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[RP] Lettres à ma soeur Khy-ne-l'est-pas

Davia_corsu
[Quelque part en Maine, dans le trou du cul du Royaume, à compter les brebis, ou à cueillir les fruits]

La guerre c'est bien. Si! Si! C'est bien parce que pour une Blanche ça entretient son moral. La trêve, c'est nul. Ben oui, ça signifie ennui mortel, pilier de comptoir, cuite et compagnie, cueillette, pêche, dans une ville qui n'est pas la sienne, à se morfondre d'autant plus que sa Cap' a envoyé son fiancé-amour-amant à l'autre bout du duché. En gros: grosse déprime.

Ce qu'une Blanche en guerre aime le plus? La trêve.
Ce qu'une Blanche en trêve aime le plus? La paix.
Ce qu'une Blanche en paix aime le plus? Repartir en mission.
En fait, cette Blanche là n'est certainement jamais satisfaite.

Et pendant ce temps, la Blanche pense à sa famille, ses amis, son amour, son duché, bref, tout ce qui se passe loin, loin, loin très loin d'elle.

En ce moment, sa préoccupation première, outre les élections tourangelles qui étaient imminentes, c'était le mariage de son frère.

Et oui, son PETIT frère allait se marier. Avec une gourgandine qui sympathisait avec l'ennemi. Non content d'être le PETIT frère, il fallait qu'il aille s'acoquiner avec une copine du Ponant.

Du haut de ses seize printemps tout rond, la jeune fille avait d'abord très mal pris que son PETIT frère se marie avant elle. Finalement, après échange épistolaire avec son père, elle avait fini par se dire que l'important était le bonheur du-dit PETIT frère et que, d'après le paternel, la jeune fiancée était une femme bien - même si c'était une gourgandine amie des ponantais.

Bref! Possédant un grand coeur, comme chacun le sait, la jeune Corsu finit par se dire que l'idéal était d'apprendre à un peu mieux à connaître celle qui s'apprêtait à sceller alliance avec le Clan Corsu.

Installée dans sa tente sur la petite table qui lui servait d'écritoire, elle s'apprêtait donc à pactiser avec l'ennemi.
Plume, vélin, inspiration, expiration, concentration. On y était.




A Khy, ma future belle-soeur,
De Davia Corsu de Villandry
Escuyère et Lieutenante de l'Ordre de la Dame Blanche à l'Ecu Vert
Ambassadrice de Touraine pour les OR et OMR


Déjà, faire péter toutes ses fonctions, ça fait classe, surtout devant sa future belle-doche. Genre: "T'as vu, tu vas pas intégrer une famille de m***erdeuuh!"



Ma Chère future belle-soeur,

Nous ne nous sommes vues qu'une fois, fort rapidement en taverne à Loches, mais je vous écris ce jour, car me prend le vif désir de mieux apprendre à vous connaître.
En effet, si mon frère vous épouse, nous serons, comme qui dirait, soeurs! Et deux soeurs se doivent de s'aimer et de se chérir mais pour ce faire, il faut un peu se connaître.

Mon père m'a dit que vous étiez une jeune fille au grand coeur et que vous aviez la trempe d'une Corsu. Je l'espère car vous savez combien l'honneur est important dans notre famille.


Ensuite, mettre un peu de paumade, être gentille quoi, amadouer la biche, puis ne pas hésiter à faire un peu peur, c'est qu'elle va devenir Corsu, morbleu, ce n'est pas rien!



Sachez qu'en épousant mon frère, c'est notre clan que vous épousez, vous serez ma soeur, vous pourrez compter sur moi, pour tout. La famille c'est sacré.

C'est d'ailleurs pour ça qu'il me coûte tant d'être loin d'eux, si longtemps. Cette fichue guerre dure dure et la trêve n'arrange pas notre affaire, nous sommes toujours mobilisés. Je maudis le Ponant et ses soifs d'indépendance, ses désirs de grandeur. Il me tarde tant de retrouver Batti, de vous voir en face et de serrer mon père dans mes bras.


Et enfin, on se plaint un peu, parce que ras le bol d'être loin des siens et puis surtout, surtout! on porte l'estocade, on parle du sujet qui fâche, juste pour voir si ça va mettre le feu aux poudres.



Ma chère soeur, permettez-moi de vous appeler ainsi, il me faut déjà vous quitter afin d'aller m'entraîner. L'oisiveté est mère de tous les vices et ma lame a grand besoin de se dérouiller.


Vous ne pensiez pas qu'elle allait dire qu'elle filait en taverne se payer quelques bières, non?



Prenez soin de vous et de mon frère. Que le Très-Haut vous garde.

Je vous embrasse comme je vous aime.

Davia


Et voilà, empesez le parchemin, empaquetez le tout et hop direction KHY, à vitesse de PGV (Pigeon Grande Vitesse).
_________________

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Khy
[En Berry, par mon kiki !]

- Grumpf...

Soupir las d'une brunette étalée en travers d'un lit confortablement agrémenté de coussins & autres draps inutiles.
La Suzon s'occupe à inculquer quelques notions de savoir-vivre à une Juliette hystérique, Alix s'en est allée au marché faire quelques commissions pressantes, Ripouf doit sans aucun doute traîner dans un tripot du coin tandis que Nashia se prélasse sûrement dans les draps d'un nouvel amant.


- Grumpf de grumpf...

Et elle, elle s'emmerde. Profondément. Et elle ne fait rien pour changer la situation, en vérité. Elle est bien silencieuse, depuis qu'elle a quitté Loches. Silencieuse & déprimée de ne pas pouvoir rire grassement avec le nabot à bouclettes blondes, de ne pas pouvoir lancer des noyaux d'abricots sur les conseillers municipaux, de ne pas pouvoir le voir, lui, son blond chérichou d'amuuuuur.
Dégoulinante, elle l'est. Mais chut, c'est un secret.
Alors oui, elle s'ennuie. Mortellement.

Elle s'ennuie tellement d'ailleurs qu'elle s'irrite de voir un pigeon impertinent la déranger dans sa morosité. Elle le laisse gratter le carreau de la fenêtre quelques minutes, avant de se lever, de guerre lasse, pour lui ouvrir & récupérer la missive qu'il apporte.


- T'as intérêt à c'que ce soit important, le piaf, sinon j'te fais écarteler...

Nouveau soupir désespéré, tandis qu'elle déroule le pli, écarquillant les yeux lorsque, par pur hasard, c'est le nom des Corsu qui s'affiche en premier. Batti, c'est lui, sans aucun doute, il lui a écrit, enfin, enfin, enfin !

- Ma chère future belle... Gné ?

Ah ça, non, ce n'est pas son blond, pour sûr, & ça lui détruit tout ses faibles espoirs, à la pauvre brunette. Un grognement d'insatisfaction franchit ses lèvres ternes tandis qu'elle s'oblige à lire, en entier, le contenu de la lettre.
Moue de dégoût, sourire narquois, nez plissé & sourcil arqué, le faciès de l'adolescente s'étire en de nombreuses expressions, toutes aussi comiques les unes que les autres.


- Greluche...

Elle inspire pourtant, aussi profondément qu'elle le peut malgré son poumon abîmé, & s'empresse de se mettre à rédiger une réponse. Tout aussi hypocrite & mielleuse que le pli de sa fameuse belle-soeur, sans doute un peu plus tordu, aussi.



A Davia Corsu de Villandry, Escuyère & Lieutenante de l'Ordre de la Dame Blanche à l’Écu Vert, Ambassadrice de Touraine pour les OR & OMR,
De Khy,

Dans un saladier, ajouter titres, fonctions, noms & futilités au néant déjà fondu.



Ma très chère amie,

Nous ne nous sommes peut-être vues qu'une fois, fort rapidement comme vous le dites si bien, mais il n'en reste pas moins que vous m'avez fait fort grande impression. C'est donc un honneur pour moi d'être considérée comme votre soeur, bien que ce titre n'existe que par les liens du mariage qui devrait avoir lieu bientôt.

Déficelez l'hypocrisie & faites la mijoter dans une marmite en toc.



Votre père est d'une bonté remarquable pour notre époque, & j'avoue être flattée de ce qu'il dit de moi. Il est, en vérité, un des rares à savoir que je ne suis pas celle que l'on décrit grossièrement dans des gazettes illisibles, ni celle à qui l'on prête des comportements déloyaux. Cependant, de là à dire que j'ai la trempe d'une Corsu, c'est peut-être un peu exagéré.

Mettez les détails de côté, & contentez-vous de hacher finement les herbes de simulacre.



J'apprécie toutefois l'intérêt que vous me portez, & tenterai de ne point entacher la réputation & l'honneur des Corsu. La famille est aussi sacrée pour moi que pour vous, sachez-le.

250 grammes de mensonges pour 250 grammes de vérité, mélangez-bien & laissez reposer.



Je comprends, de ce fait, votre haine à l'égard du Ponant. J'avoue ne pas être au courant de tous les tenants de cette guerre, & ne pas m'y intéresser suffisamment, de plus. Je me contente de prier pour que le Très-Haut protège le Royaume. N'est-ce pas suffisant ?

Incorporez des contradictions & quelques pincées de réserve, puis montez le doute en neige.



Vous souhaitiez me connaître, posez-moi donc quelques questions auxquelles je me ferai un plaisir de répondre.
Que le Très-Haut vous garde, très chère soeur,

Je vous embrasse tout autant,

Khy.


- Mademoiselle, je suis rentrée !
- Ah, Alix, tu tombes bien... Tu veux bien attacher ça à la patte de ce pigeon ? Tu lui donnes un peu d'eau & tu le laisses repartir.
- Bien, mademoiselle.. Et c'est ?
- Une recette de cuisine, Alix... Brebis mainoise à ma sauce spéciale.
- Que vous faites la cuisine, maintenant ?
- J'expérimente !

Et l'Alix de cligner des yeux, complètement paumée, avant de s'empresser d'obéir aux ordres.
Et Khy de s'affaler sur son lit, à nouveau, grognant à l'ennui qui la gagne derechef.


- Grumpf...
_________________
Davia_corsu
[Kiki, c'est kaka]

Pigeon droit devant!

Et la jeune Blanche de baisser la tête pour éviter l'atterrissage forcé de l'animal.

Par les oreilles de Sainte Ulphe, un jour ce volatile m'éborgnera!

Soustraite de force à son entraînement musclé avec Kasia, la jeune femme alla s'asseoir un peu plus loin, laissant sa soeur Blanche faire un peu d'exercice. En défaisant avec fébrilité les liens qui retenaient le vélin, elle se demandait qui pouvait lui écrire. Charles, qui avait du partir avec sa Capitaine pour une ville plus lointaine? Séverin, dont elle avait un peu moins de nouvelles ces temps-ci? Mais l'écriture lui était inconnue, ce n'était donc ni l'un, ni l'autre.

Elle parcouru la missive suivant les pleins et les déliés d'une fine écriture et, une fois lue, posa la lettre sur ses genoux en soupirant. Lisse, elle était d'une lississitude* effroyable.

L'air renfrogné, la jouvencelle, se leva en froissant le papier qui n'avait rien demandé et se rendit jusqu'à sa tente. Elle s'ennuyait ferme, écrire lui ferait certainement du bien et puis, connaître un peu mieux cette fille n'engageait à rien. Si elle doutait des goûts de son père en matière de femme, en revanche, elle avait foi en sa grande sagesse. Il ne pouvait donc avoir complètement tort.

Elle se mit donc en tête de rédiger une nouvelle missive.




A Khy,
De Davia Corsu.


On va faire plus sobre cette fois-ci, sans se départir du Corsu chéri, genre: "toi ma vieille, t'en n'es pas encore".



Chère Khy,

C'est avec plaisir que j'ai reçu votre réponse. Ainsi donc, si ma belle-soeur a le sens de l'honneur, je vois que mon frère a fait un bon choix. J'espère qu'il saura s'en montrer digne tout autant que vous.


La Blanche adorait son frère, mais à de multpiles moments, elle avait pu constater que leur manière de penser, de même que leur manière de vivre étaient aux antipodes l'une de l'autre, paradoxalement, il ressemblait plus à sa mère adoptive, qui était d'ailleurs devenue la marraine du jeune homme, qu'à leur père. C'est pourquoi, elle doutait quelque peut de la stabilité affective de son petit frère.



Vous me parlez de mieux nous connaître. Je pense que vous en savez plus su moi que moi sur vous. D'où venez vous? Quelles sont vos occupations? Avez-vous une famille? Un travail? Je ne sais de vous que deux choses: mon frère vous aime et mon père pense que vous êtes digne de respect et d'attention, mais qui êtes-vous vraiment.


Sincère? Elle l'était, elle avait vraiment le désir profond de connaître cette future belle-soeur et que toutes deux s'entendent bien. La jouvencelle avait déjà trop souffert de ces querelles fréquentes qu'elle avait eu avec sa mère adoptive, même si elle l'adorait. Elle se doutait bien que la fiancée de son frère n'avait pas que de saintes fréquentations, elle était même peut-être un peu mercenaire à ses heures, où quelque chose du genre, mais, elle était prête à s'en accommoder pour mieux convertir son âme perdue. Naïve, mais point trop. Juste très utopiste.



Je dois malheureusement déjà vous quitter, si la guerre n'est plus, la trêve nous use et l'avenir reste incertain. J'espère pouvoir si tôt que tout cela sera fini, pouvoir me rendre auprès de vous et ne point manquer votre union sacrée avec mon fratellu**.

Que le Très-Haut vous garde et qu'Aristote vous protège.

Affectueusement.

Davia


Elle espérait recevoir réponse et pouvoir ainsi, mieux appréhender la nouvelle rencontre. Au moins trouveraient-elles peut-être quelques sujets d'ententes!

Lasse, la jeune blanche fit porter sa missive afin qu'elle soit envoyée. La fatigue de ces derniers temps s'était accrue et elle n'avait pas encore pris le temps d'aller consulter un médecin.


* Mot inventé par l'auteur.
** Petit frère en corse.

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Khy
[Khy a du kaka kaki, collé au.. Euh.. Huhu. Et là, j'ai honte.]

- Un peu plus à gauche... A droite.. Voilàà.. Nooon, ne vous relâchez pas, enfin ! Bon, on recommence...
- Pi.. geon...
- Mais non, mais non, vous n'avez pas l'air d'un pigeon, il vous faudrait des ailes pour ça, allez, allez, redressez-vous, tête bien droi..
- Un pigeon, Alix !
- Oh !


Pigeon qui, il faut le dire, tombe à point nommé. Car l'arrivée de cet adorable, merveilleux, magnifique, que dis-je, fantastique pigeon signe en effet la fin de la leçon dispensée à notre brunette préférée. Car aujourd'hui, c'est bienséance. Un plateau de fruit sur la tête, une ligne droite tracée au charbon sur le sol, des gouttes de sueur perlant sur le front de la martyrisée, la scène est pour le moins.. insolite.
Mais qu'importe, le pigeon est là, & dans un bruit de plateau renversé, l'adolescente s'empare avidement de la missive, congédiant l'Alix d'une senestre impatiente.
Elle s'installe à son écritoire, parcourant rapidement le contenu du courrier, ses sourcils se fronçant imperceptiblement.

Honneur, honneur, honneur. Cette Corsu n'aurait donc que ça en tête ?
Et ça la ronge, la brunette, cette question d'honneur jetée sur le vélin à chaque nouvelle réponse. Honneur; n'y a-t-il que ça dans l'esprit de Davia ? Et qu'entend-t-elle, surtout, en parlant d'honneur. Et pourquoi, foutre dieu, pourquoi ne parle-t-elle que de ça !
Sa senestre, anxieuse, file entre ses mèches brunes, en entortille quelques brins en défaisant ses macarons, donnant à sa coiffure un style très anarchique. Cette question d'honneur la taraude étrangement, comme si le seul fait d'être fille de catin lui en ôtait le droit. Comme si le simple fait d'avoir été souillée l'empêchait d'en avoir. Comme si son blond, à qui elle avait voulu faire plaisir, lui avait arraché les dernières bribes d'honneur qui lui restait encore.


- Batti...

Un soupir franchit ses lèvres ternes, tandis qu'elle lâche ses mèches pour se mettre à écrire, avec application.
Quoi de mieux que la nouvelle d'une bonne entente entre sa soeur & sa fiancée, pour un cadeau de saint Valentin, n'est-ce pas ?




A Davia Corsu,
De Khy Strozzi,
Sourire amusé alors qu'elle continue. Cessons les piques, & mettons-nous un peu sur un pied d'égalité.



Très chère belle-soeur,

L'honneur est certes chose importante. Et je ne doute pas que mon fiancé, Battistu, possède & use avec sagesse de cette qualité.
Bon, oui, elle abuse un peu, elle tartine beaucoup, & elle s'accapare violemment le pauvre blond, mais enfin, après tout, c'est la Corsu qui a commencé !



Je doute de savoir autant de choses que vous semblez le croire, mais enfin, c'est à moi de me faire connaître, après tout.
Enfin "connaître" est un bien grand mot. Histoire banale, bien ficelée, bien remodelée, & servie sur un plateau d'argent.



Je suis née à Orléans, d'une union illégitime entre un noble & une bourgeoise. Mes deux parents sont morts, c'est donc mon oncle qui subvient à mes besoins, & ma tutrice qui s'occupe de toute mon éducation. Ma vie n'est rythmée que par les leçons de bienséance, de géographie, de théologie, & autres leçons tout à fait passionnantes.
Ajouter que la bourgeoise en question n'a de bourgeoise que son enfance, & est catin par la condition n'est sans doute pas bien indispensable. Préciser le nom de cet oncle est tout à fait ridicule, quant au nom de sa tutrice, si la Corsu ne le sait pas encore... Sans doute vaut-il mieux qu'elle l'ignore encore un peu.
Et pour ce qui est des leçons, il faut avouer qu'il serait tout à fait honteux & ennuyant de mentionner qu'il y a plus de leçons relatives au combat qu'autre chose.




J'ai hâte de vous rencontrer à nouveau, comme j'ai hâte de recevoir votre courrier, en espérant que mes réponses vous conviennent.
Pour ce qui est du mariage, soyez assurée que vous serez prévenue bien à l'avance, pour que vous puissiez vous organiser afin d'assister à notre union. Votre absence nous peinerait énormément.

Que le Très-Haut vous garde.

Avec toute mon affection,

Khy.

Lentement, elle pose la penne, relisant en plissant le nez les mots qu'elle vient d'inscrire.
La lettre lui semble d'un vide étonnant, comme si sa vie se résumait à ça, & uniquement à ça. Un sourire sardonique vient effleurer ses lèvres en même temps que ses doigts, qui tracent leur passage à l'encre noire.


- Crotte... Alix ! De l'eau !

Et alors qu'elle semblait satisfaite, c'est d'une senestre fébrile qu'elle griffonne hâtivement quelques mots de plus.



Ps : Vous semblez tenir à cette question d'honneur tout autant que moi... Cependant, je sais combien la notion peut avoir un sens différent pour chacun d'entre nous. Ma question est donc toute simple : quel est votre point de vue sur cette qualité si importante à mes yeux ? Où la situez-vous?
- Mademoiselle, enfin, comment avez-vous donc fait pour vous barbouiller d'encre ainsi ?
- C'est mon âme qui noircit.

Et au regard effaré de la ronde Alix, c'est un sourire amusé & angélique qui lui répond.
C'était de l'humour, douce Alix. Je crois.

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Davia_corsu
[Mais ki donc est Khy? Est-ce un Kiki ki aime le kaki et ki fait kaka en kankanant?] Et NA!

Pinzuta*!

L'insulte avait claqué sèchement dans la bouche de la jeune Corsu. Elle venait juste de finir la lettre reçue. Elle en avait de bonne, la belle-doche! Elle lui avait posé THE question! Mais dans quelle galère s'était-elle fichue avec ses questions! Elle grogna à la Baile et repartit vaquer à ses occupations:
1- S'entraîner
2- Remplir sa fonction d'ambassadrice.

Elle répondrait plus tard, parce que là, l'honneur, tout ça... Elle en était à des lustres pour réfléchir dessus. Elle avait sans doute passer trop de temps entre les bras de Charles à soupirer de bonheur, le sens de l'honneur avait alors pris un tout autre sens!

Les jours avaient passés, Charles était aussi parti avec l'autre groupe de soldat, pour le plus grand ennui de la jeune blanche qui tuait le temps autant qu'elle pouvait, avec la complicité de Kasia, tout autant désoeuvrée qu'elle.

L'honneur, l'honneur, c'est vrai qu'elle n'avait que ça à la bouche, sans doute à force de trop souvent l'avoir vu baffoué. Soit dit en passant, il lui fallait pourtant répondre à cette foutue missive. Un jour d'ennui, comme un autre, elle finit par prendre son courage à demain.




Ma chère Khy,

D'après votre dernière lettre, vous semblez bien entourée. Il me fera grand plaisir de rencontrer votre oncle et votre tutrice, qui sont, je n'en doute pas, des bons conseils et des guides d'importance dans votre vie, tout comme le sont mon père et ma marraine pour moi. Il y a sûrement une part de nous qui est pétrie d'eux, quelles qu'en soient les différences.
Il fallait s'y atteler que ça lui plaise ou non.


Faire simple, plus d'embrouilles, de mensonges, même plus de titres, pas même de nom. Répondre de soeur à soeur, en toute humilité.



Vous me posez la question de l'honneur, c'est un bien vaste sujet et je ne sais si je suis de taille à y répondre.


Non, elle n'était pas de taille, mais il fallait bien répondre, que diable! Elle soupira, se sentant bien indigne tout à coup.



Et bien pour tout vous dire, je ne pense pas que nous ayons tous la même définition de l'honneur. Pour ma part, l'honneur va de paire avec la réputation et la conscience. Il est souvent caché par un vernis qui s'écaille. Finalement, l'honneur est comme la noblesse, il y a ce que l'on voit et puis il y a ce qui est. L'honneur n'est-ce pas de garder la tête haute quelles que soient ses actions et de les assumer et d'être responsables de ses actes?


Elle se rappelait les années passées au couvent pour parachever son éducation, lorsque les Villandry avaient jugé bon de l'y envoyer. L'honneur et la vertu, les soeurs avaient tenté de lui inculquer, mais c'est finalement son père qui lui avait fait comprendre ce que c'était réellement.



Le sens de l'honneur n'est-il pas d'essayer d'être irréprochable, autant que faire ce peut, d'être droit, de lutter pour les valeurs que notre coeur nous dicte?
L'honneur n'est pas la vertu, mais souvent l'un et l'autre sont liés, à moins d'être un fieffé menteur, de ne pas avoir de vertu et de paraître irréprochable aux yeux du monde, mais finalement, l'un rejaillit toujours sur l'autre.


Personne n'est parfait, c'est un fait, mais la jeune fille en écrivant ces mots était convaincue que celle qu'allait épouser son frère serait à la hauteur de l'honneur des Corsu, peut-être même plus que certains membres de la famille eux-mêmes. Elle esquissa un sourire et reprit sa missive.



Mais peut-être pourriez-vous me donner votre sentiment à ce sujet, je sais qu'il vous est aussi cher et j'aimerais beaucoup savoir ce que vous en pensez. Cela dit, la personne la mieux placée pour vous parler d'honneur est sans doute mon père, c'est un homme d'honneur en plus d'être un sage. Le meilleur que je connaisse, parfois je déplore que Batti ne lui ressemble pas plus, mais c'est ainsi, avec l'âge, mon fratellu** apprendra très certainement.


Elle avait peur pour son frère, c'était indéniable. Peur qu'il ne suive les traces de sa mère adoptive, qu'il ne jure que par un pouvoir factice et une ambition démesurée. Peut-être qu'avec Khy à ses côtés, il trouverait son chemin. Perdue dans ses pensées, elle acheva la lettre.



Je dois malheureusement vous quitter, ma chère soeur, je suis toujours mobilisée et chaque jour je me dois de m'entraîner pour rester opérationnelle, même si je doute que le conflit armé reprenne. Prenez soin de vous et de mon frère et que le Très-Haut vous garde.

A prestu***.

Davia


Elle souffla. La prochaine rencontre avec sa future belle-soeur serait sans doute très intéressante, finalement, elles avaient peut-être plus de points communs qu'elle ne le pensait.


* Surnom donné par les Corses aux continentaux parce qu'ils parlent avec une accent "pointu", gentille insulte dans la bouche des Corses.
** Petit frère
*** A bientôt.

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Khy
[Tic-tac, tic-tac, ta Khykhy t'a quitté, Tic-tac tic-tac, t'es cocu, qu'attends-tu ?] J'm'incline quand même, hein.

C'est vautrée dans ses draps qu'elle reçoit la lettre de Davia, portée par une Alix silencieuse. La blonde servante dépose le pli au bord du lit, faisant vite demi-tour, tête basse & mine sombre, s'échappant sans même ouvrir la bouche.
Elle n'ose plus la regarder dans les yeux.

D'une senestre hyaline, elle s'empare de la missive, la parcourant rapidement des yeux avant de pousser un soupir.
Honneur. Elle ne se souvient même plus d'avoir posé la question. Honneur. C'est fou comme en deux petites semaines, ce mot peut changer de signification, se liquéfier pour n'être qu'un vague concept auquel on a sans doute, dans une vie antérieure, pu croire.

Khy, écoeurée par la simple lecture du mot, s'extirpe des draps en se tenant le ventre, venant tant bien que mal s'installer à son écritoire. L'engeance lui broie les entrailles depuis qu'on lui a annoncé son état. Enceinte... De Batti, évidemment. De qui d'autre, après tout ? ça fait trop peu de temps qu'elle est à Bourges. Trop peu de temps que l'Hélios à la mainmise sur elle.


- Tsss...

A ce rythme, elle va devenir parano. Porter l'enfant du brun la révulse. Sans aucun doute.
Ce serait avouer sa défaite. Sa faiblesse. Avouer qu'il avait raison. Qu'elle lui appartenait. Pleine & entière.
Non, il n'y a que Batti qui puisse être le père. Et le fait que sa grossesse ne se voit pas encore n'est que le fruit du hasard. Voilà. Pensées closes.

Et sur le parchemin rêche, les mots de se tracer rapidement, noircissant la réponse qu'elle veut renvoyer vite.




Ma très chère Davia,

Quel soulagement de voir que vous avez fini par répondre. J'attendais votre réponse avec impatience. En ces temps troublés, je crains que vous ne soyez la seule personne avec qui il me plaît de correspondre.
On peut bien être entourée comme peu de gens le sont, ça ne nous empêche pas de nous retrouver seuls face à certains détails.
C'est sans doute les mots les plus vrais qu'elle n'ait jamais adressé à cette fameuse belle-soeur. Mais les rapports avec son blond se corsent, & depuis qu'il l'a rejoint à Bourges... Elle perd pied. Et se raccroche, tant que faire se peut, à la seule qui ne puisse la juger, car trop loin.



J'ai honte de ce que je vais vous avouer, mais je me suis moquée, lors de nos premiers échanges épistolaires. Je vous ai cru - & puissiez-vous me pardonner - femme terne & sans intérêt, alors que vous êtes, sans doute aucun, tout le contraire. J'ai honte de m'être laissée au jeu du mépris sans même chercher à vous connaître. Mais vous êtes bonne, Davia, & l'intérêt que vous me portez est une preuve, encore, de votre honneur sans tâches.
La plume s'immobilise, le faciès de l'adolescente montrant son hésitation à rayer - ou non - les lignes précédemment inscrites.
Mais la brunette se mord bientôt la lèvre, continuant sans daigner se reprendre. C'est sans doute le premier pas sincère qu'elle fait vers la Corsu.




A mes yeux, ma soeur, il y a de l'honneur partout où il y a du coeur. Je vous reprendrai ainsi : "lutter pour les valeurs de notre coeur nous dicte". Voyez comme je suis de votre avis, & approuve à vos paroles pleines de bon sens. Et comme vous le dites si bien encore, votre père est la personne la mieux placée pour éclaircir cette question.
Quant à votre frère, il est vrai qu'il ressemble peu à son père, cependant je reste persuadée qu'il est un homme aussi bon que lui.
Et plus elle écrit, plus elle doute de la véracité de ses propos.
Elle lâche un grognement rageur, secouant la tête pour effacer le visage menaçant d'Hélios de son esprit.
Il la hante décidément bien trop.




Je vous laisse sur ses mots, en espérant recevoir bientôt de vos nouvelles. Et vous rencontrer à nouveau, par la même.
Qu'Aristote & Christos vous protègent,

Affectueusement,
Khy.
Elle s'empresse de clore la missive & de l'envoyer avant de se vêtir à la hâte pour sortir. Échappant à la vigilance des membres de la maisonnée, elle se glisse au dehors, allant rejoindre la débauche, la luxure que lui impose le brun, filant vers les mauvais quartiers. Son coeur ne lui dicte plus rien, en vérité. Elle se contente d'obéir & de fermer les yeux.
Non, d'honneur, elle n'en a plus. Elle n'en a jamais eu.

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Davia_corsu
[Château de Montpipeau. Les yeux tournés vers l'avenir]

Le temps était passé. La guerre s'était achevé sur un goût de mort amer et puis il y avait eu l'absence et puis il y avait eu Séverin. Séverin et son étrange demande, Séverin qui avait sauvé la petite Blanche perdue.

Elle s'était installée en villégiature au château de Montpipeau. Les cousins du jeune Volvent avaient eu l'amabilité de l'y recueillir. Elle n"oubliait pas son amie épistolaire à qui elle n'avait pas pu répondre. Trop de douleurs, trop de choses sur le coeur, ça n'était pas l'heure.

Mais en cette jolie journée fraîchement printanière, après une douce promenade champêtre, elle avait pris plume et parchemin pour retrouver sa correspondante de coeur, en toute simplicité.




Ma chère Khy,

Pardonnez mon silence, je fus bien trop longue à prendre la plume pour répondre à la missive de vous que je garde sur moi. Je ne vous oublie pas, sachez-le. Le temps à passé et nombreux sont les évènements qui m'ont troublés.


Elle soupira la brune Blanche, le regard voilé. Charles... le souvenir de son amant mort la hantait toujours, bien qu'elle fasse de son mieux pour ne rien laisser paraître. Encore une fois, elle devait porter ce masque d'indifférence qui protégeait un monde intérieur torturé et habité par un fantôme.



Je suis heureuse de constater que ces missives finalement, nous rapproche, en tous points de vue. Nous ne nous connaissions pas et, désormais, je peux me targuer que nous soyons amies.


L'ombre avait été chassée, elle ne voulait pas ressasser le passé, mais plutôt se confier sur un présent qui lui semblait si étrange, presque étranger.



Ma chère amie, ma soeur, j'espère que très bientôt nous nous verrons, car depuis fort peu de temps, je suis fiancée et les noces se préparent. J'espère tant vous y voir...


Oh, oui, comme elle l'espérait. Cette soeur qu'elle ne connaissait pas, croisée un soir, si rapidement, dans une taverne lochoise. Elle avait besoin d'elle.



Dans votre dernière lettre, vous me parlez toujours d'honneur. Certaines choses, que j'ai vécu récemment, me font penser que l'honneur n'est pas toujours où on le pense.

Ainsi, l'homme que je vais épouser et sans doute l'homme qui ait le plus d'honneur que je connaisse. Si vous saviez comme il est bon, si vous savez comme je l'admire...


Elle posa sa main sur son ventre, à peine arrondi. Il était temps que Séverin l'épouse, il avait été le plus valeureux chevalier qui soit en acceptant de la prendre, elle et l'enfant qu'elle portait, sous son toit.



Mais il est inutile que je vous en dise plus, vous verrez par vous même, car j'escompte bien que vous soyez de la noce! J'ai une trop grande envie de vous connaître et l'occasion et trop belle!

Donnez moi de vos nouvelles, ma mie. Je m'inquiète pour vous...

Prenez soin de vous et que la Très-Haut vous garde.


Oui, elle était inquiète, elle avait croisé Batti au détour d'une taverne lors de son cours séjour à Loches et ce qu'il lui avait dit l'avait laissée dubitative. Elle espérait que Khy se portait bien.



Post-scriptum: je vous joins le faire-part de mes noces.

Affectueusement.

Davia




Elle plia le tout avec soin et le confia à Manon, qui ne la quittait plus. Une fois seule, elle ouvrit la fenêtre et respira à nouveau l'air Orléanais.
Bientôt, elle serait ici chez elle, bientôt, tout changerait.

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Khy
[Entre Orléans & Bretagne, les yeux rivés sur le passé.]

A la traîne, encore.
Si les premiers jours, la jeune femme a mis un point d'honneur à toujours devancer l'Acéré, il faut avouer que la chevauchée, intense, & les pauses, jamais bien calmes & trop souvent courtes, commencent à peser sur sa faible corpulence. Sans compter que la Chose, qui ne s'agite pas encore, certes, mais qui donne à son corps des formes auxquelles on ne croyait plus, use étonnamment de toutes les forces qu'elle n'a pas.
C'est donc parce qu'elle est à la traîne & qu'Hélios fixe trop bien l'horizon qu'elle récupère le pigeon - qu'elle nommera sans doute Vaillant - sans aucune anicroche.
D'une senestre vive, elle effraye l'animal qui ne tarde pas à partir, & se permet même, une fois les rênes à nouveau en main, de défroisser les parchemins.

Et sa monture, qui renâcle, étouffe un "oh" surpris. La lippe est pincée, mordue, se rehaussant à l'instant d'une teinte pourprée, alors que le faire-part est fourré dans la première besace venue.
En d'autres temps sans doute - pas si lointains, mais tout de même - elle aurait ragé de voir que la soeur de son promis se mariait avant elle, alors qu'elle se faisait une joie de la devancer. Mais aujourd'hui, alors que ses épousailles ne sont plus compromises mais bien annulées, alors qu'elle refuse obstinément de répondre aux missives de Battistu, alors qu'elle a quitté & Nashia, & le Berry, & tout ce qui lui restait pour ne se raccrocher qu'aux sarcasmes de l'Hélios... aujourd'hui, disais-je, le faire-part ne fait que raviver des flammes qu'elle estime douloureuses, & des choix qu'elle ne peut plus reprendre.
Et l'envie d'envoyer valser la lettre se fait sentir, alors qu'elle dévore les dernières lignes en silence, avant de la déchirer en de multiples morceaux, les semant sur son passage.


[Quelques heures plus tard]

Pour une fois, une auberge. Pour une fois, une paillasse, & non pas une vulgaire couverture en laine pour se protéger du sol humide, ni de la paille empestant le moisi & le rat. Non, une paillasse, une vraie, & l'autre qui est sorti pour régler on ne sait quelle affaire, ou pour s'enivrer dans on ne sait quel tripot.
Et Khy, donc, d'en profiter pour noircir un des rares parchemins qui lui restent, grâce à son dernier pot d'encre. Elle n'a pas encore eu la foi de demander à l'Acéré de s'acheter de quoi écrire.
« A qui ? », lui dirait-il. « Personne », répondrait-elle.


Citation:
Ma douce soeur,

Vous êtes toute pardonnée. J'avoue avoir cru, un instant, que vous m'en vouliez de m'être laissée prendre au jeu de la moquerie. Mais vous n'êtes pas ainsi, je le vois bien, & je ne peux que vous pardonner, si tant est qu'il y ait réellement quelque chose à pardonner.

Mais contez-moi donc, Davia, les troubles qui vous torturent ainsi. Vous me parlez de vos épousailles avec une conviction qui ne me convainc guère.

Je sais que vous êtes faite d'honneur, & que c'est chose vitale pour vous. Je sais que ma vision de cette qualité a été ébranlée en quelques semaines seulement. Je sais que je ne devrais pas vous dire ce que je vais écrire ici.

Alors veuillez excuser mes paroles insolentes si jamais je me trompe, mais je ne vous juge pas femme à accepter d'épouser un homme sur le seul fait qu'il soit d'honneur. Et puissiez-vous encore me pardonner, mais j'oserai même écrire que votre père ne vous contraindrait pas à vous marier à quelqu'un que vous n'aimez pas de sentiments profonds.

Ne me condamnez pas sur ces mots, ma soeur ; mais s'il vous est encore possible de faire pas en arrière, faites-le. Et si le choix ne vous est plus accordé, souffrez que je m'inquiète de ces maux qui vous obligent.

Sachez, toutefois, que si épousailles il y a, j'y serais, bien en vue, pour vous en tant qu'amie.

Et pour ce qui est de moi & des nouvelles que je peux vous apporter... Souffrez que je vous le dise de vive voix. Je reprendrai votre expression, qui s'accorde à merveille à mes propres tourments : vous verrez par vous-même.

Je vous quitte sur ses mots, en espérant avoir de vos nouvelles avant vos épousailles.

Que le Très-Haut vous garde.

Votre amie.

Sans doute que si on lui avait dit que leurs troubles étaient les mêmes, & qu'elles seraient deux, ainsi, à présenter ventre rond & teint faiblard, sans doute donc qu'elle se serait tordue de rire au point de s'en rompre les côtes.

Elle clôt la missive d'un simple bout de corde fine, le sceau de Pettinengo lui étant retiré.
Et avant qu'Hélios ne revienne, la réponse partait pour Montpipeau.

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Davia_corsu
[A Montpipeau, on ne joue pas forcément du pipeau et on ne danse pas encore la gigue]

Lasse, elle se sentait si lasse. Elle avait repris des forces et les blessures de son échauffourée tourangelle avaient quasiment disparues, sa jambe n'était presque plus meurtrie. Mais son coeur... c'était autre chose.

Lorsque Manon accouru, lui apportant missive, elle esquissa un sourire amusé. Depuis l'envoi de ses faire-parts de mariage, elle jouait avec les pigeons, elle jonglait même avec eux. La jeune servante s'était fait un honneur de lui rapporter les missives elle-même.


Mad'moiselle, Mad'moiselle, encor' une autre!

Davia resta assise sur le banc où elle se trouvait, dans les jardins de Montpipeau. Chaque jour le même rituel était mis en place et après avoir pris un bain, Manon l'aidait courageusement à bander ce ventre qui commençait tout juste à poindre. Ainsi, sous les tissus des jupons et des robes, personne n'y voyait rien, parfois même, elle se demandait si Séverin s'en rapelait.

Elle prit la missive tendue et déroula le parchemin, l'écriture de Khy semblait à chaque fois plus tourmentée. Elle parcouru les lignes, avide de nouvelles.

Ses yeux se voilèrent de tristesse et sont front se plissa. Pourquoi tous s'échinaient ainsi à la détourner de Séverin. Certes, ce n'était pas un amour passionné, certes elle n'avait pas pour lui cet élan embrasé d'un désir fou. D'ailleurs, parfois, elle se demandait même si elle le désirait. Mais la grande tendresse qui les unissait, l'amitié toute en sensibilité qui les avait enclin l'un vers l'autre, ne valaient-elles pas mieux que toutes les passions dévorantes? Elle avait aimé Charles à la folie, sans réfléchir, se donnant à lui sans penser au lendemain, parce que c'était la guerre, parce que ni l'un ni l'autre ne savait s'il y aurait de lendemains. Mais aujourd'hui il était mort et il avait laissé une jeune Blanche éplorée et un orphelin qui grandissait en elle. Alors?

Alors, elle était certaine de faire le bon choix. Séverin était un havre de paix, le refuge en pleine montagne, le phare dans la tempête, l'asile béni où toute femme perdue qu'elle était, elle pouvait se reposer. Il la sauvait, et il lui offrait d'aimer à nouveau, différemment, elle qui pensait son coeur mort. Certes, elle avait toujours la sensation que son corps était mort. La peur que lui intimait de toucher celui qui était devenu son fiancé, l'angoisse qui surgissait quand elle s'imaginait devoir partager sa couche, mais pourtant... Son coeur n'était pas mort lui, elle était apaisé lorsqu'elle le voyait. Elle aimait se promener avec lui, discourir des petites choses du quotidien, de leur mariage, de la vie à Montpipeau. Elle était en paix et elle n'aspirait qu'à cela.

Mais comment l'expliquer à sa soeur épistolaire?

Lentement, elle s'était levé et avait pris le chemin de sa chambrée, jouxtant celle de Séverin. Là, installée, elle avait pris plume et parchemin, congédiant Manon pour être seule dans le calme.

Leur situation se ressemblait étrangement et pourtant les conditions dans lesquelles elles le vivaient était douloureusement dissemblables. L'une en paix, dans la cage dorée que consistait le château du Duc, auprès d'un fiancé à la fois taciture et attentionné. L'autre, sur les routes, aux prises avec un amant tumultueux, n'ayant même pas le sou pour s'acheter un peu d'encre.

Si elle avait su...

Comment pouvoir se confier à coeur ouvert, alors qu'elle-même tentait d'oublier.




Ma tendre amie, ma soeur,

Quel plaisir de vous lire. J'ai commencé à recevoir bon nombre de réponses pour mes noces, mais votre missive est sans doute celle qui m'a le plus comblée de joie.

Je vous sens inquiète à mon sujet, surtout ma soeur, ne le soyez pas. Je vais bien, je suis heureuse et je sais que le choix de mon époux est le bon choix. Je veux passer ma vie auprès de lui. Certes, je ne l'aime pas d'un amour passionné et déraisonnable, mais la tendresse qui me lie à lui vaut plus que toutes les passions fugaces. Je l'aime oui, j'aime sa tendresse, j'aime ses silences, j'aime sentir son regard sur moi. Il me protège et il m'a prouvé combien il m'aimait.

Je ne désire rien de plus, sachez le ma soeur, et surtout je ne veux pas faire marche arrière. Acceptez mon choix et vous verrez, mon futur époux vous charmera.

Vous ne me dites rien de vous. Je m'inquiète. Je ne vous l'ai pas dis lors de ma dernière lettre, mais j'ai vu Battistu à Loches, il m'a semblé en colère, il m'a parlé d'un autre... Je l'ai senti blessé.

Loin de moi l'idée de vous juger, vous savez combien je vous aime et vous savez, tout comme moi, que le chemin du Bien, du Beau, de la Vertu est semé d'embûches et peut parfois bien surprendre.

Il me tarde d'entendre votre voix, que vous me racontier, de prendre votre main et de vous dire combien vous me manquez. Si j'osais, je vous inviterai à venir, ici, près de moi. Comme nous serions bien ma soeur! Montpipeau est un lieu très agréable et si vaste qu'il peut y avoir faste et festivités sans que nous soyons dérangées.

Je vous embrasse, ma chère soeur, comme je vous aime et que le Très-Haut vous garde.

Davia


Elle sabla le parchemin, souffla sur la peau pour enlever le surplus, son écriture fine et régulière se déroulait sur le vélin. Vite, il fut confié à Manon pour qu'elle ne tarde pas à l'envoyer. L'invitation était lancée. La jeune Blanche n'apprendrait que trop tôt qu'elle serait arraché à son époux pour une nouvelle mission auprès des Dames Blanches.
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Khy
Une lettre, remise au bon soin de l'aubergiste avant de monter en selle, qui sera sans aucun doute remise à qui de droit avant qu'elle n'ait pu apercevoir les tours de Montpipeau.

Citation:
Trop douce, trop tendre Davia,
Mon aînée,

Je crains que mes mots n'aient été trop mauvais, & que, par habitude, j'ai couché sur le vélins des paroles trop dures. Votre choix a été accepté à l'instant même où vous me l'écriviez, & cela n'a toutefois pas la moindre espèce d'importance. Vous êtes sensée, bien plus que moi d'ailleurs, mon avis n'a ici pas du tout à compter. Je ne doute pas que vous ayez choisi un époux d'honneur & de vertu, & de tout un tas de choses qui ne me viennent à l'esprit. Je vous le dis, ma soeur, je ne doute pas du bien fondé de ces épousailles.

Seulement...
Comme vous dites vrai, que le chemin du Bien, du Beau & de la Vertu est semé d'embûches, & peu parfois, sans doute toujours, bien surprendre. Vous dites vrai, oui, trop vrai sans doute, & je ne peux, dès lors, plus me résoudre à vous faire réfléchir à un choix qui, à son annonce, m'a paru presque délirant.
Je ne m'y attendais pas, voilà, & ma plume trop amère à penser plus à mal qu'à vous féliciter.

Puissiez-vous me pardonner, Davia, j'ai honte désormais.
Je vous félicite, encore & encore, vous & votre futur épousé.

Je prends la route, dès aujourd'hui, pour venir vous trouver à Montpipeau & faire acte de présence à ces épousailles qui, je n'en doute pas, sera plus belle fête qui soit. Je me hâte, ma soeur, en espérant qu'à défaut de ne trouver du temps après, nous en trouverons avant.
Permettez que je vous demande l'adresse d'une auberge de pas trop mauvaise facture où je ne risque pas de croiser votre frère, ni votre mère, qui seront sans aucun doute présents. Je n'ai pas bien le courage encore de leur faire face, surtout dans mon état, & je crains surtout que ma présence n'ait qu'une aura néfaste sur vos festivités.

Et s'il nous est donné, malgré votre présence trop quémandée par tous, de nous retrouver seule à seule à l'abri des oreilles indiscrètes, je vous conterai tout, ma soeur, de ce que je n'ai pas le courage de coucher sur le vélin. Et j'ose espérer que vous ferez de même.

Je vous couvre de toute mon affection.
Que le Très-Haut vous garde,

Khy.


Et un autre petit mot qui lui, restera dans la chambre, en évidence sur la paillasse, accompagné d'une bourse bien remplie.

Citation:
Voilà de quoi payer des catins bien en chair pour les deux semaines à venir.
Profite, au lieu d'enrager.

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