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[RP]Et si, et si... le fruit d'un souvenir de passage...

Illona
Troyes –…

L’eau avait coulé sous les ponts depuis qu’elle avait quitté son Sud natal pour échouer dans la froideur champenoise. Dès son arrivée, elle avait pris ses marques sur les terres que ses parents avaient laissés, tout en esquivant de son mieux les allusions de son parrain quant à une future union avec son stupide rejeton.

L’adolescente n’a peut-être plus prononcée un mot depuis le massacre de sa famille, mais elle n’en est pas stupide pour autant. Ici, ils auraient allumés eux-mêmes le bûcher de ses parents s’ils avaient pu. Et ces projets n’étaient voués qu’à accroître leur patrimoine, sans la moindre considération pour elle et ses aspirations.

Comme à l’ordinaire, elle revient du marché, après avoir écoulé le produit de ses champs rapidement. Pourtant, cet après midi, alors que le coffret noirci par le feu funeste est toujours à la place où elle l’a rangé, lui vient l’idée de l’ouvrir enfin. Une pomme dans une main, la cassette dans l’autre, elle prend son temps, presque encore hésitante alors qu’elle s’assied en tailleur sur sa couche.

La jeune fille inspire longuement pour trouver le courage de l’ouvrir, puis s’exécute, d’un geste lent, et découvre des vélins roulés, légèrement teintés par les flammes qui ont léchées leur écrin de bois. Un à un les rouleaux sont parcourus des yeux, avec émotion. C’est comme si elle redécouvrait ses parents au travers de courriers sans réelle importance désormais, au travers de leurs écritures soignées. Elle revoit leurs visages aimants, entend leurs voix et ressent presque à nouveau la douce bienveillance qui planait jadis dans son foyer. Quelques reconnaissances de dette la font grimacer, les noms portés étaient des voisins que ses parents avaient aidés sans jamais réclamer en retour. Elle pensait en avoir fini lorsque deux lettres pliées et cachetées dans le fond attirent son regard.

Elle effleure doucement le cachet de cire, intact, puis le vélin vieilli, avant de lire le nom du destinataire… Terme… La curiosité prenant le dessus, elle décolle précautionneusement l’estampille et déplie avant de commencer à lire. Au fil de sa lecture ses yeux s’écarquillent et le morceau de pomme qu’elle est en train de mâcher lui reste en travers de la gorge. La découverte est rude et pourtant il ne lui vient pas une seconde à l’idée de remettre en doute le moindre mot écrit là, voilà plus de quinze ans, par sa mère… Interloquée par ce premier courrier, elle décachète rapidement le second et le lit avec avidité avant de tout reposer sur le lit et de se lever presque d’un bond pour parcourir les cent pas dans sa chambre.

Concentrée, bien qu’abasourdie, elle intègre les nouvelles et réfléchit à toute allure. Ainsi, son père n’était pas son père naturel et il avait connu sa mère déjà grosse de l’œuvre d’un autre. Rien dans leur attitude ne lui avait jamais donné matière à soupçonner quoi que ce fut. Mais alors qu’elle y songe plus avant, cela n’a rien de véritablement étonnant. Leur Foy n’était qu’Amour et la venue d’un enfant toujours accueillie comme un don du ciel. Elle n’en éprouve alors que plus d’amour et de reconnaissance pour ses parents.

Mais… Si sa mère dans sa prime jeunesse avait pu fauter et s’il advenait que l’homme soit toujours en vie, alors cela voulait aussi dire qu’elle avait une seconde chance. Au pire, il refuserait de l’entendre, au mieux… Elle refuse de se faire de faux espoirs, mais savoir d’où elle venait vraiment ne saurait lui être néfaste.

Dans sa tête résonne le nom de l’homme à qui finalement sa mère avait renoncé à prévenir, par deux fois. Terme… Et si..
Pas de si ni d’atermoiements, pas de larmes mais de l’encre, et sa plume qui commence lentement à glisser sur le vélin. Elle n’en est même pas nerveuse tandis que les mots coulent rapidement en arabesques presque audacieuses…



Citation:
Messire De Terme,

En ce vingt et unième jour de septembre de l’an de grâce mil quatre cent soixante, je me permets de vous présenter une requête qui pourra vous paraître incongrue voire trop cavalière à votre goût.

Je viens de découvrir des lettres que ma mère vous avait écrites mais qu’elle n’a jamais envoyées.

La première vous informait qu’elle était grosse et la seconde qu’elle avait trouvé un époux qui l’acceptait ainsi que l’enfant à venir comme sien.

Je ne cherche ni à vous mettre dans l’embarras, et ne suis pas intéressée par la plus petite richesse que vous pourriez détenir.

Je suis simplement en quête de vérité et de mes racines.

Aussi, ma question est des plus simples qui soient : Avez-vous connu ma mère, Esclarmonde de Villerouge-Termenès ?

Illona.



Elle n’a pas fait montre d’une grande imagination, ni ne s’est répandue en détails inutiles. Elle ne sait même pas s’il est en vie et si dans le meilleur des cas, il accèdera à sa demande.

Et c’est presque en courant que la silhouette effilée gagne le relais de poste local, peinant à se faire comprendre alors qu'elle doit encore écrire qu'elle veut un coursier pour retrouver le destinataire. Une fois la chose entendue, du moins comprise dans son cas, elle regarde l'homme et la monture disparaitre dans un nuage de poussière avant de regagner ses champs pour y travailler, le cœur un peu plus léger que d’habitude.
Chabert
Des jours qu’il attendait le retour du Chardon, cette jeune femme pour qui il s’était pris d’affection, cette sòrre pour qui chaque jour, il faisait de son mieux pour faire de la grange, leur grange, un lieu habitable. Mais plus que cette sœur qu’il s’était trouvé, qu’il s’était inventé à travers le souvenir du Mona, il y avait cette sœur morte qui le narguait en promenant devant lui son spectre étincelant au travers d’une jeune femme, d’une marquise. Il aurait du se moquer de la présence de la marquise de Nemours en Anjou, et pourtant, cette présence là avait le don de le bouleverser et de le laisser songeur des heures durant.

En vain, il avait essayé de se changer les idées, en vain, il avait pansé Ordalie pour s’occuper l’esprit, et ce jour-là n’échappait pas à la règle, les chardons allaient et venaient à un rythme soutenu sur le vieux cuir de la jument, tandis qu’un coursier haletant poussait la porte, pli en main. Un sourire, un des rares sourires du Terme alors qu’il s’en saisit et envoya voler une pièce pour l’homme, soulagé à l’idée d’avoir des nouvelles de Cerdanne. S’il savait.. Adossé à une poutre, les mots furent parcourus sans trêve que celle qu’ils lui offrirent quand la lettre fut abaissée pour le laisser face à face à la jument.

_ Ordalie, la vie est une femme, elle souffle le chaud et le froid, et moi, je suis dans la merde.

Voilà qui avait au moins le mérite d’être clair. Pas de déni, pas de mensonge, les mots eurent un écho dans la carcasse du Bonhomme, un écho suave comme une caresse ou une voix tendre, la voix d’Esclarmonde. La lettre tomba au sol et l’homme avec, le visage entre les mains, le regard d’acier se ferma au monde, revoyant le passé, les boucles brunes d’Esclarmonde entre ses mains larges, sa taille fine contre son corps musclé. Le corps frémit, un corps qu’il avait oublié mais que les mots lui rappelaient, et la honte avec. La honte d’avoir cédé, mais pire encore, la honte d’avoir par ce pêché emprisonné une âme sur cette terre de souffrance et de douleur. Il ne doutait pas, non. Aucun des mots glissés sur le papier n’était remis en question. Esclarmonde était trop bonne, trop douce pour lui jeter leur faute au visage, pour lui infliger à lui la terrible responsabilité, et elle avait choisi un autre homme capable d’accepter, un autre homme qui ne lui aurait pas jeté son fanatisme au visage en échange de son amour et sa tendresse. Esclarmonde était-elle cruellement ou délicieusement aimante ?

Et soudain, il réalisa.. Le passé, l’odieux passé, et cette drôlesse qui recherchait ses racines. Le coup fut dur, plus dur encore que le premier. Esclarmonde n’était plus. Esclarmonde qui avait été ses rires, ses pleurs, ses peurs et tous ses désirs, Esclarmonde n’était plus, et en échange, le voilà qui se retrouvait avec une drôlesse sur les bras qui désirait connaître ses racines. S’il n’avait été tant baigné de cette foi qu’ils partageaient tous deux, il aurait pu en vouloir à cette enfant d’être née, d’avoir vécue, et de n’avoir su protéger sa mère, mais Esclarmonde aurait parlé d’amour, aurait aimé d’amour et aurait refusé tout compromis à la tendresse. Ce fut un soupir de la jument à ses côtés qui le tira de sa contemplation d’une rainure dans le bois de la grange, et enfin, il alla chercher de quoi écrire.

Citation:
A Illona, fille d'Esclarmonde de Villerouge-Termenès,

Ta lettre a été une douloureuse révélation pour moi, et je ne sais comment tu la vivras quant à toi mais j'ai connu ta mère voilà un peu plus de quinze ans, j'ai aimé ta mère voilà un peu plus de quinze ans.

Si elle ne m'a pas envoyé ces lettres, c'est qu'elle me connaissait mieux que quiconque et c'est pour lui rendre hommage et effacer le tort que j'ai pu lui causer que je vais te poser une question à mon tour : Me rejoindrais-tu si je venais à toi ? Si je te proposais de parler de cela de vive voix ?

Je te laisse réfléchir à cela, je prends la route ce soir pour quitter l'Anjou qui si elle est accueillante, n'est pas le lieu de retrouvailles paisibles en famille. Je me dirige vers le Limousin qu'on dit plus calme. Si tu acceptes, dis moi où tu te trouves. Si tu ne veux pas.. Je comprendrai et m'effacerai.

Que Dieu te conduise à bonne fin,

C. de Terme.


Sa réponse à lui était tout aussi cavalière, voire pire encore, pourtant, d’un bond, il se leva pour rattraper le coursier au plus vite et lui tendre le pli et plusieurs pièces en échange de sa célérité à rejoindre la jeune fille, non sans lui avoir demandé de lui décrire auparavant. Et ce fut ainsi, la tête plein de souvenirs d’Esclarmonde de Villerouge-Termenès, son seul et unique amour de jeunesse, superposés aux descriptions du coursier, que Chabert de Terme empaqueta ses maigres effets pour quitter la grange angevine et gagner le Limousin.
_________________
Illona
Une espèce d’euphorie la porte depuis la découverte des lettres écrites par sa mère. Impatience physique, elle n’a que peu dormi ces dernières nuits, son esprit bouillonnant la rendant par moment plus gauche encore qu’elle ne se sentait dans ce corps adolescent qu’elle a tant de mal à apprivoiser.

Assise sur une marche devant la maison, elle écoute d’une oreille distraite la nature s’éveiller sur ses terres tout en grignotant une large tartine de pain frais recouverte d’une épaisse tranche de terrine de lapin. Au loin retentissent les brames rauques des cerfs dans la forêt qui étouffent presque le chant matinal d’un coq plus proche. La jeune fille engloutit sa dernière bouchée de pain sous les premiers rayons d’un soleil encore hésitant, puis se lève et s’étire avant d’épousseter les miettes sur ses vêtements.

Rien dans ses gestes ne trahit l’agitation qui domine ses pensées à ce moment précis. Ce n’est que lorsque le cavalier déboule dans le tonitruant fracas des sabots sur le chemin de pierres que son attention revient la réalité. Le front plissé, elle le détaille lorsqu’il s’approche plus avant, presque méfiante quand elle cherche du regard la pioche abandonnée à l’entrée la veille. Et ce n’est pas sans un certain soupir de soulagement qu’elle accuse réception de la missive, se laissant presque choir littéralement à nouveau dans l’empressement dévolu à son âge.

Postérieur revenu sur la marche, elle déroule le pli et le dévore, s’en nourrit presque d’une seule tirade.
Déjà les mots résonnent dans la tête de l’adolescente et l’enivrent. Il ne l’a pas rejetée, ne l’a accusée d’aucun mal. Il a répondu… Et si la réponse gonfle sa poitrine d’un nouvel espoir, certains mots l’ont touchée plus que d’autres. Il a connu sa mère et surtout, il l’a aimée… Evidemment, l’idée d’en parler de vive voix la met mal à l’aise, forcément. Mais plutôt que de s’en faire sur l’instant pour ce détail, elle se relève d’un bond, faisant signe au messager de ne pas partir, et court à l’intérieur pour rédiger au plus vite une réponse.

L’écriture est plus nerveuse que pour son premier courrier, signe évident de l’empressement qui l’anime.


Citation:
Messire de Terme,

Je vous remercie grandement de la promptitude avec laquelle vous m’avez répondu.
Aussi, vais-je m’employer à montrer la même rapidité.

Si je puis confesser sans mal le trouble dans lequel je me trouve depuis la lecture de ces lettres et les révélations que j’y trouvais, je n’osais croire encore qu’il pourrait me rester même l’espoir d’un avenir autre que celui, gris et morne, de l’existence solitaire qui est mienne depuis la disparition de ma famille.

Comment dès lors ne pas envisager ce voyage pour vous trouver, puisque je fis moi-même cet audacieux premier pas afin de vous connaître ?
Je quitterais la Champagne où mon père avait acquis quelques terres exploitables dès ma prochaine récolte ensilée et prendrais la route pour vous rejoindre.

Je ne sais encore si Dieu veillera sur mes pas, il me semble si éloigné parfois et d’avoir vu les horreurs dont les hommes sont capables j’en suis venue à craindre qu’il n’ait fini par se détourner de nous.

Qu’il vous garde toutefois, en pleine santé,

Illona.


Toujours aussi empressée, elle revient à la porte pour confier sa réponse au messager, lui glissant quelques écus supplémentaires ainsi qu’un sourire reconnaissant, avant de le regarder rebrousser chemin.
Un long soupir lui échappe alors. Ne s’est-elle pas trop dévoilée dans sa réponse ? Et s’il y voyait là quelque méprise… Elle peste intérieurement contre elle-même, sa crainte révélée de s’être montrée peut-être d’une fragilité inappropriée ou d’une nature versatile. Elle qui avait été temporairement apaisée, n’en est maintenant que plus déconcertée. Et elle n’avait osé avouer son mutisme à cet homme, ce père inconnu, de peur qu’il ne comprenne et la rejette, préférant remettre le problème à plus tard. Le cœur battant sourdement, elle empoigne d’une main ferme le manche solide de la pioche pour prendre la direction du champ à travailler. Rien ne vaut le travail pour se clarifier les idées, ou du moins les mettre en attente, plutôt que de se laisser envahir par ses craintes jusqu’à en être percluse.
Chabert
Alors qu’il avait plié bagages et sellé Ordalie plusieurs jours après envoyé la lettre, alors que la grange était rangée et n’attendait que sa propriétaire légitime, il fut arrêté sur la route par le pauvre coursier harassé de tant d’aller-retour, un cheval à moitié crevé sous lui. Un sourire échappa au Bonhomme, se remémorant la ténacité d’Esclarmonde qu’elle avait sans faillir transmis à sa fille. Le brave homme fut récompensé avec la promesse d’une nuit grassement payée à l’auberge de Saumur, et le cathare prit la route au plus vite, quittant l’Anjou qui avait été le théatre de retrouvailles agréables pour rejoindre un Limousin aux promesses incertaines mais non moins délectables.

Il ne s’arrêta sur la route que pour permettre à sa monture de s’abreuver et se nourrir, préférant quant à lui un jeun qu’il n’avait pas pratiqué depuis longtemps, désirant par là, purifier son corps en même temps que son âme pour ne pas apparaître au plus mal devant celle qu’il ne doutait pas de pouvoir appeler sa progéniture. En chemin, il rencontra de pauvres hères affamés à qui il offrit sa bourse gardant par devers lui, quelques pièces, assez du moins pour se nourrir sur la route. Arrivé à Poitiers, il chercha un relais de poste disposant d’un pigeonnier, et plus encore d’un pigeon connaissant le chemin jusqu’en Champagne.

Le soir même, la missive quitta Poitiers pour rejoindre Troyes.

Citation:
A Illona, fille d'Esclarmonde de Villerouge-Termenès,

Tes mots me peinent. Te savoir si loin et ne pouvoir te réconforter comme je devrais le faire me navrent. Ne perds pas espoir, ce n’est pas Dieu qui a voulu que nous souffrions sur cette terre, Dieu n’est qu’amour et nous avait voulu anges. Le responsable, c’est le Diable, mais prends ton mal en patience, nous aurons gain de cause un jour, et nous retrouverons notre place auprès du Très-Haut, et lui retournera au Néant.

Quand tu liras ces mots, je serai certainement aux alentours de Limoges. Arrange toi alors pour trouver un pigeon qui en connaisse la route, je m’installerai dans l’hôtellerie la plus connue en t’attendant.

Que Dieu te conduise à bonne fin,

C. de Terme.


Quant à lui ? Comme il l’avait promis, il reprit la route pour gagner le Limousin au plus vite, couché sur l’encolure d’Ordalie quand le sommeil venait, mangeant en selle pour économiser des minutes qu’il estimait vitales. Et les jours approchaient où il rencontrerait bientôt sa descendance, la chose n’avait de cesse de le laisser songeur, béat comme devait l’être tout homme, tout noble, fier de transmettre son sang, dévasté comme l’était tout bon homme, d’avoir emprisonné sur une terre de douleurs une âme innocente.
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