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[RP] Désenchantée, mais pas perdue. Part.II

Charlyelle
Il faisait grand froid et le flambeau mystérieux de la nuit éclairait un ciel pur et répandait un demi-jour très voluptueux. Par intervalles, elle admirait la beauté du paysage, le calme de la nuit, le silence touchant de la nature. Frissonnante malgré qu'elle soit bien couverte, sous une brise matinale et balsamique. Bourgogne. Sémur. Là voila arrivée.

Et c'est auberge qui parait sur lequel elle jette son dévolu. Une élévation, tenant lieu de perron, régnait sur toute la longueur de la bâtisse, et un balcon suspendu en ombrageait le rez-de-chaussée. Quoiqu'enneigée, la cour était propre. Les murs, bien lavés au savon, brillaient comme des glaces. Les portes et les fenêtres étaient garnies en bronze et en argent et semblaient dénoter d'un ordre merveilleux. Les chemins étaient sablés de sable fin et brillant ; tous les monticules étaient soignés comme des gâteaux d’amandes ; les arbres étaient taillés en charmille ; les buissons, en vase de fleurs, en colonne ou en éventail. La création semblait avoir passé sous l'outil du menuisier.
Rien n’avait gardé sa forme naturelle. Il y avait un pont sur lequel n’auraient pu se croiser deux poules, des fleurs en acier, des Chinois en bois, se cachant du soleil d’été sous des parasols au mois d’octobre ; un chasseur ajustant un canard qui, depuis vingt ans, n’avait pas eu l’idée de s’envoler du lac.

L'aubergiste, une femme dont on croirait le physique taillé dans celui d'une petite poupée blonde, s'empressa de montrer sa chambre à cette cliente étrangère. Elle lui montre fièrement les tapis qu'elle a brodé, les dentelles séculaires, les couvertures de brocart, et elle jouit franchement de la stupéfaction de la brune à la vue du lit. Et il n'avait rien à envier à celui que possédait la Pallikare en sa roulotte. Celle-ci était d'ailleurs sous la garde d'Ilug auquel elle n'avait donné aucun signe de vie.
Des piles de coussins, qui allaient toujours en diminuant, semblaient monter à l’immortalité en une double pyramide ; un baldaquin, en dentelles pareilles aux nuages descendait du ciel jusqu’à terre, et une couverture de satin blanc s’étendait sur l’immense surface du lit, pareille, pour la couleur, à la surface d’une mer d’azur pendant les beaux jours de l’été. Charlyelle courrait certainement le risque d'être noyée dans les plumes et les duvets.

Demain avait cessé d'exister pour l'Ecossaise qui vivait au jour le jour. Il voulait qu'elle soit discrète, rien de tel que de descendre dans une auberge huppée pour ce faire. Bien plus discret que la roulotte de toute manière. Et il lui était aisé à la Dentellière de se fondre au sein du lieu.
Et pour ce faire, elle portait comme vesture une tunique simple de cachemire à longues manches évasées, échancrée à la grecque dans sa partie supérieure, serrée et plissée à la taille, libre de toute autre étreinte, par une ceinture de maroquin rouge, brodée d’or, incrustée de rubis, d’opales, de turquoises, et s’agrafant par un splendide camée représentant le portrait de sa mère. Unique bijou avec sa fibule que Charlyelle possède, ayant appartenu à sa figure maternelle. Jamais passé ne fut à la fois plus sombre et plus éblouissant que celui de l'Ecossaise. Et du plus loin qu'elle s'en souvient, elle se revoit, enfant de trois ou quatre ans, vêtue d'une robe de toile, marchant pieds nus par une route de montagne, au milieu des brouillards et de la pluie de son Shetland natal, s'attachant de sa petite main glacée à celle d'Ilug. Parfois, elle voudrait être toujours restée cette enfant qui ignorait encore, qui était son père.
Elle s’enveloppait comme d’un manteau d’un large châle indien, aux couleurs changeantes et à fleurs d’or, qui plus d’une fois, dans quelques soirées intimes et riantes avec Ilug au coin du feu, lui avait servi à danser ce pas du châle qu’elle avait inventé et qu'elle ne dansait que très rarement.

Elle hoche la tête en écoutant l'aubergiste. Ces derniers temps, elle n'a pas connu le moelleux d'une couche, préférant dormir à la belle étoile, même sous un froid glacial. Par prudence, elle a refusé qu'Ilug déplace la roulotte et a même renvoyé le vieil homme sur Montpellier.
Aussi, dans l'immédiat, elle n'a envie que d'une chose. Et il faut croire que sans avoir besoin de demander, ses voeux sont exaucés. Un baquet de bois et des seaux d'eau fumante qui lui passent sous le nez, portés par quelques meschines. Une autre est déjà en train d'aligner plusieurs flacons sur une table. Un carré de toile est déplié et des morceaux de cire verte les rejoignent. A l'odeur, l'experte qu'elle est sait déjà qu'il s'agit de savon le plus fin qui puisse se trouver hors de Castille, à base d'huile d'olive et de lait d'amande. Une autre sortait également un peigne, une brosse et quelques autres fioles d'un coffre de bois.

Tout en conservant son calme en surface, elle inspira vivement entre ses dents. C'est qu'elle avait l'impression d'être mise devant le fait accompli alors qu'elle n'avait pas encore décidé si elle descendrait icelle ou pas. Elle n'avait pas conscience de la boue et de la poussière qui recouvrait sa peau par endroit. Vestiges d'une galopade effrennée dans quelques larges flaques. Mince comme un roseau, elle montrait dans son maintien une sorte de grâce inconsciente qui rappellait la légèreté et la joliesse d'un jeune saule. Et elle carra les épaules, comme pour se préparer à une défense. Puis elle se détendit légèrement, se fendit d'un sourire et d'un hochement de tête, accepta l'invitation de l'aubergiste.

Un instant plus tard, tout ce petit monde s'en était évaporé des lieux, et elle se retrouvait seule devant un baquet fumant...

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Charlyelle
« Les meilleurs remèdes contre la dépression sont des bonnes actions et des bains chauds. »
-Dodie Smith-


***

La lune commençait à palir, et elle n'avait pas encore soupé, plongée qu'elle était dans son bain. L'eau dans le cuvier était encore chaude, et la brune se revigorait lentement. Elle inspira à fond, prenant garde de rester sur le bout d'étoffe que l'aubergiste avait fait déployé sur le sol. Elle dénoua son jupon et le laissa choir à ses pieds. Puis triturant les liens qui fermaient son encolure, elle souffla pour chasser les cheveux qui lui tombaient dans les yeux. Elle défit en toute hâte les lacets qui nouaient les deux pans de sa tunique et se plongea, avec un soupir de délice, dans le baquet d'eau fumante. Puis elle se mit à fredonner une ballade, tout en commençant à frictionner sa nuque et ses épaules. Munie d'une petite brosse en ivoire, c'est ensuite à ses bras qu'elle s'attaque.
Trempant le coin d'un linge dans l'eau, elle le savonne, se lavant le visage et l'essuyant de toute trace de savon qui pouvaient subsister sur ses joues. Toujours fredonnante, elle se penche en avant pour s'en prendre à ses cheveux. Elle commence à enduire ses longues mèches d'une crème onctueuse et odorante dont elle a le secret, et qu'elle fabrique elle-même. La jeune femme ne tarde pas à s'absorber dans cette tâche, massant son crâne du bout des doigts, défaisant les noeuds qui emmêlaient ses cheveux, rince et renouvelle l'opération par deux fois.
Chaque fois, le parfum d'aubépine qui montait des mèches mouillées, devenait plus entêtant. Les boucles fines s'enroulaient autour de ses doigts, de plus en plus soyeuses.
Son décrassage enfin achevé, elle se vida plusieurs cruches d'eau claire.

Un moment plus tard, glissée dans une houppelande aux tons bleutées, dont elle avait noué les rubans autour de son cou gracile, elle humait les relents de venaison, paupières closes et narines frémissantes, qui montaient jusqu'à elle.

Commençant par tresser ses cheveux, elle finit par défaire l'oeuvre naissante, les laissant battre l'air et se glisser en cascades sur ses épaules.

Elle n'aimait pas le monde, néanmoins, elle pénétra dans la grand-salle de l'auberge, la tête haute, sur la défensive. Le tohu-bohu qui régnait partout la soulagea quelque peu : nul ne lui prêtait la moindre attention.
Cela lui donna le courage de regarder autour d'elle. L'immense salle était pleine à craquer, des gens allaient et venaient, des conversations s'entrecroisaient en tous sens.
Ce joyeux vacarme eut le don de la détourner un instant de ses tracas.
De longues tables bien astiquées avaient été dressées d'un bout à l'autre. La plupart des personnes qui y étaient assises avaient déjà commencé à rompre leur jeûne. Quelle différence avec la morne routine de ses repas solitaires ! Souvent des tranches de pain blanc qu'elle accompagnait de son porridge natal. Mais nullement cela ici, alors qu'elle découvre, empilé devant elle, une moitié de chapon, une part de tourte au mouton, un fromage blanc et moelleux recouvert d'une sauce onctueuse et sur un petit plat, une pomme cuite et une pêche aux épices.
Haussement de sourcils amusés de la brune à qui il lui semble alors entendre la voix d'Ilug lui parvenir, tel un chuchotis dans les esgourdes.

Une dame mange par petites bouchées, afin de ne pas avoir les joues gonflées comme un écureuil faisant ses provisions pour l'hiver.

C'est qu'elle n'est pas devant son feu de bois ici et la Dentellière se doit de se tenir. Et préserver son anonymat tout en ne se faisant pas remarquer par des manières qui ne soient trop rustres, acquises lors du temps de ses longues chevauchées hydriques.
Après tout, autant profiter du jour qui passe, puisqu'elle ignore si demain elle sera toujours en vie. Surtout sur cette terre là.

C'est aussi repue qu'un chaton gavé de crème, chassant du doigt une goutte de vin tombée sur la table, qu'elle se plonge dans quelque réflexion et quémandant un nécessaire d'écriture, elle ne tarde pas à se pencher studieusement sur un vélin, apportant réponse à l'un de ses parchemins en attente.

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Charlyelle
Elle prend son temps pour profiter de la sérénité des lieux. La jeune femme ne l'avouera pas, mais elle a passé une sale journée la veille. Entre interrogations et inquiétudes qui germaient dans son esprit torturé. Il avait dit arriver hier et elle n'avait vu personne. Renseignement discrètement pris auprès d'un ancien de la maison comme elle, l'Ecossaise avait au moins pu être tranquille de ce côté là : il ne s'était déjà pas pris son armée dans la tronche.

Du haut des remparts où elle est montée cette nuit, les embruns guettent. Elle s'est fort chaudement vêtue, c'est qu'elle a l'habitude de ces longues veillées. Entre les vieilles pierres et elle, c'est une longue histoire d'amour. Au loin, les embruns décèlent un cheval qui se la joue "poor lonesome horse" sur la crête en face.
A la lueur des braseros, elle regarde le jour se lever. Et les premières silhouettes qui passent le gué interpellent ses embruns aiguisés.
Et soudain. Les tripes qui se tordaient d'inquiétude malgré elle, s'apaisent. Naturellement, une longue goulée d'air glaciale est avalée alors qu'elle se colle les reins contre l'un des moellons là haut. Elle l'a vu. Il est là le brun. De sa démarche nonchalante et fière qui n'appartient qu'à lui, le fidèle frison est du voyage aussi. Prudemment, elle joue avec l'obscurité. C'est qu'elle a beau avoir l'avantage du terrain d'observation, il lui suffit de lever les yeux lui aussi pour s'apercevoir que les remparts ne sont pas désertés.

Et il est assez alerte pour la reconnaitre la haut.

Fin sourire vient égayer les ourlées. Car c'est bien la première fois depuis tout ce temps qu'ils se connaissent, qu'elle s'accorde le droit de se sentir heureuse qu'il soit là. Pour une fois, ce n'est pas la raison qui parle, mais c'est le ventre qui s'éveille et elle aurait juré que son iceberg de coeur venait de rater un battement alors que les embrumées se repaissaient sans vergogne de la silhouette masculine de l'accorte brun.

Les bottes glissent sur les pierres gelées. Le pas est assuré, lorsqu'elle descend paisiblement les marches et s'engouffre dans l'une des ruelles qui la mènera dans l'une des tavernes du village.

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