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[RP OUVERT] Arnaques, traite négrière et cie.

Eleo.
Avant de débuter ce RP, je tiens à dire que tout ce qui se jouera ici éventuellement, se déroulera selon les mentalités de l'époque et les différentes conditions humaines de chaque individu de couleur ou non, selon les usages en vigueur au Moyen Âge. La couleur de certains personnages a été choisie en toute connaissance de cause, et pour sortir des sentiers battus, mais aucunement pour faire acte de racisme ou de xénophobie et encore moins pour abaisser la condition de l'être humain noir, ou de quelque couleur que soit sa peau. L'esclavagisme tout autant que le racisme ne devraient pas ou du moins, plus exister et reflète pourtant, encore trop souvent la bêtise et l'étroitesse d'esprit de l'Homme.



" Des grands, des petits, des maigres, des gros… euhm oui enfin… Blancs, noirs !

Cargaison toute fraîche, débarquée du navire à l’instant !

Approchez, approchez et admirez ! Admirez bonnes gens, nobliaux euh… messieurs et mesdames de la noblesse et autres pecquen… artisans !

Acquitionnez… Acquérez… Pff ! Enfin faites l’acquisition d’un de ses spécimens en provenance d’Afrique.

Pas cher, pas cher !"


Hurlait en mimant ses propos, enchaînant les gestes grandiloquents et mimiques absurdes, le supposé marchand à la peau tannée qui, additionnée à son faciès oriental et à son œil acéré, lui proférait un air plus proche de l’escroc qui veut vous refilez sa camelote à tout prix que de l’honnête citoyen ; suait et gesticulait sur l’estrade qui surplombait la place infestée de monde, juxtaposée au lavoir où se mêlait dans un piaillement horripilant les vieilles bonnes femmes édentées et jeunettes graciles tout aussi édentées.

Brouhaha crescendo, mélangeait à la populace et aux voix caverneuses des crieurs qui osaient encore, bravant les coups de poignards, les estafilades intempestives, les coups de tatanes et autres coups du sort, venir officier dans ce quartier aussi célèbre que mal famé qu’est la Cour des Miracles, épicentre du crime et de la crapulerie.

C’est dans la moiteur suffocante de la ville, et les odeurs corporelles qui fustigent les narines et aspirent avec véhémence dans un tourbillon nauséeux, que la Orselo, accompagnée de la Belette blonde se frayent un chemin après moult détours et le double de reproches et de noms d’oiseaux que les deux bonnes femmes, rompues et harassées, piétinant dans la gadoue, pour atteindre l’estrade, en jouant des coudes.

Elle serait bien montée sur le dos du Hub’ mais, on peut dire aisément qu’entre eux… ce n’est pas l’amour fou et de plus, ce n’est pas une mule… juste une tête de mule ! Mais chuuuut… faut pas le dire ça !


Élisabeth ! Je t’avais dit qu’on aurait dû prendre ton carrosse ! Au moins on aurait pu…-écraser quelques grouillots qui gênaient- passer facilement ! Alors que là, on patauge dans la m**** comme des gueux ! Dégage de là, toi laisses moi passer !

Ça, c’était pour un pauvre gosse qui venait de glisser dans la fange, en embarquant sur son passage un cageot de pommes. Et là… Éléonore n’avait pas pour projet de lui tendre la main, elle avait plus envie de lui décocher un coup de pied dans les côtes ou de lui marcher dessus. Après tout, à la Cour des Miracles règne la loi du pas vu, pas pris… mais aussi celle du plus fort !
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Cesarphilippeauguste
Le carrosse, arborant fièrement le blason familial des Leostilla, noble famille savoyarde, avançait lentement sur les routes pavées de aux alentours de Paris, capitale du royaume de France. À côté de lui, en face de lui, derrière lui, des centaines de pécores marchaient sur les bords de la route, vêtus de torchons et d’excréments bovins ; alors que sur les mêmes pavés sur lesquels le fils du vicomté impérial avançait progressivement, moult charrettes transportant du foin, du blé, de la nourriture ou des matériaux roulaient. Ces derniers devaient approvisionner plusieurs milliers d’âmes qui résidaient dans la capitale des roys de France, ô combien majestueux, bien que les derniers souverains qu’aient connus les francoys salissaient les fleurs de Lys arborant les emblèmes royaux du royaume qui avait en partie succédé à au grand empire de Charlemagne, l’autre partie - plus précisément les deux autres - étant devenue le Saint-Empire Romain, là où il résidait.

Soudainement, les deux percherons blanc comme neige se stoppèrent, sous les ordres du conducteur de la voiture, faisant freiner les charrettes derrière elle. Deux hommes en armes - et en armure -, équipés d’hallebardes, se présentèrent au conducteur qui parlait tant bien que mal avec ces deux hommes, questionnant sur la personne qui était à l’intérieure du carrosse, César. Au même moment, les deux cavaliers-escorteurs du Leostilla parvinrent enfin à rattraper la voiture, bloqués suite à une collision entre deux charrettes chargées, ce qui devait être fréquent dans des villes comme Paris. Les quatre hommes s’expliquèrent un instant, avant que les deux gardes ne se décident finalement à les laisser passer, certainement puisque quelques écus furent donnés à chacun des hommes armés.

Cela signifiait l’entrée dans Paris, et plus précisément par la Porte Saint-Denis, construite par le roi Charles V entre 1356 et 1383. Le carrosse s’avança sur un pont en pierre qui enjambait la Seine, avant de poser ses roues sur un pont-levis en bois, alors qu’à gauche de lui, une dizaine de pécores marchaient un à un, empruntant eux le petit pont-levis exclusivement réservés aux marcheurs - ce qui, en soit, était une bonne idée. La voiture pénétra à l’intérieur de l’imposante porte fortifiée érigée pour protéger Paris, alors qu’une trentaine d’hommes en armes surveillaient continuellement les passants, les charrettes, mais surtout les alentours, en cas de venue de gens du voyage ou de brigands. Une seconde porte fut traversée, et enfin, le Leostilla était à l’intérieur de Paris.

L’arrivée dans Paris avait été lente, voilà que la traversée de Paris était quand à elle pénible. Partout gravitaient des centaines de bourgeois et paysans, des charrettes, des enfants qui courraient partout, obligeant le conducteur a faire arrêter à plusieurs reprises les percherons normands, et même à le faire dévier de la Grande Rue Saint-Denis - Paris, même au Moyen-âge, c’était la jungle, et il y avait aussi des conducteurs de charrettes qui hurlent sur les autres quand ces derniers n’avançaient pas, ou étaient mal placés - laquelle il devait pourtant emprunter pour se rendre aux Halles de Paris afin d’y acquérir plusieurs denrées de valeur. Brusquement, violemment même, le carrosse s’arrêta net. Le conducteur, intrigué, descendit, alors que les deux gardes personnels du Leostilla s’inquiétèrent de l’endroit où ils étaient arrivés.


    « - Sire, sire, sire ! Nous nous sommes égarés. »
    « - Maltaillié *, sortez-nous d’ici foutedieu ! »
    « - Le carrosse s’est enlisé, sire … »
    « - Chiabrena ! Coquebert ! Sottard ! ** »
    « - Nous allons devoir continuer à pieds, sire. »

César Philippe soupira profondément, jurant à plusieurs reprises et insultant son chauffeur, qui ne savait plus où se placer, avant d’ouvrir la porte et de descendre prudemment de son carrosse. L’un des deux gardes fit de même, alors que l’autre allait rester avec le conducteur le temps que César et son homme armé traversent le quartier et aillent aux Halles, à pieds, ce qui prendrait bien plusieurs heures au moins, surtout lorsque l’on ne connait pas la ville. D’ailleurs, il aurait été plus aisé d’y arriver s’ils savaient réellement où ils étaient, ce qui, étrangement, était bien loin d’être le cas. Ils étaient parvenus dans un quartier malfamé, grouillant de pauvres, dont l’odeur nauséabonde remplissait les narines du noble, qui ne manqua pas de rejeter ce qu’il avait ingurgité ce matin même en taverne par terre, aux pieds d’un mendiant.

Ainsi venaient-ils d’arriver dans la Cours des Miracles, sans le savoir, et assurément sans le vouloir non plus. Quel noble souhaitait se « promener » dans un tel lieu malfamé, réputé pour sa débauche, ses vols, ses meurtres, etc ? Certainement pas lui, et pourtant, ils allaient devoir le traverser entièrement pour espérer tomber sur les Halles de Paris. Les deux savoyards marchaient dans les ruelles délabrées du quartier, à la recherche désespérée de quelqu’un qui pourrait les conduire. César tourna la tête, en direction d’une estrade où un homme gigotait, braillant tout autant que les autres, mais avec un accent légèrement plus différent. Il s’arrêta, son garde aussi, et regarda les autres hommes et femmes qui s’y tenaient, mélangeant inquiétude et curiosité. Des hommes à la peau noir, qu’était-ce donc que cette diablerie ?


* Incapable
** Chiure de me**e ! Nigaud ! Coui**on !
Elisaabeth.
        « Des hommes à la peau noire ? Se seraient-ils roulés dans la suie ? »
        D’Élisabeth.


« Viens au pays des schtroumpfs, des petits êtres bleuuuuuus » … bleus ? Nooon ! Si ? Bref ! Là n’est pas la question – du moins, pas encore ! – mais il faut avouer que cette idée de se rendre sur une place publique pour faire on ne sait quoi est absolument ridicule. Mais que voulez-vous ! Quand on ne souhaite pas se mettre à dos une cousine tant adorée, même si on ne mâche pas ses mots, il faut savoir se montrer patiente, calme et gentille comme tout ! Revenons à nos moutons, les enfants. Nous sommes donc sur une place – totalement inconnue pour la Belette-Blonde – quand la cousine Orselo commença à râler – pourquoi cela nous étonne-t-il encore ?

Hubert, accompagné deux gardes, aux couleurs de Mesnay, – on ne laisserait pas une noble dame accompagnée d’un membre de sa famille, traînées dans les rues seules tout cela pour exaucer le souhait totalement hallucinant de l’une d’elles – se trouvait juste derrière les deux cousines, dont l’une d’elles râlait déjà – oui, nous l’avons déjà dit et alors ?


Élisabeth ! Je t’avais dit qu’on aurait dû prendre ton carrosse ! Au moins on aurait pu… passer facilement ! Alors que là, on patauge dans la m**** comme des gueux !

Combien de fois, la jeune femme allait devoir s’expliquer, hein ? Levant les yeux au ciel, soupirant bruyamment, la Mesnay s’explique de nouveau – mais s’était-elle au moins expliquer sur le pourquoi elles se déplaçaient non pas en carrosse mais à pied ? Éléonore. Je te l’ai déjà dit, encore faut-il que je m’en souvienne … mais ça, c’est une autre histoire ! nous nous déplaçons à pied parce que le carrosse se retrouverait dans un piteux état si nous avions eu l’idée, la plus débile qui soit, de nous y aventurer avec le carrosse. À savoir que s’il arrivait quelque chose à mon carrosse, il aura fallu amener ce fichu carrosse cassé – je ne prétends pas que mon carrosse est cassé ! C’est une mise en situation pour bien t’expliquer mon point de vu – chez un « réparateur » et cela m’aurait coûté un bras ! Radine la jeune femme ? Mais pas du tout ! C’est une menterie ! Et aux dernières nouvelles, ce n’est pas toi qui paie tout ce qui me concerne.

Et voilà la cousine. Tu l’as cherché ? Tu l’as trouvé ! Mais ne croyez pas que la jeune femme envoyait des fions dans la figure de sa cousine – quoi que vous puissiez en dire, elle l’aime, sa cousine, malgré tout ! – mais en même temps, la cousine était un peu chiante à ce sujet-là. Comme si nous passions aussi facilement, tu parles ! Les gens ne connaissent plus le code de la route ! C’est fini, tout cela ! Ils ont tous oublié qu’il fallait mettre les clignotants pour passer, on doit faire des constats à l’amiable quand il y a un semblant d’accident et puis, et puis … mais qu’est-ce que nous racontons, là ? Ça ne va pas bien du tout, là ! Il n’y avait absolument rien de cela à cette époque. Bon, on arrête et on reprend. Où en étions-nous … ah oui ! Nous étions en train de parler de carros …

Dégage de là, toi laisses moi passer !

Hein ? Quoi ? Élisabeth fronça les sourcils puis, se rendit compte qu’Éléonore parlait ainsi à un enfant. Et là, contre toute attente, la jeune femme ne réagit pas comme une mère mais comme la jeune femme qu’elle fut un temps : une vraie garce – mais bon, cela ne se voit peut-être plus mais elle l’est encore un peu !

Casse-toi, sale gosse ! Tu ne vois pas que tu gênes le passage, là ?!

Et une engueulade de plus pour le gosse. Finalement, elle commença par regretter ce qu’elle venait de faire mais bon, ce n’était pas son gosse et elle devait continuer de suivre sa cousine. Un coup d’œil devant et derrière pour voir où se trouvaient ses « gardes semi-allemands » puis, comme on le sait tous, si Élisabeth ne râle pas, c’est qu’il y a forcément un truc qui cloche. Jusqu’ici, tout allait bien. Mais cela ira beaucoup mieux après avoir râlé !

Franchement Éléonore ! Je ne te comprends pas ! Tu m’aurais demandé, je t’aurai prêté quelqu’un … avant …

Déjà, de un : on ne dit pas « je t’aurai prêté ». On dit « je t’aurai envoyé l’un de mes domestiques pour t’aider, en attendant que tu puisses trouver la perle rare ». Et de deux : comment ça, avant ? Tu aurais un souci quelconque, à présent ?... Aahh mais oui ! Suis-je bête ! Tu as un gamin dans les pattes, maintenant ! Du coup, cela veut dire « on double les domestiques ! » et ça, ce n’est pas bon pour l’économie, non, non, non ! Pas bon du tout, même ! Du coup, cela passe pour du semi-esclave – semi parce qu’elle héberge, nourrit et tout ça les domestiques, alors le salaire, on y pensera plus tard, hein ! – mais quelle importance, après tout ? Personne ne s’est plainte, jusqu’à maintenant … Ou du moins, nous devrions dire que la seule personne qui a eu le malheur de se plaindre s’est un peu retrouvée pendue, alors …

Puis, il arrive un moment où on ne peut plus continuer d’avancer … comment ça, on est bloqué ? Nooon ! On est sur la place publique, où des beaucoup de gens – principalement des gueux parce que les bourgeois ont l’intelligence de ne pas descendre auprès des gueux, comme peuvent le faire certains nobles (trèèèès rare) ! – s’étaient rassemblés quand un gigolo hurlait à tort et à travers qu’il y avait des grands, des petits, des maigres, des gros, des blancs et des noirs … Des noirs ? Comment ça, des noirs ?


Éléonore … as-tu vu ?... Coup d’œil pour savoir où se trouvaient les gardes puis, rassurée, elle s’accrocha au bras de sa cousine puis, quand Élisabeth aperçut quelques personnes dont la couleur de leur peau était noire, elle s’exclama, presque offensée : Des gens à la peau noire ?! Mais ça existe, ça ?!

Ou la découverte des personnes d’une autre couleur de peau, au milieu du XVème siècle ? Ouai bon, ça va ! On n’aurait peut-être pas tous eu la même réaction, non ? Si ?!
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Eleo.
La qualité première d'Elisabeth étant la radinerie, on pouvait aisément placer en seconde position, mais en occupation première, la ralerie. Hé oui... et le pire, c'est que ça devait venir des gênes familiaux puisque la Orselo possédait à quelque chose près, le même caractère exécrable !

Une fois le gosse passé, et toutes ombres de remords dissipées, la brune continue de jouer des coudes pour gagner le premier rang lorsque survient le:


Tu m'aurais demandé, je t'aurai prêté quelqu'un...

Regard assassin, même pas une petite lueur de remerciement, juste ses pupilles vert d'eau hautaines et fières sur Elisabeth.

Je veux pas de ta charité ! Si je dois avoir un domestique, il sera à moi! Parce que... -coup d'oeil au Hubert- Vu comment tu les choisi...

Grimace à l'appui. Reprise de la remontée de sardines, jouant toujours des coudes avec autant de vigueur, pour atteindre le devant de la scène, juste à quelques pieds des marches, pour admirer toute la décadence du spectacle.

Elisabeth accrochée au bras, la Orselo scrute et inspecte ces énergumènes à la peau sombre. Des êtres humains mélangés, sales, crasseux, perdus, désorientés et hagards, le regard perdu dans le vide à fixer un point imaginaire entre deux battements de paupières lourdes de ressentiments, comme pour oublier leur situation: oublier où ils sont, ce qu'ils y font et le sort que leur réserve Aristote, ce bon vieil Aristote ou n'importe quelle autre divinité païenne que ce soit; qui a dû ranger le dossier bien en dessous de la pile, il y a tellement longtemps qu'il a fini par les oublier, irréversiblement et définitivement! Mais bon Dieu il doit pas y avoir un travail fou là haut!... Si?... Ah bon!


Vu quoi...?

Des gens à la peau noire?!Mais ça existe, ça?!

Regard horrifié vers la blonde, nez plissé et moue dubitative, avant de jeter un subtil coup d’œil à l'homme à côté d'elles, voir s'il n'avait pas entendu cette ineptie, avant de rétorquer:

Visiblement, ça existe. Mais... je suis sûre qu'avec un petit bout de savon, on pourrait faire des miracles!

Niaiserie, ignorance ou sérieux?

La brune, affairée à regarder chaque visage, essayant de discerner lequel de tous ces gens serait le plus fidèle, le moins malingre, le plus solide et la moins bête possible. Parce que quitte à cohabiter en partie avec elle, et qu'il était de bon ton pour une femme seule et respectable, d'avoir une suivante, ou une bonniche ou une servante si vous préférez... autant choisir LA perle rare!
Éléonore ne voulait surtout pas d'une tête de mule comme l'autre rouquin là, avec lesquels les rixes étaient plus que fréquentes. Non il lui fallait quelqu'un de docile mais pas idiote.

Et le marchand qui recommençait à scander son charabia, avec un accent épouvantable. Tout ce bruit, joint aux odeurs âcres des corps de la populace lui tournait la tête et les entrailles; et remplissait sa bouche d'un élan de bile acide, qu'elle s'empressa de ravaler avec moult effort de déglutition, mais peine perdue, pliée en deux, c'est un aller simple pour le bol de gruau, et pas n'importe où sur les pieds de sa cousine, enfin juste au pieds. Les nausées, ça ne prévient pas hein!

Pâle comme une morte, Eléo se redresse, honteuse et confuse de donner pareil spectacle. Et c'est ce moment précis que choisit l'escroc pour s'approcher un peu plus près, et de sa voix doucereuse d'entonner:


Missire, midame! Faîtes votre choix! Y en aura pas pour tout l'monde! Faites grimper les enchères, ça vaut de l'or ces bestioles! Robustes et travailleurs, vous trouverez pas meilleurs!

Un éclair de dégoût traverse les pupilles agate de la jeune femme, se retenant de lui cracher au visage, mais entre gens bien, tout le monde sait que ça ne se fait pas!
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Cesarphilippeauguste
D’un œil troublé, César regardait toujours les hommes noirs qui avaient certainement été placés par le vendeur-brailleur sur cette estrade en pleine Cours des Miracles, encerclée par des gueux dont l’odeur pestilentielle remplissait de plus en plus les petites narines du savoyard. Il n’avait point l’habitude de respirer de telles odeurs, en effet. Auguste était plutôt habitué aux douces senteurs du château familial et à ces délicieux parfums qui volaient partout dans l’air des pièces. Mais là, les effluves des corps malsains des mendiants parisiens étaient pour l’homme insupportables, qui restait néanmoins sur place, continuant de regardait les esclaves proposés par l’oriental au langage incompréhensible.

Les yeux se plissèrent légèrement, alors que les sourcils se froncèrent. Les pupilles d’émeraudes du Leostilla indiquaient l’intérêt que commençait à porter le fils du vicomte impérial de Thann pour deux des hommes présents, uniquement vêtus de quelques chiffons blancs - remplis de crasses - au tout bas de leur ventre ; cachant ainsi ce qui devait l’être pour ne point choquer le public. Comment des personnes pouvaient-elles être noires ? Cela semblait quasiment impossible pour l’homme qui n’avait auparavant jamais rencontré de tels êtres, ni entendu parlé. Certes, il savait que certains hommes vivants à l’est et au sud avaient une peau plus mate, que l’on appelle turcs ou arabes, mais jamais d’hommes à la peau noire.


    « - Humbert ! s’exclama-t-il en direction de son garde, qui scrutait toute éventuelle menace autour de son protégé. Pourquoi ces personnes sont-elles de cette couleur ? Est-ce l’œuvre du Sans Nom ? »
    « - Je ne sais rien de tout cela, sire ; répondit l’homme qui avait dans le double de son âge et qui se tenait prêt à bondir sur l’un des gueux à tout moment. Pouvons-nous continuer nostre chemin sire ? Je n’ai guère confiance en ces lieux. »
    « - Leur couleur, et leur odeur … cela me rappelle les excréments. Oui, cela doit être ça. Pourquoi se sont-ils recouverts d’excréments dès leur naissance ? Sont-ils aussi incivilisés que cela ? Connaissent-ils la propreté ? »

Se recouvrir d’excréments dès la naissance, voilà une bien étrange tradition que ces hommes avaient. Pourquoi diable être ainsi ? Cela est des plus repoussants, tant sur le plan visuel qu’olfactif. C’est vrai, qui aimerait voir et sentir chez lui des excréments déambulant dans ses couloirs pour être servi ? Pas grand monde, assurément. Et pourtant, la curiosité du savoyard semblait passer outre cela, et au fur et à mesure que le nombre de questions qu’il se posait dans sa tête grandissait, son intérêt pour ces êtres venus d’ailleurs faisait de même, comme si au final, malgré qu’ils soient repoussants physiquement, l’appétit du savoir prenait le dessus.

Mais les pensées de l’homme furent très rapidement, et soudainement, interrompues lorsque sa voisine se retourna afin d’expédier son, ou ses, précédent(s) repas sur ce qui devait être une femme qui l’accompagnait. Une odeur nauséabonde supplémentaire dans ce monde puant, qui passait presque inaperçue si l’on ne voyait pas les restes de ce qu’elle avait ingurgité par terre. Le simple fait de voir cela, et des émanations de ceux qui l’entouraient, lui donnait l’envie de faire pareil, et il ne cessait d’humer l’odeur d’un bout de chiffon parfumé qu’il gardait continuellement dans sa poche droite, pour supporter de telles conditions, qu’il n’avait auparavant jamais rencontré. Cela devait être similaire dans les marchés des villages, mais il n’y avait jamais été non plus. Pourquoi y aller alors qu’une armée de serviteurs peuvent le faire à sa place ?


    « - Pauvre gueuse, lâcha-t-il froidement. Elle se répugne de sa propre odeur, sur sa voisine. Un bas-monde dans lequel nous sommes perdu, Humbert. Contemplez la bassesse des gueux, et leur dégoût pour eux-mêmes. Des rats, tous des rats, que des rats. Ils vous rongeraient jusqu‘à l‘os pour se venger de leur sort mérité, avant de se dégoûter d‘eux-mêmes. Estimez-vous heureux de ne point être ainsi, Humbert. Et si par malheur, vous deviez leur ressembler, ôtez-vous la vie avant que vous ne vous dégoutiez vous-même. Chiabrena de gueux. »

César détacha son regard de la flaque pour plutôt se concentrer sur les deux femmes qui étaient à côté de lui, dont il n’avait jusque là pas prêté la moindre attention, car il n’en avait que faire de deux inconnues certainement gueuses. Ses deux yeux regardèrent néanmoins scrupuleusement les deux damoiselles : elles ne semblaient, à la tenue, pas gueuses, non. Elles semblaient sortir du lot de mendiants qui étaient présents tout autour de l’estrade, mais que diable faisaient-elles ici ? Se serait-il trompé à leur compte ? À vrai dire, que diable faisait-il ici aussi ? Vraisemblablement, elles devaient aussi être intéressées par ces hommes avant que la première ne rejette son repas sur sa voisine. Yeux qui se détachèrent d’elles lorsque le vendeur vint les accoster pour parler encore de ses esclaves. Une chance peut-être pour aborder le prix.


    « - Hé, vous ! cria-t-il pour interpeller l’homme. Combien d’écus pour deux de vos hommes ? »


Avis aux mélangistes & co : Je ne pense absolument pas ce qui est écrit sur ce RP à propos des africains. J'aime l'Afrique.
Elisaabeth.
        « La Cour des Miracles fait-elle vraiment des … miracles ? Nooon, j’décooonne !! »
        D’Élisabeth.


Comment je choisis mes serviteurs … comment je choisis mes domestiques … non mais elle veut une tarte ou quoi ? Je l’enquiquine, je la proute et je l’emm*BIP*de. Non, rien, je n’ai absolument rien dit de méchant, pas du tout ! Et puis, Hubert, elle ne sait absolument pas le gérer, sinon, il ne serait pas comment ça avec elle, non, non, non. Certes, il a son caractère mais il est comme il est, c’est-à-dire un brave gars, quoi ! En plus, ce ne sont pas des menteries – quoi que … on peut masquer un chouïa la vérité, si ? Que de la vraie vérité, hein ?!

Quand Élisabeth demanda à sa cousine si des personnes de cette couleur pouvaient vraiment exister, sa cousine, avec toute la gentillesse et la délicatesse qu’elle pouvait faire preuve dans certaines … épreuves comme celle-ci, lui répondit, naturellement, comme si « DING ! Eurêka ! J’ai trouvé une solution ! » :
Visiblement, ça existe. Mais... je suis sûre qu'avec un petit bout de savon, on pourrait faire des miracles!

Époustouflée, choquée, désappointée, perdue, lamentablement … émerveillée par cette « race » qui était bien d’une autre couleur que la sienne. Jamais elle n’avait vu cela, au grand jamais. Aujourd’hui, sur cette place – dégueulasse et qui pue à souhait –, loin de son enfant et de son « chez-elle », elle découvrit qu’il pouvait exister des humains, venant d’un autre Continent, ayant une autre couleur que la couleur blanche. Drôle de découverte, il fallait l’avouer. Les yeux verts de la jeune femme se mirent à briller, bel et bien émerveillée par ce qu’elle découvrait. Aussi étrange que cela puisse paraître, elle ne pouvait que se rendre à l’évidence : il y avait, certes, d’autres continents mais à présent, étaient-ils tous ainsi ? Comme « eux » ? Comme les esclaves qui se trouvaient devant elle ?

Bien plongée dans ses pensées, ce ne fut que l’odeur déplorable qui lui vint lui « chatouiller » le nez, qui lui fit comprendre qu’il s’était passé quelque chose pendant qu’elle réfléchissait. Sa cousine venait de dégobiller … QUOI ?! Les yeux grands ouverts, stupéfaite, encore quelques centimètres et le repas de sa cousine se trouvait sur ses pieds, du moins, le bas de sa robe. Dégoûtée, elle se recula, laissée sa cousine se débrouiller avec son dégueulis, elle apporta une main pour la coller à la bouche puis, essayant de trouver une autre odeur plus agréable – vous me diriez comment vous pourriez trouver une odeur plus agréable à la Cour des Miracles, entourée par des esclaves qui sortent tout droit d’un bateau où ils furent malmenés, et par-dessus le marché, les gueux ont décidé de se rendre intéressants en participant à la « conquête » d’esclave. Advienne que pourra, ainsi soit-il !

La jeune femme dût s’habituer à l’odeur – fort peu accommodante – qui régnait sur la place. Élisabeth n’avait nullement vu qu’un jeune homme se trouvait à quelque pas d’elles. Elle ne s’en rendit compte que quand ce dernier lâcha avec une froideur à vous en glacer le dos – façon de parler, bien entendu : « Pauvre gueuse ». Pauvre gueuse ? À qui parlait-il ? Oserait-il parler ainsi de sa cousine ? Bougre ! Corniaud ! Seule Élisabeth possédait le droit d’insulter à sa guise sa cousine – droit pas encore totalement acquis mais nous faisons comme si ! – et personne d’autre ! Scélérat ! Espèce de fils de …

En l’observant plus attentivement, elle remarqua que ce n’était pas une personne de « basse classe », comme presque toutes les personnes qui se trouvaient sur la place – sauf si les dites personnes fortunées se cachaient, eux aussi, parmi les gueux ! –, loin de là. Accompagné – tout comme elle avec ses soldats (nous précisons que ce sont des mercenaires) allemands en plus de son Hubert – d’un homme d’armes – très probablement que cet homme devait occuper ce rôle ! – qui ne devait le lâcher de vu, il fallait bien l’admettre, ce petit abruti de péteux n’était pas de la merde comme le trois-quarts des personnes présentes. Une réplique – peut-être bien sanglante – devait être sortie de la bouche même d’Élisabeth, ainsi cela fut fait.


Comment pouvez-vous vous permettre de traiter une demoiselle respectable de « gueuse » ? Pour qui vous prenez-vous pour insulter les gens de la sorte, petit insolent ? Little buugger* !

L’un des noms d’oiseaux que sa chère et tendre Adrianna – sa suivante-camériste – lui avait « appris » quand la jeune femme s’ennuyait beaucoup trop et qu’elle souhaitait apprendre l’anglois. Son regard vert se plongea dans les yeux du jeune homme, afin de le fusiller du regard. Vous savez, ce regard tellement … doux et … agréable quand vous observez bien. Vous voyez ? Nous sommes donc sur la même longueur d’onde. Quand le damoiseau eut fini son monologue auprès de son chien – ohh, pardon ! Je souhaitais dire, son homme de main, bien évidemment ! –, il demanda en hurlant, aussitôt après ce vendeur d’humains, à combien d’écus pouvaient coûter deux des ses hommes. Toujours aussi droite qu’un i, l’odeur nauséabonde et détestable à souhait qui lui chatouillait les narines, elle enchaîna en hurlant à son tour :

Vos prix ! Et je vous en achèterai quelques uns !!

Les « quelques uns » n’étaient pas vraiment précis mais ce qu’il fallait pour attirer l’attention de ce trafiqueur d’humains. Elle allait renchérir quand l’un de ses deux mercenaires crut bon d’oser montrer sa belle voix : **Fraülein ? Ce qui suivit, malheureusement, d’un : Ta gueule. Je parlemente ! Et puis quoi encore ! Il fallait bien qu’elle se fasse comprendre puisque ce dernier comprenait un mot sur deux de ce que la jeune femme pouvait lui répondre ! Elle reprit en s’adressant au « propriétaire » des esclaves : Alors ! Vos prix ? Dépêchez-vous, l’ami, sinon, vos petits bonhommes risquent de vaciller et rejoindre notre Créateur ! Vu leur état squelettique !

La vérité sort de la bouche des enfants … ou pas !



*Little buugger = Petit bougre
**Fraülein = Ma Dame

Petite mise au point afin d'éviter tout malentendu à propos de mes posts, de ce RP en général : je ne suis pas ra-cis-te ! J'aime les gens qui n'ont pas la même couleur de peau que moi. Je les aime tous. Je vous aime tous. Sans exception. Je ne suis pas ra-cis-te, je ne fais que jouer une jeune femme du XVième siècle qui découvre des gens qui n'ont pas la même couleur de peau qu'elle. À vous, mélangistes en tout genre, à vous les très chers lecteurs qui nous lisent (d'ailleurs, j'vous remercie, ça me touche à moi personnellement (léger clin d'oeil à une célébrité, je n'ai pas pu m'en empêcher !)) : Peace & Love ! Je vous aime tous et je n'ai aucun souci avec qui que ce soit ! Peace & Love mes frères (et soeurs, hein) !!

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Eleo.
Impossible de déterminer ce qui blessa le plus la Orselo, la dureté des propos de ce parfait inconnu, ou bien le fait qu'on la considère comme une misérable pauvresse, même s'il n'y avait rien d’infamant à faire partie de la populace, enfin quoi que... question de point de vue et pour elle, ce n'était pour le moins, pas très gratifiant. Quoiqu'il en soit, hors de question de laisser ces insultes comme ça; même si cette chère Elisabeth, c'était empressée de répliquer à la vitesse du courant d'air, avec un vocabulaire plus que douteux, à la signification compromettante.

Pour votre gouverne mon brave, mon écoeurement tient surtout aux gens de votre espèce qui juge sans même prendre la peine de lever la tête, et de se préoccuper de ce qui les entourent! Et vous n'avez sans doute pas été sans remarquer l'odeur putride qui règne ici, voilà le pourquoi de mon dégoût, ce qui ne relève en rien de la bassesse de ma condition. Je suis médecin, messire!

Et de le toiser de toute sa hauteur, jaugeant son accoutrement coûteux et ses manières nobles, elle conclut, un sourire malicieux et dédaigneux sur les lèvres :

Et... vos soieries ainsi que vos titres que je soupçonne nombreux, ne vous empêche pas de patauger dans la merde au même titre que nous, messire! en désignant les bottes crasseuses du jeune homme, d'un coup d’œil moqueur.

Satisfaite, quoique contrariée, Éléonore reporta son attention sur l'escroc à la peau basanée, qui haranguait la foule, et surtout ceux, qu'ils jugeaient pouvoir plumer, et dépouiller d'une somme exorbitante, qui paraîtrait futile à leur bourse de gros riches !

Pas besoin de lui redemander ses prix, puisque ses voisins s'en étaient chargés, chacun à leur manière ; l'un bref et mal aimable, et l'autre grandiloquente et pressée.

Rejetant ainsi son regard sur les créatures à la peau d'ébène, objets de toutes les convoitises, mystérieuses et inconnues.

Tenant à peine debout, voûtés et pour la plupart décharnés ou, au contraire gonflés par la malnutrition, et aveuglés par le manque prolongé de lumière; c'est, grelottant qu'ils attendaient de savoir à quelle sauce, ils seraient mangés...

L'impatience finit par gagner la brune, qui finit par passer derrière sa cousine pour s'approcher d'un de ses chiens de garde, plutôt à sa mine renfrognée et à sa main qui ne quittait jamais le pommeau de son épée, gardant tout de même une certaine distance de sécurité, compliqué dans la foule compacte de péquenaud, mais sait-on jamais... peut être une menace imminente ou, une agression, un détroussage...:


Was haben Sie zu knurren?*

Pour toutes réponses, elle n'obtient qu'un autre grognement bestial, ce qui finit de l'excéder, soupire, avant de fulminer...

BON !! VOUS LES CRACHEZ VOS PRIX POUR FINIR !! BORD*L DE MERD* !!?

Oui, malgré un certain petit air pédant, il lui arrive d'être mal embouchée... et alors? Il faut toujours une victime de toute façon.

*Was haben Sie zu knurren? => Qu'est ce que vous avez à grogner?

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Le.marchand.d.esclave


Se frottant les mains, fourbe et intéressé, le pisse vinaigre sent déjà rouler entre ses doigts les pépètes, les ronds de carotte ou les radis, c'est selon... mais il s'y voit déjà. D'ailleurs, il s'y voit même tellement bien que les pauvres bougres, en bas de l'estrade, qui vont y laisser jusqu'au dernier fil de leur caleçon, répètent, s'emportent, tempêtent et hurlent pour obtenir réponse de la part du voleur. Délester des nobliaux, de quelques kilos d'or, c'est pas rien quand même! En préambule de réponse, un rictus et un ricanement aussi harmonieux qu'une scie en mouvement.

Jusqu'à ce que le petit boudin, la brune, drapée dans une robe trop étriquée pour sa poitrine, qui accumule tous les gâteaux et pâtes sucrées, qu'elle peut ingurgiter à longueur de journée, faute de mieux; s’époumone, précédé, de la blonde toute aussi replète à la gouaille surexcitée, et du blondinet à la trogne désabusée, un brin prétentieux mais pas dégueu à regarder, disons l'mot.

Le resquilleur au nez busqué, s'approche de sa démarche claudicante et lorgne l'assemblée, en frottant toujours ses mains caleuses.


Approoooochez midaaaame éééééé miiiissieur !! Dites donc, bonnes gens! Faut pas s'inerver comme ça ! Y en aura pour tout l'monde!

PAAAS CHEEEER ! J'peux vous faire un lot si vous voulez...
Voyant les larons, le regarder de travers et tiquer

Un prix...une offre si vous priférez! C'est vous qui dicidez, mes amis! C'est comme vous voulez! J'vous en fait trois pour 2500 écus! Allez c'pas cheeerr !

Il crache par terre, se gratte la tête d'un geste mal assuré et fait prendre l'air à ses chicots, puis d'un geste large du bras désigne son gagne pain du jour.

'Sont tout frais débarqués du quai, regardez moi ça, une mine de vizir!

Son œil s'illumine lorsqu'un cri transperce la foule.

300 écus pour le petit gros là bas!

Biiiiien, biiiien, biiien! 300 pour l'miissire au fond! Qui dit mieux? Faites péter vos bourses ! Enfin j'veux dire, faîtes monter les enchères!

Approoooochez, approooochez miidaame ééééé miiissieuuuur ! Du blaireau! Du négro! Du négrillon! Y en pour tous les goûts!
Cesarphilippeauguste
    « - Milles excuses pour mon déportement, gentes dames. Néanmoins, vos visages, comparable à des naches, me donnaient l’impression que vous étiez davantage des gueuses - paltonières - que des fames de mon rang. »

Il fallait l’avouer, César avait un certain « talent », peut-on dire, pour présenter ses excuses aux femmes, en les comparant à un fessier et à des filles de joies la phrase suivante, ce qui était en soi tout naturel pour lui, puisqu’il pouvait se permettre tout ce qu’il souhaitait vu son rang dans la hiérarchie sociale, quasiment tout en haut, grâce à son père, un vicomte impérial, assurément. Alors il n’avait que faire de ce que pouvaient penser deux petites gueuses sur lui, bien que l’une semblait prétendre ne point l’être, ce qui pouvait être fort étonnant bien que sa la tenue vestimentaire semblait affirmer ses dires.

    « - Au risque de vous décevoir, jeune merdaille, je ne pratique point ce dont vous m’accusez là, caillette. »

L’insulter de la telle sorte - bourge -, signifiant homosexuel (terme non-existant à cette époque, mais les gens comprenaient) et hérétique, c’était tout de même très osé. Assurément, ces deux gueuses ne manquaient point de culot pour tenir tête à un homme comme César qui n’allait néanmoins point en rester là, se contenant néanmoins d’esquisser d’un sourire moqueur en direction de celle qui avait reçue le repas de l’autre gueuse devant ses pieds.

    « - La différence entre vous et moi, c’est que je n’ai point l’habitude de « patauger dans la merde », contrairement à vous, jeune coquefredouille. Et sire correspond davantage à mon rang qu’un vulgaire « messire ». Vous n’avez, à ce que je vois, aucune quelconque éducation, et cela m’attriste fortement, notamment venant de personne se prétendant « respectable ». Vous ne valez pas mieux, à mes yeux, que toutes les personnes qui nous entourent ici. Allons, n’essayez point d’acquérir des esclaves, pourquoi diable en voulez-vous ? Pour vous réconforter en voyant qu’il y a des personnes inférieures à vous ? En dessous de la merde, qu’est-ce-donc si ce n’est vous ? Vous. »

Puis, le Leostilla se retourna vers Humbert, son garde du corps qui suivait la conversation depuis quelques instants déjà.

    « - À vostre avis, Humbert … s’ils sont dans le noir, et qu’ils ne sourient point … nous est-il possible de les distinguer ? »
    « - Je … sire … je ne sais que vous répondre. Ces dames pourraient peut-être vous éclairer ? »
    « - J’espère ne plus être ici lorsque des gueuses sauront répondre à une telle question. »

L’homme laissa s’échapper un soupir alors que la présence de tous ces gueux l’indisposait de plus en plus. Il voulait repartir dans son carrosse, quitter cette maudite ville et retourner dans les grottes - ou dans ses appartements - au château de son père, en Savoie, sis sur les terres du vicomté Jausiers. À côté, l’une des deux femmes hurla sur ce marchand d’esclaves, « incapable de se tenir en société », pensa-t-il intérieurement avant de soupirer une fois encore, sans toutefois critiquer ouvertement ladite gueuse qui cherchait à acquérir quelque chose qu’elle ne pouvait de toute évidence pas, si les gueux avaient de l’argent, cela se saurait.

    « - Hé, le turc ! Trois-milles écus, en pièce d’or, pour trois de vos hommes ! »

Et l’offre du marchand ? Trois pour deux mille cinq cents écus ? Au diable cette offre, à ce prix là, il n’était pas à cinq cent écus près. Et sa fortune dépassait largement cette somme, qui plus est, il n’aurait point eu de mal à se refaire une santé sur le dos des caisses de Jausiers, assurément, comme il avait un peu l’habitude de faire, lorsque nécessaire. Déclarer de fausses dépenses, ou corriger les revenus, il y avait bien des manières pour trouver de l’argent sur le dos des gueux lorsque l’on est fils de vicomte. A quelques centaines d’écus près, cela ne changeait pas grand-chose à tout cela.
Eleo.
Désastreux... Pitoyables excuses, qui avez pourtant si bien commencées... Comme quoi, toutes bonnes choses finissent par dégénérer. Mais se faire insulter de "face de fesses" et de "bassinoire de corps de garde*", n'est pas pour vous ravir, et ce qui donne du grain à moudre à Éléonore, qui n'attendait que cela pour se défouler, déverser sa hargne exacerbée et je le répète, il faut tou-jours une victime. Et là, c'était vraiment tendre le bâton pour se faire battre.

Bras croisés, ignorant les prédications de l'ottoman sur son perchoir exposé aux vents mauvais, la brune s'adresse à Elisabeth, dont le silence la laissa dépourvu. Sourire ironique relevant ses lippes charnues, et vissant son regard d'agate assassin sur leur interlocuteur :


"Il insiste beaucoup sur le mot gueuse! Je pencherais pour des tics de language. ça arrive très souvent quand on est trop centré sur soi...

Et le blanc-bec de reprendre sa diatribe arrogante. Éléonore boue intérieurement. Courroucée par une telle insolence, et par le manque flagrant de réaction de sa cousine, qui d'ordinaire partait dans des attaques acerbes et piquantes, faisant ployer n'importe quel chêne, laissant les attaquants circonspects et pantois! Il était une certitude : la maternité l'avait ramolli, mais pas au point de laisser cette insolence impunie très longtemps.Lui jetant un coup d’œil à la limite d'en venir aux mains pour la faire réagir un temps soit peu; le cœur de la brune balance
entre coups de coude entre les côtes, tirage de cheveux, ou gifle. Mais trop pressée de clouer le museau de ce gringalet, ce qui ne semblait pas chose aisée.


Cessons cette discussion stérile ! Vous n'êtes qu'un nobliau à deux ronds, suffisant, aussi orgueilleux qu'hautain qui se prend pour...

Elle a la langue bien pendue la Orselo, et une fois qu'elle est lancée, on ne l'arrête plus, elle oublie même d'y mettre un peu de forme.

Enfin, juste qui jouit d'une certaine aisance, dû probablement à la chance ou à une quelconque autre forme de favoritisme, alors que ce joyeux Sire ; tout ce qu'il a réussi de sa vie c'est déblatérer des insultes ridicules à tour de bras et développer un narcissisme à toute épreuve, fortifier par la présence d'une garde asservie, qui lui insuffle une toute puissance chimérique et insolente sur les pauvres hères qui l'entoure. L'orgueil est péché, Siiire !

Finit-elle de persifler, doucereuse et agressive, et reprise d'une crise de bondieuserie. Alors c'est tout en se signant, qu'elle lâche arborant un air de dévote, un matin de messe :

"Heureux les pauvres d'esprit, le royaume des Cieux leur appartient."

Puis de planter ses pupilles vert d'eau, furieusement dilatées, dans les yeux du jeune homme.

Quelque soit le prestige de votre nom, il est bien entaché par votre présence icelieu, et par l'état déplorable de vos bottes, Sire!

Une personne de votre prétendu rang, aurait envoyé des sous fifres pour cette basse besogne. Même votre escorte a plus d'estime pour les autres que votre grande insolence dédaigneuse.


Et d'adresser un sourire aimable à l'homme de main du Savoyard.

Je n'en sais bigrement rien, mon brave mais je suis rassurée par la propre ignorance de votre maître, qui pourtant se prêtant supérieur.

Comme quoi, la grandeur d'un titre montre bien la bassesse de l'âme de son détenteur...


Après avoir ponctué de façon magistral, et un dernier soupir désabusé, la Orselo se détourne,lasse, vers l’hurluberlu sur l'estrade, qui beugle maintenant plus fort qu'un cochon qu'on égorge. Écoutant ses offres pas si affriolantes que ça, elle laisse se prononcer tous les nigauds, présents sur cette place putride, qui veulent acquérir un petit bout de cette nouveauté, pour pouvoir crier haut et fort, leur distinction, aussi fugace qu'insolite soit elle.

Et quand bien même, elle devrait mettre toutes ces possessions en hypothèques, il est absolument hors de question qu'elle reparte sans une bonniche. Puisque toute femme, seule ET respectable, doit se montrer avec une suivante, pour faire montre de sa bonne condition, et de sa respectabilité certifiée. Mais Éléonore ne pouvait toute fois, pas se permettre de miser aussi gros que son voisin. Il faudrait donc marchander.


Il me faut une femme! Robuste et saine qui plus est! Je vous en offre cinq cents!

Jetant un œil à Elisabeth, attendant son offre, puisque la blonde semblait en pleins calculs. Parce qu'en bonne auvergnate... Un sous EST un sous ! Amusée, autant qu'ulcérée, la Orselo sourit malicieusement, mains posées sur ses jupes, prêtes à froisser le tissu pour grimper plus aisément sur les planches de bois grinçantes, afin de concrétiser sa vente, qu'elle espérait rapide pour pouvoir quitter ce lieu immonde, quitte à oublier les bonnes manières et à passer la première, devant tout le monde !

Bassinoire de corps de garde = Prostituée de bas étage !

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Elisaabeth.
        « Armstrong, je ne suis pas noir ; Je suis blanc de peau … »
        De Claude Nougaro.


Saligaud ! Petite ordure ! Pour qui vous prenez-vous pour nous insulter, dites-moi ? Vous avez peut-être une belle couronne sur votre tête mais puisque vous souhaitez jouer à ce jeu, jouons alors ! Je suis la détentrice des terres de Mesnay, sises de la baronnie d’Arbois de sa Grandeur Héloise Marie de Sparte !!

Certes, la jeune femme était peut-être restée muette pendant un petit temps mais il ne lui fallut que peu de temps pour se reprendre. Des attaques de ce genre, elle n’était pas réellement habituée à ce qu’on les vienne les lui faire en face, mais dans son dos. Du coup, même si elle était armée à des répliques sanglantes pour les attaques, il pouvait lui arriver de tomber des nues en constatant qu’il pouvait y avoir encore des personnes franches. Les personnes qui n’ont nullement peur de venir à vous, en face de vous, pour vous dire très clairement en vous regardant droit dans les yeux ce qu’ils ont à vous dire. Nous pouvons le constater dès à présent, il en existe encore ! Revenons à cette scène, voulez-vous. Le regard vert de la jeune femme vira au gris. Bah oui, il ne faut pas non plus la prendre pour ce qu’elle n’est pas, c’est-à-dire une conne. Elle avait bien appuyé le fait que sa suzeraine était une Sparte. Il ne fallait pas non plus pousser Mémé dans les orties.

Et puisqu’apparemment, vous idolâtrez le mot « gueux » ou « gueuse », je terminerai cette conversation « stérile » comme le précise ma cousine – qui est aussi respectable que moi ! –, que « les gueuses » vous emmouscaillent !

Certes, il ne fallait pas pousser Mémé dans les orties mais il fallait avouer que la jeune femme avait une langue bien pendue. Avec un franc-parler qui faisait d’elle une jeune femme avec un caractère … de cochon, pour ne pas paraître impolie. Et puis, elle ne mâchait pas ses mots mais cela, vous l’avez sans aucun doute remarqué. Toujours aussi droite qu’un « i », se faire traiter de catin par un scélérat, c’était, il fallait l’avouer, très limite, voire même oser. Elle ne rétorquera point à cette insulte mais elle saura s’en souvenir, lui balancer une remarque bien sanglante, un peu plus tard, quand l’occasion se présentera.

Au grognement que lâcha l’un de ses mercenaires allemands, Éléonore posa – dans la langue natale du dernier – une question dont la blonde ne fit aucun effort pour comprendre puisqu’elle ne parlait pas allemand. Élisabeth lança un regard étonné à sa cousine et lui lança un «
Depuis quand parles-tu germain ? » avant de se souvenir que la brunette avait vécu son enfance en Lorraine et non pas en Auvergne comme la blonde. Peut-être que cette connaissance venait de là ? Soit. Passons. Élisabeth écouta la question de l’homme de main de l’ingrate personne qu’était son maître puis lui répondit – parce que croire qu’elle allait répondre au jeune homme après s’être fait insulter, il ne fallait même pas y compter :

Vous me voyez navrée, messire, de ne point pouvoir répondre à une telle question mais je ne saurai vous aider. Il faut l’avouer que ce genre … Elle fit une pause pour mesurer ses paroles car après tout, même si ces gens n’étaient pas comme elle, même si cela devrait être des « sauvages », il fallait quand même les … respecter ?, d’énergumènes doit être assez rare ? Du moins, je n’en ai jamais vu auparavant …

Et l’autre cinglé de vendeur qui beuglait de nouveau pour s’offrir de beaux écus. La jeune femme toussota, prête à se mettre à en faire de même mais pour parlementer, contrairement au petit insolent qui commençait à étaler tout l’or qu’il pouvait posséder. Cette fois-ci, c’est au tour de la jeune femme de se faire entendre pour obtenir ce qu’elle souhaitait : d’autres domestiques !

Hé ho ! L’occitan !! Je vous achète quatre de vos hommes pour le prix de trois ! À mille huit-cents écus … NET !!

La jeune femme se sentit obligée de rajouter le « net » à la fin de sa phrase. Ohh certes, elle allait mettre mille huit-cents écus dans des hommes qui allaient probablement mourir puisqu’ils étaient affreusement squelettiques, mais s’ils survivaient au voyage qu’ils allaient effectuer pour rentrer « à la maison », ils seraient … récompensés ? Et puis, mettre mille huit-cent écus dans des hommes, c’est comme si elle mettait mille huit-cents écus dans une ou deux tenues qu’elle aurait eu dans un atelier chic ! Il ne fallait pas faire sa rabat-joie, non plus !
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Arsene
    « Regardez moi cette marchandise, ça éclate plus qu'un clair de lune ou un rayon de soleil, ou une pute sous un réverbère. » Arnaques, crimes et botanique


    La Cour des Miracles. La maigre carcasse de la rousse se traîne de façon nonchalante. Sans but, elle erre, découvre, et s'approprie les lieux. Le nez en l'air, les yeux grand ouvert, rien ne lui échappe. Elle se sent à l'aise dans ce décor la mioche. La Cour était à l'image d'elle même, glauque et sordide. Un rictus malsain né sur ses lèvres tandis qu'elle se repaît et se délecte des scènes qui s'offrent à elle.

    Les pupilles émeraude papillonnent un peu partout avant de s'ancrer sur une silhouette non loin d'elle. Sa sœur. Les yeux se font songeurs, toujours braqués sur la jeune fille. Partie à la recherche d'un père, elle s'était retrouvée avec une famille complète et une tripotée de frères et sœurs. L'acclimatation avait été difficile. Les relations sociales et la gamine ne faisaient pas forcément bon ménage. Coups, insultes, bagarres et railleries font encore partie intégrante d'une discussion fraternelle. Ils restent, elle reste, donc ils font tous avec.

    Son sourire ne quittant pas ses lèvres, elle entraîne Agnésina avec un peu plus de vivacité au travers des ruelles. S'arrêtant ça et là devant diverses curiosités. Un badaud avec un œil ensanglanté, la plaque de notoriété d'un médium, une fille de joie, un lépreux, une taverne et son enseigne, la devanture d'un herboriste, le cimetière. Elle aurait continué son chemin si une foule n'avait pas attiré son attention. Arsène s'approche, se crée un chemin en jouant du coude avant d'apercevoir la raison de cet attroupement. Un marchant d'esclave et sa marchandise.

    Si la couleur de peau de ces êtres la choque, l'intimide et la déstabilise, elle n'en laisse rien paraître, écoutant attentivement les paroles autour d'elle. La somme d'argent attire surtout son attention. Elle ne sait pas compter mais elle a assez de jugeote pour comprendre que les prix énoncés, ça représentait beaucoup d'écus. Une petite lueur dangereuse au fond des yeux et la voilà qui retourne auprès de sa sœur.

    L'idée avait germé d'elle même dans son esprit. Le bras d'Agnésina est empoigné et la mioche l'entraîne un peu à l'écart. La bouche se penche à son oreille et elle entame un monologue.


    « Ils veulent acheter des esclaves. Quelle idée conne d'acheter quelque chose quand même. On pourrait p'tête dire que les nôtres sont mieux. »

    Quoi ? Elles ont pas d'esclaves, ce n'est pas un soucis ça !

    « Mieux qu'on les livre à domicile ! Et en vie ! Mais qu'il faut un acompte pour ça. »

    La rousse opine de la tête, satisfaite de son idée.

    « On fait ça, dis ? »

    Arsène sourit de toutes ses dents et tourne de nouveau la tête vers l'assemblée, se frottant presque les mains d'avance.

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Agnesina_temperance
Voyez le visage tout à fait normal d'une demoiselle. La beauté est subjective et si la demoiselle est tout à fait banale, vous pouvez la trouver belle. Elle est une femme qu'on a envie de connaître, elle est intéressante mais cette vision est gâchée. Par un affreux bouton. D'herpès. Il est contagieux, il est moche et pleins de pustules. Paris et la Cour des Miracles, c'est similaire. Paris est comme elle mais la Cour des Miracles, elle, elle lui crache à la figure. Elle est l'avertissement contre la maréchaussée. Elle sent le sang, la fiente et le goût prononcé du crime. Il y'a qu'à voir cet homme avec cet œil ensanglanté, la catin avec sa jupe retroussée pour appâter le chaland, les gens présent comme les faux estropiés qui mendiaient. Agnésina n'était pas à l'aise à cet endroit. Elle était sur ses gardes. Elle l'était toujours. Question de principe et de méfiance.

La jeune Corleone avait accompagnée sa sœur pour voir, pour découvrir et trouver la bonne opportunité. Un contrat qui se présente, une trouvaille ou qui sait. Sa sœur. Elles étaient à la fois si différentes et si similaires. Si au début, Agnésina ne savait pas quoi faire d'Arsène, elle a commencé à l'accepter après l'avoir observée. Certes elles s'étaient cherchées, certes elles s'étaient battues mais peut-être était-ce le sang qui avait bouillonné, s'était reconnu. Elle ne savait pas et elle s'en fichait. Elle ferma les yeux un instant. La Cour des Miracles ne sentait pas la rose. Elle n'était pas silencieuse. Agnésina avait l'impression que c'était un monde étrange qui se dressait devant elle. Les gens de cet endroit étaient des marionnettes tenus par un marionnettiste fou. Et ça la renforça dans ses convictions intimes. Le Très-Haut était un marionnettiste qui savait manier ses marionnettes dans le bon sens. Le Sans-Nom, lui, se fichait de la beauté du spectacle. Il se moque des gens et fait que s'amuser. Et elle ? Qui était son marionnettiste ? Elle avait remis en doute ses convictions depuis qu'elle avait goûté à l'illégalité. Elle ne se reconnaissait en aucun des deux. Elle venait même à penser que le Très-Haut et le Sans-Nom étaient des marionnettistes débutants. Alors, est-ce qu'il existe une autre voie ?

Elle pensait trop. Et trop. Elle devait se concentrer sur le moment présent. C'était une très bonne idée. Elle marchait, regardant autour d'elle avec méfiance et froideur. Petit à petit, elle s'habituait et devenait indifférente. Elle réfléchissait. Aux affaires futures et aux choses à trouver ici. Et sa réflexion est interrompue par un spectacle auquel elle ne s'attendait pas.

Des êtres qui ressemblaient à des hommes. Mais ils étaient noirs. Ses yeux froids s'écarquillèrent en interrogation et, quelque part, en peur. Qu'est-ce que c'était ? Des animaux ? D'où venaient-ils...? Elle en avait jamais vu. Jamais. Elle ne pouvait détacher son regard d'eux. Oui, ils étaient peut-être que des animaux sans âme. Ils semblaient si... différents. Non, ils ne pouvaient pas être comme elle... En acheter un, elle n'oserait pas. Trop peur qu'ils soient des animaux féroces et elle n'avait pas les moyens. Enfin, elle voulait s'acheter un bateau. Un bateau Corleone. Alors, les écus, elle en gardait le plus possible. Elle tique. Elle regarde autour d'elle. Mille huit-cents écus.... Agnésina savait compter et elle savait que ça représentait une sacrée somme et avant de continuer sa réflexion, son bras est empoigné pour être un peu à l'écart.

Les propos d'Arsène trouvent échos dans l'esprit de la sœur et un bref sourire en coin se dessine sur ses lèvres. Oui, Agnésina était partante pour faire ça. Elle lui chuchota dans l'oreille.


«- Oui.

C'était clair et concis. Toujours murmurant, elle poursuivit.

«- On peut même dire qu'on a quelque chose en plus qu'il n'a pas...
Un bébé esclave.
Plus on les prend jeune, plus ils sont serviables.
Et on pourra dire qu'il faut prendre la mère avec et que ça aura un prix.
T'en penses quoi ?


Les prunelles bleues s'attardent sur sa sœur pour attendre sa réponse avant de s'éterniser sur le marchand et enfin, sur les potentiels acheteurs. Elle haussa la voix, s'approcha, pour qu'on l'entende dans ce brouhaha.

«- Vous allez vraiment acheter ces esclaves-là ?
Regardez-les !
Regardez-les.
Ils mourront avant d'avoir franchi le seuil de votre porte...
Croyez-moi, on en connait assez sur les esclaves...
Et surtout, on en a des meilleurs.


Elle passa sa main dans ses cheveux, le visage le plus sérieux possible.
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Le.marchand.d.esclave


Trois mille écus ! semble-t-il nécessaire à ce foutu forain, pour prendre conscience de ce qu'il semblait avoir entendu.

Tanrim... Madre de dios! ça s'était la stupéfaction. Et personne ne proteste en plus. Il semblerait qu'il soit tombé sur une belle pelletée de blaireaux, qui n'y connaisse strictement rien aux affaires.
Ou alors c'est pour conclure plus vite, parce que même lui, le rat qui était habitué aux bas fonds, et aux fosses, il fallait bien avouer que c'était loin de sentir la rose ici bas! Mais on est pas là pour pérorer sur les odeurs du bas peuple, il va même pousser jusqu'à trois mille cinq cents. Il tient le bon bout. Le vermisseau aux boucles blondes flanchera, l'ottoman en est certain. Suit l'offre de la grosse dondon, qui semble bien plus pingre, beaucoup moins bien nanti et beaucoup moins facile à rouler que le bellâtre; parce qu'apparemment, elle a bien vu qu'il suffirait d'un courant d'air pour faire flancher la marchandise; et que ça valait guère plus qu'une poignée d'oseille. Ces riches, ils ont tellement de pèze qu'ils savent même plus quoi en faire toute façon.

Et pour clore cette envolée de prix, voilà la blonde qui essaie de l'arnaquer... et en beauté! Mais bon, il n'est pas en position de faire la fine bouche, notre homme, tout escroc qu'il est. Parce que... Parce que faut pas faire fuir le badaus, surtout ce qui savent compter; ou en donne l'apparence!, avec des prix trop exorbitants. Déjà en train de tirer des plans sur la comète, de ce qu'il va faire de tout ce blé.

Et de reprendre de son accent ottoman,nasillard de spéculateur avéré


Vous missire! Pour cinq cents z'écus en plus, j'vous garantis la qualité q'vous pourrez ja-mais trouver 'illeurs! Sur la tête de mes enfants... -il crache par terre.- C'est pas d'la camelote! Allez, cinq cents z'écus.
C'est de l'offre ça, missire! Et en or massif..


L'occitan se délecte des écus, qu'il sent déjà rouler entre ses doigts, brasser entre ses bras; montre la brune à la mine courroucé du doigt mais tout le monde c'est que ça ne se fait! A la Cours des Miracles, au diable les bonnes manières!

Midame... Il change son doigt de cible, et le plaque sur la dame de Mesnay, le balançant de l'une à l'autre, avec insistance. Midames! Un p'tit effort quand même! Vous trouverez pas meilleurs ailleurs, garantie provenance direct. Z'ont ja-mais rispirer aut' chose que... On s'en fiche ! C'est du pur race et...

Et voilà que le baratineur a la chique par une fille ! Dans l'assemblée qui s'égosille et le pompon; qui essaie de lui retirer SON pain de la bouche, ...enfin plus précisément les écus de l'escarcelle.

Vite un plan d'attaque. Merdeuh! Et puis qu'elle continue ses salamalecs, se boniments! Le marchand devient livide. A ce train là, elle allait lui foutre tout ses plans par terre. Ah... la charogne! Son sang ne fait qu'un tour, et accoste la friponne en gueulant comme un marchand de harengs, en faisant rouler ses "r" de fureur, lui rendant son accent abominable.


Eh ! La bougrrresse! Va jouer ailleurrrs. C'est mon terrrain ici. Et puis, qu'est ce qu'ils ont, mes esclaves! Sont très bien mes esclaves! C'est très bonne marrrchandise! La bonne santé... Un peu d'soupe et on y verra qu'du feu!

Espèce d'arsouille !


Baratin quand tu nous tiens. Bon il enjolive un peu les choses mais, tout bon vendeur doit irrévocablement farder la vérité pour la rendre... euhm vraie? Deux escrocs. Une mythomane. Un musulman. Qui d'eux deux aspirera les écus de l'autre?

Alors miiidames, miiisieur! Choisissez! Choisissez! Viendez, montez et r'gardez! Que du beau... Genre: on la conclue cette vente bordel de crotte !
Elisaabeth.
        « Et si on disait que … ah bah non. La négoce, c’est toujours pas ça ! »
        D’Élisabeth.


Quoi ? Pardon ? Mille huit-cent écus, net, ne lui suffisait pas ? Il faut dire aussi qu’à côté de l’autre snobinard qui accepte de donner presque le double de la somme proposée pour avoir trois des hommes de l’occitan, sa somme à elle, c’était de la gnognote ! Ah la bonne blague ! Elle croisa les bras, pas satisfaite pour deux sous, puisque l’occitan demande aux deux cousines de faire « un petit effort ». Mais quel effort ? Certes, il ne pouvait pas savoir les véritables raisons pour lesquelles Élisabeth refusait de dépenser des sommes faramineuses – que ce soit pour n’importe quoi – mais l’argent … c’est l’argent, bordel ! On ne rigole certainement pas avec ça ! Surtout quand on doit subvenir aux besoins d’une enfant qui grandit de plus en plus vite, au fur et à mesure que le temps défilait à vive allure.

Revenons à nos beaux petits moutons … noirs … arf, la narratrice s’est trompée ! Elle souhaitait dire : revenons à nos beaux petits bonhommes noirs qui vont nous servir d’esclaves. Des prix furent proposés, à droite, à gauche. Ce fut même impossible de pouvoir bouger, comme bon nous semble, pour voir la gue … du moins, je voulais dire, pour voir la tronche qu’avait celui qui proposait des prix aussi … minables que le sien ! Hééé ! Mais ce n’est pas juste ! Pourquoi faut-il toujours que cela tombe sur elle, ce genre de refus ? Il se croyait où, l’occitan ? Pensait-il pouvoir plumer de la sorte la jeune femme, cette Belette, certes blonde, mais qui pouvait se montrer parfaitement intelligente quand elle sentait qu’on s’apprêtait à la prendre pour une moins que rien, une idiote sortie de sa tanière pour se rendre ridicule en public ?

Comment montrer à l’occitan que ce qu’il pouvait déblatérer ne l’intéressait guère, puisqu’il refusait d’accéder à sa demande ? Cela est fort simple : gardant toujours les bras croisés, elle leva ses émeraudes au ciel, lâchant un soupir agacé. Ça y est, a-t-il compris ? Parce que pendant qu’il ressortait encore l’un de ses grands discours, son élan fût stoppé net par … une voix de donzelle ! Sourcils froncés, elle se tourna – ou du moins, fit de son mieux avec tout ce petit monde – pour mettre une tête à cette voix féminine. Et puis, à force de ne pas trouver ce qu’elle voulait, elle regarda son mercenaire allemand – du moins, l’un des deux jumeaux ! – et lâcha, après qu’une belle idée fasse « Eurêka ! » dans sa tête :
Tu vas m'aider ! Tu vas me porter quelques secondes ! Il faut que je sache …
Par… pardon ?
Ne me coupe pas, abruti ! J’ai dit, tu vas me soulever quelques secondes afin que je puisse voir quelque chose !

Et vu que le ton est assez autoritaire, le mercenaire n’a pas le choix, il exécute l’ordre donné par la jeune femme : la soulever afin qu’elle puisse voir « quelque chose ». Il se baissa, un genou à terre, attrapa les jambes de la jeune femme afin de l’asseoir – ou asseoir un bout de fesse, vu les rondeurs que la Balafrée a gardé depuis sa grossesse – sur son épaule puis, après avoir pris un peu de courage et de souffle, il se leva. Élisabeth, quant à elle, s’agrippa à la tête, enfonçant un peu plus que prévu le chapeau que portait le mercenaire. Une fois « bien installée », elle continua de chercher le visage. Dieu que cela peut être épuisant de se trouver sur une place publique avec … trop de public, justement ! Elle plissa les yeux, persuadée qu’elle trouverait … Bingo !

Fais-moi descendre, maintenant.

Exécution, encore. On a beau avoir une gueule d’ange, il n’empêche que l’on doit toujours se méfier des apparences ! Si ça se trouve, cette donzelle, elle fait partie du coup foireux que l’occitan préparait en volant, très probablement, les personnes souhaitant achetées des esclaves. Elle croisa de nouveau les bras – si seulement elle pouvait faire les cents pas, elle le ferait ! –, et réfléchit. Que faire mais surtout, qui croire ? Elle regarda sa cousine, attendant qu’elle réagisse, elle aussi ! Puis, elle jeta un œil au snobinard. De lui aussi, elle attendait une réaction, quoi que, finalement, elle s’en fichait un peu, elle ne le connaissait pas ! Élisabeth leva les yeux vers l’occitan, qui s’était bien énervé après la jeune fille ; puis vers l’estrade, où se trouvaient les esclaves. L’occitan … les esclaves … l’occitan … les esclaves … l’occitan …

Elle joua du coude pour passer, elle avait une idée en tête et elle allait mettre en œuvre son idée.


Dites-donc l’occitan !, dit-elle en montant sur l’estrade pour s’approcher des esclaves … notamment d’un enfant fortement squelettique afin de mieux l’observer, malgré les réticences dont pouvaient faire preuve ces personnes à la couleur de peau différente à la sienne, pourriez-vous nous garantir que vos ... hommes !, elle se retourna pour toiser le vendeur turc en ne s’arrêtant pas de parler : seront toujours en vie, une fois notre transaction finie ? Qui nous dit que vous ne les …, elle continua de parler tout en s’approchant de l’occitan, l’air pas du tout commode, … avez pas empoisonné afin de pouvoir toucher nos écus sans que nous puissions utiliser nos hommes dûment achetés ?

Son regard vert pivota vers la jeune fille qui avait tant aimé nous faire entendre sa voix, elle non plus, elle n’échapperait pas aux questions de la jeune femme : Et vous demoiselle ? Quelles sont vos garanties ? Pourquoi ne pas nous montrer un petit aperçu de vos esclaves ? Parce qu’après tout, certaines personnes n’accepteront peut-être pas de dépenser de l’argent tant qu’elles n’auront pas vu les dits esclaves ! « Notamment moi », pensa-t-elle au fond de sa petite tête blonde.

Dans le genre « je suis comme saint Thomas », quand elle s’y met, Élisabeth peut se révéler imbattable. Elle est là pour acheter, certes, mais elle, ce qu’elle veut, c’est une garantie que ce qu’elle s’apprête à acheter vivra encore des lustres, des lustres, et des lustres !...

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