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[RP] Votre premier entretien d'embauche

Nizam
    [Avant les négociations, la présentation.]

    Le seize, le seize... Ça ne doit pas être loin, pourquoi donc la rousse avait-elle choisi la demeure située à l'autre extrémité de la ville ?
    Nizam était à Limoges depuis ce matin, deux jours d'un si éprouvant voyage où les seules mauvaises rencontres qu'il fit furent des ronces mal placées sur son chemin. Définitivement, il n'avait aucune affinité avec les plantes. Ses bottes, fraîchement usées, foulèrent enfin les pavés de la cité, cette capitale que l'on disait plus animée que toutes les autres villes du comté réunies, pour le guérétois habitué à deux uniques tavernes le défi n'était pas trop difficile à relever. Le blond écoula ses premières heures à flâner à travers le marché, les rues, les ruelles qui lui faisaient tourner à plusieurs reprises le cou. N'ayant croisé que quelques badauds à Bourganeuf, l'animation qu'il voyait aujourd'hui l'avait rassuré, adieu auberge éternellement vide. Le centre présentait une vie bouillonnante et riche. Surtout riche. Note cérébrale : penser à chercher les endroits malfamés dans cette cité au sang bleu, y'en a forcément, cela fait bien partie des lieux obligatoires d'une ville accomplie.

    Lui, épaules recouvertes d'une cape bon marché, là pour le protéger du froid vous piquant déjà la peau en cette fin d'automne, il ne brillait pas avec sa dizaine d'écus en poche, ni son bâton et ce qu'il trainait dans sa besace de cuir. Il avait une drôle d'impression dans certains quartiers; Limoges, la ville avec trois nobles pour un gueux ? Vous m'étonnez qu'il y ait de l'argent à se faire dans le coin... D'ailleurs n'était-il pas venu pour cela ? Fauché par ses dernières acquisitions et en sérieux manque d'actions concrètes, le balafré avait saisi l'opportunité que lui offrait une jeune rouquine. Il avait apprécié la correspondance qui s'en était suivie, la nobliote à qui il avait indirectement proposé ses services armés l'avait encore surpris depuis leur rencontre "marine" lors de la joute verbale. Sa méfiance naturelle l'avait forcé à tempérer son engouement, malgré les descriptions de Mahelya, il ne savait pas précisément dans quoi il s'embarquait, si ce n'était que le salaire à la clé avait l'air suffisant pour qu'il se déplace. Sans parler de toutes les conditions intéressantes que lui avait énoncé la tribun, logé, nourri, la monture offerte - l'étalon, non les lunettes, pour ceux qui ne suivent pas - et puis d'la brioche quoi... Elle lui avait parlé dernièrement des talents de sa cuisinière, en bon gourmet - comprenez goinffre - qu'il était il ne pouvait résister davantage.
    Il devra certainement revoir les modalités du "contrat" le liant à la noble, que les choses conviennent à l'employeur et à l'employé, à lui de négocier sa paie et de mettre les pendules sur les "i", comme dirait l'autre, concernant leur affaire. Rendra-t-elle cela officiel au point de lui donner un parchemin à signer ? Se contentera-t-elle de la parole du balafré ? Sera-t-elle seulement là lorsqu'il se présentera à l'adresse qu'elle lui avait donnée dans ses lettres ?

    Foutue adresse à ce propos, il tournait en rond. Blond certes, mais d'habitude son sens de l'orientation lui permettait de s'en sortir. Mettant un terme à son vagabondage citadin, il demanda sans grande amabilité, celle-ci ayant disparu avec sa patience, la direction exacte pour trouver le seize rue de la Justice - quelle ironie le nom de cette rue...


    - A gauche et t'as qu'à r'monter mon gars, c'est au bout !

    Étouffant un léger merci dans sa barbe claire et mal taillée, il suivit l'indication, constatant alors toute la longueur de ladite rue. Elle n'aurait pas pu choisir plus en retrait, hein ? Ce n'était pas comme s'il était venu pour visiter toutes les impasses de la ville. Le râleur arriva enfin à destination, faisant face à une bâtisse plus imposante. Il la fixa un court instant, souffla, et s'avança pour donner quelques coups contre la solide porte. Nizam attendit, pas d'inquiétudes, pas de craintes non... Juste son nez et ses extrémités entrain de geler avec ce temps humide, qu'on lui ouvre !
Harchi
[16 rue de la Justice - 1er étage]

- Harchi, peux-tu ouvrir s'il te plait ? La voix cristalline se manifestait de la porte ouvert du bureau. Encore en train de travailler. Une évidence.
- Je suis déjà en route Filia. Attendions-nous de la visite ce jour ?
- Je n'ai pas souvenir ... Peut être du tissu que j'aurai commandé ...

Les pas lourds du vieux soldats faisaient craquer les planches de bois de l'escalier. En passant devant la porte de la cuisine, une délicieuse odeur de ragout de mouton, vint chatouiller ses narines, et pour un peu l'aurait presque détourné de sa mission de première à savoir ouvrir la porte d'entrée. C'est que le temps c'était rafraichi ses derniers jours. Et bien qu'a priori, ils n'attendaient personne, ce n'était certes pas une raison pour laisser le visiteur se transformer en statue de glace. Les pieds trainant un peu, la large main calleuse parvint néanmoins, au bout de quelques secondes, jusqu'à la poignée. Et après un tour de clef, la lourde porte de chêne s'ouvrit sur un blond balafré pas vraiment inquiet. Ce qui surprit le vieux soldat, il faut bien l'avouer. Harchi, du haut de ses presque quarante printemps et bien que le temps avait gravé ses marque sur son visage buriné, avait encore une belle carrure qui laissait aisément deviner sa carrière dans les armes, surtout lorsqu'elle était savamment soulignée par les vêtements simples, mais de belle fabrication qu'il portait ce jour. Noirs, ils étaient noir, chemises, braies, bas et botte. D'un noir très profond qui ne passait pas au fil des lavages. Ses yeux opalescent possédaient encore cette vigueur, toujours alerte à scruter les moindre détails du plus banal, au plus inattendu. Seul vraiment ses cheveux blanc, indiquait qu'à présent il était un vieillard. Et cette apparence ne le gênait guère, au contraire. Personne ne se méfiait d'un vieux. Et cela lui avait bien servit lorsqu'il s'était mis au service d'Aldraien... ais ceci était un autre histoire...
Revenons à nos moutons.
Le vieux soldat imposant qu'il était encore, se retrouvait donc face à face avec un étranger pas du tout impressionné lui.
Qu'est-ce que c'est que cette fantaisie ? pensa-t-il.


- Bonjour ... Je peux ...


le visiteur impromptu allait subir un véritable interrogatoire lorsque, au même instant, des pas plus légers se firent entendre, dévalant les escaliers, alors que la toute petite voix fluette prononçait :

- A moins que ... Si si Harchi ...Attends ! Sois gentil ! J'attendais de ...

Harchi s'écarta d'un pas sur le côté, pour laisser le soin à sa Filia(*) de définir s'il s'agissait de la personne qu'elle attendait.

________________
(*) fille en latin
Mahelya
... de la Visite ...

Fin de la phrase alors que le délicat petit pied de cuir recouvert, se posait enfin sur le palier du rez-de-chaussée. Instant précis qu'avait choisi le vieux soldat pour lui permettre de s'aviser de qui la visitait. Mauvaise idée ... Car c'est également l'instant précis où elle manqua de se retrouver les quatre fers en l'air.
Dans sa précipitation, l’Étincelle avait omis de se tenir à la rambarde des escaliers. Bertille ayant lustré le pavé, la chausse dévia de sa trajectoire initiale, entrainant malheureusement la Roussotte avec elle. Heureusement, la glissade fut évitée par un savant réflexe de la Frêle. Mais les apparences, elles, n'étaient pas sauves ! Nizam dut être ravi d'assister à l'une de ces situations où Mahelya paraissait complétement ridicule. Et dire qu'Harchi voyant son déséquilibre n'avait même pas levé le petit doigts pour la retenir ... Pfff ! Son orgueil venait tout de même d'en pendre un petit coup. De quoi avait-elle l'air pour son futur employé si elle ne tenait même pas debout. tssss ... et re pffff ...

Le rouge vint à pigmenter les joues aux tâches de rousseurs, alors que la jeune fille tentait désespérément de retrouver un semblant de contenance. C'était pas gagné, pourvu que personne ne se moqua d'elle. Blessée dans sa fierté, elle garda -pour un temps du moins- les yeux rivés sur le sol. S'étant redressée, la Flammèche lissait à présent le tissus émeraude de sa robe au corset parsemé de perle, un joli gallon doré définissant le pourtour de son décolleté qui avait sans doute bien changé depuis qu'elle avait jouté avec Nizam. Bien qu'encore Frêle, quelques formes voluptueuse épousaient à présent la silhouette de la jeune Fille, en faisant doucement une femme. Une chrysalide devenant papillon ... la plus belle des transformations ... Toujours le regard baissé, une fois la robe parfaite, elle replaça délicatement dans son ses longues boucles rousses qui venaient mourir au creux de ses reins. De son apparence, si une chose n'avait pas changé, c'était bien sa chevelure ... Toujours libre ... Signe qu'elle n'était toujours pas mariée, ni promise. Bref...

Après cette rapide remise en l'état, la petite Flamme s'avança doucement, levant doucement ses sinoples sur la silhouette du balafré.


- Nizam ... Bonjour ... Veuillez entrer, je vous prie ... Le temps est hivernal dehors ... On ne parle pas de ce qu'il vient de se passer ... On ne fait aucun commentaire ... Et on continue comme si de rien était ... d'accord ? ... Ou pas ...

Invitant Nizam à pénétrer la bâtisse de pierre, elle lui indiqua la porte à gauche, celle qui ouvrait sur le salon, aux meubles raffinés, pourtant rien d'ostentatoire, pas de dorure, ni de bibelots, juste de meubles de qualité. Petite description :
Au fond, donnant sur le jardin, une table pour les grands repas sur lequel dort un chandelier d'étain, entourée de jolies chaises tapissées, au plafond un vaste lustre en forme de roue, possède douze grosses bougies toutes allumées à cet instant, éclairant la pièce en plus des deux fenêtres (une sur rue et une sur cour).
Donnant sur la rue, un petit salon, quatre fauteuils moelleux, une table basse au centre et contre le murs porteur, une cheminée ni trop petite, ni trop grande, dans laquelle ronflait un feu rougeoyant et chaleureux, à côté de la porte par laquelle, ils venaient de pénétrait se trouvait une large bibliothèque très bien garnie, seul folie de la Flammèche. Dans toutes la pièces, de larges tapisseries et de lourds rideaux décoraient les murs de pierre.


- Allez-y entrez ... je vous rejoins tout de suite. Puis se tournant vers Harchi. Harchi, peux-tu demander à Bertille si elle peut nous apporter de quoi grignoter et de quoi égayer et enchanter nos palais.... Hum ça sent drôlement bon ... qu'est-ce qu'elle fait ? du ragout de mouton ? ... j'ai hâte d'être à ce soir !

Laissant le Valet exécuter les ordres, à son tour elle entra dans le salon.

- Je vous en prie prenez place. désignant de la main blanche un fauteuil bien moelleux.
_________________
Nizam
    [Faire bonne impression ... Essayer]

    Tête en l'air. Il détaillait une poutre, une fenêtre, un piaf séchant ses ailes. Tout avait de l'intérêt lorsqu'on le forçait à ne rien faire, si ce n'était attendre dans ce cas précis. Comment serait l'intérieur ? Il avait compris que la jeune fille était d'une famille aisée, du moins pas de simples seigneurs, il pourra le confirmer ou non selon ce qu'il verra. Le balafré devrait être bien placé pour ne pas se fier à ses premières impressions, mais il jugeait rapidement chaque personne croisant son chemin, une opinion, une analyse qu'il peaufinait ensuite si nécessaire. Plus d'informations il aura, mieux ce sera, ce n'était pas seulement sa curiosité qui était en jeu, mais une vieille habitude le poussant à assurer ses arrières où qu'il aille.
    Le blond avait peu d'appréhensions sur "l'entretien" qui allait bientôt se dérouler, affichant une confiance totale en ses futurs talents de garde, s'habituer à une nouvelle vie en cette capitale sera certainement plus déconcertant. Nizam s'intéressait désormais à une discrète fissure dans le mur, dessinant un "z" de plusieurs centimètres, quand il entendit la porte grincer et s'ouvrir. Devant lui se présentait un homme marqué par le temps mais sans doute aux épaules solides, vêtu, telle une ombre, entièrement de noir - pas un fil qui dépasse. Seules teintes de blanc dans ses cheveux et sa barbe grisonnante venaient souligner son âge. Parmi les rides, le regard vint se poser sur l'étranger, ce dernier avait déjà deviné l'identité du vieil homme. Harchi. La rouquine lui en avait brièvement dit un mot, valet, ancien soldat... Soldat. Nizam avait répondu qu'il avait hâte de le recontrer, Mahelya n'avait peut-être pas saisi l'ironie dans la phrase, heureusement. En raison de quelques expériences passées, il était le premier à critiquer ceux portant l'uniforme. Il remarqua la surprise sur le visage du vieux et s'en amusa. « T'inquiète l'ancien, j'viens pas pour saccager l'endroit » une pensée traversant son esprit... Avait-on oublier sa venue ? A peine avait-il ouvert la bouche pour répondre à la salutation qu'on entendit derrière des pas semblant descendre bruyamment un escalier. Nizam aperçut l'entrée, et enfin la jolie rousse qui fit une acrobatie digne des plus grands équilibristes - on va dire ça - avant de venir se présenter. Un sourire narquois à la commissure de ses lèvres, il laissa une parole s'échapper.


    - Je n'ose pas vous imaginer sur un navire.

    Léger hochement de tête, il était là pour se faire embaucher, pas pour embarrasser davantage la noble dont les joues devenaient aussi flamboyantes que ses boucles - l'étaient-elles autant dans son souvenir ? Ou autre chose avait changé ?

    - Bonjour Mahelya, et Harchi je suppose ?

    Se tournant vers l'homme, il accepta sans plus attendre l'invitation et passa la porte. Il observa vaguement ce qui l'entourait, ce qu'il nota en premier fut la chaleur et la tendre odeur de viande flottant dans l'air, drôle d'habitat pour quiconque n'ayant pas mis les pieds dans une maison au cadre relativement familial depuis... Evitons d'y songer. Sa besace sur l'épaule, il suivit le geste de la Frêle jusqu'au salon.
    Vint alors le premier problème. Nizam sortait des chemins, et de quelques heures en ville, les traces sur ses bottes de cuir témoignaient de la pluie, la boue et autres joyeusetés que l'on trouvait aisément à l'extérieur, espérons que celui ou celle faisant le parquet ne lui en tiendrait pas rigueur. Il épousseta nonchalament ses vêtements qu'il portait depuis son départ - voyage oblige, seule sa chemise noire était du jour, et c'était un effort - défaisant la cape, il voulut dompter des mèches blondes hérissées par le vent mais abandonna en scrutant la pièce qui s'offrait à lui. Si ce n'était évidemment pas un palais, la demeure n'en était pas moins bien décorée, sobrement certes mais qui battait alors ce qu'il avait pu voir ailleurs. Il avait à peine entrevu les autres salles, le lustre rayonnant, la large table de bois, et ce salon qui attirerait n'importe qui à profiter de l'un de ces fauteuils, le calme troublé uniquement par le crépitement des braises. « Mais qu'est-ce que tu fais là, Niz ? ». A l'instant des souvenirs auraient pu faire surface, pourtant enterré par les années ils restèrent silencieux, tout comme le jeune balafré.

    Mahelya le rejoignit, reprenant un fin sourire à la vue de la rouquine il arrêta un court moment son regard sur la robe. Peut-être aurait-il dû soigner son apparence... Peut-être. Il exécuta le premier ordre, et posa ses affaires à côté de lui.


    - Content de vous revoir. J'espère que vous avez bien reçu ma dernière lettre, un messager devrait être aussi efficace qu'un pigeon, si on n'lui propose pas tout une brioche pour s'remettre de sa course.

    Elle comprendra l'allusion. Ah la brioche ! Penser à demander sa part de brioche.
    Nizam ne voyait pas précisément comment aborder le sujet de l'embauche, si cela ne tenait qu'à lui, il attaquerait directement sur avantage et revenu mais...


    - Bon, je crois que nous avons d'jà fixé plusieurs choses par écrit, mais pas tous les détails, s'pas ?

    Sous-entendu, si tu veux faire le tour de ce qui est bon à savoir, ce qui est marqué en petit caractère à la fin d'un contrat, les choses à faire, ne pas faire - et le salaire ! - ou même poser des questions au blond, c'est maintenant.
Harchi
Un hochement de tête sec, "oui Harchi c'est moi et alors ?" Et le regard opalescent scrutait l'étranger, il allait lui emboiter le pas, direction le salon, mais apparemment sa Filia (*) avait d'autres projets pour lui, loin d'eux. La Barbe ! Ça ne le ravissait pas le vieux Soldat, mais alors pas du tout ! Depuis quand un inconnu se pointait ici, et pouvait-il avoir une entrevue avec sa petite Rousse en tête à tête ? Que mijotait-elle ? Que faisait-il ici ? Et plus important encore, pourquoi ne pouvait-il pas assister au rendez-vous ? Qu'est-ce que cela cachait ?
Protecteur le vieux reître ? Sans doute, il faut dire que sa protégée s'épanouissait de jour en jour et lui, ombre parmi les ombres, lui suivant toujours de prés avait remarqué les regards des hommes changer sur son passage. Leurs regards n'étaient plus tendre, émerveillés devant une enfant à l'intelligence exceptionnelle, non, leurs yeux étaient devenus gourmands, envieux et il s'avait que leurs mains les démangeait de pourvoir se poser sur elle. Elle ne grandissait plus vraiment mais devenait de jour en jour la magnifique femme qu'il avait prédite. Sa gorge s'était arrondie, sa taille affinée et ses hanches quelques peu élargies. Les traits de son visage avaient perdu la rondeur de l'enfance, pour devenir harmonieux et délicats. Même sa chevelure était plus brillante.
Horrible possessivité qui grondait dans ses entrailles. Cet instinct de protection exacerbé qui le poussait à ne plus la laisser Seule, jamais et surtout en présence d'un homme. Il la voyait toujours comme une enfant…
Loin de le rassuré, Il remarqua le sourire amusé faire tressaillir les lèvres de la Rouquine à la remarques sur les bateaux. Quelles était donc cette folie ? Se pouvait-il que … ? Non …? Mais pas le temps de poser sa question, ni même d'interroger du regard que la Petit Flamme avait disparue de son champs de vision, rejoignant le balafré du coté du salon.

Bougon, inquiet, les pieds trainant au sol, il ouvrit la porte de droite, celle qui donnait sur la cuisine : le Domaine de Bertille. Une délicieuse odeur, jusque là simplement suggérée, s'échappa dans le vestibule. Pourtant le parfum alléchant n'apaisa pas le vieux guerrier qui posa ses opales sur les formes généreuses de la Cuisinière. On soupçonnera toujours une aventure entre les deux domestiques pourtant rien ne vint le prouver. Bref…


- Mahélya demande à ce qu'on la serve dans le salon. Vin et amuses-bouches.
- C'est qu'nous avons d'la visite ?
Bertille avait les yeux qui brillait et le sourire ravieaccroché à ses lèvres. Les visites elle adorait ça elle.
- Oui !
- Tiens dont, et c'est qui ? J'le connais ? T'crois qu'il rest'ra avec nous pour l'Dîner ?
- J'espère pas ! Et non un inconnu !
Le ton était sec. Mais le vieux soldat n'était qu'un grognon aussi ne supprima-t-il pas le sourire de la cuisinière.
- Bah pour'quoi t'es-t'y pas avec elle ?
- Parce que !
- Ah… Bon j'nai pour quelques s'condes ! t'surveilles l'ragout ? Si l'sauce boue, il s'ra foutu ! Fais gaffe ! Sinon t'l'aura ton coup d'rouleau à pâtiss'rie !
* C'est ça restes donc avec ta mauvaise humeur ! *
- Gnia gnia gnia…

Mais Bertille était déjà sortie avec un plateau garni de brioche de gâteau sec et d'un peu de nougat, deux verres et une bouteilles de vin paillé, le meilleur sur le marché : le vin Limousin ! Laissant le pauvre Harchi seul en compagnie de ses démons. La Petite Flamme attendait cette visite apparemment et pourquoi Diable ne l'avait-elle pas mis au courant…


_________________
(*) Fille en latin
Mahelya
[Pendant ce temps dans le salon.]

L'esquisse d'un sourire flottait sur les lèvres de la Rouquine, cette visite du balafré lui faisait bien plaisir, inutile de le nier. La tête se pencha sur le coté aux premières paroles "privées" du Blond, laissant glisser sur son épaule une longue mèche de boucles rousses. Ah la brioche ... Tout un souvenir ... Pauvre Pigeon ... Au moins s'était-il régalé.
L'entretien commençait apparemment et il était amusant de voir que c'était le futur employé qui en était l'instigateur.


- Effectivement j'ai bien reçu la visite de votre messager, mais je n'ai pas jugé utile de vous répondre par écrit puisque vous étiez déjà arrivé à Limoges. Et lui n'a pas eu de Brioche. Non non.

Le sourire s'élargit avant que l’Étincelle ne plonge ses sinoples dans le regard du Balafré. * Et oui je te sonde mon ami. *. C'est l'instant précis que choisi Bertille pour rentrer dans le salon, les bras encombrés d'un plateau bien garni. La Petite Flamme prit le temps de détailler les mets présentés : des gâteaux, du nougat et de la Brioche ! Ouf ! Bertille, installant les assiettes sur la tables basse, sourit à la Rouquine avant de rapporter son regard sombre sur le mystérieux visiteur. Curieuse ! Ce qu'il y avait de drôle avec La Bert' c'est que contrairement à Harchi, elle, elle n'espérait et ne désirait que l'instant où sa petite maîtresse serait épousée, toujours là, à l'inciter à regarder et approcher les hommes.
Nizam du plaire physiquement à la cuisinière puisque sans rien dire, alors qu'elle emplissait les godets de vin paillé, elle se retourna vers Mahelya et lui adressa un clin d’œil avec un discret pouce levé, avant de tout reposer sur la table et de s’éclipser à pas feutrer en prenant soin de fermer la porte de la pièce derrière elle. Comme si elle espérait qu'il se passe quelques choses entre le blond et la Rousse...
Il n'en fallut pas plus pour que les joues aux tâches de rousseurs se pigmentent de rouge et que l'esprit de la Roussotte s'interroge sur ce qu'avait bien pu imaginer Bertille. * Mon Dieu qu'allait penser Nizam ? Non non on n'essaie pas de me caser tout le temps ! Non non on a pas non plus envie de tuer les hommes qui me rendent visite.... C'est que du bonheur non ? *
Mouais ... C'était pas le plus facile des entretiens d'embauche ! Ça c'était certain ! la prochaine fois, elle fera en sorte de se retrouver seule dans la maison. Ça sera plus tranquille.
Baissant un peu son jolie minois, elle présenta de la main l'assiette de brioche et ne put s'empêcher de murmurer amusée.


- Voyez que je vous en avais gardé. Je vous en prie, servez-vous.

* Oui oui sers-toi et laisse moi le temps de retrouver un peu contenance parce que j'ai comme qui dirait l'impression que la cuisinière pense et va raconter n'importe quoi à tout le Village. Ca va être sympa ... *
Doucement le regard semblable à la robe qu'elle portait se releva pour se sceller à nouveau à leurs miroirs. Le sourire qui avait disparu à mesure que son visage devenait coquelicot, revint timidement sur ses lèvres purpurines.


- Avant de commencer ... Hum l'entretien ... Je voulais juste éclaircir un point avec vous. Celui-ci étant ... Harchi et Bertille... Ce ne sont pas des domestiques ... enfin si... mais... mais je ne les considère pas comme ça ... Si vous travaillez ici, il faudra les respecter autant que moi ... euh plus que moi même, évitez les blagues maritimes avec Harchi ... Il est un peu ... comment dire ... Soupe au lait en ce moment.

Les paroles s'étaient envolées dans le silence du salon, à peine perturbées par un feu qui crépitait joyeusement dans la cheminée, tandis que les mains de la Frêle se frottaient, signe d'une légère gêne, d'un embarras certain d'évoquer ce sujet. Pourquoi me demanderez-vous ? Et bien parce que ... Ceci est une autre histoire.
Bref revenons à l'instant présent.
Il y eu encore un petit blanc où rien ne fut prononcé de la part de la Flammèche. Elle observait son probable nouveau garde. D'une elle devait s'assurer qu'il était crédible de l'engager comme garde. De deux, c'était l'un de ses regards typiques où l'on avait l'impression qu'elle essayer de sonder la personne en face d'elle au plus profond. Cela marchait bien avec son frère Kylian. Avait-elle bien fait d'accorder sa confiance à Nizam, blond à peine connu et juste croisé lors d'une joute ? Ça seul l'avenir le lui dirait, pourtant en cette instant l'Incandescente n'était absolument pas soucieuse. Raclement de gorge avant de reprendre.


- Il y a bien quelques détails qui n'ont pas encore été abordés, je vous l'accorde, notamment votre salaire. Avant de le fixer, j'aimerai connaître vos prétentions à vous. N'ayez crainte et dites moi. Je vous écoutes.


Là, L’Étincelle reprenait son costume de femme d'affaires. Oubliées les mimiques et bouilles enfantines. Envolée la maladresse. Place à l'assurance et la confiance en soi résultat des longues heures d'enseignement et de punition chez les moines. Son éducation n'avait pas était strict, mais rigide, comme toute enfant noble elle avait été façonnée pour rentrer dans un moule. Les Moines avaient simplement oubliée que l'on ne domestique pas le feu. Cependant quelques vestiges de cette éducation détestée, faisaient malgré elle surface parfois. Parfois ça la gênait : les relations humaines n'avait pas beaucoup été étudiée. Parfois au contraire cela lui rendrait service : les chiffres et les investissement la passionnaient, et la rigueur dont elle pouvait faire preuve parfois lui octroyait de la crédibilité.
Peu de gens la connaissaenit ainsi. Peu de gens savaient comment elle s'en sortait seule avec deux champs, un atelier et deux domestiques, plus une jeune amie à nourrir... Mais cela les intéressait-il vraiment ?
Droite, dos confortablement calé, mains croisées posées délicatement sur ses genoux, le regard sinople ne flanchait pas et observait Nizam. * Allez parle, il y a de grande chance pour que tu obtiennes ce que tu demandes. *


- Une fois cette question réglée, nous consignerons par écrit tout ce qui a été déjà dit. Puis vous me ferez un inventaire de ce que vous aimez et ne supportez pas chez autrui et j'en ferai de même. La bonne entente et la confiance sont de mise pour travailler cher moi. Ensuite, je vous montrerai votre pur sang, l'endroit où vous logerez, vous ferez visiter la maison puisque ici, aux yeux de tous, vous serez un garde, d'ailleurs je définirai d'avantage votre travail. Et enfin vous présenterez officiellement à Harchi et Bertille... Oh Et à Miel aussi, ma protégée, donc la votre également.

La voix était assurée, nullement tremblante, cela devait dénoter avec la petite maladroite de tout à l'heure.

_________________
Nizam
    Assis négligemment, dos courbé et avant-bras posés sur les cuisses, il adopta une stature droite dès qu'il remarqua celle de Mahelya. Si la jeune femme avait certainement reçu une éducation rigoureuse, Nizam avait depuis longtemps adapté la sienne à son train de vie. Comme rassuré par l'épisode de la brioche, il répondit au sourire et affronta les deux émeraudes qui le fixaient depuis son entrée, habitué du regard des autres, cette soudaine mise en observation l'intriguait légèrement. Il devait prouver qu'elle n'avait rien à craindre de lui, qu'il avait les épaules pour ce travail ? Il était jeune, mais il avait déjà d'la carrure ! Gagner la confiance de la rouquine sera un avantage à l'avenir, il le savait pertinemment, non pas seulement pour rendre sa fonction de garde plus aisée, mais il était toujours important de se rapprocher des gens qui exerçaient un minimum d'influence. Pouvoir et argent, le monde ne change pas.
    Pourtant dire qu'il pensait uniquement à cela en s'engageant ici serait faux, ce qui l'avait poussé était évidemment le tempérament de la rousse et la façon dont elle traitait autrui, à commencer par les domestiques ! D'ailleurs Nizam vit enfin Bertille qui était à l'origine - et l'ignorait - de toute cette histoire de brioche. Il la salua d'un simple hochement de tête et lui offrit un sourire, de ceux que l'on donnait lorsque l'on voulait bien paraître, s'il travaille ici avoir le reste du personnel dans sa poche ne serait pas mal. Il regarda ensuite les mets apportés, retenant ses yeux de trop s'ouvrir, elle nous faisait Noël avant l'heure ? Il ne comprit pas exactement, ou eut peur de comprendre, le discret échange entre la cuisinière et Mahelya, le fait est que les pommettes de la Frêle se coloraient à nouveau. Cette fois-ci, c'est un fin rictus qui vint se loger sur ses lèvres, il y avait sans doute erreur sur la personne, ou sa future "patronne" ne devait pas recevoir beaucoup de visites, d'hommes du moins. A quoi pensait Bertille ? Il devait y avoir un fossé entre la rousse et le blond. Le Balafré ressemblait-il vraiment à un prétendant pour une jeune noble, à ce point désespérée ? Le sujet sera à aborder un jour, non l'apparence de Nizam, mais si la Rouquine avait possible fiancé, en bon garde, qu'il sache quels hommes il pouvait laisser s'approcher - et plus si affinité - sans crainte d'elle. Amusé par la gêne de Mahelya, il ne se fit pas prier pour saisir une part de brioche.


    - J'vous en veux plus pour c'pigeon.

    Et lui de goûter un premier morceau, puis un deuxième, puis... Mais la discussion reprit, avant d'attaquer les choses sérieuses, et qu'il ne perde toute crédibilité à s'envoyer la viennoiserie en entière, elle lui parla respect. Allons, il n'y avait pas plus respectueux que lui. Il ne pensait pas avoir de problème avec Bertille si elle était aussi douée à la cuisine, Harchi cependant... Il avait un pressentiment, ce sera plus difficile de le convaincre de sa "bonne" foi, surtout si l'homme faisait office de figure paternelle. Le titiller un peu sera distrayant.

    - Une arête qu'est mal passée ?

    Bon, d'accord, on ne va pas énerver tout de suite le vieil homme. Il toussota, et avala un autre bout de brioche.

    - Aucun problème, tant que le respect est partagé.

    Silence prolongé. Quelques secondes où l'azur du visage entaillé dut une nouvelle fois rencontrer les sinoples, elle le jugeait, autant faire comme s'il n'avait rien à cacher, il soutint le regard. Il y avait quelque chose de surprenant chez l'Etincelle face à lui. A leur première rencontre, elle sortait de l'enfance et cela se voyait encore, Nizam lui avait en conséquence attribuer une certaine naïveté, mais il avait déjà dû revoir son opinion à la joute, et en faisait de même aujoud'hui. La réserve et le comportement qu'elle manifestait lui donnait impression de voir une femme gérant ses biens en toute indépendance. Un sourcil se releva lorsqu'elle lui demanda en quelque sorte son prix. Il avait eu le temps d'y songer en chemin, mais il s'attendait à ce qu'elle donne elle-même le salaire de départ. Qu'en savait-il ? C'était la première fois qu'il allait être au service d'une noble, il connaissait d'autres contrats, les combats, pas forcément les plus honnêtes, les armes, tout ce qui pouvait s'en suivre, cela suffisait-il pour devenir garde ? Il ne désobéissait pas tant qu'il avait sa bourse d'écus. Alors... Combien ?

    - Si j'ai bien compris, je serai nourri et logé à vos frais. Garde n'est pas sans risque, s'pas ? Alors le salaire devrait dépendre de mes déplacements avec vous. Jusqu'à combien pourriez-vous mettre afin qu'un homme risque sa vie pour la vôtre ?

    On ne faisait pas dans la demi-mesure. Il exagérait peut-être, Mahelya n'était pas non plus jeune fille à cacher, avec une horde de brigands sanguinaires à ses trousses, ou autre. Garde du corps, ça ne devait pas être si compliqué; il aurait dû lui demander combien sa mère payait ceux qu'elle lui envoyait.

    - A voir selon ce que vous attendez de moi, si je dois assurer chaque jour votre sécurité, où qu'vous alliez.

    Autrement dit la suivre dès qu'elle aurait l'idée de sortir de cette maison, une bonne entente serait certes préférable. Nizam la laissa terminer, il fut encore étonné par ses procédés, faire un inventaire de ce qu'il aime ou non ? Elle était sérieuse ? Ce sera son employé, en quoi serait-elle intéressée par ce qui déplait ou non au balafré ? Si ça pouvait=t lui faire plaisir, cela allait être amusant de faire la liste de tous les défauts que le blond avait rencontré chez l'Homme. Il acquiesça aux dernières informations, ce fameux pur sang qui risquait de changer sa vision des équidés et dont il avait récemment trouvé le nom. Faire le tour de la maison, pas de problèmes, présentation pour tout le monde... Miel ? Miel, la demi-portion qui l'accompagnait lors des joutes ? Sa protégée ? Celle de Nizam ? Il fixa Mahelya un instant, c't'une blague ? Il voyait déjà les réactions de la môme... La cohabitation allait être plus intéressante que prévu.

    - Ah ... D'accord. Alors pour revenir au salaire, par semaine, disons normale, entre 60 et 70 écus, avec une journée libre. Il augmentera si nous voyageons ou si vous prenez délibérément des risques.

    L'hésitation qu'il y avait eu quelques minutes plus tôt s'était également envolée. Joue donc Rouquine, tu as les négociations à lancer. Il jugeait bien s'en sortir avec le prix donné, voire très bien en comptant tout ce qu'il aura à sa disposition ici, inutile de lancer une somme exorbitante dès le début s'il tenait à se faire embaucher. Il restait un détail qui n'avait pas été abordé, ce détail qui faisait que son rôle de garde ne sera pas si ordinaire. Nizam se tourna vers la porte, si Bertille et Harchi épiaient leur conversation - ce qui était selon lui fort probable - le sujet devra être remis à une prochaine fois. Il regarda Mahelya et usa d'une voix plus posée.

    - Et concernant notre "affaire" ?
Harchi
[A ce moment dans la cuisine.]

- L'est pas laid ! l'balafré ! Même plutôt mignon. t'crois qu'c'est un prétendant pour l'môme ?
- Il n'y a pas intérêt ! Sinon je te jure qu'il ne ressors pas d'ici vivant
- Boudiou ! qu'tu peux être grognon quand tu t'y mets. T'sais bien qu'un jour elle s'mari'ra Hein ? Qu'elle va pas rester t'filia pour l'vie ? Qu'elle aura sa famille, et ses momes ? En plus t'as vu comme elle est tout'jolie ? Elle f'ra tourner des têtes soit en certain hein ? Elle va d'venir une femme aussi !
- Le plus tard possible !
- Harchi ! j'sais pas c'que t'as en c'moment ! Mais lâche-là un peu ! T'es trop sur s'dos ! Y t'arrive quoi ?
- Je ne sais pas. J'ai peur qu'il lui arrive du mal et qu'elle soit malheureuse. Tu sais bien que je ne suis plus tout jeune. Bientôt je ne serai plus là, je n'ai pas envie de la laisser affronter seule ce monde. Mais j'ai pas non plus envie de la laisser au premier venu ! Je sens que ma fin est proche, je suis déjà tellement âgé, et j'ai vu et vécu tellement de choses...
- Taratata ! 'rrête donc ton charabia ! t'disais pas ça hier.
Cette phrase est un indice mais comme personne ne l'entends, on ne pourra confirmer la relation. Même si elle en avait conscience car la vie était ainsi faite, Bertille détestait ses instants où il évoquait son possible trépas.

Bertille venait à peine de revenir, un large sourire greffé sur ses lèvres charnues. Oh pour sur, le Vieux soldat, la connaissait bien sa cuisinière qui n'espérait qu'une chose cuisiner au mariage de sa Rousse, ce que lui n'était pas pressé de voir arrivé. A cet instant, il doutait que le jeune blond soit un éventuel prétendant, encore moins un amant. Certes il avait passé une chemise propre, mais il était loin de tenir le rang de sa prunelle. Non non mais qui était-il vraiment ?
S'il avait été un autre, il ne se serait sans doute pas gêné pour écouter à la porte. Mais il était Harchi, Vieux soldat de métier, Vieil homme usé qui suivait Mahelya depuis sa naissance. Sa naissance justement ... Sans que Bertille ne le remarque, les opales d'Harchi laissèrent perler sur sa joue creusé par le temps, une larme rebelle. D'un revers de la main, sec, il la fit disparaître. Il ne pleurait jamais, depuis plusieurs années, depuis un drame, depuis cette nuit là, depuis 1447, journée où sa vie s'était arrêtée. Pourtant depuis les révélations au Baptême de Mahelya, les larmes se manifestaient de plus en plus souvent, incontrôlables, quand il avait le malheur de se laisser aller à penser ce qui aurait pu être différent. Bien évidement, un soldat ne pleure pas, il attendait donc d'être à l'abri des regards indiscrets pour laisser libre court à sa colère et à sa tristesse.
Si seulement il avait su ...
Si un jour elle savait ? ...
Il devait les prévenir ...

Retour à l'instant présent, hors de questions de se laisser tourmenter par de vieux démons. La priorité pour l'heure était de découvrir ce qu'il se tramait ici. M'enfin ... Pour se faire, il faudrait attendre que les deux sortent enfin du salon. Et espérer qu'ils veulent bien répondre à quelques questions. Et prier pour qu'ils disent la vérité ... Mouais, en fait il avait plus de chance de croiser une Licorne c'est ça ?
Mahelya
[Retour au Salon]

Le dos toujours droit, le regard déterminé, l'ombre d'un sourire sympathique à la commissure de ses lèvres purpurines, elle toise, elle scrute, elle attend patiemment qu'il arrête de tourner autour du pot pour qu'il lui donne un prix : son prix. Les doigts se croisent sur ses genoux. L'attente, la patience vertus d'une jeune flamme du monde. Bien entendu, la Rouquine n'était pas un lapin de trois semaines à peine sortit du terrier. Non malgré ses quatorze années, elle avait roulé sa bosse la Flammèche. C'est donc tout naturellement qu'elle avait pris grand soin de se renseigner avant cet entretien. A vrai dire, le jour même où elle avait proposé le travail à Nizam. Bloc-note et fusain en poche, oui l’Étincelle notait tout, elle était partie demander tout d'abord aux gardes de sa Mère. Les pauvres avaient pensé à un piège, une sorte de complot fille/mère, pour savoir s'ils se plaignaient de leurs rétributions, heureusement ils avaient finis par comprendre que ce n'était là que de simple question pour parfaire ses connaissances générales...
Ensuite, elle s'était rendue auprès d'Aldo, le garde de rose vêtu qui sévissait au Castel Comtal. Là, nul besoin de mentir pour obtenir les informations, juste rajouter des "O" a chaque fin de mots, pour que le garde étranger comprenne les questions posées, ah et danser la samba aussi, ça s'était juste un plus parce que ça lui faisait plaisir à Aldo…
Enfin, elle s'adressa aux gardes en faction, cette sorte de milice qui restait plantée à chaque porte de la ville.

De ses interrogatoires, de ses recherches elle avait obtenu une fourchette de prix. Mais tous l'avaient aussi informé qu'en cas de mission exceptionnelle, il y avait également une rétribution exceptionnelle, sous forme de prime. Fière des résultats obtenus, elle était donc rentrée chez elle et s'était enfermée toutes la nuit dans son bureau.
D'un coté, à l'encre noire, elle avait essayé de définir ce qu'elle attendait réellement de Nizam, de l'autre à l'encre bleue elle avait tenté d'établir un comparatif en répertoriant les points communs et les divergences entre ce que faisaient chaque jour les gardes de métier et ce que ferait le Balafré. Après de long moment de réflexion, le Frêle était enfin parvenu à un chiffre qui lui semblait correct à tout point de vue.
Ne restait plus qu'à savoir s'il collait avec les prétentions du Blond. Sens en alerte, Oreille aux garde-à-vous, Elle attendait don la réponse. Quoi ?! De 60 à 70 écus ??!!! M'enfin. Le Minois aux tâches de rousseur se baissa quelque peu, fixant un point imaginaire sur la pierre au sol. Ses longues boucles glissèrent alors contre ses épaules, semblables à un rideau cachant son expression au regard du Balafré. Sous sa chevelure apparaissait peu à peu un sourire satisfait. Mais point question de le rassurer tout de suite, lui savait jouer, elle aussi. C'est donc le visage toujours dissimulé qu'elle reprit la parole.


- Certes Garde n'est pas un métier de tout repos, et peut parfois s'avérer dangereux. Mais en vérité, je ne pense pas que vous soyer en extrême danger si vous assurez ma sécurité. Je ne suis pas une célébrité, pas même une personne importante. C'est surtout pour rassurer ma Mère que je vous engage, et aussi parce que, quitte à avoir un garde, je préfère en avoir un que j'ai choisi, plutôt qu'un que l'on m'impose.

*Voilà ça c'est fait ! Alors tu flippes un peu ou pas ? Non parce qu'on dirait bien, parti comme c'est parti que la Roussotte ne va peut-être pas te donner satisfaction.*
Doucement les sinoples se relevèrent jusqu'à s'accrocher à leurs homologues bleus et c'est un franc sourire que le Balafré eut loisir de découvrir sur le visage de Mahelya. Une main délicate, nonchalamment rapporta les longues mèches de feu dans le dos, avant de venir rejoindre sa consœur et d'à nouveau se mêler les doigts. Même position sérieuse. Si le sourire n'éclairait pas son visage, l'Etincelle aurait tout d'une statue marmoréenne.


- Ceci étant dis, je ne vous trouve pas très cher.

Et plouf, un pavé dans la marre… Voilà ce qui amusait depuis cinq bonnes minutes la petite chipie. Le sourire s'élargit et le sinople de ses yeux se teinte de malice avant de reprendre, la voix plus légère, avec un soupçon d'amusement.

- Bon, je cesse de m'amuser ! Laissez-moi vous exposer ce que j'avais en tête pour vous. Une fois que j'aurai fini, vous me direz si cela vous convient où non ?

La posture, bien que toujours droit, se fait légèrement plus décontractée. Nous ne sommes pas au monastère ici ! Non mais ! Et de nouveau les sinoples s'accrochent à leurs miroirs. * Je te sonde ! Mais vois aussi comme je te dis la vérité ! *

- Je pensais vous payer 80 écus par semaine, le gîte et le couvert étant déjà assurés, ensuite pour déplacement exceptionnel, ou évènement tout aussi incongru, une prime renforcerait ce salaire de départ. Prime à définir en fonction du temps et du risque encourut mais pouvant aller de 100 à 500 écus. A ce salaire en écus sonnant et trébuchants, qui je l'espère vous facilitera la vie, j'ajoute la litière de votre équidé ainsi que son avoine. Puisque je ne possède pas encore ma propre écurie, nos bestiaux sont en pension dans une taverne de la ville. Rassurez-vous d'ici au printemps cette situation devrait être revue. Vous auriez bien évidement le Dimanche de libre, et votre journée s’achèverait dès que je serai rentrée ici et me trouverais en présence d'Harchi. Il vous appartient de faire ce que bon vous semble de vos soirées disponibles.
Les tavernes à Limoges sont très accueillante.


Cette phrase fut ponctuée d'un clin d'oeil. Puis le débit de paroles reprit de plus belle.

- Concernant les repas, et autres collations. Ma Bertille étant une merveille, vous pourrez voir avec qu'elle pour qu'elle vous prépare de quoi grignoter en journée. Sinon les repas, sauf situation exceptionnelle, nous les prenons tous ensemble, dans la convivialité et la bonne humeur, - le silence m'angoisse - dès que Bertille nous informe que c'est prêt. Tout cela pour vous dire que l'heure peut varier d'un jour à l'autre. J'estime ne pas à avoir à définir une heure fixe, si nous voulons bien manger, il faut prendre son temps.
Quoi d'autre ... Hum à oui ... Votre logis est meublé, toute fois, ne connaissant pas vos besoins, si jamais vous vous apercevez qu'il vous manque quelque chose merci de m'en informer, et je remédierai à ce manquement dans les plus bref délais.


Au fur et à mesure que sa voix cristalline raisonnait dans le silence du salon, le buste de la jeune fille s'était avancé un peu, mais son regard n'avait pas lâché celui du blond. * Alors ? le marché t'intéresse ? *
Puis le silence tomba peu à peu, et l’Étincelle prit une grande inspiration avant de reprendre la parole. Un instant son regard dévia vers la porte du salon. Non … Jamais Bertille et Harchi n'écouteraient aux portes. Elle en était certaine.


- Concernant notre affaire, ce sera un forfait. 250 écus pour dix leçons! Rien de plus et rien de moins, c'est à prendre ou à laisser.

Alors ? Check ou pas ? Cette fois elle s'était tut pour de bon, guettant, espérant une réaction du Blond. A cette instant, hormis le nombres des années, elle n'avait plus rien d'une enfants, habituée qu'elle était à gérer son propre patrimoine depuis son "évasion" du monastère à l'age de six ans. Surdouée ? ... si peu ...
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Nizam
    Gagné. Finalement, cela payait bien de jouer les modestes. Il avait suivi attentivement la réponse de la Rouquine, et fit en sorte de cacher sa surprise lorsqu'elle réhaussa le prix donné. Il y avait quelque chose qui clochait dans la logique des négociations, mais il ne s'attarda pas plus dessus. Elle lui avait donné fausses impressions, dissimulée derrière ses mèches de feu et le faisait attendre pour lui offrir en définitif un salaire qui allait au delà de ses espérances. La nobliote avait les moyens ! Voilà qu'elle l'assaillait d'informations, tout ce qu'il retenu fut que sa vie ici serait bien plus aisée que sur les chemins, et avec un risque amoindri. Il se demanda si Mahelya ne craignait pas un jour l'escroquerie, à trop donner au premier venu elle attirerait vite des regards mal intentionnés, sans parler de ceux qui se posaient sur elle uniquement par le charme d'une féminité naissante. Nizam resta silencieux, le visage seulement marqué par l'apparition de cette ride du lion entre les deux sourcils froncés, moment de réflexion pour le Balafré. Ne déviant pas ses yeux des deux sinoples, il écouta jusqu'à la fin des explications. 80, voire 100 à 500, et les 250... Il aurait sérieusement dû se lancer plus tôt dans ce métier, en attendant de barouder sur les routes. Mahelya témoignait encore d'une assurance qu'il connaissait peu aux jeunes filles de son âge, elle avait pensé à tout ce dont il aurait besoin dans cette capitale, et même plus. Une courte minute s'écoula et deux simples mots scellèrent l'accord oralement.

    - Marché conclu.

    Check. Mais ce n'était que le début du contrat. Il se tourna davantage vers la rousse, la lueur de cynisme qui avait parfois tant de mal à le quitter venait de disparaître.

    - Je serai exclusivement à vos ordres, cela va de soit, mais j'attends toujours que vous définissiez précisément mon rôle, qu'il n'y ait pas de malentendu. La prime sera fixée avec nos deux accords, quant au reste, je n'ai rien à redire. Comme je vous l'ai écrit, je m'occuperai de ma monture avec ce que vous mettez à ma disposition; pareil pour le logement.
    Ma présence aux repas est souhaitée ou obligatoire ?


    Il préférait vérifier, cela ne le gênerait pas tant vu les talents manifestes de Bertille, mais par les années de vagabondage, il accordait peu d'importance au repas dit formel qui pouvait volontiers s'éterniser et où nul n'était pressé de finir son aile de poulet. Tenter de l'attacher à une table plus d'une heure avec une enfilade de plats - malgré le vin qui les accompagnent - serait un défi à relever. Il donna une autre précision tandis que l'enjouement revint enfin dans son allure.

    - Vous pensez que dix leçons seront suffisantes ? Leur durée variera, en général une matinée, ou un après-midi entier, voire la nuit. - Ouep, t'as bien entendu - La première commencera cette semaine, dites moi où nous devrons nous retrouver. Je vous détaillerai mieux là-bas ce que j'envisage de faire.

    Elle allait en avoir pour son argent. Le sourire s'élargit - tu n'sais pas c'qui t'attend ma jolie - ce sera également une nouvelle expérience pour le blond, mais l'idée lui plaisait, il avait réfléchi à mille et une mises en pratique. Ses méthodes sortiraient peut-être de l'ordinaire, mais Mahelya avait dû s'en douter au moment où elle lui avait proposé ce service, espérons.

    - Alors, j'signe où ?
Mahelya
"Je serai exclusivement à vos ordres" ... Hochement de tête en signe d'accord. "j'attends toujours que vous définissiez précisément mon rôle" ... A nouveau, l’Étincelle accepte. Ça va de soit. "La prime sera fixée avec nos deux accords"... Évidemment.
Et de secouer encore et encore le minois. * Dis donc l'Balafré tu n'as pas remarquer que tout est ok ? *.
Puis vint la question des repas. Mince ! Voilà qu'il semblait vouloir s'esquiver. Même si elle n'en laissa rien paraître, le temps était à la pointe de déception. Pour elle prendre des repas avec ses gens, c'était comme prendre des repas avec sa famille ou encore des amis, chacun racontait sa journée, parlait de ce qu'il se passait dans le Comté. La politique était souvent abordée d'ailleurs encore plus en ce moment que l'on s'apprêtait à vivre une nouvelle élection. Les trois compères n'étaient souvent pas d'accord évidement et les conversation pouvaient s’enflammer quelques fois, mais très vite la tension laissait place à de grands éclats de rire. Ils étaient tous tellement loin de tout ses préoccupation. Quand il était de bonne humeur, Harchi racontait sa vie au combat, les pertes et victoire qui l'avaient marqué. Parfois même il se laisser aller à quelques blagues et plaisanteries douteuses. Heureusement la Flammèche n'en saisissait pas souvent le sens. Mais Bertille, elle, riait à gorge déployée. De ses instants privilégiés, l'Incandescente avait noté que le Vieux Soldat ne parlait jamais de sa vie personnelle. Mouarf il devait être secret un point c'est tout.
Bref, cela chagrinait Mahelya que le Blond ne veuille pas partager cela. Le sourire ne s'effaça pas pour autant et c'est d'une voix douce qu'elle répondit.


- Pour les repas ... Ce n'est pas une obligation non ... C'est juste notre plaisir ... Quelques minutes par jour pour partager une nourriture délicieuse et apprendre à se connaître mutuellement ... Après tout nous vivons en communauté. Mais vous ferez comme bon il vous semblera.

Et les sinoples reprennent leurs observations du Balafré. * Alors le repas, tu veux ou tu veux pas ? Tu veux c'est bien, Si tu veux pas tant pis, Si tu veux pas, J'en f'rai pas une maladie *(*) ... Ou peut-être bien que si ... Lissant d'un geste sec les plis imaginaires de sa robes, elle reprit sur le même ton, essayant de garder sa soudaine hilarité quand elle se remémora les questions du Blond. Voix douce et œil perçant.

- En toute sincérité ... Dix leçons ... Elle avait, l'espace de quelques minutes essayé de garder son sérieux, se mordant la langue pour ne pas rire immédiatement. Cependant, Son regard n'avait plus rien de sérieux et c'était franchement de l'amusement qui transpirait de ses yeux. - Je crois que cela ne va pas suffire. Je suis maladroite comme vous avez pu le remarquer. Pourtant j'essaie. A vrai dire j'avais plutôt pensé à quatre ou cinq forfait de dix leçon pour que je puisse au moins faire illusion. Mais vous êtes déjà assurer que je ferai de mon mieux, je vous l'ai promis dans un courrier.

Du bout des doigts, elle chassa quelques gouttes d'eau salée qui avaient perlé au coin de ses yeux. Sa maladresse, tant qu'elle ne nuisait à personne la faisait toujours sourire.

- Concernant le lieu ... le temps commence à se rafraichir ... Mais je connais une maison abandonnée en retrait de tout, c'est là que vous m'enseignerez. Au 1 chemin du petit sceau. Retenez bien cette adresse nous nous retrouverons là-bas.


Avec grâce, à la fin de sa phrase, l’Étincelle se leva, lissant une fois de plus sa jolie robe émeraude.

- Je vais chercher un parchemin et une plume afin de consigner tout cela, nous n'aurons plus qu'à le signer vous et moi. Je vous en prie restez ici et faites comme chez vous. N'hésitez pas à solliciter Bertille si vous désirez quelque chose.... Ah moins que vous ne préfériez m'accompagner pour visiter la maison ?

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(*)Zanini ou Brigitte Bardot- Tu veux ou tu veux pas
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Nizam
    Dans leurs échanges épistolaires, elle lui avait également précisé le déroulement des repas, la jeune femme l'avait invité à sa table, il comprenait que Mahelya, malgré ses origines, ne voyait pas ses domestiques comme inférieurs, la façon dont elle lui avait parlé d'Harchi et de Bertille et le comportement qu'il avait pu entrevoir aujourd'hui le confirmaient. Si cela ne parut pas la vexer lorsqu'il expliqua indirectement qu'il était inutile d'espérer sa présence à tous les déjeuners, ou soupers, il crut déceler une légère insistance. Apprendre à se connaître... C'est là la différence entre la Frêle et le Balafré, lui n'envisageait pas son travail autrement qu'une relation employé-employeur, il voulait bien - et surtout - sa confiance, qu'elle le voit comme homme de main à la rigueur mais rien de plus; et puis aussi agréable et jolie soit-elle, il n'irait tout de même pas.. Non. Nouvelle note dans son esprit, trouver l'âge exacte de sa patronne.
    En conclusion, et sauf pour de rares exceptions, il n'avait pas le sens de la communauté, ayant auparavant oublié celui de la famille, il avait quitté il y a quelques années maintenant le seul groupe auquel il s'était réellement apparenté; mais comme dirait la narratrice d'en face, c'est une autre histoire.
    Nizam dut revoir sa vision des choses en réalisant qu'il passerait la plupart de son temps, pour ne pas dire la majeure partie, près de la rousse, alors même s'il semblait apprécier son caractère, il avait du mal à développer librement ses relations dès que celles-ci étaient marquées par l'argent. Les à priori du blond seront peut-être balayés au premier met partagé, il ne savait pas à quoi s'attendre, les derniers repas qu'il eut en bande avant de vagabonder en solitaire jusqu'à Guéret ne devaient pas exactement ressembler à ceux de cette maison. Cependant à 80 écus la semaine, il pouvait éventuellement faire un effort.


    - Alors j'viendrai parfois faire honneur aux plats de Bertille.

    Il rejoua un sourire, en miroir de celui de la rouquine. Au moment d'aborder les entraînements, il avait dû toucher juste puisque Mahelya donnait impression de dissimuler un fou rire depuis plusieurs minutes. A son tour de réprimer un air moqueur, il n'avait tout de même pas hérité en élève de la maladresse incarnée, non ? Pour quatre ou cinq forfaits à 250 écus, il était tout à sa disposition, il aura au moins la première leçon pour évaluer les talents naturels de la jeune fille, puisque la motivation n'avait pas à être remise en doute. Il acquiesça quand elle lui donna le lieu du rendez-vous, 1 chemin du petit sceau... Connaissant sa mémoire légendaire - ironie - il préféra se répéter deux ou trois fois l'adresse, il s'y rendra peut-être bientôt en repérage, voir ce qu'il pouvait tirer de cette maison abandonnée si elle ne tombait pas déjà en ruine.
    Le balafré dévia son regard sur la rousse dès que cette dernière se releva, l'heure était enfin à la rédaction du contrat. Sans pouvoir se l'expliquer, l'observer user d'une plume contre un vélin serait sans doute pour lui une nouvelle source de curiosité, leurs seuls contacts ces derniers jours étaient passés par l'encre et le papier, il s'était presque habitué au style et à l'écriture de sa correspondante. Hm. Rien de plus qu'employeur-employé, n'est-ce pas ?
    Ses yeux descendirent sur la robe que Mahelya entreprenait de lisser plus ou moins machinalement depuis le début de leur entretien, puis glissèrent brièvement sur les formes féminines que laissait deviner le tissu, devait-il la complimenter ? Non, les flatteries dans la bouche du blond perdaient souvent de leur crédibilité en raison de ses sarcasmes, et il était rarement sincère dans ses éloges. Quoiqu'il était prêt à parier qu'un compliment lancé à la rouquine provoquerait aussitôt le rosissement de ses joues, héhé, à tester un jour.
    Il revint enfin aux sinoples qui n'avaient paru cesser de le détailler - cherchant le fond de ses pensées ? - et écouta simplement la fin de la phrase. Dès que la demande fut formulée, Nizam se leva, estimant que s'il "sollicitait Bertille" à partir de son premier jour d'embauche, il aurait sérieusement du mal à cacher sa gourmandise. D'une pierre deux coups, il connaîtra enfin la demeure de ladite Étincelle.


    - Si j'peux laisser mes affaires ici, oui. Faites donc mon guide, je vous suis.

    "Je vous suis", il sentait qu'il allait désormais prononcer un bon nombre de fois cette phrase.
Mahelya
- Bien alors allons-y de ce pas, j'en profiterai pour vous ... hum ... montrer mon déguisement. La fin de la phrase fut murmurée, bien qu'elle savait que personne n'écoutait aux portes, il fallait tout de même rester prudent.

Le sourire s'élargit encore. Elle n'était pas très grande par rapport à Nizam, voir même presque petite. C'était d'autant plus flagrant parce qu'ils se trouvaient à proximité à peine séparés par une table basse. Elle n'y avait jamais fait attention auparavant, mais maintenant qu'il devenait aux yeux de tous "son garde", les sinoples se devaient de détailler le Balafré. Devaient ? ... Vraiment ? ... En réalité, c'était sans doute la première fois depuis la dissolution de ses fiançailles, qu'elle observait autant un homme, un vrai qui avait roulé sa bosse. Du moins c'est ce qu'elle pensait. Note pour plus tard : Demander à Nizam de lui raconter ses péripéties, comment il avait eu cette balafre si visible, et qui pourtant ne le rendait pas si lait ?... Moui ... A mon avis elle avait plus de chance de croiser un canard à trois pattes. De plus, le blond risquerait de se montrer tout aussi curieux qu'elle et l'interrogerait sans doute, sur la fine cicatrice qui fendait sa lèvre supérieure. Moui … Mauvaise idée …
Bref...
A côté de Nizam, elle paraissait bien petite chose, frêle, fragile, tout comme à côté d'Harchi d'ailleurs, mais avec ce dernier, cela ne lui faisait pas le même effet. Sans doute parce que le vieux soldat la suivait depuis sa plus tendre enfance. Sans doute ...
La joie manifeste sur son visage ne disparut pas même lorsqu'elle tourna les talons, faisant virevolter sa longue cascade de boucles rousses qui venait mourir aux creux de ses reins, Pour se diriger vers la porte et l'ouvrir à la volée.
Une fois de plus elle tourna son minois vers le Blond et plongea ses sinoples dans ses azurs.


- Nous allons commencer par l'étage, d'une parce que le Bureau s'y trouve de deux nous visiterons la cuisine en dernier et ainsi vous ferez la connaissance officielle de Bertille et Harchi... Et avec un peu de chance, le ragout sera prêt. Foi de moi, vous n'en gouterez jamais de meilleurs. Cette fois aussi, elle chuchota la fin de son intervention. Non pas par crainte d'être entendu non ! Juste pour créer un début de complicité entre elle et le Blond. * J'arriverai à t'apprivoiser l'ami ! Je me le promets *

Et la pointe du petit soulier se posa en direction de l'escalier. Elle prit la tête du duo, non pas par impolitesse, au contraire, tout maître de maison doit se mettre en avant d'éventuel danger lorsqu'il a un visiteur. Ce sont les règles de bonnes conduites. Oui oui. Tout comme les hommes doivent entrer les premiers dans un lieu public, pour s'assurer que leur compagne ne risque rien avant de la faire entrer...
'Fin bref... C'est une autre histoire...
L'escalier était massif, en chêne, sculpté sur les rambardes des mêmes motifs que la porte d'entrée. Une maison à étage était assez inhabituel à cette époque, encore plus avec une façade en pierre. Pourtant c'était bien la demeure de la Flammèche, celle qu'elle avait acheté par l'intermédiaire d'Harchi, à ses huit ans : Son aménagement à Limoges. Tiens pourquoi ne pas expliquer tout cela au Balafré ? Peut-être s'en fichait-il ? Mais peut-être aussi que toutes informations sur la maison seraient bienvenues ?
C'est ainsi que la Rousseur se transforma en guide touristique.


- La maison est en pierre, parce qu'il s'agit d'un ancien bâtiment administratif. Une étude de notaire. Elle devait donc résister aux incendies... L'information tombe un peu comme un cheveu sur la soupe ? Oui c'est ça... Mais ne l'avait-on pas déjà dis ? Le silence angoissait l'Incandescente. - Mais voilà bien longtemps qu'il n'y a plus de notaire à Limoges et que cette bâtisse est devenue habitation. Pour ma part je la possède depuis environ six ans.

Et la procession avançait toujours, montant inlassablement les marches qui ne craquaient pas. Les hanches naissantes de l’Étincelle se balançaient au rythme de ses pas. Et sa chevelure voguait dans son dos avec légèreté. Sa robe de soie bruissait sur le bois, l'effleurant doucement. La grâce, malgré sa maladresse parfois, était son apparats.
Les murs étaient vide de décoration, seules quelques chandelles aux bougies allumées éclairait l'escalier, donnant au tissus émeraude des inspirations irisées.
Enfin la chausse délicate foula le palier du étage. Elle s'avança un peu dans le couloir afin de laisser le temps à Nizam d'acclimater ses yeux à la soudaine obscurité de l'étage. Là aussi il y avait quelques bougies pour éclairer mais pas de fenêtres sur rue, puisqu'elle se trouvaient derrière les portes des grandes chambres et du petit bureau. Sur cour et Jardin, cinq portes, quatre chambre de domestiques et une salle d'eau avec baquet d'étain.


- Devant nous, sur la droite ce sont les lieux d'Harchi. A l'origine s'était deux chambres mais, nous les avons réunis pour qu'il soit plus à son aise. Et sur la gauche, c'est la même chose pour Bertille. Et en face, il s'agit de la salle d'eau, pourvu d'une baignoire. J'en ai fait installer une chez vous aussi.

Elle attrapa une bougies sur la desserte non loin d'elle et la tendit à Nizam. Le couloir du premier étage, tout comme le salon au rez-de-chaussée, était garni de longue tapisseries qui ornaient ses murs - une façon d'avoir un peu d'isolation - là aussi quelques chandeliers, dont la plupart étaient éteints. Pourtant une fois de plus rien d’ostentatoire et rien d'inutile. Comme en-bas on retrouvait ici une large bibliothèque parfaitement garnie. Tout était en ordre et rangé. Gloire à Bertille.

- Je vous en prie, vous pouvez regarder si vous le souhaitez...
Derrière nous, il y a la chambre de Miel, et la mienne séparées par un petit bureau, celui-là même où se trouve les plumes et les parchemins. Mais, faites comme chez vous si vous voulez jeter un œil.

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Nizam
    Le déguisement. Il y avait songé et avait maintenant hâte de voir la "transformation" de la jeune fille. Si frêle qu'elle était à côté de lui, il se demanda si le changement serait une si bonne illusion, la nature et la féminité prenant peu à peu leur droit. Répondant toujours à la bonne humeur qu'affichait Mahelya, il se rapprocha d'elle, jusqu'à ce que la poignée de la porte soit tournée. Alors que la présentation des pièces allait débuter, il entendit le second murmure de la rousse; un fin sourire étirait ses lèvres, il ne se doutait pas de ce qu'elle essayait de faire, elle avait gagné, il restera pour le ragoût, l'encas et la brioche passés, des bruits sourds venant de son ventre auraient trahi tôt ou tard son appétit. Ses pas plus rudes prirent la suite des légers de l’Étincelle, il la laissa aller en première, galanterie, politesse ? Non, elle était juste plus proche que lui ! Quant aux éventuels dangers du visiteur... Constatant l'habilité de la rouquine dans les marches, Nizam pourrait surtout la retenir ou à défaut servir d'amortisseur si l'idée lui prenait de glisser à nouveau. Il détailla d'un regard l'escalier, en ayant rarement vu de tel dans une maison, malgré la pierre une odeur de bois semblait omniprésente et ce n'était pas désagréable. Le balafré rabattit un instant ses deux azurs sur les mèches rousses devant lui, oscillantes selon le rythme de la montée, le silence fut brisé par les explications de la maîtresse des lieux.
    De notaire... Bâtisse aux fondations solides donc, cela se voyait, et le changeait des bicoques qu'il connaissait. Il arqua un sourcil lorsqu'elle lui donna la seconde précision. Six ans ! Quelque chose clochait, à cet âge-là ne devait-elle pas vivre avec sa famille ? Le blond savait qu'elle avait été adoptée, mais n'avait pas davantage insisté sur son passé. Que l'on puisse posséder tel habitat alors qu'elle ne devait même pas avoir une dizaine d'années, la logique lui échappait.


    - Six ? Vous deviez être jeune pour acquérir votre propre toit.

    L'indiscrétion se réveillait. Il n'en rajouta pas plus et arriva enfin à l'étage, restant à côté d'elle, seuls de faibles rayons de lumière et quelques bougies lui permettaient de se repérer. Ses pupilles se dilatèrent, lui offrant enfin une nouvelle vision des ombres. Le couloir s'étendait, plusieurs portes fermées étaient face à eux, Nizam se rendit compte de l'espace que représentait ledit bâtiment, n'allez pas lui faire croire que depuis six ans elle gérait seule toute la maisonnée. Bertille et Harchi l'aidaient certes mais... Une si grande habitation pour une enfant - car elle devait l'être au moment de l'achat - et ses deux domestiques, cela forçait la comparaison avec ce qu'il avait connu au même âge avec ses frères et une famille qui serait vite devenue nombreuse si son père n'avait pas été souvent sur les routes pour multiples affaires commerçantes. Retenant en conséquence une critique, sans doute Mahelya n'y était pour rien et avait au moins eu une enfance aisée - ou ce fut ce qu'il en déduisit.
    Nizam écouta les indications, tentant par la même occasion de visualiser un plan de la surface. Le personnel n'avait pas à se plaindre ici, on était loin de la minuscule chambre de bonne. Il se tournait en fonction de ce qu'elle lui désignait, sans grincer des dents au détail de la baignoire.


    - Ah. Hum m'rci. Comme pour vos gardes, bain obligatoire j'suppose ?

    Lui et sa grande affinité pour l'eau... Tant qu'elle n'était pas chauffée, à la limite de se brûler, il avait du mal à aller de lui-même pour se laver. Encore un effort à faire s'il voulait garder son emploi, il avait bien compris que la noble ne supportait pas la crasse de ses gardes.
    Il attrapa la bougie tendue, éclairant un court moment leurs visages, et balafre le concernant, quoiqu'il avait cru déceler une légère cicatrice à la lèvre de Mahelya, mais il n'allait pas plus poser son regard à cet endroit pour le confirmer, il suffirait que Bertille ou Harchi soient dans le coin pour que ce soit évidement mal interprété. Ils avancèrent dans le couloir, quelques tapisseries au murs, des décorations... Sur l'une d'elle, il reconnut aux blasons ce qui devait être un arbre généalogique - celui de la Frêle ? - ignorant qu'elle avait peut-être fait des recherches à ce propos, il rapprocha prudemment la flamme pour mieux éclairer cette fiche de famille. Noms étranges, et qui lui étaient inconnus jusqu'à ce qu'il retrouve en bas celui de Mahelya, avait-il également vu celui de Sindanarie ? La femme lui avait dit être sa cousine, il n'y aurait rien de surprenant. Froncement de sourcils, équivalent à un moment de réflexion, était-ce là en relation avec l'histoire d'adoption dont la jeune fille lui avait vaguement parlé ? Il adressa un dernier regard aux blasons dessinés puis se pressa de la rejoindre, imaginant qu'il aura tout le temps nécessaire pour assouvir cette curiosité dérangeante.
    La visite donnait cette fois-ci sur une bibliothèque, après invitation il pénétra dans la pièce aux murs bientôt couverts de livres. Des reliures, des manuscrits de tisserands... Il fut surpris par le nombre de couvertures en cuir évoquant le Livre des Vertus, qui était lui-même en plusieurs exemplaires. S'il y avait bien un livre sur lequel il avait passé des heures alors qu'il était à peine adolescent, en présence de moines - quand ceux-ci ne s'occupaient pas de l'élaboration de leur bière - c'était bien celui-là. Quand était-ce la dernière fois qu'il l'avait ouvert ? Il préférait ne pas savoir... D'ailleurs, à quand remontait simplement la fois où il put lire quelques pages d'un livre ? Il s'était habitué aux dépêches, aux lettres ou aux affichages mais il avait rarement eu l'occasion de feuilleter des pages dans toutes ses années de vagabond.
    Silencieux, il pencha la tête pour lire les titres donnés sur les tranches, cela faisait presque dix ans qu'il avait fuit toutes ces pensées aristotéliciennes, l'ironie l'y confrontait aujourd'hui. La rouquine était donc pointilleuse sur la religion, bonne chose à savoir. Il revint vers Mahelya, lui montrant la bibliothèque.


    - Eh bien, z'en avez plus d'un pour chacun ici. Vous faites une collection, ou vous encouragez l'Eglise ?

    Si elle dit oui à la deuxième proposition, il va rire. Ou partir en courant, au choix.
    Arriva le tour du bureau, jugeant que se trouvait là le but de son exploration, il ouvrit lentement la porte, tenant encore la bougie à la flamme chevrotante, mais une fenêtre sur rue diffusait la clarté du jour. Ses yeux devenant bientôt avides de découvertes s'arrêtèrent sur le meuble de bois, les vélins entassés, des plumes taillées étaient posées près d'un encrier. Plumes noires, d'oies ou peut-être de cygnes ?


    - Si votre chambre est à côté... Voyons ce qui serait le mieux pour le moment, l'écriture de notre contrat, ou votre déguisement ?

    Le balafré esquissa un sourire, il n'avait pas oublié le chuchotement du salon.
Mahelya
La petite Flamme continuait son observation du Blond tandis qu'il déambulait au premier étage. Leurs pupilles étaient mises à rudes épreuves entre l'obscurité du couloir et la clarté des pièces sur rue, mais le jeune Balafré semblait s'en accommoder parfaitement, ne se plaignant jamais de la faible lumière qui régnait une fois toutes les portes fermées. Et heureusement, car bien qu'à l'abri du besoin, l’Étincelle ne dépensait jamais plus que de raison - sauf peut-être pour les fils et les tissus, mais ceci est une autre histoire - et les bougies, de bonnes qualité et capable de tenir plusieurs heures sans se consumer entièrement, des cierges en cire d'abeille donc, valaient une véritable fortune...
Bref, note pour plus tard : Acheter des lampes à huile, plus économiques...
Elle détaillait donc tout ses gestes, scrutait la moindre mimique, écoutait attentivement son souffle, sa respiration, ses remarques. Tout ce qui pouvait lui donner un indice sur ce que pensait Nizam. Difficile me direz-vous dans le clair-obscur du couloir. Et Pourtant…
Le nouveau garde semblait vouloir étancher sa soif de curiosité, interrogeant la Frêle, l'air de rien, dans la conversation, apparemment il la trouvait jeune : Normale, savait qu'elle était noble de sang : Évidemment, et s'interrogeait sur le pourquoi du comment avait-elle eu cette maison si jeune : Ça elle devrait bien lui expliquer … Un jour … Ce n'est pas si pressé … Si ?... Si elle ne répondit pas immédiatement, elle n'en oublia pas pour autant les points qu'il avait soulevés. Plus tard, mais peut-être pas si tard finalement, foi de Mahelya, elle y répondrait.

Bientôt, le Blond et la Rousse se retrouvèrent dans la Bibliothèque. La fierté de la propriétaire des lieux - Tout comme la cave d'ailleurs, mais nous en reparlerons plus tard -. Des mois des années pour réunir les précieux ouvrages reliés de cuir et enluminés par les plus illustres. Certains étaient en plusieurs exemplaires parce que relié à différentes époques, comme le Livre des Vertus d'ailleurs. Ce qui visiblement n'échappa pas au Charmant mais néanmoins perspicace Nizam. Sa remarque ne manqua pas de faire naître sur les joues aux taches de rousseurs cette pigmentation rouge, qu'elle arborait aisément dès qu'elle se sentait gênée ou que quelqu'un perçait à jour l'une de ses lubies, tel que c'était le cas présentement. A nouveau les mains fines et blanches lissèrent le tissu irisé de la robe émeraude, tentant toujours de faire disparaitre des plis imaginaires. Ce geste était très pratique, et très souvent elle bénissait la personne rencontrée en Berry qui lui avait enseigné cette parade. A se concentrer sur sa mise, elle devait donc baisser le regard ce qui lui permettait de dissimuler ses joues rougeoyantes à son interlocuteur. La classe quoi ... Ou pas ...
Elle se racla aussi discrètement que possible la gorge avant de murmurer.


- J'aime ce livre ... et je crois que c'est tout ce qu'il me reste de mon éducation ...

*Et ouiiiiiii les moines et les nonnes ça me connait, un Livre pour chaque monastère visité, j'en ai fais du chemin non ?! Bon, et si tu regardais un peu d'autres couvertures là non ? Parles moi de Béroul et de son Iseult, parles-moi des chansons des trouvères et des troubadours, ou du point de croix et de la soie ... *
Cependant, la magnifique bibliothèque, tout aussi jolie et agréable fut-elle, fut vite abandonnée pour le Bureau. Et là, y'avait pas à dire, mais par rapport au reste de la maison, c'était un peu plus animé. Un grand meuble à tiroir se tenait non loin du petit écritoire de bois, un des tiroirs était mal refermés et laissait échapper un rouleau de parchemin vierge. Par terre, il y avait encore quelques copeaux de plumes taillées, un parchemin à moitié écrit se trouvait juste devant le siège tapissé. Sur l'écritoire, un encrier était encore débouché, et deux grosses tâches d'encre noire allaient bientôt s'imprimer dans le bois si personne ne songeait à les éponger. Une bougie presque entièrement consumée, livrait ses derniers éclats. La pièce avait été quittée dans la précipitation - Rappelons que Mahelya y travaillait juste avant l'arrivée de Nizam ...
Une fois de plus le pourpre s'invita sur les joues de la Jeune Flamme.


- Je ... euh ... j'étais ... enfin ... je travaillais ... quand vous êtes arrivé ... Je … euh … pas eu … le temps de ranger…


Gloire à toi Nizam ! Tu viens de découvrir que l’Étincelle n'est pas des plus ordonnées. Amen… Une vraie tornade pouvant même parfois s'apparenter à un cyclone si l'on n'y prenait pas garde. Bien évidement et heureusement d'ailleurs, Bertille était là pour veiller au bon ordre.
L'incandescente ne pouvait lisser une fois de plus sa vesture, là ça aurait vraiment fais suspect, aussi décida-t-elle de se concentrer sur les rideaux, qu'elle avait elle-même tissés, feintant d'y avoir trouvé un accroc. La meilleure des diversions ! Di da di da doum…
Heureusement Nizam proposa la solution du déguisement pour quitter la pièce embarrassée, enfin même s'il ne l'avait pas fait exprès. En tout cas, c'est le prétexte sur lequel sauta l'Incandescente pour changer de sujet et surtout quitter le Bureau maudit, témoignage vivant de son étourderie, et de son désordre.


- Oh, le déguisement ! quelle bonne idée ! Oui allons-y, ma chambre est à droite. Je vais le passer pour vous le montrer. L'argument maintenant. Voyez-vous, je préfère passer la tenue en premier, car si Bertille et Harchi s'impatientaient à un moment je préfèrerai vivement qu'ils n'est pas le loisir de me voir en garçon mais plutôt en train de me voir gratter un vélin d'encre noire. Y'a pas à dire, ils ont bon dos les domestiques.

Un nouveau sourire fleurit sur les lèvres purpurines de la Rousseur, avant que celle-ci ne sorte du bureau pour s'engouffrer dans sa chambre. En ouvrant la porte, l'on se trouvait nez à nez avec le coté u lit à baldaquin pourvu de rideau en velours dans les ton de vert et d'ocre, assorti aux rideaux qui ornaient la fenêtre. Un feu somnolant, brillait encore dans l'âtre face au lit, entre la cheminée et la fenêtre un paravent aux scènes romantiques d'amour courtois. La Petite Flamme était fleur bleue. De l'autre coté de la cheminée, un imposant fauteuil tapissé, juste à coté d'un guéridon, sur lequel trônait – encore – un livre des Vertus. En le désignant, le sourire toujours éclatant, l'Etincelle s'exprima :


- Je vous en prie Nizam, prenez place, je n'en ai guère pour longtemps à me grimer en garçon.

Et sans plus rien ajouter, la jeune fille se dirigea, un paquet de vêtement à la main derrière le paravent. Un homme, une jeune fille, dans une chambre, quoi de plus normal ? Je vous le demande. Et le silence tomba peu à peu, seul le bruissement de tissu sur sa peau au teint de perle, raisonnait dans la chambre silencieuse. Cela dura sans doute quelques secondes. Pas un bruit, pas un son hormis celui du tissu et des vieilles buches de bois craquant dans l'âtre. Puis…

- Je suis arrivée à l'âge de huit ans ici, avec Harchi et Bertille et un héritage. J'ai fais acheté cette maison à mon vieil ami, avec mes deniers bien entendue, j'étais mineure, je n'avais pas le droit légalement de devenir propriétaire. Mais je me plaisais tellement ici, et ne pouvait pas vivre éternellement à l'auberge… Enfin…
Cette année, 1460, j'ai fêté mes quatorze ans, je fus fiancée, anoblie (en cours), baptisée, et Harchi m'a légué la maison. Oh le baptême fut rocambolesque, j'y ai appris que je n'étais pas celle que je pensais, que toute ma vie fut tissée de mensonge et que ma vraie famille avait périe en 1447 et j'ignore pourquoi et je doute qu'un jour quelqu'un puisse me l'apprendre… Oh et le fiancé est parti…


Sa voix cristalline n'était pas triste, mais ne présentait pas non plus un quelconque amusement. A vrai dire, derrière son paravent, quelques larmes silencieux s'échappaient de ses cils. Alors qu'elle venait d'enfiler la chemise, après avoir pris soin de bander sa gorge aux formes arrondies, l'index, machinalement suivit le sillon de la fine cicatrice qui fendait sa lèvre supérieure... Devait-elle lui raconter ça aussi ? Plus tard ... Peut-être ...
Du revers de la main, elle s'essuya les joues, plus ou moins parfaitement.


- Vous êtes prêt ? Je peux sortir ?
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