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[RP fermé] Promotion du pion roy

Tojas
L'homme s'échinait sur sa table en bois massif à noircir un vélin, son dos était parcouru de soubresauts rapides et saccadés, en silence. Il se trouvait campé au milieu de la pièce en face de la seule ouverture de la pièce plongée dans la pénombre.
Le paysage inondait le regard, fait de vert et de bleu, la petite maison de pierre dominant une colline plongeant vers une mer calme, surplombée d'un manteau nuageux laiteux laissant filtrer une lumière diffuse.

Tout à coup, l'homme émit un son, un grognement désapprobateur, la silhouette penchée sur la table se redressa subitement.
Son épais bras se posa violemment sur son front dans un claquement puissant et sec.

Appointment or Rendez-vous, how do we say that in Oïl tongue ? 1

J'ai perdu mon françois depuis dix ans, quel pensum de rédiger cette requête !

Le colosse se pencha à nouveau sur la table, et il repris son grattement frénétique, appliqué à la tâche, avec détermination.
Le début de la matinée était déjà bien entamé, les nuages n'étaient déjà plus là dans le ciel, la lumière dardant à travers l'embrasure de la porte éclairait davantage la pièce, découvrant des murs en pierre de bonne facture, mais néanmoins noir de fumée.
Un âtre sans flambée occupait la gauche de la pièce tandis qu'un bric-à-brac indescriptible occupait la droite.

Tojas maugréait tout en s'affairant sur sa missive rétive.
Il ne se peut pas qu'un nouveau pion du roi, n'arrive pas à promotion!
Cette petite est tout ce qui reste comme avenir à l'Irlande.


On pouvait lire sur la missive
Citation:
"Dear Ithilien,
Mathilde la petite fille est in danger !
Le couvent de Touraine a burnt up en décembre dernier,
tu dois bring her in Blaye as soon as possible,
I will join you there,
her adress is 3 rue Picois, Loches, Touraine."
2

Hey, je sens que j'ai fait plein de spelling mistakes, elle ne va pas me le pardonner, Ithilien ! 3

Tojas avait reçu une missive du continent la veille, en provenance de Loches ou un de ses agents avait remarqué une jeune fille rousse dans une Taverne qui se targuait de jouer au jeu des Roys, ça ne pouvait être que Mathilde.

Ce même agent lui avait appris peu avant par une autre missive que la Chartreuse du Liget à Chemillé-sur-Indrois avait été incendiée, aucun survivant n'avait été retrouvé.
Il n'y avait plus de temps à perdre, la jeune file devait être secourue immédiatement, le seul fait qu'elle soit encore vivante était déjà un miracle en soi.

L'homme robuste se leva alors de sa chaise éculée, et fît crisser le bois sur le sol en pierre, il s'étira longuement en contemplant ce paysage calme et coloré.

Sauver le royaume en ramenant la fille du maître au bercail, avant qu'il n'y voit que goutte.


(1) Rendez-vous ou Rencard, comment dit-on cela en langue d'Oïl ?

(2) "Chère Ithilien,
Mathilde la petite fille est en danger !
Le couvent de Touraine a été incendié en décembre dernier,
tu dois la ramener à Blaye le plus vite possible,
Je t'y rejoindrais,
son adresse est le 3 rue Picois, Loches, Touraine."

(3) Dis-donc, je sens que j'ai fait plein de fautes d'orthographe, elle ne va pas me le pardonner, Ithilien !
Ithilien
Ses paupières fatiguées se haussèrent tandis que, aussi flegmatique, un pâle soleil pointait doucement son nez sur la campagne tarbaise, irriguant sa couche d'albâtre d'une lumière orangée. La jeune femme accueillit ses rayons chaleureux avec reconnaissance tandis que son esprit s'éveillait lentement, et que ses yeux bruns observaient la sereine et inéluctable montée dans le ciel de l'astre. Délicatement, elle poussa ce bras velu qui entourait sa taille et se défit de l'étreinte de son bel italien pour pouvoir s'asseoir. Là, sur la colline dominant l'horizon, la jeune femme s'enroula dans une couverture pour se protéger du froid mordant de ce matin-là, et se mit à observer la campagne environnante. Elle reconnût l'Adour qui coulait, généreusement, entre les prés, les forêts, qui disparaissait pour reparaître de nombreuses lieues plus tard, dans un liseré indistinct, creusant et vallonnant ces terres pour y marquer son passage. Un vent venu des montagnes sudestes souffla dans son dos un air glacial qui la fit grelotter et remonter la couverture un peu plus haut sur ses épaules nues. Le soleil, maintenant, dardait haut ses rayons, annonçant une journée magnifique, hivernale mais splendide.

« Une belle journée pour continuer notre route... »

A l'idée de devoir encore marcher dans ses godillots détrempés de neige, à l'idée de ses mains pleines d’engelures et de ses lèvres gercées, Ithilien soupira. Elle était italienne, c'était une enfant du Sud, une création du Soleil impétueux et brûlant. Elle préférait la chaleur... Qu'était-elle venue faire dans ces terres ? L'Hiver était une saison magnifique, mais bien trop rude pour la peau délicate d'un être méditerranéen comme la sienne. Un soupir las s'échappa de ses lèvres craquelées.

Elle se leva enfin et songea à réveiller ses compagnons de route - ces marmottes ! - qui dormaient encore. Emmitouflée dans sa petite couverture, bien dérisoire, elle s'approcha du feu dont elle joua avec les braises, depuis longtemps froides, à l'aide de la pointe de sa dague. Elle se retourna pour jeter un coup d’œil, discrètement, à ce bel italien avec lequel elle avait passé la nuit... et bien d'autres encore... Celui-ci la regardait, ses yeux vifs étaient plantés dans les siens. Depuis combien de temps l'observait-il ? Ithi lui décocha un magnifique sourire.


« Ciao mio tendere » , alla t-elle lui murmurer au creux de l'oreille avant de lui donner un baiser en guise de bonjour.

Lentement, le camp entier s'éveilla. Miranda d'abord, les yeux hagards, vînt les retrouver, elle aussi avait visiblement très peu dormi du fait du froid mordant contre lequel, même malgré toutes leurs couvertures, ils n'avaient su lutter. Ils partagèrent leurs maigres ressources : un fond de floc, cet excellent spiritueux aquitain dont Ithi raffolait, et cette nombreuse réserve de miches de pain qu'ils agrémentèrent seulement de leurs paroles, et de leurs rires lorsqu'ils virent la tête au réveil de leur amie Natacha. Les cheveux ébouriffés de cette dernière et ses minuscules yeux qu'on discernait à peine valaient tous les spectacles du monde !

Mario, le meneur du groupe, la pressa doucement de son magnifique accent, accent qui faisait toujours autant fondre l'Alien. Cette dernière regardait, toujours en émoi devant elles, les lèvres de son amant remuer tandis que celui-ci parlait à la princesse Slave.

« Habille toi prestement Natacha et avale un peu de pain, nous marcherons pour la journée. Nous atteindrons Auch ce soir si tout se passe bien. »

L'italien les menèrent bon train ainsi jusqu'à Auch, la capitale de la région, qui serait leur étape pour la nuit. D'un commun accord, las de ce froid engourdissant leurs membres, les compagnons de voyage avaient décidé de faire halte pour cette nuit-là à l'auberge. Ils n'étaient certes pas riches, mais ils ressentaient désormais le besoin de réchauffer leurs êtres et leurs esprits. Quitte à dépenser leurs écus, ils avaient décidé de le faire bien : ils avaient ainsi réclamé les services de l'aubergiste pour que celui-ci leur fasse un bon ragoût, et leur apporte de nombreuses bouteilles pour qu'ils refassent le monde, avinés. Cette soirée restera longtemps gravée dans la mémoire d'Ithilien comme celle d'une cuite mémorable aux côtés de ses amis, blottis autour du feu de cheminée de la chambre qu'ils avaient louée pour la nuit.

Ce sera également ce soir-là que l'aubergiste, une fois l'affairement passé et ses services octroyés aux différents clients fort nombreux en cette nuit glaciale, revînt voir la joyeuse troupe menée par l'Italien. L'homme replet s'essuya les mains dans son tablier suffisamment dégoûtant pour que ses mains ressortent de ce contact plus sales qu'elles ne l'étaient auparavant. Il prit à parti Ithilien et lui donna un pli, scellé à la cire, plutôt rare pour de simples gens, comme elle. Un sourcil fût haussé tandis qu'elle observait la missive qu'on lui tendait, puis elle remercia l'aubergiste et retourna s'asseoir auprès de ses compagnons.

Pendant que Natacha et Miranda, toutes les deux aussi fouines l'une que l'autre, se penchaient vers elle pour apprendre de quoi il s'agissait, Ithi ne sût leur répondre : elle n'en savait pas plus qu'elles. Le seul fait qu'ils pouvaient tous comprendre était que la jeune italienne venait de recevoir une missive d'une personne importante, qui s'était donné la peine de la retrouver. Comment, d'ailleurs, cette personne avait-elle appris qu'elle se trouverait à Auch ? Tant d'autres questions auxquelles il ne suffisait qu'à Ithi de répondre, en décachetant la missive, source de toutes ces interrogations.


« Hé bien qu'attends-tu ? Ouvre ! » entendit-elle sourdement, tandis qu'elle défaisait doucement la cire qui liait le vélin.

L'Alien fronçait les sourcils, l'effort était intense pour elle. Bien qu'ayant pour beaucoup vécu en Royaume François, la jeune femme savait bien évidemment parler couramment la langue d'oïl, mais il lui était encore difficile de la lire. Notamment et surtout lorsqu'il s'agissait des lettres pompeuses des hauts pontes, ou de bourgeois les mimant. De plus - et c'était là le problème majeur pour une italienne qui parlait bien des langues hormis l'anglais - son expéditeur alliait, dans un méli-mélo incompréhensible la langue d'oïl et l'anglois.


« C'est un Chevalier... Je l'ai rencontré il y a assez longtemps... »

Une vague d'émotions l'envahit, alors qu'une phrase particulière sauta à son visage et lui martela le cœur.

Citation:
Le couvent de Touraine a burnt up en décembre dernier.

La jeune femme dût relire plusieurs fois la suite pour être apaisée et comprendre que la "jeune amie" en question y avait survécu et qu'elle n'était en rien décédée, comme elle le craignait de premier abord. Elle maudit alors le Chevalier de ne pas avoir fait l'effort d'écrire dans une langue compréhensible du commun des mortels, ni d'avoir omis de préciser presto que Mathilde ne faisait pas partie des victimes du drame. Car bien qu'Ithi ne connaisse que des bribes d'anglois, elle se doutait que le terme "burnt up" n'était pas courant dans les salons de thé.

« Je... Je dois aller à Loches, pour récupérer une petite fille... Elle est toute seule et en danger, et le Chevalier Tojas me supplie de m'occuper d'elle le temps qu'il rentre d'Irlande... »

Ciao mi tendere Salut mon tendre

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Commandatrice
Thoushaltkill
[12 décembre 1460: Sanglant Sexte ]

Le jeune fille se trouvait face à un pupitre rudimentaire dans une cellule aux barreaux étroitement espacés, dos à une paillasse, ses cheveux terre de feu dégoulinaient sur une robe de bure sombre trop grande pour elle. Elle était penchée sur un livre qu'elle connaissait par coeur, concentrée, tendue, loin de ces murs froids et hostiles. Il était presque l'heure de Sexte, il lui restait quelques temps pour sa besogne fastidieuse.

Une cavalcade retentit soudain dans les couloirs du couvent, inhabituelle, inquiétante, qui l'extirpa de son travail quotidien. Peu après une femme au visage inquiet et burinée par les années ouvrit la porte de la cellule dans un fracas assourdissant.

La mère supérieure à l'air bouleversée, que se passe-t-il donc ?
Elle ne le saura peut-être jamais !

Etant astreintes au silence absolu, les nones de l'ordre des Clairistes se voyaient imposées un voeu de silence absolu, la mère supérieure ne lui avait jamais adressée la parole !

La vieille nonne fit deux grands pas dans la cellule, saisit la jeune fille par la main de la jeune fille interdite, qui s'était retournée vers la porte toujours vissée sur sa chaise en paille, puis elle l'extirpa de son siège dans un mouvement rotatif la ramenant face à la porte toujours en mouvement.
Elle franchirent la porte dans un éclair, la mère supérieure jetta un oeil dans le couloir des cellules et aperçu du coin de l'oeil un groupe d'hommes en armure déboucher dans le couloir, ils vociféraient des jurons dans une langue inconnue.
La jeune fille ne touchait pratiquement pas terre, un pas de géant affolé sur deux.
La cavalcade des barbares redoublait derrière elles, la main de la vielle femme lui broyait la sienne.


La nonne et la jeune fille débouchaient au bout du couloir desservant toutes les cellules, dans la cellule de la mère supérieure dont la porte était ouverte, le groupe des poursuivants les talonnaient de près.

La jeune fille franchit la porte de la cellule à l'horizontale, la tête la première en direction de la paillasse surélevée du sol, sa main se trouva libérée de l'étreinte d'acier qui lui faisait oublier l'astreinte familière autour de sa cuisse.

Elle se rattrapa comme elle put avec son deuxième bras, pour éviter le choc avec le mur, un bruit de porte qui claque retentit simultanément. La mère supérieure était dans sa cellule, dos à la porte, la bloquant tant bien que mal, pendant que la jeune fille se retournait péniblement en essayant de se mettre sur son séant.

Quelques secondes plus tard, le visage de la vieille femme marqua un étonnement figé, une lame effilée lui transperçait le torse, la bouche grande ouverte, son regard se posa sur le visage perdu dans l'incompréhension de la jeune fille. Le bras gauche de la femme remonta à l'horizontale en désignant la fenêtre grande ouverte dénuée de barreau.

File ! Ton nom doit être ThouShaltKill, nous t'avons trouvée au bord d'un chemin à côté de Bordeaux.

La mère supérieure vient de briser son voeu de silence pour moi !
Quelle raison peut bien la pousser à faire cela ?


La jeune ThouShaltKill resta abasourdie quelques secondes - peut-être fatales - assise au bord de la paillasse, en contemplant le corps de la vieille femme arc-boutée sur la porte qui commençait déjà à trembler sous les coups des hommes qui meuglaient de l'autre côté et tapaient dedans à coup de pied.
Le sang giclait par à-coups, retirant la vie du seul être humain que côtoyait ThouShaltKill.

En un instant, elle franchit la fenêtre sans même se retourner, elle était dehors...
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Thoushaltkill
[12 décembre 1460: prise de l'inititative ]

ThouShaltKill réalisa avec stupeur qu'elle venait de se jeter dans le vide par une fenêtre dont elle ignorait complètement ce qui se trouvait en dessous.

Elle pencha la tête instinctivement vers le sol, après avoir commencé sa chute dans le vide, elle discerna un parterre très fournie en ronce, fougères et petites arbustes de toutes sortes au pied de la bâtisse en pierre blanchâtre, la hauteur lui contracta immédiatement l'estomac et sa mâchoire s'ouvra, sans qu'aucun son n'en sorte.

Le temps d'un éclair plus tard, elle se trouvait dans les ronces, complètement emmêlée dans les ronces, au prise avec sa robe de bure enfichée dans l'épais fatras de piquants.

Je dois me cacher, ou suis-je ?

Son instinct lui dicta de quitter sa robe en sortant par le dessous, pour se libérer au plus vite, a force de contorsion et d'effort contre le poids de l'habit, elle parvînt finalement à sortir de sa gangue mortifère, tel un papillon, presque nue comme un ver.

Elle se retrouva accroupie, un genou à terre à deux enjambées de la lisière du bois cernant le couvent de toute part.

Cachons nous jusqu'à Vêpres ! J'irais chercher des affaires plus tard !

Après de longues heures de patience dans le froid, point trop rigoureux, de cette fin d'année, la jeune fille nota une diminution des bruits dans le couvent, les va-et-vient cessèrent presque totalement.

Elle prit son courage à deux mains et empreinta alors une des portes dont elle avait connaissance au rez-de-chaussée qui donnait sur l'économat, presque entièrement vidé de ses produits, de là elle rejoignit le couloir des cellules des nonnes.

Avant de s'y engager, elle tendit l'oreille de longues minutes, jetant prudemment des coups d'oeil furtifs depuis son poste d'observation, l'étroite volée d'escaliers lui assurait une retraite sûre si l'on venait d'un des deux côtés du couloir.

Enfin, elle décida qu'aucun danger n'existait et rejoignit sa cellule en marchant silencieusement, la tête baissée avec les oreilles grandes ouvertes.

Une fois dans sa cellule, elle se couvrit d'une tenue chaude, et mis la main sur cinq manuscrits qu'elle avait empruntés à la bibliothèque dans le foutoir qui lui servait de cellule.
"Cracow Poem: De Ludis Scaccorum"
"Bonus Socius"
"Civis Bononiae"
"The Porter Manuscript"
"The Munich Manuscript"

Elle se retourna avec ses précieux ouvrages vers le couloir et retourna l'économat, ou elle trouva ce qu'elle cherchait, un grand sac solide pour y protéger son trésor.

Elle sentit alors une odeur entêtante de fumée qui lui signala un danger imminent.

[Cheffe Aldraien
Merci de traduire tout ce qui n'est pas en français, cf Règles d'Or. Bon jeu.]

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Thoushaltkill
[12 décembre 1460: Vêpres à l'économat ]

Cette odeur de brûlé mis son sixième sens en alerte, son coeur retentit plus fort dans sa poitrine, elle parcouru du regard l'économat, en ne reconnaissant rien de ce lieu familier où ces coreligionnaires venaient commercer.

Une pièce presque carrée, avec une grande table en merisier massif centrale, une porte aveugle débouchait dehors d'un côté de la pièce, tandis qu'à l'opposé une volée d'escaliers montaient à l'étage du dessus.
Une petite ouverture discrète à sa droite desservait la réserve.
Les mûrs de la pièce étaient cachés par des rayonnages serrés où l'on pouvait contempler des produits en tout genre, d'habitude.
Il ne restait que des sacs en tout genre, ou des débris de produits alimentaires dans tous les emplacements de la pièce.

Une odeur d'alcool se fit alors sentir derrière l'odeur de fumée, et tandis qu'elle se déplaçait autour de la table centrale pour distinguer d'où provenait ces deux fumets inhabituels en ce lieu si fréquenté, elle vît tout à coup une silhouette dans l 'embrasure de l'ouverture menant à la réserve.

Son sang ne fît qu'un tour, elle saisit son sac contenant toute sa vie, avec fermeté et initia un mouvement rapide vers la porte qui la mènerait vers la liberté.

Elle discerna un mouvement dans son champ de vision sur sa droite, la silhouette bougeait en même temps qu'elle.


L'instant d'après elle dépassait le coin de la table centrale, d'un déhanchement, elle évitait de se ficher dans le bois et continuait sa progression en optimisant la distance parcourue.
Quant à la forme floue, elle était encore loin de sa trajectoire et se mouvait étrangement par saccades.

Le choc eut lieu: son visage rencontra l'épaisse porte en chêne, tandis qu'un fracas se produisait derrière elle, la personne cachée dans la réserve venait de se vautrer lamentablement sur la desserte, tandis qu'elle venait de se prendre la porte en pleine trogne.

Dans un effort qui la surprit, elle put rester en équilibre sur ses jambes, malgré la douleur dans sa mâchoire.

Après une seconde interminable, elle repris ses esprits et saisit la poignée sans s'occuper de la personne qui grognait sur la table de façon inintelligible.

Elle franchit la porte et s'élança vers le bois dans une obscurité presque totale, vers une nouvelle vie d'aventure peuplée de dangers.

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Thoushaltkill
[12 décembre 1460: Les flammes et la gerbe ]

La jeune fille se trouvait donc seule dans cette obscurité à couper au couteau, avec pour seul bagage son balluchon de livres, le plus précieux bien au monde dont elle disposait, qu'allait-elle donc faire maintenant ?

Elle repensait à la phrase posthume de la mère supérieure:

Ton nom est ThouShaltKill, nous t'avons trouvée au bord d'un chemin près de Bordeaux

Qui "on" ? Quel drôle de nom !

La jeune fille marchait avec une assurancce qu'elle ne se connaissait pas dans ces bois denses et inconnus, la mère supérieure l'autorisait à flâner de jour jusqu'à deux cent pas dans les bois qui entouraient le couvent.

Elle ne comptait déjà plus ses pas, par contre elle tendait parfois l'oreille en entendant des craquements inquiétants, pensant que des gens devaient la poursuivre dans les bois.

Pourtant, aucune lueur ne venait déchirer l'opacité des ténèbres, aucune présence ne semblait exister en dehors de la sienne dans cet univers végétal et humide.

Il faisait étrangement doux, la lune n'éclairait presque aucunement le sous-bois et sa progression devenait péniblement longue, elle se guidait en se repairant à la déclivité du terrain, prenant le parti de toujours monter pour éviter de tourner en rond.

Enfin, elle rejoignit un espace où la lumière blafarde de la lune s'immiscait avec peine, lui laissant apparaître ce qu'elle devina être un chemin, grimpant sur sa gauche et découvrant une ombre imposante au loin dans la nature, entourée de flammes s'élevant vers le ciel.

De nombreux corps de bâtiments éparpillés brûlaient à l'unisson dans une communion destructrice, en contre-bas.

Elle se sentit soudain prise d'une crise d'angoisse qui lui étreignit le plus profond de ses entrailles, un haut-le-coeur irrépressible la surpris et elle ne put s'empêcher une régurgitation bruyante et ignoble sur le bord du chemin.

Le bruit incongru de ses entrailles se répandit en écho infini dans le vallon en feu, ses convulsions ne voulaient pas cesser, malgré le bruit qui signalait à tout un chacun sa présence.

Après avoir vidé ses entrailles et déglutit toute la bile dont elle disposait, elle se redressa enfin en s'essuyantant la bouche souillée, ses yeux étaient inondés de larmes, ses yeux verts injectés de sang discernèrent progressivement de frêles silhouettes se mouvoir devant les flammes toujours aussi voraces.

Elle comprit, toute ébaubie, après un long moment que les gens d'armes venaient vers elle du bas du vallon !

La nuit venait à peine de commencer pour ses jambes endolories, elle prit la direction opposée et se mit péniblement à courir, se forçant à se mouvoir, elle se retourne de temps en temps pour mesurer l'avance qu'elle avait sur ses poursuivants.

Que Sainte-Claire me protège !

La Chartreuse du Liget à Chemillé-sur-Indrois n'est plus qu'une ruine calcinée, je la quitte à toute jambe poursuivie par une meute de barbares aux trousses.
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Lord_smith
[13 décembre 1460: Soldes de tout compte ]

Lord Smith se tenait debout face à sa cohorte d'homme en armes, emmitouflé dans une cape maculée de tâches diverses et variées. Derrière eux se tenait les restes d'un couvent qu'ils avaient mis à sac durant la nuit.
On devinait aussi des bottes crottées sous cette lourde cape, bottes qu'il y a peu avait ceint les flancs d'une monture extenuée qui venait de les réveiller avec son galop tonitruant.

Le ramassis de larves imbibées qui lui faisait face, tenaient debout malgré l'heure avancée, débraillés, puants, couverts de sang et de foutre.

Ils arboraient de piètres tenues de brigands affamés, trouées, déchirées.
Seules leurs armes ayant peu servies, trahissaient les moyens conséquents d'un commanditaire fortuné et déterminé à mettre le paquet.

Lord Smith posa alors une question d'une voix rocailleuse et profonde, l'air mécontent, il toisa tout son monde avec un regard suspect et autoritaire.

Où, est donc passé Swinney ?

Les cinq gaillards émergèrent d'un seul homme en se regardant les uns les autres, cherchant en vain leur camarade de forfait, absent au rapport sans aucun doute possible !

Smith, tourna alors les talons et dégaina l'épée de son fourreau en un chuintement inquiétant.
Les autres se relâchèrent alors, se décontractant les guibolles, un bougre planta même un coude dans les flans de son voisin, en montrant du doigt la cape mouvante du seigneur commandant, ricanant en silence dans le dos de son employeur.

Smith tourna alors sa tronche balafrée vers la meute de barbares goguenarde, s'arrêta brusquement en portant son poids sur son pied droit, puis dans un mouvement rotatif fulgurant décapita les deux trublions du bout de la rangée d'un seul coup de tranchant.

Les trois autres compères esquissèrent un pas en arrière, insuffisant pour éviter la sanction du bras armé agile et précis.
L'homme du centre fut transpercé de part en part, un clignement de cil plus tard.
Les deux premiers de la rangée remerciés d'une dague plantée dans la jugulaire pour l'un, dans le nez pour l'autre.

La couronne paye en acier ce mois-ci !

s'exclama Lord Smith, avec un sourire forcé déformant son visage encore plus que ne le fait sa cicatrice immonde d'habitude.
Thoushaltkill
[13 décembre 1460: Loches sans galoche ]

ThouShaltKill marcha toute la nuit, pieds nus sur le chemin qui serpentait à travers la forêt immense, le ventre vide, la liquette souillée par son propre vomis.

Toujours incertaine qu'une troupe de gens en arme ne la suivait pas, elle forçait l'allure de temps en temps, écorchant ses pieds blancs laiteux fragiles et délicats.

Sa besace l'encombrait de plus en plus, elle changeait donc le poids d'épaule quand la douleur se faisait un peu trop insistante, prenant son mal en patience, elle s'échinait à éviter les cailloux les plus gros sur le chemin, progressant dans l'herbe quand cela était possible.

Au détour d'un coude du chemin, elle découvrit un enchevêtrement de bâtiments calmes qui se découpaient sur le ciel, quelques toits dépassaient d'une butte, indiquant une construction imposante.
Aucun bruit ne perturbait le calme nocturne de cette campagne paisible, elle se dirigea vers le bourg sans trop se soucier de rien d'autre.

Elle progressait comme un pantin désarticulé, avec des pieds en bouilli, son ventre la mangeait de l'intérieur, elle avait même du mal à respirer.
Elle croyait progresser rapidement, mais ses pas étaient ridiculement petits, et le bourg était encore loin.
Elle s'écroula au milieu d'un champ de maïs en voulant couper à travers champ, son corps lui intima l'ordre de dormir, elle ne put pas lutter plus contre son besoin de repos.

Au réveil, le ciel était gris et menaçant, elle se trouvait allongée de tout son long sur le dos au pied du maïs qui semblait mûr, en tout cas elle s'en contenta aisément pour rassasier son estomac qui criait famine. Son premier larcin !

Le bourg était animé et l'heure déjà avancée, elle rassembla ses hardes et décida de se mêler à la populace pour commencer sa nouvelle vie, une vie de labeur lui tendait les bras.

Elle se dirigea alors vers une échoppe d'où provenait des éclats de voix, poussa la porte avec timidité et fût accueillie avec urbanité par des villageois occupés à boire un breuvage amère et infecte.
_________________
Thoushaltkill
Après ces évènements rocambolesques, ThouShaltKill se fit toute petite dans sa bonne ville de Loches, comprenant petit à petit, jour après jour comment évoluer dans ce monde si différent de celui qui a été le sien.

Après quelques jours de labeur et d'obéissance aveugle au Tribun, la jeune fille fut fière de devenir une citoyenne à part entière de la ville de Loches. Elle commença l'apprentissage de la paysannerie en portant son dévolu sur une plantation de maïs (surement une réminiscence de son réveil à Loches).
Ses journées monotones, se déroulaient toujours de la même façon, une embauche à la mine d'Or (elle aimait tout ce qui brille) et une soirée en taverne lui permettant d'étancher sa soif de connaissance du monde, des rouages politiques de ce monde si vaste qu'elle découvrait un peu plus chaque jour qu'Aristote faisait.

Puis, un beau jour de janvier, elle reçu une missive étrange et qui la bouleversa pour quelques jours:

Citation:
buongiorno ma fillotte ! (1)
Je me nomme Ithilien et j'aimerais que l'on se rencontre en Guyenne dans la ville de Blaye dans les premiers de jours de février, on fera connaissance devant une bonne crêpe chaude au lait ribot.
Pour ce faire, j'ai pris la liberté de demander à quelques amis de venir vous chercher à Loches, afin de vous assurer un déplacement sûr et sans mauvaises rencontres.
Vous pouvez avoir confiance en le sieur Malaga qui vous mènera jusqu'à moi sans tracas.

Ithilien, votre marraine dévouée,
Ciao bambini, abbraccio. (2)


(1)Bonjour ma fillote !
(2)Salut mon bébé, baisers.

_________________
Ithilien
Plusieurs jours s'étaient écoulés depuis que la jeune italienne avait pris connaissance du courrier du Chevalier Tojas. Durant cet intervalle, Ithi n'avait fait que se ronger les ongles et de murmurer pour elle-même, réfléchissant au meilleur moyen pour porter secours à la petite Mathilde. Tandis que son Mario menait leur groupe de compagnons à travers les plaines recouvertes de givre, Ithilien songeait.

Elle se trouvait, elle et ses compagnons de route, à Saint-Bertrand de Comminges, une bourgade perdue dans le sud du royaume françois. Ils ne seraient jamais assez rapides pour parvenir jusqu'à Loches - si tant est qu'ils y parviennent - et pour ensuite trouver la petite fille. Fort heureusement, l'italienne, bien qu'étrangère, connaissait d'autres personnes, itinérantes comme elles, qui seraient ravis de lui rendre ce service.

Une personne en particulier lui venait à l'esprit. Il s'agissait d'un fringant trentenaire, fils de commerçant, ayant souffert de la perte de ses parents bien trop tôt, mais qui était parvenu à garder de ce traumatisme qu'une maturité et une intelligence hors du commun. C'était un meneur d'homme qui, justement, menait plusieurs de ses amis hors de la guerre angevine, qui le tâchait du moins. Si elle ne se trompait pas, Malaga devrait être dans les environs de la Touraine, et même si ce n'était pas le cas, elle ne doutait pas qu'il ferait un petit détour...

Le soir même où cette idée traversa son esprit, l'italienne prit sa plus belle plume et écrit, à la lumière cette chandelle que son Mario lui avait allumé à cette intention.




Mon très cher Malaga, "chef",

Je suis aujourd'hui bouleversée par un courrier que j'ai reçu récemment, m'apprenant qu'une petite fille que je connais se trouve dans le malheur... et que je ne peux, hélas, aider. Mon compagnon Mario - que tu as il me semble déjà rencontré -,moi et deux amies voyageuses rencontrées sur les chemins nous trouvons actuellement près de la frontière espagnole. Je ne suis pas en mesure, actuellement, de porter secours à cette petite fille, Mathilde, et je crains que ce ne soit une affaire pressante.

Je t'en prie, si tu te trouves près de Loches, pourrais-tu lui porter aide et soutien ? Je ne puis te donner beaucoup d'informations sur ce drame qui s'est produit et dont elle est la pièce maîtresse, la seule chose que je puis te dire c'est qu'elle a une douzaine d'années, elle est haute de 4 pieds et 7 pouces, et elle a une chevelure flamboyante.

Fais-moi confiance, comme tu l'as toujours fait. Comme toujours, tu ne seras pas déçu. La vie d'une petite fille est en jeu...

Un forte abbraccio il mio amico

Ton amie, Ithi

Sa plume avait gratté le vélin à une vitesse dont elle n'avait pas l'habitude, inscrivant d'une écriture vigoureuse mais élégante cet appel au secours. A peine terminée et signée, Ithilien plia la missive de ses mains tremblantes et la fit porter à la volière. En moins de temps qu'il ne faut pour le dire, un pigeon était déjà parti en direction de la Touraine, vers un sentier obscur de la profonde campagne, qu'arpentaient alors le barbu Malaga et sa compagnie.

Un forte abbracio il mio amico Je t'embrasse mon cher ami

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Commandatrice
Thoushaltkill
[Loches 29 Décembre 1460: flatulence surnaturelle ]

ThouShaltKill avait froid cet hiver, avec ses guenilles noircies par les heures harassantes de travail en sous sol. Les soirées étaient longues et la fréquentation des tavernes était sa seule distraction le soir.

Ce soir là, Dame Mayet et d'autres voyageurs de passage papotaient au coin d'un feu bien entretenu, l'une d'elles se nommait Dame Klorysse et venait du Sud.
Une tournée générale fut offerte et je me suis laissée entraîner à consommer cette délicieuse boisson, quoiqu'un peu amère, que l'on nomme bière.
Les discussions allaient bon train pendant que je réprimait un rot inconvenant.
Quelques instants plus tard, un ballonnement soudain survint, me retournant les entrailles et m'obligeant à me délasser les jambes.


Les convives se doutant de ce qui allait advenir déployaient toute sorte de contre-mesures: parfum du sud de la France aspergé avec fébrilité, bougie requise au tavernier pour assainir l'ambiance putride et nauséabonde à venir.

Quelle mouche avait donc piqué tout ce beau monde ? Je ne m'expliquait pas de si étranges comportements, j'allais comprendre dans peu de temps.

Le clou du spectacle arriva enfin: une flatulence supra naturelle fit trembler les murs de la taverne, comment le séant d'une si petite chose peut-il produire un bruit aussi monstrueux ?

L'odeur insupportable provoqua quelques pâmoisons chez les dames, les fenêtres qui donnaient sur le manteau blanc de l'extérieur furent ouvertes en grand.

Le rouge de mes joues me firent quitter les lieux avec célérité, me trouvant toute honteuse d'un si dégradant forfait.
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Ithilien
Accoudée à la fenêtre de la chambre qu'ils avaient loué pour la nuit, Ithilien observait le pigeon s'envoler dans le clair-obscur de cette nuit étoilée. L'air était glacé, le froid s'infiltrait à travers la fine chemise de la jeune italienne, mais elle n'en avait cure... et ne le ressentait même pas. Elle songeait. Elle songeait à ce volatile qu'elle avait envoyé pour sauver une petite fille. Elle songeait à ce geste inconsidéré et stupide, qui ne pourrait en rien aider Mathilde. Comment peut-on placer dans les mains (pattes) d'un idiot de pigeon la vie d'une personne ? Comment avait-elle pu croire une seule minute qu'elle pouvait confier la responsabilité qu'elle se trouvait avoir envers Mathilde à une tierce personne ?

Un soupir s'échappa de ses lèvres, tandis que le pigeon ne devenait qu'un point dans l'horizon, et finissait par être imperceptible pour l'oeil nu. La flamme de la chandelle, dont la lueur fût celle qui lui avait permis de rédiger sa missive, commençait à s'estomper dans son dos, tandis que les braises de la cheminées devenaient incandescentes. Les minutes passaient, et l'italienne ne parvenait à bouger de sa fenêtre. Elle se remémorait le temps passé... ce temps où Mathilde lui était tombée dans les bras.


[ 12 ans plus tôt ]
Ithilien avait alors à peu près le même âge que Mathilde, au temps présent. Fine et vive, la petite italienne était toujours rieuse et malicieuse, pleine de vie. Brune aux yeux sombres, l'enfant ressemblait comme deux gouttes d'eau, en miniature, à l'adulte qui l'accompagnait. La femme, trentenaire, maintenait sa fille près d'elle, l'entourant de sa cape rougeoyante, pour l'empêcher d'aller courir elle-ne-savait-où dans les bois attenants à la route. L'italienne savait pertinemment que ces bois regorgeaient de brigands, et que la route qu'elles arpentaient était la moins sûre de tout le royaume... mais elles devaient avancer. La mère hâta donc le pas, tandis qu'Ithilien tâchait de suivre l'allure de sa mère, tout en bougonnant, capricieuse.

Le soleil était en passe de passer par derrière la colline, se cachant pour quelques heures, et laissant ainsi la pénombre s'instaurer dans cette contrée. La nuit était le territoire des malandrins, des violeurs et des lépreux, l'italienne le savait pour avoir longtemps été commerçante itinérante. Elle ne souhaitait donc aucunement qu'elle et sa fille se retrouvent coincées à l'extérieur des remparts de la ville qu'elles tâchaient d'atteindre, les gardes de ces derniers ayant reçu l'ordre de ne plus laisser personne à la nuit tombée.

La lumière orangée d'un soleil fatigué éclairât soudain, au détour d'un virage serré, un drôle de cortège. Il s'agissait d'une caravane, de commerçants sans doute, pourvue de 2 voitures. Ces dernières, éventrées, gisaient sur le côté de la route, les roues brisées. Des chevaux en apparat agonisaient sur le bord de la route. Une attaque de brigands avait vraisemblablement eu lieu, ces derniers avait sans doute profité du renfoncement de la route par rapport à la forêt adjacente. Ce virage était l'endroit idéal, ils avaient dû fondre sur cette caravane qui, malheureusement, n'aura pas résisté.

« Un attacco di briganti... Rapidamente Ithi ! » murmura sa mère, paniquée, à la petite fille, tout en jetant de furtifs et nombreux coups d'oeil derrière son épaule.

Courant presque maintenant et traînant Ithi derrière elle, enserrant fermement, presque douloureusement, sa main dans la sienne, l'italienne se hâtait pour quitter cet endroit infesté de brigands. Elle connaissait un raccourci et, prenant le risque malgré le danger que les malandrins en question se tapissent dans les ombres, elle quitta la route et se faufila entre les arbres, entraînant avec elle sa fille, apeurée. Quelques instants plus tard, elles entendirent un petit cri. Un cri d'enfant. Puis des chuchotements effrayés.

Elles trouvèrent alors une femme, de l'âge de la mère, assise contre un arbre, en larmes, qui tenait dans ses bras une petite fille qui sanglotait dans son sein. Elles se firent toutes aussi peur les unes que les autres, Ithi refoulant un cri de surprise. Rapidement, les deux petits groupes comprirent qu'ils ne craignaient rien de l'autre. Aussi, prirent-elles le parti de partir ensemble, et de rejoindre rapidement Bordeaux, qui ne tarderait pas à fermer ses portes. L'autre femme, stoïque bien que le visage recouvert de larmes, ne pipait mot et suivait l'italienne à travers les branchages leur fouettant le visage et les troncs mousseux des vieux chênes. Ithilien, dans l'instant, avait quitté la main de sa mère et marchait maintenant à côté de la femme, ne quittant pas des yeux le bébé. La petite fille ne parvenait à défaire son regard du visage auréolé de cheveux roux, ce visage désormais apaisé d'un petit être. Ce n'était pas la première fois que la petite fille voyait un bébé, mais celui-ci avait quelque chose d'étrange... peut-être Ithi avait-elle ressenti ça à cause des évènements de cette nuit-là, qui les avaient liées à jamais ?

La femme surprit le regard de la petite italienne, et lui sourit doucement avant de lui dire :

« C'est une fille, son petit nom est Mathilde. »

Un attacco di briganti... Rapidamente Ithi Une attaque de brigands... Dépêche toi Ithi

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Commandatrice
Thoushaltkill
Loches, mois de Janvier 1461 : quatre enterrements et un miracle

Enfermée dans son petit chez soi, chaleureux bien que spartiate, ThouShaltKill réfléchissait intensément à ce qu"il lui fallait faire pour rejoindre Blaye. Epuisée par ses journées harassantes dans la Mine D'or, elle se faisait violence pour construire un plan de bataille pour se rendre dans cette ville qu'elle ne connaissait pas, dont elle apprenait l'existence grâce à la lettre bouleversante de sa marraine. Où se trouve donc cette ville ? De quoi aurait-elle besoin sur la route ? De nourriture, d'armes ? Que pouvait-elle bien faire d'une épée, elle qui avait peur des gens qui guerroyait surtout à l'Ouest de Loches en ce moment. Le félon Anjou était assailli par l'Ost.

Depuis son échappée héroïque du couvent en flamme, elle nourrissait une espèce de peur panique envers toute personne portant une arme ou une armure, un bouclier. Surement une espèce de paranoïa, ce traumatisme dont elle était sortie indemne, n'avait pourtant pas été sans traces dans l'inconscient de la jeune fille.

ThouShaltKill redoublait alors d'efforts en taverne pour compléter ses informations concernant les comtés voisins, cherchant à savoir si une guerre ou une quelconque loi martiale l'empêcherait dedéployer ses ailes et de quitter le nid lochois, qui l'avait vu éclore et grandir dans ce monde complexe, peuplé d'être riches et aimables qui l'informaient souvent sans rechigner, et bien sûr, elle partageait ses maigres connaissances avec les voyageurs de passage en taverne, qui voulaient bien supporter le débit intarissable de son questionnement indiscret. Le premier ami d'un voyageur est le secret de ses déplacements, évitant les brigands trop bien informés par une indiscrétion sur son itinéraire.

Comment allait-elle bien pouvoir affronter de si grands dangers, elle qui ne pensait qu'à sa sécurité et pensait qu'elle était encore l'objet d'une traque implacable ?
Un beau jour, le 8 janvier 1461, elle reçu un pigeon lui annonçant le départ d'un groupe de voyageurs mené pas le sieur Malaga de la ville de Nevers assez loin de Loches à l'est. Elle sauta sur place à pieds joints, littéralement emportée par un prochain départ vers Blaye. L'instant d'après, son enthousiasme retomba en égrainant un à un les points qui lui restaient à régler pour pouvoir partir de Loches. Une somme de tâches insurmontables, qu'elle devait pourtant faire, elle le devait.

En premier lieu, il fallait qu'elle réussisse à céder son champ de maïs, auquel elle avait fini par s'attacher, puisque ses revenus s'étaient vu grandement améliorés depuis qu'elle le cultivait avec régularité et application. Elle devait ensuite élaborer un itinéraire pour rallier Blaye en éviter de passer par la ville de Saumur, devenue ville franche et étant le théâtre du lutte acharnée entre les angevins et l'Ost. Un courrier pour demander un laisser passer avait été envoyé néanmoins à un maire d'un jour, sans réponse. Elle prit son mal en patience, et rédigea deux autres vélins pour savoir si le passage par Saumur était vraiment impossible. Apparemment, oui. Les armées angevines ou l'Ost pratiquaient le "fauchage" aveugle dans la région, et emmener un groupe entier dans cet enfer n'était pas possible.

Au détour d'un panneau d'affichage, elle remarqua que le 7 janvier 1461, le duché du Berry venait de décréter la loi martiale, et après vérification en taverne, on disait qu'une armée malade et assoiffée de sang terrassait toute personne dépourvue de laisser passer dans le duché du Berry, désormais bouclée. Elle réalisa alors que personne ne viendrait la chercher à Loches. Une missive lui parvint quelques jours plus tard, lui apprenant que le groupe de Malaga avait effectivement été décimé sans pitié et sans sommation. ThouShaltKill s'en trouva anéantie sur le moment. Cela bouleversait complètement ses projets, où allait-elle devoir tout le courage pour cheminer seule sur les chemins ? Mais, par dessus tout, comment pouvait-elle sortir du duché de Touraine, tous les chemins menant à Blaye étaient fermés !

Elle ne peut compter que sur elle désormais, abandonnée à son sort, mue par le désir irrépressible de connaître sa véritable identité, son passé, ses origines. Seule Ithilien pouvait lui justifier sa présence en ce monde sans pitié, où l'ignorance était punie. Elle devait retrouver impérativement sa marraine à Blaye en Guyenne. Mais, son champ n'était toujours pas vendu, malgré le porte-à-porte de toutes les bicoques de Loches pour annoncer son désir de vendre ce lopin de terre qui la liait à Loches, au cas où son annonce n'aurait été remarquée, sur la panneau d'affichage consacré à cet effet, débordant d'annonces, certaines datant de quelques mois, voire années.

Après une cogitation intense pour trouver une solution à ce problème de champ, la ville comptait quinze lopins de terre à vendre, elle avait si peu de chance de le vendre, elle imagina une loterie qui pourrait être organisée par la mairie de Loches, avec son champ en seul et unique lot, mais quel lot ! Vendre vingt billets de loterie pour vint écus, et l'affaire serait faite. Elle proposa son idée à la maire par un courrier détaillée et motivée, qui ne lui répondit pas le moins du monde. ThouShaltKill eu même le culot d'en parler à l'inaccessible maire Tayabrina.reudi en taverne un beau matin, avant d'aller chercher l'or du duché dans la mine qui la faisait manger tous les jours. Cette dernière la prit de haut et la menaça de faire appel à l'armée pour l'empêcher de quitter la ville de Loches. Avant de partir, elle n'hésitait pas à la traiter de dictatrice !

Piquée au vif, et très remontée par cette altercation violente, la jeune fille s'essaya alors à l'écriture d'un pamphlet qu'elle voulait volontairement acide et subversif :


Citation:
Si tu cherchais un peu de gaieté
Evite le détour par Loches
Si le sort en Loches t'a planté
Viens donc, on s'arrache de Loches

Si t'as quelque chose à fêter
Evite le détour par Loches
Y a pas d'chouchen à volonté
Viens donc, on s'arrache de Loches

Si t'as rien trouvé pour crécher
Evite le détour par Loches
Si tu ne veux pas te les geler
Viens donc, on s'arrache de Loches

Si t'as des projets pour le futur
Viens donc, on s'arrache de Loches
Si tu veux manger pour une misère
Evite le détour par Loches

Si tu veux papoter avec la maire
Viens donc, on s'arrache de Loches
Si tu veux passer un bon moment
Evite le détour par Loches

Si tu veux t'débarasser d'un champ
Viens donc, on s'arrache de Loches
Si tu souhaites organiser une loterie
Evite Loches, supercherie !

Si tu n'aimes pas les mioches
Evite le détour par Loches
Si tu es plus que d'la bidoche
Viens donc, on s'arrache de Loches

Partout on te fait les popoches
Evite le détour par Loches
Mais si t'aimes bien tes galoches
Viens donc, on s'arrache de Loches

Toute ressemblance avec des personnes existant ou ayant existé, des évènements ayant eu lieu, n’est PAS que pure coïncidence.
Librement inspiré de "Lambé An Dro" de Matmatah


Enfin, un évènement improbable et inespéré, un petit miracle, -pourvu qu'Aristote me pardonne ce blasphème- survint, le 21 janvier 1461:
Citation:
Vous avez vendu à Stacy un champ pour 400 écus.

Elle peut désormais partir, s'envoler, se mesurer à ce monde hostile et dangereux, peuplé de brigands et de soldats, mais si prometteur; un avenir qui ne pouvait que lui sourire désormais !

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Tojas
Un corps de profil en lévitation flottait au-dessus du muret, il se déplaçait lentement, la tête en avant. La journée était ensoleillée, seuls quelques nuages blancs venaient troubler la pureté du ciel azur. Il semblait manquer des jambes au corps imposant assoupi, qui s'enfonçait parfois derrière le muret, et était soumis à un lacet imperceptible.
Vu de derrière, un goupillon raclait de ses trois boules plantées de piquants le sol irrégulier sur la gauche d'un équidé au pas. Le corps avait des jambes qui touchaient presque le sol, l'homme était penché sur la gauche par le poids de l'arme qui récoltait les brins d'herbes séchées du chemin flanquant deux murets irréguliers.

Tojas repris connaissance après avoir piqué un petit roupillon, écrasé par la chaleur et le poids des ans. Il avait fait son balluchon en hâte pour rejoindre son port de départ direction Honfleur. En voyant que son fidèle compagnon à grandes oreilles, Smith, venait de s'arrêter pour se sustenter au lieu de l'emmener à bon port, il gonfla ses poumons d'air tout en imprimant un mouvement rotatif à son goupillon tintinnabulant. Le baudet remonta l'encolure et dressa ses oreilles pointues vers le ciel en écarquillant ses yeux globuleux.

Tojas lâcha enfin un son caverneux et rageur

Smith, Giddy-up ! (1)

L'âne rejeta alors la touffe d'herbe qu'il avait encore entre ses mâchoires, et entama un trot forcé en laissant échapper un braiement réprobateur. L'immense carcasse du guerrier continua à agiter le goupillon en faisant un bruit de tous les diables, tandis que la pauvre bête s'efforçait de soutenir le géant sur son dos. Tojas avait affublé ce baudet du nom se son pire ennemi, la taille de son cerveau n'état surement pas étranger à cela, quoi que l'âne il pouvait en faire quelque chose !

Quelques heures plus tard, le chevalier montait à bord d'un mauvais marcheur en direction du continent, il détestait quitter la terre ferme. Après avoir largué les amarres, la bicoque mis toutes voiles dehors, tandis qu'il se mettait en boule dans un coin du pont en contemplant la mer calme et propice au souvenir.

Tojas se remémora alors toutes les aventures passées sur le continent, durant de longues heures ou il trompait sa peur en s'égarant dans ses souvenirs.


(1) Smith, hue dada!
Thoushaltkill
ThouShaltKill passait avec application son pinceau sur la planche de bois brute, dessinant les lettres immenses, elle avait choisi la couleur pourpre pour aguicher sa clientèle de loin et que l'oeil soit attiré de loin par son enseigne rutilante et provocante. Elle en était au E, le E dans l'O du Phoenix. Son esprit ressassait les milles pérégrinations de son cheminement chaotique à travers les contrées en guerre ou fermée du pays Franc.

Après avoir touché son pactole inespéré, la jeune fille s'était ruée sur le marché en visant tous les biens transportables et vendables à Blaye. Une charrette ? A quoi bon, elle ne pourrait pas la remplir. De la nourriture, oui, beaucoup de fruits du verger lochois, ça se consomme et ca donne le teint avenant, et au pire ça se revend bien. Quoi d'autre ? Des barriques de vin, elles n'ont pas l'air très chers. Et puis tiens, ces belles carcasses de cochon dodues plairont certainement à un boucher de la Guyenne. Au moins, si je me fais brigander, ils ne me prendront pas mes écus, mais devront se coltiner mon fardeau. Mon sac en toile était plein à craquer au départ de Loches, je n'avait même pas pensé à prendre mon manche, et devais me trimbaler ma pioche à la main, elle ne rentrait pas dans le sac.

La route fût longue et la progression fastidieuse à travers le Berry, où il a fallu obtenir un laisser-passer puisque la loi martiale avait été promulguée. Le voyage jusqu'à Chateauroux fût calme, malgré l'appréhension de la jeune fille. Un nouveau laisser-passer pour le comté du Limousin dû être envoyé à dame Victoire_, qui ne fût accordé que trop tard, puisque je ne pouvais attendre plus et décidait de contourner le Limousin par l'Auvergne où il n'y avait nul besoin de laisser-passer.

Par contre, le temps de trajet allait s'en trouver doublé, peu importe, j'avais tout mon temps. Je décidais donc de rebrousser chemin, par Bourges, puis Bourbon et Montluçon. La prévôt des maréchaux m'ayant enjoint d'éviter Sancerre qui était dangereuse. C'est seulement arrivée à Montluçon que je reçu mon laisser-passer tant convoité. Une fois rendu à Montluçon, dame Sterenn. me suppliait de la guider à travers le Berry et me priait de bien vouloir l'attendre pour voyager à deux. Une petite pause de quatre jours fut donc observée, qui nous permis de nous retrouver à deux. Malheureusement, ce fût un faux départ, je partais toujours devant sans pouvoir voyager à deux.

Je passais donc par Montpensier et Clermont où je pris la décision d'aller chercher Angely à Mende en passant par Rodez. Angely étant ma filleule et un peu perdue dans ce monde complexe, je me devais d'aller lui porter assistance et de nous retrouver à Blaye. Je laissais donc Sterenn. derrière moi tout en mandant les laisser-passers pour nous trois pour le comté du Rouergue et le duché de Guyenne. Les jours se ressemblant et les chemins toujours aussi calmes et dépourvus de tout brigand, je progressais sans encombre à un rythme élevé en tapant dans mon stock de fruit qui diminuait à vue d'oeil.

L'obtention du laisser-passer pour le Rouergue ne fût qu'une formalité quoique assez court en durée, je dus donc demander une prolongation car le retour n'aurait pas pû être possible. Je passais donc par Murat, Aurillac et Rodez, où je ne restais qu'une nuit, évitant d'entamant ma bourse qui s'allégeait dangereusement. Ensuite, les villes d'Espalion et de Mende me virent passer où je restais deux jours le temps de me remplir la bourse, Angely était prête à partir ayant suivi les conseils de se fournir en pain pour le voyage. Je conseillais à Sterenn. de marcherr tout droit vers Cahors où nous pourrons nous rejoindre.

Le retour à travers Espalion, Rodez et Villefranche se fit d'un trait, en lance. Angely me suivant systématiquement sans encombre. Les chemins étaient toujours aussi sûrs malgré les rumeurs de brigandage entre Villefranche et Cahors, nous n'y vîmes que du feu. Sur le chemin, je me décidais à passer par le comté du Périgord pour gagner une journée de marche, et redemandais un laisser-passer au prévôt Soren pour traverser à la vitesse de l'éclair cette contrée riche et peuplée.

La réponse ne se fît pas attendre, et le voyage continuais à une cadence infernale, Angely et ThouShaltKill observait cependant une pause d'une journée à Sarlat pour goûter aux joies des tavernes et à l'opulence de ses échoppes. Après Sarlat, les villes de Bergerac, de Castillon et de Bordeaux nous vire passer à la vitesse du vent.

ThouShaltKill n'était plus qu'à une journée de marche de Blaye, Angely décidait de s'essayer à la pêche à la ligne sur les bords de la verte Garonne, la jeune fille se précipitait alors vers la ville de Blaye comme la faim sur le monde, touchant enfin au but qu'elle s'était fixé un mois et demi auparavant. La jeune fille marchait donc seule vers Blaye, la ville tant rêvée.

ThouShaltKill repensait à tout cela avec nostalgie, étant déjà devenue propriétaire d"une taverne et d'un champ de maïs en très peu de temps, ayant rencontré enfin sa marraine et tout son groupe d'amis. Son périple ne fut qu'un pénible moment à passer au final, lui ayant permis de se rendre compte que la ville de Blaye est vraiment la ville qu'elle a préférée parmi toutes celles traversées.
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