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[RP] Écris-moi un canard.

Finn
[Canard à Oie blanche.]


Relecture fugitive d’une lettre à l’encre fanée, souvenir d’une comptine troienne qui fit éclore un maigre sourire nostalgique sur la trogne pâlotte de l’Irlandais.
Les Flandres, un petit bout d’Érin en terres françoises.
Ses pensées se tournaient vers ce refuge des amis de la poésie éthylique et déjantée, alors qu’elles se couchaient sur le vélin qui s’y destinait.




Katinsky,

Comment vont tes bottes ?
Se sont-elles colorées de cette teinte verte eau, à moins que ce ne soit eau verte, que tu chérissais tant ?

Tu apprendras que mes chausses et ma bure, quant à elles, ont été remisées au profit d’une tenue plus seyante pour la pratique assidue de la guerre.
Tu apprendras également que j’ai été chatouillé par la pointe d’une lame. Ce qui ne m’était pas arrivé depuis 45. C’est, je crois, à cet instant que j’ai regretté que tu n’aies pu être là pour éponger la dette que tu t’es crée en me chargeant de panser le pouce que tu t’étais éraflé en me taillant ce ravissant petit palmipède en bois devant la gentilhommière Pique. Peut-être même que je t’aurais laissée le dessiner ton foutu bonhomme !

A propos de dette, j’ai souvenir que je te devais une histoire et pas des moindres. J’en aurais bien une en stock, mais je crains qu’elle ne soit pas adaptée à l’impudeur du récit à voix haute, Peut-être pourrais-je te la narrer du bout de la plume ? Je tâcherai de la rendre plus féérique que la dernière concernant cette vieille catin remplie de semence masculine. Juré craché.

Qu’en dis-tu ?
Deal ?

Gaéliquement,

Finn d’Pommières dit « Hélène »
Seigneur de Cazayous

PS: Méfie-toi de mon volatile, il n'aime QUE la Mirabelle.

_________________
Katina_choovansky.
[Correspondance ornithologique, suite ]


Il y a des fois dans la vie, où l’on marque des victoires. Des victoires qui ont l’air anodines comme ça, sans conséquences, sans incidence…. Mais mesdames, combien d’entre vous peuvent se targuer de faire parler le Pique Seigneur de Cazayous de bottes pour commencer une lettre ?!

On ne peut plus satisfaite de cette nouvelle victoire sur le monde, la flamande prit parchemin et plume, fila une écuelle de liqueur au volatile et répondit au canard irlandais.

Quelques heures plus tard, Marc Antoine, le fier et stupide volatile flamand avait donc pris la route, partant là où seuls les pigeons savent partir.
Mais étant flamand, qui plus est brugeois, Marc Antoine ne faisait rien à moitié. Aussi, après un détour de huit cents deux kilomètres, il vint à se poser sur une branche non loin de Finn, le message à la pate, quand soudain, foudroyé par une crise d’épilepsie dont il avait parfois quelques brutaux accès, il tomba de l’arbre et roula jusqu’aux pieds de son destinataire.








« Hélène,

On ne dira jamais assez à quel point la vie d’une amatrice de bottes peut être difficile, car oui, bien sur, la couleur compte (et c’est bien verte eau, je vous félicite de votre mémoire, vivement que vous vous rappeliez que vous me devez un repas en taverne), mais la forme aussi, le talon, la façon d’épouser la cheville, de lacer le mollet, ou de tout simplement piler une face malveillante de béarnais sous son talon… Une botte, c’est un tout… Et l’été qui point fourbement son nez m’a pervertie jusqu’à me faire acheter une petite paire de nus pieds bleus absolument ravissante alors que je venais pour la paire de bottes.
Vous vous doutez bien que ce n‘est que parti remise. Il faudra bien que j’assortisse mon châle de toutes façons…


J’apprends bien sûr avec tristesse que vous vous êtes égratigné. Je regrette moi aussi de ne pas avoir pu être à vos cotés à ce moment là. Croyez bien que ce n’est pas un seul bonhomme dont j’aurais couvert le bandage mais une vraie fresque épique avec trompettes et angelots grassouillets dans un soleil couchant… Ah, quel regret…
Bien sur, vous pouvez toujours faire un petit effort pour vous faire embrocher aux portes de Bruges histoire que j’aie une chance de laisser libre court à mes talents artistiques. Promis, z’aurez aussi droit tous les soirs à un air de cornemuse avant d’aller dormir.
Et une dernière chose : je m’étais pas " éraflée" le pouce. Je me l’étais à moitié tranché. Je me souviens nettement de mon héroïque stoïcisme et de cette joie neuve et saine, quand enfin, on a bien voulu me bander la plaie et éponger les 12 litres de sang que j’avais perdu.

Enfin bref, oui, puisque nous parlons dettes, vous en avez. Un repas trois étoiles, un bonhomme à dessiner sur un pansement et une histoire !
Je vous assure à ce propos mon enthousiasme le plus délirant en sachant que cette fois il n’y aura ni pute, ni cadavre, ni gars bourré dedans… ou alors, juste pas dans le même contexte, ce qui serait déjà super.

Nous avons donc un deal.
J’attends votre histoire pour daigner souffler ma chandelle.



Flamandement,

Katina Choovansky




_________________

Maitre Troubadour à la Confrérie
Finn
[Retour de palme.]


Attablé dans un petit rade tourangeau, l’Irlandais tapota du doigt contre les barreaux de la cage du pigeon groggy. Puisant son inspiration dans le whiskey, il entreprit alors de donner suite à la réponse de la Flamande et enfin renvoyer son malheureux volatile d’où il venait.



Katinsky,


Il se ravisa et décida d’employer le titre approprié à la juste reconnaissance des talents artistiques de la troubadour.



Maîtresse,

Je prends bien note de l’invitation à étaler mes tripes aux portes de Bruges. Et avant de me traîner jusqu’au seuil de ta bicoque ou de décliner, je vais attendre de savoir à quelle terre de France mes employeurs destinent cet honneur. Mais sois assurée que l’attention me touche, surtout en ce qui concerne le récital de cornemuse. J’espère seulement que tu as appris un morceau en lien avec mes origines insulaires.

Pour ce qui est de solder ma dette, voici :

« Il était une fois un canard, un canard à col vert cancanant le celtique. Celui-ci appréciait la vie dans sa mare, entouré de ses frères et sœurs palmipèdes. Fidèles les uns envers les autres, ils se confiaient mutuellement leurs vies. Au sommet de cette pyramide fraternelle trônait le Roy des canards, un animal craint et respecté par ses congénères. Un beau jour, ce dernier leurs parla d’une poule qui voulait usurper son autorité. Il discourut avec ardeur et conviction de telle sorte qu’il parvînt à persuader le vieux colvert du bien-fondé d’une action à l’encontre de cette voleuse de basse-cour corrompue.

Le dévoué volatile décida de prendre son envol. L’initiative le mena jusqu’aux abords du bastion que s’était octroyé l’usurpatrice. Mais il lui fallait se rendre à l’évidence, celle-ci était bien entourée. Il devait donc recruter quelques compagnons de bonne fortune afin de mener à bien ses pieux desseins. Pieux car ce qui soutenait sa démarche s’accordait avec l’amour qu’il portait à son Dieu et à son souverain. Un amour inconditionnel qui fit germer l’idée que celle qui affirmait détenir son pouvoir du même Dieu n’était autre que suppôt de l’Innommable.
En outre, la Reyne au plumage fleurdelisé venait de se prononcer en totale opposition avec les actes, en apparences malhonnêtes, de sa meute, les condamnant sévèrement.

Charriant le fardeau qu’il s’était imposé de son propre chef, le colvert écuma les comptoirs des pires cloaques de la basse-cour royale en quête de soutien. Discrètement mais sûrement, il fit la rencontre de deux nouveaux amis : une araignée mâle qui lui recommanda celle qui semblait partager sa toile. A l’issue d’une partie de dés pervertie par une habile tricherie pour le premier et d’une confession en saint cloître pour la seconde, le colvert réussit à les rallier à sa cause. En effet, ces deux-la partageaient son aversion pour la vilaine poule qui s’était érigée en dictatrice de toutes les mares, menaçant ainsi son espèce d’une extinction probable.

Tous trois échafaudèrent un plan d’attaque au prix de nombreuses heures de palabre. Rompus à ce genre d’exercice, il n’eurent pas grand mal à dénicher l’itinéraire secret du cortège royal censé traverser une certaine forêt de Fontainebleau. Tapis dans la robe végétale d’une Nature verdoyante qui leurs était favorable, ils patientèrent jusqu’à l’arrivée de la volaille royale. Un tronc d’arbre placé par leurs soins entravait le passage le long du sentier. Ils se servirent de cette maigre ruse et de l’effet de surprise pour prendre d’assaut les sbires de Béa la poule. Roland l’araignée musela le cocher d’un carreau d’arbalète entre les deux yeux tandis que Finn le colvert abattit sa javeline sur celle qui sembla se réclamer capitaine de la garde royale. Le combat s’engagea ainsi dans la stupeur du convoi piégé. La troisième, Corleone, put se frayer un chemin jusqu’à la prison de bois de leur cible et parvînt à l’atteindre en plein cœur. Hélas, de ce geste funeste, les deux périrent, agresseur et victime. Quoiqu’il sembla au palmipède que quelques filets d’air gonflait encore la fine gorge blanche de l’usurpatrice.

Ainsi donc, après avoir souffert d’un coup condamnant à la surdité le flanc gauche de son crâne de piaf, il grimpa sur le toit du cercueil, en ôta le couvercle et pendit la méchante Reyne grâce au concours de l’un des rideaux de soie ornant l'instant d'avant sa fenêtre. Le coup de grâce venait d’être porté et la cavalerie pointait ses naseaux à l’horizon. Son forfait accompli, il prit la fuite en abandonnant ses comparses à leur sort. Ces derniers, qui survécurent finalement à leurs blessures, furent âprement questionnés par les équidés du Guet de Paris. De leurs tortures ils succombèrent, à moins que ce ne fut d’une exécution en règle. L’histoire ne le révèle pas. Ce que l’on sait c’est que le colvert alla couler de beaux jours dans une mare du Quercy en compagnie de la paire de gants blancs brodés d’un « B » d’or. Le trophée prélevé sur les lieux du crime qui lui rappela à chaque instant ce jour fatidique, et la confusion qui en découlait.

Le canard vit toujours, rongé par une culpabilité nouvelle qui s’associe parfois au souvenir de cette aube sanglante. En revanche, nul ne sait s’il vit heureux. »

Bon, ça ne vaut pas ton conte de fées, mais j’espère que nous sommes quittes. Du moins, pour l’instant.

Bonne nuit.


Intimement,
Hélène, Canard de Troie.

PS : Ton pigeon a failli me claquer entre les doigts, j’ai été contraint de lui faire suivre un régime à base de Whiskey. C’est un véritable soiffard !
Tu me dois une demi-bouteille.

_________________
Katina_choovansky.
[ Prête-moi ta plume pour écrire un mot]


Une moue à la fin de sa lecture.
L’histoire était bonne, mais gâtée par cette arnaque en forme de post-scriptum…
Quelques instants où le temps s’effilocha, laissant la brune brugeoise, le nez en l’air, pensive. Sous le crane flamand, des étincelles de souvenirs, d’associations d’idées, de propos alors épais et insignifiants, sur les bords de la mare…
C’était donc ça.
C’était donc lui.

Un coup d’œil sur Marc Antoine, qui empestait le Whiskey, puis sur le rayon d’soleil perçant timidement dans un ciel de grisaille, avant qu’elle ne se décide à déménager son nécessaire à écriture prés de la fenêtre (Et ouais, un rayon de soleil dans les Flandres, ça vaut plus cher que la tête d’une reine au bout d’un Pique.).







A l’attention d’Hélène, Canard de Troie (mais que ça vous va bien !),


Finn,

J’aime beaucoup cette façon que vous avez de m’appeler Maitresse. Ca a un coté chic qui fait son petit effet. Il nous faudra l’essayer en public, histoire de voir si ça fonctionne aussi bien que ça ne sonne.
Dois-je en conclure que vous acceptez de me passer mes armes de Troubadour ? Que vous ne me confondrez plus avec une vendeuse en porte à porte ? Que vous passerez enfin me voir à la Confrérie ? D’autant que j’attends toujours après Gaétan. C’est pas Dieu possible de mettre aussi longtemps à apprendre à faire le Poirier, même pour un manchot ! Et rappelez vous que je vous l’ai demandé propre, hein ? Et pas que des joues. Propre. Avec une majuscule… oh pis merde : PROPRE en lettres capitales, pour qu’on se comprenne bien. (vous n’avez plus d’excuse)


Et puisque je vous parle de la Confrérie, laissez-moi vous remercier à ma façon, pour votre histoire, qui m’a, je dois vous le dire, beaucoup plu. Nous avons au château, un exercice qui consiste à transformer la forme d’un texte, en en gardant le fond.
J’espère que le résultat vous plaira.


J’ai entendu siffler la plume dans les airs.
J’ai entendu les cris des bêtes s’élever vers le ciel.
J’ai entendu la peur, le doute, le feu et la colère,
Crevant l’onde paisible au cœur de la forêt.

J’ai vu trois perles rouges tomber et se briser.
J’ai vu la main crispée sur l’étoffe alourdie.
J’ai vu la tache bleue sur la poitrine meurtrie,
Et l’or se ternir sous l’ombre de mes ailes.

J’ai entendu les soupirs de ce cocon ouaté
Et vu la silhouette fauve s’y dresser.
J’ai vu le tissu sur la gorge nouée,
Et entendu la fièvre des mots doux cancanés

Les gants ont glissé de ses mains à ses poches.
En fera-t-il son nid avec quelques bouloches ?
Étonnant animal que celui qui s’en va
Fier, triomphal, et vaincu à la fois.

Je lisse une rémige, pousse une trille aigüe,
Et m’élance vers la cime d’un Tremble chevelu.




Faites moi le plaisir de bien vous porter, du moins jusqu’à ce que nous nous retrouvions. Pour l’heure, l’envie d’user mes bottes vient de me reprendre (et oui, que ne faut il pas faire pour pouvoir justifier ses achats prochains aux yeux de son comptable?). Je devrais quitter les Flandres d’ici quelques semaines. Dites moi donc où on vous enverra, il se peut que ce ne soit pas si éloigné de ma feuille de route.

Je vous confirme que nous sommes quittes concernant l’histoire. Il vous reste le repas, et le bonhomme pansement. Je saurais vous le rappeler quotidiennement, n’ayez pas de craintes.

Pour l’heure, prenez soin de vous.
J’attends de vos nouvelles,

Flamandement,

Katina Choovansky
Maitre troubadour.


PS : Je ne paierai cette demi bouteille que si vous m’offrez la moitié restante.



_________________

Maitre Troubadour à la Confrérie
Finn
[Ovation sans bruit pour un ramage sans fausse note.]


L'exercice troubadour trottait inlassablement dans sa tête, adoubant définitivement son auteur aux yeux de l'Irlandais. Si de coucher son récit sur le vélin avait réveillé de vieux démons, les vers qui s'en inspirèrent lui apportèrent l'apaisement de l'âme qu'il recherchait dans la confession de ses fautes. Un aveu dont il se délestait du poids pour la seconde fois.



Grande faucheuse des mots justes et beaux,

Oui, c'est un peu long, mais je suis prêt à le clamer en place publique, au même titre que le précédent (quoique le premier risque bien d'écorner ton image de pucelle vertueuse chez les esprits les moins chastes - tiens, comment va Luc?). Oui, il nous faudra l'essayer, mais parfaire ton élégance n'est pas l'unique objet de ma lettre.

Il me faut te dire que mon âme se repaît de ta moisson. Ton cadeau me touche et j'ai donc décidé de t'accorder cette demi-bouteille (mais toujours contre la tienne). Je tiens d'ailleurs à te féliciter pour ne pas avoir cédé à la perfidie de ton volatile qui n'a pas hésité à simuler un malaise afin de me ravir mon précieux Whiskey. Toi, tu l'auras gagné honnêtement et avec brio (même si je dois avouer que la performance scénique de ton pigeon n'était pas exempt d'un certain réalisme). Si telle est la récompense, il me tarde d'achever un autre souverain agonisant. Prions seulement pour que mon dernier tympan y survive et puisse ainsi t'entendre la déclamer.

En parlant de ça, les armées de notre bon Louis devraient difficilement me permettre d'escale à Bruges. Je les braverai, mais sans doute pas pour l'heure. Elles ont déjà semé leurs douloureuses meurtrissures sur ton jeune apprenti. Ma blessure m'a contraint à abandonner Gaetan avec nos hommes et, hélas, les soldats royaux le rossèrent en Alençon. Je n'ai pas de nouvelles de sa part mais il semblerait que sa vie ait été épargnée. Ceci explique certainement son absence à ton instruction: le misérable préfère pincer le cul des barbières en Orléanais.

Il s'interrompit et reprit le fil de sa rédaction, quelques instants plus tard, son cynisme ne pouvant voiler complètement l'angoisse qui faisait trembler sa plume.



Lorsque je l'aurais retrouvé, je me ferai un devoir te le ramener aussi souple et propre qu'un félin. Il te récitera l'ensemble de ton œuvre en faisant le cochon pendu sur le créneau le plus haut du château de la Confrérie. Foi de canard!

En ce qui me concerne, la routine s'installe. Une routine pénible qui m'oblige à dissimuler mes allées et venues en ville, et à dormir dans l'entrepôt à grain d'un moulin dont le charme bucolique n'a d'égal que son état avancé de délabrement. J'espère pouvoir m'échapper de ce lieu dans peu de temps.

Sur ce, je te laisse reprendre la tienne, qui, je le souhaite, est plus palpitante.


Que l'éloquence de Sainte Illinda habite toujours tes paroles.

Finn, admirateur fervent.


PS: Je joins à cette lettre un croquis réalisé au fusain par ton humble serviteur, je songe à le prendre comme modèle pour le bonhomme sur ton prochain bandage.
PPS: Qui est le Tremble chevelu?

Joignant le geste à la plume, Finn glissa avec la missive un vélin parcouru par les traits grossiers d'une créature hybride entre la femme et l'oie blanche arborant fièrement une impressionnante paire de bourses masculines aux côtés de ses attributs féminins impudiquement dévoilés.
_________________
Katina_choovansky.
Tant va la plume dans l’air qu’à la fin elle s’envole



Marc Antoine, le fier et stupide pigeon flamand filait droit.
Il avait des ordres, et stricts. Hors de question de se laisse saouler cette fois, la cheffe avait été claire : « Si je dois encore me faire arnaquer du whiskey, j’te plume la gueule », l’avait elle prévenu.
Et il l’avait prise au sérieux, car les flamandes ne déconnaient jamais avec l’alcool. Fermement attaché à sa patte, une enveloppe assez volumineuse dans laquelle on avait glissé une lettre et deux petits rectangles d’une vingtaine de centimètres chacun. Enveloppés d’un fin papier brillant sur lequel avait été dessiné le sceau d’un comté italien, on pouvait lire en grosses lettres capitales dorées le nom du fabriquant « Peppone Abatucci, Roma »
Etait ce lourd pour lui ?
Putain oui, mais Marc Antoine n’était pas n’importe quel pigeon. Il le ferait ! Il y arriverait, dut il y mettre toutes ses petites forces.
Aussi, quand il aperçut enfin la silhouette de son destinataire, Marc Antoine eut une vision fugitive d’un paradis rempli d’un maïs rond, doré et ferme, avant de piquer au sol, évanoui, pour s’écraser aux pieds de Finn.
Mission accomplie.







Hélène,

Vous me trouvez touchée de vous avoir à ce point diverti et satisfait, et vous assure de renouveler l’expérience si l’aventure se présentait, mais ne vous sentez pas forcé d’aller vous fritter avec tout ce qui aura des plumes. Mon imagination a suffisamment d’envergure pour embrasser bien des thématiques, et les odes se déclinent sous de divers aspects lorsque l’on est brugeoise. Souvenez vous que je peux m’extasier devant un caillou.
D’ailleurs, ne vous inquiétez pas de passer bientôt par Bruges, vous ne m’y trouveriez pas. Je devrais prendre la route début juillet avec Saian, Blanche, Bocom et sa fiancée. Je ne sais pas encore pas quel moyen nous irons mais nous visons les montagnes à l’est. On me propose d’y accéder en péniche. Vous savez ma passion pour les rafiots, et si j’ai déjà assouvi ma soif des mers et des océans, je n’ai pas encore eu l’occasion à m’essayer à la navigation fluviale… et j’avoue que l’idée me plait bien… il a quelque chose de siestif (*) à s’imaginer à raser les berges de campagne sur le pont ensoleillé d’un bateau…

Je ne vous renouvelle pas les recommandations d’usage quant à votre santé (et mon impossibilité à vous dessiner un bonhomme pansement si vous êtes trop loin), cependant, si vous en avez l’occasion, adressez à Gaétan mes vœux de prompts rétablissement.
Veillez à lui transmettre la pate d’amande qui est jointe à votre courrier quand vous prendrez de ces nouvelles ; n’allez pas croire que c’est un moyen détourné pour vous forcer à prendre des nouvelles parce que vous vous inquiétez et que vous cherchez un prétexte pour lui écrire, c’est juste qu’il est hors de question que j’envoie Marc Antoine en Alençon. Il y est interdit de séjour depuis qu’il a attaqué les chiens de la garde comtale en 1457. Et pour finir, ma fois, tant qu’il peut pincer des culs orléanais, c’est que ces doigts sont capables de tenir une plume.
Je ne désespère donc pas vos arrivées prochaines, vous lui assurerez que c’est de pied ferme, juchée sur des talons de dix centimètres que je vous attends.
Au passage, puisque vous me demandiez de ses nouvelles. Bocom vous adresse son plus sincère mépris. Il semble qu’il vous en veuille encore pour cette histoire d’attentat à la pudeur… quel être rancunier tout de même…


Un mot également, sur votre… œuvre.
M’en voulez vous si je vous avoue qu’elle m’a fait rire à gorge déployée et que définitivement, je l’adore ? Bon, évidemment, pour me le mettre sur le pouce, ça ne risque pas d’être facile tant ses divers attributs sont… volumineux…, mais je suis presque prête à me faire embrocher une cuisse pour y avoir droit.

Les nouvelles des Flandres ne sont pas très bonnes me concernant j’en ai bien peur.
On a ouvert un procès à mon attention en halle, et quand je dis « on », c’est surtout l’infâme et révulsif Nevgerel qui a harangué la foule, payé des faux témoins (comme Bocom, c’est vous dire) pour m’accorder malgré moi la nationalité tournaisienne sous le prétexte bancal que j’en ai l’attitude.
Putain de bouseux.
Ils ne voient même pas que c’est eux qui se sont habitués à ma sublimitude au point de la trouver nécessaire à leur village… M’est avis que c’est surtout une façon de me dire « revenez vite de votre voyage car sans vous, ça va être trop pourri dans le coin », mais vous les avez vus… ils ont du mal à verbaliser les choses
J’vous l’dis, moi, vivement le départ !

Que la grange qui vous abrite ait au moins un toit digne de ce nom. Je sais que les canards aiment l’eau, mais tout d’même, ce serait con de vous choper un mauvais rhume.
J'attends de vos nouvelles.


Flamandement,

Katina Choovansky,
Maitresse Troubadour


PS : Le Tremble chevelu, sans rentrer dans une digression assommante, c’est à la fois l’arbre vers lequel s’élève l’oiseau, et également, plus imagé, plus visuelle, l’idée d’un être supérieur. A vous, qui aimez tant les prêches, cela devrait vous plaire un peu plus qu’un simple peuplier aux branches chargées.


(*) Barbarisme assumé
_________________

Maitre Troubadour à la Confrérie
Finn


Manchot indigne,

Maître Katinsky t’adresse ses vœux de prompt rétablissement.
Hâte-toi de lui écrire un mot pour excuser ton absence à ses leçons et n’oublie pas de te rendre régulièrement à l’office dominical avec les cheveux propres.

Finn.

Ceci fait, il reprit le cours de sa correspondance flamande, juché sur un rocher, les doigts collants et les papilles frémissantes sous une bouchée de pâte d’amande.




Katinsky,
Equilibriste de la prose harmonieuse,

Je t’ai trouvé un caillou. Ou plutôt un galet. Bref, je ne connais pas le terme exact censé désigner cet objet dur et ovale. Je l’ai ramassé la nuit dernière au bord de la rivière alors que je procédais à mon entraînement régulier au ricochet. Sa teinte vert d’eau ne manquera pas de s’assortir avec ton châle. J’espère que ce présent saura fourbir ton inspiration en sus de te porter à l’extase, comme tu semblais le suggérer.

Depuis quelques jours, j’ai le loisir d’envisager de loin les cimes de ces « montagnes de l’Est » dont tu parlais. Je me trouve en ce moment même en Savoie. En Bresse savoyarde exactement.
Où en es-tu de ton périple ? Ai-je une chance de te trouver au sommet ? Mieux vaudrait que tu n’y sois pas encore, je vais devoir rebrousser chemin d’ici peu. Ici, je suis assailli par les moustiques et la route marchande sur laquelle je me suis permis de tenir péage n’est pas aussi lucrative que prévu.
D’ailleurs, tu apprendras que l’on requiert ma présence dans un tribunal, tout comme toi.
Jusqu’où ira ma solidarité !

Je me réjouis que tu apprécies mon art, si souvent incompris. N’oublie pas de me prévenir si jamais tu venais à avoir besoin de bander ta cuisse, je reproduirais le cas échéant cette fidèle représentation de la noble Brugeoise qui a su me sensibiliser aux mœurs flamandes. Et de bon cœur.

Enfin, Gaetan te remercie pour ton délicieux présent. Il sera sans doute trop timoré pour te l’avouer mais je sais qu’il raffole de ce genre de sucreries. N’hésite surtout pas à m’en communiquer d’autres que je lui ferai parvenir.

Je ne sais si je t’ai tout dit, mais il va me falloir mettre un terme à cette lettre car j’arrive en bas de page. Dans le pire des cas, je trouverai bien un nouveau support pour y combler les lacunes du précédent.

Politesses d’usage etc,
Hélène.

Au verso.



PS : Au fait, tu savais que j’étais devenu parrain ?

_________________
Katina_choovansky.




Saint Claude, Franche comté
22 aout 1460




Hélène,


D’abord : Han ! Un galet !

Vous chercheriez un accès direct à mon cœur que vous n’auriez pas fait mieux. Dieu merci, les flamands n’ont pas de cœur ; ça nous permet de nous sortir haut la main de ce genre de situations et de ne se sentir nullement sentimentaux et redevables vis-à-vis des autres (oui, oui, nous sommes bien faits, nous, les flamands). Ainsi donc vous l’aurez compris, même si vous avez eu cette délicatesse extrême de chercher à l’assortir à ma garde robe, vous ne récolterez pas mon éternelle gratitude mais un sobre et poli : « Putain, merci, j’en serais presque émue »


Ensuite, je note, illustrant votre courrier, des grosses traces grasses que je reconnaitrais entre mille pour avoir fait les mêmes sur mes manuels de versification à la Confrérie… Je vous accuse, mon très cher palmipède Troyen, d’avoir honteusement boulotté la part de pate d’amande réservée à votre craspougne et famélique manchot.
Déjà que c’est moche d’ôter la nourriture de la bouche d’un enfant, je trouve que vous poussez un peu loin en la chourant à un infirme. Pis alors, vous avez même pas pris la peine de vous sucer les doigts avant d’écrire et vous tentez honteusement de m’en soutirer d’autre...
Je prends ça pour un affront direct.
Vous paierez…
Tenez, je sais que ça vaut bien plus cher mais dans mon extrême magnanimité, vous paierez en m’acquittant de la dette de Marc Antoine. De cette façon, je ne vous dois plus rien, et vous me devez toujours une demi-bouteille…
(Je ne sais pas vous, mais moi j’ai toujours aimé les histoires qui finissaient bien)

Et pour conclure de cette longue introduction, je ne m’excuse nullement de ma réponse tardive, vous vous en doutez bien. Manquerait plus qu’on apprenne que je sois susceptible d’éprouver des remords pour qu’on m’empêche de rentrer à la maison, vous comprenez.


Puisque vous voyez les montagnes, rejoignez nous.
J’ai un cadeau pour vous moi aussi. En fait, avec ma délicieuse compagnie, ça ferait même deux. Double raison donc de nous rejoindre à St Claude.
Nous y faisons escale depuis quelques jours après un voyage assez mouvementé.
Ca a commencé avec Bocom qui s’amuse à traiter les artésiennes de femelles (je me demande ce qui lui prend parfois), qui en récolte pas loin de 18 points de suture et quelques cheveux blancs.
Ca a continué avec Bocom qui déchaine les passions torrides de jeunes nymphomanes pré-pubères rien que par sa présence et qui me force à abandonner ma bière pour couvrir sa fuite dans les rues champenoises… (Oui, je vous rassure, Bocom paiera en temps et en heure, et avec les intérêts. Comme quoi, vous vous en sortez bien, vous)
Ca a suivi son chemin en Lorraine avec la rencontre animalière surprenante d’un mulot déguisé en ours (« true story » comme on dit chez vous) et pour l’heure, une pause à St Claude Franche Comté où là encore, Bocom a réussi à tomber sur une vieille connaissance qui lui en veut à mort.
Nan, mais j’vous jure, vous devriez venir, c’est génial. Où qu’on aille, y a quelqu’un pour lui tomber sur le coin de la gueule d’une manière ou d’une autre.

Si avec ça je ne vous ai pas suffisamment alléché pour nous rejoindre, je vous donne un aperçu du programme qui est à suivre, dans le désordre : je vous mets votre race aux ricochets, on va voir une exécution publique, on caillasse quelques Läderhosen puis on leur pique un costume, on boit une bière dans toutes les troquets du coin juste pour le plaisir de dire « elle est meilleure dans les Flandres quand même », on pousse Bocom d’en haut de la montagne et on revient les bras chargés d’edelweiss pour le bouquet de mariée de Blanche. (Si à ce moment là je devais vous appeler Frantz, je vous permets de me recadrer d’une bonne beigne, c’est que je me serais un peu trop prise au jeu, et que parfois dans la vie, il faut savoir dire stop)

C’est décidé.
Je vous attends.
Et dépêchez vous, avant que je ne boive tout votre cadeau.

A très bientôt,
Katinsky.


PS : Parrain ?
Bordel non, j’ignorais que vous aimiez les enfants au point d’en parrainer un… qui donc ? D’où le sortez-vous ? Quel parent à l’humour corrosif a décidé de vous faire cette bonne blague ?



_________________

Maitre Troubadour à la Confrérie
Katina_choovansky.
Au 21 octobre, perdue pour la énième fois dans les rues de Sémur, la flamande avait cru se faire attaquer par un pigeon, ce qui expliquait le hurlement qu’elle avait courageusement poussé avant que son odorat délicat ne lui indique une forte dose de malt à proximité. Après quelques reniflements dans une moue méfiante, elle en conclut que c’était bien le volatile qui embaumait de la sorte, ce qui la motiva passablement à s’en saisir. A sa patte, un papier daté du jour même, sur lequel on avait tracé au verso quelques mots « Vous souvenez vous de moi ? »

Non seulement elle se souvenait de lui, mais en plus, elle se souvenait qu’il lui devait une demie bouteille de Whiskey. S’asseyant à la table de la première taverne qu’elle trouva sur son chemin, elle ouvrit le parchemin et les quelques mots que Finn lui adressait.




Maîtresse Choovansky,

Vous n'allez pas le croire, je me suis enfin mis en branle.
Êtes-vous toujours dans vos montagnes?
Je m'engage ce soir en Auvergne pour gagner la Bourgogne par Nevers.

Dites-moi où je pourrai vous trouver, en espérant que vous n'ayez pas déjà regagné vos Flandres.

Gaéliquement,
Finn d'Pommières


Réponse fut envoyée prestement. Le canard irlandais était trop rare pour qu’on ne le chasse pas.





Hélène,

Le jour où j’oublierai un canard aux accents grecs d’origine gaélique, c’est qu’il faudra m’abattre.
Je me suis échappée des montagnes pour un séjour à Sémur. BON SANG QUE CELA TOMBE BIEN, me direz vous, car non seulement nous ne sommes pas loin, mais en plus je viens vous chercher à Nevers (et oui puisque je vous dis que ça tombe bien).
Nous partirons mardi soir et serons donc à Nevers dés jeudi. Si cela vous va, nous reprendrons la route de suite, j’ai des essayages de robes à faire à Sémur, je ne peux pas m’en absenter trop longtemps

Flamandement,
Katina Choovansky.


PS : Bordel, qui vous a appris à dire « vous » ?



Le lendemain, le pigeon aromatisé se présenta de nouveau, et si elle se demanda brièvement comment un oiseau pouvait avoir à ce point mauvaise haleine, elle ne s’attarda pas sur le sujet et enchaina avec la lecture parcheminée.




Choovansky,

Quelle charmante attention!
Plus sérieusement non, ça ne me va pas. Puisque vous faites un pas vers moi, je me dois de faire de même par souci d'équité et comme je sais que vous avez à coeur l'équilibre du monde. J'aurais pu être mardi à Nevers mais au lieu de ça, je vais presser ma monture pour arriver Mercredi à Cosne ou Autun. Personnellement, j'ai une préférence pour Cosne mais je vous laisse le choix du lieu de rendez-vous. Et vous n'aurez ainsi qu'à vous enfuir une journée de vos essayages auxquels je compte bien assister.

Qu'en dites-vous?

Hélène.

PS: J'ai pris des cours du soir.



Action, réaction, une réponse à l’expéditeur…





Hélène,

De « Ah », à « Oh », en passant par « Ouah », voilà ce que m’inspire votre courrier.
J’aurais du me douter qu’en esthète des sculptures en bois, vous comprendriez l’importance des jupons de soie et de la dentelle à l’épaule… ou l’inverse, je ne suis pas regardante tant qu’il y a de la soie et de la dentelle.
Nous nous retrouverons à Cosne mercredi sans faute, voilà ce que j’en dis.
Je porterai une cornemuse en bandoulière.

Flamandement,

Katina Choovansky.

PS : une putain de bonne adresse faut croire




Trois courriers quittèrent encore la chambre d’hôtel dont celui-ci, foutrement énigmatique.





Changement de programme ! Nous avons affaire à un canard qui s’y connait équilibre de l’univers, en mode et qui a le bon gout de ne pas vouloir me tenir trop longtemps éloigné de mes futurs jupons.
Le rendez vous avec Finn se fera finalement à Cosne.
Départ mardi soir pour y être dés mercredi matin et réceptionner le Gaélique

Saian et Mutine me suivront jusqu’au bout du monde (enfin, Saian suivra mes fesses et Mutine suivra Saian), qu’en est il de vous ?
Toujours de la balade
?

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Maitre Troubadour à la Confrérie
Katina_choovansky.
La soirée de la veille encore à l’esprit, la flamande ne fut presque pas étonnée de voir surgir un pigeon sentant le whiskey devant elle tandis qu’elle se dirigeait d’un pas pressé vers le poste de police pour dénoncer Bocom qui avait donné un coup de pied dans l’une de ses malles.




Choovansky,


Tout d'abord, je vous souhaite la bienvenue à Compiègne. "On" m'a dit vous avoir vue descendre une chope pleine comme un mercenaire ivre, j'en suppose donc que votre foie a survécu à cette journée de voyage. Comment va cette soie ?

De mon côté, la désolation s'est installée dans mon coeur...
Les Ménéhildiens ont préféré élire un des leurs plutôt que le sang neuf que nous leurs offrions, les consanguins ! Quant au score d'Ella, il est indécent. Pire, il dépasse le mien qui est resté à l'état de nul. Nous n'allons pas rester une journée de plus dans ce trou à rats sans classe.

Sinon, quelle est cette eau de jouvence dont vous faisiez des mystères hier ? Hein ? Hein ? Hein ?... (Vous avez de la chance que je sois tout aussi "économe" avec l'encre qu'avec le reste)


F.


Déplié, lu, la brune changea de tactique et se dirigea plutôt vers une taverne pour rédiger une réponse digne de ce nom au canard irlandais





Hélène,

Je m’extasie encore de votre incroyable sprint d’hier. On m’aurait dit un jour que je vous verrai sauter par-dessus un muret pour atterrir en roulade et vous accrocher à un fil à linge pour enjamber un potager dans la foulée, que je ne l’aurais pas cru. Comme quoi, le scepticisme, c’est moche. Sur le coup, je ne vous ai pas félicité, mais, vous étiez là,vous savez qu" il m’eut été difficile de vous applaudir tout en vous jetant des parpaings. Je ne désespère pas de remédier à ce malheureux problème… (M’enfin n’y voyez pas non plus un appel à la récidive…)
Ma soie va très bien, elle porte l’empreinte de votre grosse paluche dégueu dessus, ce qui, j’imagine, la rend collector (j’essaye de rester positive même si j’ai encore pleuré ce matin)

Je ne supporte pas l’idée que votre cœur soit desolationné, aussi vais-je vous faire une fleur. J’avais promis une lettre d’insulte en rimes à votre épouvantable nouvelle conquête que je deteste-deteste-deteste. Je vous la livre en premier. Vous pourrez glousser à volonté en la lisant devant elle sans lui donner jusqu’à ce qu’elle s’arrache les plumes (j’adore cette idée)


Lorsqu’on croise son regard on hésite d’abord
A y poser un sac, un coussin, une étole,
M’enfin merde quelque chose qui permette qu’on ignore
L’ignominie félonne qui subjugue même l’alcool…
Car oui, j’aurais voulu être ivre plutôt que me fader
Cette triste présence trouvée à vos cotés
Sous les traits bien ingrats de la dite Ellana
Qui est aussi jolie qu’un chaton tout moisi.

J’aurais presque souhaité cueillir le Walhalla
Plutôt que continuer à masquer cet ennui
Qui m’a assailli l’âme à chaque mot qu’elle dit,
Et m’estime chanceuse d’avoir quitté la ville,
Son centre, ses tavernes et ses brunes débiles
Maintenant que je sais qui est son maire pourri.

Ellana a le sourire noir et les cheveux tout gras,
Les mains trop grandes et les pieds trop plats,
Elle déambule, au bleu du ciel et de la mer,
Et ne vit dans le monde que pour le rendre amer.
Je n’ose imaginer quelle bande de consanguins
Vit en terres champenoises pour l’avoir élue maire,
Et préféré à vous malgré ses air protozoaires
Mais moi, si j’étais vous, je remercierai le destin
Qu’ils n’aient pas voulu d’moi pour leurs sombres desseins
Et l’ait choisit elle pour son coté bovin.


Et je n’ai jamais parlé d’eau de jouvence (je vous reconnais bien là, soiffard !). De toutes façons, si je vous l’ai pas dit hier, c’est pas pour vous le dire maintenant (et ouais enfin, soyons lucides). Je vous le dirai peut-être quand vous viendrez dans les Flandres. (et toc)

N’oubliez pas notre contrat, je vous interdis de faire des conneries sans mon approbation.
En attendant, je vous embrasse,

K.

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Maitre Troubadour à la Confrérie
Finn


    Choovansky,


    Ah si vous saviez comme je suis heureux. La flèche de la félicité a enfoncé son fer en plein dans mon cœur pour y creuser un sillon d'extase en ce jour du seize avril. Comme j'aimerais vous avoir à mes côtés afin de partager l'allégresse qui est mienne alors que l'humble auteur de ces lignes est parvenu à rallier Dijon sans perdre une seule pièce de monnaie. Et j'ai passé la journée à vérifier, le compte est bon. Je parie que du haut de votre misère financière, vous saluez l'exploit et cela me réchauffe le foie. Le Bourgogne y a sa part, mais vous avez la vôtre, soyez-en assurée.

    Sans transition, passons aux sujets moindres.

    Vous l'aurez compris, depuis notre dernière et trop brève entrevue, j'ai pris la direction du Sud. D'ailleurs, des amies à vous m'ont rendu une agréable visite à SM. De sombres idiotes se prénommant Blanches qui, en sus d'usurper l'intitulé de votre âme-sœur, se permettent de reproduire la même infamie avec celui dont vous m'avez doté le jour béni qui a vu naître cette grande et profonde amitié qui nous lie par-delà les lieux et les tas de débiles qui les occupent. Du moins, l'une s'appelait aussi Hélène. Mais c'est déjà trop, vous en conviendrez.
    Enfin, j'ai revu ma chère et tendre épouse, cette sangsue agglutinée à ma bourse. Pour votre gouverne et celle de l'autre dégénéré Normand, elle a très bien accueilli mon arrivée surprise. Certes, l'effrontée m'a avoué s'être équipée d'une arbalète dans la crainte que je vienne lui retirer son fils du tétin, un soir de désœuvrement, où j'aurais trouvé un quelconque intérêt à récupérer la progéniture que j'ai sciemment abandonnée. Vous êtes vous-même une femme, je n'ai donc pas besoin de m'étendre sur la logique implacable du beau sexe.
    Quoi qu'il en soit, et ce n'est pas pour faire honneur à la subtilité torve de votre éloquence, je suis au regret de vous annoncer que j'ai toujours pas bité pour quelle obscure raison j'étais censé prévenir cette visite à ma petite famille. En plus, je vous en veux. Vraiment, vous auriez pu me dire que mon fils était si beau garçon.

    Sinon, vos vers sont toujours source d'émotion. Que de poésie dans une si petite cage thoracique. J'ai d'ailleurs une réponse à vous transmettre de l'intéressée. Car vous l'imaginez bien, j'ai suivi vos instructions à la lettre. Et celle-ci réside en un concis : « Je l'emmerde. »
    Ce n'est pas du Choovansky mais avouez que c'est éblouissant de clarté.

    Pour conclure, si j'ai bien compris, la réponse à votre énigme se trouve en Flandre ? Peut-être ? Et toc ?? Vous manquez pas d'encre, vous. Je réclame une charade. Au pire, un indice.


    En attendant, vous avez droit à mon plus désagréable sourire.
    Hélène de Sparte.


PS : En compensation, voici de quoi recouvrir la tâche de bière qui a été causée par votre trop grande confiance en ma propre maturité.
*Un morceau de soie blanche sur lequel on peut lire brodé : « Hélène a mis sa main ici. »*

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Katina_choovansky.


Helene, Très cher canard irlandais,

Bordel, c’est beau ce que vous écrivez. J’en aurais la larme à l’œil si je savais comment on pleure (et si je n’avais pas déjà remarqué chez mes congénères que ça salopait tout leur maquillage…Comme si c’était pour se marrer qu’on passait tous les matins autant de temps à se pomponner)
Moi aussi j’aurais voulu être là quand vous avez déposé la dernière piécette de votre somptueux magot chez vous, parce que je pense que je n’aurais pas résisté à l’envie de me jeter dedans, et après, on aurait du tout recompter parce que j’en aurais foutu partout (je pense que j’aurais au moins essayé de nager dedans si ce n’est pas m’y enterrer vivante. Mais non je ne suis pas vénale, je suis juste une femme.)
Par contre, maintenant que je sais que vous êtes blindé de thunes, z’avez pas intérêt à me dire non une seule fois quand j’agiterai ma chope sous votre nez

Et bien sûr que j’aurais pu vendre la mèche pour votre fils. M’enfin, je vous connais, vous auriez pu vous en contenter juste pour faire chier le monde (c’est aussi pour ça que je vous aime tant rassurez-vous) ! Et puis, Rose nous avait demandés de ne rien dire, et pour le coup, même si ça a été super dur, j’ai trouvé ça plutôt judicieux, parce qu’au fond, si vous êtes curieux, bougez-vous les miches pour avoir vos réponses. Maintenant que c’est dit, bêtifions joyeusement (sachant que je nierai complètement avoir tenu ses propos et jurerai les avoir écrits sous la torture) : n’est-ce pas qu’il est beau ?
Rose dit qu’il n’a rien de vous, mais je la crois de mauvaise foi. Déjà, j’ai trouvé qu’il sentait le whiskey à un moment quand je le tenais, et ensuite, il a votre regard… sauf que le sien n’est pas voilé d’alcool mais de lait maternel. Et à un moment je jurerai l’avoir entendu faire « Coin-coin » ! J’aurais aimé que vous soyez là pour confirmer, parce que c’est sûr qu’on aurait fêté ça dignement. A ce moment-là, j’avoue que je me suis sentie seule, loin de vous (ou du moins de quelqu’un qui vous aime aussi, et en dehors de moi et vous, je ne vois personne d’autre. Ah si bien sûr, Humbert ! Saluez-le de ma part au passage si vous le croisez)

Je suis ravie que mes vers ait réussi à percer jusqu’à l’opacité laiteuse du cerveau de la pimbeche aux cheveux sales qui vous accompagne désormais (ça prouve qu’elle en a un, et je vous avoue avoir douté, un instant, long de nos retrouvailles à maintenant). Je me sens presque fière à l’idée que sa mâchoire prognathe ait eu assez de volonté pour braver l’inertie qui la caractérise et éructer quelques mots en mon honneur. Je reconnais bien dans ce subtil phrasé, toute l’étendue de son vocabulaire et ne me demande plus pourquoi vous l’avez choisi parmi tant d’autre : elle est facile à suivre.
Remerciez la de cet argumentaire foudroyant qui, sans aucun doute, me fera vibrer jusqu’à ma tombe et proposez lui donc que je rédige son épitaphe si d’aventure elle me faisait la joie de mourir un jour (pas trop lointain ce serait super).

La réponse à mon énigme se situe effectivement dans les Flandres, et à ce sujet, quand vous viendrez la chercher, ne vous attendez pas à un accueil avec fanfare (oui je sais, quelle déception. Moi aussi j’ai eu les boules). Notre comte la monopolise complétement pour son tour comtal, et je le soupçonne fortement depuis qu’il reste sourd à ma lettre de protestation, qu’il ne la garde pour lui tout seul tout du long de son mandant…
Je vous attends pour peindre des banderoles vindicatives.

Je compte aussi attaquer mon biographe pour « Incitation à aller à Ghent ». J’attends les résultats de l’exorcisme avant de lancer la procédure, on sait jamais, que ça s’explique.

Et concernant l’indice, je vous en donne un : ça a de la classe.
Je vous renvoie ma plus belle grimace.

A très vite parce que ce fut trop court

Katina


PS : ne comptez pas sur moi pour vous dire que j’ai ri pendant dix minutes en voyant votre dédicace sur soie, ça vous donnerez des idées de récidives.


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Maitre Troubadour à la Confrérie
Finn


    Choovansky,


    Vous êtes terrible ! Mon pauvre myosotis... Quelle est cette pluie acide que vous lui crachotez dessus ? J'en étais tellement tourneboulé à la lecture de votre diatribe que je faillis écluser cul sec le présent malté qu'une compatriote venait de m'offrir (deux litres cinq, quand même). Mais cela, c'était bien avant d'apprivoiser la touchante affection qui se cache derrière le voile pudique de votre plume acérée. On est pareils, finalement. On grogne, on crache, on moque, mais toujours par amour. Choovansky, je vous soupçonne de l'adorer ! Et ne faites pas cette tête, pensez à votre maquillage. Je n'ai d'ailleurs pas pu m'empêcher de relever le sens tout aussi caché que douteux d'un lexique flirtant avec la « petite mort ». En remettant en ordre tout ce fatras de fausse-pudeur, je lis que votre corps vibre tout entier à l'idée de pouvoir vous frotter d'amour à sa stèle. Et je vous dis non, Choovansky ! Et même si je ne note également la « joie de mourir » que vous pourriez y trouver, il existe quelques très rares obsessions que nous ne pouvons partager.

    D'autant que les boissons distillées occupent déjà une très grande part de nos rêves. Vous imaginez si nous avions en sus une passion commune pour le bleuet ? Nous ne serions plus qu'un, vous Irlandaise et moi Flamand, votre désert mammaire et ma forêt pileuse, tout cela unis dans le même conglomérat rocailleux. Une plaie pour le monde.

    Enfin ! Cela n'éclaire toujours pas votre énigme et je ne rajeunis pas. « Ca a de la classe ». Je vous ai déjà dit que je n'avais aucun goût ? Toute cette élégance dont vous me voyez souvent paré n'est que pure coïncidence. Un heureux hasard dont je ne suis hélas pas responsable. Si je ne craignais pas de devoir essuyer un de vos glaviots sur ma joue, je vous avouerais que j'ai déjà allié rayures et pois, et ce à plusieurs reprises.

    Par conséquent, et en vertu de mon estéthisme grossier, je réclame un nouvel indice (et n'hésitez pas à dessiner).

    Au fait, vous savez qui d'autre a mauvais goût ? Ma cousine par alliance, celle qui voue un culte à la teinte jaune. D'ailleurs, je l'ai rebaptisée Jaunisse. Ou Faigneas, selon les modalités de rime.

    Hélène


PS : Je compte sur vous pour arborer fièrement cet écusson que je vous offre avec malice.

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Katina_choovansky.



Bruges
27 juin 1461




Hélène,

J’ai l’impression que cela fait des semaines que je n’ai pas eu de nouvelles de vous… certainement parce que ça fait justement des semaines que je n’ai pas eu des nouvelles de vous (J’aime quand les choses sont simples à comprendre). Me rendant compte de ceci, je me suis prestement emparée de ma plume pour vous envoyer une lettre bien lapidaire et vous coller votre méfait sous le nez quand je me suis souvenue, juste après mon « gros traitre à votre race » d’introduction, que si je ne recevais pas de nouvelles, c’est parce que c’était à moi de vous répondre. (Oui, j’étais en grande forme intellectuelle à ce moment-là)
Alors là j’ai pensé à anti dater mon courrier pour vous faire croire à un pigeon égaré pendant de longues semaines. J’étais même prête à lui arracher deux trois plumes et lui crever un œil pour qu’il ait un air « j’ai vécu des choses terribles qui font que vous pardonnerez de ne pas avoir livré ce courrier en temps et en heure comme l’espérait son expéditrice », histoire que vous ne puissiez pas commencer votre courrier par « traitresse à votre race »… Et puis je me suis dit que merde., rien ne valait d’assumer grave un truc pour qu’on ne puisse pas vous le reprocher (ou du moins pour vous sentir moins coupable).
Alors j’assume.
Grave.
Je vous nargue même.
Cette entrée en matière me ravit, je passe donc à la suite.

Mon cher Hélène, il s’est passé plein de choses et rien à la fois, c’est ça la magie des Flandres ! Ceux qui croient que ce n’est qu’un comté de gros nationalistes chauvins qui jettent des cailloux sur tous les ghentois qu’ils rencontrent n’ont pas tout à fait tort, mais quand même, on ne fait pas que ça.
On a jeté des cailloux sur un peintre qu’était même pas Ghentois ! (et quand je pense qu’on nous dit intolérant )
Quand je dis « on », c’est surtout moi pour être honnête… mais j’avais d’excellentes raisons ! Vous auriez fait de même en voyant le tableau de ce gros pervers, je suis sûre !
Tant que ce n’était que la CAM qui était modèle à son insu, ça m’allait moi, et tout aurait pu s’arrêter là ! Sauf que vous savez à quoi ressemble un tournaisien, Finn… Alors sous prétexte qu’ils m’ont menacée et torturée pour que je devienne citoyenne d’honneur, il faudrait en plus que la ville ait un portrait de moi ! Et paf ! Une croute qui me représente avec un panneau « I love Tournai », la honte ! Putain, j’vous jure, ils mériteraient qu’on les tonde, ces consanguins…
Promettez moi qu’après avoir rasé le Béarn, nous irons tondre tous les tournaisiens, Hélène !

Une fois remise de mes émotions, j’ai exposé quelques temps mon brushing sur les remparts brugeois. On nous promettait plus de cents brigands fonçant droit sur nous, j’en n’ai pas vu un seul... En même temps, j’avoue qu’il m’est arrivé une fois ou deux de picoler avant de monter à la tour, ce qui explique peut-être mon manque d’observation.

Les festivités de Bruges se sont merveilleusement passées. Bocom s’est fait plumer au ramponneau, le comte s’est mangé une épée dans la gueule (ça lui apprendra à m’avoir sucré ma fanfare de retour), et j’ai même trouvé le temps de commencer à faire mes malles pour un prochain départ. Car nous partons ! D’abord direction Rose qui se trouve quelque part en Alençon (je vous dirai si Léonard est toujours aussi beau), puis bien sûr, droit vers Calyce, dont je vous ai déjà parlé la dernière fois que nous nous sommes croisés.
J’espère que ce nouveau périple sera l’occasion de vous croiser sur la route. Des mois que vous n’avez pas pu vous moquer de Bocom… Comment faites-vous ?
En parlant de Bocom, j’ai choisi dans mon immense magnanimité d’éclairer un peu sa vie de rustre en acceptant de le fréquenter. N’en faites pas une attaque, pensez au contraire à toutes les saloperies que je vais pouvoir vous raconter sur lui que plein de gens ignorent (cependant, que ça ne nous empêche pas de nous moquer encore de sa calvitie, son embonpoint et son âge avancé qui le pousse à faire des siestes inopportunes en pleine taverne).
Vous voyez, vous me parliez de ce partage indécent dont nous faisons preuve dans notre gout des choses, et bien voilà encore un point commun : Nous avons parfois des gouts douteux pour nos fréquentations. Vous le Bleuet, moi Bocom. Match nul.
(Au passage, je trouve que Flammirlandaise, ça sonne aussi classe que Flamangevine. Je sais pas vous mais moi je constate que le flamand est classe partout où ça le nécessite)

Et j’adore Mimosa ! N’en dites pas de mal ! Certes, aimer le jaune, c’est suspect, mais c’est la moitié du drapeau flamand alors du coup, ça prend tout son sens (puisque je vous dis que j’aime quand les choses sont simples)

En parlant de couleur, comment va votre (**« chèvre et lente » raturé**) chère et tendre ? Toujours aussi délicieuse ?
Vous savez quoi ? Moi je serais vous, je me punirais en ne me donnant aucune nouvelle d’elle. Ça m’apprendra à être mauvaise langue. Non, non, c’est pour mon bien Finn, soyez ferme, résistez ! Je me contenterai de nouvelles de vous exclusivement et je serai bien punie.

Sur ce, je vais vous abandonner. Nous revenons tout juste d’une excursion à Ghent pour aller jeter des cailloux sur la mairie, il faut encore que je brule les vêtements que j’ai portés durant mon séjour là-bas (on déconne pas avec l’hygiène)
Donnez-moi de vos nouvelles (et plus vite que moi, on ne peut pas être deux à assumer un tel retard de correspondance), et surtout, faites tout pour que je vous vois sur la route.

Je vous embrasse discrètement pour pas faire jaser votre rombière.

Flamandement,
Katina


PS : Oh, la prochaine fois qu’on se croise, faites-moi penser à vous parler de ce grand noir tout nu qu’on a trouvé sur la plage et qui n’avait pas un gros animal accroché à son bas ventre mais bien une protubérance fortement excessive de son anatomie. Je suis certaine que vous allez adorer cette histoire.

RePS : Vous avez raison de croire que je vous cracherai à la gueule si vous portiez des rayures et des pois… Vous êtes un homme sage et perspicace, je l'ai toujours dit.

RerePS : C’est bien parce que c’est vous : ça a des bottes.

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Maitre Troubadour à la Confrérie
Finn





    Vannes
    10 octobre 1461


    Choovansky,


    Oh la croûte ! Non pas vous, mais cet ignoble trait de pinceau qui défigure vos mamelles. Comment ose-t-on jouer sans vergogne avec les proportions dont le Ciel vous a dotée ? C'est bien simple, on dirait qu'il a remplacé votre tout plat mais non moins divin buste par celui de mon ex-Myosotis.

    Ex oui, chaque chose a une fin. Et telles les feuilles qui tombent en automne, celle-ci se fane loin de mes branches de pommier. Sauf que ça fait bien cinq ou six mois que je l'ai libérée de mon étreinte. Ce qui vous donne une idée de l'état d'enflure de son ventre. Un indice : ça doit être énorme et rempli de mon fruit. Ne vous offusquez pas si je vous apprends seulement maintenant que vous risquez d'être une nouvelle fois tantine, on m'en a moi-même informé il y a peu. « Ah, les femmes ! », vous me direz. Et je vous répondrai « Les garces ! ». Et nous rirons en cognant nos chopes devant les résultats de la saison de soule. Ou de hurling, si on est d'humeur sanglante.

    Ah si vous saviez comme cela me manque. Caillasser d'honnêtes gens avec vous, médire sur Luc... Et tout ça avec plus d'alcool que de sang dans les bras. Vous pouvez être certaine que nos chemins se recroiseront. Je n'ai même pas encore quitté la Bretagne depuis que j'y suis installé. Mais je vais y remédier bientôt. J'insiste, cependant, vous ne pouvez PAS m'en vouloir d'avoir épousé cette contrée : vous roulez des pelles à Bocom. La région me rappelle d'ailleurs autant vos chères Flandres que ma bien chère Île. Tant de choses se sont passées depuis votre dernier pli que je ne peux tout vous conter. Mais en gros, j'ai aidé des Penthièvre à rater un assaut sur l'Anjou, je me suis brouillé avec la Danoise et j'ai accepté un titre de Chevalier auprès d'une Princesse bretonne.

    Vous la rencontrerez sûrement lorsque nous nous reverrons et vous constaterez que si vous avez meilleur goût en matière d'atours, j'ai la palme dans le choix de mes liaisons. Et alors, vous ne pourrez me refuser un poème sur celle-ci, subjuguée que vous serez par la qualité de ses jurons. À ce propos, et puisque je vous ai signé une décharge vous autorisant à m'empêcher de faire des conneries, j'en aurais peut-être une à vous soumettre de vive-voix. C'est assez personnel, mais vous êtes une femme de bon sens, vous saurez me guider. En échange, je vous interdis de laisser Luc vous enfler le ventre ! Vous connaissez mon avis sur les proportions, inutile de le rappeler.

    Quoi d'autre... Ah oui, j'ai revu un de mes anciens petits camarades palmés. Vous savez, le borgne à qui il manque plein d'autres morceaux ? Non ? Vous manquez un sacré boute-en-train, et bien moins laid que Luc même si sa beauté se trouve surtout en-dedans. J'étais pourtant resté sur une mauvaise image des Canards en apprenant que le résidu de basse-fosse qui enleva Rose en début d'année était l'un d'entre eux. Attention, n'allez pas imaginer que je lui en veux d'avoir enfermé mon épouse dans une cave, mais l'enfoiré me réclamait son poids en or ! Je tiens à signaler qu'elle portait encore mon fils, à cette époque. Vous le croyez, ça ? Il va sans dire que je l'ai envoyé à Ghent.

    Bien, je crois que c'est tout. Ne me reste plus qu'à vous souhaiter de me retrouver dans les plus brefs délais. Néanmoins, pour vous épargner le choc, je préfère vous prévenir que j'ai rasé mes rouflaquettes.


      Bretonnement,

      Hélène



    PS : Je n'ai pas oublié votre devinette. Flamand, qui a la classe et des bottes : je propose un soldat flamand !
    C'est une blague.




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