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[RP Nemours] Curiosité n’est que vanité. […]

Isaure.beaumont
[…]Le plus souvent, on ne veut savoir que pour en parler. Blaise Pascal

Nemours. Nemours et ses coquelicots. Nemours et ses intrigues.

Le marquisat renaissait depuis le retour de Clémence. Accompagnée de sa jeune cousine, leurs rires et conversations emplissaient tout le domaine. Aux côtés de sa blonde, Isaure oubliait les récents évènements et savourait son confort retrouvé.

Ce jour-là, les deux jeunes femmes se rendaient au jardin pour profiter de la douce chaleur printanière. Leur babillage aurait enchanté les oreilles d’Aimbaud s’il s’était trouvé dans les parages… D’ailleurs n’était-ce pas lui qui s’éloignait d’un pas preste ? Le coude épineux de Clémence vint alors piquer le bras isaurien et un regard biaisé glissa sur elle.


-Isaure, vous voyez ce que je vois ?

Suivant le regard de sa cousine, la damoiselle remarqua que la porte du bureau d’Aimbaud était restée entrouverte.

- Ce n'est ab-so-lu-ment pas dans mes habitudes, n'allez pas vous imaginer n'importe quoi, mais... ce bureau est toujours fermé et... On ne vous a jamais dit de saisir chacune des opportunités qui pouvait se présenter à vous ?

La jeune Wagner étira les lèvres en un sourire. Les deux curieuses se rapprochèrent alors de l’antre secrète de l’Homme. Quand le chat n’était pas là, les souris dansaient. Et Dieu qu’elle avait envie de danser ! Elle n’eût pas le temps de lui répondre que déjà Clémence la poussait sur les lieux du forfait à venir.

-Mais… Commença-t-elle à protester.

- Allez-y vous, moi je monte la garde. Découvrez ce qu'un époux peut bien vouloir cacher derrière des verrous. Mais vite.

[M-30 avant le retour d’Aimbaud]

Elle avait été désignée d’office et il était inutile de contester la décision de la marquise. Peu importait d’ailleurs. Isaure se faisait un plaisir de violer l’intimité du Josselinière. Alors qu’elle faisait face au bureau en désordre, sa cousine, elle, montait la garde, adossée au mur.


L’excitation était telle que les joues se colorèrent tandis que les battements de son cœur s’accélérèrent. Aimbaud pouvait revenir d’un moment à l’autre, et il ne faisait pas bon d’être encore là à son retour. Elles devaient faire vite.

- Surveillez bien. Je ne voudrais pas que votre époux me trouve ici. Et si ce devait être le cas, j’espère bien que vous ne fuirez pas en me laissant ici, seule !

Les mains se posèrent sur le bureau. Il y en avait partout et Isaure ne savait plus où donner de la tête avant d’avoir commencé.

- Je… Je commence par oùùù ?! Je ne sais pas par où commencer !!
_________________
Aimbaud
[M-29]

Et puisqu'il faut vous conter le passage de la vie d'Aimbaud qui s'écoula pendant le laps de temps qui allait suivre, excusez par avance la prose basique de ce récit, ni glorieux, ni moral, ni même franchement intéressant, mais juste : véridique.

Pressé par une envie naturelle, Aimbaud descendait au petit trot les marches de pierre en colimaçon qui menaient à l'étage des latrines. Il avait délaissé un manuscrit d'étude sur la formation des armées en poussant un râle exaspéré quant à tous les chiffres qu'il lui fallait ingérer, puis il s'était étiré comme un gros chat en baillant son saoul, et pour terminer il avait saisit la première excuse venue pour aller se changer les idées : vessie pleine ! Sachant qu'il allait revenir dans deux minutes — ERREUR ! — il claqua la porte de son bureau sans fermer la serrure. Ladite porte, forcée par son élan, ne fit que rebondir sur le verrou et s'entre-bâilla de façon polissonne, d'une façon visiblement très SEXY aux yeux de la gente féminine, car les deux femmes qui passaient là allaient vite se laisser succomber à la tentation... Mais là n'était pas le propos de notre récit basique.

Les latrines sont une pièce du château que l'on évoque assez rarement. Ces petites pièces exigües étaient pourtant nombreuses dans la demeure et tout un chacun y passait un temps certain. Il y en avaient pour les gens de maison, il y en avait pour les maîtres. Celle où se rendait Aimbaud avait une vue imprenable sur toute la contrée, les bois de la Commanderie et les champs de blé vert, que l'on apercevait de part une meurtrière. Eh oui, en temps de guerre, il fallait imaginer qu'un poste de tir était situé dans les cabinets... C'était donc un petit renfort sur la muraille, meublée seulement d'un banc dont la trouée laissait voir, au loin en contre-bas, les remous glauques des douves. Un charmant petit coin de paradis. L'ennui avec cette pièce, c'est qu'elle était fraîche et venteuse !

[M-28]

Aimbaud, pleine d'insouciance, sifflotait un air connu pour son époque en achevant de dénouer les lacets de ses braies. Il fit ensuite ce qu'il avait à faire, avec une petite pensée de regret car aucun canard ne se trouvait là dessous sur le plan d'eau (il avait grande joie, d'ordinaire, à tenter de les mitrailler en clamant : "Sus à l'ennemi ! Chaudron d'huile bouillaaaaaaante !").

[M-27]

La porte des latrines se referma tandis qu'Aimbaud achevait de se re-fagoter. Il frappa dans ses mains d'un air décidé.


Bon... Au boulot !

Il se tourna vers l'escalier de la mort, qui lui soufflait avec un air vicieux : "Reviens à tes parchemins, mon ami... Reviens... Tu en étais au chapitre sur les points d'État... C'est passionnant tu sais...". Le jeune Josselinère regarda l'escalier d'un air torve. Il sentit alors son estomac gronder dans les tréfonds de ses entrailles, et l'appel des cuisines fut le plus fort... Il s'éloigna en trottinant, reprenant son sifflotement qui se répercuta dans les coursives.
_________________
Clemence.de.lepine
[M – 29]

C'est mal.

Dieu que c'est mal.

Et absolument en contradiction avec les résolutions qu'elle s'était fixées à Rome. Elle avait fait un marché avec Dieu, qui lui semblait plutôt équitable. Elle lui avait demandé plein de choses et en retour, elle lui avait promis quantité de choses également.

Elle se souvenait fort bien avoir dit quelque chose comme : « Dieu, je te promets d'essayer de respecter mon époux et de ne rien manigancer contre lui. »


J'avais dit « essayer ».

A bien y penser, elle se souvenait aussi d'avoir dit : « Dieu, je te promets de tenter de ne plus chercher d'excuse pour justifier chaque mauvaise action que j'aurais envie d'accomplir. »

J'avais dit « tenter ».

A l'appel au secours de sa cousine, elle glisse un coup d'oeil par la porte du bureau et en observe l'intérieur. C'était le bureau de son père, autrefois. Elle ne se rappelait pas qu'il y régnait alors autant de désordre qu'aujourd'hui. A bien y penser, elle devait encore posséder une clé de la porte et des tiroirs, si Aimbaud n'avait pas daigné changer les serrures. Cela aurait facilité les choses, si elles s'étaient par exemple introduites en pleine nuit, aidées de sa clé, pendant qu'Aimbaud dormait. Mais ça aurait été, sans aucun doute, encore plus mal que ce qu'elles faisaient actuellement. Pousser une porte déjà ouverte n'avait en soit rien de très déplacé. Ouvrir la porte fermée d'une pièce dont on n'est pas l'usager possède cependant quelque chose d'un peu plus sournois.

Et nous ne sommes pas sournoises. Nous ne faisons qu'entrer dans une pièce à la porte ouverte. Peut-être même est-elle restée ouverte à notre intention.


Elle hausse les épaules et parcourt d'un regard rapide tous ces livres et parchemins qui traînent en pagaille sur le bureau. Ses yeux curieux glissent du plafond – parsemé de boulettes de papier mâchées que le très mature marquis s'est sûrement amusé à y envoyer d'une pichenette adroite – jusqu'au sol – où le spectacle est quasiment identique.

Isaure, regardez les pieds du bureau. Il les a calés avec... je ne sais pas. Un vélin qui n'est pas vierge. Il y a quelque chose d'écrit. Qui peut-on bien dédaigner au point de faire de ses lettres des cales de table ?

[M – 26]

Et pendant qu'Aimbaud hésite devant les escaliers pour finalement se décider à faire demi-tour, Clémence reprend sa position devant la porte. Contre le mur. Le visage innocemment tourné vers le couloir. Elle monte la garde. Parce que ça l'implique moins que de devoir fouiller elle-même le sanctuaire de son mari. Elle ne ressent pas vraiment de pression. Pas encore. Il est parti depuis trop peu de temps pour qu'elle parvienne à déjà s'inquiéter de l'éventualité de son retour. Et si elle a le cœur qui bat, c'est davantage pour l'excitation de pénétrer ainsi l'intimité de quelqu'un sans qu'il n'en sache rien, que pour l'adrénaline qui ne lui bat pas encore aux tempes.

[M – 25 et 50 secondes]

Alors ? Appelle-t-elle du couloir, le ton impatient, rongeant l'ongle de son index pour tromper l'attente.
_________________
Isaure.beaumont
[M-25 et 40 secondes]

Accroupie au pied du premier pied du bureau, Isaure s’affairait à extraire la cale. Petit gémissement d’effort.

-Oui, oui, voilà, ça vient !

Le bureau était lourd. Assez lourd du moins pour que retirer le vélin sans le déchirer s’avère difficile. L’extraction méticuleuse du mystérieux courrier demanda à Isaure beaucoup de patience, ce dont elle était bien souvent dépourvue. L’extraction méticuleuse du précieux document fut un succès.

[M-23]

S’agenouillant, elle entreprit une rapide lecture à voix audible :


- A Aimbaud de Jôsselinière, le blablabla […] Héritier de la maison Jôsselinière, salutations. Mon jeune … ami. Vous êtes invité à…à... participer à mon mariage.


Rien de croustillant. C’était navrant de banalité. Du moins jusqu’à ce qu’elle arrive aux lignes suivantes. Hélant Clémence, elle lui tendit le vélin, la moue réprobatrice.

Flex a écrit:
    A Aimbaud de Josselinière,
    Le 17 octobre 1459,
    Fait à Marmande,

    héritier de la maison Josselinière, salutations.

    Mon jeune ami,

    vous êtes invité à venir participer à mon mariage ! Un faire-part est ci-joint à cette lettre.

    J'espère vous y voir, venez accompagné de votre copine. Après la cérémonie se déroulera la partie la plus intéressante, c'est à dire un collège entre hommes où l'alcool, les drogues et les putains seront à nos dispositions.

    Recevez nos salutations distinguées.



    Qu' Aristote veille sur vous.






[M-21 et 60 secondes]


Les investigations reprirent. Ce fut à la seconde missive d’être extraite. La tâche fut moins ardue. Cette fois-ci, Isaure avait été méthodique et en quelques secondes, le vélin mystère bis fut délivré. Les mains s’activèrent à le déplier. Les yeux parcoururent avidement les lignes, mais aucun sont ne passa le mur de ses lèvres jusqu’à ce que :

- Le goujat !!!

Et de se relever pour aller donner la missive en main propre.

Clémence a écrit:
Missive rédigée et scellée à Paris, le vingt-troisième jour de novembre.
De Clémence de l'Epine,
A Aimbaud de Josselinière,


Amitiés.

Ce que vous me contez là est plutôt affreux et je suis bien aise de vous savoir d'assez fort caractère pour pouvoir le supporter. A Paris, nous sommes contents quand il pleut, car l'eau permet de débarrasser quelque peu les ruelles de ses immondices et on aurait presque l'impression que les pavés rutilent de propreté. La boue, bien qu'infecte, a une odeur moins désagréable, je vous le jure, que toutes ces ordures jetées des fenêtres et les souillures des uns et des autres. Mais je sais que vous ne pouvez, où vous êtes, voir les choses sous cet angle et que la pluie ne fait qu'ajouter à ce sinistre, morne et triste tableau que vous me décrivez.

Priez, priez donc et ne vous arrêtez pas, moi je le fais : pour vous, pour ces hommes, pour ces femmes, mais surtout pour ces enfants, car la force de la prière vaut bien celle des armes, et a cet avantage d'agir en silence. Ne vous laissez pas trop accabler par la misère, détachez-vous en, c'est ainsi que l'on s'en protège.

Tout cela mis à part, il va me falloir vous rejoindre pour que nous commencions, puis achevions, les tractations de mariage. Il me semble que nous sommes assez grands pour le faire nous-même, je ne désire plus d'intermédiaire. Attendez-moi sous huitaine – et point davantage, je l'espère – à Saint-Robert. Dès avant mon départ, les bans seront publiés et le mariage annoncé pour le dix décembre. Apprenez cela à vos camarades et à vos chefs d'armée, laissez-les vous féliciter et se désoler de vous perdre pour quelques jours. Bataillez encore un peu puis venez à Saint-Robert. Nous en partirons ensemble après avoir vu et signé tous deux les dispositions de notre contrat de mariage. Si tout se déroule sans encombre, nous serons en Bourgogne vers le cinq ou le six. Vous pourrez retrouver votre vie et vous y reposer un jour ou deux tandis que je gagnerai Paris et la Chapelle Saint-Antoine-le-Petit.

J'espère que d'ici mon arrivée votre colère se sera atténuée et que nous serons disposés à nous voir sans trop risquer l'incartade.

Portez-vous au mieux,
Clémence


[M-20]

Tandis que Clémence lisait, guettant d’une oreille sa réaction, la Miramont s’attaqua aux tas de missives et autres documents éparpillés sur le bureau. Ses gestes étaient aussi désordonnés que le bureau marquisal. Inconsciemment, Isaure regardait régulièrement la porte, tendant l'oreille au moindre bruit suspect. Parfois, à cause de trop de concentration, il lui arrivait d'oublier de respirer.
_________________
Aimbaud
[M-25]

Pour accéder aux cuisines, Aimbaud avait l'habitude d'emprunter le passage secret qui menait à la salle du trône. Il avait pris ce fâcheux réflexe depuis que Clémence lui avait fait une visite guidée de sa demeure — "Alors vous voyez, là, vous soulevez la tapisserie et il se trouve un loquet sous cette pierre. Ensuite vous pouss... Mais NON PAS COMME UNE BRUTE ! Vous allez tout casser." — et d'après elle, il y en avait encore bien d'autres dissimulés dans le logis dont on avait oublié le mécanisme. Elle lui avait fait promettre, évidement, de ne faire usage de ces passages qu'en cas d'urgence, et ceci dans la discrétion la plus totale. Et il s'était empressé, évidement, de divulguer l'astuce à ses deux favoris valets, et d'emprunter ces couloirs à toute heure du jour... Après tout, c'était le chemin le plus direct, qui évitait de passer par toute une aile du château (et une aile vraiment basique, alors que les loquets cachés derrière les tapisseries, c'était autrement plus jouissif).

Un panneau de bois s'ouvrit en grinçant dans la salle du trône. L'écho se répercuta dans l'espace désert. Aimbaud sorti de sa cachette en sifflotant. Il referma le battant de bois avec un coup de pied et piqua tout droit vers un couloir en bout de pièce, sans même prêter gare à la magnificence des tapisseries, la marqueterie en croisillons qui constellait le plafond ou même les tapis de riche pourpre qu'il foulait d'un pas pressé. De son oeil blasé, il constata seulement que les grands panneaux d'acajou de la salle versaient une grande et belle lumière ce jour là !

[M-23]

Une énorme bouffée de vapeur d'eau, aux senteurs de bouillon de tripes, sauta au visage marquisal quand il entra dans les cuisines. Tous les murmures se turent et toutes les têtes coiffées de blanc (tâché de gras) s'inclinèrent en disant "Vot' magnificence !".


Oui oui ça va ça va. Du vin ! Du manger ! Ah, Aymon.

Fit Aimbaud en apercevant son valet accoudé sur le linteau de la cheminée, dans une pause étudiée de beau-gosse, auprès d'une servante qui tranchait des radis, imperturbable. Le drôle répondit à l'appel dans un sursaut, et s'approcha aussitôt de son seigneur avec révérence pour partager sa table et l'entretenir des nouvelles du logis, tandis qu'Aimbaud piquait des morceaux de pain et de fromage au bout de son couteau pour les enfourner avec appétit.

Il fut question des corvées que l'on avait apportées le matin, et des deux nouvelles servantes que l'on avait employées pour battre le linge... Dont l'une passait justement entre les fourneaux, un panier sous le bras... Ils matèrent, ils s'entendirent du regard. Puis Aymon parla de Danavun, qui sentait mauvais, et qui prenait toute la place. Puis d'Isaure, qui était vilaine avec lui. Puis de l'armée, qui fut dure, qui lui cassa les épaules et le dos, mais qui l'amusa bien pour ce qui était de la garnison. Alors Aimbaud partagea son vin avec lui et lui conta quelques bonnes anecdotes de la bataille de Limoges lors de la guerre Ponantaise, et comment ils avaient gagné le concours du plus haut charnier contre l'armée rouergoise, si bien que lorsqu'on y avait mis feu l'odeur avait fait vomir tout un chacun sur une lieue à la ronde. L'histoire provoqua un petit blanc dans la conversation.


[M-21]

Aimbaud et Aymon mâchèrent leur pain, respectivement, en attendant que l'autre trouve quelque chose à dire.


[M-20]

Hé sinon j'ai pu croiser les filles Blanc-Combaz. Vous auriez du en épouser une, elles sont pas si mal les bougresses ! Mais z'auriez eu cette harpie de Saint Just pour belle mère. C'qui eut été moins drôle...
Tu es dans le vrai, le bel avantage au moins avec Clémence, c'est qu'elle n'a plus sa mère.


Sans que l'on sache trop par quel lien d'idée, ils en vinrent immédiatement à parler de Lugh, et de la carotte quotidienne qu'Aymon donnait au palefroi afin de lui faire un bai bien riche et de lui améliorer le caractère ! Ils terminèrent le fond de leurs godets et Aimbaud annonça qu'il était grand temps qu'il retourne à ses études, mais le futé valet le pria avec de grands gestes cajolants de le suivre aux écuries pour constater lui-même de l'excellente tenue de son canasson.

BoooAAaarrf... Juste un court instant alors.

Un court instant. ERREUR !

Écrit avec LJD Aymon.

_________________
Clemence.de.lepine
[M-23]

Elle pouffa. Complètement insensible à ce que qui avait pourtant offusqué Isaure. Elle avait reçu une invitation pour le même mariage, de la main du même expéditeur, mais la conclusion, elle s'en souvenait fort bien parce qu'elle avait trouvé la perspective tout à fait ennuyante, était totalement différente. Un collège de femmes débattant sur elle avait oublié quoi. Elle avait répondu « d'accord » pour la forme et parce que ce genre de réunion pouvait vite tourner au spectacle. On n'a pas idée de réunir des dizaines de femmes, et uniquement des femmes, dans une même pièce. C'était le genre de choses qui partait vite à vau-l'eau et se finissait en crêpage de chignons en bonne et due forme. Le fait était qu'elle n'y avait jamais participé parce que TOUT était parti à vau-l'eau bien avant.

Ne vous en faites pas, Isaure. Regardez la date, nous n'étions ni mariés ni même fiancés. Et Aimbaud n'est jamais venu au mariage puisque j'y étais et que je ne l'y ai pas vu. Quel humour, cet Enguerrand, et quelle subtilité... non vraiment. Un homme très distingué.

Elle commença à faire les cents pas le long du couloir, continuant malgré elle à rire de la découverte de la cousine, s'imaginant avec délice comment le prendrait le Dublith s'il apprenait que son courrier se retrouvait coincé sous un pied de table comme un vulgaire brouillon de liste de courses.

- Votre très gracieuse Grâce ! Vous savez, mon mari vous conchie au point de ratatiner vos gracieux courriers et de les utiliser sans grâce ni culpabilité aucune comme cale de bureau. Je serais vous, je...
- COOOmment ? Qu'est-ce que j'enteeends ? C'est une honte, une infâmie ! Ah ça, il me le paiera, le bougre ! Un duel, rien de moins, un duel, je veux ! Réparons cette erreur sans tarder !
- Que voulez-vous dire par « réparons cette erreur » ? Explicitez. Non parce que je suis tout à fait d'accord avec vous, Aimbaud a été l'erreur de ma vie. A cause de lui, j'ai perdu ma meilleure amie et...
- Un gant, qu'on me donne un gant !
- … ma virginité et...
- Non pas celui là, l'autre ! Le blanc. Il a plus de classe.
- … je ne suis plus riche qu'à moitié puisque tout lui appartient maintenant autant qu'à moi. Réparez l'erreur alors mais...
- Marquise, menez-moi à lui.
- … discrètement, et attendez qu'il me fiche un héritier dans le ventre quand m... Quoi ?! Ah non dém*rdez-vous, je suis déjà trop impliquée dans cette histoire.

[M-22]

Le cri la fit sursauter et elle s'en retourna immédiatement camper ses positions à côté de la porte. D'un geste leste, elle attrapa la lettre hideusement abîmée que lui tendait Isaure, et aux premières lignes, elle sut qu'Aimbaud venait de faire lui aussi l'erreur de sa vie.

Le goujat ! Reprit-elle dans un écho stupéfait. Il a mis MA lettre en cale de table ! Il m'a mise au même niveau que le Dublith !

Elle froissa la lettre, la roulant en boule, puis se ravisa, la défroissa et la déchira en milliers de morceaux qu'elle dispersa comme une traînée de poudre sur son bureau. Furieuse, elle prit le premier objet qui lui tombait sous la main – un pot à plumes immonde griffonnés de tas de minuscules inscriptions qui répétaient toutes inlassablement la même idiotie équivoque « Hin hin hin ». Comme si même le pot à plumes se mettait à se moquer d'elle. Rageusement, elle l'envoya promener à l'autre bout de la pièce. Il rebondit contre le mur, contre un secrétaire immaculé qui servait à on ne sait pas bien quoi, et vint se fracasser contre le sol en douzaine de morceaux emplumés.

[M-20]


AIMBAUUUUUUUD ! Le cri résonna dans le bureau et se répercuta contre les murs de l'étage, faisant quasiment vibrer les fenêtres et trembler les courtines.

Je le hais, Dieu que je le hais, est-il possible d'haïr à ce point ? Oui puisque je le hais vraiment, vraiment. Je ne lui ai RIEN fait et en retour, lui, il me considère comme... comme... comme un vulgaire cale-table ! Je ne sers PAS à caler les tables.

Elle s'était assise sur la chaise de bureau et tentait de se calmer, tentait de ne pas sortir immédiatement chercher son grossier mari et lui apprendre les bonnes manières d'un coup de latte bien senti. Reprenant une profonde inspiration, elle coinça son menton sur les paumes de ses mains jointes et reporta son attention sur le désordre ambiant.

[M-18]

Pardon pour cette regrettable interruption. Reprenons. En... déplaçant délicatement le pot de plumes, j'ai fait tomber une lettre. Vous n'avez qu'à lire celle-ci. Je...

Elle se leva dignement et toisa la pièce avec un air de défi.

… m'en retourne dans le couloir.
_________________
Isaure.beaumont
[M-19]

- Clémence ! Clémence, voyons ! Pas si fort ! S’il vous entend et qu’il revient, nous sommes faites ! Vous aurez l’occasion de vous venger, ne vous en faites pas.


Isaure était inquiète. Le coeur s'affola et les yeux parcoururent le couloir hâtivement tandis que les oreilles se tendaient, guettant le moindre bruit. Mais rien ne vint.

[M-18]

Sa cousine apaisée, Isaure répondit à sa demande et se baissa pour ramasser la lettre qui avait voleté jusqu'à ses pieds. La parcourant rapidement, elle n'y vit rien de bien passionnant. En réalité, ce qui aurait pu les intéresser, son regard ne l'avait pas percuté, et c'est déçue qu'elle tendit la lettre vide de tout intérêt selon elle à sa cousine.

- Une lettre de sa suzeraine. Vous pourrez vous en servir comme cale-pied.
MarieAlice a écrit:

Aimbaud,

Je vous écris rapidement après une première nuit de combats. Je ne doute que vous savez que Dijon fut prise, le Duc élu mis à bas de son trône, que le Roy a ordonné que ses vassaux et les Ordres Royaux marchent sur la Bourgogne et sa capitale pour remédier à cela. Et, ô joie immense s'il en est une, votre suzeraine préférée - oui je parle de moi là - fait partie de ses deux choses là. Enfin je dis chose.... Ahem, vous aurez compris.

J'aimerai savoir où vous vous trouvez, ce que vous faites exactement - et j'espère bien que vous ne faites pas n'importe quoi - et, tant qu'à faire, si votre épouse a décidé de rentrer pour agrandir la lignée des Josselinière.

Votre suzeraine largement fatiguée de tout ce cirque.


Sa mission accomplie, elle repartit en quête d’indices. Bientôt, elle trouverait le Secret de son cousin. Et elle se réjouissait d’avance de la tempête qui s’abattrait alors sur lui.

[M-17]

Les yeux balayaient le monticule de documents. Elle repoussa un gros livre dans lequel on semblait parler de guerre. Rien de bien intéressant en somme. Et l’esprit s’agitait : où cacherait-elle ses plus grands secrets ? Dans une collection de manuscrits reliés ? Et la main se tendit vers un de ses dits manuscrits pour s’en saisir.

La jeune fille l’ouvrit avec empressement. Que pouvait bien dissimulés cet ouvrage aux enluminures divinement réussies ? Elle s’assura qu’il n’y avait aucun pli et ses yeux, amateurs des beaux arts, s’attardèrent un instant sur les dessins colorés et détaillés.


- Votre époux a là une collection toute particulière ! Je ne le savais point sensible aux arts. Voilà qu’il remonte dans mon estime. L’on pourrait le croire rustre, et pourtant… Il s’émeut devant tant de beauté. Je ne le savais point si raffiné. Quel homme plein de surprises !

Le bouquin est tourné dans tous les sens, les yeux se plissent, le nez vient se poser contre le papier.

[M-(3x5)]

- Quels étranges dessins. Oui, voilà de bien particulières représentations. L’on dirait qu’ils dansent. Mais quelle danse ! C’est un peu fouillis. Et leur tenue est un peu… épurée… Et là… là… Hmmm, le travail n’est pas si soigné, regardez, une tâche sur l’entrejambe de l’homme ! Un trait mal assuré.


Ses pas l’avaient menés jusqu’à sa cousine et le doigt sur la dite tâche, elle lui secouait le manuscrit sous les yeux. Le manuscrit s'envola bientôt de ses mains pour rejoindre celles de la blonde et tordant ses mains, les lèvres légèrement pincées, Isaure hasarda un:

- En parlant d'homme Clémence... Je voulais vous entretenir d'un sujet... important...

Il fallait qu'elle lui en parle, et à trop repousser, ce n'en serait que plus difficile. Clémence comprendrait.
_________________
Aimbaud
[M-19]

Oui ?
Messire ?
Quelqu'un m'a appelé, non ?


Aymon — qui ne devait sûrement pas d'être lavé les oreilles depuis quelques années — fit bonnement non de la tête, et Aimbaud cru avoir rêvé. Bien loin de s'imaginer qu'au même instant, Isaure et sa femme avaient le nez plongé dans ses manuscrits cochons, il emboîta gaiement le pas de son serviteur. Ils quittèrent les cuisines par une porte de service dont le goulot étroit sentait la crotte de poule, puis débouchèrent dans la cour du château. Un troupeau d'oies s'écarta brusquement sur leur passage, pourchassées par un dogue baveux qui vint frotter son museau plein de terre aux pieds d'Aimbaud, avec une révérence toute canine. Le bon maître, n'allant pas se salir les mains, se contenta de lui octroyer un tapotement de sa chausse.

Ouiii bon toutou, ah la pa-patte ! C'est le brave toutou à son papaaa. Eh qui-qui m'a sali mes ribouques ! Fit-il en s'essuyant la semelle sur le pelage du chien, comme sur un paillasson.

[M-15]

Un instant plus tard, maître et valet passèrent le clos des écuries, suivis par le dogue qui ressemblait désormais à une vieille perruque traînée dans la boue (une vieille perruque qui haletait, la langue pendante). Et dans l'enclos principal, celui avec une mangeoire en buis laqué avec un fer-à-cheval plaqué or, celui dont les portes étaient peintes et sculptées de petites flammes moyennâgeuses-tuning, celui avec une bannière crénelée de velours bleu sur laquelle était écrite "LUGH (Visage pâle)", dans cet enclos là, eh bien : il y avait LE cheval. Parce que Lugh, ça n'était pas un cheval. C'était LE cheval. Le cheval offert à Aimbaud par sa soeur, mis-bas dans le haras de la cour de France, le pelage noir comme geai, les pattes blanches comme linceul, le museau rose comme euh... (là je n'ai pas trouvé de comparaison qui fasse théâtrale). LE cheval fut salué par Aimbaud de la façon suivante :


Ouh qui n'est content le dada ! OUh que oui ! C'est mon dada d'amûr à son pôpa ! Le braaaaave Lugh, ouh qui n'est beau. Bon dadaaaa !

Est-il nécessaire de préciser qu'Aimbaud avait une manière toute spéciale de se comporter avec ses bêtes ? Les bêtes le lui rendaient bien. Lugh se mit à piaffer, retrousser les babines et à cogner ses naseaux dans la paume du Josselinière, croyant qu'on le menait en ballade. La belle amitié équino-humaine ! Face à une telle symbiose de caractère, l'on ne pouvait que se taire et observer le spectacle en poussant un soupir attendri. C'est ce que fit Aymon, avant de rompre le charme :

Alors, ce bai ? Qu'en dites-vous ? Cela fait effet la carotte, pas vrai ?

Et le marquis, pour s'en assurer, passa le poil de son destrier au fil de la main, avec plus de soin qu'il ne l'eut fait pour sa propre épouse... Soudain, une bosselette arrêta ses doigts.

J'en dis... Qu'est ceci, maraud ? Une tique, sur mon plus beau cheval de chasse et de course ? Que vois-je ? Une deuxième, ici ? Salopaaard ! TU NE TE FOUTRAIS PAS UN PEU DU MONDE ?

Oh seigneur. Elles n'y étaient pas la dernière fois. J'vous jure ! Je l'inspecte au peigne fin. C'est le maître chien ! Il ramène toute la crasse de ses bêtes avec lui du chenil. Mais AÏE ! C'est le maître chien j'vous dis !


Tout à sa colère, Aimbaud avait saisit un balai, s'en était fait une arme, puis avait visé la tête d'Aymon, et s'en était fait une cible.

[M-12]

Quelques coups de bâton plus tard, Aymon s'était empressé d'ôter les parasites en les mouillant avec de la gnôle de poire. Il tapotait désormais Lugh comme une bonne mère, et Aimbaud et lui se réconcilièrent sur une gorgée d'eau-de-vie. Le serviteur collabora en accusant une nouvelle fois le maître-chien qui amenait là les puces de ses bêtes, en venant jouer aux cartes avec les palefreniers, et Aimbaud promis de le faire battre plus qu'à son tour.


Hors donc, on joue aux cartes par-ici ?

Fit le jeune seigneur en relevant le nez, l'air intéressé. Le valet opina avec un air de connivence, et le mena vers le lieu des paris.

Écrit avec LJD Aymon.

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Clemence.de.lepine
[M-18]

... qui est aussi MA suzeraine ! Normalement, on n'utilise pas comme cale-pied des lettres de personnes que l'on est censé respecter.

Normalement... Elle n'a toujours pas digéré la précédente trouvaille alors, elle rechigne un peu à prendre la missive de MarieAlice. Mais bon. D'un autre côté, il lui semble difficile de pouvoir trouver pire – et pourtant...

D'un regard absent, elle parcourt la lettre et ses yeux, naturellement, s'arrêtent sur le passage où il est question d'elle. Elle soupire et reste pensive, contrariée à l'idée que d'autres qu'elle puissent se préoccuper de la question délicate de l'héritier. Ses prunelles s'illuminent et un vague sourire vient éclairer son visage sombre. D'un pas décidé, elle gagne à nouveau le bureau d'Aimbaud, balaye la surface d'un geste large pour faire de la place, se baisse pour ramasser une des plumes qu'elle a précédemment fait tomber, attrape vélin et encre et s'assoit à la table.


Nous allons rassurer Sa Seigneurie, d'accord ?

Elle pose la question pour la forme, en réalité elle n'a pas besoin de l'accord de sa cousine pour savoir ce qu'elle a à faire ou non. Et, alors qu'elle commence les formules de politesse, Isaure lui remue sous le nez un parchemin couvert de dessins... pour le moins explicite.

[M-15]

Voyons Isaure, ne vous abaissez pas à regarder ce genre de choses.

Elle gronde gentiment, distraite, et continue d'écrire. Elle n'a que faire des penchants malsains de son époux et peu lui chaut qu'il ait en sa possession quelques gravures à l'équivoque relative. Cependant, il lui paraît déplacé que sa cousine y jette ne serait-ce qu'un coup d'oeil et elle relève une seconde le regard pour, des mains de cette dernière, arracher les dessins suggestifs qu'elle envoie à leur tour voler sur le plancher.

Toute à sa lettre, elle n'entend que vaguement ce qu'Isaure tente de lui dire. Et elle attend d'avoir apposé le point final sur le vélin pour battre des cils et tendre un sourire complaisant à la brunette.


Rien de grave, j'espère. Moi, du moment que vous demeurez toujours pucelle, je crois que je peux tout entendre.

Que tu crois...

Du regard, elle cherche la cire, son scel déjà brandi et prêt à venir orner le bas de la lettre. Ne parvenant à mettre la main dessus, exaspérée par tant de désordre – qu'à elle deux elles n'ont pas arrangé – elle glisse sous le bureau et se met sur le sol à fouiller papiers et objets épars. De temps en temps, elle vient, en poignées, ramener sur la table quelques papiers griffonnés qui lui semblent assez importants pour ne pas avoir à prendre la poussière et les traces de pas par terre. A un moment, sa main agrippe un médaillon et, machinalement, elle le pose à son tour sur le bureau. Après quelques instants de recherches infructueuses, elle se relève, époussette le bas de sa robe et reste plantée devant sa missive, le sourcil froncé.


Tant pis. Pas de scel. Pouvez-vous donner ça à un valet ? C'est pour MarieAlice Jagellon. Vous pouvez lire, si vous voulez.

Et elle, elle se rassoit, bien calée au fond du dossier, les mains croisées en son giron, comme si la pièce était devenue son territoire. Car, elle s'y sent comme chez elle, et elle arbore désormais un petit sourire satisfait en contemplant son nouvel environnement.

[M-12]

Allons-y, dites-moi tout, mais n'interrompez pas vos recherches.
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Isaure.beaumont
[M-15]

Les prunelles isauriennes suivirent le vol du manuscrit, ne comprenant pas le manque d’intérêt de sa cousine pour une telle œuvre. Puis, haussant les épaules, elle reporta son attention sur sa cousine, absorbée par la rédaction d’une lettre.

Bientôt, les regards se croisèrent. La missive achevée, Clémence partit à la recherche de cire et retournant un peu plus le bureau, elle fouilla sans ménagement chaque recoin du secrétaire.

-Oh, je pense alors que vous serez ravie de la nouvelle que je vous réserve. Vous serez la première à savoir ! En fait…

[M-13]


Mais déjà Clémence changeait de stratégie et s’attaquait aux divers objets et feuillets qui jonchaient le sol. Trop occupée à sa recherche, elle ne semblait pas l’écouter, ni même l’entendre. Isaure, debout là, attendait patiemment que sa cousine daigne lui prêter une oreille attentive. Elle bouillait d’impatience de lui conter sa joie, de lui révéler ce secret qu’elle gardait si précieusement depuis plusieurs jours.
Se saisissant de la lettre qu’on lui tendait, Isaure laisse ses yeux avides courir sur le vélin.

Citation:
A ma très chère suzeraine,
De la part de votre toute récente vassale, par la force du mariage,
Salut et respects.

Je suis par mégarde tombée sur une de vos lettres à Aimbaud qui traînait au milieu de mes affaires, on ne sait bien pourquoi. Enfin vous connaissez Aimbaud et sa propension au désordre, il n'y a pas là matière à se poser trop de questions.

Je viens, par cette missive, vous rassurer sur le point que vous évoquiez et qui me concerne un peu, je crois. Apprenez que je suis de retour depuis peu, que j'ai prié en allant à Rome, que j'ai prié à Rome, et que j'ai autant prié sur le chemin du retour. Je continue à le faire, j'adresse mes prières à Dieu et personne, j'en suis certaine, n'aura jamais vu âme plus fervente que la mienne. Tout comme vous, la question de l'héritier me préoccupe et ça n'était pas pour autre chose que je décidai d'entreprendre ce pèlerinage vers Rome.

Maintenant, me voilà à nouveau en France et disposée à reprendre les efforts dans l'optique de satisfaire mon époux, moi-même, et tout ceux qui de notre union attendent descendance. Je vous assure que ces efforts sont menés conjointement et avec toute la meilleure volonté du monde. Et je suis certaine que d'ici quelques semaines, j'aurai le bonheur de prendre à nouveau la plume pour vous annoncez un heureux événement.

Après tout, Dieu n'aura pu se trouver insensible à tant de dévotion.

J'espère que vous voilà rassurée, ma suzeraine, car il m'incommoderait de vous savoir inquiète à ce sujet.

Que le Très-Haut vous garde,
Clémence de L’Épine

PS : J'espère que de votre côté, vous priez également pour nous.




Les épaules se haussèrent imperceptiblement : il était évident que Clémence donnerait bientôt naissance à un héritier mâle, fort et beau. Comment aurait-il pu en être autrement. Les descendantes de Blanche de Sicile ne pouvaient faire que de beaux héritiers. C’était bien connu.
Acquiesçant à la demande de sa cousine, Isaure coinça le message dans son corsage. Avant de se remettre à sa fouille.


[M-12]

- Oui donc, je voulais vous dire…

Les mains remuèrent encore un peu plus le méli-mélo chaotique de papiers, plumes et autres objets. Bientôt, les mains frôlèrent le médaillon que Clémence venait de ramasser et, fébriles, elles l’ouvrirent sur le portrait d’un enfançon tout blond.

- Ooooh regardez comme Aimbaud était blond petit. IL était alors adorable, il a fort changé. Vous ne trouvez pas ?

Elle agita le médaillon sous le nez de sa cousine comme elle l’avait fait précédemment avec le manuscrit.


- C’est difficile à croire qu’il ait pu être si mignon à une époque, bien lointaine à présent.

Lui remettant le médaillon, elle se remit en quête de quelques lettres compromettantes.

[M-11]

- Oui, donc je vous disais…


Le cœur s’accéléra. Pourquoi était-ce si difficile de tout lui dire ? N’avait-elle pas dit que tant qu’elle la savait encore pucelle, elle pouvait tout entendre ? Et d’une traite, elle avoue son inavouable secret :

- EhbienCassianetmoivoulonsnousmariercetété ! Vous êtes invitée, bien entendu !
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Clemence.de.lepine
[M-11]

Un portrait d'Aimbaud ? Ça n'avait aucun intérêt. Elle jeta tout de même un regard machinal en direction de l'objet que sa cousine s'amusait une nouvelle fois à lui remuer juste sous le nez. Elle fronça les sourcils. Et attrapa le médaillon d'un geste vif.

Ça n'est pas...

Elle s'apprêtait à dire que si le garçon pouvait en effet bien être son époux une bonne douzaine d'années plus tôt, il ressemblait également à un autre gosse qu'elle avait croisé il n'y avait pas si longtemps que ça. Sauf que Isaure la prit de court. Elle débita un charabia de paroles que Clémence ne fut pas certaine d'avoir correctement saisi tant le message était... absurde. Qu'est-ce que c'était que cette blague ?

Elle resta là, à passer du médaillon à sa cousine, du médaillon, à sa cousine, incapable de décider ce qui, entre les deux, pouvait être le plus dérangeant. Et puis, son regard perdu s'affermit à nouveau et, se levant, elle s'en vint trouver Isaure, se planta devant elle, fut tentée un court instant de lui asséner une petite tape sur le crâne pour la réveiller, mais préféra prendre une bonne inspiration et lui répondre, d'un ton calme.


Plutôt mourir.
Et d'accompagner ces funestes paroles d'un sourire mielleux.

Ses doigts se posèrent sur l'épaule délicate de la Wagner, et, par ce geste, elle rappelait à Isaure qu'elle considérait avoir une certaine autorité sur elle. Et que donc, ce genre de débilités, on les lui soumettait avant de penser à les concrétiser.

Maintenant que les choses sont claires entre nous, je vais vous apprendre un secret.

Cela compenserait peut-être sa déception d'avoir à essuyer un refus.

Ça. Elle désigna le portrait du blondinet qui ornait le médaillon. Et bien, ça n'est pas Aimbaud.

Elle entretint le mystère, laissant s'installer le silence. Elle hocha la tête d'un air grave, parce qu'elle était sur le point de révéler le plus grand secret de tous les temps.

[M-10]

Il s'agit... Elle baissa le ton et s'approcha tout près de l'oreille d'Isaure. Il s'agit du fils d'Aimbaud... et de Blanche.

N'était-ce pas la chose la plus croustillante qu'il soit possible d'entendre ?

Attention, je crois qu'Aimbaud ne sait pas que je sais. Laissons-le à ses illusions.

Il lui fallut une seconde de plus pour se demander comment ce médaillon avait bien pu atterrir ici. Elle joua avec la chaîne, pensive, mais l'objet lui sembla vite un peu trop brûlant. Il y avait des questions qu'il valait mieux ne pas se poser. Et alors qu'il lui avait semblé inutile de remettre les précédents papiers fouillés à leur place exacte, il lui parut nécessaire de replacer le médaillon là où il avait été laissé. Elle observa d'un œil catastrophé le bureau, parce qu'elle n'avait aucune espèce d'idée de l'endroit d'où avait pu sortir ce truc. Alors, précautionneusement, elle le déposa dans les mains d'Isaure.

Voilà. Rangez-le. S'il vous plait.

Ou comment se débarrasser efficacement d'un problème.

Et elle repartit vers le couloir parce que tout compte fait, le temps filait.


[M-9]

Vous avez essayé d'ouvrir les tiroirs ?
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Aimbaud
[M-10]

Aimbaud de Josselinière et son fidèle valet longèrent les écuries et débouchèrent sous un préau où l'on re-ferrait les chevaux, où l'on entreposait les vieilles selles et où accessoirement, entre un tas de purin et une flaque de boue, on pariait sa paie aux dés et aux cartes... En voyant la noblesse arriver, les deux palefreniers qui se trouvaient là se levèrent en trébuchant dans les pieds de leurs tabourets et ôtèrent aussitôt leurs toques pour découvrir, l'un son crâne lisse comme un oeuf, l'autre son crin roux et gras. S'amusant de l'effet de surprise, Aimbaud se campa près d'eux pour les désigner tour à tour de l'index.


Vous êtes bien PÂLES freniers. Hin hin hin !
Gné hé hé hé.


Maître et valet donnèrent du coffre dans un ricanement en deux tons qui se répercuta sous la tonnelle pendant un long instant. En face, les garçons d'écurie se contentèrent d'osciller d'un pied sur l'autre en se jetant des regards gênés, ils lâchèrent quelques petits éclats de rire forcés pour être polis. D'un coup, Aimbaud cessa de rire et s'assit près de la cagette qui servait de table, les trois autres l'imitèrent brusquement.

À quoi joue-t'on ?
Vot' Magnifas... science... Euh. Tarentelle, Hasart... Aluette. Ramponneau ?


La cagette manqua de se renverser, car le marquis venait d'y poser sa bourse d'or. Les serviteurs dévisagèrent le porte-monnaie comme s'il s'agissait de la mère de Christos en petite tenue. Peut-être des voix d'enfants de choeur se mirent-elles à résonner comme un Larsen au fond de leurs âmes. Ils se ruèrent sur les cartes pour donner.

[M-7]

J'vous dis, y font que d'tricher... La dernière fois ils ont tout remporté avec des un. Genre "un" ça vaut plus qu'un Roi...


Maugréait Aymon en voyant partir dans le pot commun, l'écu dont son seigneur lui avait fait cession. Aimbaud resta maître de sa concentration, menaçant son adversaire avec son regard terriblement châtaigne, par dessus la frontière de ses cartes, mieux agencées qu'un éventail de veuve espagnole. Le Roux fronça ses tâches de rousseur tandis qu'une petite perle de sueur dévalait la gouttière de sa narine, ou peut-être était-ce de la... Beurk caca. Le marquis fut déconcentré, sa parade d'intimidation s'effondra...

Et j'relance de sept.

"Sept écus, mon Dieu... Sept écus... C'est un fou lui... Attendez. Quoi, sept écus ? Nemours m'en rapporte 20 000 par an, je crois. Genre... C'est pas un petit gueux de palefrenier fini à l'urine marié avec sa soeur qui va me foutre une déculottée. Ouais, quoi ? C'est à moi qu'tu parles, minus ? You feuque maille ouaiffe ? Tiens. Prends ça dans tes dents, rouquinator..." Telles étaient les pensées d'Aimbaud alors qu'il observait fiévreusement son deux de pique et son cinq de carreau, en sentant une moiteur froide lui descendre entre les omoplates...

Je suis ! Aboya-t'il. Et je relance de... DEUX.
Ouais ! Allez-y, messire. C'est rin que d'la comédie.


Aymon tenait le rôle de la pom-pom girl, il trépignait d'encouragements.

[M-6]

Le palefrenier tapa deux écus sur le comptoir et lâcha son couple de reines.


PUTAIN DE CHRISTOS ! Mais il est tout pété ce jeu !

Le jeune Josselinière s'emporta en quittant la table, dans laquelle il balança un coup de pied teigneux. D'un tour de bras, il ramassa sa bourse et tourna les talons en poussant un râle exaspéré.

Toujours écrit avec ljd Aymon.

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Isaure.beaumont
[M-11]

Plutôt mourir ?

Était-ce une plaisanterie ? La Marquise, sa cousine, était-elle en train de la taquiner ? A moins qu’elle ne voit d’un mauvais œil cet hyménée ? Qu’entendait-elle par plutôt mourir ? Plutôt mourir que d’assister à ton mariage ou plutôt mourir que de te laisser épouser ce pédant petit paon ?
Un rictus déforma les lèvres de la Miramont, simple réponse au sourire doucereux de sa cousine. Elle ne devait pas faire paraître son désappointement.


[M-10]

Et tandis que la marquise lui confiait le secret du siècle, Isaure se plongea dans ses réflexions. La voix de sa cousine alors perdue dans le flot de ses pensées ne lui parvint qu’une fois qu’elle reçut le médaillon dans ses mains.

-Le ranger ? Hein… ah… euh oui ! Bien entendu.

Sans se soucier de l’endroit exact où elle l’avait trouvé, elle le posa distraitement sur le bureau. N’était-ce d’ailleurs pas Clémence qui l’avait ramassé ? Se ravisant, elle reprit le médaillon et le lança sur le parquet, quelque part sous le bureau, sa place initiale.

[M-3²]

Se mordillant la lèvre, la brune tira un à un les tiroirs pour en extraire leur contenu.


-Vous ne viendrez donc pas ? Voilà qui m’attriste Clémence. A défaut de père et de mère, j’aurais aimé savoir que vous, ma cousine de sang, seriez présente à mes noces !

Dans le fond d’un tiroir, dissimulé sous un fouillis d’objets et parchemins en tout genre, Isaure découvrit, plaqué contre la planche de bois légèrement vermoulue, un paquet de lettres reliés par un vulgaire bout de ficelle.

Se saisissant d’une lettre, elle la parcourut rapidement :


Blanche_ a écrit:
Merveilleux, merveilleux.

Avoir des nouvelles de cette Chère Clémence me ravit. Ravit, dis-je. Oh, très certainement que si elle ne s'était pas invitée à Valdecorneja sur sa route de retour, j'en aurais été très peinée de devoir attendre le mois de mai pour Enfin la revoir!
Transmettez-lui toute mon amitié.

Blanche da Lua


Au verso, à l'encre sympathique, brunie.

Citation:
Mon très cher amour,

Un mot de vous réveille mon coeur, un second l'enflamme. J'ai souffert mille morts à cacher votre pli sans y pouvoir répondre, une seconde lettre m'achève... Ah, si peu de place pour répondre, et pourtant tant de mots se pressent à ma plume...!
Il nous faut nous voir, je ressens le désir de vous dans tous mes os ; ma peau se languit de la votre, et mon Âme, doux Amour, n'a de cesse de chercher la votre... Où je vais je sens l'odeur de vous. Et vos mots me poursuivent... J'entendis votre voix me lire votre lettre. Assurément, vous étiez là, et tandis que je gardais le papier plié dans mon corsage, résonnait-elle encore à mes oreilles, et mon coeur. Je sens le souffle de votre impatience collé à la mienne, j'ose espérer que vous n'avez porté crédit à vos propres inquiétudes... Là, lasse, j'aimerais vous garder de chacune d'elles, je n'aurais de cesse de vous faire comprendre l'étendue de ma passion, s'il le faut je consentirai à la folie que vous m'ordonnez.
Mon coeur me le dicte, je vous invite à venir ; gardons cette manière de nous écrire le temps qu'il le faudra.

Vous revoir, sitôt que je pourrai...! J'en mourrai si je ne le puis. Me lisez-vous, entendez-vous ma voix? J'aurais presque vos mots au bout de mes lettres. "Ne faites pas de bêtises..!" vous pourriez me le dire. Blanche, ma mie...
J'ai reçu une invitation pour Paris. Et la Bourgogne, ainsi qu'Orléans. Compromettons-nous dans cet amour, je n'ai plus aucun espoir d'être rédemptée, et trouvons à la Castille ou la France le juste théâtre de cette damnation. J'y ai plus de contentement qu'une éternité pure auprès de mon époux. Aimbaud, pour l'amour de vous je ferais n'importe quoi. Me lisez-vous, entendez-vous ma voix ? Je vous aime encore.

Ardemment,

Blanche



En lisant la courte lettre sans intérêt, le visage d’Isaure se rembrunit. Elle tendit d’un geste sec le petit paquet de lettres à Clémence. En y piochant au hasard, voilà ce qu’elle pourrait lire.

Blanche_ a écrit:
A Aimbaud de Josselinière,
De Blanche de Walsh-Serrant,
Salut.

Mon très cher ami, j'ai reçu aujourd’hui votre lettre et elle m'a ravi : vous êtes en semblant
de bonne forme, vous avez bon ton et bonne figure, et tout cela me contente. J'aime apprendre de
bonnes nouvelles, et savoir votre épouse grosse (ou presque) me plaît. Dites moi si un petit rien
lui ferait plaisir, ou serait à son confort... Peut être une délicieuse surprise... Seulement si Vous
me promettez de garder le secret. Le moins que l'on puisse dire, c'est que tous deux vous êtes
gâtés. Que Clémence pleurait sur son statut de simple célibataire, désormais, est bien drôle...
Ou plutôt rassurant. Si vous me permettez de vous faire une confidence semblable, moi-même je
crois bien que je suis grosse. Je n'en ai encore aucun signe (et se faire de trop grandes idées ne
me sera pas profitable) mais il est quand même sûr que mon ventre est animé, et en moi je sais
qu'il est différent. C'est étrange comme les choses ont changées, elles ne sont absolument pas
pareilles que ce que j'ai ressenti l'autre fois, alors pour être sûre il me faudrait faire
venir le docteur, et je n'ai pas envie. Alors je m'ôte cette idée de la tête, et souvent je fais semblant
d'être normale, afin de ne rendre inquiet aucun membre de mon entourage, sauf bien sûr moi
même... Il est une vérité dans l'adage qui dit, que plus une femme se croit grosse moins elle l'est, et
qu'il ne faut surtout pas penser à son corps dans cette situation... Alors, mon ami, surtout
couvez votre épouse, gardez loin le front et contentez-vous de laisser grandir en son ventre ce que je
ne puis pas, d'ici, protéger moi-même. Rien ne prouve qu'elle se trompe, Clémence suit
les signes que son corps et son âme lui envoient. C'est une âme pieuse. Elle est totalement entourée
de la bienveillance divine pour n'avoir jamais failli à ses taches, et je ne vois aucune raison de
ne pas bénir votre union par une descendance, aussi rapide qu'elle soit. Il est bien des gens,
qui à son âge, enfantent deux fois l'an. Je coupe-ci, pour un autre sujet qui m'importe. J'ai
grande déception à ne pas vous savoir venant à Gondomar, j'imaginais bien vous voir passer une
semaine ou deux sur les terres de mon époux, entourés de sa famille, ses vassaux, son escorte
et mes nombreuses dames de compagnie, avec toute la bonne et haute société du Royaume de
Castille... Puisque vous ne devez pas descendre, je monterai et montrerai à Clémence la dentelle
si merveilleuse que l'on ne fait qu'ici, celle que l'on avait admiré toutes deux un jour, autour
du cou de sa Majesté de Tarstemara-Borja, et qui m'avait rendue à cet instant verte de
jalousie. Je prendrai aussi des soieries, des mets locaux, et j'irai jusqu'à elle à Nemours, moi,
même si elle ne veut pas venir, car je suis femme de parole et d'Amitié. Ne pas se
revoir, c'eût été trop difficile. Non, c'est donc décidé, je viendrai à Paris, à Nemours, voire
en Bourgogne (et donc je pourrai en profiter pour voir Della) et ce voyage sera
si bienheureux que j'en retournerai à Gondomar heureuse. Ravie. Sanctifiée. Ou simplement très
reconnaissante. Donnez moi une date pour que je vienne, que je prépare ce périple (qui est risqué
tout de même, car il faudra prendre la mer) ou alors plus simplement, promettez
de glisser dans votre prochaine lettre une quelconque occasion, à la fin ultime de
se revoir toutes les deux. Concernant votre requête, enfin, il se peut que je ne
sois pas capable de la rassurer entièrement. Quelques mots, seuls, ne peuvent pratiquement rien
face à une angoisse que partagent toutes les femmes. Mais si vous me croyez apte à lui faire
entendre raison, je vous promets de vous contenter. J'ai déjà en tête des phrases douces qui
sauront l'apaiser, la soulager de ses angoisses (car c'en est j'en suis sûre) sans qu'elle ne puisse
saisir que je ne cherche, somme toute, qu'à lui faire attendre le moment. Et à cette fin, causer
avec elle, tel que vous nous le suggérez, est indubitablement pertinent. Aussi, dès notre
future rencontre, je m'attellerai d’arrache-pied à cette tâche, à cette stupide perte
de ses angoisses pour qu'elle vous revienne plus douce et calme. Il ne restera ensuite plus qu' à
attendre que la bénédiction vous touche (même si peut être c'est déjà le cas) et ainsi, tous
ses peurs seront dépassées. En y réfléchissant plus, je me dis que le mieux pour venir, ce sera les
calendes prochaines. Peut être dans un mois, peut être dans deux.
Qu'importe la date à laquelle l'on prédit d'arriver, pourvu que je vienne, n'est ce pas ? J'arriverai
donc probablement au premier du mois de février, ou de mars, ou d'avril, c'est selon, sous
réserve que mon très cher époux ne change pas de programme tel qu'il le fait depuis huitaine.
C'est un fait qu'il est très occupé, et que je le suis aussi. Allons, c'est décidé, puisque j'attends
de savoir votre réponse, je reste sur la date du 1er février et je changerai plus tard, en fonction de vos
instructions.

Bien vôtre,

Blanca da Lua.




Blanche_ a écrit:
Aimbaud,

Je ne saurais dire dans quel état je suis présentement ; la seule chose qui me parait évidente, c'est que j'abandonne-là toutes mes obligations, pour vous répondre immédiatement. J'ai très peur de vous perdre si je repousse à demain ma réponse.
Vous voyez des mots, vous criez une douleur, et doutez que j'entende. Petit, et crétin, tous ces qualificatifs qui gisent sur le papier par ma faute, vous les voyez et ils vous attaquent. Mais le cri, Aimbaud, mon cri, l'entendez-vous ?
Il y en avait d'autres, des mots. Des petits et idiots, parce qu'ils étaient avoués, et qu'ils l'étaient à contrecœur, mais ils étaient !

Je vous ai dit cent fois vous détester, même ! Vous haïr, et si vous n'avez vu que je souffrais d'une pareille façon, j'en suis désolée. Ouvrez-les yeux. Petit, crétin, aveugle. Vous êtes tout cela, mais, encore, comme dans ma dernière lettre -Oh ! comme il me coûte de l'écrire à nouveau !- Amour, le mien, et puisque les mots ont leur importance, souffrez de les lire encore.
Amour. Amour. Amour. Que n'est-il question d'une plate amitié avec ces deux syllabes ! J'aimerais mieux, au contraire, bien plus ne sentir pour vous qu'une innocente inquiétude, un peu maternelle, ou encore une indifférence amicale, mais il n'en est rien, j'ai mal, constamment, et vous, idiot ! Idiot, vous ne voyez rien, faut-il que je vous l'écrive en plus gros ?
Je vous déteste. *rature*

Je vous en prie, dites-moi quoi faire. Un mot de vous, et j'obéis.

Gwenn


[M-8]

-Voilà trop de lecture pour moi. Je vous laisse cette tâche. Vous serez ravie d’apprendre que VOTRE A-MIE a été ravie de vous voir en Castille !


La brune s’interrompit.

-N’entendez-vous rien ? Ah non… J’ai dû rêver. Mais nous ne devrions point trop nous attarder. D'ailleurs, je commence avoir faim !

Et tandis qu’elle disait ses mots, elle continua sa fouille. Abandonnant les tiroirs, elle se concentra de nouveau sur les lettres qui jonchaient le plateau, espérant y trouver quelques nouvelles fraîches et appétissantes.

-Alors, de quoi ces lettres parlent-elles ? Y a-t-ils quelques croustillantes informations ?
_________________
Clemence.de.lepine
[M-9]

Je ne viendrai pas, non. Ni vous d'ailleurs. Ni personne. Isaure, n'évoquons plus le sujet, vous ne l'épouserez pas, dussé-je vous faire enfermer dix ans au couvent pour vous en faire passer l'envie.

Elle n'appréciait pas spécialement que sa cousine aborde à nouveau le sujet quand pour elle, il avait définitivement été clos. Et elle n'appréciait pas non plus que la révélation de l'existence du bâtard d'Aimbaud n'ait pas eu l'effet escompté. Il s'agissait pourtant du scoop de la décennie, voire du siècle, si l'on excluait cette histoire de Jeanne la Pucelle et de ces voix qui l'avaient amenée à prendre les armes pour libérer la France de ces satanés anglois. Alors, on comprendra aisément ce léger froid qui s'installa entre les deux parentes.

La suite ne fut pas plus joyeuse. Ce petit jeu devenait dangereux. A vouloir savoir, on en arrivait à trop savoir, et il était des secrets qu'il valait mieux garder cachés. Trop tard, pourtant. Isaure avait trouvé LA cachette, et tiré de ce sanctuaire des trésors qui ne demandaient qu'à rester enfouis.

Elle tint la première lettre entre ses doigts et il ne lui fallut pas plus d'une nanoseconde pour reconnaître l'écriture de Blanche. Elle tressaillit. La missive n'était pas datée – d'un coup d’œil, elle les engloba toutes et constata qu'aucune ne l'était – mais celle qu'elle avait devant les yeux parlait de son arrêt en Castille. C'était il y a... il y a... trop peu de temps. Celle-ci contenait si peu de lignes, toutes la concernaient, et elle perçut l'ironie acide du message avec un pincement au cœur. Fronçant les sourcils, elle constata l'aspect presque brûlé du vélin et, mal lui en prit, elle le retourna, dévoilant l'autre face dont le contenu écrit à l'encre sympathique avait déjà été révélé.

Si son cœur s'était serré aux mots de Blanche à son sujet, cette fois-ci, il s'emballa, s'arrêta, et s'emballa à nouveau. Elle aurait voulu arracher ses prunelles à cette lecture qui l'assassinait à chaque nouveau mot d'amour et de promesse qu'elle déchiffrait. Mais comment... comment... elle était comme hypnotisée par ces phrases qui ne pouvaient exister, qui ne devraient exister, ces expressions qu'elle n'avait jamais utilisées elle-même et qui lui étaient tellement étrangères. Elle vibrait de la passion de Blanche, et c'était mal de continuer, c'était le courrier d'Aimbaud, c'était l'amour de Blanche, c'était leur secret à tous les deux, et s'ils étaient pécheurs, elle n'en était pas moins pécheresse à pénétrer ainsi leur brasier.

Que pouvait-elle y faire, elle l'avait permis à Blanche. Cela lui avait semblé la seule chose à faire pour pouvoir garder intacte leur amitié. Il s'en était résulté un échec cuisant. Mais elle ne pouvait se sentir trahie, le sentiment de trahison était déjà pris, Blanche se l'était accaparé et Clémence ne se voyait pas le lui voler. Elle se sentait démunie. Terriblement seule, aussi, c'était Blanche et Aimbaud, encore, cela serait toujours Blanche et Aimbaud. Et si elle tentait de reconstruire Blanche et Clémence, et même si elle s'efforçait de construire Clémence et Aimbaud, il n'y aurait toujours que Blanche et Aimbaud. Il n'y avait aucun moyen de lutter.

Elle pensa se mettre en colère, mais c'était au-dessus de sa volonté. Elle parcourut, d'un œil las, les autres lettres. L'une lui parut bien étrange, et le contenu l'était tout autant, tout à fait hors de propos et parfaitement fictif. Elle ne s'embarrassa pas à vouloir percer le mystère, il était clair qu'on y avait dissimulé un message, tout comme celui qu'elle avait lu avait été dissimulé dans le jus d'un citron, peut-être.


[M-5]

Et alors, elle les tendit à Isaure, fébrile, tremblante, le regard fuyant.

Rien d'intéressant, vous pouvez les remettre à leur place. Lui répondit-elle d'un ton las.

Puis, hochant du chef, elle désigna la porte.

Allons-y, je crois qu'il n'y a plus rien à trouver ici.

Oui, fuyons aussi vite que nous sommes entrées, il y a bien trop de démons cachés, ici.

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Isaure.beaumont
(M-7]

Isaure tourna le dos à sa cousine pour lui signifier clairement qu’elle boudait. Elle avant tant espéré la voir se réjouir de cette nouvelle et au lieu de ça, elle se voyait menacer d’être placée en couvent !
Les yeux rivés sur le bureau, elle y mettait un semblant d’ordre, il fallait qu’Aimbaud ne se doute de rien. Leur passage ne devait pas se savoir.


[M-5]

Tout en rangeant, Isaure avait changé de position. Et Clémence, l’instant d’avant dans son dos, se trouvait désormais à sa gauche. Quand elle lui tendit les lettres, la brune fit d’abord semblant de ne pas les voir. Qu’elle les range elle-même ! Pourtant, au bout de quelques secondes, elle céda et prit les lettres. Ouvrant le tiroir où elle les avait trouvées, elle les replaça à l’endroit exact. Seuls les papiers du dessus furent remis n’importe comment, avant que le tiroir ne soit refermé dans un claquement sec.

Son regard s’attarda alors sur une preuve irréfutable de leur crime : un de ses cheveux, brun et ondulé, s’était mêlé aux missives éparpillées sur le bureau. Voulant le retirer, elle attrapa sans le désirer un parchemin au passage. Les yeux se heurtèrent alors à son nom. Cette lettre parlait d’elle et de… ses hanches larges ! Le nez se fronça immédiatement et la curiosité la piqua vivement. Cependant, des éclats de voix semblaient se rapprocher et il fallait mieux qu’elles quittent rapidement les lieux.


[M-3]

La missive toujours en main, légèrement froissée par la crispation inconsciente de ses bras, Isaure referma hâtivement tous les tiroirs et remis les derniers éléments à leur place – ou tout du moins à la place qu’elle pensait être la leur. Enfin, elle pressa sa cousine de sortir en la poussant légèrement vers la porte. Si Aimbaud les découvrait là…

[M-2]

Naturellement, la jeune fille referma la porte derrière elle. Elles avaient eu raison de sortir : des pas résonnaient dans les escaliers et les voix se distinguaient à présent nettement. Aimbaud et son fidèle Aymon seraient là sous peu. Les jeunes femmes –filles ? – s’éloignèrent du bureau. Il leur suffirait de lui faire croire qu’elles arrivaient seulement dans le couloir.

[M-1]

C’est alors qu’Isaure s’aperçut qu’elle tenait encore dans sa main la missive. Avait-elle encore le temps d’aller la reposer ? En faisant vite, oui, sûrement. Mais sa curiosité prit le dessus et les yeux parcoururent la lettre tâchée de vin et de graisse. Tâches qui occultaient les parties les plus importantes de la lettre....

Erwelyn a écrit:
Mon bon Aimbaud enrubanné de perles de pluie venues d’un pays où il ne pleut pas

Qu’il fait bon de voir que tu envoies prompte réponse et qu’en plus tu amènes une solution à au moins un de mes problèmes. Vous la jeunesse, êtes si plein de fougue, tout vous paraît si facile à surmonter !
Mais tu as raison, *Tâche de graisse sur :Ygerne* brillera à jamais pour toujours dedans nos cœurs. Elle sera le soleil qui réchauffe nos âmes, la rosée du matin qui rafraichit les pieds qui ont passé une nuit dans des bottes, le lait chaud au miel de lavande, la liqueur de poire devant la cheminée.

Pour cette fameuse Isaure, tu as l’air de venter moult de ses qualités. Cependant, a-t-elle les hanches larges ? Il paraît que c’est important pour faire des enfants. Mais bon, la cousine d’une marquise, ça ne se refuse pas. Et puis même si elle n’est que dame, elle se lancera bien un jour dans la politique et deviendra comtesse ou alors héritera d’un oncle éloigné du *encre effacée, sûrement par un doigt :quinzième* degré du côté de son frère adoptif. Il y a toujours des solutions pour ça.

En tous les cas, je dis marché conclu. Tu m’enlèves une fière chandelle du pied, je saurais te remercier comme il se doit. Les marier sans délai nous ferons. Mon bougre de vassal a déjà assez attendu pour prendre épouse. Il s'agit de *Tâche de vin dans laquelle l’encre s’est diluée :Judas Gabriel Von Frayner*. Un mâle, un vrai, qui n'a peur de rien. Bon, il a les cheveux longs, mais ça se coupe, ça n'est pas un problème. Un très bon parti en tous cas, il saura s'occuper d'elle comme une petite princesse, je le gage !

Comment organisons-nous tout ceci cher ami ?

Bisous câlins
Lynette



PS : Et Clémence, a-t-elle les hanches larges ?


[M-0,5]

La lecture achevée, Isaure, le visage déformée par la colère, se tourna vivement vers Clémence et ses doigts crispés sur le vélin l’agitèrent frénétiquement devant les yeux de sa cousine.

- Ah ! Ah ! Je le savais ! –commença-t-elle à hurler avant de se souvenir qu’Aimbaud approchait. Dans un murmure accusateur elle reprit : En fait , non ! Je ne le savais pas mais… mais j’aurais dû m’en douter ! Je comprends mieux à présent ! Oh oui ! Je comprends biiiien mieux pourquoi vous avez refusé de m’entendre parler de Cassian ! Traîtresse ! Vous… vous… Ah je vous déteste !
Clémence voulut s’emparer de la lettre, mais Isaure retira sa main avant qu’elle ne puis s’en saisir. S’ensuivit une lutte. Blonde vs brune. Brune vs blonde. Et le vainqueur est … Clémence !!



[HRP] Post modifié pour faciliter le travail de JD Clémence, je suis trop bonne [/HRP]
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