métaphore semblait assez clair : marche derrière moi ou crève d'indigestion sur le bas-côté. Le bout de mes doigts s'insinuent dans les plis de sa robe, viennent caresser la peau fine à travers le tissu et profiter de la chaleur de ce corps soumis.

Chacun de tes doutes est autant de regards vers ces fruits et ces gourmands. A force de les regarder, tu seras à leurs pieds sans même t'en rendre compte. Si tu es ta seule guide, tu vas te perdre, et tu auras perdu de vu les bergers qui étaient tes yeux pour voir le chemin.

Avec le temps, elle doutait de plus en plus, elle qui était si naïve quand je l'ai connu, si admirative des vérités que je lui apportais. Maintenant, elle semblait étouffer, telle une chienne à qui on tirerait la corde trop fort. Il fallait que je lui laisse un peu de leste, que je lui accorde un peu de vérité pour retarder l'échéance : un jour, je serais obligé de me débarrasser d'elle.

Bien sûr, tu dois douter, au moins une fois dans ta vie, pour savoir pourquoi tu suis le Berger. Même s'il vaut mieux ne pas quitter du regard le Berger que de le quitter des yeux trop longtemps, il faut trouver un juste milieu entre sa progression sur le chemin menant au Paradis et se souvenir de la raison pour laquelle on fait tout cela, ne pas devenir comme tous ces gens qui ont oublié le Message Divin.

Je la sentais sceptique, toujours. Même si elle acquiesçait sur le moment, le doute persistait en elle. Je tirais sur la mauvaise corde pour la faire avancer dans la direction que je désire. Plus doux encore que précédemment, je concluais :

Ma fille, comprends-tu maintenant pourquoi je ne peux pas te laisser regarder ailleurs que vers moi ? Tu as vu ces fruits, tu les as goûté. Mais tu n'as pas vu les corps dans les buissons. Tu n'as pas vu le funeste destin de ces gourmands. Ne serait-ce que pour l'âme de ton enfant, je ne peux pas te laisser retourner auprès d'eux, même si pour ça je dois te donner l'impression d'être un tyran.

Et de refermer mes doigts sur sa cuisse frêle et offerte, pour que plus jamais elle n'ait envie de goûter à la luxure, mais qu'elle se laisse volontiers aller au pardon de ses fautes. "Le larcin, l'inceste, le meurtre des enfants et des pères, tout a eu sa place entre les actions vertueuses" (Pensées, Pascal).
_________________
Cerdanne
Le froid épais des églises l’avait toujours dérangé.
Pour elle, aucun apaisement possible dans ce lieu de prière.
Les murs solides, trop haut, trop pesants, les lumières trop changeantes et l’autel inaccessible.

Un seul homme avait réussi à l’y trainer.
Temps reculés, étouffés dans sa mémoire.
Époque insouciante ou seul un chat errant avait su l’apprivoiser et lui redonner le gout du rire.
Se suspendre aux cordes des cloches qu’ils sonnaient ensemble, à la volée, sous le regard bienveillant d’un curé pas comme les autres.
Partager le pain, le vin dans un grand brouhaha et oser croire enfin Que Ce Très Haut là était pas si mauvais que ça et tolérait ses propres croyances.

La Brune, machinalement, chercha l’étroit passage qui menait au clocher..Lysian devait l’y attendre peut-être, la bouche pleine des cerises qu’il picorait comme un piaf..

…..

Patiente, elle attend ses comparses et c’est la blonde qui se pointe, silhouette dissimulée d’où seules les billes noires émergent d’un éclat mauvais.
Pressée, la donzelle entre sans plus de manière.
La brune l’observe et absorbe sa détermination à prendre place ici.

Oui mais il manque la roide à la fête et Cerdanne attend patiemment sa venue.
Regard froid posé sur la silhouette de bure qui domine une ombre frêle, là bas dans un recoin de la nef.
Oreille tendue pour tenter d’accrocher les mots qui résonnent entre les murs.

Un pas, un pas de plus et la Provençale écrase ses souvenirs heureux. Un pas de plus et la brune retrouve sa haine.
Accumulée, choyée et précieusement mise sous clés. Il est temps d’ouvrir le bal des damnés.
Le regard fixé sur la silhouette de bure penchée sur l’ombre frêle , elle se déplace sans bruit.

Parce qu’elle n’aime rien de moins que la froideur, elle s’éloigne de la blonde dissimulée et de piliers en piliers se rapproche de l’homme.
Les azurs givrés par la folie qui la tenaille.
Les brulures de son dos retrouvant un souffle de vie….

Anaon ! Dépêche ! …L’heure des comptes a sonné. Il est plus que temps.

_________________
Anaon
    Course de la blonde et dernier regard de saphir qui vient couvrir les alentours. Quelque instant après l'entrée d'Eliane c'est la mercenaire qui s'élance pour gagner le couvert de l'édifice. La main n'attend pas pour refermer vivement, mais silencieusement, la porte du transept. Et au dos de trouver appuie contre le plat du bois. La contrariété arrive bien vite quand il coule dans son esgourde l'écho de quelque paroles qui naissent du cœur de la nef. D'un bond, la balafrée va trouver refuge dans l'absidiole. Corps soudé à la pierre qui lui fait appuie, d'un rapide mouvement de tête, elle risque un regard dans les entrailles de la battisse. A la lueur chevrotante de quelque cierges blafards, deux silhouettes se découpent pieusement de l'obscurité qui leur fait un cocon.

    Gast! La femme retrouve brusquement le plat du mur.

    _ Par tous les Dieux et leurs catins!

    D'un geste sec, elle ramène sa capuche sur son visage et remonte son cache-nez en tirant rageusement sur les lacets qui le tiennent fermé. Si elles avaient choisi pareille heure pour commettre leur larcin c'était bel et bien pour s'assurer d'un semblant de tranquillité et de sécurité. L'hypothèse d'une présence malgré la nuit avait été prise en compte et elle se fait maintenant réalité... Et ce n'est pas pour réjouir la mercenaire.

    Un regard se rive sur le Chardon découvert qui a déjà trouvé l'abri de quelque pilier. Bien vite la dextre vient tâter sa besace et s'y engouffre pour extraire une des étoffes destinées à étouffer les cliquetis de leur futur butin. Œillade au tissu trop léger qu'elle n'arrivera pas à lancer assez loin et les azurites avisent un cierge à porter de main. Sans plus de cérémonie les doigts viennent briser la cire puis enroulent grossièrement l'étoffe autour du bout de bougie. Et de jeter le tissu lesté dans la caboche de la brune. Un regard réprobateur est lancé à sa comparse et d'un geste sec elle tire sur sa capuche pour lui faire comprendre son imprudence.

    Et les mains reviennent s'ancrer sur le manche de l'arbalète. Les yeux se ferment un instant tandis que l'oreille se tend. Les sens se déploient et s'agacent à la perception de cette atmosphère qu'elle exècre bien trop. Son sang frissonne un instant, alors que l'air glaciale la ramène près de dix ans en arrière.

    Les églises. Pour elle, ce ne sont que des tombeaux géants. Des mausolées de silence. Une prison de pénitence ou des chiens fidèle viennent se répandre en lamentation et se limer les genoux en génuflexion devant des idoles en supplice. L'air y est toujours impalpable, glaciale et pesante. Indescriptible. De quoi lui limer les nerfs à vifs. Les narines se dilatent et hume les embruns d'encens si caractéristique qui agresse son odorat. Elle n'avait pas remit les pieds dans une église depuis le funeste jour où elle s'était vidé de son sang sur ses pavés. A ce souvenir, sa cuisse droite s'emballe de quelque crispation spasmodique. Réminiscence de chair. Les jours de pluie et les heures de fatigue, l'allure de la mercenaire se fait boiteuse à l'éveil de la plaie qui lui barre la cuisse d'un côté de l'autre, mais se sont pourtant des cicatrices plus fraiches qui l'ont mené ici. Celles qui lui ont crevé les joues et laminé le dos.

    Les azurites se révèlent alors et l'immobilité demeure encore le temps de s'étouffer avec les dernières paroles prononcer par la voix masculine. La visage pivote, le regard cherche celui de Cerdanne. Il faudra faire vite ma belle. Que le silence macabre de la sainte bâtisse ne se brise pas d'un cris malvenu.

    Les doigts s'affirment de plus plus belle sur l'arme, tandis que la voix placide s'élève dans l'obscurité.

    _ " Prenez et mangez, ceci est mon corps... Buvez-en tous, car ceci est mon sang". Macabre lubie que de vouloir dévorer son dieu à chaque messe et de courber l'échine devant le symbole de son ultime souffrance. Et se sont les païens que l'on traite de barbare...

    Au cœur des murailles de pierres le silence impose son règne, à peine briser par les pas de velours qui fendent l'obscurité pour s'arrêter dans la pénombre de la nef.

    _ Ose ouvrir la bouche et je fauche ton cris avant qu'il n'aie eu le temps de franchir la barrière de tes dents.

    Dans l'ombre le regard jauge la femme, frêle et le métal du carreaux se plait à accrocher la lumière faiblarde qui filtre des percées. Menace scintillante qui se tourne imperceptiblement vers l'homme en bure.

    _ Un son de travers et je redore les dalles de ta cervelle.

    Timbre impavide. Si la mercenaire est du genre à éviter les effusions sanguines inutiles, elle pourrait pourtant bien vite prouvée que sa parole est d'or quand il s'agit de menace.

    Et ses deux comparses ne seront pas plus tendre qu'elle...

_________________

Images originales: Victoria Francès, concept art Diablo III - [Clik]
Sorianne
Les nuits et le sommeil agité, celles où elle n'arrivait pas à trouver ce dernier... Ce jour là, elle payait tout cela, s'adonnant même à des confidences à l'oreille attentive de son bourreau. Peut-être était-ce dû à l'ambiance feutrée qui régnait? Au calme ambiant? Même lui semblait étrangement apaisé et les sens de la noiraude s'y trompèrent. D'une main fine passée sur la joue, elle chassa la dernière larme qui s'était échappée malgré toute la volonté de la jeune femme à ne pas se laisser aller en présence du prélat. Depuis combien de temps n'avait-elle pas évacué tout ce chagrin qui la rongeait?

So frissonna en sentant les doigts glisser doucement sur sa jambe, et fermant les yeux, laissa échapper un soupir las. Empourprée, elle préféra laisser faire. Ne valait-il pas mieux laisser passer une caresse et être en paix pour le reste de la soirée, plutôt que de tâter du bâton et se faire sermonner? L'envie de lutter était loin. Son esprit fatigué vaquait déjà vers d'autres cieux, d'autres lieux. Que devenait le brun nobliau qui l'avait aidé? Que devenait ce fiancé perdu? Était-il heureux avec sa baronne?

La main qui se referma sur sa cuisse la fit sursauter, et réouvrant les yeux, la mine pâle, la brune chercha à repousser les serres qui s'appropriaient son corps. Agrippée aux doigts du curé, la So leva le nez vers lui, le regard implorant. Si elle s'y était résolue, elle avait toutefois gardé l'espoir de se tromper quant à l'issu de la discussion. L'air calme et paisible qu'il affichait la chagrinèrent plus qu'autre chose. Non, elle n'avait pas envie de lutter ce soir. Doucement, elle relâcha son étreinte, libérant la main inquisitrice et referma les yeux en se laissant couler contre le prélat. Qu'il prenne, aisée serait la tâche puisqu'elle ne comptait pas aller contre sa volonté cette nuit. Ainsi ce sera le banc...

C'est à peine si elle sentit ce léger courant d'air qui vint lui souffler sur la joue, faisant danser les cheveux échappés du lacet noué à sa nuque. Il ne l'inquiéta pas outre mesure, elle qui était si occupée à penser à ce passé regretté. Et l'écho d'une voix résonna sous la voûte. Une femme... La petite brune se redressa aux paroles prononcées, et se tourna afin de voir qui parlait. Une ombre tapit loin de la lumière conférée par les bougies et les cierges. Une ombre à peine devinée, mais l'éclat décelé accompagnant les menaces et la noiraude frémit. Qui? Muette ce soir, ou presque, la So, sourcils froncés, perplexe et inquiète, ne dit mot. Sans doutes était-ce préférable...

_________________

♥♥♥ Crokiiiiie
Scopolie
Victoire. Les derniers remparts, ces doigts fins et faibles, cèdent à la pression de ma main caressante. Bientôt, la forteresse serait envahie et pillée de ses richesses, n'y laissant que des ruines. Un jeu sans conséquence, ou si peu, à la différence près que nous ne sommes plus des enfants pour jouer avec des figurines en bois sculpté. Mais c'était sans compter sur ce dur retour à la réalité : le monde est plein de violence, nos corps sont manipulés par les pulsions malsaines et nos âmes sont hantées par le passé qui resurgit certains soirs.

La voix de la folie résonne dans la bâtisse. Surpris, je m'écarte de Sorianne par réflexe, ma main venant saisir ma crosse. Si c'était un voleur trop audacieux, je lui aurais ouvert le crâne en deux. Voilà bien longtemps que je ne m'étais pas battu, mais j'ose espérer avoir garder quelques compétences de ma jeunesse dans le maniement du bâton de guerre. Je me retournais lentement vers l'intruse, posant mon regard sombre, accentué par la lueur d'une bougie, sur elle. J'étais calme, détendu, et me voilà tendu, énervé, prêt à en découdre.

J'ai horreur qu'on me menace. Pourtant, ce n'est pas la première fois que j'aperçois le fer d'un carreau briller dans ma direction. Souvenirs d'une Cour des Miracles agitée par une émeute, celle des déchets de la société terrifiés par les rats nouvellement arrivés, des fous sanguinaires qui tuaient tout le monde. L'une de ces vermines m'a tiré un carreau dans la jambe tandis que je canalisais l'attention de la foule. Mon expérience parlerait donc pour moi, c'est-à-dire garder le silence. Je me souviens que trop bien de la douleur que produit un tel instrument, alors pourquoi risquer son intégrité physique pour quelques écus ?

Deux autres silhouettes se détachèrent de l'obscurité. Je restais debout devant le banc, immobile, observant avec attention les faits et gestes de ces énergumènes. Ils sont trop bien vêtus et armés pour être de vulgaires voleurs affamés. Trop intelligents sûrement pour ne pas savoir qu'on ne fait pas fortune dans une église, sauf peut-être en priant très longtemps. C'est un tout autre but qui les amène, et cela a sûrement un rapport avec le bourgmestre hérétique de Craon au vu de leurs propos. Ce sont sûrement des mercenaires envoyés par ce misérable pour m'éliminer, cela ne fait aucun doute.


Qu'est ce que vous voulez ? demandais-je à voix basse pour que le doigt sur la gâchette ne bouge pas tandis que j'observais froidement le trio infernal.
_________________
Eliane_
"La liberté s'allume dans les ténèbres." de Nicolas Berdiaev

Les raclures ne sont pas celles qui se nichent dans les ténèbres, mais celles qui se meuvent sous la lumière divine et qui arborent les paroles célestes pour leurs propres fins...
Cet homme et cette femme, elle les a déjà vus dans la taverne saumuroise, Scopolie et Sorianne, mais elle ignorait alors le lien qui pouvait les unir. Prêtre manipulateur et croyante possédée par l’esprit et certainement le corps. Ses iris se rivent sur cette main posée sur la cuisse, sur cet élan de courage qui émane telle une lueur timide et tremblante. Mais le souffle, les paroles divines se posent et terrassent cette lueur. Les ténèbres triomphent.

Toujours nichée dans l’ombre d’une colonne, Eliane inspire doucement et ferme un court instant les yeux. Souvenir du couvent et de cette manipulation incessante et destructrice. Fervente croyante qui peu à peu avait réalisé que sa liberté ne pouvait émaner que par un rejet total du culte. Ils sont forts ces hommes qui jouent de la dévotion et de la foi pour servir leur égoïsme et leur perversion…Impossible d’en vouloir à cette femme et à son abdication…La blonde en avait fait les frais et avait eu bien du mal à retirer ses liens, ses chaînes qui étouffent l’esprit et l’âme…

Les yeux s’ouvrent. La délivrance se jouera ici lieu.

Les trois femmes avancent sur le sol béni affichant enfin leurs silhouettes. La voix d’Anaon s’élève, crachant venin et vérités et met ainsi un point final à cette sordide machination. Le curé s’écarte, le carreau est fixé et sa voix retentie pour trouver une réponse à leur intervention. S’il savait.

La blonde décroche l’une des torches de sa ceinture et fouillant de sa dextre libre sa besace, finit par en sortir la pierre de feu. Le choc se fait contre le granit de l’hôtel et l’étincelle vient rencontrer l’huile qui imbibe le tissu de la torche. Sa voix reste close à cause de son accent italien qui ne saurait que trop bien la trahir, et pourtant, elle annonce la suite des évènements et le sens même de leur motivation à sa manière…
Eliane s’empare de ce pavé religieux qui orne l’hôtel et l’ouvre grossièrement. Le geste est hanté par la folie hérétique. La torche est placée sous les paroles saintes qui finissent par être rongée par le feu de la Délivrance. Voilà ce qu’elle était venue faire, lui nuire et nuire également à cette Eglise, tirer un trait sur ce passé qui les ronge et honorer la Vendetta.

Les parchemins sont jetés à même le sol et les flammes continuent leur office. Ils voulaient détruire les hérétiques par le feu, brûler les sorcières par le souffre…Alors ainsi soit-il, il en sera de même pour tous ces écrits anciens et puissants et certainement du reste….

Son corps reste droit, fier alors qu’à ses pieds la foi se consume. Un regard est adressé à Cerdanne et Anaon, la suite allait se faire également, à chacune sa façon de procéder et d’obtenir satisfaction. Eliane ne l’aura qu’en embrasant ce lieu de culte et qu’en marquant le corps du Scopoli.

Un prêté pour un rendu…
Le feu pour le feu,
La souffrance pour la souffrance.

_________________

Envie d'un RP ? Envoyez un MP précis, sans tabou.
Cerdanne
Elle penche juste un peu la tête, admettant par là même le bien fondé de l’Anaon.
Le foulard improvisé lesté de cire bénie arrive comme un cadeau entre ses doigts fins.
Masquer le visage, masquer la voix qui se déformera sous la chaleur du tissu.
Masquer la chevelure brune qu’elle torsade d’un geste coutumier.
Et garder l’éclat des prunelles.
Une lumière particulière et que peu connaisse.

L’instant d’après, la Provençale est autre.
La roide, d’un geste anodin venait d’ôter le dernier verrou des gestes mesurés.
Mauresque qui souplement se déplace d’un pilier à un autre et se rapproche du couple.
Tranquille et nullement pressée. Il y en aura pour tout le monde.

C’est la roide qui, la première, ouvre leur nuit.
La voix calme lui arrache un rire que son bâillon volontaire étouffe.
Un instant, elle imagine les dalles du lieu sacré luisante d’un nectar sombre et brillant.
Frêle silhouette, Cerdanne s’avance à ses cotés pour mieux appuyer la menace de l’Anaon.
Son regard givré fixé sur l’homme à l’allure négligé et qui s’abrite sous la bure. Une main négligemment posée sur sa dague.

La brune, elle, elle observe. Et cet homme qui tout à l’heure tenait fermement la chair d’une fidèle entre ses mains, les regardent et questionne.
D’un bond Eliane, avide, s’est déjà précipité.
Les flammes…ainsi donc, ce sont les flammes pour elle cette nuit.

Cette église est peu riche et les quelques reliques et objets qui trainent ne valent rien.
Juste la symbolique qu’elles sont venues piétiner, bafouer, renier.
Encore une fois..

Son regard toujours fixé sur l’homme, elle s’avance encore un peu
Cette bure là, elle l’a déjà croisé.
Ainsi le bon samaritain qui se proposait de l’aider à sauver son âme, avait trouvé d’autres agnelles à arracher des flammes de l’enfer.


Curé !
Ta crosse ! Lâche là !


La voix adoucit, chaude et rauque murmure presque…

Décale-toi ! Décale-toi encore !

Les flammes que la blonde attise les entourent d’une aura particulière et La Provençale revoit les siennes, sournoises, jamais éteintes.
Son regard assombrit cherche celui de la petite brune collée à l’homme d’église, il y a peu…
Les éloigner l’un de l’autre dans un premier temps.
Éviter une éventuelle union, volontaire ou pas…


Embrasse donc le sol de ton corps douloureux, curé.
Bras en croix, offre nous donc ton sacrifice…

_________________
See the RP information <<   1, 2   >   >>
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)