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[RP] Chair qui pend, serre les dents

Arsene
    « La douleur est aussi nécessaire que la mort. » Voltaire


    Paisiblement allongée et lascivement enroulée dans une couverture de laine, la Roussâtre dort. L'esprit bercé par l'ingurgitation en petites doses de lait de pavot, est plongé dans les méandres tortueux et apaisant d'un rêve. Le buste aux côtes fragilisées se soulevant au rythme régulier et tranquille de sa respiration. Profitant pleinement de cette impression de nirvana atteint, de la plénitude d'un silence reposant et de l'apaisante chaleur diffuse, elle s'oublie. Petit réceptacle vide d'émotions et de sentiments, toutes douleurs temporairement oubliées. Le calme avant la tornade et le chamboulement de son esprit.

    La maigre carcasse se tourne et s'affole en proie à une agitation et à une nervosité peu commune. Elle perçoit de nouveau les abords sinueux d'un chemin de campagne. La lune basse et les nuages ambiants éclairent à peine la croisée. Elle ne parvient pas à déceler les silhouettes proches et la tension se fait palpable, le cœur faisant des bonds dans son enrobage de chair. Les pupilles vertes discernent le gabarit des assaillants qu'une fois que le premier coup s'entrechoque sur sa carne, surprise. Bien trop tard et les gestes de défense manquent de rapidité et de spontanéité. La dague sort de son fourreau et s'élance, brillant d'un éclat meurtrier. Les lames heurtent contre le fer des rapières, les râles de souffrance et d'amertume fusent.
    Bousculée par un homme à la carrure imposante, la maigre brindille plie avant de rompre. Le minois aux éphélides rencontrant avec violence le sol boueux et humide. Les bras repliés sur sa nuque dans une tentative de protection vaine, elle attend la dernière sentence et la brûlure de l'épée sur sa peau.

    Interminable et douloureuse attente. Le couperet se fait désirer et la mort, maîtresse de l'angoisse, joue avec les nerfs de sa victime. Le jugement ne tombera pas. La Lionne Corleone s'est élancée, bardant de sa lame, le corps de sa protégée au sol. Incompréhensible élan et sursaut maternel. Au delà des mots et des paroles houleuses, le lien s'est tissé entre les deux jeunes femmes. Puissante et incontrôlable attache entre deux âmes similaires. La cadette se référant à son aînée pour chacune de ses actions, allant jusqu'à rechercher sa fierté et la lueur de satisfaction dans ses yeux sombres. Modèle, mentor et mère. Je t'aime quoique je dise, que je fasse et un jour, je te protégerai aussi.

    Elle se revoit de nouveau traîner sa maigre carcasse dans les rues étroites et dans les bouges à la réputation douteuse. Cherchant à y déceler une chevelure blonde et une trogne tailladée. La nuit et l'attaque ont séparé l'époux et l'épouse. Et elle erre comme une âme en peine, se rongeant allègrement les ongles et cuticules en tentant de maîtriser une nervosité et un affolement grandissant. Le rapprochement progressif entre les deux cœurs est finalement apparu comme nécessaire pour laisser place à un lien fort et ravageur. Obnubilant l'esprit torturé de la rousse, le blondin se fait indispensable. Tu meurs, je te tue et je meurs.

    Le petit corps s'agite, prisonnier de songes que l'esprit ne contrôle pas. Les côtes se réveillent et les yeux se plissent fébrilement. Les deux paupières s'ouvrent subitement sur des pupilles parfaitement éveillées et la Frêle tente de calmer sa respiration irrégulière. Les échos des combats résonant encore dans les oreilles, elle glisse une petite main à la peau fine sous sa chemise, frôlant et effleurant son buste maltraité. Tentative dérisoire d'apaiser l'impression d'étouffement et ses douleurs. Les couvertures de laine glissent et remontent couvrir une carcasse couverte d'hématomes et jambes et bras cherchent à s'enrouler à la chair de l'amant. Elle tique sur la froideur ambiante et chasse ses boucles pour découvrir un lit vidé de sa présence masculine.

    S'appuyant avec précaution sur un coude, la roussette se redresse et scrute de ses mirettes curieuses la pièce plongée dans la pénombre des premières lueurs du jour. Elles butent sur le corps à la tignasse claire, affalé sur une chaise devant l'âtre où seules quelques flammes vaillantes subsistent encore.


    « Nizam... »

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Nizam
    [Sentier comtois]

    Balafré s'écrase. Balafré s'effondre. La silhouette couverte de fourrures et de ferrailles rampait péniblement sur l'humus noir de la forêt comtoise. Séparé du reste au premier choc des armes, Ils l'avaient débusqué le lendemain. Un gibier acculé, cerné par la cépée et par plus de lames qu'il n'eut manié, voilà à quoi il était réduit. Triste fatuité du cavalier persuadé que le fer mordra une autre chair que la sienne. Le corps fit une nouvelle fois leçon à l'orgueil, l'on perça, l'on craqua, comme il advenait de la carcasse d'un brocard qui ne fut assez rusé pour semer la meute et ses maîtres, les chiens rongent la viande et apaisent l'excitation des ventres creux. Chien, il en était avant cette nuit-là, la fièvre des coups, le mercenaire la trouvait comme le mari fidèle s'en retourne auprès de son épouse. Il comprit que la Faucheuse guettait et qu'il ne saurait la faire fuir. Pas aujourd'hui. Alors l'émail écarlate nourrit la terre et grima de pourpre tant la trogne crasseuse que les restes. La carne parut plus lourde que toutes les pierres sorties des mines des royaumes. Lorsqu'il n'y eut plus de tressaillements, Ils l'abandonnèrent comme l'enfant délaisse son jouet cassé. Seul et étendu, la fourrure ne s'était pas départie de sa chaleur, mais par le Déos, que sa chair était froide.

    Les lueurs fauves de l'aube s'enfoncèrent dans le bois et piquèrent les bourgeons vigoureux de la belle saison. Parmi ce bouillonnement de vie, l'une se ravivait faiblement. Il ne sut pourquoi, il ne sut comment, mais le palpitant battait et un souffle écorchait sa gorge, insufflant au dedans de lui la force d'une âme qui rechignait à quitter sa coquille brisée. Crever là, il y renonçait, il avait ce grondement dans les entrailles, celui qui ne nous rend jamais plus vivant qu'après avoir effleuré avec indécence le linceul de la grande Mort.

    La monture avait disparu avec la meute des enflures. Il fallut du temps pour se lever, il fallut du temps pour avancer jusqu'à rencontrer le premier malheureux auquel il réclamera la charité d'ordinaire méprisée. Qu'on le porte jusqu'à celle à qui il était lié par des promesses et un anneau, c'était tout ce qu'il souhaitait.


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    [Piaule de la Corleone]

    Balafré s'affale. Malgré son corps vautré et sa trogne abîmée indolemment penchée, de la nuit il fut incapable de s'assoupir. L'épouse apaisait les plaies de l'esprit, mais contre celles de la chair, nul remède ne saurait les faire taire. Il ne respirait qu'en gardant la gueule entrouverte, une flasque de gnôle non loin de sa pogne. Le blase fendu à sa première approche du fer des années auparavant en gardait les stigmates et, cogné brutalement, saignait souvent au point de contraindre le mercenaire à souffler comme un animal en fuite. Le mal s'insinuait et léchait vilement chaque meurtrissure. L'une de ses épaules avait la raideur du bois, et l'impression d'être le festin des vers tant les nerfs grouillaient, tiraillaient sur ces os qui s'étaient brièvement écartés, comme le font ceux d'un pantin articulé. La douleur des muscles contus lorsque les bronches se bombaient d'air était une autre de ses envahissantes compagnes. Ça fourmillait, ça creusait au profond de cette carne tordue avec l'acharnement d'y faire son trou. Il aurait voulu arracher lui-même la peau endolorie, comme s'il s'agissait de celle d'un autre dont il pouvait se débarrasser. Serre les dents, Balafré. Sa dextre était crispée sur le tissu poisseux couvrant sa cuisse, linge souillé par le liquide visqueux qui perlait obstinément des chairs mutilées. L'italienne avait recousu ce qui le nécessitait, avant que la viande ne pendît et pourrît dans les mauvaisetés qui la gonflaient. La plaie suintante aurait déjà dû s'assécher, mais le boiteux n'en avait pas inquiété sa femme. La frêle, comme d'autres du clan, n'avait pas été épargnée et devait également se ménager.

    Ses doigts agrippèrent les braies rougeâtres, teinte vieillie qui eut l'avantage de moins souffrir des souillures du sang. L'entaille se plaisait à éprouver la patience du mercenaire. Le regard noirci de cernes, il fixa les braises mourantes de l'âtre devant lequel il cherchait vainement le repos. L'époux avait abandonné la paillasse où s'agitait parfois la Rousse, prise par des rêves dont il craignait la tournure. Il avait tenu sa promesse, il était là avec elle, mais le sentiment d'impuissance face aux souffrances de l'un et de l'autre entachait la joie des retrouvailles. Que cette faiblesse l'agaçait.


    - Nizam...

    La tignasse blonde se leva lentement afin de distinguer la jeune femme emmaillotée dans ses couvertures, cette brindille de rousseur à qui l'orgueilleux avait cédé part de ses pensées, non sans bousculer son ego. La pogne oublia la cuisse où le mal s'enhardissait, et se tendit, bien que sale et rougie, vers elle. Viens.

    - Ce rêve, encore ?
Arsene
    « La peur naît à la vie plus vite que tout autre chose. » Léonard de Vinci.


    Les mirettes vertes papillonnent et s'agitent à détailler la chevelure blonde et son propriétaire. Elles glissent avec un lenteur exquise et délibérée sur le visage tailladé, esquivant furtivement la balafre qui trône avec arrogance sur le nez masculin et s'attardent sur les iris bleutées. La course folle des sinoples s'arrête sur la main tendue. Invitation à une étreinte à la chaleur réconfortante et salvatrice.
    L'échine se redresse dans un mouvement de buste douloureux. La respiration temporairement suspendue et bloquée, elle abandonne la couche. Unique témoin de leurs nuits agitées et de leurs angoisses. La douleur s'insinue, perfide, dans les chairs de la rousse étirant sur son minois aux éphélides prononcées une grimace amère.

    Relâchant la couverture de laine, elle esquisse quelques pas chancelants et ensommeillés sur le parquet miteux de la chambre d'auberge. Elle avait jeté à la hâte son dévolu sur une taverne anonyme et bon marché. Cherchant à panser rapidement ses plaies et à s'oublier dans les méandres sinueux et tortueux d'une mauvaise vinasse.
    La tignasse fauve et indisciplinée retombe en boucles éparses devant ses prunelles. La menotte s'enroule et s'entremêle à la main masculine tandis que le corps débraillé se niche contre sa carcasse. Recherchant ardemment le bouillonnement de sa peau. L'épiderme engourdi et frais se mêlant avec langueur contre la peau rugueuse de l'époux. Le regard couve avec fascination les braises faiblardes. Ses envies et ses lubies se réveillant lentement à chaque rébellion des flammes. Tentative dérisoire de survie, le feu se consume, économisant vainement les derniers morceaux de bois à engloutir.


    « Ce rêve, toujours. Les lapins roses et les poneys à cornes. C'est que c'est fourbe et vicieux ces bêtes là. »

    Un sourire s'étire sur ses carminées charnues et abîmées alors que les yeux se détachent finalement et difficilement du brasier mourant. Le blond connaît la teneur de son rêve et de ses craintes. Ces deux nuits sanglantes et barbares ont ouvert une perspective dans l'esprit de la Frêle qu'elle n'avait pas encore envisagé. Perdre le jeune homme. Retrouver son corps lardé de coups et froid. Et l'esprit masochiste ressasse sans cesse cette peur, incapable de se débarrasser de cette appréhension.
    Elle observe un instant leurs doigts enchevêtrés, repérant seulement et enfin l'épiderme rougi.


    « Ta main.. Tu saignes, encore ? »

    S'il avait tenu sa promesse, l'esprit du blond semble pourtant à des lieues de la chambre d'auberge. Le corps ravagé par un mal dont elle ne peut panser correctement les plaies et l'esprit fatigué par cette douleur qui ronge sa carne. Impuissante et accablée par ses propres blessures, la jeune femme appose avec précaution sa main au poignet fragilisé sur la peau d'une joue barbue, tentant de soulager par le sillon qu'elle trace, les douleurs de l'homme.

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Nizam
    Alors Balafré à la peau rude accorda sa carne mauvaise et avachie à cette brindille qui se nichait contre lui. La gracilité de l'italienne avait tant été accentuée par les maux du corps qu'il craignît de l'enserrer avant de se soucier des peines que lui causerait cette proximité charnelle, triste sort des amants lésés par le fer, las de se frôler pour ne pas écorcher la chair meurtrie. Crispé par des vagues de souffrance, l'allusion aux canassons à cornes eut le mérite de fendre les lèvres du mercenaire en un pâle sourire, mais il n'insista pas sur ce qui assaillait véritablement les songes de la Rousse. Ces angoisses-là partiront, s'en persuadait-il pour ensuite apaiser l'épouse. L'homme éreinté n'avouera pas qu'il crevait autant de peur que de fatigue, il se dresserait de ses dernières forces comme un rocher salé qui s'effrite à chaque déferlante l'enveloppant de son écume.

    Il ignorait encore s'il allait joindre ou non le Déos, si la Faucheuse avait retenu son geste pour mieux l'emporter avant la prochaine lune - vicelarde la Noiraude - mais ce n'était pas cracher son âme salie si piètrement qui l'effrayait outre mesure. Fallait-il avoir cette fêlure dans le métier des armes de savoir que tôt ou tard - et souvent tôt - le mercenaire cane comme un autre badaud, avec des préférences, les tripes emmêlées par l'acier donnent fichtrement plus d'allure qu'une carcasse amaigrie sur une paillasse. D'où viennent tes craintes Balafré ? Perdre au jeu de la noire Mort ne te donnait rien de plus qu'un haussement d'épaule, à moins peut-être qu'une rousse n'ait changé les règles.

    Le sourire maigriot donné à l'italienne avait un écho sonnant de plus en plus faux. Ses lèvres se tordent. La respiration devient sifflante entre ses dents, et celles-ci grincent, agacées de ne pouvoir bouger autrement tant la mâchoire se raidit. La cuisse d'où s'écoulait la sanie mêlée à l'émail rouge et visqueux s'était subitement rappelée à lui, la carne esquintée endurait les douleurs lancinantes de l'épaule démise et des contusions, mais celle-ci... Par le Déos, pourquoi avoir fait les hommes si faibles ? D'un geste brusque, il ôte sa pogne souillée de la main de l'épouse et la porte au tissu poisseux des braies, les traits secs du visage se creusent de mal et de colère de le subir, encore, impuissant. Enfin un souffle et le regard blême se plante dans celui de la Frêle, le bleu sale et usé rencontre le vert angoissé.


    - Encore. Ça ira. On aura de quoi s'rem-... Mmh. Bientôt... Tu n'veux pas te reposer ? Ça passera.
Arsene
    « J'ai avancé, tout droit, devant et en premier
    Affronté des géants qui auraient tant voulu m'écraser
    Mais rien à faire, l'animal est resté sur ses pieds »


    Manau – Ma fée.


    Affaiblie et amaigrie. Les affres de la chair et de l'esprit ont considérablement creusé la délicatesse de la carrure féminine. Les côtes déjà maltraitées par des assaillants virulents et une alimentation aléatoire se retrouvent pourvue d'une mince épaisseur de peau. Exposant ainsi fièrement leurs dessins sur l'épiderme d'albâtre. L'estomac capricieux refuse catégoriquement la nourriture, les entrailles nouées par une angoisse sourde se jouant volontairement de la frêle.
    La petite carcasse s'installe contre la musculature de l'époux et la respiration précipitée s'apaise imperceptiblement. Les paupières s'abaissent doucement et les narines s'emplissent de l'odeur du blond. La fine menotte glisse lentement sur le muscle d'un avant-bras tendu et ravalant son ardeur, pour leur épargner douleurs et frustration, la rousse se contente du frôlement imposé par les blessures. Pourtant, les pensées s'étirent vers une étreinte passionnée et salvatrice.

    Le Cerbère panse ses plaies, à l'abri des regards et des badauds. L'ego fragilisé se reconstruit petit à petit. Et bientôt, la bête sera de nouveau sur pieds. Plus forte et plus orgueilleuse. Les griffes de l'entité se déploieront sans pitié sur les âmes errantes, terrorisant sans vergogne les quidams osant se confronter et s'opposer à ses fières incarnations physiques. Mais dans la pénombre de la misérable chambre, Corleone laisse l'inquiétude trahir ses traits. L'ombre perverse de la mort plane au dessus d'eux, se jouant de leurs réactions et de leurs peurs. Prête à bondir, elle attend, tapie dans l'obscurité ambiante. La fierté est chassée de son trône et refoulée dans un coin de la cervelle angoissée. Le maigre sourire qui étirait ses lèvres s'affaisse instantanément lorsqu'elle comprend les afflictions du blond.

    Les sinoples fatiguées et tourmentées se font orageuses. Le minois autrefois crispé affiche des allures menaçantes alors que le maigre corps se redresse. Elle reste silencieuse, le temps d'un battement de cœur douloureux et de cils, transpercée de part en part par une onde de douleur. Celle-ci s'introduit insidieusement dans la chair meurtrie et remonte lentement le long de son buste. Brutale et âpre. Le sillon brûlant repart finalement, laissant dans la bouche de la frêle, une amertume singulière et maintenant connue.
    La voix s'élève finalement, sifflement malingre au début, elle claque bien vite. Démontrant une autorité et un agacement évident malgré son affaiblissement visible.


    « Montre-moi. »

    Implacable, la brindille ignore ses propres blessures et le regard farouche reste rivé sur la cuisse estropiée.

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Harchi
      " Il n'y a rien de plus éprouvant que de devenir pour un temps le compagnon contraint, de son pire ennemi. "
      Harchi, un soir en taverne après avoir descendu une bouteille pleine d'Armagnac.


    Pourtant le vieil homme a bien arpenté la campagne, évité les villes, redoublé de vigilance pour porter le précieux colis à ce Balafré qu'il détestait tant. Un pli arrivé à Limoges quelques temps plus tôt, dans les mains de sa précieuse Rousse, encore bien trop attachée à ce résidu de moisissure, du moins à son gout, avait scellé son destin et l'avait conduit à ce jour, dont les premiers rayons de soleil peinaient à fendre encore l'obscurité tenace de la nuit, à ce lieu, miteux où régnait une odeur acre d'alcool, de bois carbonisé et de sang. Bien évidemment, en bon soldat c'est ce dernier qui avait attiré son attention. S'il n'avait pas su qu'il ce trouvait, là, debout dans ce taudis, véritable statue marmoréenne, il aurait pu se croire sur un champs de bataille. Il ne lui fallait que fermer les yeux.

    Et c'est exactement ce qu'il fit, le vieux. Fermer les yeux pour se laisser imprégner, submerger par ces odeurs d'autrefois. L'ancien est anxieux mais il se concentre plus encore. Sur sa droite un peu plus loin des pas lourds et disgracieux, dont la résonance s'impose à ses oreilles. Il ne bouge pas, du moins l’œil d'un tavernier aviné, ne peut discerner le mouvement fluide et rapide d'un soldat de carrière. Cependant, avant qu'il n'ait pu prononcer le moindre mot, un éclaire argenté fend l'air et se retrouve presque délicatement posé contre la gorge du Dérangeant. Alors les opales apparaissent enfin sous leurs volets de chair, menaçantes. Harchi inspecte la proie au bout de sa lame. Un tablier sale, un pantalon crotté, un regard bovin, une odeur de bière et de liqueur qui parfument un peu plus les effluves de la transpiration du tavernier. L'homme, choqué, écarquille les yeux et tente de balbutier quelques mots. Alors un sourire carnassier s'affiche alors sur le visage de l'Ombre.

    * Ce serait si facile, si propre, si net et qui peut savoir que tu es là ? Hum ? * Traitresse Folie, toujours présente dans son esprit qui s'accorde le droit de susurrer ses mots tendres lorsque l'homme est vulnérable et qu'il laisse déborder cette colère amère trop longtemps contenue. Harchi est Fou. Harchi entend des Voix. La nuit est son Enfer et la Folie sa douce et intime Amie. Il pourrait, oui il pourrait se laisser bercer par les mots glacials de son Impossible Amante, qui sait que trop bien exprimer les désirs noirs du Guerrier. Oh oui il pourrait, se serait si facile... Mais auprès de sa Fille, l'Homme d'Armes a appris la maitrise. Enfin ... presque ... Jusqu'à ce qu'il ne parvienne plus à se maitriser en somme. Le temps semble devenir infinit dans cette action brutalement arrêtée. Il toise, jauge et finalement la morsure du fer se fait moins ferme sur la gorge offerte en offrande. Si facile ... Et le vieillard prononce pour l'Imbécile trop peu prudent quelques mots.


      - Je n'ai guère besoin de tes services, retourne donc dans ta cuisine mitonner cette immondice que tu oseras sans doute nommer ragout à tes clients. Ne montre plus ton râble dans cette salle tant que tu n'entendras pas la porte claquer sur les pas de ma sortie. Si tu n'obéis pas, mon visage se penchant sur tes yeux, pourrait bien être la dernière image que tu verras. La cécité, crois-moi, n'est pas quelque chose que tu as envie de découvrir ...

    L'homme en joue, semble indécis. Pendant un instant, Harchi discerne même l'envie de rébellion dans les iris du tavernier. * Oh oui tente, tente donc de nous faire plier. Ca serait si facile Soldat ! Si facile ! * Mais la Folie se lit sur les visage aussi bien que les démons se remarquent dans les yeux des possédés. Et le Dérangeant finit par obtempérer avant que le vieux soldat n'ait eu même le temps de raffermir sa prise sur sa gorge aux veines palpitantes. * Dommage, au retour peut-être ... * Le soldat de nouveau seul reprend l'inspection des lieux. Trouver la raclure sans l'aide de personne est la meilleure chose à faire pour l'instant, surtout s'il a besoin de le conduire ailleurs. Car de la situation, le vieil Homme ne sait rien si ce n'est que le Blond semble s'être fourré dans de sales draps. Anonymat et fuite paraissent être alors la seule échappatoire de ce bourbier.

    Quelques minuscules goutes de sang se notent sur le planché souillé de graisse, de verre, de paille et d'alcool. Et la carcasse fatiguée s'applique à les suivre. Pas de velours, sait-on jamais si le tavernier ne serait pas en train d'écouter derrière sa porte. Au bout de quelques instants il trouve enfin ce qu'il cherchait. Pas la peine de s'annoncer n'est-ce pas ? Le Soldat est normalement attendu. Le chêne craque un peu lorsqu'il est ouvert à la volée. Et apparait dans l’embrasure une silhouette massive, sombre, encapuchonnée. Harchi est arrivé, seul. Le coursier ? Il s'en est occupé.

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