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[RP] Corps n'est lien que si on en fait le choix...

Laell
[Saumur]

C'est dingue comme une simple rencontre peut bouleverser une vie. Tout commença un soir comme les autres dans une taverne saumuroise, une entrée, quelques banalités d'usages échangées.

"B'soir"
"Enchantée"
"Moi pas encore, ptet plus tard"


Ah ça, la Corleone ne pensait pas si bien dire. Elle n'était pas à proprement parler antisociale et suivant les jours, elle le serait plus ou moins, mais elle savait par expérience que les rencontres hasardeuses en taverne n'étaient pas souvent enchanteresses. Après un petit moment de discussion, voilà que la brunette face à elle se présenta : Enjoy Corleone MacDouggal. Comment ça Corleone ? C'est vrai que la famille était grande et quelque peu éclatée mais Laell ne s'attendait pas à trouver une cousine inconnue sur sa route. Et encore moins à ce qui arriverait par la suite, mais nous n'en sommes pas encore là.

Comme à son habitude Laell restait sur la réserve avec cette nouvelle arrivante, surtout que celle ci se disait de la famille. La gamine - qui n'en était plus vraiment une - passa plusieurs heures à observer les réactions de sa cousine, tentant d'en provoquer par moment. Elle voulait la cerner avant de lui accorder sa confiance. Celle ci était vive, fougueuse même, tantôt agressive, tantôt exubérante, cherchant toujours à ce qu'on la remarque. Chose qui ne plaisait que très rarement à Laell, elle qui était plutôt posée et observatrice. Rien dans le comportement d'Enjoy n'aurait dut lui plaire et pourtant...

Quelques années auparavant, c'était elle et sa cousine Elwenn qui se comportaient ainsi sous le regard bienveillant des autres membres de la famille. Etait ce là un trait de caractère Corleonien ? Celles ci apprenant à se contenir quand nécessaire au fil du temps... C'est fort probable, on le constate avec bien d'autres jeunes Corleone.
Elles portaient un nom qui avait brillé, qui avait été craint dans tout le royaume et au delà. Ainsi la jeunesse se croyait elle dans l'obligation de se montrer forte et dure pour acquérir ses gallons au sein même du clan ?

Les jours passaient, se ressemblant tous. Nouveaux visages, nouvelles rencontres et toujours plus de bière avalée. Faut dire que Laell savait y faire pour se les faire offrir, heureusement pour elle parce qu'avec ce qu'elle buvait, jamais elle n'aurait les moyens de s'entretenir elle même.
Chaque nouvelle rencontre avec sa cousine apportait son lot d'agacement. Oui Enjoy agaçait particulièrement Laell qui ne se gênait pas pour la remettre en place à chaque occasion que ce fut par les mots ou par les gestes.
Mais aussi, chaque fois, celle ci était touchée par ce que dégageait la jeune femme. Elle tentait de cacher derrière son agressivité un manque cruel de confiance, en tout cas, c'était ainsi que le voyait Laell.

Puis un courrier, un simple courrier, obligea la jeune femme à s'exprimer. A réfléchir à ce ressentit qu'elle avait, à rassurer celle qui en face doutait et voulait bien faire. Nombreux étaient ceux qui avaient connu Sad à Saumur et beaucoup s'amusaient à comparer cette jeune génération avec leur tante. Oui, elles étaient loin d'avoir l'expérience de celle ci mais elles en avaient le sang et la hargne, un jour viendrait où on les regarderait avec appréhension. Laell en était sûre, on reparlerait d'eux prochainement.

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Enjoy

    Bien avant de trouver la Raison, le Sage se perd dans les méandres de la Folie...


    [Let Them Talk*]


    Après des mois à errer dans les bois telle une âme en peine, l'envie soudaine de retourner à la civilisation se fit sentir. Une once de curiosité sans doute aussi. Comprendre et apprendre, voici ses maîtres mots. Fureter pour une Furette dans les ruelles de La Flèche, s'y sentir comme une étrangère. Jaugeant les gens, tentant de s'insérer dans ces groupes qui refusent de s'ouvrir comme des coquilles subissant la marée. Sa présence était bien secondaire. Aussi voyant qu'elle était de trop, elle prit la route vers Crâon afin d'y rencontrer Alacian, admor Spinoziste. Seulement les aléas du quotidien les menèrent à seulement se croiser. En effet ce dernier dut se rendre à Saumur suite à des menaces d'attaques étrangères sur l'Anjou. Il n'eut de cesse de lui dire de rester bien sagement en ville. Il la prenait pour qui ? Une jeune donzelle en détresse qui attend à l'arrière son promis ? Malgré de belles rencontres, notamment Cune, elle décida de mettre un terme à son séjour dans cette bourgade bien trop paisible.

    Direction Saumur. Cette ville est bien incompréhensible. On peut penser la connaître puis elle nous surprend encore et toujours. La populace est discrète, du moins c'était le cas en cette période où les brigands étaient légions. Il se préparait quelque chose d'une ampleur hors du commun. Enfin c'est ce que disaient bien des gens. L'histoire nous apprendra que leurs manoeuvres ne furent qu'un cuisant échec.

    Comme à son habitude, elle se rend dans la taverne la plus proche. Les discussions vont bon train et pour ne rien changer la mustélide est toujours aussi appréciée. Mais ces constantes se voient soudain perturbées lorsqu'une jeune femme aux yeux noisettes et à la chevelure brune passe le pas de la porte. D'abord vient le temps de la courtoisie, un simple Bonjour est échangé. Au fur et à mesure, les langues se délient et les facettes se dévoilent. Deux Corleone se font face. Réciproques dans l'ignorance de l'autre. Les journées se succèdent où Joy tente d'analyser, d'observer sa cousine. Il se dégage une multitude de choses de sa personne. Du calme, du charisme, de l'intelligence et aussi, même si elle ne veut pas l'avouer, une forme de gentillesse. Mais parfois les instincts primitifs refont surfaces et elle pique, elle enfonce les aiguilles dans les âmes trop sûres d'elles. Quelle fut sa surprise quand elle vit Laell agresser verbalement son "jouet". Quelle violence ! Enjoy était à la fois admirative et interloquée. Elle pensait avoir fait le tour de sa personnalité ou du moins les grandes lignes. Mais c'est mal connaître l'Italienne qui déborde de complexité.

    Quelques claques derrière la tête, quelques maigres reproches. Parfois un manque de soutien. La sensation d'être une pièce rapportée qui fait tâche au milieu d'une belle collection. La soirée avec le procureur Angevin et l'amie de Laell en est le plus bel exemple. La furette était en furie. Sans doute voulait-elle briller plus que de coutume... Cherchant sans cesse la moindre personne. Quand soudain le blond masqué lui porte un coup sur la tête. Naturellement, elle y répond vivement. Ce n'était rien de plus qu'un piège...prévisible. La Pique engrossée se mue en témoin tandis que sa propre cousine n'y trouvait rien à redire. Lors d'un simulacre de procès, malgré une relaxe logique, les semences d'une rancoeur furent jeter. Désormais, elle devait de se contrôler. Tandis que les plants de la haine commencèrent à germer...

    ...

    Les pieds dans la boue, des nuits privées d'intimité et de confort. Puis encore ces échanges épistolaires. Des remises en question. La poursuite d'un idéal. Dompter l'autre. Le faire courber, l'épouser dans son mouvement. Puis...

    Plus rien.

    L'attaque Orléanaise n'était qu'un coup d'épée dans l'eau. Les Corleone furent blessées, certes physiquement mais surtout intérieurement. Joy le savait, elle ne sentait pas cette histoire depuis le début. D'ailleurs, elle s'était confiée à ce sujet à sa cousine. Qui lui avait répondu d'une manière peut être pas des plus appropriée qu'elle était libre de faire ce qu'elle voulait... Ce qui blessa profondément la "pois cossaise". Et quand il s'agit de convalescence, c'est à Saumur que les médiscastres et autres bonnes femmes se transformèrent en bougies afin de rester à leurs chevets. Joy n'a rien eu de bien mémorable, juste un bleu. Aussi, tournant en rond, elle crut devenir folle.

    Et c'est un soir qu'une chose se produisit. Elwenn, son autre cousine, l'a délaissée au profit d'un sombre pécore. Ce fut la goutte d'eau. Déjà qu'elle se sentait rejetée, l'attitude de la rousse la conforta dans son idée. Malgré une profonde estime et du respect pour les siens, elle préféra quitter la ville une fois la nuit tombée. Lors de ses pérégrinations, elle se retrouva avec elle-même. Ce qui était à la fois profitable et néfaste. Parce que l'endurcie qu'elle était, devenait de plus en plus douce et mielleuse. A croire que c'est son entourage proche qui lui donne la force d'exister. Happée par la noirceur ou la blancheur de ceux qui l'entourent. Une chose est sûre, elle a pallié le manque, la perte de ses cousines par la luxure. Allant jusqu'au dégoût. Plus jamais. Plus jamais, elle ne recommencerait. Même si bien sûr, elle était une sorte de volatile ayant besoin de temps à autre de se dégourdir les ailes pour ne pas se perdre.

    Un mois plus tard...

    Les retrouvailles. Une soirée emplie de joies et de rires. Elle savoure la présence de ses deux cousines. Malgré une belle noirceur au tableau...un messager de l'Amor là...à la noix. Elwenn était agréable et déconneuse. Laell toujours elle-même, bien qu'un peu bizarre...
    Le retour au calme. Laell et Enjoy, seules, discutent sans réellement se fixer sur un sujet. Sa cousine a beaucoup bu, plus que de coutume. Est-ce pour fêter quelque chose ? Ou bien pour enfouir des pensées envahissantes ?

    La première fois n'a que des allures d'avant goût lorsqu'elles se cherchent sans vraiment se trouver. Quelques moments de tendresses, un désir naissant puis leurs mains se rencontrent, leurs desseins s'esquissent et se découvrent. Et d'aventures en aventures, l'élan se fait conviction. Jusqu'à ce que sonne le glas de la passion naissante. Initiée par Enjoy qui malgré l'extase se conforte à croire que Laell lui fait une faveur, un précieux présent qu'elle ne mérite pas forcément. Cela ne sera que partie remise.

    La seconde fois, sur la plage de leur tranquillité, quand le verbe ne suffit plus et ne trouve plus sa place dans la formation des phrases. Elles se rapprochent, se détaillent sans dire un mot. Jusqu'à ce que... Les Sages perdent totalement le sens des réalités. S'instruit le miroir de leurs visages, si proches, si éloignés de la convention. Dans un mouvement assassin du temps, leurs lèvres se scellent, les langues joueuses se lovent. Une explosion d'émotions surgit alors, les non-dits deviennent des lionnes rugissantes. Tandis que leurs échangent se font plaintifs et que leurs ombres s'épousent. Une main en guise d'invitation pour rejoindre le camp et poursuivre les négociations.

    Au sein de la clairière, les étoiles se fixent dans le ciel endormi. Courageuse et défaillante, elle songe à un passé récent. Laell : Refusant sans cesse ses avances, leurs complicités non dissimulées, ce soir-là où elle se mit à chercher d'un peu trop près le Colosse. En résultat un nez ensanglanté et une légère perte de connaissance, faut dire qu'il est massif le bougre. Sa cousine fut la seule à rester pour éponger le sang, la douleur et pour la soutenir aussi physiquement que moralement. La Furette lui avoua alors qu'elle avait fait cela sachant pertinemment qu'elle prendrait un mauvais coup. Mais on ne pouvait dire du mal de ses cousines et encore moins de celle qui la tenait dans ses bras en cet instant. On assure les réprimandes que l'on peut, avec les moyens que l'on a...

    Dans la couche de leurs plaisirs, la mustélide oublie un moment qu'elle est une Corleone et ses rêves de gloires pour s'abandonner toute entière à la geôlière de son coeur.
    Quelle hérésie... Souffrir de goûter au fruit de la tentation. L'interdiction ultime, la Folie suprême, le non sens des sens...


*Laisses-les parler.
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Laell
De Saumur à Orléans, retour à Saumur.
Le désastre n'avait pas été évité, le retour fut douloureux. Blessée par une personne qu'elle avait appréciée à Blois, Laell devait se soigner avant de reprendre la route. Route qui l'appelait, qui l'obsédait, partir... Quitter cette ville qui n'avait plus qu'un gout d'échec, l'excitation d'une guerre avortée d'un coup d'épée mal reçu avait fait place à l'attente du nouveau départ.
Temps qu'il faut occuper comme on peut, soirées passées en taverne, rapprochement de deux femmes. D'agacement à attachement. Envie de protéger face à un devoir de paraitre dure. Jamais la jeune femme n'avait fait montre de ses sentiments comme elle l'avait fait avec Enjoy. Oh certes tout cela restait très chaste, mais elle sentait bien qu'elle ramollissait au contact de l'écossaise. Quand les deux cousines étaient seules, elle n'arrivait pas à conserver ce voile derrière lequel elle se cachait pourtant si bien habituellement. Se montrer douce, la regarder attendrie, arrêter ce flot de sang, l'entendre refuser qu'on l'attaque, elle sur qui les pensées des autres glissaient toujours, elle était troublée et ce n'était pas normal.

Puis vint le jour où elle apprit le départ d'Enjoy, partie, blessée, sans même prévenir. La veille, une fois de plus la brunette lui avait dit qu'elle était libre, qu'elle n'avait qu'à partir si elle le voulait. C'était vrai, mais la Corleone n'avait pas prévu que ça arrive comme ça.
Pas même un courrier, rien, alors qu'elles avaient correspondu pendant des jours avant ce départ. Ecrits qui reflétaient bien plus les sentiments de Laell que ses actes en public. Il lui fallait garder son comportement rude, hors de question de laisser apercevoir un semblant de sensibilité. Plutôt mourir que de passer quelqu'un de faible.

Le temps passa, toujours aucune nouvelle, après un passage fugace dans sa vie, Enjoy avait reprit sa liberté dès qu'elle avait pu. Laell n'écrivit pas plus. Hors de question ! Certes sa cousine lui manquait mais c'était elle qui était partie sans prévenir. Le retour sur les routes fit un bien fou à la gamine, elle avait un groupe à guider, une bonne raison de cesser de penser. Il fallait se concentrer sur le but de leur voyage. Les choses se mettaient en place.

Puis Joinville...
Quelques jours qu'elle trainait là dans l'attente du reste de la famille, quelques rencontres agréables. Retour d'Elwenn en taverne, nouveau futur ex futur époux pour la rousse. Des bières partagées, des éclats de rire aussi. Laell profitait de l'effusion créée par l'attaque prochaine. Une chose toutefois lui revenait en tête, elle savait qu'Enjoy serai de la partie mais elle ne se montrait pas. Un instant de faiblesse au matin, elle prit sa plume pour lui demander de venir.
Le départ était prévu pour le soir même, les choses continuaient d'avancer. Quand enfin la porte s'ouvrit, les cousines de nouveaux réunies, la soirée fut arrosée bien plus qu'à l'accoutumée, les regards rieurs et les rires continuèrent tard dans la nuit. Puis chacun rentra dormir un peu, laissant les deux Corleone seules.
Rapprochement physique infime, jeux de regards, idées fugaces qui prennent forme. Ils étaient loin ses besoins de carapaces, sa raison s'envola, la laissant seule submergée d'émotions inconnues. L'alcool était là, noyant sa raison. Elle continua de boire, encore et encore. Laisser libre cours à son corps de profiter de ce qu'il lui réclamait et qu'elle ne voulait plus faire taire. Elle aurait le temps d'y penser une autre fois. Ce soir là était pour elles, uniquement. Le monde s'effaçait laissant les deux femmes savourer ses retrouvailles dans un élan de sentiments interdits.

Comme un criquet saute sur un brin d'herbe en été, la raison pointa son nez dans l'esprit d'Enjoy qui repoussa sa cousine pourtant prête à se donner à elle. Envie brisée dans son élan, dur retour à la réalité. Les corps se séparent, les doutes s'installent.
Les vapeurs d'alcool présentes ne laissent pour l'instant place qu'à peu de réflexion. Elle regretterait lui disait Enjoy. Peut être mais sur l'instant la seule chose qu'elle regrettait c'était d'avoir été ainsi rejetée. Retour au campement et départ pour la campagne. Elles ne verraient pas de ville avant une bonne semaine.

Chaque pas était lourd, son corps la punissait... d'avoir trop bu ou de ne pas avoir forcé les choses... Esprit obsédé par cet échange de baisers, ces caresses inachevées. Mais il y avait le but de ce voyage, elle ne devait pas l'oublier et chaque fois qu'elle essayait de concentrer son esprit vers lui, l'image revenait. L'envie était là et ne la quittait pas. Sentiments d'être faible, incapable de tenir ses pensées à l'écart. La route fut avalée sans qu'elle s'en aperçoive. Le camp fut installé, la gamine dormit un peu, rêves envahis, son esprit refusait de changer d'itinéraire.
Le réveil fut des plus douloureux, son corps meurtrie par l'alcool refusait tout mouvement, le sommeil la fuyait comme la peste et ses pensées toujours tournées vers Elle. Si près et pourtant si loin.

Gueule de bois d'avoir trop bu ou d'avoir gouté sans s'abreuver réellement. Deux femmes ensembles, l'idée n'était pas évocable pour Laell et encore moins deux cousines mais pourtant elle faisait son chemin. L'alcool s'évaporait doucement, rendant sa lucidité à la Corleone. Que serait le futur si elle s'adonnait à son plaisir ? Comment pouvait-elle ressentir autant d'attirance envers celle qui partageait son sang ? Comment le vivre ? Jamais elle ne pourrait le laisser entrevoir. Honteuse jusqu'au bout de son âme si quelqu'un l'apprenait. Pensées secrètes et inavouables, pourtant tellement agréables. Coeur qui s'emballe à la simple pensée de cette soirée.

Nouveau soir qui pointe, hasard qui les fait se croiser, torture psychologique, raison qui s'efface. Face à Elle, qui l'a repoussé la veille comme pour mieux l'envouter. Mélange des corps et des coeurs, passions refoulées enfin libérées. Interdits rendant les actes encore plus délicieux. Le monde disparait de nouveau. Il n'y a plus qu'elles. Jouant, se découvrant, partageant. Instants de bonheur poussés à l'extrême.
Puis après la tempête le calme retrouva ses droits, la marée passa, laissant les deux femmes à leurs pensées. Corps serrés l'un contre l'autre, partageant la même couche. Le froid ferait une bonne excuse si on les remarquait au lendemain.
Le futur serait réfléchit une autre fois, éloigner la réflexion ne fera pas disparaitre sa nécessité mais l'atténuera au fil du temps.

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Enjoy
    « Stare into my eyes... »

    Sentir sa présence la rassure. Leurs deux corps exempts de vêtements se mêlent l'un à l'autre. Postée sur son flanc gauche, une main posée sur les hanches de l'Italienne, les paupières closes. Voici le portrait de deux jeunes femmes. Elles se cherchent, se découvrent, s'apprécient bien plus que de raison. Celle-ci leur a fait défaut dès lors qu'elles décidèrent de consommer ce fruit défendu. La respiration de la mustélide est tranquille. En sa compagnie, elle est en sécurité. Loin est le temps de ses déboires au sein de son quartier Spinoziste. Les bagarres pour gagner sa vie encore plus. Désormais, elle arpente les routes avec sa famille maternelle, goûtant aux mamelles de la Gloire d'un nom qui évoque le respect et la crainte.

    La lumière pénètre au sein de leur couche. Un battement de cils s'en suit puis sa répétition dénote l'arrivée imminente des sens qui s'éveillent. L'esprit embrumé remet en place ses connexions logiques. Le cerveau évapore l'afflux soporifique des vapeurs nocturnes. Un muscle se bande, la réaction est des doigts qui gigotent légèrement. Les yeux s'ouvrent et laissent éclore perpétuellement des joyaux noisettes aux reflets ébènes.

    La pensée se fait sensation de bien-être tandis que sa main glisse délicatement sur la croupe incendiaire de sa partenaire. Son visage s'illumine à l'évocation de pouvoir toucher ce corps qu'elle a tant espérée. Se servant de l'appui de son coude, elle se rehausse s'approchant par là-même de Laell afin de venir perturber son sommeil en déposant un chaste baiser dans le cou. Dextre délaisse soudainement sa danse lascive contre l'épiderme de la brune pour dégager sa chevelure. Les lèvres d'Enjoy viennent prendre le pouls de la rêveuse alors que cette main, qui a rendu un précieux service, repart vers d'autres contrées. Le sillon du mont de Vénus pour quelques timides sursauts d'envie. L'Italienne pousse un petit son semblable à une plainte, se mettant sur le dos le faciès encore endormi. Elle offre son regard à la Furette qui y répond d'un sourire tendre. Son index s'évade alors dans ce qu'il contournait jusqu'à présent. L'excitation inonde d'onde son cortex ce qui a pour résultante d'augmenter l'étreinte de cette torture physique indéfinissable.

    La frimousse de la mustélide côtoie celui de sa compagne, pauvre hère en détresse, qui se voit infliger d'un échange buccal encore quelque peu timoré. La franchise sera pour plus tard. Pour l'instant, il s'agit de tester les constantes de la brune qui lui fait face. Rien de mieux pour cela que débuter un long pèlerinage. Celui menant à la route du péché. Où le pèlerin n'est rien d'autre qu'une langue joueuse avide de se délecter de mille délices.

    Une gorge en guise d'introduction, puis l’ascension du plaisir fait écho à une descente contrôlée qui vient titiller la pointe d'une poitrine délicieuse. Succions, mordillements délicats, assaisonnés d'un baume appliqué par cet ustensile qui définitivement a bien des utilités et ne sert pas qu'à s'exprimer. Sa course effrénée pour les émotions qu'elle procure, s'allie avec les secondes d'un million de caprices. Ils viennent s'étaler sur le ventre de la belle. Ses courbes parfaites n'expriment que la volonté de se faire dévorer à chaque rencontre, chaque moment partagé. Puis c'est désormais autour de sa féminité de subir la sentence promise. Les doigts rieurs de Joy cèdent la place à une sensation chaleureuse. Sa langue câline plus que nécessaire tantôt suave dans l'action tantôt force de conviction quand il s'agit d'asséner le fléau de ses pulsions. Après bien des minutes complices de ces terribles sévices, la mustélide enjambe sa prisonnière et revient à sa hauteur. Elle la prend alors dans ses bras et clôture par un simple :


    Bonjour...

    Ses lippes esquissent un dessin enjôleur embrasant sa frimousse. Elle se relève et va se saisir de ses sempiternelles haillons qui recouvrent partiellement ce qu'il faut cacher. La furette s'étire pour redonner un peu de vigueur à son corps endolori. Ses doigts glissent dans sa crinière pour qu'elle recouvre un peu de sa superbe. Et comme un rituel, elle farfouille dans sa besace à la recherche de sa gourde ou du moins de ce récipient assimilé comme tel. Quelques gouttes pour raviver la joliesse effritée d'une nuit difficile. Sa toilette est simpliste mais pas inexistante. Elle aura tout le loisir de s'adonner aux joies d'un bain dès lors qu'ils seront en ville.

    Cela tombe bien parce que justement la civilisation est leur destination. Après des jours de marche en rase campagne, le but n'avait jamais été aussi près. Le plan initial a connu quelques modifications suite aux évènements Lorrains. Une armée avait mis en alerte la plupart des villes. Les défenses étaient plus hautes que de coutume et les gardes sur le qui-vive. Alors suite à des tractations Toul fut choisi comme lieu de villégiature.

    Relater ici l'essence même de l'attaque n'a que peu d'importance. Dans les grandes lignes, une diversion fut faite par la matriarche qui attendait un malheureux évènement, la naissance d'un mouflet. Les hommes en faction furent happés par la blonde engrossée sur le point d'engendrer la future engeance du royaume... Sa cousine prit la place de bourgmestre et la première chose à faire pour ses nouveaux administrés était de leur signaler la présence des Corleone certes, mais aussi de leur souhaiter une bonne journée.

    Les Toulaids sont une peuplade sauvage qui ne sort que très peu. Les quelques rares échantillons de la faune locale montrèrent une piètre image de la ville. Au fond, cette prise de mairie était méritée. Les Corleone leur avaient donnés une leçon. Espérons qu'ils vont la retenir. De toute façon, la famille en son entier a décidé de revenir afin de s'en assurer. En réalité, la noblesse du crime fait preuve d'altruisme. Laell prenait très à coeur son nouveau rôle. Elle était cheffe de groupe et désormais la pilleuse de Toul. Celle sur qui on mettrait un nom pour parler de cette infamie. Les résidents de la bourgade et les Lorrains dans leurs ensembles se souviendraient certainement d'elle.

    Même si l'exposition qu'elles auraient dû mériter n'a pas été au rendez-vous à cause de l'armée empêcheuse de piller en rond. Toutefois, on pouvait sentir poindre une touche d'agacement de la part de ces derniers. Surtout lorsque la Furette décida de mettre les choses aux claires via une affiche. Un communiqué si on veut, sur la situation réelle. Afin de bien expliquer la différence existante entre les deux groupes. Malgré ceci certains membres, au moins un, y trouvèrent à redire. Ainsi une lettre fut envoyée à la mustélide qui s'empressa de la partager avec le reste de la famille. Utiliser de l'encre pour répondre aurait été du gaspillage. Une Corleone ne s'abaisse pas à s'entretenir avec la fange, elle laisse cela à d'autres. Question de prestige et de hiérarchie sociale. Des rires. Voici ce que ce parchemin leur évoqua. Faut dire que dans la région les troubadours ne manquent pas.

    Pendant ce temps, les parts furent distribuées et les cadeaux qui lui avaient été promis aussi. La Furette arborait désormais une superbe tenue de rouge et de noire. Un savant mélange de sombres et de passions, de discrétions et d’exubérances. Un beau résumé des multiples facettes de sa personnalité. Mais bientôt ces offrandes donnèrent lieu à des crises de jalousie. Toujours excessives quand celles qui les prodiguent ne sont que des femmes aux ambitions démesurées. Cela va de paire.

    Et c'est après avoir quittés Toul en pleine campagne qu'un heurt causa une réaction de la part de Joy. Enaell, la soeur de Laell, trouvait bien des choses à redire sur ce rapprochement entre elles. Qu'elle avait eu des cadeaux et pas elle, qu'elle passait du temps avec sa frangine et pas elle. La mustélide n'est pas vraiment un modèle de patience mais pourtant pour sa famille elle encaisse sans dire un mot. Maugréant de temps en temps en silence. Mais là c'était le débordement d'un vase qui avait été allègrement rempli. Joy annonça alors vouloir retourner à Saumur. Sa quête de solitude... Se levant sans faire un bruit, elle prit la porte tandis que Laell tentait à sa façon de la retenir sans trop se dévoiler non plus...

    ...

    Assise sur une pierre, les coudes posées sur ses genoux afin de soutenir sa tête à la mine boudeuse. Le relais n'est pas très loin mais parfois même en étant tout près, il est nécessaire d'écrire une chose. Les pigeons sont d'une praticité sans faille. C'est ainsi que le volatile virevolte et se pose à ses pieds. Un vague regard vers l'animal. Un soupire. Puis, elle prend la peine de se mouvoir afin de le débaguer et récupérer son dû. Un bout de vélin enroulé, l'écriture est petite. Elle ne fait que suivre la surface relativement restreinte. Ses sourcils se froncent à la lecture. Sans un mot, elle le dépose dans son corsage. Fixant le ciel bruni et les quelques rares étoiles qui osent poindre le bout de leurs nez.

    Elle n'y répondra pas. Du moins pas de suite. Si elle pouvait accepter les répliques acerbes ou même le désintérêt de la rousse à son égard. Le fait de constater que Enaell se mettait à souffrir du même mal la surpassait. Mais ceci était logique et prévisible. Elles ont appris à faire face aux situations ensembles toutes les trois. A vivre au quotidien. Les rapports de force, même si encore présents, se font plus implicites peut être plus lourds aussi. Et elle, nouvelle venue, croisée Ecossaise qui plus est, vient tout remettre en cause. La hiérarchie, même si pas clairement établie, souffre de sa présence. Laell qui représente le centre de ce monde, quoiqu'elle dise, est la source des convoitises. C'est à celle qui voudra le plus d'exposition avec elle. Celle qui voudra une attention particulière de sa part.

    Comment trouver sa place au sein de cet étrange échiquier ? Enjoy n'en a pas la réponse. La certitude de ses sentiments est la seule force qu'elle possède encore. Un atout dans son jeu. Qui malheureusement risque de ne pas suffire. A moins que les choses changent. Mais comment pourraient-elles changer en l'état ? La furette est partagée car ce sont ses cousines mais elles se comportent comme de vraies capricieuses. Ne voulant pas partager la brune. Désireuses d'en préserver chacune l'exclusivité. Alors la pièce rapportée, qu'elle est parfois, se retrouve désemparée. Comment vivre pleinement cet amour, aussi interdit soit-il, dans ce genre de cas ? Il ne s'agit pas de se battre contre un homme bien trop intrusif et qui voudrait ravir le coeur de Laell. Non. Juste de se confronter à ses cousines sans devoir les blesser, sans être désagréables avec elles. Composer ou subir.

    Que peut-elle faire ?

    En cette heure tardive, sans doute rien. Elle reprend sa position initiale songeant à celle qui a conquis son coeur...

    ...

    Une nuit en solitaire. Un somme à l'écart du groupe pour une fois. Histoire de se retrouver un peu avec elle-même. L'intimité est absente. La faute à une vie qui demande énormément de sacrifices. On ne peut dormir paisiblement dans sa demeure, cultiver son champ et râler à l'occasion contre le pouvoir en place. Non, leur réalité est toute autre. Il s'agit de composer avec les éléments, de se mouvoir durant des jours peu importe le froid ou les intempéries. La pénombre fraîche et les journées étouffantes de chaleur. Des semaines à crapahuter en n'ayant rien d'autre à voir que toujours les mêmes personnes. Appréciable pour certains aspects mais néfaste pour d'autres, la vie dans une communauté aussi restreinte peut être parfois une sinécure. Malgré tout, on profite de ces instants en famille. On s'engueule parfois mais les éclats de rire sont aussi là. On savoure le fait de partager un peu de son existence avec ceux qu'on a envie de connaître. Puis quelques fois, on fait des rencontres. Allant de la victime des invectives Corleonniennes à l'individu qui laissera une place dans les mémoires.

    Un autre soir, un lendemain pluvieux. Elle est là comme à son habitude. Enjoy attend de pouvoir lui parler, exprimer ce qu'elle ressent concernant des points cruciaux. Mais quand vient l'heure de s'exprimer le dialogue ne prend pas la tournure espérée. Les deux jeunes femmes s'amusent, évoquent des détails, des souhaits. Un débat s'installe. Une volonté de rejeter les doutes au plus profond et de faire jaillir tel un geyser l'espoir et l'optimisme. Garder la motivation de ses aspirations. La préserver afin que jamais rien ne l'estompe. Qu'elle survive à l'épreuve cruelle de l'échec. Et elles en auront tôt ou tard. L'art est aussi de savoir se relever lorsque rien ne va. Voici une des hantises de Joy. Vu qu'elle a tout eu en si peu de temps. Qu'elle peut toucher le bonheur suprême. Pourquoi ne pourrait-elle pas tout perdre du jour au lendemain ? Cette réflexion est bien loin des principes matérialistes. Tant qu'elle a de quoi se nourrir ne pas avoir de biens n'est pas un réel problème. Cela concerne tout ce qui est abstrait, impalpable qui va de l'ordre de l'émotion, du vécu, de l'expérience, de la réussite et des déboires...

    La famille se déplace encore. Alors que la plupart, si ce n'est tous, s'évanouissent dans les bras de Morphée. Laell mène les rênes de son convoi. Présente à ses côtés, la tête sur son épaule, la mustélide scrute l'horizon d'un ciel opaque où seuls les feux de la prochaine bourgade donnent l'indication d'être sur la bonne voie.


*Regarde dans mes yeux.
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Laell
Nuit paisible, sans doute une des plus sereines passées depuis l'abandon de son enfance.
Aucun doute, aucune question, juste l'instant présent, la Corleone s'était endormit dans les bras de Sa Cossaise.

Une sensation, un frétillement de peau, les sens s'éveillent avant l'ouverture des yeux. Elle n'avait pas rêvé et comme pour lui confirmer, Enjoy relançait leurs jeux interdits avant même son réveil. Elle était là, à ses cotés, sourire qui s'étend. L'invitation ne pouvait être refusée et l'Italienne y répondit d'un simple râle exprimant le désir de nouveau éveillé. Doucement son corps pivota sur le dos. Son regard encore endormi, s'éclaira en croisant celui de sa partenaire.

Corps qui se tend sous les caresses matinales. L'esprit pas encore envahit de pensées inutiles, elle savourait ce plaisir offert. Aucun mot ne serait échangé, il n'y en avait pas besoin, les regards se frôlaient, les corps se cherchaient. Légère hésitation face à cette passion naissante, balayée d'une main par sa tortionnaire. Elles joueraient ce matin, son corps lui serait offert. Sa main se glissa à son tour sur la peau de sa compagne. Du bout des doigts, la découverte commença, explorant timidement les courbes de son dos. Regards échangés, les bouches se redécouvrent. Les sensations de la veille se réveillaient à leur tour. Ce n'était pas un rêve qu'elle ne revivrait jamais. S'abandonnant, ses gestes se firent discrets, pour finalement s'évanouir laissant place à son ressenti. Son corps, son âme ne vivaient plus que pour cet instant. Elle découvrait le vrai sens d'un mot pourtant simple, le plaisir. Inondée par la chaleur de ce traitement, elle restait encore hésitante face à cette partenaire entreprenante. Jamais elle n'avait eu de femme dans ses bras de cette façon là mais elle apprendrait, et vite.
Le bonheur étirait ses traits alors que sa cousine cessait son offrande. L'extase fut traduite par une étreinte. Puis un "Bonjour..." glissé à l'oreille.

Vint le temps de la séparation, il serait trop long pour la Corleone. Son regard se posa sur Enjoy qui se levait, la laissant seule avec ses émotions. Aucune envie de se lever, de quitter ce lieu qui refermait désormais le secret de leur nuit. Un simple sourire béat, le regard emplit d'une tendresse qui deviendrait passion. La brune abandonnée laissa vagabonder ses pensées. Elle ne pourrait pas en parler, elle le savait et ce secret donna un gout tout particulier à cette expérience. Elle le garderait jalousement. Ne le partageant qu'avec celle qui venait de quitter sa couche. Où cela les mènerait n'importait pas. Elles étaient ensemble et rien ne pouvait prendre plus grande place dans son esprit.

Une fois les sens calmés, ayant retrouvé un semblant de contenance, elle s'habilla à son tour, toilette de chat, quelques coups de doigts pour démêler sa chevelure. La journée serait longue avant de revenir partager sa couche avec celle qui avait éveillé chez elle, un besoin jusque là inconnu. Oh pas qu'elle n'eut jamais eu d'expérience, mais elle avait toujours ignoré la puissance des sentiments amoureux, ayant uniquement assouvit quelques besoins naturels avec des hommes de passage.

Plus tard viendrait un temps où on lui reprocherait sa complicité avec cette cousine nouvellement découverte. La prise de Toul avait rassemblé la famille en taverne. Après de nombreuses soirées passées avec Enjoy pour seule compagnie, les deux femmes partageaient bien plus qu'il n'était imaginable et le comportement de la brune le laissait entrevoir. Elle réagissait à chaque pique envers sa cousine. Une jalousie naissait à chaque fois qu'Enjoy semblait trop avenante avec une autre et sa compagne en jouait. Elwenn dont elle avait été si proche auparavant ne semblait pas accepter la place qu'Enjoy prenait et les assauts se faisaient plus réguliers.

En quelques jours, l'attirance avait muée, laissant place à une passion dévorante. Les hésitations de la première fois avaient fuit, laissant Laell à son tour maitresse de leurs ébats. Après la charrette, ce fut à la mairie de Toul d'accueillir leur présence.
Laell, maire, s'était octroyé l'étage qui avait sans doute logé bon nombre de ses prédécesseurs. Elles ne dormiraient pas dehors cette nuit.

L'idée d'aller visiter l'endroit fut émise dans l'oreille d'Enjoy. Dans un sourire enjôleur, Laell lui avait prit la main sans attendre de réponse et le couple se rendit presque au pas de course en ce lieu où elles ne seraient pas dérangées. Leur danse commença, la brune prenait les devants devant le regard surpris de sa partenaire. Echanges langoureux, vêtements qui volent. Donner plus que recevoir. Les gestes de l'Italienne se faisaient assurés tandis qu'elle découvrait le corps offert à elle. Gonflée par la réussite de la prise de la mairie, poussée par la confiance gagnée, elle avait décidé de rendre cette soirée inoubliable. Les deux corps se mêlaient à n'en devenir qu'un. Les mains se firent exploratrices, le regard de la brune cherchant chaque mouvement de sa compagne, chaque indication de plaisir, la poussant à continuer dans un seul but. Forçant par ses gestes sa cousine à devenir proie, elle se fit louve. La nuit s'égraina au rythme de leurs souffles dans un élan de jouissances partagées.

En quelques jours, les doutes s'étaient fait sentiments, les sentiments devenus passion, passion devenue amour.

L'amour crée la jalousie. Laell se retrouva bien malgré elle emportée par le flot des émotions contradictoires de chacune. L'ambiance s'assombrissait, les reproches silencieux se muaient en attaques. Sans doutes que toutes avaient des torts et les ressentiments commençaient à poindre. Des départs furent évoqués. La quiétude de leur relation s'envola.
Une simple soirée en taverne devint désastre pour la brune qui prit enfin conscience des causes des troubles autour d'elle. Après Elwenn, ce fut le tour d'Enaell de réagir. Laell avait offert bien plus de cadeaux à sa compagne qu'à n'importe qui d'autre et elle en avait parlé devant sa frangine. Erreur fatale s'il en est une... Enaell, jeune capricieuse, chieuse et précieuse, n'allait pas l'avaler comme ça. Elle qui n'avait encore reçu de sa soeur que promesse de cadeau sans en voir la queue d'un. Puis ce fut le choc, la terreur s'installa dans le coeur de la brune. Enjoy voulait partir, rentrer à Saumur. Son départ de la taverne fut le théâtre d'une vaine tentative d'évitement. Ne rien laisser paraitre...

Tiraillée... c'est le mot... Se lever, la retenir, mais un regard vers sa soeur, le faire serait un aveu. Alors elle était restée là, essayant de la retenir d'un seul "Enjoy". Essayant de camoufler dans le son de sa voix l'affolement né de l'évocation d'un départ. Enaell l'avait vu, l'avait senti et la Corleone avait dû mentir, se défendre d'aimer Enjoy, ravivant à chaque mot une douleur qu'elle n'avait jamais connu.
Enaell l'avait assailli de reproches, lui disant qu'elle prenait l'Ecossaise pour sa soeur, reproche balayé d'un revers sans mensonge, sa soeur, sûrement pas, ses sentiments étaient bien trop différents. Puis le mot sorti, "ta p'tit copine", non Laell ne la voyait pas ainsi. Elle l'aimait, elle voulait passer sa vie auprès d'elle. P'tite copine, expression tellement insignifiante pour des sentiments si forts.
Souffrance cachée, inquiétude maquillée par de la mauvaise humeur. Besoin de savoir, d'être rassurée. Ignorant les moqueries de sa soeur, elle prit sa plume. Un courrier, un simple courrier qui pouvait apporter une réponse apaisante.



Enjoy, Ma Joy...

De toutes les choses que tu pouvais dire, tu as sortie celle que je redoute le plus.
J'ai besoin de toi, ne pars pas, pas comme ça.

J'ai besoin de te voir, d'avoir une chance de te faire changer d'avis.

Je t'aime...

Laell


La soirée s'était écoulée, lentement... Par deux fois Laell sorti, espérant trouver sa muse non loin, par deux fois elle rentra seule. Pas de réponse à son courrier... Enaell fini par partir, la laissant seule avec ses pensées...
Sa gorge se noua, elle était seule, pour la première fois depuis des jours.

"Et si elle partait..."

Torture psychologique infligée à soi même... Et si elle partait...
Rester avec la famille, continuer à mentir, cacher chaque jour sa peine qui comme un parasite se développant en elle, la dévorerait à petit feu... Souffrir en silence...
Ou...
Quitter la famille... Avouer son amour devant tous... Le vivre au grand jour... Après tout, son nom n'était qu'un nom... Renoncer à ce pour quoi elle s'était toujours battue... Elle aurait tout donné pour sa famille... Mais aujourd'hui ? Serait-elle prête à perdre ce qu'elle avait connu de meilleur pour eux...

Et si elle partait... Pensée qui tourne en boucle, rien à boire pour la faire taire. Boire... Boire... C'est ce qu'elle avait fait le premier jour, si peu de temps écoulé et pourtant l'impression d'avoir toujours vécu cette passion. Souvenir d'un soir qui parait si loin aujourd'hui. Bonheur sans faille qui se brise égrainant un châtiment à la mesure de la puissance de ses sentiments. Pas de réponse à son courrier...

Et si elle était partie... Coeur qui se sert. Pas comme ça, elle ne pouvait pas. Elles se retrouveraient le soir, se loveraient l'une contre l'autre. Respirant son odeur, sentant son corps contre le sien. Elle ne pouvait pas être partie. Instant de panique. Besoin de la voir... Corps qui se lève, coeur qui s'emballe. Porte franchie presque en courant. Elle la chercherait toute la nuit s'il le fallait mais elle la trouverait... Du moins elle l'espérait...
Mais quand on ne veut pas être trouvé, on ne l'est pas.

Restée seule avec ses craintes, elle avait fait le tour du campement, cherché dans les environs. Elle n'était plus là... Résignée ou désœuvrée, elle prit le chemin de sa charrette peu avant le lever du jour. Charrette cruellement vide de sa présence. Doute qui s'installe ne fuit pas dès le retour du soleil...

Après quelques heures à la recherche d'un sommeil qui ne viendrait jamais, elle finît par sortir de son trou, errant sans vraiment de but autour du campement, évitant soigneusement de croiser âme qui vive. Quelques morceaux de bois ramassés pour entretenir le feu, seul point de lumière dans la nuit du camp. Rien de l'activité sur le campement n'atteignait Laell. Silence assourdissant dans le néant de ses pensées. Elles s'étaient croisées au matin. "Elle est là..." Aucun mot n'avait été échangé, le regard de Laell s'était voulu assuré tout au long du jour. Jamais elle n'accepterait de montrer aux autres ses souffrances, si grandes soient elles. Enfin le soleil baissa, terminant une journée inutile, chacun ayant vaqué à ses occupations, ils avaient attendu les retardataires, ils pourraient bientôt repartir.
La soirée s'avança, la Corleone était comme toujours au rendez vous des soiffards, lieu qui avait vécu le drame de la veille. Enfin, la libération, son arrivée la rassura. Elles devaient parler mais aucune n'osa aborder le sujet tant redouté. La discussion vagabonda vers le futur de la famille. Echec possible dans une prise de mairie, conséquences éventuelles. La brune tenta de rassurer sa compagne. La nuit s'étira sur leur discussion, les bras se rouvrirent, les inquiétudes toujours présentes, leurs étreintes restèrent timides.

La route fut reprise après une nuit trop calme. Le lendemain, ils atteindraient Joinville. Nouvelle soirée qui ne tiendrait pas ses promesses. Peu d'autochtones, plusieurs membres de la famille firent leur apparition. La soirée aurait pu être belle, mais il en fut autrement. Une nouvelle fois, une querelle éclata entre l'Ecossaise et la Rousse. Un porte qui claque, puis un retour quelques heures plus tard. Une annonce fracassa le peu de joie présente. Elwenn voulait partir, les arguments donnés eurent un gout d'attaque envers la famille, brisant peu à peu les restes d'une amitié sincère entre les deux italiennes qui s'éloignaient déjà depuis longtemps.
De nouveau les reproches sur la relation qu'elle entretenait avec l'écossaise fusèrent. C'en était trop pour Laell. Rousse contre Brune. Les mots sortirent. Le ton fut haussé. Puis ce fut le silence. L'autochtone spectatrice servit à changer de sujet pour rendre un semblant de bon sens à cette soirée. Celle-ci invita les Corleone à revenir pour leur faire la même conférence sur la défense que celle effectuée à Toul quelques jours plus tôt. Si elle savait la pauvre ce qu'elle venait de réclamer. Les Corleone ne donnent jamais de conseil gratuit, encore moins quand il s'agissait de défense. Le meilleur apprentissage s'effectue par les actes. Un jour peut être viendraient ils prendre la ville, respectant ainsi l'engagement pris auprès de cette femme, tribun Joinvillois.
Du silence à la prise de parole, la tempête rousse fit tourner le sens du vent. Il était désormais le temps des excuses. C'était trop facile pour la brune, elle était blessée. Bien plus que jamais. Les mots bien plus violents que des coups d'épées. Elle les avait reçus de plein fouet. Les avait entendus mais n'était pas prête à les digérer. Elle se contenta d'écouter. Aucun commentaire ne pouvait exprimer son ressentiment envers sa cousine. Il faudrait du temps...

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Enjoy
    La jalousie. La jalousie étreint leur relation. L'Italienne paie le prix de son importance au sein de la famille. Tandis que l’Écossaise souffre d'être considérée telle une paria. Les liens subissent des agressions. Certaines sont fugaces et n'offrent que de peu répercussions. D'autres, au contraire, établissent une ambiance malsaine. Les non-dits cèdent petit à petit leurs places aux ires. Alors la mustélide s'écarte peu à peu du groupe. Elle s'établit des plages de solitude lors desquelles elle peut vaquer à ses occupations sans avoir à subir des remontrances. On lui remémore tant de fois qu'elle n'est qu'une pièce rapportée, une chose en trop, qu'elle finit par le croire. A la longue la rage s'amplifie, les dents se serrent, les poings se ferment. On apprend à encaisser comme elle le faisait avant lors de ses combats de rue. La gentillesse s'estompe, la hargne resurgit. La femme-enfant sociable redevient une sauvage. La furette fronce les sourcils et avance la démarche assurée au sein de la ville. Cela fait bien trop de temps qu'elle se tait. On la déteste ? Et bien soit. Elle donnera du grain à moudre aux moulins à parole de son entourage. Pour elle, la famille c'est sacré et elle ne laissera personne sur le bord du chemin. Personne. Sauf ceux qui le méritent. Malgré des excuses acceptées avec un soupçon d'hypocrisie, la mustélide n'oublie rien. Tout est préservé dans un coin de sa mémoire. Prête à infliger une vengeance justifiée si la situation l'exige. Pour l'instant, elle se tait. Joy préfère de loin ne pas converser que de faire semblant. Alors elle les évite. Toutes sans exception. Même Laell subit cette sanction et le rebut du clan aiguise ses crocs dans son coin. Les insultes, les plaintes glissent sur sa peau sans même causer le moindre choc émotionnel. Si la brune ou la matriarche étaient les cheffes et qu'elles devaient recevoir des doléances de quelques personnes querelleuses...elles risquaient d'avoir du travail à fournir. Enjoy n'ira pas agresser de son propre chef. Elle laisse faire, observe les uns et les autres. Désormais, elle sera muette.

    Évoluer au sein d'un climat délétère ne la dérange pas plus que ça. Une habitude sans doute. Ou bien est-ce son instinct de survie ? Toujours est-il qu'elle ne veut pas entraîner sa cousine dans sa chute. Alors si elle doit partir, elle partira. Sans un mot, sans un "au revoir". Rien, juste des actes. Les paroles ont une importance à la durée de vie limitée. Un jour, son usage ne suffit plus et il faut passer à l'action. Un membre du clan qui passerait sa vie à vanter les mérites des siens sans faire preuve de courage pour les justifier, tombera tôt ou tard dans l'oubli. Voire la caricature. Celle de prétendre une chose fausse, sans intérêt. Ressasser sans cesse la même tirade enjôlée par quelques beaux effets d'annonce. Jusqu'à ce que de ce sublime apparat d'antan, il ne reste plus rien que la vétusté des haillons d'un prestige rapiécé...

    Ses pas la guident vers les bas-fonds de la ville. C'est une coutume. A croire que le luxe des beaux quartiers la gêne. Et qu'elle doit nécessairement se trouver aux pires endroits afin de retrouver cette paix intérieure qu'elle recherche tant. Les mendiants tendent leurs bras sur son passage. Les bourses qui ornaient sa taille sont très vite dissimulées. Se fondre dans la masse est le maître mot. Le caniveau qui longe son parcours déborde d'une eau noirâtre à l'odeur nauséabonde. Les badauds souffrent de multiples maladies. Un crache ses poumons en s'accrochant au mur, un autre souffre de la lèpre. Sa présence ici contraste de beauté sur une toile moisie. Aucun but particulier ne la motive. Elle erre juste. Les pensées triturent son esprit, elle s'imagine un monde à son image. Les heures passent, la nuit tombe doucement. La fraîcheur la foudroie désormais. La mustélide rebrousse chemin vers ces lieux de faste et de prestance.

    Au détour d'un croisement, son regard s'égare sur la posture étrange d'un homme. Les yeux noisettes de la jeune femme prennent alors l'animal en chasse. Elle s'approche féline avec un déhanché ravageur. Un appel, non pas de détresse, mais d'envie. Une fois à sa hauteur, elle lui présente son plus beau sourire. Ce qui ne déplaît pas à sa cible. L'homme affiche deux prunelles noires, des traits réguliers, une moustache fournie et une certaine classe. Il s'agit sans aucun doute d'un bourgeois. Les yeux de la belle raptent l'attention de son vis à vis. Une main féminine se porte alors sur le torse de sa nouvelle conquête. Puis elle descend doucement vers les attributs d'un mâle dans la force de l'âge. Elle sent poindre une réaction naturelle. Ses pupilles brillent alors de milles feux. L'individu commence à poser ses pattes sur les formes de la mustélide plus que consentante. Jusqu'à ce que sa mimine si inoffensive se mue en étau broyant les joyaux d'une famille qui vient de perdre aisément quatre branches sur son arbre généalogique. Le bourgeois grimace et souffre. Enjoy jubile de ce pouvoir, constater la chute de ce...pauvre riche. Elle lui assène alors un coup de genou en pleine face, histoire de conclure cette entrevue. Il gît alors au sol se tordant de douleur. La Corleone récupère les quelques piécettes qui traînent dans ses poches et disparaît au loin.

    De retour auprès du convoi, un quignon de pain sous la dent, elle relit une petite lettre de celle qu'elle adore...
    Puis la voyant qui s'affaire près du feu, elle vient à sa rencontre s'agenouillant à ses côtés.



    Rien ne peut nous séparer, j'espère que tu le sais...

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Laell
L'aventure continua, Laell guidait son groupe. Les rênes en main, sa compagne à ses cotés dans la charrette. Le cortège avait été rallongé par le groupe de Rod' qu'ils avaient rejoint à Toul. Les Corleone réunis dans un même but. L'oeil extérieur n'y aurait vu aucune tension. Seuls quelques protagonistes vivaient ces troubles. Ne pas les laisser sortir devant la famille. Ne pas risquer la cohésion du groupe alors qu'ils redoraient leur nom.
Même si la brune n'en disait rien, le doute s'installait en son esprit. Il est des mots qui ne s'oublient pas si vite. La semaine avait été mouvementée mais peu été ceux qui s'en étaient rendu compte.
"On ramollit" voilà la phrase évoquée le plus souvent par Laell ces derniers temps. Oui elle avait ramollit mais elle restait Corleone et reprendrait les choses en main sous peu. Le temps des doutes passerait ou elle le ferait passer elle même.

La famille arriva à Langres, s'installa à l'entrée de la ville. Les charrettes furent placées en cercle, se protégeant ainsi de l'entrée d'intrus. Chacun remplissait son rôle. Depuis plus d'une semaine qu'ils agissaient ainsi, les gestes étaient devenus habitude dans cette organisation bien huilée.

La soirée se passa comme toujours en taverne, rires et discussions, mots échangés contre d'autres. Le calme regagnait peu à peu les esprits. Certains propos furent clarifiés. La brune défendant toujours la place de sa Cossaise face à la Rousse. Malentendus estompés avec de simples explications. Puis vint enfin la fin de la discussion. Les aigreurs furent effacées à grand coup de chopes. Certes la brune avait été blessée, mais elle n'avait plus l'envie de continuer. Face à elle, était Elwenn, elles avaient vécu tant de choses ensemble, il était idiot d'en arriver là. Il était temps d'enterrer la hache de guerre. Ne pas gommer des années à cause d'une simple semaine et de quelques mots assénés sous la colère.

En fin de soirée, Laell retourna au campement. Le calme régnait. Les autres dormaient. Le feu crépitait de ses dernières forces. Accroupie devant lui, le nourrissant de quelques morceaux de bois qui avaient été accumulés à coté plus tôt dans la journée, elle entendit des pas. Une ombre s'approchait. Ombre qu'elle connaissait si bien. Ombre qu'elle n'a pas vu depuis l'arrivée en ville.
Depuis des jours, le doute était là. Questions trop souvent éludées, qui avaient fini par faire leur place dans l'esprit de l'italienne. Et si finalement, ce n'avait été qu'une passade. Elles ne garderaient qu'un souvenir fugace d'un bonheur éphémère. La douleur était là. Peur d'en parler, peur d'avoir la confirmation. La brune ne dit rien quand sa cousine s'agenouilla à ses cotés. Regard fixé sur les flammes, ravivées du bout d'un bâton.


Rien ne peut nous séparer, j'espère que tu le sais...

Regard qui cherche le sien, un simple sourire pour réponse. Les inquiétudes s'envolèrent. Elle avait juste besoin d'être seule. Egoïstement, la Corleone n'avait pensé qu'à sa souffrance à elle. Ballotée par le flot des heurts, elle avait oublié qu'Enjoy avait été elle aussi touchée par les mots émis. La défendre n'était pas suffisant pour la protéger.

Les deux Corleone s'étaient retrouvées, éclairées par la faible lueur du feu. Les ombres dansaient autour d'elles. Une main se leva pour rejoindre ce visage qu'elle aimait tant voir sourire. Ses doigts glissèrent sur sa joue. Revenir sur les évènements de ces derniers jours ne servait plus à rien. Ils raviveraient des blessures encore trop fraîches. Une seule envie, la serrer contre elle. Lui montrer qu'elle ne laisserait jamais partir.
Doucement, elle l'attira à elle, ses lèvres cherchèrent les siennes. Rien n'avait plus d'importance. Au coeur même du campement elle embrassait sa belle.
Sa main saisît la sienne, comme un besoin de sceller ses mots, elle l'attira dans sa charrette. Besoin maladif d'être contre elle, de sentir sa peau, d'être sienne en cette nuit. Confirmer par son corps qu'elles ne sépareraient jamais, que rien n'aurait raison de cette passion irraisonnée.

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Enjoy
    Silencieuse. Que ce soit sur ses intentions ou sur ses émotions. On l'avait déçue une première fois, puis une seconde. Lors d'une tentative ratée qui encore, maintenant, a du mal à être digérée. La rancune est tenace comme une plante vivace. Et c'est d'ailleurs l'une d'entre elles que ses doigts habiles appliquent sur ses yeux sous la forme d'une pommade. Ses origines sont variées. Une rencontre bouillonnante entre le Nord, l'Ecosse et le Sud, l'Italie. Elle en possède les deux aspects à travers la pigmentation de son épiderme, la couleur de ses yeux et de sa chevelure. En outre du physique, il y a aussi les traits de sa personnalité, son tempérament. Les mélanges causent parfois quelques ravages. Pour faire naître de sublimes mirages qui ont une senteur sauvage. De la Belladone pour embellir son regard noisette. Pas sûr que cet artifice convienne à sa dulcinée d'Italienne. Mais toujours aura-t-il la principale vocation d'attiser sa curiosité. Dès lors, elle sera irrésistible avec ses yeux de biche. Sa cousine ne pourra rien lui refuser.

    Au sein de la campagne Bourguignonne, le contenu des conversations anime les divers protagonistes. Les aigreurs se font de plus en plus présentes. Elles la suivent de près, de très près comme des boulets aux chevilles. La chaîne subit cette tension chaque jour plus forte. Si c'était une corde, cela ferait un moment qu'elle aurait cédé. La jalousie s'est légèrement effacée. Se substituant à une forme de malaise, sa langue claque contre le palais de son embarras. Un soupçon d'hypocrisie hurleront ses détracteurs. A moins qu'il ne s'agisse que d'un sacrifice afin de ne pas enflammer le parchemin quasi-translucide d'une unité qui s'étiole un jour sur deux. Rien est simple. Elle le sait et c'est pour préserver Laell qu'elle ne dit rien. La Furette n'espère que le meilleur pour cette dernière. Son souhait est de la voir s'épanouir, d'atteindre les sommets et surtout ne pas sombrer par sa faute. Chose que l'Italienne ne semble pas bien saisir parfois ou peut être est-ce le contraire. Est-elle juste sûre de la force de ses sentiments et qu'elle s'est mue en une vraie prisonnière.

    Quoiqu'il en soit, la situation devenait pratiquement invivable du fait de la vétusté de leurs espaces respectifs. Composer avec les autres n'est pas forcément une de ses qualités premières. Une personne qu'elle ne peut pas voir en peinture, elle mettra un coup de coutelas en plein centre de la toile et ira égorger l'auteur de cette ignominie, parachevant son oeuvre en émasculant le modèle. Ce n'est pas une vipère même si elle en possède la langue. Pourtant qu'est-ce qu'elle avale comme couleuvres. S'en est presque insoutenable. Et chaque discussion lui inflige des émotions contradictoires. Rester ou partir. La mustélide arpente dès lors une impasse. Elle se noie au sein de cet océan en furie. Prier pour espérer une bouffée d'oxygène ne serait pas du luxe. Hélas, Dieu l'a abandonnée à la naissance dès lors qu'elle fut estampillée du sigle de la Mort, celui d'une Corleone. Désormais les plans d'Hier se taisent et on les remplace par une proposition peut être alléchante sur le papier mais qui n'apportera réellement rien de bon. Enjoy doute et le fait partager à la brune ainsi qu'aux éventuelles personnes présentes lors de ses escapades en taverne. Elle ne le sent pas. La dernière fois qu'elle eut cette sensation, elle dut rester aux chevets de ses cousines. Puis finalement, elle se carapata à travers le Royaume en quête d'un peu de liberté. L'immobilisme a une fâcheuse tendance à la tuer à petit feu. Vous voulez l'assassiner ? N'envoyez pas un ou des hommes de main. Non, cela serait une perte d'argent. N'essayez pas le poison. Sa salive est si meurtrière à force de déverser son fiel qu'elle serait capable d'empoisonner n'importe quelle liqueur fatale. Oubliez les stratagèmes de l'impossible. Au lieu de tout ça. Laissez-la juste moisir parmi une peuplade alanguie et une bourgade aussi vivante qu'un cimetière lors de la période hivernale. Et vous aurez son décès sur la conscience. Mais ceux qui veulent la voir périr n'en ont pas alors tout va bien.

    Quoiqu'il en soit les échanges se font bien piquants. Fralis croit même à un moment que la colère est devenue sa nouvelle porte parole. Alors qu'en réalité, s'applique juste son expression la plus pure. Mais c'était bien la dernière fois puisque ses propos sont porteurs d'un agacement certain auprès de son Italienne. Du coup, elle se tait. Les soldats ne posent pas de questions. Bien qu'il ne s'agisse pas d'une armée, la hiérarchie est quasi la même et le prochain ordre de marche sera celui d'en rejoindre une. De quoi prendre de l'avance. C'est une partie d'échec, on calcule deux coups à chaque tour. Les inquiétudes de sa Belle sont nombreuses et pour tenter de les apaiser, la furette ne trouve rien de mieux à rétorquer qu'un simple : « Je suis là... » Mais parfois la tentation est forte d'ajouter un : « Pour l'instant... » Or plus cela va et moins cela va justement. Si bien que la tentation devient une obligation, une coutume voire une ponctuation. Histoire de rappeler à sa partenaire qu'elle n'est pas éternelle et que si la rivière continue de se troubler et drainer de la boue. Sa présence sera tout sauf nécessaire. Les bases ont été posées. Ses positions sont non négociables. S'enfermant dans un mutisme salvateur pour la famiglia mais certainement pas pour elle. Si on lui demande de clarifier la situation, un ultimatum sera sans aucun doute à l'ordre du jour. La choisir ou non. Cette pratique, ce chantage la débecte au plus haut point. Seulement parfois ce sont les seules flèches qui restent. Dans d'autres circonstances, cela aurait été « Dévorer ou se faire dévorer. » Hélas, la situation atteint le summum de la complexité.

    Mais comme toujours les langues acerbes tentent d'être de nouveau joueuses. Très vite, elles se rencontrent. Les corps s'épousent, les ombres dépeintes par la lueur des bougies ont attendu ce moment durant des journées qui avaient des allures d'éternité. La main directrice tire, retire, fait glisser les couches de vêtements qui s'amoncellent sur leurs peaux. La mustélide se retrouve bien vite en tenue d'Eve alors que son autre pratique les pires châtiments sur sa personne. Leurs ébats tendres et passionnés se poursuivent jusque tard dans la nuit. Les étoiles viennent prendre place dans le ciel pour un ballet dont elles sont les seules spectatrices. Elles savourent leurs chaleurs corporelles, leurs flux se mélangent. L'excitation éclate comme un éclair dans le brouillard et les draps d'un lit de fortune sont souillés. Les pulsions s'en moquent bien et leurs débats s'allongent sur une longue plage où seule l'aube vient les chatouiller. Au réveil d'une nuit sans sommeil, une déclaration pour entretenir les hostilités. Pourvu que la hache de guerre ne soit pas enterrée et que cette maladie aux symptômes fiévreux ne guérisse jamais...


    Je t'aime.

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Laell
Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme...
Ainsi la joie se muait en peine. Le plaisir en douleur. La chaleur devenait glaciale. Les certitudes glissaient vers les doutes.
Le flot de la vie coulait comme une rivière en crue dévastant ses rives qui lui assuraient pourtant la protection de son territoire. Tel un arbre arraché, coquille de noix sans autre espoir que le naufrage, la brune se noyait, luttant pour quelques bouffées d'air accordées avant la mort. Emotions contradictoires qui la poussaient dans un sens et dans l'autre. Sur les montagnes russes des sentiments, on ne peut que subir. Avec l'utopie propre à la jeunesse, elle osait croire que ses décisions pourraient avoir un impact sur la direction prise. Croire à ses actes est une nécessité quand on se perd soit même.

Depuis Langres le temps avait passé. Des retrouvailles et de l'assurance de leurs sentiments, elle était revenue à l'éloignement et aux doutes causés par un futur trop proche. Sémur avait été rejoint. La famille avait répondu à l'appel d'un devoir qui n'était pas le sien mais qu'ils avaient finalement choisi d'endosser, à contre coeur pour la plupart.

Depuis des jours, les discussions tournaient autour de la folie de leur action. Avaient-ils seulement envie d'y aller, sans doute que non. Risquer leur vie, ils le faisaient chaque fois qu'ils entraient dans une ville pour la prendre. C'était leur lot quotidien et pour rien au monde Laell aurait voulu le céder. Sa vie sur les routes, elle l'aimait sincèrement. La préparation, l'organisation, le recrutement même l'animaient à chaque fois d'une étincelle de vie. L'adrénaline qui s'emparait de chacun de ses muscles quand ils s'approchaient de la cible, après des jours de marche forcée vers un seul but. La curiosité attisée par l'ignorance du contenu des coffres promis. Le plaisir ressenti quand quelques mots lançaient les hostilités. Les rires une fois les gardes passés. Puis le résultat des efforts, récompense des sacrifices faits.
Que c'était loin...
Aujourd'hui, la famille se préparait à la guerre. Participation qui pouvait leur ouvrir bien des portes, mais que devraient-ils perdre pour les enfoncer.

L'Ecossaise le disait, le rappelait souvent, elle n'avait aucune envie de croiser le fer pour les idéaux d'un autre. Autre qui déjà n'avait pas tenu parole quelques mois plus tôt. Chaque jour, l'Italienne l'entendait, chaque jour elle devait expliquer et tenter de convaincre. Mais comment convaincre alors que soit même on n'y croit pas. Alors, elle avait utilisé la seule arme qui lui restait, la famille. C'était elle qui avait décidé. Triste excuse... Elle même avait fini par accepter de participer. Mais ses motivations étaient faibles. L'avenir du Clan pouvait se jouer sur cette guerre. De nouveaux appuis à obtenir, quelques futurs commanditaires à rencontrer. Peut être des preuves à faire.
Laell le savait que trop bien, pour arriver là où Enjoy voulait la voir, elle devrait sacrifier quelques bouts d'orgueil. Mais comment lui dire, comment lui faire comprendre qu'elle ne souhaitait pas plus qu'elle être sur ce champ de bataille qui n'était pas le leur. Comment faire entendre à quelqu'un qu'on est d'accord avec lui alors qu'on agit à l'inverse. Impuissante contre cette détermination qui s'efface. Impuissance qui appelle la colère. Ce soir là, pour la première fois, Laell céda à la rage qu'elle refoulait. Non pas que le couple se déchira, toutes deux tenaient trop à l'autre pour en prendre le risque mais la soirée laissa un goût amer à la Corleone.

Personne ne pouvait dire si les engagements seraient respectés, ni même s'ils seraient suffisant pour trouver un jour un semblant de positif à cette décision.

Comme à chaque fois, les deux femmes se retrouvèrent, ne dit on pas que l'amour est plus fort que tout. Une inquiétude restait dans l'esprit italien. Aucune forteresse aussi solide soit elle ne résistait aux assauts répétés. Tôt ou tard elle céderait. Qu'en serait-il de la leur... Même si chaque fissure était réparée, consolidée, l'effondrement restait possible avec le temps.

A la veille des combats, Enaell décida de ne pas suivre la famille. La seule qui avait gardé encore un semblant de lucidité peut être.
Enfin, la guerre débuta. Le coeur alourdit d'une conversation douloureuse quelques heures plus tôt. Laell marchait en silence, ressassant les mots émit par sa Belle. Elle était déçue d'elle même. Et pourtant elle n'en avait aucune raison. Elle doutait d'elle comme elle avait douté à Saumur. Sentiment que la Corleone avait cru évanouit mais qui avait dû être juste enfouit. Elle avait accepté de laisser de coté ses convictions pour la suivre. Elle le savait. Elle la protégerait, arrêtant chaque coup d'épée de son propre corps s'il le fallait. Douce utopie. La seule guerre qu'elle avait connue était celle de la Fronde, guerre sans bataille ou presque. La seule que son armée avait essuyée lui avait offert quelques cicatrices sur le corps et stoppé net sa participation. Mais à cette époque, elle n'avait qu'elle à défendre. Personne n'avait plus de valeur à ses yeux. Aujourd'hui il en était autrement. Elle mourrait plutôt que de perdre Enjoy. Du moins c'est ce qu'elle pensait avant d'être happée par les cris et les fracas des armes.

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Enjoy
    A l'orée d'un bois pernicieux. Prisonnière et vagabonde. Entre l'Amour et la Haine. Entre le concret et l'abstrait. La certitude et le doute. Sous sa pèlerine rouge, le chaperon furète au sein d'une forêt lumineuse mais aussi tellement obscure lorsque l'on s'y attarde. Un filet écarlate s'écoule lentement de sa bouche mêlé à de la salive. Ses yeux se révulsent, affligée d'une pluie de coups qui la font choir au sol. Son corps est retrouvé inerte, gisant dans une mare de sang. Les palefreniers changent d'office et se font croque-morts. Petit être chétif est emmené à l'Hospice pour y recevoir soins et médications. Hélas, il y a des maux qui ne peuvent guérir par de simples onguents. Des plaies vicieuses s'offrent une place au creux de son palpitant. Le coeur souffre de rancoeur. Rien ne sera plus vraiment comme avant. Les Corleone se font manipuler par une ouaille qui est plus un loup qu'autre chose. Pauvres agneaux sans défense, qui iront émettre leur dernier soupir sur l'autel des sacrifices. De la chair à canon. Ils ne demandent rien d'autre que ce qu'ils ne pourront jamais avoir. Éternels insatisfaits qui devraient revoir leurs ambitions à la baisse ou peut être tenter d'assurer ce pourquoi ils ont été faits.

    Convalescente, les jours s'allongent et forment une ennuyeuse semaine. Eloignées l'une de l'autre. La sensation de manque leur est commune. La façon de la gérer est sans doute toute autre. Pour la mustélide, il s'agit de ressortir, reprendre les rouages d'une existence qui ne tient parfois que par un fil. Friable et tellement passionnée. Ses prunelles croisent des gens qui confirment ou infirment la notion de l'éclat que les individus peuvent porter. Puis sembler si dérisoires, inutiles, vide de sens dès lors que la surface est grattée pour laisser apparaître les interstices, les rainures qui les caractérisent. Une fois, on l'embrasse avec violence de la part d'une donzelle, qui une heure avant, paraissait soumise à une timidité handicapante. Une autre, c'est un homme qui ploie sous les avances de la tentatrice. Ou bien, les plaisirs et déplaisirs d'une seconde rencontre avec une Fleur toxique.

    Mais une constante la rappelle à l'ordre. Celle de cet écho vibrant qui explose sous sa poitrine. Son Autre. Qui reste définitivement passive à la Capitale. Tous le sont. De cette passivité naquit l'ennui, la souffrance mentale. Ne pouvoir la tenir dans ses bras, ne pouvoir pénétrer au sein de son jardin secret. Lui concéder bien du plaisir, s'essouffler et jouir. Le contact physique n'est plus. Les sentiments sont omniprésents et ils la firent revenir à la raison alors qu'elle gémissait sous les fourches démoniaques. La prise de nouvelles de Laell eut une petite soeur rassurante. La même motivation jaillit en elle, lorsque la Lune accroît son cercle dans la nuit. Son nécessaire à écriture à portée de mains.

    Sa plume à la pointe usée et craquante prend vie sous ses doigts. Les barbes de la penne sont effeuillées, rabougries et sans panache. Le rendu est cassant, torturé. Entre traits rageurs et gestes brusques. Avec quelques courts moments d'apaisements pour ordonner des mots aux boucles élégantes. L'encre bouillonnante. Subtil ou bien agressif. Le contenu reste inchangé. Bien que la forme dénote l'émotion de l'émettrice à l'instant de son acte.


Citation:
    Laell,

    L'oraison a été éconduite. La Mort ne vaincra pas. Pas aujourd'hui.
    Un trouble m'agite et provoque en moi, un véritable raz de marée. Je ne puis rester bien plus longtemps à des lieues de ta personne. Ne pouvoir humer ton parfum, apprécier le son de ta voix, souffrir de tes silences, me délecter de tes noisettes moirées. Il n'y a que deux raisons qui me font lutter, Notre Nom et celui de te voir allongée à mes côtés.

    Sache que je ne désire plus vivre au gré des arcanes de la famiglia. Il serait souhaitable de dévoiler ce secret, qui n'en est presque plus un. Avec pour objectif d'un jour, nous unir en faisant de voeux pieux....ou non. Je sais que les bonnes moeurs sont retordes et que celui qui voudrait servir notre cause, n'est pas né. Aussi, juste une cérémonie païenne nous conviendrait. Oui, tu as bien lu. Je te parle de l'union de deux êtres. Qui en l'état nous est et nous sera toujours interdite. Mais qui pourrait bien prononcer une objection ? Nous, fières Corleone qui faisons fis des lois et du licite. Je veux ceindre sur ta tête, non pas une couronne de marguerites, mais bien de roses.

    Est-ce que ma volonté est la tienne ?

    Je dois également t'entretenir d'une chose. Fleur des Pois, celle que nous avons croisé à Paris, est à Sémur. C'est une petite impertinente qui ne respecte rien, ni personne. Indomptable, je le crains. Quoiqu'au début, tu devais penser la même chose de moi. Après un régime strict de pichenettes derrière l'oreille, je file presque droit. Des fois, je le regrette. Ma fougue s'estompe, je suis devenue bien sage. Cela ne va pas. Puis cette guerre saupoudre mes paupières d'une poussière assoupissante.

    Dans la nuit, nous espérons pouvoir rallier Dijon. Peut être que ta soeur nous suivra. Sinon, elle rejoindra le clan ultérieurement. Mon impatience ne peut se guérir qu'à tes côtés. Alors je ne puis faire halte, ne serait-ce une journée de plus, dans ce patelin nauséeux où rien ne se passe. Rien que pour nous avoir séparées, la Bourgogne mérite qu'on la châtie. Seulement, elle se couvre d'une coutume familiale qu'il serait peut être bon, un jour, de réformer de fond en comble.

    Mes pensées sont tiennes,


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Laell
"Jamais rien ne se passe comme on l'aurait voulu... Tu devrais le savoir..."

Dans l'esprit de l'italienne, comme dans beaucoup d'autre, la guerre n'évoquait que sang se mélangeant à la sueur, douleur qui peu à peu remplace la hargne, battement des tempes rythmant l'assaut et crissement des lames sur les os qui se fracassent sous les chocs. Vision erronée, elle s'en rendit compte bien vite. La guerre n'est que réflexion, engagement et fuite, une succession d'attente, d'insoutenables minutes qui s'allongent encore et encore jusqu'à dévorer les âmes. La guerre est une leçon de patience même pour le plus sage des hommes.
Un simple combat en guise d'apéritif, l'inquiétude en hors d'oeuvre, suivit d'un soupçon de lenteur, agrémenté de temps égrainé, repas qui affame au lieu de rassasier. Le dessert reste la souffrance d'être séparé. Puis l'apothéose arrive enfin, des retrouvailles comme digestif.

Mais avant, il faut supporter l'attente. Les secondes se font heures quand dans la nuit, l'armée patrouille. Croisant ça et là quelques voyageurs solitaires. Peu de mouvement en cette période trouble. Sa hache avait été affutée plus souvent qu'usée, elle fracasserait les premières chairs croisées, traçant un sillon rouge vif dans la peau de sa future victime. Une occupation fut trouvé avec Mira, elles jouaient aux cartes. Jeu comparable à la guerre. Un roi devait en battre un autre. On pariait quelques pièces là où d'autres pariaient sur des vies. Très peu d'action, beaucoup de réflexion. La Corleone n'aimait pas vraiment battre les cartes mais ça avait le mérite de faire passer le temps.

Ainsi dix jours passèrent. Dix jours de solitude insupportable. Dix jours passés à se refuser toute pensée. Dévorée par un manque insatiable et inavouable. L'inquiétude des deux premiers jours avait passé à la lecture des nouvelles de sa Brune. Elle ne lui avait pas répondu. Aucun mot couché sur le vélin n'aurait pu exprimer son ressentit. On lui avait arraché une partie d'elle dès la première bataille.
Puis un message lui redonna enfin le goût de sortir du campement improvisé des Corleone au sein de celui de leur armée.
Cette simple nuit fut plus longue que les dix précédentes. Elles seraient à Dijon demain, enfin réunies. Et cette lettre... Ces mots griffonnés, assemblés, formant des phrases au sens tellement improbable.

Depuis des semaines, Enjoy lui paraissait s'éloigner d'elle. De déception en déception, de doute en inquiétude, pour arriver à un "je te l'avais bien dit". Et pourtant, ces mots...
Elle releva les yeux du vélin. C'était bien la sixième fois qu'elle le lisait depuis qu'elle l'avait entre les mains.

"Est-ce que ma volonté est la tienne ?"

Son coeur s'était emballé à la première lecture comme aux suivantes. Elle n'aurait même jamais osé en rêver. Depuis le départ, elle ne savait pas où ça les mènerait. Jamais elle n'avait douté de ses sentiments, mais comment être sûre qu'Enjoy ressentait la même chose. Elles avaient été si haut dans le bonheur, retombées si bas quelques temps plus tard, pour se retrouver à nouveau puis se séparer durement. Depuis le début, leur amour n'était que montagnes russes, agrémenté de sauce jalousie, piqué de part et d'autre par les aléas d'une vie en comité trop restreint.

"Est-ce que ma volonté est la tienne ?"

Bien sûr qu'elle l'est. Comment pouvait-il en être autrement. Passion sans bornes. Emotions indomptables. Elles se retrouveraient le soir. Faisant fi des présents, profitant juste de l'instant des retrouvailles. Ne parlait-elle pas de ne plus se cacher, de faire savoir à tous qu'elles s'aimaient et d'en accepter toutes conséquences pour pouvoir vivre enfin pleinement.
Ah comme le rêve est doux tant qu'on ne le vit pas. La soirée arriva et avec elle, la dureté de la réalité.
Les mots étaient doux et encourageant à l'écrit, l'attitude fut froide et distante. Pas un regard échangé, pas un sourire offert. L'amertume de la guerre avait noyé toute forme de tendresse qui avait pu transparaitre dans les lignes qui avaient noircit le parchemin. Comment une seule nuit avait pu passer entre le moment de l'écriture et celui des retrouvailles. Comment une simple nuit avait pu modifier l'envie alors que rien ne s'était passé.

Les doutes avaient refait surface, égratignant de nouveau toutes certitudes. L'attente avait été rude chez les deux femmes. L'italienne savait combien l'inactivité était néfaste pour sa Brune mais elle n'avait imaginé qu'il en serait ainsi. La soirée fut comme beaucoup trop d'autre. Piques acerbes et reproches dévoilés. D'une demande en mariage à la séparation il n'y a qu'un pas. Regrets montrés, départ évoqué. Une fois de trop...
La Corleone avait fini par quitter la taverne qui aurait pu accueillir leurs retrouvailles. Cherchant un peu de quiétude dans un endroit tranquille, elle erra un moment dans les rues trop bondées de soldats en attente de la fin d'une guerre qui ne semblait pas vouloir se terminer. Puis de retour dans une taverne, seule avec ses pensées, elle commença à les noyer comme à chaque fois. Avec l'ouverture de la porte virent des heures de discussions, inutiles... Réponse fut donnée entre deux reproches. Remise en question de la demande formulée la veille. Simple torture, bonheur offert, reprit et échangé. Rage contenue face aux doutes émis.
L'Ecossaise lui demanda ce qu'elle attendait d'elle. La réponse fut simple et sincère. Plus rien. Dans les bras de celle qui l'avait voulu pour femme la veille, elle avait connu le meilleur comme le pire. Elle avait rêvé pour elles, une vie sur les chemins, une gloire partagée, une reconnaissance dans leur monde, redorer un nom qui fut tant craint. Mais aujourd'hui, elle ne savait plus rêver...

Le temps qui s'écoule a ses qualités, il permet au plus timide rapprochement de s'opérer. La soirée fut ponctuée par quelques mots rassurants. Cette nouvelle nuit de séparation qui s'annonçait risquait de sceller leur avenir commun.

Départ pour Autun et retour à Dijon. L'attendrait-elle ? Quels doutes subsisteraient ? Quelle suite donneraient elles à tout ce qu'elles avaient vécu jusque là ? L'esprit Corleonien divaguait tendit que ses pas la ramenait vers Dijon.

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Enjoy
    Dijon, capitale des mésententes. Le couple se retrouve enfin après des jours de séparation. Cruelle sanction. L'absence la dévore. Ne plus pouvoir goûter ses lèvres ou humer son parfum subtil. A la place, elle dépérit lors de sa longue convalescence. Heureusement quelques rencontres lui redonnent du baume au cœur. Notamment Tynop et Etienne. Deux hommes, deux ombres potentielles pour son Italienne. Pourtant aucun d'entre eux n'a de chance si ce n'est un baiser donné au premier. Récompense et remerciement suite à la cessation d'un bouclier. Qu'elle possède encore. C'était à Sémur. Sa demande en mariage dévoila ses passions ultimes. Les retrouvailles, qui devaient se poser en promesses d'un nouveau jour, finirent de lui arracher le palpitant. Les blessures venaient à peine de se refermer. L'impatience, quant à elle, ne faisait qu'accroître. Si bien que la mustélide n'offrit aucun sourire, aucune caresse. A la place son courroux s'exprima et a bien failli sonner le glas de leur relation. Infecte impétueuse qui n'a de cesse de lancer des piques acerbes aux gens. Tous ont dû y passer ce soir-là. Même sa Belle. Un combat dont elle est experte. Les tours se sont enchaînées jusqu'à la faire fuir. Pour autant sa colère ne s'apaisa pas. Les heures s'égrainèrent, elles se retrouvèrent. Les échanges furent vifs, tranchants, impossibles. Une rencontre la calma un court instant. Puis la jalousie arriva en renfort dans une chevauchée fantastique.

    A la pointe de la nuit, les deux êtres aimants avaient achevé leur déchirement pour en entamer un autre. Laell prendrait la route d'Autun pour guerroyer, tandis que sa chère et dure reste à l'arrière. Un détail mais sur le moment il signifiait beaucoup. Sur la table des négociations le départ de la mustélide avait été évoqué. Sachant pertinemment qu'elle ne fera pas long feu sans cette famille étrange, sans l'action qui en découle et surtout son Autre. Puis l'évocation d'un duo pour arpenter les chemins et monter leur propre unité de détrousse pointa le bout de son museau. Cette alternative ne la satisfit encore moins que la première. La Fougueuse a un nouveau rêve, celui de faire briller les Corleone par l'intermédiaire de son Italienne à leur tête. Si elle venait à la suivre, ce dernier songe, cette douce envie s'évanouirait à jamais. Seules, elles ne seraient rien. Et elle sait aussi que même si l'écossaise pouvait se permettre de rallier un autre groupe. Jamais sa future épouse n'accepterait d'endosser le rôle de larbin alors qu'elle était la numéro deux de la famiglia.

    Quoiqu'il en soit, elles se perdirent de vue. Les deux préoccupées d'une façon différente. La fidèle guerrière sur le champ de bataille en plein doute. Celui de ne plus revoir sa promise lors de son retour. Tandis que la pleutre rongeant son frein à Dijon, ne sachant quoi faire, quoi dire, et exprimer le remord certain de voir la silhouette de sa Brune disparaître dans la brume. Avec pour derniers mots : « Peut être qu'on ne devrait pas se marier... » Idiote furette, vilaine fille, arrogante impulsive. Mais à l'aube, la mustélide était encore là, à patienter. Elle espérait le retour de sa Belle afin de se faire la belle. Ce qui ne tarda pas. La persifleuse déversa ses indications à la sage Laell. Souvent, c'est ce qu'elle ressent. La Macdouggal-Corleone est du genre rapide, calculatrice donc légèrement manipulatrice. Elle peut se le permettre avec presque tout le monde sauf avec sa moitié. Pourtant, il arrive qu'elle ressente la sensation étrange que quoiqu'elle dise, toujours elle la suivra. Ceci lui offre une forme de pouvoir. Impalpable, indescriptible mais aussi extrêmement dangereux. Parfois elle regrette les pichenettes derrières les oreilles pour la remettre dans l'axe. Pas en public, c'est humiliant. Mais en aparté, sa Brune ne se le permet même plus. Et pourtant c'est ce qui a permis de la dompter un peu. De la faire grandir aussi.

    Au fond, le souhait du retrait des troupes Corleone avait été émis par la mustélide. Relayée par la numéro deux. La grande majorité de la famiglia n'en voulait plus. Puis la mission avait été accomplie. Les teutons furent mis en déroute. Et les garnisons restantes n'étaient que des armées semi-privées aux desseins bien loin de Rome et de la Royauté. Les affaires locales donnent des ailes aux rats qui se muent en vautours. Les rapaces cherchèrent à amenuiser la Bourgogne afin de bloquer les votes et s'assurer une meilleure place sur l'échiquier. Manœuvre non dénuée de ruse bien qu'une prise de pouvoir contestée au milieu de nobles armés jusqu'aux dents n'offre que peu de possibilités au dialogue et à l'entente cordiale. Ainsi donc, le groupe entama sa descente vers le Sud. Et le couple se retrouva enfin. Pour ne plus se quitter. Essuyant ensemble les déboires, les remontrances des populaces pro-papistes. C'était amusant de se faire traiter de catin par un homme qui offrait des verres avec bonhomie y a moins d'un mois. Leur chemin était une voie royale pour un pèlerinage nécessaire : Mende.

    La rencontre d'avec un roux semi-barde et déluré comblèrent leurs soirées bien vides en divertissements. Puis ce dernier fut perdu en rase campagne. Deux groupes, deux itinéraires différents pour une cible commune. La tension fut à sa comble jusqu'à ce que les siens pénétrèrent dans la mairie comme un soiffard dans une ribaude. Voici venu le jour des rires et des joies. Les coffres furent vidés, une petite annonce fut faite. Puis ils reprirent la route vers d'autres horizons....

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Laell
L'après Mende avait démarré par le mariage. La journée avait été longue. La cérémonie tout autant. Certains ne s'étaient pas gênés pour interrompre l'office à grand coup de règlements de comptes. Les deux familles s'en étaient donné à coeur joie, chacune son tour. Certains se contentant de se faire entendre, tandis que les autres s'arrosaient mutuellement de coups et de sang. Chacun avait eu le loisir de se désintéresser de la raison de leur présence. Le mariage avait fini par être célébré plus ou moins devant les convives, pour ceux que ça intéressait encore. Ce qui aurait dû être grandiose ne fut que soirée ratée. Chacun avait pu s'abreuver et s'emplir la panse à sa guise. D'autres débordements avaient eu lieu mais rien de digne de la Cour des Miracles. Aucun mort ni même estropié n'avait été à déplorer.

Seule la nuit de noce méritait réellement de rester en mémoire.
Comme une première fois, les deux femmes s'étaient retrouvées, offertes l'une à l'autre avec une passion renouvelée. Plus aucun doute, plus aucune crainte. Elles s'étaient unies jusqu'à la fin des temps. Un échange d'anneaux montrant à chacun qu'elles s'appartenaient l'une à l'autre. Les deux corps se rapprochèrent. Une chambre dans la taverne avait été apprêtée en prévision. Les murs étaient recouverts de tentures plus ou moins douteuses mais encore présentes. La lumière diffusée par les quelques bougies faisaient danser des ombres à chaque vacillement de leurs flammes. On entendait la fête qui se prolongeait dans la cour de la taverne. Des cris, des coups, des chants et des danses habillaient le silence dans la pièce.
Laell, désormais Corleone Macdouggal, plongea son regard dans celui de celle à qui elle avait offert son destin.

Ma femme...

Un franc sourire s'étira sur ses lèvres. Ce mot là serait répété sans cesse pendant des jours. Le bonheur était présent bien plus qu'à n'importe quelle prise de mairie. La fière Italienne dévoila une fois de plus son coté tendre et amoureux à celle qui hanterait ses nuits jusqu'à la fin de ses jours. Le tissu vola de part et d'autre de la pièce. Les mains se firent avides et les bouches dévorantes. Les corps s'enlacèrent, ne faisant plus qu'un. Les peaux frémirent au rythme des emballements des coeurs. Les respirations saccadées, entrecoupées de gémissements dévoilaient l'ampleur des plaisirs atteints. La nuit était à elles, leurs ébats dureraient jusqu'au petit matin.
Jamais elle n'aurait pu penser arriver à aimer autant cette femme le jour de leur rencontre. Ce simple passage en taverne qui avait changé à jamais le sens de sa vie. Elle ne vivait plus que pour Elle. En si peu de temps, ses sentiments s'étaient développés au delà de l'entendement. Pour Elle, elle perdrait tout, supporterait toutes les tortures. Une seule chose pourrait l'achever. La perdre...

L'après mariage avait continué avec la prise de Carcassonne. La famille s'y était infiltrée comme la maladie ronge un homme. Sournoisement, discrètement. Et à la nuit tombée une nouvelle fois les Corleone frappèrent. Comme à chaque fois, la propagande avait fait rage. Qu'aucun Languedocien n'ignore ce qu'il s'était passé dans la nuit. La ville avait été vidée de ses coffres, délestée de tous ce qui avait pu intéresser l'un des membres du Clan. Puis une nuit de défense, une démission et un départ. Comme toujours, avec le sourire. Mais cette fois, le manque de discrétion de l'équipe leur avait valu quelques procès. Deux pour le prix d'un. La prise de Mende serait payée aussi.

Arriva Castelnaudary. Ville qui n'était pas ciblée peu de temps auparavant mais la fierté de la famille ayant été bafouée par le Roy une fois de trop, l'or coula de nouveau hors des caisses communales pour rejoindre les charrettes déjà trop remplies du Clan. Les raisons furent annoncées publiquement. Le couple Royal n'avait pas daigné répondre à leurs courriers mais s'était permit de leur demander une nouvelle fois leur aide. L'affront avait été à la hauteur de la prise. Castelnaudary était une ville riche avant de connaitre la folie vengeresse des Corleone. Certains affirmaient que leurs têtes seraient mises à prix, que chaque armée du royaume n'aurait de cesse de les pourchasser. Mais la résultante n'en fut qu'un procès supplémentaire. Partie hors des terres Toulousaines, Laell n'eut la possibilité de se défendre, le procureur nouvellement nommé n'ayant pas jugé bon de lui faire parvenir les minutes de son procès en cours. Il s'acheva donc sur une vaine tentative de négociation. Rendre l'or ou croupir en prison. Le choix fut rapide. Le séjour dura cinq jours. Cinq longues journées loin de sa femme. Sans aucun doute la plus grande torture qu'on pouvait lui infliger. Une amende fut prélevée à son entrée dans les geôles. Le temps de se refaire passa avant que de nouveau la justice se rappelle à son souvenir. Cette fois, c'était les languedociens qui la firent écrouer sur les terres Guyennoises. Trois jours de prison, là encore accompagnés d'une amende. Il ne restait plus que le troisième, qui sans doute tomberait dans un avenir proche.

De la terre battue au sol, une odeur puissante qui s'en dégageait. Sans doute qu'un jour il y eu de la paille au sol. Des cris résonnaient parfois dans le silence noirâtre de sa cellule. La lucarne bien trop haute laissait apparaitre parfois un faible rai de lumière. Assise dans un coin, la Corleone souriait. Les genoux entre ses bras, pensant au futur. Aucune prison n'aurait raison d'elle. Aucune torture ne lui ferait changer de vie. Elle était née brigande et mourrait brigande. Elle continuerait à payer pour l'ensemble de la famille autant de fois qu'elle prendrait la tête d'une mairie au nom du Clan.
Parfois une voix parvenait à ses oreilles. Elle était là dehors. Les épais murs les séparaient mais elle sentait sa présence. Les retrouvailles n'en seraient que plus fortes. Elle l'attendait. Leur avenir aussi. Bientôt la Corleone serait de nouveau libre.

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Enjoy
    Les mariages. Unir les désunis pour une histoire sans lendemain. Voici ce qu'elle en pense. Ils étaient tous venus. Avec leurs trognes blêmes ornées par des regards gênés. Ils ont laisser écouler des rires gras de leurs lippes. Ils ont essuyé d'un revers de manche leurs colères, ils ont tenu malgré cette union perfide. Les absents ont été remarqués. Qu'ils soient de la famiglia ou non, la frontière de l'impardonnable avait été franchie. Et comme tout un chacun le sait, la Corleone n'a pas la mémoire courte.

    Le convoi ne jettera l'ancre que lorsque la bise embrassera la nuque de leur cible. Brinquebalée au rythme de la route, elle fait courir machinalement un écu le long de ses doigts habiles. Sondée par des pensées maladives. Suintant d'aigreurs, de remords et de questionnements. L'attente de l'événement ne laisse qu'un goût amer en bouche. A croire que les espérances sonneront éternellement le glas des sentiments inaccessibles. Toujours dans ses prévisions, ses plans, ses hypothétiques conquêtes. Loin de l'âge des songes, à tout juste la vingtaine, la Sulfureuse se laisse happer par les limbes de la désillusion. Ses rêves de gloires ont quitté le port de ses ambitions. Ils voguent. Tous autant qu'ils sont. Avec leurs forces et leurs faiblesses. Ils arpentent ensembles une même veine parmi ces immenses cours d'eau.

    Et comme un léger remous dans un miroir lacustre, Carcassonne s'effleure, s'effrite et se fane sous le regard sombre de la Corleone. A l'unisson, les silhouettes cavalent au siège du Présidial pour le tenir au péril de leurs vies. Nocturne est avec eux et le sera ainsi jusqu'à la Fin. La facilité avec laquelle les remparts ont cédés aux forces italiennes la laisse dubitative. Les ribaudes ont bien plus de prestance au moment de s'offrir à l'ingrat. Même lorsque le tocsin s'époumone à travers la cité, le challenge est absent.

    Victimes collatérales d'une guerre qui ne les concernent pas. Les Carcassonnais se réveillent sonnés, abasourdis. Pensent-ils alors que les Corleone sont là que pour se couvrir d'or et de prestiges ? Alors que leur venue n'est liée qu'à une idée, un plan. Celui de s'éloigner de leur proie principale pour mieux l'égorger au détour d'un sentier. L'instigatrice de cette manœuvre se noue l'estomac à chaque fois que le Soleil se lève et que la Lune s'étiole. Aucune place à l'erreur, tout doit être parfait. Cette réussite doit suivre le fil de l'Héritage, celui d'une Sadnezz qui les observe de là-haut. Alors la tension la torture jusqu'au moment de quitter la place, les poches pleines. Pas avant.

    Le stratagème a fonctionné. Carcasonne cède, puis au tour de Castelnaudary, la réputée imprenable. Le couple royal a compris ce jour qu'il ne fallait aucunement se jouer des Corleone. C'est comme vouloir dompter le feu, à la longue on se brûle. Les ricochets des promesses non-tenues éclaboussent la faune locale. Emplie d'incompréhensions, les choses seront enfin mises à plat suite à une annonce.


Citation:
    Au triste peuple Toulousain,
    Aux gueux, aux gueuses,
    Aux saltimbanques de la défense,
    Aux couards, aux nobles,
    Au Roy & à la Reyne,


    Saluti !


    Que les incultes se rassurent, nous leur offrons la foi et même un crédo. Celui des Corleone et de la Spiritu Sanguis. Lorsque vous lirez ceci, agenouillez-vous devant la splendeur de nos écrits. Et édifiez une statue à notre effigie.

    Les autorités comtales vous mentent mais ceci n'est pas une nouveauté. La prise de Castelnaudary n'est rien d'autre qu'une preuve accablante à l'encontre du couple royal. Ceux-là même que vous chérissez et pour lesquels vous avez pris les armes afin de faire couler le sang de vos voisins. Vos bergers ne sont que des loups et vous rien d'autre que des agneaux apeurés. Contrairement à ce que veut bien vous faire croire votre Comte, nous ne sommes pas à la solde de l'engeance consanguine et illettrée surnommée Namaycush. Nous sommes nos propres maîtres et désormais le resterons à jamais. La Reyne Agnès de Saint Just dict Gnia ainsi que son époux le Roy Eusaias Blanc-Combaz ont jugé bons de se jouer de nous. Ils veulent asservir la noblesse du crime pour en faire leurs chiens.

    Au début, l'appât du gain nous a piqué au vif. Et face aux belles promesses de la Galeuse nous avons accepté de passer au fil de l'épée les acoquinés de la croix en Bourgogne. Hélas les compensations n'ont jamais germées autre part que dans nos esprits. La Reyne n'a pas daignée répondre à nos missives notamment lorsque nous réclamions aides et assistances pour porter préjudice à l'alliance de Navarre. A la place, nous n'avons eu que l'expression d'un profond dédain. Si bien que nous avons lancé un ultimatum à Son Altesse qui resta lettre morte. N'ayant plus de compte à leur rendre, nous nous sommes désengagés pour recouvrir notre précieuse liberté. Ainsi notre serment de non agression envers les vassaux du Roy ainsi que le Domaine royal venait d'être levé. Nous nous sommes empressés de donner une réponse sans équivoque à la couronne. En résulte, la prise de Castelnaudary.

    Ville réputée imprenable. Il nous semble qu'elle est sur-estimée. A en voir la facilité déconcertante avec laquelle nous nous sommes introduits dans la mairie. Seulement deux gardes alors que Castres venait tout juste de tomber. Nous n'avons pas dévalués la force de nos adversaires mais la réciproque n'a visiblement pas été appliquée. Rogner sur les coûts de la défense alors que les coffres sont pleins à craquer, c'est un acte criminel.

    Nous vous enjoignons à ne pas nous chercher querelles car il reste trois villes à notre disposition. Le Languedoc a minimisé notre importance, depuis ils s'en mordent les doigts. Vous êtes du bois, nous sommes de l'or. Vous êtes de la laine, nous sommes de la soie. Toute action portant atteinte à l'intégrité morale ou physique de l'un des nôtres sera sévèrement réprimandée. C'est un conseil. Reste à espérer que vous le suivrez à la lettre.

    Au nom des Miens & de la Spiritu Sanguis,




    La suite a une odeur de soufre et celle de la Mort.

    Sono Corleone !*


*Je suis Corleone !
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