Afficher le menu
Information and comments (0)

Info:
Unfortunately no additional information has been added for this RP.

[RP] Auxerre – Un retour

Ingeburge
Ils avaient troqué le roulis provoqué par la houle ballotant la nef pour le bercement des voitures et des montures. Ils avaient ensuite fait route vers Auxerre, depuis Orléans, en passant par la Champagne. Ingeburge aurait préféré pousser jusqu'à Cosne avec cette caraque de guerre qui avait été sa demeure durant des jours et des jours dont le nom sonnait comme une déclaration, ou plutôt, alimentait celle qui avait eu lieu près d'un an et demi plus tôt. A ses yeux, il eût été bien plus pratique de faire escale à Cosne et d'y laisser le bateau. De là, ils auraient pu se rendre à Donzy, sur ses terres, à quelque cinq lieues à l'est et y prendre du repos. Ils n'y seraient vraisemblablement pas restés très longtemps, le cœur de la vie bourguignonne de la Danoise se trouvant plus au nord, dans l'Auxerrois, mais oui, c'eût été plus pratique, sans compter que c'était en Bourgogne. Cependant, pour des raisons qu'elle ne chercha pas à connaître, le comte du Tournel choisit de laisser son navire à Orléans et ils furent donc contraints d'achever un périple maritime commencé trois semaines plus tôt par la route. Ils arriveraient donc à Auxerre puisqu'il n'était pas question de passer par le Berry, que c'était de toute façon le but final et qu'emprunter la route champenoise constituait un trajet moins long – et plus sûr – que s'il avait été décidé de se diriger vers Sancerre.

Des billets étaient partis en conséquence pour préparer l'arrivée des voyageurs au long cours, vers Auxerre donc, mais aussi vers Villefargeau, seigneurie vassale située à moins de deux lieues à l'ouest de la cité auxerroise. A dire vrai, si Ingeburge savait fort bien que le comte du Tournel avait décidé de prendre ses quartiers bourguignons là où elle se trouverait, elle ignorait tout à fait le plan du reste de la troupe et il valait mieux anticiper et faire préparer plusieurs demeures, en divers endroits, pour satisfaire aux envies de chacun. On verrait bien une fois arrivés. Et elle était heureuse au final de ce choix du port orléanais qui lui resterait certainement inexpliqué, n'étant pas portée à forcer les confidences et se satisfaisant d'ignorer certaines décisions de l'Euphor, ressentant déjà suffisamment de pression de la part de celui-ci par ailleurs. Il lui tardait de revoir Auxerre, son havre, son repos, son cocon malgré son implantation en plein cœur d'une cité animée. Là, enfin, elle serait juste la maîtresse des lieux, elle serait celle qu'elle était quand il ne s'agissait pas de paraître aux yeux du monde, elle serait libérée des contraintes et elle serait à l'abri de tous et de tout, l'endroit n'étant pas de ceux que l'on force aisément et elle-même mettant toutes les chances de son côté pour ne pas être importunée. Et il lui faudrait bien cette paix, cette quiétude, cette paisible énergie pour faire face à ce qu'elle pressentait être l'épreuve la plus douloureuse et la plus décisive de son existence.

Ainsi donc se passa pour Ingeburge la fin de ce voyage, elle se plongeait toute dans la délicieuse et apaisante perspective de revoir chez elle non sans essayer de deviner qui ferait quoi et de penser qu'il serait tout de même plus convenant que le comte du Tournel allât loger à Villefargeau. Car il était clair qu'il ne résiderait pas au château; cela, non. Ne s'estimait-elle déjà point suffisamment perdue en acceptant des attentions qu'elle ne cherchait pas à provoquer, en ne luttant plus que mollement contre l'envahissante et brûlante inclinaison du Phœnix et en ayant accepté que celui-ci l'accompagnât? L'accueillir sous son toit, en ces conditions, serait le pinacle de la perdition et sa vertu souffrait à cette seule idée. Il serait de toute façon aisé de l'écarter sans trop le froisser ou lui rappeler les principes qu'elle avait et qui lui l'irritait tant. Le castel d'Auxerre était sis en pleine ville et était de fait de dimensions réduites bien que très honorables. L'essentiel des pièces était au seul usage de celle qui le possédait et cela, l'Euphor pourrait s'en rendre compte et conclure qu'effectivement, il ne pouvait s'y loger. Enfin. Les dispositions prises permettraient, elle l'espérait en tous les cas, de répondre aux besoins et demandes de ses compagnons d'expédition, et elle avait demandé à ce que tant de lieux divers fussent préparés qu'elle eût pu inviter davantage de monde encore. Mieux valait cependant prévoir large que réduit.

Orléans quitté, ils se dirigèrent donc vers la Champagne. Depuis le départ de Montpellier, elle avait plusieurs fois caressé l'idée de se rendre à Dourdan puisqu'ils traverseraient, d'une manière ou d'une autre, l'Orléanais et cette idée avait été rendue plus prégnante quand elle avait compris qu'ils emprunteraient la route de Montargis. Qu'était une vingtaine de lieues quand on avait vogué à travers la Méditerranée, longeant la côte catalane, se faufilant entre les îles Baléares, franchissant le détroit de Gibraltar pour contourner la péninsule ibérique puis suivre les côtes lusitaniennes? Qu'était encore une vingtaine de lieues quand on avait caboté dans les eaux gasconnes, guyennaises, poitevines pour atteindre l'embouchure d'une Loire remontée en un temps record? L'idée pourtant resta à l'état d'hypothèse, elle ne s'en ouvrit point, se demandant pourtant si Actarius y avait songé puisque c'était à lui qu'elle avait formulé la proposition de se rendre dans la capitale de l'Hurepoix; elle en rougissait encore. Courtenay dépassé, l'on poussa jusqu'à l'Yonne qui serait le repère, le fil conducteur de la fin du périple. Et la descente commença à travers le Pays d'Othe, sur la rive gauche du fleuve sur laquelle était d'ailleurs sises Auxerre. L'on atteignit ainsi les terres de Joigny désormais tenues par l'époux de la Favara avant de quitter le Jovinien et de passer enfin en Bourgogne, en Auxerrois même, quand Migennes placée à la confluence de l'Yonne et de l'Armançon se montra. Traverser le premier menait droit aux terres de Seignelay, sur la rive droite; mais l'on continua toujours, inexorablement, vers le sud. L'on traversa Charmoy, l'on poussa jusqu'à Appoigny où se dressait, superbe, le château de Régennes repris par les Bourguignons aux Anglais environ trente ans auparavant. Moins d'une lieue encore, et ce serait Auxerre.

La cité apparut enfin, ceinturée de son rempart et Ingeburge pourtant barricadée dans son coche le perçut. Comment? Ce devait être l'allure qui s'était alentie sans pourtant perdre en enthousiasme, c'était peut-être ce frémissement qui la prenait toute. Prudemment, elle écarta un peu le ridelet qui masquait l'ouverture de la portière et elle reconnut ainsi le Clos de la Chaînette, son vignoble citadin dont on tirait un vin de qualité destiné aux invités prestigieux. Le convoi roulait au pas désormais et l'on franchit une première porte avant d'atteindre au nord de l'enceinte la Porte Saint-Simon. Les formalités remplies, la rue Saint-Siméon fut gagnée. Sur la gauche s'ouvrait celle de Saint-Germain, débouchant sur l'abbaye du même nom et l'église Saint-Loup; sur la droite, c'était Notre-Dame-là-de-hors qui dressait ses flèches. S'enfonçant davantage vers le centre de la cité, le cortège fut contraint de progresser à allure modérée. Cette arrivée contrastait avec la dernière qui avait vu revenir la duchesse d'Auxerre au début de l'été, en cette occasion, la nouvelle avait été diffusée dans tout le pays et il avait été délicat d'avancer tant la presse avait été grande. Cette fois-ci, rien de tel, Ingeburge avait tenu à une arrivée discrète. Mais était-ce vraiment possible au vu de l'importance du train et de la qualité de certaines des personnes le composant? Il y eut donc des habitants pour saluer le retour de leur dame et réclamer d'elle qu'elle se montrât au moins un peu. Une fois l'église Saint-Renobert dépassée, il fallut encore monter quand la voie menant au château fut atteinte et le messager partit en éclaireur quand Migennes avait été dépassée avait suivi les ordres donnés : fermer provisoirement la rue par la garde ducale afin que nul ne pût gagner les abords du château. Les voitures et montures enfin s'immobilisèrent, le castel urbain dominant la ville depuis son promontoire avait été atteint, la Tour Gaillarde, massive, en marquait le seul point d'accès. Seuls les voyageurs entreraient dans la cour trop petite pour accueillir tant de coches, chariots et chevaux.

Frissonnante, La duchesse d'Auxerre mit pied à terre, tenant son chat entre ses bras. Le lourd portail de bois avait été ouvert quand depuis le châtelet l'on avait aperçu les arrivants. Des consignes tombaient et de voir et entendre les Morvandiaux s'activer et s'interpeler de leur accent particulier assurèrent à Ingeburge qu'elle était bel et bien de retour chez elle. Cela lui fut confirmé quand entrée dans la cour, dans un raffut de tous les diables, ses deux dogues allemands au poil noir de bleu luisant s'en vinrent japper autour d'elle. Ses gens heureux de la voir eux aussi s'approchaient, tous ceux qui étaient restés à demeure, ceux qui avaient été du séjour en Languedoc mais qui avaient dû rentrer en Bourgogne faute de place suffisante sur une caraque qui était avant tout un bateau pour guerroyer et non pour caboter insouciamment. Les chiens aboyaient toujours et elle tâcha de les calmer :

— Freki, Geri, wartet*.
Et elle continua ainsi, s'adressant à eux en allemand, leur demandant si c'était elle ou le chat qu'ils venaient ainsi fêter. Le félin, d'un air blasé, ignorait superbement les deux canidés et eut bientôt des velléités d'indépendance. Ingeburge le laissa sauter de ses bras et Faunus fila pour y grimper jusqu'à l'arbre de justice planté face au portail, un orme sans âge qui sous l'assaut de l'automne avait vu sa verte ramée se parer d'or et d'écarlate. Derrière l'arbre, se dressait l'église privée des ducs d'Auxerre; à sa gauche, les écuries surmontées de deux étages de communs; à sa droite le logis principal.

Les chiens ne s'intéressèrent pas au manège de la boule de poils tigrés mais continuèrent à tourner autour de leur maîtresse. Celle-ci, amusée, leur concéda que c'était bien elle qui était la destinataire de tous ces honneurs bruyants et elle flatta leur museau imposant où brillaient des crocs pointus et redoutables pour qui y égarerait sa main. Les siennes, gantées, ne risquaient rien et non grâce à cette protection de peau qui ne pesait pas lourd face aux puissantes mâchoires mais parce qu'ils la connaissaient bien, lui ayant été offerts par son défunt époux alors qu'ils étaient encore des chiots. Et que c'était bon de se pencher ainsi pour caresser ses animaux avec une tendre vigueur, que c'était bon d'écouter les domestiques et tous les membres de sa mesnie lui demander de ses nouvelles; elle eût pu y passer la journée malgré la fatigue. Mais elle n'était pas seule, elle avait des invités à accueillir et se tournant vers eux, elle leur dit simplement :

— Entrons donc, une collation et une bonne flambée nous attendent dans la grande salle.

Geri et Freki ayant anticipé son mouvement la précédèrent vers le logis. Les yeux grands ouverts, la Danoise pénétra sa résidence pour emprunter aussitôt l'escalier à colimaçon menant à l'Aula Magna qui occupait la quasi totalité du premier niveau. Légère, elle gravit les marches et atteignit rapidement l'étage. Là, sur le seuil de la grande salle dont la porte massive avait été largement ouverte, elle s'arrêta un instant, la poitrine écrasée par l'émotion, afin de contempler la vaste pièce qui comme d'autres signes avant lui indiquait qu'elle était bel et bien chez elle. En sus de la riche cathèdre ducale poussée contre le mur faisant face à l'huis et des dressoirs, bibliothèques et coffres qui s'alignaient contre les longues parois s'étirant en longueur qui constituaient l'ameublement ordinaire, avait été installée une table sur tréteaux disparaissant sous une nappe immaculée. Des sièges avaient été installés de part et d'autre et hanaps, gobelets, carafes, cruchons, pains, pâtés, chaussons à la viande, fruits et confiseries posés dessus. Mais il y avait du monde derrière elle et elle se reprit, pénétrant plus avant dans la salle. Des valets, parfaitement stylés, attendaient et l'un d'eux vint débarrasser la duchesse de son manteau et de ses gants. Celle-ci se dirigea tout aussitôt vers la cheminée monumentale et s'arrêta devant l'aquamanile afin de se laver les mains. Ses ablutions achevées, elle se rendit ensuite sans façon à la table et prit place à la seule extrémité occupée par une chaire ouvragée qui lui était réservée. Les dogues, eux, s'étaient couchés devant le foyer, calmes désormais. A ses invités, elle dit :
— Je vous en prie, prenez place et n'hésitez pas à faire savoir ce que vous voulez.
Les domestiques présents se tenaient prêts à répondre à la moindre demande.

Un homme qui avait tout d'un secrétaire se présenta alors lesté d'un coffret à la vue duquel la Prinzessin grimaça quelque peu. Aimablement mais fermement, elle écarta de quelques mots le scribe, lui indiquant qu'elle verrait plus tard pour le courrier, le lendemain sûrement. In petto, elle repoussait même l'ouverture et l'examen des lettres arrivées en son absence à plusieurs jours, voulant profiter bien à fond de son retour sur ses terres. Et le moyen pour y parvenir? Ne rien faire du tout, pour quelque temps. L'homme repartit, elle enjoignit ses commensaux de se sustenter :

— Bien, mangeons, et dites-moi quels sont vos projets. J'ai fait préparer diverses demeures dans les entours, certaines point trop éloignées du castel, dans la rue même que nous avons empruntée en dernier. Pour ceux qu'ils ne feront qu'une courte halte à Auxerre, des chevaux frais ont été ramenés de mes écuries d'Augy il y a quelques heures.

Au dehors, l'on voyait désormais flotter à la cime du castel les armes de von Ahlefeldt-Oldenbourg en lieu et place de celles d'Auxerre qui étaient restées hissées tout le temps de l'absence de la dame des lieux; il était en effet de coutume de montrer les armes personnelles de celle-ci quand elle se trouvait à demeure. Ainsi tous dans la cité et au-delà, dans le pays, seraient informés du retour de leur duchesse.

-------
[* Attendez]
_________________
Actarius
Les négociations orléanaises avaient été menées rapidement. Soucieux du devenir de son fleuron des mers, baptisé en l'honneur de sa future hôte, le Phénix avait pris toutes les précautions, pesé le pour et le contre longuement tout en remontant la Loire. Il avait, après maintes tergiversations, opté pour le port d'Orléans, malgré l'offre intéressante et la compréhension de la Duchesse de Bourgogne. La sécurité de sa caraque et l'inquiétude née de différentes rumeurs avaient fini par avoir raison de son indécision. Quant à la question pécuniaire, il ne l'avait considérée qu'avec l'intérêt relatif d'un puissant et riche seigneur, peu connu pour son sens aiguisé de l'économie. Et pour cause, il en était parfaitement dépourvu. Fort heureusement pour lui, il bénéficiait d'un intendant génial. Sa fortune, il la lui devait et c'était en toute confiance qu'il lui avait abandonné la gestion courante de ses terres languedociennes durant son absence. L'accostage s'était déroulé sans accroc, l'arrivée à quai, puis la mise en cale sèche également grâce à la prévenance de Sa Grasce de Valbois, qui avait prouvé en la matière savoir exceller aussi bien sur la lice que dans l'exercice de ses fonctions. Soulagé, il avait laissé une majeure partie de l'équipage dans une auberge louée à cet effet. Seuls l'accompagneraient ses gardes et suivants tournelois, en tout et pour tout une bonne vingtaine de personnes, dont la grande majorité arborait une arme au fourreau. Le cortège ne s'était guère attardé dans le Domaine Royal. La Prinzessin devait avoir grande hâte de retrouver son "chez elle" et le Comte partageait cette relative impatience, tant il lui tardait de découvrir le refuge décrit avec tant de coeur dans une missive.

Chaudement vêtu et recouvert d'une grande pelisse noire au col de fourrure, maintenue par une chaînette en or, le Phénix chevauchait en avant-garde. Comme de coutume, il avait privilégié la selle au confort d'une voiture. Une inclinaison naturelle à opter pour le plein air quel que pussent réserver les caprices du temps. Les températures avaient chuté depuis quelques jours, mais le Mendois ne se laissait pas effrayer par si peu. Le Gévaudan connaissait lui aussi de rudes automnes, des hivers impitoyables et plus particulièrement dans les parages des Cévennes. L'Euphor semblait d'excellente humeur. Le sourire naissant, l'œil brillant, il se montrait volontiers volubile, se laissait happer dans les différentes conversations sans rechigner et en lançait quelques-unes. Parmi les personnes qui voyageaient dans sa proximité, se trouvait la jeune protégée. L'orage paraissait lointain, la menace d'un nouveau coup de tonnerre n'en restait pas moins prégnante. En cela résidait, l'unique voile d'ombre sur le Coeur d'Oc. Un tissu léger, anecdotique, du moins en apparence, car rien dans les inflexions de sa voix, dans l'éclat de ses iris, dans ses gestes ou son attitude générale ne trahissait l'inquiétude. Il lui était d'autant plus aisé de ne pas la dévoiler que son esprit s'accrochait à la plus heureuse des perspectives: découvrir son aimée en un lieu où elle serait à son aise, découvrir ses gens, découvrir son Castel, ses champs, ses jardins, ses bois, découvrir un peu plus d'elle et partager peut-être des moments aussi précieux que ceux évoqués dans une missive.

Ainsi, dès lors qu'on lui signifia la proximité du duché auxerrois, son corps s'éveilla littéralement du léger engourdissement provoqué par la cavalcade. Rien n'échappa à ses sens aiguisés qui déjà diffusaient en lui l'agréable et intense impression de se rapprocher d'elle plus que jamais auparavant. Car, dans sa logique de l'impalpable, le Comte croyait fermement qu'un lieu pouvait en dire très long sur son propriétaire. Ses terres du Tournel témoignaient avec une vigueur quasi indécente de son essence, de ses traits de caractère, de ce qu'il était. Son esprit aveuglé n'imaginait pas un seul instant qu'il en serait autrement en Bourgogne, là où la Fleur de ténèbres s'était épanouie. Malgré la saison, il devina sans peine la gestion remarquable de ce fief. L'état des routes, l'apparence des fermes, l'ambiance apaisante des hameaux, les sourires sur les moues, les salutations et attitudes respectueuses face à l'imposant cortège, tout transpirait le bien-vivre. La Prinzessin se révélait sous un jour nouveau, bien que pressenti, celui d'une Suzeraine remarquable. L'idéal se matérialisait un peu plus tandis que son regard fut happé par les murailles de la cité, le coeur de ses terres, le centre de son monde. Le passage de la Porte Saint-Simon, la remontée vers le promontoire où s'élevait la forteresse l'emplirent d'une profonde émotion, celle de l'homme heureux, celle de l'homme qui imaginait la foule de sensations parcourant l'esprit de la Duchesse. Le retour chez soi, le retour d'exil, il le savait pour l'avoir éprouvé, avait quelque chose d'incomparable. Un mélange de soulagement, d'excitation, d'une joie simple, complète, pimentée par l'appréhension d'y amener un être cher et de voir sur lui l'effet de la découverte.

Cet effet n'avait pas métamorphosé le Phénix déjà souriant et épris de ces terres, mais il avait instillé une forme de plénitude dans sa manière d'être adoucie, trahie par des gestes moins tranchés, moins martiaux et cette attitude contemplative. Il avait allumé la curiosité respectueuses dans ses iris de Sienne, qui s'attachèrent à la maîtresse des lieux pour ne plus la quitter. Ces dernières rayonnèrent lorsque se déroula devant elles la scène des retrouvailles, elles la suivirent dans la demeure, au fil des marches de l'escalier, elles assistèrent à ce petit temps d'arrêt au seuil de la vaste pièce. Elle semblait si légère, paraissait encore plus belle que d'habitude au point qu'il lui coûtait de devoir partager sa présence avec les autres, au point qu'il n'aspirait qu'à s'asseoir près d'elle et à l'écouter parler de ses terres. Ce moment, il l'espérait tant que la conviction qu'il viendrait naquit. Si bien qu'il ne s'assombrit pas à la perspective de ne pouvoir s'abandonner à une tendre caresse, qu'il lui aurait volontiers prodigué pour signifier son bonheur d'être là avec elle. Il prit place, motivé par l'invitation de son hôte de charme. Il se fit apporter du vin et fut le premier à se prêter à la conversation initiée.


J'ai dans l'espoir, Votre Altesse, dès lors que nous nous serons installés là où vous le souhaitez, de pouvoir dérober quotidiennement quelques-unes de vos heures pour que vous me fassiez découvrir vos terres.

Direct, sans doute un peu trop, mais le mystère de ses sentiments pour elle, n'avait pu qu'être levé pour les personnes présentes, qui toutes connaissaient le nom de sa caraque. Le secret lui pesait, il ne le gardait plus qu'avec peine. Sans doute se montrerait-elle offusquée par ce projet dévoilé, tout en ignorant qu'il en existait un autre. Celui-ci cependant il le tairait et ne le révélerait qu'au moment propice là où il s'était pris d'espérer qu'ils bâtissent des souvenirs communs. Dans un endroit vierge encore qu'ils avaient caressé sur le trajet et qu'il ne désirait découvrir qu'avec elle. Le Mendois frémit imperceptiblement à cette perspective, sentant déjà un soupçon d'anxiété l'étreindre. Il la chassa d'une gorgée et de nouvelles paroles prononcées avec la chaleur de son accent, avec la douceur grave de sa voix.

Si cela vous agrée, bien entendu.
_________________
See the RP information
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)