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[RP] J'ai perdu le dos de ma tempérance

Vasco.
Sale période! Entre les nuits sans sommeil à combattre et celles à crapahuter la campagne, le sicilien n'était plus dans son état normal. Il y a deux jours, son groupe de mercenaire avait été intercepté en pleine campagne par les rebelles francs-comtois. Une taupe avait tenté de creuser ses galeries sous les pieds de la Spiritu Sanguis et elle était parvenue en partie à atteindre ses objectifs même si des chausses-trapes avaient été posées autour de lui. Certains de ses compagnons de combat étaient tombés et la chienne campait aux alentours des cerbères hydriques aux abois. Des conciliabules avaient été menés. La décision avait été prise : ils tenteraient de forcer le passage avant que la Fiole Ébrechée ne referme son piège sur eux. Le plan était risqué, ils le savaient. Ne pas agir était tout aussi risqué.

Alors que la nuit était maintenant maître des lieux, plongeant la campagne environnante dans l'obscurité la plus totale, les mercenaires progressaient silencieusement, passant d'un rocher à un taillis, d'un buisson à un arbre. Ils n'étaient pas de taille à affronter l'armée en face d'eux et ils le savaient. De temps à autre, des bruits d'épées qui s'entrechoquaient se faisaient entendre ça et là? Escarmouche? Bataille rangé? Entrainement? La situation n'était pas des plus aisée. C'est à peine si chacun des membres du clan se voyait l'un l'autre. Pire, une purée de pois commençaient en se lever de terre, nimbant les mercenaires d'un halo cotonneux à double tranchant. Certes, ils étaient mieux protégés des yeux de l'ennemi, mais les lignes hydriques et spiritueuses risquaient de s'étirer dangereusement. Pour Velasco, le plus dur était de se taire, éviter de se faire repérer par l'ennemi en prononçant des paroles inutiles.

Lorsqu'enfin, il estima avoir progressé d'au moins trois lieues, il fit une halte. Le groupe se reforma. Les lances se reconstituèrent. On se comptait. On se congratulait. On était heureux d'avoir dupé la chienne. Du regard, le Visconti chercha son Agnesina parmi les mercenaires qui affluaient encore peu à peu. Mais d'Agnesina, il n'en n'eut point. Une ride soucieuse apparut sur le front du sicilien.


- Chiabrena! Ina, où es-tu?

Le flux d'arrivant finit par se tarir. Chacun avait pris une petite pause après ce moment de tension extrême. Les lances étaient prêtes à marcher vers l'objectif final de leur nuit et Ina n'était toujours pas réapparue. Le sicilien allait voir la Dyme, sa cheffe de lance. Il tenta de négocier un délai supplémentaire. En vain. Praséo avait de ordre et elle les appliquait. Elle réussit à convaincre qu'Ina était capable de se débrouiller seule et de les rejoindre au petit matin.

Lorsque le soleil se leva enfin sur la campagne suisse, Velasco était appuyé contre un gros rocher, soucieux. L'inquiétude montait en lui. Personne n'avait vu Ina. Où pouvait-elle bien être?


- Tu n'as pas le droit Ina. Non...Tu n'as pas le droit...

Les scénarios les plus incroyables fusaient dans l'esprit du Visconti. Avait-elle été attaqué par un loup ou un ours? Avait-elle rebroussé chemin pour retrouver Enjoy et Arsène. S'est-elle perdue dans la campagne suisse? A t-elle été accrochée par l'ennemi? Est-elle cachée quelque part, blessée? Ses forces commençaient à le lâcher. La fatigue, le doute, l'inquiétude... Il se sentait inutile ici, perdue aux milieux d'inconnus qu'il fréquentait depuis plusieurs mois pour la plupart d'entr'eux. Il n'était pas à sa place. Il voulait rebrousser chemin, partir à la recherche de sa Corleone. Après tout, ce n'est pas la première fois qu'il discuterait les ordres et ce n'est pas la première fois non plus qu'on lui en tiendrait rigueur. Depuis une semaine, les relations avec Ina n'étaient pas au moins. Il y avait eu cette dispute à propos de son comportement avant la prise de Saint-Claude. Il y avait eu cette aveux qu'elle lui avait fait sur son désir envers Beren de la Fiole Ébrechée et de Lancelot de Bénoic. Lancelot...le mari même de cette chienne à qui ils venaient d'échapper cette nuit. Se pouvait-elle qu'elle s'en fut retournée vers lui? Vers eux? Cette pensée furtive disparut aussitôt de l'esprit du Visconti. En ce matin, l'inquiétude était plus forte que la jalousie. Ses sentiments le poussaient à faire machine arrière. Il n'y avait jamais de bon moment pour cela, mais la disparition d'Ina après toutes ces péripéties tombait vraiment mal. La raison, quand à elle, l'avisait de prendre un peu de repos et de décider de ses actions par la suite. Seul, il n'irait pas loin. La fatigue aurait raison de lui et ce n'est pas donner une sauce sicilienne à manger à une bête sauvage qui aiderait Agnesina. Aussi, le Visconti coupa la poire en deux. Il prit sa plume, rassembla ses idées et contacta l'ensemble des maires des villes environnantes pour savoir si la Corleone n'aurait pas réussi à rallier leur ville.


Citation:

    Campagne suisse, le 6 Avril 1462

    Sieur, Dame,

    Je m'appelle Velasco Visconti, humble commerçant en vadrouille sur les routes suisses. Hier, à la croisée de chemins, j'ai fait la connaissance d'une charmante jeune femme qui s'est présentée à moi comme étant Agnesina Temperance Corleone. Nous avons discuté, échangé. Ce matin, elle a disparu alors que nous avions convenu de faire route ensemble. Je suis inquiet pour elle. Je me demande ce qui a bien pu lui arriver. Aussi, je me tourne vers vous et votre maréchaussée pour savoir si des habitants de votre ville ne l'aurait pas vu passer. Si tel est le cas, pourriez-vous me répondre en utilisant ce présent pigeon?

    Avec mes plus sincères respects,

    Velasco Visconti


Et les réponses ne tardèrent pas...

Citation:

    Salves,

    Je suis navré aucune information.

    Vous pouvez vous renseigner auprès de l'avoyère de Sion et de Grandson.

    Bon séjour
    Gauvin_1er
    Avoyer



Citation:


    Bonjour Vasco.,

    Je n'ai pas eu l'occasion de rencontrer Agnesina Temperance Corleone. Sans doute devait-elle se rendre quelque part en hâte.
    Si elle est toujours présente dans le village, elle vous contactera sûrement pour que vous puissiez voyager avec elle.

    Cordialement.
    Shenkj



Citation:


    Saint-Claude, le 7 avril 1462,

    Messire,

    Je vous conseille fortement de ne point chercher à revoir cette jeune femme, toute aussi charmante qu'elle soit. Vous risqueriez de gros ennuis.

    Elle est actuellement en procès à Saint-Claude pour prise de mairie ainsi que non respect de la loi martiale comtoise.

    Cordialement,

    Mimi Guyader
    San Claudienne


_________________
Vasco.
Ils partirent cinq cents mais par un prompt renfort, ils se virent trois milles en arrivant au port*. Pour la Spiritu Sanguis et les hydres, l'adage aurait plutôt du être inversé: ils partirent trois milles et par un mauvais renfort, il se virent cinq cents en arrivant à bon port. La nuit qui venait de s'écouler avait été plus tranquille. Pas de mauvaise rencontre. Sarani la chienne avait rebroussée chemin et devait désormais errer quelques part dans la campagne nord de Genève. Enfin, leur destination finale se profilait à l'horizon alors que le soleil avait pointé le bout de son museau depuis déjà plusieurs heures. La chasse était terminée. Enfin... temporairement. Le Cerbère avait eu ses trois têtes coupées. Frappée Enjoy Corleone! Frappée Arsène Corleone! Disparue Agnesina Temperance Corleone. Ne restait plus dans le petit groupe qu'Amalio. Mais on ne le disait pas au mieux de sa forme et qui plus est, le Visconti ne s'état jamais rapporté à lui. Il avait toujours pris ses ordres d'Enjoy, d'Ina ou d'Arsène. La Dyme, cette créature étrange que l'on disait féminine et qui pourtant attirait autant le Visconti qu'une taupe en rut, avait souvent été le chef de lance du sicilien. Pourtant, la perception qu'il avait d'elle était différente de celle qu'il avait du tryptique Corleone. Ce n'est pas une question de respect. Ce n'était juste pas pareil.

Les recherches de la veille pour retrouver la trace d'Agnesina n'avaient pas donné grand chose. A l'inquiétude, commençait à se succéder un profonde mélancolie que beaucoup plus tard certains appeleront Spleen. Peu à peu, le Visconti se refermaient dans une sorte de coquille dont il espérait qu'elle allait le protéger contre les agressions répétés de la destinée ces derniers temps. Dispute, réconciliation, dispute, rapprochement, disparition. Les coups donnés contre les fils de trâme et de chaîne qu'ils avaient formés étaient fréquents et puissants. Le tissu s'était effiloché mais il n'avait pas encore cédé... pour l'instant.

La nuit dernière avant que les Spiritu hydreux ne se remettent en marche, il était tombé raide mort dans le sommeil, comme ça, le long du chemin, en récitant sur un ton monocorde une litanie de noms de personnes dont il désirait désormais aprement la mort : Beren de la Fiole Ébrechée, Lancelot de Bénoic, Sarani de la Fiole Ébrechée, Rastignac**. Son sommeil ne fut guère reposant. Dans ses cauchemars, le gueule ouverte de la Chienne, la bave coulant entre ses crocs acérés, arrosait son visage des effluves fétides de son haleine de mort. Le visconti se trouvait sans cesse adossé à une impasse, dans l'impossibilité d'échapper au monstre. Et au moment où elle allait planté sa machoire dans son cou pour la lui déchirer, le rêve revenait inexorablement au début. Il tournait ainsi dans une sorte de boucle infinie. Encore et encore. Mais lorsque le disque réussit enfin à sauter de sillon, lorsque la Chienne arracha son cou, se faisant alors inonder par des gerbes de sang sicilien, le Visconti dut faire face à une horreur plus indicible encore: les traits de Sarani déformés par la haine mutèrent. Ils passèrent respectivement à Beren, à Lancelot puis à...Agnesina Corleone!

Le jour qui suivit, Velasco eut beaucoup de mal à chasser ces images cauchemardesques de sa conscience. Elles étaient tenaces. Elles lui avaient semblaient si...réelles. Ne pas savoir ce qu'était devenue Agnesina venait le torturer jusque dans ses entrailles. Il n'avait pas faim, buvait à peine. Il avait perdu du poids depuis une semaine. Ses traits étaient marqué par les soucis et la fatigue. Ce jour, dans une taverne de la ville qu'ils avaient rejoint, il avait décidé de changer de tactique pour retrouver son Ina...


Citation:

        Avis de recherche




    Que cela soit su de tous,

    Recherche Agnesina Temperance Corleone. A été vu la dernière fois sur la route entre Genève et Fribourg, à environ 6 lieues au nord de Genève dans la nuit du 5 ou 6 Avril 1462.

    Personne de petite taille, cheveux noirs et lisses la plupart du temps portés en chignon, teint   blanc, yeux verts. 

    Au moment de sa disparition, portait une cape brune, des braies marrons, une chemise ocre, bouclier noir et épée à la ceinture. 

    Pour toute information, contacter Velasco Visconti en envoyant un pigeon à destination du lieu-dit de Renens, au croisement des routes Genève-Fribourg-Grandson.


    Fait le 7 avril 1462.






Citation:

    Campagne Suisse, le 7 Avril de l'an MCDLXII

    Dame Mimi Guyader,

    Merci pour votre réponse. Vous m'apprenez là de bien inquiétantes nouvelles. Le non-respect d'une loy martiale ne m'inquiète pas tant que cela. Après tout, ce ne sont là que quelques tracas d'ordre administratifs dont je suis habitué et avec lesquels il me faut jongler. Vous ne pouvez imaginer combien les loys martiales nous coûtent cher à nous pauvres marchands en nous faisant perdre un temps fou. Vous le savez comme moi : le temps c'est de l'argent. Moi-même, il m'arrive parfois de ne pas respecter les loy martiales quand des impératifs d'ordre économiques ne me donnent pas le choix. Après tout, à chaque de mesurer son risque, de peser le pour et le contre. La plupart du temps, faire 1 ou 2 jours de prison est plus rentable que de rater un lucratif contrat commercial. L'économie s'opposera toujours à la sécurité, c'est ainsi.

    Par contre, ce que vous me dites ensuite à propos d'Agnesina m'inquiète bien plus. Une pilleuse de mairie? Elle à qui j'aurais donné le très-Haut sans confession? Elle dont le regard froir et enjôleur m'a fait vacillé dès les premiers instants? Elle à qui j'ai rêvé de voler un baiser à la commissure de ses lèvres? Elle dont la voix est si ensorcelante? Une pilleuse de mairie? Dites-moi dame, vous ne m'avez pas répondu: est-elle encore à Saint-Claude? Si oui, retenez-là bien: Je lui ai confié une forte somme d'argent pour la mettre à l'abri des pillards qui rôdent autour de Genève. Certains soirs, j'entendais les grognements sourds et infects des chiens qui réclamaient leur victime. Je n'étais guère rassuré. J'ai préféré mettre mes oeufs dans deux paniers différents voyez-vous. Mais là, avec sa disparition et ce que vous m'apprenez sur elle, j'ose croire que mon argent ne s'est pas envolé. Je suis inquiet cependant. Pouvez-vous me tenir informé des suites de l'affaire?

    Respectueusement,



    P.S : Ci-joint une affiche de recherche que j'ai réalisé. Pouvez-vous la diffuser dans toutes les villes franc-comtoises? Avec tous mes remerciements...


Et plus tard dans la journée...

Citation:

    Re bonjour messire Visconti,

    Je viens de vérifié et elle est effectivement encore enregistrée dans une auberge de la ville. Elle est donc encore bien à SC.

    Je ne puis vous assurer que je la retiendrai, mais j'ai affiché votre avis de recherche en gargote.

    Cordialement,

    Mimi Guyader.


* Inspiré du Cid de Pierre Corneille
** Inspiré des habitudes de Arya Stark dans le Trône de fer de G.R.R Martin.

_________________
Vasco.
Quelques temps plus tard, au sortir d'une discussion en taverne qui avait rendu fou le sicilien, une corbeau, oiseau de malheur, part en direction de Genève.

Citation:

    A toi le fils de chien qui a osé faire couler le sang des Corleone,
    A toi Serguei, de l'armée des "Loups Gardiens de Saint Claude" dirigée par la chienne Sarani


    Ainsi donc le chiot s'est égaré des jupons de sa chienne de mère et il est venu faire joujou là où il n'aurait jamais dû mettre les pieds? Tu ne me connais pas encore Serguei, mais tu vas apprendre à me connaître. Déos n'a pas voulu que je sois là lorsque tu as commis ton forfait? Nous allons donc rattraper un petit peu le temps perdu. Mon nom est Velasco Visconti. Je suis né un beau matin d'été à Syracuse sur les côtes Méditerranéenne. Ma mère est une catin qui offre ses services dans le port de la ville. Quand à mon père, c'est un marin quelconque qui y a fait escale. Peut-être est-il grec, ottoman ou égyptien. Je n'en sais rien et je m'en fous. J'ai d'abord été mousse, puis marin, puis capitaine de mon propre navire. J'ai vadrouillé d'est en ouest et du nord au sud de la Méditerranée. J'ai commercé, fait de la contrebande, et quelques autres professions de ce genre plus ou moins payante. Et puis les aléas de la vie m'ont envoyé retrouver la Spiritu Sanguis. Ceux d'un évêque stupide qui ne connaissait rien à l'Aristotélisme m'a fait passer du côté de la Réforme.

    J'étais à Poligny quand la Spiritu Sanguis a dû faire payer à la Franche-Comté le prix du sang pour avoir touché à des enfants. J'ai été à Saint-Claude quand la folie de cet Aristokolès de malheur a plongé toute la Franche-Comté dans ce bourbier dont elle ne peut sortir qu'affaiblie. Tout ça pour quoi? Pour que quelques nobles en manque d'action puissent se dégourdir les sens à Genève? Pour qu'Aristokolès puisse encore enfler un peu plus sous l'effet de son orgueil démesuré.

    Tu dois bien te demander, Serguei, pourquoi je te raconte tout ceci n'est-ce pas? Tu es soldat. Tu te doutes peut-être que la meilleure façon de vaincre son ennemi, c'est de commencer par bien le connaître, n'est-ce pas? Je te rappelle mon nom Serguei. Je suis Velasco Visconti, et toi tu n'as pas le droit de m'appeler autrement qu'ainsi.

    Tu te rappelles de la nuit du 5 au 6 avril? Tu te rappelles avoir porté atteinte à l'intégrité physique d'Agnesina Temperance Corleone? Tu prétends encore et toujours que ce sont les mercenaires qui viennent provoquer les francouards? Que faisais-tu donc dans notre campement? Écoute bien cette litanie : Beren de la Fiole Ébrechée, Lancelot de Bénoic, Sarani de la Fiole Ébrechée, Serguei de je ne sais quoi, Rastignac. Cette liste, c'est ma liste de morts. Je n'aurais de cesse de te poursuivre pour ce que tu as fait cette nuit-là à Agnesina. J'enverrai ta tête rouler aux côtés de ta chienne de maîtresse. Je prendrais le temps qu'il faut. Un sicilien sait faire preuve de patience pour ce genre d'action. Qui plus est, il a la mémoire tenace, crois-moi.

    J'étais à Poligny. J'étais à Saint-Claude et je serais en face de toi pour les défaites à venir de la Franche-Comté. Sarani a joué? Sarani va perdre et elle entraînera dans sa chute tous ceux qui ont eu la folie de la suivre.

    Bonjour chez toi Serguei!

    Fait le septième jour d'avril de l'an MCDLXII




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Serguei.novgorod
Il observe les lames confisquées à Elwenn et Agnesina au prix de deux corps à corps successifs, il les soigne et les bichonne tour à tour, alors que le message lui parvient. Amusé, un petit sourire en coin mauvais pare ses lèvres, alors qu'il répond à son tour, et son message de partir à destination de Vasco... Retour à l'envoyeur, mérité, et bien senti. A la cire qu'il a piquée à Dieu sait qui, il a scellé, en plus du pli, une longue mèche nouée d'un ruban... Une des deux qu'il a ôtée à Agnesina, après leur... échange de coups - le dernier, disons.





Mon Grand,


J’ai reçu ton mot doux. Je me demande pour qui tu te prends, Gamin, à écrire à Sergueï Novgorod et à cracher sur mon nom au point de ne pas même savoir l’écrire.

Je ne suis pas un soldat, je suis un mercenaire. Je ne suis pas un soldat, je suis un exécuteur. J’ai tué ma première putain à la Cour des Miracles, sans doute ta chiennasse de mère, alors que tu devais encore pisser dans tes braies. J’ai égorgé mon premier loustic que t’avais sûrement pas encore deux dents sur les genvices. J’ai éviscéré des tas de gens, j’ai pris des mairies, des chateaux, j’ai fait partie de ceux de Thoros, que t’apprenais encore à écrire.

Je n’ai pas peur de toi.

Avoir frappé ta petite greluche, je m’en souviens à peine. Je me rappelle de ses cris, du bruit de ses os, des gémissements sous les coups, ouais. De son visage ? Plus trop, vu dans l’état qu’il était après mon passage. J’avais commencé quelque chose la veille, je l’ai poignardée et j’ai joué de la botte sur ses côtes pour la décrotter. J’ai senti sa peau craquer sous l’acier, j’ai senti sa cheville céder sous ma semelle comme elle a dû sentir mon nez casser sous son front… C’était de bonne guerre.

Tu as tort de m’appeler par mon nom, et de me donner le tien… Je m’en fous. Je tape sur des corps, j’en pourfends d’autres, ce ne sont que des silhouettes, même pas des êtres. Ils n’ont pas de noms, ces tas de chair et d’os dont je me charge. Je ne me souviens pas plus de ton nom qu’à la première lecture de ton pli, parce que je ne m’en soucie pas.

Par contre, touche à Beren ou à Sarani, et je te fais la même chose qu’à tes deux copines. J’ai toujours leurs lames, d’ailleurs… Un p’tit souvenir d’une rencontre fortuite… De deux, pour la tienne. Je l’ai saignée la seconde fois avec son propre acier, ton Agnesina ; ah, le doux bruit du liquide qui se répand dans un geignement sonore…

On achève bien les chevaux… Pour les femelles, ça ne vaut pas même le coup.

Je te conseille d’aller gémir sur l’épaule d’un autre, de raconter ta p’tite vie, tes origines de troufion dans l’giron de ta putasse de mère à un autre que moi… Ca m’intéresse pas. T’es qu’un bleu, grand. M’appeler soldat était une erreur.

Tu ne sais pas qui tu as en face de toi. Un nom ne fait pas tout, et pourtant, de Sergueï et Novgorod, c’est le patronyme qui devrait compter le plus à tes yeux.

Apprends, grandis, et pointe-toi devant moi. Si je suis magnanime, je m’occuperai de toi plus vite que je me suis chargé de ta copine… J’ai pris mon temps, avec elle. Elle, elle n’oubliera pas mon Nom.


Le Novgorod.

PS: J'espère que mon p'tit cadeau te fera plaisir, Gamin.
Vasco.
Pour le Visconti, les jours se suivent et ne se ressemblent pas. Après l'ouragan Saint-Claude, un moment de repos s'était avéré nécessaire. Personne n'est pas capable de tenir au front Ad Vitam Eternam sans prendre un répit de temps à autre. Qui veut aller loin ménage sa monture dit l'adage. Les chevaux s'épuisent, les hommes fatiguent, les armes s'usent. Une armée perpétuellement sur le qui-vive est une armée qui court à sa perte. Rien de mieux pour accroître le pourcentage de désertion. Sur un bateau, on parlait de mutinerie. Sur terre, on évoquait le risque de dislocation d'armée.

Ce soir-là, le Visconti était tombé de sommeil. Pour un tas, les insomnies dont il souffrait avaient lâché du lest. En soirée, il avait eu une rencontre fort intéressante en taverne. C'était le genre de discussion de deux âmes lasses qui ont envie de s'ouvrir aux confidences comme pour mettre un baume sur leurs blessures. Des souvenirs avaient été évoqués. Ce soir-là, il s'était endormi enrichi de la connaissance du passé. Avant de fermer les yeux, il avait repris sa petite comptine préférée : la ronde des morts. Mais après les révélations du jour, il avait apporté une légère modification. Légère dans la forme, d'importance sur le fond. Au chant du hibou, la litanie de noms s'égrenaient inexorablement : Lancelot de Bénoic, Sarani de la Fiole Ébrechée, Serguei de Novgorod, Rastignac


Citation:

    A toi, Sergueï de Novgorod à l'égo démesuré
    De moi, Velasco Visconti


    J'ai un instant pensé commencer cette lettre par "Bonjour SergueÏ" mais pour être honnête, que tu passes un bon jour ou pas, il faut bien que je t'avoue que je m'en fiche. J'ai imaginé débuter par "Cher Sergueï" car après tout tu m'es cher...en attendant que je puisse passer mon épée au fil de ton corps. Et puis, quelqu'un m'en a dissuadé. Alors, je commencerai simplement par ton prénom. C'est neutre, c'est fade, ça passe partout. Ça ne nourrit pas ton ego. Quoi? Tu ne sais pas ce que Ego veut dire? Eh bien, après avoir tué ta catin, je te conseille de passer dans une bibliothèque pour y lire quelques écrits des penseurs grecs de l'antiquité. Ça ne pourra que te faire du bien. Tu verras, tu te sentiras mieux après. Aussi...

    Sergueï,

    Avant donc si j'ai bien compris ton premier paragraphe, tu as été. Ça te fait quoi exactement de ne plus être? Tu sais, la vieillesse, ça rattrape tout le monde un jour où l'autre. Il ne faut pas s'en faire pour ça. J'ai vu que tu avais un curriculum vitae impressionnant! Nul doute que tu vas laisser des traces de ton passage dans l'histoire du coin. Tu veux qu'on détaille ensemble? Tu sais, si ça peut te remonter le moral...

    Alors, on commence par tueur de putain. Pas mal ça... Très intéressant comme détail. Et elle t'avait fait quoi? Elle a refermé ses dents de louve au moment où elle te faisait atteindre l'extase? C'est pour ça que tu l'as tué? Très courageux de ta part! Et tu as fait quoi du bout qu'elle a croqué? Elle l'avait avalé? Tu es allé le rechercher dans ses entrailles que tu avais mises à l'air? Là, j'admets que tu as une longueur d'avance sur moi. Je n'avais jamais trouvé un intérêt quelconque à tuer une pauvre catin... même une vieille!

    Ensuite, tu dis donc que tu as égorgé un loustic? Il t'avait fait quoi? Pas salué quand tu passais parce qu'il était occupé à labourer son champ j'imagine? La Franche-Comté est célèbre pour ça il parait : pour ceux qui monopolise le pouvoir et impose leur façon de penser à la population qu'ils prétendent défendre. Dis-moi Sergueï, tu étais où quand Poligny, Saint-Claude, Pontarlier ou Luxeuil sont tombés? Tu égorgeais un paysan ou une catin?

    Enfin, ce qui visiblement sont tes plus grands faits d'armes. Tu as pris des mairies? Bravo! Je me doutais bien que sous ses airs de nunuches pas satisfaite au lit, Sarani ralliait des brigands et des tueurs. Ceux-là même qu'elle pourfend de sa verve, ceux-là même qu'elle décrit pour polir le côté propre sur soi de sa personne. Au final, elle s'en fout comme tout le monde n'est-ce pas? Elle n'a pas plus de mépris pour les brigands que pour le reste de la population sage et travaillante. Elle se moque de tous. L'important, c'est qu'elle puisse s'enorgueillir de passer pour le sauveur de la Franche-Comté et de l'Aristotélisme. S'enrichir, se couvrir de gloire et se gausser de sa population en lui disant : sans moi, vous n'êtes rien.

    Tu sais, ces derniers jours, j'ai beaucoup appris sur toi. En fait, beaucoup et peu parce que ce sont toujours les mêmes faits qui reviennent sur toi. Tu faisais partie de ceux de Thoros? Moi je fais partie de ceux d'Enjoy Corleone! Eux sont des personnes dignes de mention. Toi, comme moi pour l'instant, nous ne sommes rien. Des faire-valoir! On m'a dit que tu n'étais qu'un suiveur sans prétention. Dans les armées, il y a les soldats et les capitaines. Sur les bateaux, il y a les moussaillons et les capitaines. Ça va moussaillon? La tête ne te fait pas mal? Elle n'a pas trop enflée? Quoi? Tu préfères que je t'appelle caporal? Pas possible! Quand as-tu eu ta nomination? C'est récent? Toutes mes félicitations! On fête ça ensemble? C'est toi qui paie?

    Ah au fait, comment va ta soeur? Et ton frère? Il se dit en Franche-Comté que Natasha a préféré s'ôter la vie plutôt que d'avoir un frère comme toi? Pourquoi tu ne me l'as pas cité dans ton curriculum vitae cette victime-là? Sadnezz Corleone fut régicide. Toi, fratricide. Remarque...Chacun fait ce qu'il peut n'est-ce pas?

    Tu vois, j'ai compris quelque chose de ta lettre et je vais t'accorder une faveur: je ne vais pas toucher à Beren. J'en ai appris de bonnes sur lui, l'homme aux victoires faciles, celui qui ne sait prendre aucun risque, le gagne-petit qui a peur de perdre gros. J'ai toujours cru qu'il avait un sens de l'honneur. J'ai appris hier que je m'étais trompé. Alors non, lui ne vaut même pas la peine que je le tue: moi, je ne tue pas les catins et les paysans. J'ai bien plus d'ambition que ça. Quant à Sarani, patience l'aïeul. Patience...Son tour viendra.

    Quand à Ina, le terme de..."copine" est fort peu approprié. Mais je comprends mieux pourquoi tu l'utilises après avoir ouï tes expériences amoureuses. Je ne peux t'en vouloir pour ça. Il faut de tout pour faire une société : des ratés, des moins-que-rien, des couards, des personnes sans ambitions. Si, si, il en faut. En ce qui me concerne, je suis jeune et j'ai encore toute la chance de prouver ce que je vaux. Pour toi, les occasions de gloire sont derrière toi désormais. Je te plaindrais si j'en avais l'occasion mais je ne suis pas sûr d'en avoir envie.

    Repose-toi l'aïeul! Il parait que votre glorieuse armée a vaillamment défait un voyageur la nuit passée? C'est ce que colportent les rumeurs locales. Voilà une ligne de plus à ajouter à ton glorieux curriculum vitae, tout à fait dans la droite ligne de tes exploits passés. J'espère que cela ne t'a pas trop essoufflé.

    Bonjour chez vous l'affreux!



    P.S : Merci pour ton cadeau. Crois-moi, en cette période, il est apprécié à sa juste valeur. Et là, il n'y a pas d'ironie dans ma phrase.

    P.P.S : dis-moi Sarani la ribaude, est-ce que tu vas la tuer aussi si elle referme ses crocs sur toi au moment où elle te fait atteindre l'extase?

    P.P.P.S : Les deux petits points sur le I et auxquels tu sembles tant tenir signifie-t-il que je doive te planter deux poignards dans le cœur pour que tu sois heureux?

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Serguei.novgorod
Touché. Cette raclure l’avait touché, en tapant à deux endroits où il ne fallait pas taper. Première chose, parler de Natasha… Coup bas, s’il en est. Aborder la relation avec sa sœur, dont personne à part eux deux ne pouvait véritablement saisir la teneur, c’était mal placé, et mal venu, mais, il fallait bien l’admettre, c’était de bonne guerre suite aux propos-mêmes de Sergueï.

Ensuite, que l’homme aborde son passé, et son présent, était également problématique à Sergueï.

Repenti, il avait délaissé son passé, mais avec lui, ses compétences et un certain savoir faire. En outre, à observer son visage abîmé sur le reflet du miroir hérité de ses années fastueuses de prince de Novgorod, à voir les ravages du temps sur son faciès, il a délaissé le parchemin. Le Slave l’a laissé gésir là, posé sur une couche sommaire à côté de lui, à même la toile qui lui sert de drap alors qu’il est assis, coudes appuyés sur ses cuisses, à songer au message du pli reçu.

Il n’est pas aïeul comme l’a affirmé le gringalet qui semble prendre un certain plaisir à lui écrire, quand lui, lui porte un désintérêt certain, mais enfin… Il a en partie raison, l’inconnu. Le passé glorieux de Sergueï est derrière lui. Son passé glorieux de brigand, plutôt.
Certes, son présent, auprès de femme, enfants et amis, était paisible et heureux, mais il est vrai qu’il avait déjà publiquement regretté de n’avoir plus l’aura qu’il possédait naguère, et qu’on ne le salue plus avec la déférence due à son rang, dans le milieu, milieu qu’il avait d’ailleurs quitté de son plein gré, par la petite porte.

Les azurs dessinent la trace violacée qui lui barre le nez et pare celui-ci d’une boursouflure noirâtre en léger relief, comme lisse ; un soupir s’échappe alors de ses lèvres ; c’est bien la première fois qu’un ennemi lui aura mis le visage dans cet état. Et le bras, l’épaule ; elle a planté la lame droit, verticalement, lacérant sans doute tendons et nerfs au passage, la garce. Il observe le bandage dans la mire d’une onde où il escompte laver un peu son corps meurtri, couvrir une partie de son torse musculeux, ceindre l’épaule et plaquer son bras à son corps, dans un râle guttural de colère. A te voir là comme ça, Sergueï, qui pourrait croire encore à tes rêves d'avant-hier de porter des couronnes, à te voir là comme ça, qui pourrait entrevoir que tu fus jamais fier, qu'avant d'être aux abois, tu narguais les automnes de ta beauté solaire ?*

Baaaah, ça r’viendra, pas vrai ? C’est qu’des bleus, des hématomes à l’ego, et laissons croire l’p’tit qu’tu songes qu’à toi, ça le détournera d’l’idée d’toucher aux gosses ou à ta femme. Une fois les stigmates du combat effacés, tu r’deviendras l’dieu solaire dans toute ta splendeur, à la beauté féline, au visage buriné de soleil, aux allures léonines. D’aucuns médiront, mais combien de femmes, dis, combien, seront tombées dans tes filets et y tomberaient à nouveau, si tu ne te complaisais pas à te rouler dans ceux de Lyson de ton plein gré, encore et encore ?

Le moral revient, avec un sourire fin, celui qui pare habituellement ses lèvres, et nargue l’interlocuteur d’un rictus amusé, moqueur, hautain. Un pied-de-nez aux penseurs, un coup de butoir aux idées reçues, un franc signe d’amitié, ce sourire-là, chacun y pourra y lire ce qu’il veut, mais seuls quelques-uns en possèdent les secrets.

Ah, c’est comme ça, hein ? Que croit-il, le mouflet ? Que tous ses « je vais prouver » atténuent les « j’ai déjà fait » du Slave ? Que tous ses « j’ai la vie devant moi » à peine dissimulés repoussent l’inévitable échéance qui agira comme un couperet aux ambitions du jeunot ? Que croit-il, l’imbécile ? Que sa candeur excuse l’absence de respect à un homme autrement plus expérimenté ? Allez, répondons donc à cette buse, et qu’on en finisse.







Machin,


J’ai absolument rien à foutre de tes hésitations quand tu m’écris, notamment celles au sujet d’la façon que dont tu pourrais bien m’appeler. D’abord, parce que j’ai autre chose à foutre que d’te lire palabrer à tord et à travers, ensuite, parce que tu n’dois pas vraiment savoir lire, mon nom étant Sergueï Novgorod et pas Sergueï DE Novgorod. Enfin, parce que j’y vois tout simplement aucun intérêt. Encore une fois, j’me fous de ton nom, je n’m’intéresse pas aux identités. Qu’tu t’intéresses à la mienne, ma foi, c’est ton problème.

Je me suis d’abord demandé si ta lettre était dictée par la stupidité, ou par ton absence de dépucelage. Au final, j’en ai conclu que tu n’es peut-être pas un imbécile, peut-être pas non plus niais et vert, mais qu’au final, tu es jeune et immature ; pas les plus glorieux de tous les traits énoncés, n’est-ce pas?

Première chose : ne jamais sous-estimer qui l’on a en face de soi. Ton paternalisme est mal placé, puisque d’une part, considérer que je suis stupide me fait douter de tes propres capacités intellectuelles, et que d’autre part… Ah, mon pauvre ami, tu me désespères. Tu aimes t’écouter parler, à ce que je vois. De là à faire les questions et les réponses comme tu divagues à qui mieux-mieux et à m’obliger à être le spectateur blasé des élucubrations de ton cerveau, c’est autre chose. Je me demande si tu t’amuses à jouer ainsi à converser seul régulièrement ; personnellement, je n’y vois, encore une fois, aucun intérêt. T’as tout d’même l’air complètement con à parler tout seul, j’me dois d’te l’dire. Quant à aller fouiner chez les Grecs, je te laisse le faire, il me semble que niveau préciosité, t’es bien placé pour aller mirer tes statues d’mecs à moitié nus tout seul, l’ami.

Deuxièmement, croire que j’ai quelque chose à foutre de l’avenir de la Franche-Comté, c’est une nouvelle erreur. Où étais-je quand Poligny, Saint-Claude, Pontarlier ou Luxeuil sont tombés ? J’en sais rien, et je m’en branle. Je pense bien que je m’occupais de mes mômes et de ma femme. P’t’être bien que j’fabriquais un jouet aux p’tits, que j’embrassais ma femme, ou qu’on s’promenait en famille, va savoir. Cela dit, je ne vois pas en quoi ce que je fais de mes journées t’intéresse. Mais, au passage… Toutes les personnes que j’ai rayées de la circulation, c’était pas des enfants d’chœur. J’vois pas pourquoi j’ajout’rais quoi qu’ce soit à c’sujet, j’te laisse faire des propres idées à c’propos, t’as l’air bien parti pour occuper tes nuits à imaginer des circonstances à c’que j’peux faire d’ma vie. Crois c’que tu voudras, d’ailleurs, j’ai pas à m’justifier auprès d’la bleusaille des Corleone. La vérité, c’est qu’j’aime vous cogner, sans raison. N’est-ce pas la plus belle justification que de n’en avoir aucune ? C’est l’exacte vérité ; j’me fous d’vos idéaux, j’en ai pas. A part, p’t’être, c’lui d’sentir éclater sous mes coups les os des tiens, comme ceux d’Agnesina, comme ceux d’Elwenn. Et d’les voir gésir, et d’les entendre gémir d’douleur. Autrement, non, rien. C’est l’calme plat dans l’horizon d’mes grands idéaux comme ceux qu’vous prétendez avoir, au lieu d’avouer que c’que vous voulez, c’est qu’les gens tremblent à l’idée d’entendre votre nom. C’est quoi, l’tien, d’jà ?

Troisièmement, j’vois qu’t’as joué d’curiosité à mon sujet, et qu’ça t’as fait partir sur un ch’min qu’t’aurais pas dû prendre. T’sais rien d’moi, encore moins d’ma famille. J’pas tué ma sœur, triple buse. On était brouillés, et c’qui est arrivé est arrivé, mais j’crache pas sur ma p’tite sœur, contrair’ment à c’que j’entends à droite et à gauche. Mon frère, c’t’un autre débat. T’as osé dire qu’c’est moi la cause d’la mort d’ma sœur, mais tu t’prends pour qui, Machin ? T’es un p’tit arriviste, à c’que j’ai compris, et t’as d’l’ambition, aussi, j’vais t’faire une confidence… Ou t’donner un conseil. Deux, en fait. Déjà, si jamais j’l’avais tuée, j’aurais été régicide aussi, tête de nœuds. Tu connaissais à l’évidence pas Natasha, pour pas réaliser qu’elle était royale à mes yeux. Ensuite, m’parle pas d’ma sœur, jamais. Et plus jamais n’oses dire qu’c’est moi qu’ai causé sa mort, espèce de crétin.

T’as eu c’que tu voulais, on règlera ça en face en face. Et quand j’t’aurai au bout d’ma dague, Machin, j’te f’rai ravaler ça. P’t’êt’ même qu’j’irai voir moi-même quels bouts t’as avalé d’ces Grecs dont tu parles en t’référant à eux. Peut-être même que j’te parle alors qu’t’en as la bouche pleine, fils d’catin. J’m’arrang’rai, tu m’lis bien ? J’m’arrangerai pour qu’à l’heure H, mon Grand, à l’heure H, et où ça s’f’ra, la lice d’vienne spectacle…

J’t’ai même composé c’te petite mélopée, mais j’dois bien à présent te confesser… Toutes ces vies évoquées, j’les ai toutes révoquées**...

*A l'heure H
Au pays Corleone
A l'heure H
Je camperai l'icône
Qu'on s'arrache
Dégainez, Corleone
J'irai cash
Donner du rêve aux félonnes

Rosse, rosse
Rosse et rosse
Foule folle
Halles, lices
En liesse

Même les nonnes
Assailliront la scène
Presque aphones
Quand l'heure
Quand l'heure
Quand l'heure H aura sonné

A l'heure H
Au panthéon des idoles
On m'arrachera
A la une AKPonne
A l'heure H
Fin des ultimatums
Alors braquez, les lâches,

Come on !

Rosse, rosse
Rosse et rosse
Foule folle
Halles, lices
En liesse

Même les nonnes
Assailliront la scène
Presque aphones
Quand l'heure
Quand l'heure
Quand l'heure H aura sonné

Elysées, Champ', tapis rouges
et gardes
Elysées, Champ', tapis rouges
et gardes


Même les nonnes
Assailliront la scène
Presque aphones
Quand l'heure
Quand l'heure
Quand l'heure H aura sonné

Même les nonnes
Assailliront la scène
Presque aphones

Quand l'heure
Quand l'heure
Quand l'heure H aura sonné !*


Sergueï Novgorod.

PS: Je te laisse fantasmer sur Sarani tout seul, ça ne me concerne pas.
PPS: A ta place, je fermerai ma gueule au sujet de Beren, que tu connais pas davantage que moi.
PPPS: Oublie pas d'aller te faire mettre, saligaud.




*Archimède, A te voir
**Archimède, Eva et les autres
***Archimède, A l’heure H, largement modifiée
Vasco.
Le fil du temps avait repris son cours normal pour le Visconti. Presque trop normal. Sur les bords du lac, le sicilien commençait à s’ennuyer ferme. Pour combler son manque d’action, il écrivait, écrivait, écrivait encore. Les préparatifs du mariage d’Elvy avaient occupé une bonne partie de son temps le jour. Le soir, c’est vers la Corleone qu’il faisait glisser sa plume. Pourquoi le soir? Parce que cela lui rappelait toutes ces nuits où il était rentré à l’improviste dans sa chambre pour lui poser une question pertinente ou non, urgente ou pas. Pour peu, le Visconti en arrivait presque à se perdre dans toute la correspondance qu’il entretenait. Un soir, il tomba sur la lettre de Sergueï. Le lui avait-il répondu? Non, il lui semblait que non. Du haut des remparts de Grandson, le sicilien se remémora un instant les paroles du mercenaire. Il esquissa un sourire en apprenant que l’homme était père. Il se demanda si lui aussi avait dû confier son premier né à un tiers pour qu’il en fasse son éducation… ou s’il avait préféré laisser les chats en liberté. Comprenne qui pourra. L’esprit du Visconti était parfois parsemé de bizarreries de ce genre. Il constata avec regrets que l’homme plantait une insulte toutes les deux phrases. Bah! Au moins, vu que le mercenariat, ça eut payé…mais ça paie plus, Le Novgorod pourrait toujours se reconvertir en insultéiculteur.

Dommage que le temps de la bataille soit si proche. Il commençait à bien l’aimer le Novgorod avec toutes ses contradictions et tout le narcissisme qui l’accompagnait. Dommage aussi qu’il ait touché à Agnesina. Ça, jamais Velasco ne pourrait le lui pardonner. Ah! Et puis, qu’est-ce qu’il pouvait bien lui offrir en cadeau? L’autre lui avait donné une mèche de cheveux d’Ina. Le Visconti n’était pas spécialement ce que l’on appelle un courtisan. Le miel des compliments ne coulait dans sa bouche que lorsqu’il s’agissait de duper. Mais cette mèche en cet instant présent, c’était elle. Avec ses lettres c’est tout qu’il avait d’elle et il était indéniable que l’absence de la Corleone le rendait mélancolique même s’il ne l’avouerait jamais.

Quand au Novgorod, il resterait sans doute un mystère jusqu’au bout pour Vasco. Le sicilien avait du mal à définir clairement son ennemi. Il percevait trop de flou dans ses affirmations. C’était un peu comme les ivrognes louvoyant d’un bord et de l’autre à la sortie de la taverne. Quand à Lui, Velasco Visconti, avait-il envie que son nom soit adulé et respecté de tous dans le monde des brigands et des mercenaires? Ceux qui sont connus s’attirent irrémédiablement des problèmes : de la maréchaussée, de la justice, de la noblesse, des autres truands qui voudraient alors devenir Visconti à la place du Visconti, des jaloux tout simplement. Pourtant Sergueï avait raison: il n’était rien. Il ne connaissait personne et n’était connu de personne. Il n’avait pas de nom, et même si part certains côtés cela l’arrangeait, il ne pouvait renier ses racines siciliennes…et tout l’orgueil et la fierté qui vient avec. D’ailleurs, les envies d’Ina pour Beren ne venaient-elles pas de là? De la notoriété de l’avocat? De sa réputation sulfureuse? Qui a envie de toucher la sainteté quand on peut flirter avec l’interdit? Hum? Si jamais le nom du Visconti était craint et respecté comme pouvait l’être celui de Corleone, alors jamais Agnesina n’aurait eu le moindre désir pour Beren ou Lancelot. Jamais! Qu’importe! Tout ça ne regardait pas vraiment le Novgorod. Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne, il partirait et il se mettra à ta poursuite Serguei. Vois-tu, il sait que tu l’attends. Ce soir par contre, il veut encore faire distiller dans ton esprit la haine que tu peux ressentir à son encontre. Et en attendant, il n’a toujours pas trouvé quoi t’offrir en cadeau


Citation:


    A toi Sergueï de Novgorod. Le reste de tes titres ou fonctions n'a strictement aucun intérêt dans le différend qui nous oppose.

    Je pense que tu te méprends sur mes intérêts. Que tu m'estimes ou pas n'a pas d'importance ici. Tu peux penser ce que tu veux de moi, tu as encore ce droit. Je ne suis pas venu pour me frotter à ta jambe, la gueule ouverte attendant que la mémère veuille bien me lancer sa gâterie. Ma renommée future ne passe pas par toi Sergueï tout comme je n'ai pas besoin que tu saches ce que j'ambitionne. Tu sais, il faut remettre cette correspondance dans son contexte, ne pas oublier que tout ceci ne sert qu'à une chose: que tu comprennes pourquoi ma lame s'enfoncera profondément dans tes entrailles quand nous nous rencontrerons. Tu es mon débiteur. Mais comme je vois que tu manques d'activités dans ta trépidante vie de père de famille, et que même si tu ne n'intéresses pas à moi, tu continues à m'envoyer moultes lettres d'amour toutes plus enflammées les unes que les autres, alors jouons. J'ai un peu de temps avant la marche de cette nuit et il me reste encore quelques gouttes d'encre à consacrer à ta gloire passée.

    Ainsi donc, tu t'encombres d'une famille, toi, l'ancienne Charogne comme dirait celle que tu sers? Qu'est-ce qui t'a motivé à en avoir? Devoir montrer aux autres que tu étais capable d'honorer une femme dans ta couche? Poursuivre ta lignée? Tu as cédé à un chantage de ton aimée? Tu te dis qu'un jour quelqu'un pensera à t'annoblir pour service rendu à la Franche-Comté et que donc, il te faut des mioches pour étendre ton pouvoir. Tu veux jouer au jeu des trônes.? C'est ça? Oui, je sais, tu vas me dire que je suis trop curieux. Certains disent que la fourmi n'est pas prêteuse et que c'est là c'est son plus gros défaut. Moi, je suis curieux de connaître ceux que je fréquente. Encore que dans ton cas, fréquenter est un bien grand maux. Oui, oui, j'ai bien écrit maux.

    Tu veux que je te dise: tu es un homme bien étrange: d'un côté tu te décris comme mercenaire bestial et sanguinaire, d'un autre comme un bon père de famille aimant et attentionné. Et pour finir, tu défends la cause d'un pouvoir corrompu, un pouvoir qui a prétendu avoir pris Genève parce qu'il n'accepte plus les menaces incessantes des brigands mais qui n'hésite pas à en recruter pour faire son sale boulot. Bref, un pouvoir qui dit surtout : faites ce que je dis, pas ce que je fais. Un pouvoir qui est aussi inconsistant que toi Sergueï. Pourquoi tu erres ainsi dans ta vie? Tu cherches constamment ton chemin? Tu n'arrives pas à accepter ta vie passée qu'il te faut sans cesse en changer? Ou alors, c'est la lassitude? Le besoin de voir d'autres horizons. Mais dans ce cas, qu'est-ce que tu fiches avec une femme comme Sarani? Elle t'a promis ton titre de noblesse? C'est ça? Tu te bats pour un titre de noblesse? Et ensuite, tu vas me dire que tu vas gérer tes rentes? Bah après tout, le niais que je suis n'arrivera jamais à te comprendre. Alors pourquoi essayer?

    Tu n'as pas d'idéaux? J'ai pu constater aussi que tu n'avais pas vraiment d'objectif dans ta vie. Tu navigues à vue. Alors dis-moi, qu'est-ce qui te pousse encore à vivre? Tu crois les fadaises que prône Son Eminence Aristokolès sur la façon d'atteindre le paradis. C'est pour ça que tu vis? Moi, je n'appelle pas ça vivre. J'appelle ça survivre. Regarde donc ce que tu es devenu. Aujourd'hui, tu n'as d'influence sur rien. Tu es un bras qui tient une épée dans l'armée d'une Chienne. Tu n'influes plus le cours de l'histoire. Tu ne l'écris plus. Tu n'es rien d'autre que de la vulgaire piétaille dont usent à foison ces grâsces de l'Empire et c'est bien dommage.

    Par contre, j'ai une petite remarque de forme sur le contenu de tes lettres: essaie d'être moins vulgaire. Tu imagines ce que penseraient tes enfants de leur père s'ils tombaient sur tes écrits? Quel exemple leur donnerais-tu? Ah, au fait, à propos de ta famille: sois sans crainte, je ne touche jamais aux enfants. Ils n'ont pas à payer pour la folie de leur paternel. Tu vois, ça sert parfois à ce que de la raclure comme moi ait des principes. Si tu pouvais expliquer ça à Sarani - pourquoi on ne touche pas aux enfants - je t'en serais gré. Tu aurais alors au moins servi à quelque chose de plus intelligent dans cette armée que de simplement prendre les coups.


    Un jeune immature.

    P.S : Mon nom, c'est Velasco Visconti, mais ça n'a vraiment pas grand importance tu sais vu que c'est avec ma lame que tu vas faire connaissance.

    P.P.S : Comment veux-tu que j'aille me faire mettre quand ta Chienne de capitaine m'a séparé d'Agnesina? Mais ne t'inquiète pas pour moi papa, je travaille à la retrouver.

    P.P.P.S : Pas mal ta mélopée. Moi j'en ai une autre. J'appelle ça la ronde des morts. C'est un peu plus simple. A peine un couplet...ou plutôt un couperet. Écoute : Sarani de la Fiole Ébrechée de Bénoic Von Hohenhole, Lancelot de Bénoic, Sergueï de Novgorod, Charli la taupe, Rastignac.

    P.P.P.P.S : le DE dans ton nom, c'est parce que j'imagine que tu viens de Novgorod. Si ça n'est pas le cas, alors... change de nom. Sergueï de Saint-Claude, c'est bien aussi tu sais.




Le sicilien se redressa en grimaçant. Son dos lui faisait un mal de chien. Il faut dire qu’il n’était guère habitué à trimballer des tas de ballots, de caisses, de sacs à droite et à gauche et à voir ainsi de près les détails de la logistique. D’habitude, les débardeurs du port s’occupaient de sa cargaison. Et en plus, l’écriture de cette lettre lui avait donné un mal de tête phénoménal.
_________________
Serguei.novgorod, incarné par Loanne
Citation:
Velasco,


Je conçois ta rage et ta colère. J’ai moi-même été si furieux quand les miens sont tombés et que je restais impuissant, sans pouvoir y faire quoi que ce soit, que je peux entendre que tu sois guidé par la haine. Je comprends cela, et c’est pour ça que je ne te tiens pas rigueur de tes lettres. Tu as besoin d’un défouloir, soit. Je serai celui-là. Je vais même faire un effort d’écriture, puisque tu me le demandes gentiment.

Tu n’as pas saisi le message, d’ailleurs, que je t’ai envoyé, en t’expédiant avec mon pli, une mèche des cheveux de ta compagne blessée. Loin de te narguer comme j’ai pu l’affirmer, c’était une façon de te dire que oui, je te comprenais, et te permettre, puisque je te sais séparé d’elle, d’avoir un petit quelque chose à te mettre sous la main, à regarder, à toucher. Que tu comprennes qu’elle ira bien, au final.

Tu es aveuglé par la colère. Elle t’a fait écrire plusieurs bêtises, à vrai dire. Premièrement, mon patronyme est bien « Novgorod ». Je viens en effet de cette ville, mais je suis issu de la famille régnante. Du moins, elle l’était quand j’ai quitté mes terres. La navigation a permis à un plus grand nombre de découvrir cette terre et ainsi, on commence à relier mon nom au territoire. Je ne m’étendrais pas davantage sur le sujet, mais c’est bien mon patronyme. Tel quel, sans particule. Sergueï Novgorod. Comme on pourrait dire « Beren Courchaton ». C’est ainsi, et j’aime mon nom, son histoire, les membres de ma famille. Je ne vais pas en changer, il est idiot de présumer du contraire.

Il est également incorrect de croire que je veuille récupérer un titre dans ces combats. J’aurais pu être anobli plusieurs fois, ce n’est pas ce que je recherche, et si telle est ta perception des choses, alors tu as tort. Je n’ai pas non plus à t’expliquer mes choix de vie, mais je vais le faire, pour que toutes ces questions qui ont l’air d’animer ta vie puissent trouver réponse. Oui, je suis mercenaire, oui, je suis père. Mon choix de rentrer dans l’armée s’est fait pour plusieurs raisons.

La première, c’est que Sarani est comme ma sœur, et que la famille passe avant tout. J’imagine que ça devrait te parler, puisque vous défendez l’heur de votre famille en premier lieu, si j’ai bien saisi. Ensuite, j’ai besoin de me battre. Or, j’ai une famille. La seule façon pour moi de justifier les coups que je donne, c’est de le faire au nom d’un autre, de les légitimer en les rendant officiels, et non plus officieux. Ca protège mes gosses et ma femme. Parce que je les aime, et parce qu’ils passent avant tout le reste, malgré les choses qui me rongent depuis longtemps. Je n’ai pas à m’étendre là-dessus non plus. C’est à moi, cela.

Si tu deviens père un jour, tu verras que rien ne compte plus que les enfants. Je ne sais pas si tu tiens vraiment à ta compagne, et si c’est le cas, je comprends que tu sois ulcéré. Et que tu diriges ta haine contre moi. Tu verras, si tu lui fais un enfant. Pour moi, les miens sont ma rédemption, mon meilleur côté, ma part d’humanité dans tout ce que j’ai vécu. Je ne te considère pas comme curieux, et chaque fois que tu imagines mes réponses dans tes lettres, tu as tort, tu tombes à côté. Je n’ai pas à envisager tes réponses, à croire que tu vas me dire sortir les violons, ou que sais-je. Tu as voulu des explications, je les donne.

J’ai été surpris de lire que tu crois que c’est moi qui t’écris des « lettres d’amour enflammées ». Depuis le début, je ne fais que te répondre, tu devrais réfléchir à cela.

J’ai déjà accepté ton duel, je ne sais pas ce que tu souhaites de plus. Tout le reste n’est que fioriture. Je ne sais pas pourquoi tu m’écris. Peut-être pour exprimer l’ire qui t’a pris au corps. On fait cela, quand on ne peut rien faire d’autre. En tout cas, je sais mes enfants et ma femme en sécurité, j’ai aucune crainte de ce côté-là.

Concernant tes griefs envers l’armée, le Comté, ou Sarani, j’ai rarement joué les pigeons, pour passer des messages. C’est sans moi, donc. Mais tu sais écrire, je suis certain qu’elle te répondrait.

Dans l’attente de la lice, donc.


Sergueï Novgorod.
Vasco.
Citation:
    Sergueï,

    J'ai cru jusqu'à ce jour que nos armées respectives auraient pu régler notre conflit. Un combat toi et moi en champ de bataille. Un vrai! Avec un déferlement exalté de haine et de violence, une exacerbation des sentiments qu'a créé ton geste de provocation ce soir-là à notre camp. Il faut manifestement se rendre à l'évidence : ce combat-là n'aura pas lieu. Dommage, cela aurait pu contribuer à régler le différend personnel qui nous oppose tout en contribuant à la cause pour laquelle nous avons, toi et moi, pris fait et cause.

    Alors, je ne retiens que ta dernière phrase : l'attente de la lice. Je quitterai mon armée. J'attends la réciproque de ta part. Un homme en moins de chaque côté. Je te ferais grâce des comptes d'apothicaires que certains feront du fait que le camp que je défends se bat en infériorité numérique et que, quantitativement parlant, un homme chez nous a plus d'importance qu'un homme chez vous.

    Où? Dis-moi simplement où! Choisis! Peut me chaut l'endroit, je ne viens pas pour faire un spectacle, je viens pour régler un compte qui est en souffrance depuis trop longtemps. Tu conçois ma rage et ma colère? Alors, tu es très bon car moi-même, je n'aurais jamais pensé haïr autant avant cela. Puisque tu as tant d'influence auprès de la Chienne, arrange-toi pour que j'arrive intact au lieu du rendez-vous, cela serait dommage que l’on ne puisse converser de visu toi et moi à cause d'une bête patrouille qui ne sait pas garder ses armes dans ses fourreaux. Je ne te demanderai même pas de sauf-conduit pour repartir sain et sauf après le duel si j'en sors vivant. Je sais que tu es entouré de personnes pour qui la parole donnée n'a aucune importance en regard de l'important d'un résultat. Et surtout soit rassuré, il n’y a, dans ma proposition, aucune fourberie digne de celle du pieu Aristokolès qui prit Genève par une trahison digne des discours de Rome.

    Par contre, je pose une condition non négociable : c’est toi que je veux. Toi seul. Je ne veux pas de champion comme la fois où Elwenn Corleone défit Beren de Fiole Ébrechée en duel à Poligny. Toi et personne d’autre. Je refuserai toute autre alternative, quelle que soit l’excuse qui pourrait te passer par la tête.

    Pour finir, un petit coup de chanson? La ronde des morts? Allez… Sarani de la Fiole Ébrechée de Bénoic Von Hohenhole, Lancelot de Bénoic, Sergueï de Novgorod, Charli la taupe, Rastignac. Ah non! Excuse-moi, il y a une erreur. Il parait que quelqu’un s’est chargé de Lancelot de Bénoic pour moi!

    Bien à toi mon bouchon.




    P.S: Tu t'embrouilles le vétéran, tu t'embrouilles : Dans ton avant-dernière lettre, tu disais n'avoir que faire de Sarani et désormais la voilà comme ta sœur? Au moins désormais le vrai visage de la Chienne se révèle. Elle hait les soi-disant brigands genevois parce qu'ils ne travaillent pas pour elle, contrairement à d'autres n'est-ce pas Sergueï? Je disais quoi il y a peu? Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais? Hum?

_________________
Vasco.
Campagne Suisse, entre lacs et montagnes. En avril ne découvre pas le sicilien d'un fil d'un fil. En avril, certains l'avaient pour découvert Velasco Visconti. A commencer par Sergueï Novgorod, l'homme qui ce soit occupait une grande partie de ses pensées. L'affaire n'avait que trop durer. Il fallait que cela se termine entre eux deux. Aux reflets blafards de la lune dans le ciel répondait une danse lascive des flammes du feu du camp. Le regard fixé sur ces dernières, le Visconti attendait jusqu'au dernier instant. Ce soir, il avait croisé Sianne et Gabriele. Il s'est ouvert de ses projets. Qui d'autre que Gabriele ici pour expliquer à Ina pourquoi il ne serait sans doute pas présent aux retrouvailles Corleone? Derrière lui, les hommes s'affairaient. L'on défaisait les tentes, rangeait vivres et armes dans les charriots. L'armée Spiritu Hydroleone Circus s'apprêtait à se mettre en ordre de marche. Cette journée-là, le Visconti n'était pas allé s'enquérir des décisions du capitaine Kreems. Peu lui importait ce jour-là qu'ils se mettent en ordre de marche vers l'un des points cardinaux ou qu'ils restent sur place pour affronter l'ennemi. C'était là le moindre de ses soucis.

Les paroles de Gabriele lui revinrent à l'esprit. Le Corleone doutait-il de sa capacité à avoir le dessus sur le Novgorod? Non. Il l'avait simplement mis en garde. L'ennemi était retors. Velasco se doutait bien que même s'il triomphait, cela ne voulait pas dire qu'il pourrait revenir sain et sauf auprès des siens. Cela était allé trop loin pour qu'ils le laissent partir sans l'inquiéter un fois le combat terminé. Pourtant, il n'y allait pas pour mourir. Il y allait pour mettre un terme, d'une façon ou d'une autre, à cette haine que Sergueï avait distillé dans le sang du sicilien en faisant couler celui d'Agnesina.

Une cacophonie derrière lui retint son attention. Le soldat préposé aux pigeons venait de rentrer la cage de ses volatiles dans son charriot, prêt à partir si Kreems en donnait l'ordre. Les pigeons...Dans la soirée, il avait écrit à Ina. Le message était prêt à partir vers la Corleone. Mais avant, il n'attendait plus qu'une chose: l'accord du Novgorod.


Citation:

    A celle qui peut être aussi désirable qu'une brise marine par un jour d'été et aussi terrifiante que la pire des tempêtes en plein mer

    Mon message sera bref Ina. Le temps me manque. Notre armée stationne actuellement dans les parages de ce qui fut, il y a quelques années de là encore un village. Aujourd'hui, il ne reste que des ruines comme nous en avons traversé tant, en Franche-Comté et en confédération helvétique. Je ne sais où nous irons et à la rigueur, je t'avoue bien que cela a moins d'importance pour l'instant à mes yeux. Où es-tu? Que fais-tu? Es-tu prêt de moi? Ce soir, j'aurais aimé sentir ta lame contre ma gorge alors que mes lèvres couvriraient ton avant-bras Cependant, il est possible que nos retrouvailles ne soient retardées. Ce soir, je quitterai peut-être les rangs de l'armée et prendrai la route qu'il me faut prendre. Je ne t'en dis pas plus. J'ai tout expliqué à ton frère.

    Prends soin de toi Agnesina Temperance Corleone.

    Ti amo caro mio.

    Fait en Suisse, le 23è jour du mois d'Avril de l'an 1462 alors que le soleil s'est déjà trouvé une grotte pour dormir.

    Velasco.


Et puis vint l'ordre du couvre-feu. La nuit devait reprendre l'entièreté de ses droits. Ordre du capitaine Kreems. Une trainée de chuchots se propagea d'un bord à l'autre du campement alors que les directives étaient transmises à chaque chef de section, puis de ces derniers à chaque soldat. Aux chuchots succédèrent une cacophonie composée de bruits de bottes, de grincement de métal, de craquement de bois. Une à une, les feux sauvages disparurent de la campagne suisse pour laisser la place à ses Majesté les Ténèbres. A son tour, Vasco ramassa quelques poignées de terre sèche et les jeta sur les braises d'un feu en fin de vie. La confirmation du Novgorod n'était pas arrivée. Il devait retarder encore un peu ses initiatives. La lettre pour Agnesina, devenue inutile, fut confiée aux aléas de la nature.
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