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[RP] Anarkia *

Anaon
    Anjou
- Dans les affres du mois d'aout -



    Les lignes dansent. Ce sont des sillons en perpétuels mouvances qui se perdent en arabesques éclatés. Course instable. Absurdités. Le ciel est un bois ébranlé d'une houle nauséeuse. Aucune ligne n'est droite, c'est tout le monde qui tangue. Distorsion des sens. Les méandres fibreux se piquent parfois de points de lumières, de flashs incongrus. Anomalies chromatiques. C'est la vision qui déraille d'une conscience en déroute. C'est l'écho fantasmagorique d'un esprit qui dévie.

    Frémissement des paupières. L'œil brûle de trop voir sans jamais embrasser le repos. La peau se pare d'un frisson inexpliqué. Il ne fait pas froid. L'air est immobile de la chaleur épaisse des langueurs estivales. Épave de chair, elle a livré sa nudité parfaite à la lueur qui veut bien apparaître. Unique ouverture sur le monde, les interstices des volets clos qui épanchent leurs lumières incertaines. Clarté du jour ou rais de velours d'une nuit de pleine lune? L'esprit n'est plus à même de le distinguer. Étendue dans des draps éprouvés de ne plus draper aucun sommeil, elle demeure, comme un gisant dans son linceul de pierre. Statue hiératique aux fébriles mouvements. Offerte, en posture du Christ en pâture sur sa croix, bras écartelés pour accueillir le néant. Une main pend du bord de la paillasse jusqu'à frôler le sol de la pulpe des doigts. Unique contact avec la réalité.

    Frémissement des paupières. Dans les nœuds du plafond se dessinent des visages. Il y a des yeux dans le bois, des sourires dans les courbes. Dans la clameur du silence on entend des murmures aux timbres du cristal. L'oreille s'éveille. Échos d'une mémoire brisée en pleine dégringolade.

    Plic... plac.
    Plic... plac.

    Tu l'entend? C'est le son d'une folie qui s'égrène. Le sablier des âmes damnés est déjà retourné et rien ne viendra l'enrayer. Jusqu'à quand le temps de la raison? Les jours passes, la sagesse trépasse. Bientôt tu n'auras plus de conscience. Encore, tu seras folle Anaon.

    Plic... plac.
    Plic... plac.

    Frémissement des paupières. Les visages se meuvent, sourient, rient! On entend leurs éclats dans le vide de la pièce. Claque dans l'âme. L'immobilité se brise d'un spasme. Les doigts se crispent et lacèrent avec hargne le plancher maltraité, hérissé de milles et une échardes. Herse miniature qui punit la chair de l'insolente. Les aiguilles de bois pénètrent le tendre des doigts, s'immiscent sous les ongles déjà sanglants de premières écorchures. La douleur est de coton, la silhouette ne rechigne pas, tout au plus s'enhardit-elle, continuant inconsciemment à s'éclater les doigts. Tension du corps, jusqu'à ce que...

    Les paupières ne battent plus. Les sillons de bois ont pris la teinte du blond et sa myriade de marbrures à soudain l'air d'une vaste chevelure. L'œil s'y enchaine comme prit dans une toile dont il ne veut se défaire. La poitrine se gonfle, les lèvres tremblent. Dans la fresque de son délire il y a des petits êtres qui dansent et qui courent. Tout les sens frémissent. Elle voit des sons, ressent des paysages, elle entend les gestes. Sous ses yeux c'est les souvenirs qui prennent vie dans un amalgame des plus incongrus. Et ces souvenirs ont les yeux gris et les cheveux blonds. Ils ont son nez et son menton. Ils ont son sang et même son nom.

    Clignement des paupières. Immobilité soudaine. La respiration se brise. Les traits se figent. Sous ses yeux, ils n'y a plus qu'un simple plafond de bois. Frisson pareil à un sanglot muet. La gorge exhale un soupir douloureux.

    Et les doigts écorchés reprennent leurs étranges supplices.

* Grec : "Fatalité"
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Images originales: Victoria Francès, concept art Diablo III - [Clik]
Rumwald



[ Il est dit qu'elle est le berceau de la plus grande force spirituelle au Monde... ]


- Une semaine plus tôt -


La lune est absente ce soir. C'est le jour parfait pour s'évaporer, couper la ligne d'une âme égarée, exalter ses sens cachés, jouer avec les nerfs des protégés, souffler enfin un secret... Oui dans les ruelles de Babylone, mieux vaut ne pas sortir s'aventurer cette nuit. Seules lueurs pour reconnaitre une silhouette ? La lumière diffuse des fenêtres mal nettoyées. Autant dire que l'instinct et l'ouïe font le meilleur ménage si l'inconscience le guide pour une promenade.

Il est dit qu'elle sauve les plus faibles d'une douloureuse existence...

Le germain n'en a cure. Que l'ultime coup de pinceau vienne l'écraser, il n'en sera que bienheureux. Il ne se voilera d'aucun capuchon, ne prendra aucune précaution pour le lieu donné. Si le cracheur est un ennemi, il n'aura qu'à écrire sa dernière ire en l'honneur de Thanatos. Si, au contraire, l'information susurrée mérite toute l'attention du blafard, la gratitude et récompense seront... Éternels.

Il est dit que l'Amour en est démuni...

A mesure que les pavés claquent sous sa marche forcée, l'artiste apprécie la douce empreinte estivale dans l'air, et ne prête aucune oreille aux bruits environnants des miracles. L'esprit est scellé dans un in memoriam des différentes ventes conclues avec l'ami provençal depuis leur première négociation. Les coffres se renflouent doucement, et sûrement faudra-t-il prévoir de s'acoquiner avec les bons alliés. Les rumeurs sur un retour d'anciennes racines de la Cour allant bon train... Bientôt peut être se révèleront-elles vraies, et lui ne pourrait plus, comme d'autres, se permettre de petit commerce individualiste.

Il est dit qu'elle exprime la surprise, autant que la crainte...

L'auberge est enfin trouvée et le squelettique souffle quelques mots au tenancier. Ce dernier lui indique la chambre de l'indic. A l'ascension des marches, Rumwald se remémore l'étrange et excitante nouvelle apportée à l'encre : La païenne au sourire de l'ange... Flot de souvenirs alléchants qui lui tire un vilain sourire tandis qu'il ouvre la porte du mystère. Le fou voit s'effondrer ce pilier maternel, devant les yeux ébahis de la pureté ; Grandir la colère dans ces âtres quand la peau est entaillée ; Disparaitre l'espoir lorsque le corps s'évanouit dans l'oubli... L’œuvre avance à grands pas.

Il est dit qu'elle est un des surnoms de la ferveur de Rome...

Le mouchard attendait son arrivée. A peine referme-t-il la porte que la langue se délie comme par magie :


J'ai trouvé une correspondance à votre description. Un sourire identique a été aperçu aux environs de l'Anjou.


Vibre vibre petit démon... Saute à cloche pieds dans mon égo. Bientôt je te libérerais de tes chaines, et je t'en donnerais à cœur joie pour notre prochaine étape... Mais d'abord, mettre de côté la vermine.

Combien ?

Trois cent écus... Elle a l'air de vraiment vous intéresser. A-t-elle quelque chose à se reprocher ? Gaagh ?!!

Il est dit qu'elle est la dague la plus longue...

Si tu as tant le souhait de vivre... Rampe jusqu'à la porte et j’appellerais du secours.

Miséricorde est loin du cœur... La victime a sa chance. Les osselets sont jetés. L'assassin murmure son défi à sa victime. Une survie pour un appel à l'aide, tout est bénéfique à la pitié... Si rare chez lui. Enfin, cela était le cas avant de retirer la lame... Étrangement, le corps du cracheur s'effondre sans demander son reste, se contorsionne, puis ne laisse que cercle sanguin et gargouillis comme derniers soupirs. Pauvre ère... Il aurait suffit de ne pas être curieux.
Encore plus décevant, tu n'as même pas souhaité une seule seconde te battre pour peut être profiter un tant soi peu de ton fragile sablier. Vraiment, ce n'est pas du jeu, un véritable gâchis que ces hommes... Leurs compagnes elles ont tant de surprises dans ces délicieuses attentions. Mais qu'importe... Le Graal est entre ses mains. La charité rejoint son fourreau au dos.


Ma Cathy... J'espère que tu as une tombe hinhinhin... J'aurais un jeune nouveau à te présenter.

Ne reste plus qu'à trouver la cachette de la Belle à la haine sans pareille. Quand on y repense, tout cela ramène à une seule vérité : un tueur revient un jour ou l'autre sur le lieu de ses crimes.


*** Musique : Thème du film Resident Evil ***
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Anaon
- Quelque jours plus tard. Au cœur d'une taverne -

"_Elle est morte" vous dira-t-on.
"_Elle cuve!
_Mais elle boit pas.
_Elle a bu!
_Et elle boira.
_ Elle sombre.
_Elle a déjà sombré.
_Non, pas encore..."

    Pas encore.

    Exhalaison empoisonnée. La gorge recrache un air vicié d'alcool et d'herbes qui s'entremêlent. Expiration pesante. Lassitude. Même respirer devient corvée. Le monde est en sourdine. Il se fait berceuse presque inaudible, poitrine de Morphée qui refuse de ceindre ses bras sur sa carcasse fanée. L'étau du sommeil. Elle le désire plus ardemment que l'étreinte la plus aimante d'un homme. Une chaise pour lui faire piédestal, la nuque se brise sur le haut du dossier pour offrir, blanche et palpitante, la précieuse corde de vie. Nonchalance provocante. Comme une invitation à venir y jouer de la chair ou de la lame. Par lubie ou pari, on s'y risque, mais bien souvent la main sévit sur les poignets des imprudents. L'ivrogne n'est pas ivre, on l'a comprit. L'alcool lui est mauvais, on en pâtit.

    Insomnie. Supplice. Emmurée vivante dans sa propre tête qui ne veut pas se taire. Prisonnière de pensées sans queue ni tête. Y'a t-il torture plus insupportable que celle où l'on est à la fois victime et à la fois bourreau. Sous les paupières closes, elle sent le monde qui se distord. Elle attend qu'il s'effondre dans le bruit mat d'une chute. Abandon.

    Berce-moi, Ivresse, de tes bras pernicieux, accorde-moi un instant ton sommeil oublieux. Livrée, j'attends, fauche ma conscience, comme tu cueilles dans l'allégresse l'âme avinée des bienheureux. Tu me refuses tes faveurs, à moi ta plus fidèle amante. Ingrate! Pour t'obtenir je laisse écus et dignité, je troque ma santé pour un peu de bien être. Petite marchande d'illusion, que dois-je encore te sacrifier pour goûter enfin à ta damnation?

    Les doigts reposent autour du réceptacle de sa détresse. Dame de fer à la robe de garance rehaussée d'un parfum capiteux aux relents de mensonge. Promesse illusoire qui ne trouve plus grâce à ses lèvres pâles. Le corps accuse sa limite alors que le cerveau n'est pas encore noyé. Insupportable sensation de flotter entre deux eaux. L'alcool meurtrit sa perception du monde, trompe ses sens. Elle n'est que poupée de coton. Son ventre est une tombe où se complait un trop plein de poison. Les chairs ont abdiqué, mais l'esprit, lui, résiste. Fil ténu de la raison. Comme une corde qui la retient pendue au-dessus de l'abysse qu'elle aspire tant rejoindre. A quand le bruit macabre de la nuque qui craque. Un seul désir, celui de s'éclater au fond d'un gouffre de sommeil.

    Les lazzis des badauds lui parviennent comme des murmures d'un autre monde. L'oreille n'entend que son propre souffle. Écœurée de toujours percevoir. L'éveil lui colle des hauts le cœur et lui vrille les tempes à s'en claquer la tête sur le coin des tables. Main dans le vide. Les doigts s'agitent d'un tic nerveux, le corps se crispe dans un frisson.

    Plic... Plac
    Plic... Plac

    Viens. Viens ma Camarde couleur de vin. Viens noyer mes rancœurs. Macabre métronome que le sang qui bats mes tempes. J'attends le glas final. Je sais que tu es là. Je sens, tu n'es pas loin.

    Viens. Viens mon Obsession.

    Plic... Plac
    Plic... Plac

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Images originales: Victoria Francès, concept art Diablo III - [Clik]
Rumwald



[ Une proie blessée au bord du désespoir est le met divin du chasseur... ]


- Tout près -


Clic... Clac... Clic... Clac... Le temps est un ennemi immortel... Mortel. Sa course est inaltérable, sèche, droite, peut être même l'unique chose juste dans ce monde troublé par les intentions des vivants. Ce danger est si immuable que nombreux le craignent, se cachent, tentent de se soustraire à ces aiguilles tranchantes comme la lame de l'Ankou. Pourvu que le bougre n'ait pas été plus rapide que lui... Voilà qui serait très regrettable.
Un sourire comme celui-ci, on en fondrait n'est-ce pas ?

S'il devait la catégoriser, le germain la mettrait volontiers dans le rang des perdus. Ah la coquine se cache... Elle ne cherche plus. Peut être même se soustrait-elle à son expédition de mère... Ou l'aurait-elle simplement oubliée ? Intéressante théorie. Aristote peut être ô combien persuasif héhéhé...
Rome sait si bien payer, il serait parjure de refuser.

Pourtant l'artiste ne vient qu'avec de bonnes intentions. Tant de cadeaux à offrir pour cette femme dénommée discrète aux dernières langues de vipères. Il la reconnait bien, une nouvelle cruelle œuvre qui se joue de son peintre... Les couleurs s'écaillent, une nouvelle peau est obligatoire s'il veut qu'elle approche le soleil. Si capricieuse et égoïste... Que d'enfants que ceux qu'il laisse vivre.
A peine ne leur accordons plus un regard, voilà que le hasard nous les rapproche...

Et si l'instinct se doutait qu'en ouvrant la porte d'une des tavernes angevines alentours, les yeux aux couleurs de l'âme humaine allaient reconnaitre son doigté, la vie ne serait plus un jeu... Jackpot.
La Muse est aux abois... Il serait si facile de lui prendre son dernier souffle, l'emmener loin des badauds, piliers de comptoir, curieux en tout genre... Et de recommencer une litanie en l'honneur de la plus grande puissance mondiale. Mais... Comme on le dit bien souvent, c'est d'un ennui que celui qui ne reconsidère jamais son être.

Les pulsions de Miséricorde sont mises en sourdine tandis que le squelettique se rapproche. Pas à pas, l'assassin déguste le nouveau visage aux limites d'un besoin de trépanation, les âtres presque éteints de cette passion qu'ont toutes ces personnes avant de s'envoler pour la terre promise... Et lorsque la curiosité est à son comble et le bourreau assis en face de sa victime, il prend soin de choisir les mots appropriés au retour de ses Enfers :


Tu avais meilleure mine cet hiver... Je jurerais même que les cris de tes enfants te maintenaient éveillée quand le Paganisme t'a abandonné.

Réveille toi feue noble femme d'une famille limousine... Tes petits t'appellent encore, es-tu sourde à leurs peurs ? Clame ta Haine... Explose la barrière... Viens me pourfendre. Tu m'as tant manqué...
Et si tu mouftes... Je t'apprends de nouvelles nuances de carmin... Avec ce couperet dans la main.

Clic... Clac... Clic... ClAc !!!



*** Musique : Kennel Area de Penumbra (jeu) ***
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Anaon
" Une oeuvre d’art, c’est un monceau de cicatrices. "
    - Jean Lurçat -


    Ses limbes sont autant de toiles qui lui collent à l'âme et enrobent ses pensées d'une chrysalide languide. Cocon pernicieux qui la coupe du monde. Elle s'y love, bercée par les octaves en sourdine des vies qui s'agitent. L'esprit ne perçoit du monde sensible que des esquisses et des bribes qui attisent à peine les sens à l'abandon. Dérive. Elle flotte, dans le lit d'un Styx aux miasmes spiritueux. Elle sent, des poignes chimériques, comme de multiples mains agrippées à ses chairs. Un étau pour son crâne, enclavé par un joug asthénique au doigté singulier. Elle croit sentir les phalanges invisibles qui se crispent un peu plus, cherchant à couler son épave aux fonds de ses abysses. Oui... Noyez-moi. Je ne vous résiste pas.

    L'inertie se brise d'une inspiration nonchalante. Et l'air semble soudain se mouvoir au devant d'elle. Le sixième sens s'anime. Perception d'un mouvement. Mais la conscience claquée n'accuse aucune réaction.

    Tu avais meilleure mine cet hiver... Je jurerais même que les cris de tes enfants te maintenaient éveillée quand le Paganisme t'a abandonné.


    Silence.


    L'albâtre s'ébroue d'un frisson. Réminiscence qui bouscule les sens dans leur torpeur. La voix s'immisce. Lui rampe sous la peau. Couleuvres de mots qui remontent ses veines de la plus désagréables des manières. Il y a quelque chose qui s'écoule en elle. Un soubresaut d’adrénaline. Un venin qui attaque ses sens. Un instinct qui s'agite avant même que l'esprit ne réagisse. Les doigts se crispent. Les bras se crispent. Et la conscience s'ébranle.

    Ce timbre. Il éclate comme un cri dans sa nuit. Crevant sa bulle d'indolence. Ce timbre. Même sourde, elle l'aurait entendu. Il émerge des tréfonds de son âme où son souvenir s'est installé comme une tumeur. Gangrène de ses pensées qui a infecté la moindre parcelle de son être… Cancer. Ce timbre... Elle l’a gravé à même la chair.

    Inqualifiable frémissement.

    Dans le tumulte de ses pensées sans consistances, s'éveillent des cris. Les poils se hérissent. La peau n'a plus chaud. Elle a froid. Et la nuque se crispe au souvenir d’un soupir qui y a flirté comme on souffle une insulte. Corrosif. Le corps se secoue brusquement d'un bref spasme. Les images claquent son âme. Folie, une fois de plus tu me guète.

      "Regarde"

    Les yeux se défont lentement de leurs voiles de chair et les azurites restent rivées sur le plafond qui tangue. Et que danse devant les prunelles troublées le paysage d'un ciel d'hivers. Ivresse, tu aurais pu être bien moins cruelle. Ce n'est pas ces délires là que je viens chercher dans tes verres. Ceux-là je ne les connais que trop bien…

      "Ne trouves-tu pas Maman... Belle ?"

    Lentement, trop lentement, le corps s'anime. La tête quitte le dossier avec une précaution infime, bascule jusqu'à retrouver son aplomb. Nonchalance d’un être désabusé, conscient, lassé de ses propres délires. Et les yeux se relèvent...


    Ineffable.


    Silence.


    Folie, cette fois tu vas trop loin...

* Musique " Method Work " de "Pefume: The story of a murderer"
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Rumwald



[ Ferrée, une proie a de nombreuses manières de frétiller... ]


- A un geste de taillader -


Le Titan approche... Cette bête féroce enchainée depuis des temps immémoriaux à l'accomplissement de la Vengeance. Haine aux poings, il tambourine la clarté jusqu'à plus soif, libère les bas fonds de l'humain pour qu'ils ne fassent plus qu'un avec leur prochain allié. La brutalité pure coule lentement dans les veines... Ode animal attisant curiosité et effroi, dépendance et fuite. L'adrénaline n'est qu'un vecteur... Un messager de la tempête à venir. Le battant écœuré hurle son veto en frappant la cage thoracique, prison dégoutante le soumettant à un rythme de plus en plus effréné. Les limites ne sont qu'insectes devant ce flot de piques enragées, pressées d'en découdre avec la Source. Tout bon poison a un embryon... Un être fragile qu'il faut sectionner si l'on ne veut pas succomber aux affres de la déraison. Mais que faire quand les questions sont avalées pour une idée unique, insupportable, addictive, frissonnante...? Le raisonnement est caduc. L'environnement devient flouté. Un corps vif, impatient, drainant la moindre parcelle d'énergie en lui pour atteindre son but...

Et cela, le Hibou compte bien se l'approprier.

Le germain veut voir ce que cache la destituée. Cet état là est révélateur d'une funambule entre deux mondes... Elle va plonger. Ne reste plus qu'à la pousser où il le souhaite. L'assassin ne peut rêver mieux comme prologue... Un cœur à ciel ouvert prêt à saigner de ses aiguilles torsadées. Devant lui, un cocon frêle abritant un enfant pleurnichard, refusant la vérité immuable de ce Monde. Allons allons Papillon... Je ne te veux aucun mal... Tu dois t'envoler... Laisser place à cet appel des abimes enivrantes. Oublie le nectar des noctambules, oublie la poudre des malheureux, oublie la femme, oublie Toi... C'est un imposteur. Je connais ta vraie valeur. Tu empêches son éveil, à mon inconnue... Tu as tort de me barrer la route.


Pourquoi cet air si sérieux ?

Pourquoi cette surprise ma Muse ?... Ne reconnais-tu pas ton Maître, ton Guide, ta Bougie, ton Phénix ? Moi je me rappelle. Mieux encore, je te lis.

Rien n'a changé n'est-ce pas ?

Ah... Mais qu'as tu rencontrée comme gente ? Ridicule faiblesse que tu subis. Tu me fais honte.

Ton esprit ne cesse de te renvoyer...

Mère ? Mère ? Où êtes-vous ? Il est malpoli de faire attendre son invité d'honneur.

Intéressant de voir comme tu peux trouver le confort dans chaque situation...

Aurais-tu peur de m'affronter ? A qui comptes-tu faire avaler telle couleuvre ?

Même dans un cauchemar... Familier.

J'invoque ta rébellion. Si tu ne viens pas à moi, fuyarde, je perce directement ta matrice, et emporte ta tête... La chaux est un moyen parfait pour te garder éternellement dans la forme que je souhaite. Remercions nos ancêtres... Même eux avaient le sens de l'esthétique sur le champ de bataille. Imagine l'effet de ce crane corrosif envoyé directement sur une personne chère à tes yeux... Je gage de ce formidable présent : brulure et phobie.

Alors...


J'ai reçu des nouvelles de ta progéniture que tu m'as confié depuis ton abandon... Aux pêchés capitaux. Tu te souviens de tes petits êtres non ?

REVEILLE-TOI !!!



*** Musique : Close To Evil de Penumbra (jeu) ***
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Anaon
" Il y a des cicatrices qui saignent encore plus que les plaies elles-mêmes. "
    - Jean-Marie Adiaffi -


    *

    L'illusion est trop parfaite. L'esprit ankylosé n'y décèle aucun accroc. Du teint lilial aussi blafard qu'une plaine sous son linceul de neige, aux monts et vallées qui sculptent son visage... Le souvenir atteint la perfection jusqu'à l'outrance. Et elle en tremble.

    On lui a ceint la tête d'une cloche de verre. Le monde est mort. Néant. Il n'y a que Lui. Lui. L'attention s'engouffre dans ses mots, dans cette voix qui assaille sa peau d'une myriade de frisson. C'est une couleuvre glacée qui lui remonte l'échine. L'effroi à l'état brut. Raison friable. Délire! Du pure délire! L'air souillé par les affres du stupre et de l'alcool s'alourdit d'émanations sorties des tombes de sa mémoire. L'odeur du bois humide vent éveiller ses narines. Celle du pin, du chêne. Frémissement. Le cœur lui monte aux lèvres.

    Tu la sens maintenant. Cette odeur fétide qui ferait d'un remugle un parfum délicat. Des bouffées de poussière qui te collent au palais et ces relents de souffre qui te tapissent la gorge. Tu la sens. Ça te prends les tripes. Ça te colle la gerbe. Effluves de chairs carbonisées, de cheveux qui se font cendres. Tu t'en souviens. L'odeur de ton propre corps qui flambe te soulève le cœur.

    Brusque tremblement. L'alcool a noyé les chairs, pas la mémoire gravée à vie par ses propres cris. Les stigmates se déchirent, les plaies saignent. Épanchement imaginaire d'un rythmique sanglot. La femme a mal. Rien ne la blesse, mais la douleur est sans pareille. Les souvenances sont impitoyables. Tout se rappelle. La tête, la peau, le cœur. Scellée dans les prunelles couleur de l'acier clair, elle subit de nouveau son martyre.

    Primaire, l'effroi la tétanise. Il n'y a plus rien de conscient dans ses ressentis. Il n'y a rien d'autre qu'un instinct exacerbé. Celui de la haine. Le sang s'empoisonne d'une bile acerbe. C'est la Géhenne qui s'agite au fond de ses tripailles.

    L'esprit comprend.

    Il est là. Ta douleur. Ta haine. Ton obsession. Il est là... A deux pas de toi. Ce souffle qui t'insulte. Ce regard qui te brüle.
    Il est là, enfin.

    Suspendu aux lèvres du squelettique, l'esprit accuse le choc. Coup de hache qu'elle se prend en pleine nuque. La réalité a crevé l'abcès aviné qui lui tenait le cerveau en étau. Et l'évidence la laisse sur le carreau. Cette scène. La balafrée l'a imaginé, rêvé, fantasmé des milliers de fois... Et aujourd'hui...Aujourd'hui, alors que sa vengeance, dans un hasard des plus insolents, lui est livrée sur un plateau d'argent, elle demeure complètement con. Exempt de réaction.

    Impossible... Pourtant...
    Il est là. Enfin...

    J'ai reçu des nouvelles de ta progéniture que tu m'as confié depuis ton abandon... Aux pêchés capitaux. Tu te souviens de tes petits êtres non ?

    Clash.

    Le coup de fouet. Giclée d'acide qui lui crame les veines. Abandon... Abandon?! Les chairs s'ébranlent d'un ultime frisson qui bandent chaque muscle qu'il agite. Abandon!!

    Et tout éclate.

    Imprudence alcoolique. C'est l'ire qui explose, la sagesse qui s'écrase. L'Anaon se lève d'un bond, la dextre dégage la coupe de vin qui crache son carmin sur le bois de la table. A corps perdu, aidé par un déséquilibre certain, la balafrée percute ce corps abhorré par tous les pores. Les mains se referment sur col et gorge. Elle en sursaute. Les doigts ne sont pas passer au-travers d'une chimère. Une fois encore la peau se froisse d'un frisson galvanisant. Touché de l'artère de vie qui palpite sous ses doigts. Ça l'affole! Elle en devient folle l'Anaon.

    _ C'toi qui me les as pris!! Mab Gast*! Que leurs as-tu fais!! Que leurs as-tu fait!! Komz!Amprevan! *

    Sourde. Sourde à la stupéfaction qui gronde dans la salle. Sourde à la raison qui lui hurle d'être prudente. La femme n'écoute rien d'autre que que ses mains qui tremblent, que cette fureur qui martèle sa tête. Ne rien voir d'autre que ses prunelles qu'elle arracheraient avec les dents. Sentir son propre sang se faire acide. Sentir ses sens s'emballer, s'exacerber, s'horripiler.

    Il est là. A bout de doigt. Cette gorge, qu'elle veut sentir craquer entre ses mains.

    Il est là.
    Il n'y a rien d'autre.
    Rien d'autre que Lui.


* En breton:
Mab Gast : Fils de Putain
Komz! Amprevan! : Parle! Vermine!
Musique " Method Work " de Pefume: The story of a murderer

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Rumwald



[ La proie à l'agonie a toujours l'esprit rebelle aux premiers abois... ]


- Premier plongeon -


Les chaines ont disparu.

D'abord les objets. Inertes, inoffensifs, utiles entre de fiables mains, fragiles, indiscrets... Ils sont les premiers à subir les prémices de Léviathan. Une coupe se trouvait juste en face, la voilà maintenant renversée comme une vulgaire brindille d'herbe soufflée d'une bourrasque d’Éole. Pourtant, son contenu a de l'humour... Liqueur des pauvres, à la robe carminée, gâchée. C'est un gong, une invitation au combat, au sang, à la douleur...

Comme ces doigts enivrés qui lui lacèrent tendrement la peau blafarde.

Enfin... La Muse se défend. L'air vital commence à manquer pour l'assassin, mais tout son corps est pris de spasmes délicieux. Sans le savoir, elle le ramène à la vie... Tranche la monotonie... Ravive la fourberie. Indécente poupée, tu m'as été si souvent éloignée... Pardonne-moi de ne pas t'avoir sustentée de victimes hargneuses depuis une éternité. Regarde... Ce met te plait ? Sens-tu ses griffes qui s’aguerrissent ? Entends-tu ce flot de paroles incompréhensibles à rendre jouasse ? Ce trop plein de haine contenu, retenu, juste pour nous ? J'en ai même lâché mon couperet. Que suis-je maladroit, rouillé, impressionné... Diverti.

Mais ce n'est pas encore assez.

Le germain profite du souffle qui lui reste pour lever ses bras et les abattre sur les jumeaux au niveau des fragiles creux séparant l'avant de l'arrière. Serpent dans l'âme... Toujours prêt à frapper les faibles maillons de l'imperfectible physique. L'artiste de l'ombre se ressaisit. Les poumons se gorgent avec impatience, la jugulaire en feu grogne son malheur... Et le squelettique contre attaque dans la foulée. Une main dextre vient saisir à son tour le col de la petite folie, tandis que, fort de ses appuis assis, tout son poids vient vivement se porter en avant, les jambes décidées à se positionner pareillement face à l'adversaire. La sobriété l'emporte cette fois-ci, l'Anaon devenue tortue malhabile sur le dos, table grinçante sous le geste ample du Hibou.
Un rire malsain éclate dans la pièce, où commence à se rameuter parieurs et badauds de mauvais genre. Le rapace aime le spectacle, toutefois avec une large préférence pour ne pas devenir la prochaine bête de foire. Tout ces ignares n'imaginent pas un seul instant ce qui se joue ici... Mieux vaut attirer la souris plus loin pour ne pas évacuer un pan de l'histoire.

A sa manière, Rumwald tente de faire des promesses d'un combat prometteur tout public de simples sifflements de mécontentement. Plaquée contre le bois à peine lisse, le germain pousse sans se retenir la frêle femme médusée, s'accompagnant d'un râle combattif, pour ne lâcher la Muse qu'au dernier moment.

Où choira la proie ? Il s'en contrefout. Il n'a besoin que de temps pour récupérer sa douce lame à terre, et insulter sans relâche les souvenirs pour mieux aller au dehors, dans une ruelle plus calme à régler les affaires personnelles.


PRIS ? Hinhinhin....AHahAhAhAaaa... Tu me les as CONFIE oui ! Qu'as-tu fais pour les retrouver mmmh ? Veux-tu me conter qui et quoi se sont succédés depuis notre dernière rencontre ? Si tu les avais VRAIMENT cherché, ton sang n'aurait pas tourné aussi bien ! Oh, je suis presque certain que pour une mère si attachée à sa progéniture tu es un exemple de médiocrité. Si j'en viens à te trouver moi-même ailleurs qu'à Paris, c'est que tu as pu t'accorder du repos plutôt que d'écouter les au secours des flambeaux de demain. Hé bien ? Remercie-moi ! Je te rappelle à l'ordre Mère... Toi qui ne tiens même pas sur tes jambes... Ah, ta souffrance égoïste a dû attirer un bel entourage. Pathétique ! Hinhinhin... A qui la faute... A QUI la faute si je dois te porter d'excellentes nouvelles ?


*** Musique : Infected is near 1 de Penumbra (jeu) ***
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Anaon
    L'illusion n'en est pas une. Maintenant elle en est sûr. Cette chair tendre et palpitante, vérité sous ses doigts qui voudraient la broyer. Le réduire au silence éternel pour crever les insomnies qui lui rongent les nuits. Mais non... non. Son agonie ne serait qu'un cataplasme sur une armure rouillée. Non, ce n'est pas la mort qu'elle veut étreindre entre ses doigts, c'est la vie qu'elle veut de nouveau serrer contre son sein. La raison hurle de lâcher sa prise, mais comme le chien qui plante ses crocs dans la chair et le sang, les griffes de la harpie refusent de se soumettre.

    J'ai trop juré de te crever pour arrêter maintenant.

    Un soubresaut de surprise quand les mains empoignent les monts qu'elles broient sans vergogne. Mais comme la liqueur alanguit les sens, elle étouffe les douleurs et aucune complainte ne vient franchir les lèvres balafrées. La femme n'a pas le temps d'enrayer le geste du squelettique qu'elle accuse dans un souffle le choc contre son dos. Échos du bois qui lui renvoie sa surprise. Les regards se trouvent, se scellent, s'agressent. Et ce rire qui éclate lui est une insulte insupportable. Par réflexe les mains accrochent le poignet bien mince pour autant de vigueur. Un prise bien vite lâchée quand l'homme l'envoi valser sur le sol.

    Plainte sourde. La balafrée vient embrasser le plancher bien trop violemment. Ressac dans l'estomac. Le visage se tord dans une grimace alors que le corps se redresse à quatre patte. La tête lui tourne et les paupières s'ouvrent sur un monde brouillé. Marée de pied qui s'étend devant ses yeux. La voix qui éclate écourte la surprise du choc. La tête pivote, assez pour voir l'être blanc quitter les lazzis de coureur de pari. Il s'en va. Il s'en va?!

    Panique dans les veines. L'avinée se redresse dans un empressement maladroit. La main agrippe une chaise qui se renverse, accroche une table et la silhouette s'élance dans une course éthylique. L'Anaon se fait sa place, impose son passage, la peur lui tambourine le crâne. Ne pas le perdre! Ne pas le perdre! L'épaule percute violemment le chambranle de la porte sans tirer aucune plainte de l'enragée obnubilée. Les pas s'arrêtent. Le vide. Les rues et leur voile d'ombre. Le silence crevé par ce timbre qui la hante tant. Les mains s'agrippent dans ses cheveux, un peu plus et elle se les arrache. Le regard affolé fouille les ruelles alors que pleut sur elle un monceau d'inepties.

    _ Je les ai cherché!! Je les ai cherché!

    Est-ce à l'homme ou à sa culpabilité que l'Anaon répond? C'est la voix du démon qui ronge ses nuits et ses jours. C'est la voix du remord, de son propre dédain. Anaon, femme qui méprise le monde, mais qui se méprise elle-même plus que tout autre. Qui parle, lui ou sa propre tête? Elle ne sait pas, son âme est folle. Noyée, déraillée, la raison est morte.

    Pan d'étoffe qui se laisse voir au détour d'une ruelle. Invitation subreptice. Déclenchement de la course. Une main reste en renfort contre les murs qui la soutiennent alors que la balafrée se perd en foulées endiablées. Et les mots qui font mal, comme autant de lames qui s'immiscent dans la seule faille qui saurait la faire ployer. Se sont des claques. Des coups de hache, des crochets qu'elle a aux tripes et qu'il se plait a tirer dans un plaisir sadique.

    Au cœur de la nuit au silence meurtrie, la mère s'époumone.

    _ C'est elle que j'aurai du trouver! Pas toi! Mais ELLE ta putain aux yeux d'émeraude!

    Alara. Le nom était tombé lors d'une conversation dans le secret d'une taverne malfamée. Non, l'Anaon n'avait pas gagné l'Anjou par simple lubie, par envie passagère. Mais par intérêt. Parmi les monceaux de conneries qu'elle avait put amasser en tant de temps, ce nom était la chose la plus concrète qui avait sut raviver l'instinct de traque.

    _ Je ne les ai jamais oublié! JAMAIS! Tu mens!

    Non jamais. Comment aurais-je pu oublier ceux qui sont ma chair, ceux qui sont mon sang. Ma vie, pour deux sourires. Non jamais. Jamais je ne les ai oublié. Jamais l'on aurait pu m'en éloigner. Le seul qui aurait pu crever la haine qui me faire mère, de mon âme je m'évertue à l'effacer.

    Non tu mens, je ne suis pas médiocre. Je suis forte. Je n'ai jamais eu les mains aussi souillées que depuis le jour où tu me les a enlevé. J'ai cherché, sans relâche dans la fange et le sang. J'ai troqué sans remord les faveurs de mon rang. Et je me suis faite raclure. Je me suis faite mercenaire. Côtoyer la vermine pour débusquer la vermine. On me prend pour une dérangée. On me prend pour une cupide. Une roture. Une égoïste, une belliqueuse, une sanguinaire. Mais je ne suis rien de çà. Je ne suis rien.

    Rien qu'une mère à qui l'on a arraché les entrailles.

    _ C'est TA Faute!! Mab Gast! Tout est de Ta faute!

    Croisement. La main prend appuie sur la pierre froide. Chaleur nocturne qui lui comprime gorge et poumons. Et l'alcool de son trop-plein que n'aspire qu'à ressortir. Les azurites se lèvent et se rivent sur le visage de son tortionnaire immobile un peu plus loin.

    La femme se redresse, calme sa respiration en saccade. Les doigts viennent frôler la garde de la dague qui se découvre d'un geste lent.

    _ Rends-moi mes enfants, sal.opard. Ou je te jure que je n'aurais pas la main qui tremble quand il faudra te taillader la face.

    Non, cette fois tu ne m'auras pas, docile et contrainte. Résignée, je ne le suis plus. Si je tremble ce n'est que de rage. Le timbre d'un calme mortel transpire de toute la haine qu'il dissimule.

    Homme d'albâtre tu seras tellement plus beau redoré de ton carmin.

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Images originales: Victoria Francès, concept art Diablo III - [Clik]
Rumwald



[ Il n'y a pas de bon chasseur... ]


- Il n'y a que de bonnes proies -

Fuir n'est pas toujours une lâcheté. Mais une stratégie avancée. L'adrénaline au cœur, le vice aux lèvres, les jambes battent pavés et terre, sans se presser, les deux billes taquines ravies de voir le piège se resserrer sur la biche enivrée, blessée dans son amour propre. Tu me veux l'Anaon ? Combats l'éther qui te fragilise tant et laisse moi narguer ce spectacle Ô combien pathétique. Les pauses de la mère perdue sont de délicieux moments où sa gorge échappe un rire nerveux et décadent. La rage est une force illimitée d'esprit quand il s'agit de défendre son terrain le plus secret... Le germain se plait à le redécouvrir sur une de ses plus chétives œuvres.

Oui... Si fragile... Un cristal impur qui ne quémande qu'à se transformer en bronze brut pour ne pas se briser. Mais qui entendrait sa triste mélodie en l'effleurant...? Lui Sait. Et la connaissance est un atout qu'il faut toujours avoir en poche. L'ignorance mène à la perte... C'est un fait. Regardez-les ces troupeaux égarés... N'avez-vous pas tous envie de les saigner pour mieux vous en servir ?...

C'est ton tour ma Muse... Enfin. Le début de la métamorphose que je veux voir naquir. Fixe moi, haïs moi, éblouis moi de ta bêtise, pour mieux que je te vois tomber de ses mains, cette Vérité qui finira bien par t'entendre à force de t'époumoner... Car oui... Ton instinct te le crie... Un hibou ne stoppe jamais son vol pour rien.


Me taillader ? Dans ton état ?

Ricanement sadique tandis que tout son corps se met en posture de garde. Tu me plais poupée embourbée... Un véritable chaton qui se défend contre une vipère assoiffée.

Tu es déjà loin de savoir les tenants et aboutissants... Hinhinhinhinhin... Et tu crois en si peu de temps pouvoir me surpasser ?

Le sourire vicelard s'étire à rendre son visage blafard dégoutant de malice. Arrogant ? Si fait. Pour attirer la mouche, tout les moyens sont bons. Si l'assassin agace la rode, lui se complait dans son rôle de simple acteur. La mercenaire est âgée, au moins tout autant que lui, mais son état rouille ses habitudes. Il compte bien se servir du moindre déséquilibre... Et frapper un talon d'Achille.

Ma faute ? Oh je t'en prie... Ne parle pas comme eux. Même si tu rêves de l'être. Ce n'est pas toi ! Regarde toi ! Tu n'as rien à voir... SI... Différente des autres. Tu n'as pas changé...

Miséricorde vibre de sortir de sa cage. Rumwald s'exalte d'avance de la danse à venir.

Tu évolues. Quoi ? C'est la... Moralité... L'éthique... Qui dérange ta conscience ? La bonne blague. Tu dois être une jolie bête de foire pour t'avoir vu si... Décrépie.

Nouvel éclat de rire malsain.

Une bonne mère n'a pas besoin, dans la recherche de ses enfants perdus, de perdre sa clairvoyance... Avoue-le... Ça te plait... Au plus profond... Au contraire du reste, qui n'a que la bonté que le monde daigne leur donner. Mais, n'aie crainte... Moi j'ai pris les devants.

Viens.


Je ne suis pas un monstre. Je viens t'annoncer la parfaite mort de ta fille, en plein travail sulfureux. Un client trop dérangé aura eu raison d'elle.

Viens..

Oui, mauvaise mère... Tu l'as tué. De ton incompétence.

Viens... Que je te cueille dans ton élan... Je vais te dire... Mon petit secret.



*** Musique : Kika de Ez3kiel ***
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Anaon
- A quatre mains -
    *

    Ces mots. Ils n'injurent qu'une fierté inexistante, ils se perdent en échos dans le silence factice des ruelles. A moins que ce ne soit son crâne qui souffre et qui résonne comme l'airain d'une cloche fêlée. La haine et l'alcool s'y mêlent dans la plus cruelle des chorales et jouent les virtuoses fatals. L'une exacerbe son impulsivité, l'autre tue sa dextérité. Ils distordent son monde. Agacent ses sens. Mais parmi l'amas de flou et noir qui ronge sa vision, elle ne voit bien que Lui. Lui. Clair, net comme un point de lumière dans un ciel d'ombre.

    La femme est sourde à ses provocations et à leurs sens que l'esprit aviné ne saisit pas toujours. Impassible à ces piques qui cherchent à crever un soupçon fierté. Sa dignité, voilà bien longtemps que l'Anaon l'a noyé dans l'alcool et le sang. Je serais fière, je ne me ferais pas chienne à courir après l'argent. Je serais fière, je ne troquerais pas l'ichor des innocents. De ses paroles, il ne fait qu'égrener sa patience. Insupportable timbre. Insultes du seul fait de vibrer!

    Mais c'est un frisson soudain. Une giclée glaciale qui lui gèle les artères. Crispation qui lui broie les reins et lui ébranle violemment l'échine. L'incarnat déjà bien pâle se fait livide alors que les yeux s'écarquillent, et la voix presque murmure.

    _ Qu'as-tu fait à ma fille?

    Et qu'apparait dans le crane l'éclat d'un regard d'une innocence presque insolente. Deux perles grises, auréolées de blond. Sa petite fille. Sa Mélusine. Beauté d'opale. Sa chair, son sang. Assaillie par la perversité des hommes...

    Mensonge !

    _ Qu'as-tu fais à Mélusine!!

    Explosion qui lui fouette les sangs. Instant où les barrages de glace éclatent pour laisser place à la déferlante d'une ire sans pareille. Crevé le sang froid, la prudence! Crevée la raison! C'est de la haine qui coule dans mes veines. Il ne reste plus rien, rien qu'un cœur qui saigne et une âme qui hurle au scandale de cet inavouable mensonge! Puisqu'il ment, puisque la mère ne peut l'accepter autrement!

    Sans un mot de plus, la mercenaire s'élance. Elle lui fera cracher ce qu'elle veut entendre, même si ce doit être dans le gargouillis d'une gorge qui se vide! Démon! Fi de son arme, fi de sa clairvoyance, fi qu'elle y crève ou qu'elle s'y blesse, elle lui étreindra la gorge et lui percera les flancs.


    La règle d'or a disparu. La Muse n'entendra plus la petite voix pour l'empêcher de commettre l'irréparable. Si l'artiste doit baisser le rideau aujourd'hui, il emportera avec lui l'emplacement du dernier sang survivant. Il peut enfin se donner à cœur joie à ce duel fumeux qu'il attend depuis trop longtemps. La roide est belle en Haine... Vient maintenant le façonnement. Que choisir...? Il y a si peu de temps à partager en osmose avec Léviathan. A quel dieu païen fais-tu honneur cette nuit très chère sauvage ?... Susurre-le moi à la pointe de ta lame, fais-moi revivre ce plaisir délectable de notre première rencontre... Montre-moi ta nouvelle couleur poupée fracassée. Juste une étincelle... Que je force un peu plus ta métamorphose cruelle. Que tu deviennes unique par mes mains blafardes... Que le monde découvre enfin un nouveau jouet du Chaos.

    Que l'espoir devienne ton pire ennemi.

    Qu'a-t-il fait ? Montrer la voie. Coupable jubilatoire face à son égo applaudi, par cet élan fougueux d'une mère effondrée. L'heure est venue de plonger ensemble limousine déchue... Amusons-nous !

    Le sourire d'ange charge. C'est pour ce cri... C'est pour ce cri là qu'il a fait tout ce chemin. C'est pour mieux dévorer ses erreurs de parcours ; Et lui rappeler, à chaque esquive et coup vicelard, qu'il ne disparaitra jamais de son esprit. La première est la bonne, Miséricorde glisse sur sa petite sœur dans un crissement glacial, tandis que le Hibou se dégage d'un coup hâtif, mais glorieux à renverser le plus docile bretteur débutant.
    La Muse cache bien son jeu. Il faudra cependant plus que ça pour faire perdre au germain son rire assassin. Le pied droit vient donc directement pousser la mercenaire par derrière, au bas du dos, non pas pour blesser l'orgueil - inexistant - mais mieux faire entendre son intolérable accent pincé.


    POuAHAHAahaha... Alors, on danse ?



    Et elle danse oui, dans son cocon de haine, la vrai, la viscérale, celle qui carbonise les méninges et fait sauter la raison. Elle pulse dans ses veines en des giclées d'acide. Ça la brule, ça la ronge, elle en a mal, mais elle l'ignore : l'ire aveugle bien des douleurs. Viendra le temps des larmes de sang, viendra le temps des nuits de rage, mais maintenant est l'heure d'une âme brisées. L'heure de valser dans la folie.

    La parade est aisée, mais elle trop élancée, c'est une volte et un choc qui s'étouffe contre ses reins. Fraction de seconde pour la surprise, instant presque indiscernable et la mercenaire fait volte-face dans une rage qui lui éclate les cordes vocales. La lame siffle alors que dextre cherche à coincer sa consœur. Ballet d'acier qui n'aspire qu'à faire reculer. Derrière les replis de l'esprit aliéné, il reste un grain de réflexion. Un grain seulement. Assez pour aviser le mur derrière eux, pas assez pour attendre encore avant de se jeter à corps perdu contre son autre, dans l'espoir de le fracasser contre le roc.


    La mère n'a pas apprécié l'apéritif... La voilà qui évolue en valkyrie, avec des âtres d'un autre monde, une puissance particulière qui chatouille allègrement son malsain besoin de découverte. Si l'égo féminin ne commande plus ses mouvements, les fruits de la colère guident son corps mercenaire sous éther, trop envieux d'enfin toucher le fond de tout ses problèmes. Dans sa rapidité d’exécution, son adaptation, Anaon flatte le blafard germain.

    La joie est telle dans ce début de ballet que l'assassin refuse la défense... Pour mieux apprendre. Voir ses progrès. Cette rose grise flétrie par la vengeance, traits du visage tirés dans une monstrueuse grimace de rage. L'Homme peut devenir monstre, à l'instar de l'animal, il n'y a qu'un pas entre survie et génocide. Et cette limite, seul le plus grand prédateur l'a dépassé. Et toi roide ? Quelle est ta force...?


    EnCoRE !

    La charge décuplée par les chaines brisées étouffe un fébrile instant le souffle de l'assassin, pour mieux revenir lorsque la pierre rencontre la chair du dos. Choc lourd et sourd. L'instinct germain crie le danger, mais l'esprit est si loin avec sa folie... Que cette entrée augmente sa gourmandise, si significative alors qu'il tressaille de rire avant d'envoyer un crochet de sa sénestre libre sur l'oreille la plus proche. La douleur est bouffée par l'adrénaline, au moins tout autant que sa vue se brouille légèrement. Il serait très peu gentleman de ne pas faire partager cette nouvelle vision avec un peu plus de piment à madame... Ou mademoiselle... Il ne sait plus. L'artiste vise là où ça résonne...


    Il quémande l'amant du supplice et l'Anaon ne se fera pas prier pour faire preuve de plus de ferveur. Les corps se sont fracassés contre la dureté de la roche et la femme n'a pas le temps de supporter l'intolérable contact de cette poitrine qui s'ébranle que le poing lesté de plomb lui fauche le crane. Explosion de la douleur. Un nappe brulante lui enveloppe la tête et brouille sa vision l'espace d'un instant. Elle a mal, mais ce ne sera jamais rien face à cet étau qui lui écrase le cœur.

    Les mains se font Célérité. La senestre vient emprisonnée le poignet et son arme endormie. Et la dague change au poing de la dextre. Le choc.

    L'acier rencontre la chair.

    Corps à corps. Joue contre joue. Main à hauteur de flanc, la dague a percé l'étoffe, la dague a percé la peau et les doigts de femme n'attendent que de sentir le carmin ruisselé sur sa main. Poitrine contre la sienne, elle jauge son souffle et s'appuie contre elle. Et si tu tombes, je m'effondre. L'alcool lui bat les tempes, la douleur lui tord le crane. Vertigineux mélange qui lui soulève le cœur. La peau tremble d'excitation, les poils de ses bras se sont hérissés sous le frisson, comme le pelage d'un chat en rage. La main tremble. Les yeux peinent à rester convenablement ouverts. Respiration. Ta peau. Ton odeur. Je l'exècre par tous mes pores. Dans ma tête, ils sont gravés, ton toucher, ta voix. Elle aussi... Elle aussi a t-elle senti tes mains et ton souffle sur son corps?

    _ Où est ma fille... Où est mon fils?

    Ton timbre m'éclate les chairs. Ton regard me brûle la peau. Ton souvenir m'empoisonne. Pleure ton carmin maintenant. Je veux sentir glisser sur mes doigts ce jus de garance que j'ai eu dans la bouche pendant des mois. Mais Parle, parle avant que je ne perde la tête. Avant que je te ne vide sans que tu ne m'aie rien dit.


* Musique : " I'm Not a Hero " de "The Dark Khnigt " par Hans zimmer
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Rumwald



[ Des trophées dont le chasseur ne parle pas... ]


- Souvent sa propre peau en est leur mur -

Rumwald ne baisse pas la tête, ce serait précipiter la douleur. Le germain serre les muscles, le corps épris par un désir soudain d'exploser. Le Fou garde sa folie, concentrée en un croissant céramique, dégoutant de malice. Les billes lunaires fixent les raisins de la colère, pour mieux se galvaniser de ce mépris unique que voue ce suppôt féminin sans chemin. Si vous me haïssez très chère, vous n'êtes pas si loin de l'adoration. Comment pourriez-vous vivre sans moi ?... Vos enfants, pfin peccadille... Je suis presque certain que vous finirez par vous habituer à leur absence. Je sens votre battant. Je sens votre signature... Il y restera un joli autographe ad vitam eternam, si j'arrive à me dépêtrer de vous, groupie dégénérée. La vie vous est si fade... Mais vous ne me contez rien. Frêle grain de sable à deux doigts de s'envoler ou de plonger. Où est votre reste de conscience païenne ? Dîtes-le moi... Que je l'écrase pour mieux me galvaniser de votre ombre sur les terres françaises.


Où est ma fille... Où est mon fils ?

Elle s'accroche... Comprend-elle simplement qu'elle les a perdu à jamais ? Cette vérité doit la terroriser. Le blafard prend un délicieux plaisir à le croire ainsi. Mais il ne doit pas trainer... La blessure aura besoin d'un bon guérisseur, de convalescence. Fuite est de mise après avoir laisser la force de la Roide le poignarder, sans défense. La mère veut une réponse tintée de clarté... A la bonne heure. Le voilà, mon petit secret...

Demande à tes Dieux pour trouver les morts.

Un court instant, la mère vacille. Un court instant, elle n'est plus sûre de vouloir le laisser vivre. Un court instant, la mercenaire laisse une ouverture. Un court instant, il est maitre de son bras armé. Un court instant, Miséricorde lèche gaiement la hanche la plus proche. Un court instant, l'assassin se contorsionne dans un cri jouissif de douleur. Un court instant, l'Anaon rencontre violemment la pierre froide. Un court instant, le poison s'insuffle... Aussi efficace que les voluptueuses fumées qu'elle a pu inhaler ce rude hiver.

La coupe n'est pas mortelle, le plan avait été établi, endormi dans le fourreau. Sa touche intermédiaire ici est terminée. L'artiste soupire de contentement et frissonne rien qu'à voir cette femme aux portes de Morphée l'Envenimée. En profiter serait... pêché. Alors, avant qu'elle ne tombe dans les limbes de sa vengeance, Rumwald s'approche de l'agonisante, s'agenouille, lui tournant le regard vers le sien et, dans le timbre pincé qu'elle préfère, lui murmure :


Quand je saurais tes nouveaux proches... Je te recontacterais, un jour. Et puisque tu m'as laissé un souvenir...

Puisque tu as mon flux vital sur tes doigts... Laisse moi t'en voler un peu pour peindre sur ton visage...

As-tu déjà senti la lavande...? Elle sent bon aujourd'hui. Oh et ton fils renait à merveille...

Avant de sombrer Déchue, je t'emprunte tes lèvres... Je nous lie un peu plus dans ce combat infernal. Garde la plus grande entaille à faire sur ton mur des victimes... J'ai soif de voir ta survie, notre relation se noircir, poupée assoiffée de percer les yeux du marionnettiste. L'assassin s'efface, boiteux, pressé de retirer le corps étranger comme on retire une pointe de palmier du pied. L'endomorphine ne le lance plus. La volonté l'encourage à trouver refuge aux terres les plus désolées de ce royaume. Paris attendra... Il souhaite un retour dont on reparlera pour des décennies et des siècles. Et cela demande du repos... Et de ne plus jouer en solo.


*** Musique : Versus de Ez3kiel ***
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Anaon
    Elle est le chien qui a mordu la chair. Elle est la folie qui s'excite de sentir l'odeur du sang. La dextre tremble de sentir l'écarlate ruisseler sur sa main. Il saigne. Il commence à se vider entre ces doigts. Elle exulte. Elle est le réceptacle de sa folie. La coupe qui recueille sa vie. Qui de l'un à besoin de l'autre? Le créateur et la créature, scellés par un cordon envenimé qui ne cèdera que par le sevrage de l'un ou de l'autre. La séparation par la mort. Je dit "oui", pour le malheur et pour le pire. Vous pouvez embrasser la damnée.

    Elle est la corde qui étrangle son cou. Elle est le fil qui le pend à la vie. Elle inspire. Elle s'empoisonne de cette odeur. Il serait si simple, tellement simple de plonger un peu plus loin dans les entrailles, tellement aisé d'aller quérir la dernière note, le dernier soupir. L'ultime silence. Mais si tu meurs ce soir, je me condamne à la tombe. Puis-ce que je crains, que ma vie, tu ne la tienne entre tes lèvres.

    Elle est la foy bafouée qui se purifie par le sang de la souillure.

    Un soubresaut. La plaie se perfore davantage alors que le corps s'encastre plus encore contre celui qui la dévore. Les narines frémissent. Les masséter tremblent. Il touche les nerfs de la païenne celte jusqu'à la moelle. Il lui rappelle amèrement la raison de son supplice. Le germe de cette haine qui lui pourrit la vie. Il a brulé ses chairs et déchiré sa peau, mais il n'a pas étouffé ses convictions. Et la mère s'en persuade : ses enfants n'ont pas encore rejoins l'Awen.

    _ Mes Dieux t'emm...

    Coupure. Un court instant, le corps tremble. Un court instant, elle perd sa poigne. Un court instant, le joug s'échange. Il n'aura fallut qu'un court instant...

    Un flash dans l'esprit. Comme une corde qui lui claque au milieu du crane. La douleur. Un hoquet de surprise s'étouffe derrière les nacres. La mercenaire n'a pas le temps d'atterrir, le crane percute le roc lui arrachant les poumons d'une plainte sourde. Blackout. Les yeux se révulsent l'espace d'un instant. Ébauche d'une inconscience qui ne dure que quelques secondes, le temps que ses genoux percutent le sol lui tirant une douleur qui la ramène aussitôt à la dimension d'un monde sensible. Ses sens s'emballent. Les vertiges, les migraines l'assaillent de nouveau et lui collent le cœur aux lèvres. Elle veut vomir. Cracher son mal. Le cerveau ne comprend pas, parasité par cette ultra-son qui lui grille les méninges. Le cri de la douleur.

    Les mains prisent de convulsion s'appliquent dans un réflexe sur sa hanche gauche qui crache un liquide vif et vermeil. Et les paupières battent la cadence pour chasser l'engourdissement qui gèle lentement ses veines. Une pression. La tête est redressée. Et les regards s'accrochent. Et ce regard....

    Les azurites s'embuent alors qu'elle comprend. La hargne s'est brisée sur le fil de lame empoisonnée. Non. Elle n'a pas perdue... Pas une fois encore, ce n'est pas possible! A la mention de ses proches, le visage de Judas et de Nyam claquent violemment dans son esprit. Elle reste coi, quand la main vient frôler la sienne, quand le doigt peint sur son front une lettre qu'elle ne peut pas voir, assujettie sa langueur.

    As-tu déjà senti la lavande...? Elle sent bon aujourd'hui. Oh et ton fils renait à merveille...

    Les yeux se ferment. Malgré sa conscience qui chavire elle a comprit. Dieux qu'elle a mal... Mais la réflexion se brise sur le geste qui suit, sur leurs lèvres qui se lient dans un baiser des plus infâmes. Écorchure dans les entrailles. Il viole sa fierté et pousse un peu plus loin le vice qui les unit. Elle en est tétanisée. Et il l'abandonne. Il s'éloigne sans un regard et la délaisse avec une lettre sanguine tracée sur le front et son corps qui vomit son sang en silence. Il s'éloigne. Il va vivre alors que sa fille est morte. Il va vivre alors que son fils se souille. Il va vivre alors qu'elle se crèvera à chercher son dernier fruit.

    La mère se tord. Elle a atteint son seuil. La gorge rend au pavé la bile acide qui lui crame le palais. Les relents d'alcool et de remugles qui s'en dégagent appel immédiatement une seconde salve. Elle semble étouffer alors que le monde tangue. Et au raclement qui s'échappent de la gorge qui s'étrangle d'une toux rauque, se mêlent les sanglots qui n'avaient pas connu une telle intensité depuis bien longtemps. Les larmes déferlent sur les joues martyrisées. Tandis que le poison continue son assaut, elle se vide de son sel et de son sang. Une fois encore, elle a perdue. Elle doit se soumettre à l'inadmissible.

    Sa fille est morte.

    Un cri vient déchirer la nuit. Elle hurle, tout ce qui lui reste de haine et d'amour. Elle hurle ses pleure et sa rancœur. Elle hurle jusqu'à s'en fendre le crâne. Jusqu'à ce que le poison zappe la moindre parcelle de conscience.

    Jusqu'à en être Anéantie.


      "Drowned out. Trashed out. You cried, in front of me.
      I broke ma promise, and tore what we had. Watch out. My Angel. My love. Watch out. My love.
      Wiped out. Reeling. You died in front of me."

* Musique : " Wiped Out " par Archive.
"Noyé. Tu as pleuré devant moi.
J'ai brisé ma promesse et déchiré ce que nous avions. Regarde. Mon ange. Mon amour. Regarde. Mon amour.
Anéanti. Titubant. Tu es mort devant moi"

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