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[RP]L'arrivée à Quiberon, Finn'ment jouée

Marzina
La longue bande de sable se déroulait à perte de vue tandis que les deux cavaliers s’approchaient de leur destination finale, accompagnés par le roulis des vagues qui se faisait simple murmure ce jour-là. Les traces de sabots se dessinaient dans le sable fin parsemé d’éclats brillants qu’une mer turquoise venait régulièrement humidifier. La blonde ferma les yeux et leva le nez, heureuse de retrouver l’air doucement iodé de la côte sud qui venait soulever de temps à autre ses boucles folles en un étendard doré. Le paysage dessina enfin une courbe vers la mer, et la côte quiberonnaise dévoila aux regards son côté paisible de plages brûlantes.
Le palefroi s’y dirigea sans même que sa cavalière ne touche aux rênes, il connaissait le chemin de la maison. Ils empruntèrent la courte bande de sable qui s’avançait sur la mer jusqu’à arriver à son endroit le plus étroit. Derrière la centaine de mètres de sable de largeur, l’île s’élargissait et l’on pouvait voir se dessiner les remparts quiberonnais que surveillaient deux simples gardes. Apercevant la crinière blonde et le cheval fauve, ils firent hisser les couleurs de Quiberon pour annoncer le retour de la maitresse des lieux et l’arrivée de son hôte. Avec un sourire empli de fierté, celle-ci annonça à l’Irlandais :


« Degemer mat e Kiberen… »

Passant la porte le paysage se dessina dans sa dualité, douces plages paradisiaques d’un côté, violente côte sauvage de l’autre. C’est vers cette dernière qu’elle se dirigea, entrainant avec elle son hôte. Ils longèrent les falaises de granit où venaient violemment s’écraser les vagues, créant de minuscules nuages de mousse d’écume venant voleter jusqu’à la surface de la presqu’île tandis qu’ils se dirigeaient vers le château. Là, Maupin les attendait, alerté par les bannières hissées.

« Altesse », lui dit-il en se baissant et en lui tendant le bras pour l’aider à descendre.

Elle enjamba son cheval et prenant appui sur le bras, en sauta d’un petit bond leste.

« Maupin, je vous présente Finn d’Pommières, il est l’hôte dont je vous avais parlé dans ma lettre. Tout a-t-il été préparé ? »

Il s’inclina légèrement.

« Selon vos souhaits Altesse. »

Elle se tourna ensuite vers Finn.

« Finn, je vous présente Maupin, mon intendant en ces terres. Si vous avez besoin de quoique ce soit, adressez-vous à lui. »

On vint les débarrasser de leurs montures pour les amener à l’écurie et ils se dirigèrent vers l’entrée du château quand soudain passa Morvan, bestiole ailée et sanguinolente à la main.

« Morvan ! » hurla Maupin d’un air mauvais, « Viens ici mécréant ! Non seulement tu ne viens pas saluer Son Altesse qui vient de rentrer, mais en plus, je vois que tu ne respectes toujours pas le deuil qu’elle a proclamé sur ces terres ! »

Le dit Morvan au nez étrangement tordu agita son volatile sous leur nez dans de grands gestes désemparés tandis qu’il jetait un regard contrit à Marzina, un agressif à Maupin, et un franchement intrigué à Finn.

« Son Altesse ramène un invité ?! »

Oui, la chose était rare, inexistante même, il était une des premières personnes étrangères à poser un pied sur la presqu’île depuis qu’elle en était devenue la baronne, exception faite d’Alix Ann qui y avait une chambre. La princesse gardait jalousement son trésor pour elle seule, vivant en autarcie dans son petit monde miniature. Elle leva un sourcil contrarié en posant les yeux sur la victime de Morvan.

« Ne me dites pas que ça vient de Retz ?! »

Morvan détourna les yeux, coupable.

« Gast ! Vous savez bien que mon frère déteste que vous touchiez à sa volière ! Vous n’étiez même plus censé vous en approcher !
- Mais Son Altesse, y’a plus de viande ici depuis quelques jours, on crève de faim ! Et votre frère a toujours de délicieuses volailles…
-Je vous l’ai déjà dit, ce ne sont pas des poules, ce sont des faucons ! Taliesyn va remarquer qu’il lui en manquera un, et il saura que c’est vous. Je le laisserais vous punir. »

Il afficha un air affolé et se jeta à ses pieds, s’accrochant à une jambe.

« Pitié Son Altesse, il est diabolique, il va probablement me couper une main !
- Vous avez volé plus d’une fois, vous l’aurez bien mérité ! »

Fronçant le nez, de mauvaise humeur maintenant, elle se tourna vers Finn.

« Maupin va vous montrer votre chambre et vous faire visiter rapidement le château. Je vous attendrais dans la salle à manger pour discuter des détails. »

La pensée même du frugal repas qui l’attendait l’agaçait au plus haut point. Elle dégagea sa jambe du poids mort qui y était accroché et partit devant.
Le dénommé Maupin se tourna vers Finn avec un air pédant.


« Si messire veut bien me suivre. »

Il ne l’aimait pas, c’était certain. D’après la lettre envoyée par Son Altesse, il était certain que quelque chose se tramait, quelque chose dont il avait une vague idée étant donné ce qu’elle lui avait demandé de préparer. Il s’avança dans les couloirs, filant dans l’intention (volontaire ?) de l’y perdre. Voyant qu’il était toujours là, collé à ses chausses, il annonça :


« Ici un couloir, là-bas aussi, et là. Ca dessert un certain nombre de salles. Et ici, c’est votre chambre. »

Il ouvrit la porte sur une chambre rendue lumineuse par sa fenêtre donnant directement sur les falaises escarpées. L’ensemble était meublé avec soin et de petits détails savamment placés pour créer une atmosphère chaleureuse tentaient de cacher le fait indéniable que les moyens financiers manquaient. Maupin fit un pas en arrière, laissant l’Irlandais prendre possession des lieux. Après un moment sans parler, restant les lèvres pincées, il lui annonça :

« Vous avez accès à tous les lieux, mis à part le couloir menant aux appartements de Son Altesse et de la jeune Dame de Buzay. S’il vous manque quelque chose pour votre chambre, demandez à Guénaelle. Mathilda est exclusivement au service de Son Altesse. Son Altesse qui punit sévèrement toute atteinte qui serait faite aux caméristes, quel que soit le statut de l’offenseur. Évitez d’adresser la parole à Morvan, il n’a pas l’heur de vous apprécier. »

Il ne précisa pas que le gus en question n’avait pas la lumière à tous les étages, ça lui semblait suffisamment évident. Et qu’il pouvait être violent ? Pourquoi le préviendrait-il ?

« Pour toute autre question, vous pouvez me demander. »

Profitant de ce qu’il détournait le regard un moment, Maupin sortit de la chambre et disparut dans les couloirs, laissant l’Irlandais livré à lui-même pour retrouver le lieu de rendez-vous.
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Finn
Voyage depuis Vannes pour les terres de Son Altesse. Cet insoupçonné trésor jalousement gardé par celle-ci et qu'il a pris l'habitude de qualifier de vulgaire caillou sans en avoir aperçu le moindre grain de sable : ils y sont enfin.
L'allure tranquille, l'Irlandais n'en perd pas une miette. Il passe le décor au peigne fin comme s'il voulait en percer tous les mystères. Découvrir ce qui se cache sous le relief qui s'étale à perte de vue. Et déjà, dès la percée des murailles, l'idée que les portes du Paradis viennent de s'ouvrir sur lui ne fait plus aucun doute : on l'y accueille.

Des flots apaisés de la baie à ceux plus contrariés qui s'échouent en contrebas de la côte sauvage, le caractère controversé de la presqu'île le frappe alors. Cette langue de terre qui s'avance, audacieuse, gagne du terrain sur un océan clément d'un côté, et impétueux de l'autre. Évidemment, elle opte pour les falaises escarpées, mais néanmoins gardiennes inébranlables des terres basses de l'autre bord. Un rempart naturel et austère que le vent chargé d'humidité qui l'arrose rend plus agréable à traverser. La chaleur y étant sans doute moins étouffante que sur les plages d'en face comme il se l'imagine. Car seul ce versant est exploré, et encore, sans détour. Ils sont attendus.

Juchée sur les hauts reliefs de la presqu'île, à flanc de rocher, la demeure s'est dessinée trop vite. Il n'a pas décroché un mot depuis qu'ils ont quitté le continent, pas plus qu'il n'en a entendu hormis l'accueil breton dont elle le gratifia. Tout affairé qu'il était à goûter sa découverte. Alors l'apparition des petites mains rythmant la vie de la Baronne en ses terres le ramène pour de bon à la réalité.

Présentations sommaires, le cérémonial est modeste. Tout juste ce qu'il lui faut après des heures de voyage. Peu d'égard est accordé à la valetaille qu'il salue tout aussi sobrement, descendant tout seul, comme un grand, de sa monture de bataille. Distrait par tant de nouvelles têtes, le Gaélique s'efforce de retenir les informations qu'on lui balance entre deux altercations. Événement dont il profite pour juger la façon qu'a la Montfort de gérer son personnel. Le frangin semble inspirer la crainte même jusqu'ici, au milieu de nulle part. On est toujours en Bretagne, tout va bien. Seul son phare s'éloigne.

Au vieux briscard de retrouver son air bravache face à l'intendant.


- « J'te suis mon pote. »

Qui n'est apparemment pas son pote, mais Finn n'en a cure. Qu'importe la méfiance du personnel, il se laisse guider sans broncher, s'amusant même dans une certaine mesure des tours du Maupin alors qu'il lui colle au train avec l'entêtement de la moule à son rocher. Pas question qu'il s'égare à cause des humeurs d'un grouillot. Encore moins chez l'Altesse. Et s'il déplore une nouvelle visite bâclée, l'hôte n'en est pas moins soulagé d'arriver à bon port. Une chambrée à l'image du reste, correcte voire plutôt agréable mais sans fioritures ostentatoires. Il semblerait que l'on connaisse ses goûts.

Se retournant vers la porte après une courte inspection :


- « C'est quoi déjà vot... »

Maudit laquais, il est parti. Pour le faire mander, encore faut-il se rappeler son foutu nom !

- « Non mais je vais m'démerder. »

Comme s'il pouvait encore le congédier de sa propre initiative. Et le nom de la camériste, oublié également. Après un dernier soupir, Finn s'affale en travers du pageot. Tout est encore trop récent, trop flou, et lui trop las pour décortiquer tout ce qu'il lui arrive. Il s'appuie alors sur des réflexes simples, des repères bien ancrés dans son quotidien pour retrouver le sentiment de maîtriser quelque chose entre ces murs. Avec application, chaque pièce de son armure est ôtée, de même que ses maigres bagages sont repoussés dans un coin. Pour une fois qu'il en a l'occasion, il pousserait même le vice jusqu'à se plonger dans un baquet d'eau propre. Il se contentera pourtant de s'asperger le visage avec l'eau de sa gourde histoire de se débarbouiller, en l'absence de l'aide d'un intendant fuyant.

Civilement vêtu, et en partie soulagé du poids crasse du voyage, l'Irlandais se décide à retourner dans la fosse aux lions. Quelques erreurs d'itinéraire l'envoient tantôt dans un placard, tantôt dans une allée sans fin. À force de persévérance, le parfum des cuisines est effleuré du museau. Et c'est bien par cette pièce à l'activité débordante et où s'affaire le personnel dévoué aux papilles des occupants que l'invité débouche sur la grand salle. La maîtresse des lieues est déjà là, comme prévu. Lui ne s'encombre pas de gêne, indifférent à la singularité de son entrée, s'avançant vers la table avant d'écarter de la main son fourreau pour parvenir à s'asseoir face à elle. Et de déclarer d'un ton franchement gouailleur, assez fort pour se faire même entendre des plus discrets :


- « Dites, faut qu'on cause défense parce que les deux prépuces mouillés qui dépassent des créneaux à l'entrée là... »

Charmante allégorie liée aux casques baignés par l'éclat du soleil, sans doute.

- « Ça va pas l'faire si c'est tout ce que vous avez. »

Ou comment se présenter aux non-initiés de la maisonnée.
Bonjour, je m'appelle Finn et je suis une grande gueule.

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Marzina
Une fois débarrassée du valet qui lui tenait littéralement la jambe, la blonde avait rejoint Mathilda qui l’attendait non loin de là. Avec l’obéissance qui la caractérisait, la jeune femme suivit la maitresse des lieux sans mot dire, non sans lui jeter de petits coups d’œil. Avec inquiétude elle avait noté le nez froncé et les yeux noirs assassins, et elle préférait faire profil bas afin que l’Altesse ne s’intéresse pas à elle. A l’intérieur du château il faisait plus frais et le calme qui y régnait eut tôt fait d’apaiser la blonde qui se dirigea d’abord vers sa chambre où Mathilda l’aida à enfiler plus habillée que celles de voyage. Puis, dans le calme, elle laissa Mathilda démêler et relever les boucles indisciplinées pendant que son regard songeur se perdait vers le paysage à travers la vitre. Bien vite les habitudes retrouvées et l’ambiance apaisée détendirent la maitresse des lieux qui se vit parée d’un discret bijou celtique autour du cou. Une fois ce rituel accompli elle se dirigea vers le lieu convenu. L’Irlandais n’étant pas encore arrivé, elle se fit apporter le livre de comptes et commença à l’observer calmement tandis que Mathilda s’asseyait à ses côtés avec plume, encrier et parchemin.
Soupir de l’Altesse devant l’écriture penchée de son intendant. Heureusement, le deuil d’un mois qu’elle avait imposé sur les terres avait eu le mérite de faire faire quelques économies, si on mettait de côté l’épervier à rembourser. Finn n’arrivant pas, ses pensées vagabondèrent vers le massacre de l’épervier de Taliesyn. Il allait en faire une maladie, c’était certain. La dernière fois que Morvan avait osé se servir de la volière comme garde-manger, Taliesyn l’avait prévenue que s’il recommençait, il lui ferait subir le même sort que celui de ses pauvres oiseaux de proie. Devait-elle prendre les devants, lui dire qu’elle rembourserait l’animal ? Ou escompter que l’incident passerait inaperçu ? Prier pour un miracle ? Accepter qu’il punisse Morvan, puis le cacher dans une des grottes de la côte le temps que Retz se calme ?

On déposa sur la table devant elle le morceau de pain agrémenté d’un verre de vin…empli d’eau. Reniflement dédaigneux de la blonde. Il aurait tout de même pu éviter de clamser le suzerain ! Ça lui aurait évité quelques désagréments à elle !
Entendant des pas se rapprocher venant de la cuisine, elle commença à demander :


« Pourriez-vous… »

Elle s’arrêta net en remarquant la silhouette de l’Irlandais qui s’installait de l’autre côté de la table. Un sourcil blond tiqua. Au moins avait-il eu la décence de s’asseoir à sa place, ce qui pouvait être considéré comme un bon point, aussi elle tenta de garder le calme qu’elle avait retrouvé en regagnant sa chambre. Peine perdue cependant. La première réflexion lui fit froncer le nez, la deuxième entraina un regard assassin. Mathilda, elle, tentait de se faire toute petite et d’éloigner un maximum son corps de celui de l’Altesse, ouvrant des yeux ronds, étonnée de l’arrivée de cet homme et de l’impertinence dont il faisait preuve. Pour ne pas risquer les foudres, elle baisse les yeux et commence à écrire les premières lignes d’introduction sur le parchemin qu’elle a en main.
La blonde laissa le silence s’installer un instant avant de demander d’un ton tranchant :


« C’est bon, vous avez fini de vous donner en spectacle ? Nous pouvons commencer ? »

Sans attendre de réponse, elle reprit :

« Je voudrais savoir si vous comptez tout critiquer comme ça à peine arrivé, que je sois prévenue ? Vous n’êtes pas là pour passer capitaine de la garde que je sache. »

Ca y est, il avait réussi, elle était de mauvaise humeur pour le reste de la discussion maintenant. Et ça ne serait pas à l’avantage du nouvel arrivant, Marzina était toujours beaucoup plus dure dans ses décisions lorsqu’elle était énervée. Pour bien marquer cet état de fait, au cas où il n’aurait pas remarqué, elle demanda d’un ton acide :

« La chambre vous convient-elle ? »

Et dire qu’elle avait spécialement demandé à ce qu’on lui prépare cette chambre à cause de la vue, se souvenant qu’il avait dit que l’aperçu de la côte sauvage devait être particulièrement beau…Ce serait à refaire maintenant, elle lui lâcherait une paillasse dans un endroit frais, humide, et sans fenêtre. Oui, un cachot peut-être bien, l’idée était séduisante après tout.

« De toute façon c’est provisoire. Vous choisirez la maison qui vous convient et vous pourrez vous y installer. »

Impression fugace de la blonde d’avoir lâché le loup dans la bergerie. Il ira donc s’installer plus loin, loin d’elle, de ses habitudes et autres petits secrets. Ce château est trop petit pour deux, qu’elle pense, déjà qu’il y prend ses aises, faudrait pas que ça continue. Mathilda gratte sur le parchemin les princières décisions avec application. On vint déposer une miche de pain et un verre d’eau à l’Irlandais. Et l’Altesse de partir en guerre :

« Sera-t-il nécessaire de trouver quelque logement à votre suite ? Ou bien le petit manchot et votre employée logeront-ils avec vous ? »

La légère accentuation du mot lui échappa. Cela faisait plusieurs jours qu’elle savait et avait tenu sa langue. Contrairement à certains enfants qui pouvaient être d’un bavard !…
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Finn
Fini ? Pour l'instant seulement. C'est juste de quoi se mettre à l'aise.
Ils n'ont encore rien vu, allons bon.

Néanmoins, les propos de sa vis-à-vis font mouche et le Gaélique tempère son sens de la représentation scénique. S'adossant confortablement, mains lâchées sur les accoudoirs, le vieux grison se fait l'image d'Épinal de l'invité modèle. Et de là, il contemple son hôte dont il vient d'éprouver le sang froid. Coiffée, apprêtée comme la digne maîtresse des lieues. Très différente de la Princesse barbare qu'il a coutume de côtoyer dans les rades ou sur les chemins. Le regard tombe sur le pendentif à entrelacs. Simple fierté patriotique ou tentative de se rendre plus agréable aux yeux du Gaélique ici-présent ? Ceux-là qui remontent pudiquement se greffer sur les prunelles sévères de la Montfort. Dans un cas comme dans l'autre, le soin porté à son intégration est remarqué.
Et salué.


- « La chambre est parfaite, tout comme le service. »

Confie-t-il, se refusant à faire état de l'hypocrisie du personnel.
Et un début de sourire qui vire au rictus lorsque le dîner est déposé sous son nez.

Foutu deuil national. Un Grand Duc calanche et c'est tout Quiberon qui se voit réduit au pain sec et à l'eau. Mais le plus indigeste est à venir, dans le ton suspect de l'Altesse. Rien de trop flagrant, juste une vague impression de reproche qu'il se décide à contredire plus sèchement qu'il n'aurait souhaité.


- « Gaetan a l'habitude de coucher devant ma porte, ça le rassure. »

Faut dire qu'à force d'être oublié un peu partout, le garçonnet a su prendre ses dispositions, suivant son maître comme son ombre jusqu'à servir de cale pour la porte de sa chambre.

- « Et l'Écrin se débrouillera pour se trouver une piaule. »

Si seulement elle daigne s'échapper des limbes de son inconscience forcée.

La miche de pain est saisie avec entrain, brutalement décapitée à coup de crocs. Il a fallu qu'elle mentionne la Danoise et le lot d'emmerdes qui l'accompagne. Voilà des jours, des semaines qu'il s'efforce d'éluder son existence, ayant même renoncé à la veiller pour la remettre entre des mains plus compétentes, et moins occupées, ne lui rendant plus que de discrètes visites à l'hospice de Vannes. Tout ceci avec la crainte qu'elle ne se réveille pas, ou qu'elle se réveille...


- « De toute façon, vous devez bien avoir quelque chose de plus spacieux qu'une masure au toit de chaume pour le seigneur de Saint-Pierre-Quiberon, non ? Dans l'idéal, j'aurais apprécié un château. »

Un hochement de tête confirme qu'elle n'a pas rêvé tandis que le doigt fait signe à la scribe du jour de mettre ça noir sur blanc.
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Marzina
Il se calme un peu, et de même la blonde cesse d'être sur la défensive. Assis là devant elle, quand elle pose les yeux sur lui et qu'il n'ouvre pas la bouche pour raconter ses âneries, elle s'adoucirait presque. Presque. Parce qu'il faut toujours qu'il finisse par l'ouvrir de toute façon. Elle prend note tout de même avec une certaine satisfaction que la chambre lui plait. Un début de sourire vient même poindre sur ses lèvres, fierté de l'hôtesse. Qui disparait bien vite quand il finit par répondre à sa question. Elle prend note des réponses, remarquant le ton sec qu'il avait employé en retour, faisant se froncer le nez altier. Elle n'obtint pas de réponse complète à la question implicite, mais elle ne releva point.

"Très bien, notez Mathilda que le jeune garçon roux restera auprès de l'Irlandais, même durant la période de transition au château. Le reste n'est donc pas mon problème."

En quelque sorte.
Les yeux noirs perdent l'espace d'un instant leur lueur froide pour se poser sur l'Irlandais dévorant sa miche, comme profitant qu'il soit occupé pour le déchiffrer un peu. Pour comprendre ce qui se passe dans sa tête, quand il prend cet air là, lointain et soucieux...Après un temps, les yeux se détachent finalement de leur vagabondage rêveur, laissant tout de même naitre un sourire distrait qui ne la quittera plus.
Tandis qu'il fait signe à Mathilda, celle-ci lui jette un regard étonné. La blonde ne se départit pas de son sourire et lui rétorque avec malice:


"Finn, vous n'êtes pas encore Seigneur de Sant-Pêr-Kiberen. Quand ce sera le cas, nous en reparlerons. Vous qui dormiez il y a peu sur vos sacs de voyage, ne me dites pas que vous commencez à avoir des goûts de luxe..."

Le sourire s'élargit, mutin, tandis que les yeux noirs viennent chercher leurs homologues qu'ils fixent un instant. Elle finit par s'en détacher.

"En attendant, ma demeure est à vous, sauf la partie de l'étage où sont mes appartements et ceux de ma filleule. Vous pouvez vous nourrir ici, et le petit...Gaetan c'est ca? aura également le couvert, avec le reste du personnel."

Elle réfléchit encore un instant puis ajouta:

"Les dépenses liées à votre armement de chevalier seront miennes. Mis à part si vous repartez dans vos délires de trébuchets, de bateaux, et que sais-je encore! Comprenez donc par là: équipement standard, classique. Mais je vous laisse le choisir, vous vous y connaissez mieux que moi."

Après réflexion elle ajoute:

"Tachez aussi de vous occuper autrement qu'en révoltant mes gens."

Ça, elle sentait déjà la grogne arriver, la seule variable inconnue était de quel coté ça allait exploser en premier? Les militaires? Les paysans? Les pêcheurs? Le personnel du château?

"Vous m'avez dit que vous m'apprendriez à tenir une arme, ça devrait occuper un peu de votre temps."

Voire pas mal, étant donné le niveau de la blonde avec cette arme là.

"Avez-vous des questions? Une requête particulière à formuler?"
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Finn
Songeur, le Gaélique fait tourner la fin de sa miche entre ses doigts, le temps de l'avaler d'une bouchée. Tout n'est pas clair. L'impression que des détails lui échappent quand d'autres lui restent carrément opaques. Comme ce déraillement qui trahit sa voix chaque fois qu'elle semble mentionner la Danoise. S'il vaut probablement mieux conserver ce mystère dans l'ombre, le reste mérite d'être dévoilé au grand jour.

- « J'en ai une : que faisons-nous au juste ? »

À quoi ça rime ? Il a comme un doute, l'animal. Et son pragmatisme le pousse à chercher quelques éclaircissements dans les yeux de son interlocutrice.

- « S'agit-il d'organiser mon séjour à court terme sur vos terres ou de préparer l'avenir ? »

Dénuée d'animosité, son attention bascule un instant sur la plume conviée dans le but évident de garder trace de l'entrevue.

- « Si je vous suis reconnaissant de l'attention portée à mes besoins ainsi qu'à ceux de ma suite, j'aimerais néanmoins établir dès à présent les tenants et les aboutissants de ce qui n'est à mes yeux ni plus ni moins qu'un contrat. »

C'est le mercenaire qui parle, l'énoncé confus ayant taquiné la prudence mercantile du Gaélique. Savoir à quoi l'on s'engage est une des règles de base du métier, il ne saurait se passer de cette étape peut-être ennuyeuse mais cruciale.

- « La Bretagne a ses propres usages, différents de ceux que j'ai pu connaître en France. J'entends que vous comptez endosser les frais liés à l'entretien de mon équipement... Qu'offrez-vous d'autre contre mon service armé et les éventuels conseils que vous seriez en droit de requérir de votre vassal ? »

Le vieux grison de croiser les doigts devant son verre de flotte, comme pour rassembler ses interrogations en une :

- « Qu'attendez-vous exactement de votre seigneur-chevalier et que peut-il attendre de vous en retour, Baronne ? »

L'opération relève de la simple formalité. Une formalité que la légèreté des dernières semaines a eu tout le loisir de contrarier. Apprendre à se connaître, tenter de s'apprivoiser par des voies que la morale réprouve laisse peu de place à ce genre de parenthèse. Mais l'Irlandais traîne ses casseroles, des erreurs qu'il répugne à voir se répéter. Surtout pas avec elle. La situation s'y prêtant d'autant plus qu'elle n'est pas inédite.
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Marzina
Parmi les questions, elle avait pu remarquer depuis le temps qu'il prenait un malin plaisir à toujours choisir les plus compliquées, celles auxquelles elle n'a pas de réponse toute faite à lui apporter, ou celles auxquelles elle ne veut tout simplement pas donner réponse, voire même celles qu'elle ne voulait carrément pas aborder. Contrariant, oui, c'était décidément le terme qui convenait le mieux à l'Irlandais. Mais elle pouvait l'être aussi.
La réplique naissait déjà sur le bout de la langue princière, mais elle la contint, décidée à garder son calme, bien que le mot "avenir" ait entrainé une vive réaction de répulsion sur toutes les parcelles de son corps. Le sourire disparait donc du minois de la blonde. L’attention qu’il a porté à l’écrit de Mathilda lui fait froncer le nez, et encore plus la réaction qu’il en a eu.


« Je ne sais pas combien de temps vous resterez sur ces terres l’Irlandais, tout du moins j’organise votre arrivée sur ces terres, et bien sûr je ferais de vous mon vassal. Mais j’ignore comment se développera ce lien vassalique, je vous l’ai dit, je n’ai encore jamais eu de vassal. »

Et elle n’imaginait certainement pas avoir ce genre de relation avec lui…

« Le contrat n’est pas pour moi un stupide bout de papier. Celui-ci n’est que l’ébauche d’une communication qui visera à prévenir de l’importance que vous aurez dorénavant sur ces terres. »

Elle darde des yeux noirs froids vers les siens. Le mot « contrat » la contrarie, c’est impersonnel, c’est froid, c’est administratif.

« Le « contrat », pour moi, c’est ce que vous et moi convenons. Votre parole, la mienne. La confiance fait aussi partie du lien vassalique à mes yeux, alors c’est à prendre ou à laisser. »

Elle triture sa propre miche de pain, perdue un instant dans ses pensées. Après tout, elle n’avait pas préparé tout ca, c’est lui qui avait lancé cette idée stupide. Ou était-ce elle ? Un peu des deux probablement, ca s’était fait si vite…

« Contre votre service armé, vous aurez résidence sur mes terres, et comme je vous l’ai dit, vous aurez de quoi vous restaurer vous et votre page. Je m’occupe donc de vos frais d’armement, et d’autres frais qui viendraient à devenir nécessaires dans vos fonctions de chevalier, notamment si vous voulez changer de destrier, par exemple. Vous ferez également partie de ma maison et à ce titre, vous pourrez porter mes couleurs et aurez droit à la même protection que celle que j’accorde aux membres de ma famille. Vous porter offense sera me porter offense. Et en temps voulu, je vous octroierai des terres. »

Elle arrache un morceau de pain, et le dévore d’un air féroce, pensive. La suite était plus difficile, elle n’aimait pas devoir compter sur les autres, et s’arrangeait généralement pour ne pas avoir à le faire. Maintenant, il lui demandait d’énoncer des attentes qu’elle pourrait avoir envers lui. Et même si c’était le principe de la vassalité, ca lui arrachait la gueule de devoir dire qu’elle attendait quelque chose de lui. C’est donc d’une voix hésitante, et avec une moue contrariée qu’elle énonce :

« Et comme convenu, j'attends que vous me protégiez, notamment en cas de conflit armé. Que vous me donniez vos conseils, quand je vous les demande. Et puis…je ne veux aucun mensonge, ca je vous l’ai dit. Si vous ne voulez pas répondre, vous ne répondez pas, mais ne me mentez pas. Je veux pouvoir avoir confiance en vous, donc ne trahissez pas vos promesses envers moi. Vous représentez mes terres, alors n’entachez pas leur réputation. Et bien sûr, comme tout vassal, vous avez interdiction de blesser votre suzeraine. »

Il y avait bien sûr des tas d’autres choses qui se pressaient sous les boucles blondes, et qu’elle aurait voulu ajouter à la liste, mais en faisant le tri, ce qu’elle avait laissé passer ses lèvres avait l’air de rester dans la mesure d’un lien de vassalité classique. Elle aurait fait les choses proprement au moins. Elle fit signe de la main à Mathilda de partir.

« Ca ira, mettez en forme et déposez-le sur mon bureau que je signe. »

La jeune femme s’exécuta et se leva discrètement après un hochement de tête, emportant avec elle parchemin et plume.

« Ca vous convient, ou vous voulez changer quelque chose ? »

Avec une pointe de mépris, elle demanda :

« Vous auriez préféré un écrit peut-être ? »
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Finn
La frugalité du repas n'aide pas à la concorde, pas plus qu'elle ne concourt à apaiser les humeurs. Les plis de son nez mécontent en témoignent. Il les reconnaît pour avoir si souvent éprouvé la sensibilité des nerfs qu'elle porte à fleur de peau. Et parfois avec malice...

Il en va tout autrement des désirs du Gaélique qui, pour une fois, n'affiche aucune espèce de satisfaction à contrarier la Breizhadez. Déplaisir qui s'accroît lorsqu'elle lui annonce qu'ils foncent droit vers l'inconnu. Cet horizon plongé dans l'obscurité la plus totale qui s'aborde pas à pas. Cette surprise de tous les instants, et Dieu sait que le vieux grison hait abandonner son sort au hasard. Le contrôle avant tout, et les impondérables n'ont qu'à bien se tenir. En particulier lorsqu'il s'agit d'engagement. Cette chose qui peut virer au drame et qu'elle lui tend comme un gniard prêt à faire dégueuler ses langes d'un moment à l'autre.

Mains jointes, la marque blanchâtre laissée par une alliance récemment ôtée démange. Il y remédie d'un geste nerveux du doigt. Progresser à l'aveuglette, ça n'est plus de son âge. L'expérience enhardit comme elle échaude.

Et que propose-t-elle ?
Une confiance mutuelle.
Au nom de quoi, Votre Altesse ?

Alors qu'il s'échine à distinguer l'affect du devoir, la Bretonne semble bien décidée à mêler allègrement les deux dans un joyeux bazar. Tant d'insouciance l'inquiète autant qu'elle l'intrigue. Il demandait des réponses mais elle n'apporte que davantage de questions. Et pourtant, les efforts consentis n'échappent pas au mercenaire. Mais ça coince quelque part, là, entre ces deux notions mal définies. L'une se montrant plus farouche, plus délicate à appréhender. Car infiniment plus intime.

La scribe envolée, l'Irlandais adopte une attitude plus naturelle, plongeant un regard songeur dans l'eau de son godet.


- « Non. »

Relevant doucement les yeux vers elle :

- « Tout cela me convient. J'ai confiance en la femme pour se rappeler ses promesses dans le détail une fois suzeraine. »

Les deux termes s'opposant d'eux-mêmes dans le ton de sa voix. Il le sait, ou plutôt il le craint : ces deux entités ne sont qu'une seule et même paire. Quand l'une souffre, l'autre gémit.

- « Alors non, il ne sera pas nécessaire de gaspiller encre et vélin . Le dîner fut suffisamment dispendieux comme ça. »

Sarcasme qu'il souligne d'un ongle venant ronger les restes de l'unique met de ce soir coincés entre ses dents.
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Marzina
Elle est tendue, un peu stressée. La situation est inédite pour elle, et en plus elle n'aime pas franchement endosser des responsabilités. Mais marcher à l'aveugle, non, ça ne l'angoisse pas tant que ça par contre. Elle fonctionne comme ça la bretonne, sur des impulsions, des intuitions, elle fonce bille en tête sans savoir où ça la mène, et elle prend ce que le Très Haut place sur son chemin, le bon comme le mauvais.
Souvent le mauvais d'ailleurs.
A corps perdu.

Il lève ses yeux vers elle, et elle s'y plonge un instant avant de les détourner avec une moue capricieuse. Elle avait bien saisi ses insinuations, et ça la vexait, parce que quelque part en soulignant les choses comme ça, il insinuait qu'elle pourrait ne pas respecter ses promesses. Elle respectait toujours ses promesses, c'est bien cela qui lui avait amené beaucoup d'ennuis avec le polak autrefois. Et qui avait sûrement causé la mort de celui-ci d'ailleurs.
Les choses réglées, elle pencha la tête de coté et lui adressa un début de sourire:


"Une fois le deuil terminé, je ferais organiser un beau repas pour fêter votre arrivée, Finn. Avec du whisky. Et...qu'est-ce que vous aimez manger?"

Le ventre de la blonde se mit à réagir violemment à l'évocation. Elle y pose une main pour le faire taire et fronce les sourcils.

"Je vais aller me reposer, le deuil et le voyage m'ont fatiguée."

Elle se leva et ajouta:

"Nous pourrons faire un tour de l'île demain si vous souhaitez. En attendant, si vous vous ennuyez, vous pourrez demander à Maupin ou Morvan de vous mener aux écuries pour récupérer votre cheval."
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Finn
- « J'aime les cailles farcies. »

Répond-il avant d'ajouter à brûle-pourpoint :

- « Mais pas le canard. »

Gardant le mystère sur ce point, le Gaélique l'imite en se levant à son tour. Ça lui semble être la chose à faire pour respecter un semblant de courtoisie. Tout comme de taire les allusions déplacées qui lui viennent en percevant les plaintes de son estomac. Le regard intéressé qui s'y porte le trahit déjà. L'espace d'un instant, l'idée de visiter ce ventre vide lui traverse l'esprit. Juste un instant.

- « Bonne nuitée, Princesse. »

Pas ce soir. Le taiseux incline la tête, la laissant le précéder de quelques minutes avant de se faire violence pour rejoindre sagement la chambre mise à sa disposition. L'entretien fut plus éprouvant qu'il n'y paraît, et l'envie de sombrer sans prendre le temps de se déloquer s'impose. Une bouteille de son précieux malt à la main, de quoi étouffer la rébellion dans l'œuf, l'Irlandais s'enfonce dans les brumes du sommeil. Une nuit sans rêve, le zig veillant toujours d'un œil.

Puis un réveil, aux aurores. Devançant le chant du coq, Finn déserte les draps et rassemble dans un grand sac les armes stratégiquement disséminées aux quatre coins du paddock. Vieille paranoïa dont il ne saurait tout à fait se défaire, même ici. Son lourd fardeau sous le bras, et dans sa tenue de la veille au soir, il interpelle l'intendant de passage dans le couloir.


- « Ah.. Machin ! Veuillez prévenir Son Altesse que sa leçon d'escrime débute dans un quart d'heure. Et tâchez de pas lambiner, elle ne tient pas à être en retard. »

La familiarité d'une tape dans le dos ponctue ce qui sonne comme un ordre, et le voilà dévalant les marches quatre à quatre pour gagner la cour du château. La géographie des lieux lui demeure encore assez floue, alors il se tient là où on l'a accueilli à son arrivée, son bazar trônant à ses pieds. Pas maître d'arme pour un sou, encore moins patient, il commence à s'échauffer. Puisse-t-elle se montrer aussi ponctuelle que les rares élèves que compte son curriculum. La petite Tulliste, la dernière en date, fut la disciple modèle, supportant sans broncher les humeurs de son professeur. Un jour, il prendrait des nouvelles.

En attendant :

- « Debout vieille moule, bougez-vous les escarres ! »

Remuant les bras activement tandis qu'il tourne en rond, la voix à l'accent rocailleux tonne sous la fenêtre de la Montfort.

- « M'obligez pas à monteeeer ..! »
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Marzina
"C'est à vous de le faire, moi je ne peux pas entrer!
-Ah la bonne heure! Ca vous arrange bien!
-Je ne prétends pas le contraire, de toute façon les choses sont ainsi.
- C'est à vous qu'il l'a demandé! Je n'irais pas contre les ordres en allant la réveiller, je tiens à ma place et surtout à ma vie!
- Elle ne fera pas ça voyons, elle vous adore!
-Je préfère pas prendre le risque, c'est votre problème après tout!"

Ainsi devisaient Maupin et Mathilda devant la porte de chambre de Marzina, se disputant pour savoir qui aurait l'audace d'aller la réveiller à une heure aussi matinale, connaissant sa réaction.

"On pourrait peut-être attendre qu'il soit l'heure?
- Vous croyez que l'aotrou* en armes là, il va patienter tout ce temps?
- Effectivement, j'ai comme un doute."

Maupin se masse l'épaule en grimaçant.

"Le rustaud m'a presque démis une épaule."

- « Debout vieille moule, bougez-vous les escarres ! »

Les deux grimacent, sachant qu'il était désormais impossible d'éviter la catastrophe. A l'intérieur, on entend déjà des bruits de draps froissés et de faibles grognements. L'Altesse a fort mal dormi la veille, passant une grande partie de la nuit à se tourner et se retourner dans tous les sens dans le grand lit qu'elle avait ramené de Nantes, comme le reste du mobilier luxueux de sa chambre, lorsqu'il avait fallu quitter le château grand-ducal. La chambre de la maîtresse des lieux contrastait donc fortement avec le reste du mobilier du château, beaucoup plus modeste.
Elle avait eu du mal à trouver le sommeil et s'était donc endormie très tard. La voix ensommeillée ne tarda pas à sommer.


"Gast! Késsecécebordel?! On est envahis?!
- Par votre chevalier Altesse.
- Késsiveut?
- Se battre, apparemment.
- Voulez que j'y dézingue la tête?!
- N'abimez pas mon futur vassal Morvan, je vous l'interdis formellement!"

Grognement déçu de Morvan qui venait spécialement chercher cette autorisation.

- « M'obligez pas à monteeeer ..! »

"Raaaaah! Il va se calmer oui?!
- Peu de chance Votre Altesse, je le vois qui tourne en rond dans la cour!
- Il m'avait d'ailleurs demandé de vous réveiller.
- Il manque pas d'air celui-là!"

Le bruit d'une princesse prenant fermement pied sur le sol, puis le martèle jusqu'à ouvrir la porte en trombe. Les trois compères s'écartent sur son passage, pour qu'elle se penche en simple chemise de nuit vers la cour, les cheveux blonds épars sur les épaules. Elle se mit à hurler, dardant des yeux noirs ensommeillés vers l'Irlandais:

"NAN MAIS C'EST PAS BIENTOT FINI CE BOUCAN?! ALLEZ VOUS RENDORMIR! ON A PAS IDEE DE FAIRE CHIER LES GENS A CETTE HEURE!"

Sur ce, elle refit le chemin inverse avec tout autant de délicatesse, claquant même la porte, avant de se ré-affaler dans son lit, un oreiller sur la tête pour ne plus l'entendre, tentant de se calmer pour retrouver le sommeil.

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*aotrou = sieur, seigneur, monsieur
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Finn
Quoi ?
PARDON ?

Figé dans sa posture de coq braillard, le matinal n'en croit pas son oreille. Et les prunelles indignées de s'écarquiller.
Comment ose-t-elle ? Depuis quand l'élève fixe les horaires de sa leçon ?


- « In ainm Dé ! »
[« Nom de Dieu ! »]

Ni une ni deux, le Gaélique entraîne ses jurons vers la bâtisse. Le pas vif, il démarre au quart de tour. S'il n'avait aucune intention de la sortir du lit lui-même, elle vient de changer la donne. Depuis le couloir, on perçoit ses grognements ulcérés résonner dans l'escalier. Et comme une traînée de poudre, le grisonnant fend la troupe de grouillots massés devant la chambre de Son Altesse.

Porte ouverte et aussitôt claquée derrière lui. Une targe de fer sous chaque bras, l'une est sèchement envoyée sur les draps froissés de la mal peignée. Il s'agit de revoir la façon de procéder. L'informer de ce qu'elle n'a de toute évidence pas intégré en lui demandant d'être son maître d'arme. Inspire...


- « Règle n°1 : La ponctualité est gage de respect. »

Traduction :

- « L'entraînement, ça commence quand JE le décide. Autrement dit pas plus tard que le lever du soleil. »

Le Frisé la toise, habité d'une colère froide. Retenue qui vole en éclat.

- « Alors magnez-vous d'enfiler un froc ! ET AU PAS DE COURSE ! »

Bras croisés et pas près de bouger.
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Marzina
Elle voulait juste un peu de paix pour dormir, rattraper sa nuit qui avait été difficile. Elle avait pensé à des tas de choses après leur entretien, des choses graves, des choses sérieuses, d'autres moins -beaucoup moins-, et la faim avait contribué à la nuit presque blanche.
Elle avait enfoncé à nouveau son visage dans l'oreiller, tentant de trouver une position confortable pour retrouver un semblant de sommeil, quand elle entendit ses grognements furieux, avec les bruits de ferraille qui l'accompagnaient. Le cœur manque un battement tandis qu'une horrible sensation semble lui écraser la poitrine, et instinctivement les doigts viennent se resserrer sur le manche de sa dague sous son oreiller, à en faire blanchir les jointures. Comme s'accrochant désespérément à une bouée.
La porte s'ouvre à la volée, et se redressant brusquement pour lui faire face, c'est l'espace d'un instant le visage d'un autre qu'elle voit se dessiner dans l'encadrement. Vague air de panique au souvenir des yeux révulsés. Elle essaie de contenir le flot de souvenirs qui débarque sans prévenir, et qu'elle pensait avoir enterré bien profondément.
Ça ne devait pas se passer comme ça. Elle aurait du lui en parler...
Elle se concentre, ou du moins essaie. Inspiration, expiration. Elle sent bien son souffle qui s'accélère, et détourne les yeux de l'Irlandais. C'est stupide, ce n'est qu'un souvenir, un lointain souvenir.
Sa respiration se fait paniquée, et elle sent les doigts sur sa gorge, qui se resserrent. Elle se sent coincée et oppressée, contre son lit, et la main qui ne tient pas la dague vient à sa gorge, comme pour se convaincre qu'il n'y a là rien d'autre que son imagination.
Il est mort, mort, définitivement, Ailvin le lui avait assuré. Plus rien n'aurait du subsister de lui.
Mais ce n'était pas le cas, malgré elle elle s'en souvenait encore comme si c'était hier.
Ce qu'elle voit atterrir sur le lit n'est rien d'autre qu'une épée à ses yeux.
"Tranchez-moi la gorge."
Les mots prononcés avec cet accent froid résonnaient encore à ses oreilles.
Et elle comprend que malgré ses efforts, la panique la gagne. La même scène qui se répète, en des lieux et temps différents.
La main tenant toujours fermement la dague vient chercher le drap pour le remonter sur elle en guise de bouclier. Les yeux noirs se noient dans ces choses qu'elle est seule à voir, oppressée.
La conscience surnage, tandis qu'elle demande d'une voix blanche:


"Calmez-vous."

Elle aurait du lui dire, que les choses s'étaient très mal passées avec son dernier "maître d'armes". Elle avait bien pensé le faire, mais elle ne pensait pas qu'il viendrait la réveiller du matin comme ça tout harnaché. Comme lui.

"J'ai...besoin d'un verre..."

Chercher l'air, de ses lèvres entrouvertes. Tenter de respirer plus calmement. Refouler ses larmes, cette peur profondément ancrée de mourir, privée d'air. La main est plus blanche que jamais, serrée sur la dague qu'elle ne sent même plus, devenue l'espace d'un instant partie de son corps, et le visage a la même teinte. De celle qu'ont les gens qui ont vu un fantôme.
Sauf que le sien était en train de l'étrangler, entre autres.
Sa voix tremblant, tout comme ses mains, elle lui demanda glaciale:


"Gast! Filez-moi donc votre flasque!"

Besoin d'un remontant. Une plaie qui s'est rouverte à désinfecter.
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Finn
À sa demande, le Gaélique se détend. En surface du moins, car l'intérieur brûle d'incompréhension.

- « ... »

Interdit, il dévisage la pâle copie de l'orgueilleuse Altesse.

S'il s'attendait à ça... Une petite boule de nerfs recroquevillée sur elle-même, blanche comme un linge. Une pauvre petite chose qui suffoque sous le poids du souvenir. Sur un mot de plus, le vieux bourru s'exécute, extirpant lentement sa flasque de son pourpoint, comme pour éviter tout geste brusque face à l'animal paniqué. Rien de mieux que l'amertume d'une gorgée de whiskey pour apaiser les maux de l'âme et bâillonner ses vieux lémures. Il le sait pour l'avoir expérimenté si souvent.

Détournant pudiquement les yeux de la scène, l'Irlandais fait demi-tour.
L'effrayer n'était pas prévu. Le timbre s'adoucit.


- « Je vous attends en bas. »

Sans poser de question.
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Marzina
Quand elle vit les traits de son visage se détendre, elle finit par se détendre un peu à son tour, et attrapa la flasque qu'il lui tendait. Non, elle n'était pas fan de son whisky, mais là elle avait juste besoin de boire quelque chose de fort. Elle ne leva plus les yeux vers lui, et tandis qu'elle buvait par petites gorgées, elle tenta de desserrer son étreinte autour de son arme. Les doigts répondaient lentement, comme s'ils avaient fini par véritablement se mêler au manche de la dague.

- « Je vous attends en bas. »

Elle le laissa partir, non sans un certain soulagement, et se laissa reposer sur son lit, fermant les yeux un moment. Mathilda passa finalement une tête discrète et intriguée.

"Vous êtes blanche."

Elle avait dit ça doucement, pour ne pas la brusquer. La blonde ne répondit pas. Elle se détendit lentement, avant de finalement se lever. Elle n'était pas vraiment d'humeur à ce genre de leçon. Elle était fatiguée et traumatisée, mais elle doutait au fond d'elle que l'Irlandais soit à même de comprendre ce genre de chose. Après tout, comme il l'avait si bien souligné, c'était elle qui lui avait demandé qu'il lui apprenne. Maintenant, elle n'avait plus qu'à assumer ces quelques paroles un peu hâtives, comme le reste.
Tandis que le fantôme s'efface, la mauvaise humeur revient. Mathilda démêle les boucles et sur ses instructions les noue en une longue tresse serrée qui vint serpenter entre ses omoplates jusqu'en bas de son dos. La blonde enfile chemise, bustier et braies, ainsi que ses bottes où elle vint ficher sa dague. Avec mauvaise humeur elle quitta la chambre, trainant des pieds jusqu'en bas, avec dans ses mains son épée et la flasque. Une fois arrivée, elle prit le parti de faire comme s'il n'avait rien vu de la panique qui l'avait habitée quand il avait déboulé dans cette chambre avec cette tête là. Elle lui tendit une flasque qu'elle avait finalement bien entamée.


"M'aviez jamais parlé que ce serait à l'aurore."

Tête basse, elle donna un coup de pied dans le mur en face.

"Je suis pas du matin."

Moue contrariée.

"Et j'ai pas le droit de manger avant j'imagine?"

Nouveau coup de pied dans le mur, l'humeur maussade. Elle était contrariée qu'il ait vu ça. Et la blonde brusquée se renferme dans sa coquille, encore.
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