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[RP]Le Drôle de Noël de Marmiton

Simeon.got
En bonne mère poule qu'elle était, Irella avait fait les recommandations d'usage avant que son fils et le moine ne sortent du presbytère et lorsqu'elle avait présenté le panier garni au frère Toque, il l'avait prestement saisi malgré le poids qu'il avait sur l'estomac d'avoir été une fois de plus malmené par sa soeur Tastevine.

Néanmoins, toute proportion gardée, Marmiton restait Marmiton et sa curiosité prit le dessus sur sa contrariété, il ne put s'empêcher de vérifier si Irella n'avait pas lésiné sur le contenu.

Avant de prendre le chemin pour la forêt, Gabriel avait emmené le moine jusqu'à l'atelier de menuiserie de sa mère où il s'était procuré une hache, une bonne corde et des drôles d'objets qu'il fallait fixer à ses pieds. Il expliqua à Marmiton qu'il s'était confectionné ces espèces de larges semelles en bois à lanières de cuir lorsqu'il commençait à neiger et que depuis il avait reçu de nombreuses commandes.

Le moine fixa l'engin d'un drôle d'air mais il faisait confiance au gamin et il les enfila sans mot dire.

Et c'est vrai que ce fut balèze, les deux compères se déplacèrent avec aisance dans la forêt enneigée, l'invention du fils d'Irella était ingénieuse, ça plut au moine replet qui au fur et à mesure de leur virée, se détendit.

A un moment donné, le jeune garçon demanda à Marmiton s'il pouvait lui poser une question? Le Moine le fixa avec crainte, qu'allait-il lui demander?

_________________
.gabriel


Hum la question, j'hésitais un une fraction de secondes avant qu'elle ne glisse de mes lèvres pour s'échapper, comme mue par sa propre volonté de ne pas mourir . Non celle ci ne voulait avorter avant de naître,elle s'expulsa d'elle même , poussé par ma curiosité et certainement aussi, par mes doutes .

Hum , euh, vous vous y connaissez en femmes ?

J’espérai qu'il allait d’emblée bien comprendre le sens de mon interrogation, normalement oui, me dis-je , car n'avait-il pas déclarer que cet sortie serait une affaire d'hommes ? Il devait donc en connaitre un petit rayon sur les femmes ....On était donc entre hommes là .. C'est ce qu'il avait dit , alors normal qu'on parle femmes .. Sauf que lui , c'était un père , ou un frère, enfin un religieux d'Eglise , est ce qu'il regardait les femmes autrement que comme faisant parti d'un grande fratrie dépourvu d'atours ?

J'étais plus qu'attentif à sa réponse, même si je semblait détaché, le nez levé vers les cimes enneigé des arbres qui maintenant commençaient à apparaître au bout du chemin qui longeait le champs, que nous étions entrain de contourner pour nous rendre en forêt.


Simeon.got
Et le couperet tomba, Marmiton s'attendait à tout sauf à cette question là, à savoir s'il se connaissait en femmes..Oh non pas ça! pensa le moine complètement paniqué de devoir s'aventurer sur un terrain si glissant...

Vu son physique ingrat, la gent féminine avait toujours fustigé le jeune garçon qu'il était, dans son souvenir le plus lointain, hormis sa mère et ses quelques amies, il n'avait été entouré que de vipères.

Le moine avait bien envie de dire à Gabriel qu'il devait se méfier de toutes ces pucelles, qu'elles ne battaient des cils que pour mieux en profiter, d'autant qu'il était beau comme un ange et que pour sûr avec lui elles joueraient les coquines.

A cette évocation, le moine piqua un fard de gêne, qui était-il pour donner de tels conseils au fils d'Irella? Le moine réfléchit un petit instant mais rien ne lui venait, ses lèvres le brûlaient de répliquer "demande à ta mère pardi!"

Alors dans sa tête de moine compositeur une aria s'intensifia, les grandes orgues se mirent à jouer, les amours de gabriel semblaient contrarièées et ça lui donna une idée...Une recette, il me faut le premier ingrédient pour créer une recette, et le moine de demander à Gabriel:


Comment ch'appelle-t-elle gaby?
_________________
.gabriel


Comment ch'appelle-t-elle gaby ?

De surprise , je croisais mes planches à glisse et m'empêtrait lamentablement !

Splach !

Le nez dans la poudreuse épaisse, elle m'éclaboussa et coula en filet glacée sous mon écharpe , tandis que mon bonnet s’étala à quelques mètres s’agglutinant de cristaux étoilés . Je restais là , penaud de ma chute et surpris aussi.
Vexé, et par ma chute et par la question de Marmiton, le cul gelé collé à terre, je frottais mes mains vigoureusement pour en chasser la neige , avant de finir de les essuyer sur mes genoux.
J'utilisais le temps qu'il me fallu pour me défaire des planches , sans quoi je n'aurais pas pu me relever, pour trouver comment répondre au père . Pas question qu'il s’immisce dans mes affaires , ah non ! Me remettant sur pied, je m'attelais à renouer mon attirail à mes bottes . Il faudra que je prévoie des canes pour l'équilibre tient , des baguettes , auquelles il faudra trouver un systeme afin qu'elle ne s'enfoncent pas trop loin dans la neige, aussi, mais je verrais ça plus tard , là je cogitais pour avoir réponse à MES interrogations, sans que Toque ne me retoque !

On ne répond pas à une question par une question frère Marmiton ! répliquais-je boudeur ! Puis je rusais en employant un brin de provocation pour retourner la situation où je voulais en venir :

J'en déduis que vous ne savez rien de rien aux femmes , c'est ça ! Va me falloir trouver quelqu'un d'aut' !
Mon père aurait su me dire lui , pourquoi elles deviennent bizarre tout à coup et cafouillent du tout et n'importe quoi ! Seulement il est plus là !


C'est vrai ça, il était plus là, soudain, je lui en voulu de nous avoir laissé ainsi , il aurait pu m'aider à bricoler, on aurait pu, lui et moi, bavarder entre hommes … Il devrait être là , avec moi , à la place de Marmiton , sauf qu'il n'a jamais été là quant j'avais besoin de lui ...

D'un geste rageur, je ramassais mon bonnet et le vissait mouillé sur ma tête presque jusque sur les yeux , et entamait de reprendre la marche vers le bois. J'étais frustré, triste et en colère tout à coup, et ma colère était orienté vers maman , sans pourvoir me l'expliquer , sans qu'elle en soit responsable mais je lui en voulu …


Frere_marmiton


A peine le frère Marmiton eût-il posé sa question, que le gamin se prit les pieds dans ses planches, il chut lourdement dans la neige faisant valser son bonnet à quelques pas de là,...

Le moine aurait pu voler au secours du jeune Gaby pour l'aider à se relever ou s'esclaffer vu la tête qu'il faisait mais il n'en fit rien, notre frère replet fixait ses propres planches en s'imaginant combien il se serait fait mal s'il s'était pris les panards dedans... Laissant son jeune ami dans la panade, le moine regarda alentour pour trouver une souche où il pourrait s'asseoir afin d'ôter ces engins de malheur, tandis que le jeune homme s'exprima sous ses airs de jeune coq blessé dans son orgueil...néanmoins, Gabriel ne put retenir très longtemps sa rancoeur, l'absence de son père se faisait cruellement ressentir...

Ce n'était pas une simple boule de neige que le frère Toque venait de se prendre en pleine poire, c'était une vraie beigne de celles qui laissent des traces...Le moine regarda ébahi le jeune homme dont la frustration était palpable, certes, Marmiton se sentait offensé d'être traité de la sorte par ce jeune gringalet mais d'un autre côté il le comprenait...

Quand le moine était contrarié, tel le hérisson, il se mettait en boule pour échapper aux coups du sort, alors, soit il bougonnait, soit , il se retranchait là où la nourriture était son refuge, c'est ainsi qu'il se perdit dans son monde, se voyant ramasser des chataîgnes dans la forêt afin de les griller avant de les engloutir...

En fermant les yeux, le moine respirait à pleins poumons cette odeur imaginaire qui le faisait saliver jusqu'au moment où il les rouvrit et tomba sur la face angélique de Gabriel, cette frimousse qu'il aurait rêvé d'avoir, ce qui le fit maugréer...

Alors il répliqua à Gabriel:


Ch'est vrai gamin y va t'falloir une aut'perchonne qu'moi, j''y connais rien aux femmes!

Puis Marmiton se mit à grogner entre ses dents, plus pour lui-même:

Pas comme tu l'entends mais j'ai eu l'temps d'les obcherver ches donzelles, j'avais qu'cha à faire, puichqu'elles n'voulaient pas d'moi, alors oui j'les ai vues cafouiller de tout et de n'import'quoi avec des idiots dans ton genre...hum...

.gabriel



Un son rauque et grincent me parvenait , filtré par mon bonnet . Mon compagnon grommelait en reprenant avec moi son cheminement, sans que je ne le comprenne . Peu m'importait, après tout, mon soucis était à mille lieues des humeurs du padre , et si j'en était responsable, il faudra qu'il fasse avec . Ma colère brouillait mon raisonnement , et me rendait amer, stupide, et si adolescent !
Je me mis à regretter soudain de n'être tout petit, et de pouvoir me réfugier sur le giron de maman à écouter ses histoires au coin du feu , comme avant. L'idée me calma , tout comme le froid de la bise qui rougissait nos joues et liquéfiait notre tarin . Je me surpris à tourner la tête vers Toque qui pataugeait à coté de moi , et sourit amusé de sa mine rendue écarlate par l'effort et la froidure du vent. Nous arrivions dans la forêt, alors je laissais pour un temps de coté mes préoccupations , pour en revenir à celle qui nous avait conduit ici.

Il doit-être grand comment le sapin ? Dis je pour enterrer la hache de guerre .

Je me mis à tourner sur moi même pour scruter les bois à l'entour à la recherche d'un sapin bien touffu


Frere_marmiton


Nos deux larrons reprirent leur chemin vers le centre de la forêt chacun gambergeant de son côté, la situation que le moine venait de vivre l'avait propulsé dans sa prime jeunesse, il ne put s'empêcher de se rappeler cette époque où son physique ingrat l'avait grandement desservi, il repensa à sa chrétiennote de mère qui ne savait quoi faire pour le consoler de ses déboires tandis que son fils engloutissait tout ce qui était comestible.

Les seules femmes qui s'émerveillaient devant lui étaient les amies de sa maternelle qui venaient déguster les desserts que sa mère lui avait appris à confectionner et elles ne tarissaient pas d'éloges à son égard.

Le jeune Simeon avait rapidement compris que toutes ces femmes étaient aussi désespérées que lui mais sa mère pensait avoir trouvé le moyen d'aider son unique fils à s'épanouir et elle persévérait dans cette voie en imaginant que c'était une solution comme une autre de lui apprendre la vie.

Quant à son père, il ne contredisait jamais sa maîtresse-femme sous peine de se voir privé de tout ce qui constituait la vie conjugale, c'est qu'elle savait le mener à la baguette son Gédéon de mari, la Chrétiennote.

Depuis qu'il avait ôté ses planches, le moine avait quelques difficultés à avancer, il devait fournir un double effort et ça le faisait transpirer, ses joues étaient écarlates mais pour rien au monde il ne l'aurait avoué, c'est alors que Gabriel rompit le silence en demandant quelle grandeur l'arbre devait avoir?

Le moine se souvînt d'une tradition, il revenait à la maîtresse de maison de déposer l'ultime décoration à la cime de l'arbre, c'était l'étoile dite du berger...

Il pensa donc à Irella avant de répliquer à Gabriel:


P't'être pas l'plus grand mais l'plus majechtueux, oui la majechté ch'est cha!

Le moine balaya les alentours du regard à la recherche de cet arbre exceptionnel...

.gabriel



Le blond laissa choir son sac qui lestait ses épaules sur ses planches, abandonnées à ses pieds en bordure du chemin . Il s' accroupi pour défaire le lien qui le maintenait fermé, et en sorti la hache et la corde, soigneusement enroulé, qu'il passa en bandoulière autour de son bras droit.

Malgré son apparent détachement, Gaby cogitait toujours.
Tel une braise qui couve sous un lit de tourbe , et ne s’éteint pas, un malaise le rongeait , insidieux. Comment le nommer ? D'où lui venait-il ?
Le déni le rendait aveugle, et rester non voyant , l’empêchait un temps d'affronter ce qui risquait de bousculer sa vie bien établie … Lui … et SA mère …

Il grimaça . Sa mère , elle s'attendait à ce que les deux larrons ne rentrent pas bredouille ; en tout cas, et il était plus que grand temps de lui trouver cet arbre, où la nuit les surprendrait au retour.

Marmiton avait fait comme lui , et avait ajouté à ses affaires, le panier à victuailles.
Gaby hésita à demander de se sustenter maintenant , car le faire après l'effort serait peut-être plus judicieux et réconfortant.

Autour d'eux , se dressaient plusieurs essences d'arbres . La forêt était relativement dense, et sous la voûte des branches épineuses, des jeunes pousses , survenus en régénération naturelle, pointaient leur tête hors du tapis neigeux.
A l'automne, l'endroit était propice aux champignons mais à présent, il était le garde manger du gibier roux qui venait se nourrir sur les touts jeunes plants, car beaucoup étaient étêter de frais .
Pour preuve, leurs nombreuses empruntes étaient nettement visible sur la neige.

D'un œil critique, mon regard passait d'un arbre à l'autre pour trouver le plus " majechtueux" . Et fort était de constater :

Les plus beaux sont les cimes des plus grands sapin Père Marmiton ! Leur vert est plus prononcé et leurs branches plus vir ..... Je stoppais net ma phrase , car un flash irradia ma lanterne et mon visage se décomposa , d'une voix désabusée, je terminais dans un murmure …. plus ferme !

J'allais dire virils , et cet adjectif ouvrit la boîte de Pandore . Elle avait changé .. Elle n'était plus la même parce que ….. parce que …. Je fis taire la suite de mes pensées … "Non non non ! Elle est à moi ! " Me hurlait mon esprit ! Je devins livide et fixait le Padre comme pour lui demander d'infirmer mes craintes .. Je me décomposais , et mes épaules devinrent lourdes tout à coup …


Frere_marmiton


Tout était une question de taille et pour un arbre c'est le cas de le dire, quoi qu'il en soit, étant donné que Marmiton n'est pas ce qu'on appelle un homme svelte et élancé, nous pouvons concevoir qu'il limite ses perspectives à tout ce qui est à portée de ses mirettes, la majesté oui mais à son niveau, malheureusement, tout va à l'avenant quand il s'agit de l'évolution du frère Toque, sauf en de très rares occasions, il ne voit jamais plus loin que le bout de son nez...

Quant à Gabriel qui dépasse aisément le moine replet d'une tête, la majesté est proportionnelle à la grandeur, c'est la branche qui fait l'arbre, ferme et verte avait-il précisé...Le moine faillit avoir un torticolis en levant les yeux et ça le fit maugréer...Marmiton réfléchit à la portée des paroles de Gabriel et en parlant de portée, il ne se voyait pas faire des efforts inconsidérés pour ramener un arbre de noël chez Irella, pas fou le marmiton.

Plus loin, le moine avisa un arbre plus petit mais bien équilibré et lorsqu'il se retourna vers la jeune homme pour lui montrer, il remarqua combien le gamin était livide, le moine plaqua sa main sur sa bouche en croyant que Gaby avait vu une bête féroce, notre moine poltron était près à détaler comme un lapin en hurlant "TAïAUT" mais rien ne semblait bouger dans les environs.

C'est alors que les boyaux du moine se rappelèrent à son bon souvenir, voilà qu'il mourait de faim et il imagina que Gabriel était dans le même état d'inanition que lui, oui ça ne pouvait être que ça et à l'adolescent le moine proposa:


Gaby, chi on cachait la graine avant d'attaquer? Tu dois avoir faim, t'es tout pâlot?

Puis le moine s'inquiéta, il allait se faire tirer les oreilles par Irella si son fils s'était refroidi, alors il ajouta:

T'es pas malade au moins?



.gabriel



Nan ! Fut ma réponse . Brève sèche !

A nouveau mon humeur passa de morose à exécrable ..

Vous pouvez manger ma part , j'en veux pas !

Manger était le dernier de mes soucis, et trouver un sapin, plus du tout une priorité car je voulais réfléchir .
Je me laissais tomber sur une souche prêt du panier , en prenant soin au préalable d'en chasser la neige , puis je me prostrais, coude sur les genoux et mon front appuyé dans la paume de mes mains.
J'aurais pu retirer la corde qui me barrait la poitrine, mais je n'en fit rien, trop absorbé par mes réflexions, cependant je pensais tout haut. Peut-être que dans ma recherche de la vérité, le Marmiton me donnerai son impression, c'est mon subconscient qui me dictait cela, alors qu'il se battait en duel entre mon pressentiment et ma jalousie :

Elle a changé depuis son retour de Honfleur …
On ne bavarde plus pendant qu' elle me prépare mon lait d'amande, le matin, elle n'est même pas présente, son regard est vague et son esprit loin , loin du presbytère ... Ou alors , elle chantonne et ne remarque même pas mon arrivée quant je la rejoins !


Je fronce les sourcils , qui se tordent en un lacet lugubre . A coté de moi je devine que mon compagnon s'offre son en-cas , comme ça , sans cérémonie ! Je doute même qu'il ne récite une bénédicité avant d'honorer les confiseries , mais de toute façon je n'en ai cure . Il doit être aux antipodes de mes tracas , et baigner dans une incompréhension totale du fait de mon comportement depuis le début de notre sortie .
De toute façon, mon attitude j'en ai rien à faire je cherche la corrélation entre le comportement de quelqu'un d'autre et ce qui l'A changé ELLE ! , et une idée commence à germer là dessus !

Je sautais sur mes jambe et m'écriais : Nyix !
Je posais ma main sur le gâteau dans celle de marmiton pour stopper son mouvement et ne l'enfourne pas pour me réponde :

Vous connaissez Nyix Père Marmiton ?



Frere_marmiton


La façon dont répondit l’adolescent aurait pu froisser le moine mais il eut une impression de déjà vu, à part la gueule d’ange de Gabriel , c’était comme s’il se trouvait face à son miroir, sauf que pour lui c’était incurable vu son âge tandis que pour le jeune homme il y avait encore un espoir de guérison.

Marmiton aurait pu pousser plus avant la réflexion mais Gabriel le coupa net dans son élan rétro-psycho-parallèle en l’autorisant à manger sa portion de pitance. Il n’en fallait pas plus pour détourner l’attention que le moine lui portait.

Mauvaise pioche de la part du jeune homme qui après avoir repoussé la nourriture que le frère lui proposait, se laissa choir sur une souche non sans l’avoir préalablement dégagée, ce qui témoigne sans conteste d’un instinct de survie avéré malgré un accablement dont le jeune homme semble souffrir.

Toujours est-il que le frère Toque se persuada que l’abattement de son alter ego du moment était bien le signe précurseur d’une maladie mais il était lui-même animé par son instinct de survie « Ad libitum ».

La tirade dans laquelle Gaby se lança, n’atteint donc le frère toque que par bribes…Fleur….amande…du presbytère…Tandis qu’il se penchait sur le panier sacré et déjà il salivait de pouvoir se farcir toutes les vivres.

Malheureusement, il ne savait par quoi commencer, il se mit donc à baragouiner une espèce d’imploration constituée de questions et réponses, trop de choix engendrant une incohérente attitude dont le cuistron était un accoutumé sans borne.

Le moine était tiraillé entre le morceau de fromage dont l'odeur lui montait au nez et le quartier de gâteau qui lui sautait aux yeux, ce dernier eut finalement sa faveur parce qu’il imagina que Gaby changerait d’avis et que ce serait certainement son premier choix…

Marmiton allait se saisir de la part de gâteau quand le gamin se leva d’un bond en criant un mot que le moine interpréta rapidement comme étant un « non » catégorique, ensuite, il lui attrapa la main, comme s’il avait vu la vile créature et le moine complètement abasourdi pensa : « il est fou ? Vl’à qu’y m’cause en arabe cré nom! » et le jeunot surenchérit par une question qui laissa le frère pantois quand il entendit que Gaby l’appelait père Marmiton…Pourquoi pas père Dodu ? Fut-il tenté de rétorquer à l’adolescent croyant qu’il se moquait de lui…

Certes, il était le père Casse croûte pour l’archevêque de Cambrai mais ce sobriquet ne lui servait qu’à se faire passer pour un autre aux yeux du prélat si obsédé par les hérétiques.

En son for intérieur, le frère Toque eut tout de même la sensation que Gabriel lui accordait une certaine importance et il en fut flatté l’espace de quelques instants... Avant de réprimer cette émotion qui ne mènerait nulle part selon lui, ce qui l'incita à prestement ramener son regard sur la boustifaille.

Pendant que le moine plongeait le plus discrètement possible la main non pas dans le sac mais dans le panier, il fixa Gabriel et lui répliqua :


Nenni j’connais pas, ch’est quoi? d’l’arabe?



Ad libitum: signifie littéralement « à volonté ».
.gabriel



De l'arabe ! Erf ! C'était pas possible ça ! Décidément il ne tirerait rien de Toque , à croire qu'il ne voyait pas la vie autour de lui, il devait vivre dans une bulle , où le monde n'était qu'une fratrie anaphrodisiaque !

Je fis un quart de tour sur moi même, lui abandonnant son gâteau , puisque tel semblait être son plaisir, et donnait , par dépit, un coup de pied dans la profondeur de la neige au passage !

Je fourrais mes mains dans les poches , agacé de n'avoir obtenu aucun éclaircissement sur rien auprès de frère Marmiton.
Je n'était plus en colère , résigné plutôt, et j'abandonnais l'idée de le questionner encore.
Je restais debout le dos tourné à mon compagnon , et visait un arbre , un jeune sapin touffu d'environ six pieds, qui tentait de se frayer un passage vers la lumière , entre quelques jeunes châtaigniers et deux bouleaux à quelques toises devant moi.

Pas de l'arabe non, mais je l'enverrais bien voir chez les maures si j'y suis , c'ui là ! Répondis-je doucement ..Du latin cette fois , certainement pour le pauvre frère qui devait y perdre le sien ..

Je pointais du doigt vers le sapin et demandais :

Il vous plaît celui-ci ?

En attendant sa réponse , je récupérais la hache , plutôt pressé de rentrer , afin de voir si l'escorteur arabuesque n'avait pas profité de mon absence pour tourner autour de mère ...



Frere_marmiton


La réaction du jeunot ne se fit pas attendre, il ne s'intéressa pas plus au morceau de gâteau, ce qui ravit le moine qui le regarda néanmoins s'acharner sur un tas de neige avant de saisir le dessert et de l'engloutir....quel délice...

Quoi qu'il en soit, Le Frère n'aurait pas voulu être à la place dudit tas sur lequel Gabriel jeta un coup de pied quant aux poches de sa braie, elles risquaient de craquer à tout moment tant la pression qu'il exerçait dessus était forte.

Marmiton pensait en homme avisé ayant déjà pu expérimenter les conséquences de ses actes d'antan mais à présent qu'il était une grande personne il pouvait se permettre tout ce qu'il lui passait par la tête et ce n'était pas ce garnement qui allait remettre en cause ses certitudes si tant il en possédait réellement...

Gabriel finit par s'immobiliser, le moine ne pouvait le voir que de dos mais cette fois il entendit nettement ce que l'adolescent marmonna, et tandis qu'il montrait un arbre au moine, ce dernier se laissa gagner par une nouvelle salve de questions relatives au comportement de Gabriel...

Il avait bien entendu parler d'envoyer un arabe chez les maures voir s'il y était....Des morts il en avait vu à la pelle mais pas ceux dont Gabriel parlait...Marmiton se frotta le visage avec ses mains comme pour mieux se connecter à la réalité...Il se leva et alla se planter devant l'adolescent, il posa sa main sur la front du gamin histoire de voir s'il avait de la fièvre mais ce n'était pas le cas...Marmiton ronchonna car cette situation commençait à lui échauffer le sang, si ça continuait c'est lui qui allait être fiévreux...

Le moine porta ses poings aux hanches avant de s'adresser avec fermeté à Gabriel:


J'ai jamais vu d'auchi ronchon qu'toi Gaby, j'ai tout fait pour t'faire plaisir mais t'es qu'un ingrat mais là tu m'intrigues, j'comprends rien à tes hichtoires et j'commenche à me d'mander chi t'as pas bu trop de calva!

A son âge pensa le moine courroucé...

Alors là tu vas t'mettre à table!... expression très appréciée par le moine cuistot...tu vas m'dire ch'qui t'pose problème et chi t'es incapable d'expliquer, ch'est que t'es fol à lier!

.gabriel



A table  ? Il devait se mettre à table  ? Alors là  ! Il en avait soupé  !

Ch'est que t'es fol à lier ! Vexant ça  ! et pire , c'est que Toque lui tâtait le front en plus  !

Je regardait le frère ahurit par son audace , et profondément troublé par la révélation de mon esprit.

Je me reculais d'un pas , pour me mettre hors de porté de sa main. On ne pouvait pas dire qu'il était pédagogue, ça non, mais je pouvais presque comprendre le désarrois de mon accompagnateur, tant je m'étais montré désagréable.

D'un mouvement de balancier du bras , j'envoyais la hache dans ma dextre vers le panier.
Elle se planta profondément dans la neige, et seul un pouce du manche resta visible. A nouveau je fourrais mes mains dans mes poches autant pour m'obliger au calme , que pour réchauffer mes doigts gourds et rougis par le froid.

J'ai pas le béguin hein ! Les filles ça m'intéresse pas ! Lui envoyais je à retardement sur un ton péremptoire , pour me venger de ses suppositions.

Il y avait bien la_Guillemette que je voyais de façon épisodique, mais elle était pour moi une compagne de jeu et rien d'autre. Que ferais-je d'une fille ?

Il était encore de cet age, où l'on entre au stade de l'observation,sans le laisser paraître. Quoique chez lui , ce stade n'était pas encore réellement entamé , il aimait sa solitude, ses expériences dans la forge de sa mère, ses heures de lecture ou d'essais en calligraphie , ses promenades sur le sentiers des douaniers ...

D'autres images aussi se lièrent en farandole , pour tournoyer en un kaléidoscope de souvenirs entre-mêlés; le projetant à Dieppe où il avait vécu. La bas, un fils de métayer venait partager ses jeux parfois , remplaçant ce frère qu'il n'avait jamais eu, son père parti trop tôt …

Père !…

Je tressailli sous la gifle que m’assénait le bandeau de mes souvenirs, en brandissant devant moi le portrait de Père et me rembruni.
J’eus envie de tout planter là, d'oublier notre mission, cet arbre, et même le père Marmiton alors qu'un vide douloureux et oppressant me comprima le torse. Je compris que mes craintes avaient éveillés ma peine, car très vicieusement, elles substituaient son souvenir au portrait d'un autre , qui semblait vouloir se rendre utile plus qu'il n'était coutume à un paroissien de le faire auprès de maman .. Nyix !

L'après midi avançait doucement , et la froidure augmentait avec lui, soufflant en une bise mordante. L'ombre des arbres qui nous couvrait à présent tendait à faire baisser la température , alors je fis un quart de tour sur moi même pour me présenter Dos au vent , se qui eu le don de soustraire mon regard à celui de Toque.
Me sentant moins acculé à devoir lui répondre , je décidais de lui confier une part de mon fardeau d'un ton plus modéré , tel le souffle d'un long soupir de contrariété :

Depuis le retour de mère de Honfleur, son escorteur reviens souvent se rappeler à son bon souvenir , plus que de raison à mon goût , et maman a changé … Déjà je n'ai le droit de l'accompagner que très rarement lors de ses déplacements car mère crains le dangers sur les routes, mais si un homme lui tourne la tête , elle partira encore bien plus souvent et finira par nous oublier ….

Sans m'en rendre compte, j'avais inclus mon paternel dans son oubli .


Frere_marmiton


Gabriel médusé prit instantanément de la distance par rapport au moine, tandis que la situation prit une tournure pathétique quand l'adolescent attrapa la hache, la fit balancer avant de la lancer pour la planter dans la neige, le moine en resta figé...

Pendant une fraction de seconde, il avait bien cru qu'il allait la recevoir dans le bide, de fait, il avait pris conscience combien la colère animait le jeune homme et s'il n'avait pas la faculté d'entrer dans la tête des gens comme aurait pu le faire feu son mentor, Monseigneur Honoré. Il s'en tînt à ce qu'il faisait depuis le début de leur escapade, il se rappelait sa propre histoire, toutefois, même brimé comme il l'avait été, jamais il n'aurait eu un accès de colère aussi manifeste, sans doute était-il trop couard ou peut-être avait-il trouvé une échappatoire qui l'empêchait d'arriver à de telles extrémités...Mitonner, voilà ce qui l'avait sauvé!

Gaby enfonça à nouveau ses mains dans ses poches, témoignage du malaise qu'il ressentait après avoir extériorisé sa frustration avec autant de fureur et ce qu'il lâcha en paroles tranchantes vînt confirmer les impressions de moine qui ne serait certainement pas à la hauteur des attentes du jeune homme, lui même, encore à ce jour, était en constant combat avec la complexité de son être...

Pour être bien certain de ce qu'il avait entendu, Marmiton se répéta intérieurement ce que le jeunot venait de lui dire, il n'avait pas le béguin, les filles ne l'intéressaient pas,,,Instinctivement le moine balança la tête de gauche à droite tant cette affirmation lui sembla saugrenue, Grand Dieu, lui au contraire, les filles il en aurait fait son quotidien et pas qu'un peu mais il n'avait pu laisser libre cours à ses pulsions, en tous les cas pas avec une fille de son âge, celle qui s'était occupé de le dépuceler avait 15 ans de plus que lui et trois lardons à élever, une bonne amie de sa mère qui s'appelait Gertrude...

Le moine laissa échapper un grognement avant d'être tiré de sa songerie par les réflexions intermittentes de Gabriel, le gamin avait beaucoup de difficultés à exprimer son trouble...ça commença par père..un silence s'ensuivit et puis ce fut cet étrange nom qu'il avait déjà prononcé..Gabriel s'interrompit une enième fois et soudain il déballa la cause de son souci..

Marmiton hoqueta en faisant les yeux ronds, il aurait pu essayer d'analyser ce que Gabriel venait de lui révéler pour le raisonner mais il vit de suite midi à son clocher, le moine ramenait tout à lui et il ne balayait que très rarement devant sa porte, il compatit aussitôt, cette révélation l'avait bouleversé, d'autant qu'il se souvînt de ce que la soeur Irella lui avait écrit lorsque qu'elle avait perdu son mari et le moine de rapporter ces dires tout haut en grinçant des dents :


Ah ben cha, y m'chemble qu'ches bonnes résoluchions lorchque ton père est mort ont été mises à l'écart, ta mère n'manque pas d'air, elle m'avait dit qu'elle n'aurait jamais d'autres z'hommes dans cha vie, qu'elle ch'ferait ordonner pour conchacrer cha vie à ches chemblables et à toi !

Marmiton maugréa, il était prêt à faire demi tour, tant cette nouvelle le contrariait mais une voix intérieure l'en empêcha, ça allait lui demander un sérieux effort mais il allait lui falloir mordre sur sa chic pour faire bonne figure devant la soeur, il fit donc malicieusement part de son idée à Gabriel :

On va couper l'plus grand arbre qu'on trouv'ra, l' plus beau, ch'lui dont elle che chouviendra Gaby, on va l'décorer avec tant d'goût qu'elle en aura des étoiles juchque dans les yeux, fais-moi confianche, elle va en pleurer...d'joie !ajouta-t-il...

Le moine se cracha dans les mains, il les frotta l'une contre l'autre et déterra la hache, tout un symbole, la guerre était déclarée à ce Nyix de malheur !



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