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[RP] A la rencontre de ses origines... Et de son avenir.

Azurine
    Un frisson lui parcourut l’échine. Elle avait mis du temps à se décider, beaucoup de temps. Après le départ d’Arnan, la jeune italienne était restée de longs mois seule, pesant le pour et le contre de cette rencontre qu’elle reculait toujours. De la procrastination. Elle avançait, hésitait, reculait. Trois pas en avant, quatre pas en arrière, ne se sentait pas prête pour tout ça, trouvait tellement idiot de rester dans un Royaume inconnue pour des personnes inconnues. Pourtant si déterminée, Azurine avait peur d’affronter cette famille qu’elle ne connaissait que de nom. La peur était pourtant une émotion qu’elle ne connaissait pas, là-bas, en Italie. Elle l’avait bravé dans toute son enfance pour ne plus revivre cette douleur insurmontable que lui avait procuré la peur de l’abandon. Alors elle n’avait plus envie de revivre ça, d’angoisser pour une famille qu’elle ne connaissait ni d’Adam ni d’Eve.

    Bien sur, les Corleone étaient connus dans le Royaume et lorsqu’elle osait dire son nom, les gens la regardaient généralement comme un paria, comme quelqu’un de dangereux. Et elle profitait de cette réputation. En quelques mois, Azurine avait réussi à forger son caractère, avait appris à être crainte et respectée rien qu’avec son nom. Corleone. Un pouvoir dont elle profitait chaque jour toujours plus, comme sur les routes sur lesquelles elle pillait parfois. Corleone. Son nom, celui de sa mère. Celui d’une famille nombreuse et soudée, dont les membres évoluaient ensemble, avec les avantages et les inconvénients d’un tel regroupement. Une famille qu’elle pourrait intégrer et qui l’accepterait rien que par le fait qu’elle était la fille de Rodrielle. Une famille avec qui elle pourrait vivre et avec qui elle ne se sentirait plus seule. Peut-être était-il temps…

    … Le quartier Spiritus Sanguis était grand, trop grand. Elle ne savait pas où aller ni qui demander. Elle ne savait pas non plus que dire, comment se présenter. A chaque pas, d’une lenteur incomparable, Azurine répétait sa présentation. « Buongiorno. Sono Azurine. Sono la ragazza di Rodrielle ». Même sans personne face à elle, sa voix était fébrile, presque timide. Parler dans sa langue natale lui donnerait une assurance qu’elle n’aurait pas avec le français qu’elle ne maîtrisait pas encore. Elle devait mettre toutes les chances de son côté. Et ce qu’elle devait faire par-dessus tout : se montrer digne des Corleone. Elle connaissait leur réputation et le caractère de chacun d’entre eux. Arnan lui avait rapidement parlé des membres Corleone et de leur tempérament de feu. En soi, elle possédait le même, mais uniquement avec ceux qu’elle connaissait ou qui ne faisaient pas partie de son hypothétique famille. C’était donc un effort surhumain qu’elle réalisait ce jour-là, en venant à la taverne familiale.

    C’était là. Face à la porte de la Sans-Nom, Azurine s’arrêta et regarda la porte en bois devant elle. C’était l’heure, l’instant décisif qui changerait, ou pas, le restant de sa vie. Allait-elle être acceptée ou rejetée ? Est-ce qu’elle serait reconnue ? Les questions tourbillonnaient dans sa tête mais la jeune italienne les chassa d’un revers de la main. Il n’était plus l’heure d’hésiter : elle se redressa, fière et forte, puis poussa la porte de la taverne avant de s’avancer vers le comptoir d’un pas assuré.

    « Voglio vedere uno Corleone. Per favore. »

    Elle retira la capuche de sa cape sombre, jeta un regard à l’aubergiste qui signifiait qu’elle ne traduirait rien et que sa demande devait être exécutée de ce pas. Aucune hésitation, aucun tremblement dans sa voix et aucun soupire. Elle était Corleone et le montrait à cet instant précis.

    A ce moment-là, elle ressemblait tellement à sa mère…

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Lililith
La Minusculissime était occupée à dessiner sur sa tablette de cire. Elle sirotait en même temps un verre de lait, lorgnant sur son chat de temps à autres pour s'assurer qu'il ne se sauvait pas. L'enfant laissait sa main courir, dessinant un arbre. Où un homme était pendu.

Scène combien macabre pour la fillette qu'elle était. Mais elle s'en fichait, elle avait vu d'autres choses encore. Elle avait vu la mort de ses yeux. Elle avait vu des membres d'une même famille s'entre-tuer. Elle avait vu des amis se torturer, à la vie à la mort. Et elle n'était plus atteinte. Elle parlait, mais choisissait soigneusement ses mots, comme pour s'épargner une peine douloureuse.

Elle était assise, donc, à contempler son oeuvre, hésitant à l'effacer. Parce que ce qu'elle dessinait était bien trop souvent éphémère, oublié aussitôt la cire lissée. Le stylet tapotait la table et son visage était rafrougné d'indécision. Elle ne savait pas quoi faire. L'Étoile demeurait là, ignorant les allées et venues des gens autour d'elle, habituée au remue-ménage. Les gens étaient de passage mais il y avait les têtes familières de la Spiritu. Dont les membres de sa Famiglia.

Mais soudain, des mots retinrent son attention.

« Voglio vedere uno Corleone. Per favore. »

La Luciole releva la tête au nom. En un éclair elle était debout et s'approcha non sans avoir émis un sifflement pour son chat.

- Perque ?

Ne pas se présenter avant de savoir qui en avait après eux. Elle n'oubliait pas. La fillette la détailla sans ménagement. Quelque chose en cette inconnue lui rappelait la Mamma mais elle n'aurait trop su dire quoi. Peut-être à cause de ce souvenir qui s'estompait, à cause de cette maudite mémoire. Elle avait bien tenté de fixer la Tatouée sur une toile mais sans succès. Il manquait toujours quelque chose.

Entre autres, l'explication de la raison dudit tatouage.

Son chat roux vint, en miaulant, se frotter à ses petites jambes. Elle ne bougea pas, ne lâchant pas des yeux l'adulte en face d'elle, attendant une réponse avant de réagir en conséquence.
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Gabriele.
Je ne suis jamais bien loin non plus de cette taverne du Sans-Nom, encore bien gentillet par rapport à ce que nous sommes. Corleone prend ce qui lui revient, et dispense mort et souffrance avec indifférence, comme l'on donnerait un baiser à son enfant pour lui souhaiter une bonne nuit. Mais les enfants Corleone ne sont pas bercés avec de jolies histoires de Prince et de châteaux, ils connaissent la mort, et ils la côtoient depuis toujours, ou presque.
Aujourd'hui, je ne suis plus cet enfant qui découvre la vie, ni même l'adolescent tempétueux et séducteur qui prend tout ce qu'on lui donne sans rien offrir en retour. Au fil du temps passé au côté des miens, j'ai découvert les responsabilités, le courage, et l'honneur. La puissance de mon sang. J'étais devenu Gabriele Corleone, celui que l'on surnomme parfois à présent le Tatoué, faisant naître à chaque fois un sourire plein de nostalgie sur mes lèvres. C'est pour cette raison que je l'avais fais, que l’Ouroboros avait rejoint mon regard. L'hommage à la Matriarche, à celle que j'aimais comme une mère, bien qu'elle soit partie trop tôt.

Elle est encore là. En chacun de nous, et chaque fois que l'émeraude de mes yeux se pose sur l'un d'eux, je songe à la fierté qu'elle doit ressentir, de là où elle se trouve à présent. Pour elle, pour notre Clan, j'ai décidé de changer, de grandir, de devenir un homme digne de protéger ceux que j'aime. Mia famiglia, mia forza.
Attablé, je jette de temps à autre un regard à la petite Stella, toujours si silencieuse depuis que sa Mamma avait rejoint les étoiles, même si j'arrivais de temps à autre à discuter avec elle. Dans mes mains, un verre de vin, la taverne bien entendu était toujours approvisionnée en chianti, et heureusement pour le tenancier, car un Italien privé de ce breuvage pourrait devenir...extrêmement dangereux, et le taulier tenait à la vie.
Je faisais tourner le liquide pour mieux en faire se dégager les arômes, tout en parcourant du regard un recueil des différentes plantes et de leur usage. Pour soigner, ou pour tuer.

A voir les miens blessés, j'avais trouver ma vocation. Les soigner lorsque mon père et Gaïa ne sont pas disponibles, et tuer dans les plus atroces souffrances qui soient mes ennemis, nos ennemis, ceux qui ont la folie de s'en prendre à Spiritu Sanguis.
La voix italienne me fait, à moi aussi, lever la tête et mon regard légèrement plissé se porte sur celle qui vient de déranger la quiétude du lieu. Les traits sont familiers, pourtant je suis certain de ne jamais l'avoir vu nulle part. Qui est donc cette Italienne ? Un instant, la possibilité qu'il s'agisse encore d'une fille de mon père me traverse l'esprit. Après tout, je n'avais aucune idée du nombre de bâtards qu'il avait bien pu engendrer, même si pour le moment j'étais l'aîné.
Voyant la petite Etoile se porter au-devant de l'inconnue, mon instinct me fait à mon tour me lever, pour rejoindre l'enfant, et poser une main protectrice sur son épaule, au cas où cette femme viendrait leur chercher des noises. Après tout, ils avaient aujourd'hui assez d'ennemis pour que ceux-ci s'aventurent jusqu'au sein même de leur quartier.

« - Anche domanda che la bambina. Chi siete e che vi volete ai Corleone? »*

Le regard se fait tranchant. A la Corleone. Je la détaille à mon tour, la main toujours posée sur l'épaule de la fillette. Le ton de ma voix est ferme, bien que je reste toujours poli et très calme en apparence. Puisque nous avons tous un héritage, voici le mien. Je suis le portrait craché de mon père, tant physiquement qu'intellectuellement. Le fils prodigue éhontément beau. Mais pas uniquement. Je lui ressemblais aussi pour mon désir de protéger les miens.
Alors, toi qui veut nous voir, dis-nous ce que tu viens chercher ici.

*Même question que la petite. Qui êtes-vous et que voulez-vous aux Corleone ?
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Pour toute réclamation, merci de vous adresser à LJD Tigist
Azurine

    Sa demande avait été exaucée rapidement, mais certainement pas par les personnes qu’elle attendait. Lorsque la voix enfantine s’était élevée dans les airs, la brune italienne avait pris son temps pour baisser la tête et regarder l’enfant dans les yeux. Un sourcil haussé – réflexe qu’elle tenait de son sang maternel – elle observa avec la même lenteur la jeune demoiselle qui la toisait avec une assurance peut habituelle chez les enfants de cet âge. Azurine esquissa un sourire en coin, reconnaissant avec quasi-certitude le caractère Corleonien.

    Et avant qu’elle ouvre la bouche pour lui répondre, c’est une voix masculine qui l’interrompit. Et la langue italienne, habituellement si chantante et agréable, sonnait chez l’inconnu comme un coup de fouet reçu en pleine figure. Son regard se posa tour à tour vers l’enfant et l’italien. Il s’arrêta un instant sur l’œil tatoué de ce dernier, lui provoquant une seconde de choc. Elle reconnaissait cette marque, savait qui la portait avant et elle eut, pendant un court instant, à nouveau ce sentiment d’abandon et de regret. Il portait le même tatouage, au même endroit, que sa mère. Il n’y avait donc plus aucun doute dans l’esprit de la brune : elle se trouvait sur le territoire des Corleone. Alors son sourire devint plus franc, il se dessina sur son visage pour accompagner son regard félin, lui donnant toute l’assurance dont elle avait besoin pour la suite. Elle n’avait plus peur, ne craignait plus de rencontrer la Famiglia dont on lui parlait tant ; ils n’étaient rien d’autre que des personnes comme elle.

    Son corps pivota donc pour faire face aux deux italiens, sa main gauche restant délicatement posée, plate, sur le comptoir. Elle était plus petite que le brun, mais sa stature lui donnait de l’assurance, montrant à son interlocuteur qu’elle n’était aucunement intimidée.

    « Sono Azurine. »

    Elle marqua une légère pause pour produire un léger effet d’attente, pris une dernière fois son courage à deux mains pour reprendre :

    « Sono la ragazza di Rodrielle »

    Pour conclure sa phrase, elle désigna du doigt l'oeil tatoué du brun, prouvant qu'elle savait que sa mère en avait un également. Avait-elle réellement besoin, par conséquent, de dire pourquoi elle était ici ? Elle hésita un moment avant de répondre, préféra attendre que l’information soit assimilée par ses deux interlocuteurs avant de prononcer d’autres mots. Que devait-elle donc ajouter précisément pour qu’ils la croient et, surtout, pour qu’ils l’acceptent ? Elle n’avait pas envie de raconter toute sa vie de suite, préférant qu’on lui pose les bonnes questions pour fournir les éléments essentiels de sa vie. Mais pourtant, elle sentait qu’il fallait en dire plus pour les convaincre, pour ne pas qu’ils tournent les talons en lui disant de partir. Elle n’accepterait pas un échec.

    « Mio zio, Aevil, mi ha chiesto di venire. Arnan mi ha detto dove trovarvi. »

    Alors me voici. Relation de cause à effet.
    Vous en voulez plus ou ça ira ?



Trad :
- Je suis Azurine.
- Je suis la fille de Rodrielle
- Mon oncle, Aevil, ma demandé de venir. Arnan m'a dit où vous trouver.
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Gabriele.
Nous nous jaugeons l'un l'autre, combien de temps cet échange là venait de durer, j'étais incapable de le dire. Quelque chose en elle, des détails, des traits, ou peut-être qu'il s'agissait de ses expressions, me rappelait...
Un sourcil se hausse. Rodrielle ? Impossible. Rodrielle est morte depuis plusieurs mois à présent. De la main même de mon padre. Amalio...Mon modèle, l'homme le plus parfait qui soit à mes yeux, et c'était une chose normale puisqu'il avait lui-même engendré la perfection en les personnes de mon frère et moi. Il le dit lui-même, je suis le fils prodigue, le jeune homme qui fait sa fierté. Modeste ? C'était mon deuxième prénom, voyons. Gabriele Modeste Parfait Corleone. N'est-ce pas que ça me colle à merveille à la peau ? Il faudrait que je songe à ce genre de prénom pour mes futurs enfants. Évidemment, il y aurait d'autres enfants, car un Corleone ne peut décemment pas s'arrêter à un seul fils.
Rodrielle donc. Elle lui ressemblait, oui. Il y avait des airs. Mais lorsqu'elle se présenta, je haussais à nouveau mon sourcil, sceptique.

«- Azurine... »

Je le répétais, tâchant de chercher dans ma mémoire si ce prénom me disait quelque chose. Mais non, rien à l'horizon. Il n'y avait aucune Azurine dans ma mémoire, mais la suite de la phrase me fit froncer le nez. La fille de Rodrielle, hm ? Peut-être qu'on pouvait effectivement voir dans son visage, dans ses mimiques, quelques petites similitudes, mais de là à croire qu'il s'agissait de la fille de Rodrielle alors que je n'en avais jamais entendu parler, ni d'Eve, ni d'Adam...
Oui, mais seulement, il y avait toujours un mais.
Elle pointa du doigt mon tatouage, et me plongea dans le doute. Je portais effectivement ce tatouage comme un hommage à cette grande femme qui avait mené notre Clan. Comme une mère pour moi, qui m'avait aimé comme on peut aimer un fils, comme elle l'avait fait pour tous les Spiritu Sanguis.
Plutôt que de me concentrer sur les yeux de cette jeune femme, je pris un peu de recul, pour l'observer dans son ensemble. L'allure fière, une stature qui en imposait, sans pour autant écraser l'autre, du moins...tant qu'on ne la menaçait pas.

La suite termina de me convaincre. Ma...cousine. Voilà. Elle est ma cousine, encore un héritage laissé par ma Tante. Si son oncle était Aevil...Mon grand-père. Je n'avais jamais eu l'occasion de le voir vraiment, je l'ai seulement aperçu, remarquant sa ressemblance avec mon padre, et de facto avec moi.
Peut-être l'a-t-elle remarqué également.
Ma main se presse un peu plus sur l'épaule de ma petite protégée. Lili, qui avait été bien trop secouée par la mort de Rodrielle, et qui s'était renfermée sur elle-même depuis ce jour, ne parlant qu'en de très rares occasions. J'avais, bien entendu, fais tout mon possible pour essayer de rendre à la bambina le sourire qui l'avait quitté, mais elle semblait toujours un peu perdue dans ce monde d'adultes, par trop violent pour l'enfant qu'elle restait malgré tout, et dont les repères lui avaient été pour la plupart arrachés par les morts successives de deux matriarches du Clan.

Aevil et Arnan. Voilà deux identités qui ne pouvaient pas lui être parvenues par hasard. Aevil, mon grand-père, et Arnan, le frère de ma Nordique. Un léger sourire, convaincu, s'étire sur mes lèvres.

«- Sono Gabriele Corleone, il nipote di Aevil, e Arnan è mio cognato. La bambina è anche la ragazza di Rodrielle. »*

Comment situer toute la famille en une phrase. Mais ce qui résume le mieux...

«- Benvenuto. »

* Je suis Gabriele Corleone, le petit-fils de Aevil, et Arnan est mon beau-frère. La petite est aussi la fille de Rodrielle.
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Pour toute réclamation, merci de vous adresser à LJD Tigist
Azurine
    Il y avait de ces instants qui vous coupent le souffle, qui risqueraient de vous tuer sans que l’on ait le temps de réagir. De ces moments qui vont changer le cours de votre vie, de ce mot qui risque de tout bouleverser. Azurine vivait un tel moment.

    Les yeux plongés dans ceux de l’italien, la brune bouillonnait. Elle avait envie de le secouer, de lui prouver par n’importe quel moyen qu’elle disait vrai car elle voyait dans son regard qu’il doutait. Cela dit, n’était-ce pas compréhensible ? A quelques mois du décès de la Matriarche, une jeune fille vient se présenter comme sa fille ; de quoi avoir des soupçons et des doutes sur la personne. Pourquoi n’était-elle pas venue avant ? Pourquoi n’avait-elle pas vécue avec sa mère ? Et, surtout, pourquoi celle-ci n’avait jamais parlé de ses jumeaux ? Vu le regard perplexe de l’Italien, il semblerait qu’elle ait un nom inconnu pour le Corleone. Et l’idée d’être inconnue la blessa comme si elle recevait un poignard dans le cœur… « Pourquoi n’as-tu jamais parlé de moi, ni d’Aldaric ? Pourquoi n’as-tu jamais mentionné le nom de tes propres enfants qui t’ont aimé et qui t’attendaient ? » Avait-elle eu honte d’eux ?

    L’Italien ouvrit enfin la bouche, se présenta. Au départ, elle fut étonnée. Ses sourcils se haussèrent dans une expression de surprise. Elle savait qu’Aevil avait eu un enfant – au moins – mais elle ne s’attendait pas à se trouver face à son petit-fils si tôt. Elle fut étonnée également de savoir qu’Arnan était également, plus ou moins, de la famille alors qu’elle le pensait n’être qu’un ami de la Famiglia mais, surtout, de sa mère.

    « La bambina è anche la ragazza di Rodrielle. »
    Second coup de poignard.

    Azurine chancela, se retint au comptoir à côté d’elle, la main tremblante à la nouvelle. Etait-ce réel ou une mauvaise blague ? Son regard se baissa pour scruter les traits de l’enfant, y recherchant le moindre souvenir de sa mère. Aevil ne l’avait pas prévenu, ne lui avait pas avoué qu’elle avait eu un autre enfant. Etait-ce d’ailleurs la seule à exister ?! Sa mère avait donc coupé les ponts avec sa vie d’avant, celle où ils étaient heureux à Joinville, pour aller faire d’autres enfants ailleurs. Azurine s’assit sur le premier tabouret près d’elle. La nouvelle lui tombait dessus comme la foudre et elle avait beaucoup de mal à l’encaisser. A peine remarqua-t-elle le sourire que Gabriele lui offrait en signe de bienvenue. Elle garda la tête baissée, le regard triste et vide, quelques instants avant de la redresser lorsque son cousin lui souhaita la bienvenue.

    « Grazie. »

    Le seul mot qui réussissait à sortir de sa bouche pour l’instant.

      Laissez-moi encore quelques secondes pour accuser le choc, pour me mettre dans la tête que ma mère, celle que j’ai aimé et détesté, qui m’a manqué pendant vingt ans, m’avait oublié, effacée de sa vie comme un vulgaire trait de fusain disgracieux. Laissez-moi quelques secondes, encore, pour que je me fasse à l’idée que je ne suis rien : ni plus ni moins qu’un être abandonné par sa mère, sans âme. Moi qui était juste avant une fière Corleone, fille de Rodrielle, la Tatouée célèbre, devient à présent qu’un simple être spectral à la recherche d’un pilier sur lequel m’appuyer de nouveau. Vois-tu, Gabriele, Cugino, que la première phrase que tu viens de m’offrir vient de détruire mon existence, vient de détruire le château de ma vie que je croyais inébranlable ? Tout ce que j’avais battit vient de s’effriter, s’écrouler, tel un vulgaire château de carte. Me voilà devant vous, fiers Corleone, inexistante, invisible, fantomatique, un corps sans âme, sans avenir et, maintenant, sans passé. Moi qui pensait qu’en revenant ici je pourrais lui pardonner, comprendre pourquoi elle avait choisi de nous laisser à mon oncle, mon frère et moi, et presque être fière d’elle… Maintenant je n’ai qu’une seule envie : la haïr. Et l’oublier comme elle l’a fait avec nous. Voilà qui je suis à présent : une jeune femme oubliée et effacée par sa propre mère. Je ne suis plus rien.


    Il lui fallut encore quelques temps pour relever la tête et plonger son regard dans celui de Gabriele. Elle gardait le silence, incapable de produire le moindre son, mais espérait que son cousin comprenne son malaise, qu’il devine sa blessure. Que devait-elle faire à présent ? Partir ? Les laisser entre eux, entre Corleone, et devenir une âme errante ? Retourner en Italie, peut-être, loin de son oncle, loin de ceux qui portent le nom de sa mère… Partir. Courir. Fuir.

    Puis elle se redressa enfin, chancelante, et fit face eux deux Corleone. Elle ne devait pas montrer ses faiblesses, ne devait pas se montrer indigne de leur nom. Il fallait qu’elle leur prouve que, si sa mère l’avait bien voulu, elle aurait eu sa place au sein de cette famille. Alors elle ravala ses larmes, jeta un regard à l’Enfant, puis soupira.

    « Non ho il moi posto qui. Sono spiacente ».
    Je n’ai pas ma place ici. Je suis désolée.


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Gabriele.
Je ne m'attendais pas à ça. La réaction de ma jeune...cousine, donc, est surprenante. Je ne sais pas ce qu'elle a pu vivre pour réagir ainsi. Le problème se situait exactement là : Je ne connais absolument rien de cette jeune femme, ni de son passé, et je ne sais pas comment me positionner par rapport à elle. Rodrielle ne lui avait jamais parlé de sa vie d'avant, elle lui avait d'ailleurs peu parlé, tout court. La Matriarche n'était pas exactement du genre loquace. Elle était là, et ça me suffisait amplement, une présence rassurante, apaisante, comme une Madre en somme. Il m'arrivait encore, souvent, de ressentir cette présence, en compagnie des autres membres du Clan, et parfois lorsque je me retrouvais tout seul, face à moi-même.
Je pouvais comprendre la réaction de cette jeune femme. J'avais moi-même eu un sacré choc en découvrant ma Famiglia. Jusqu'alors, j'avais mené une vie de dépravation, de luxure et d'envie ; cette vie n'était pas compatible avec les responsabilités d'un Corleone.

La jeune femme semblait se laisser aller à une peine que j'avais du mal à imaginer. Lorsqu'on est la fille d'une personne comme Rodrielle, comment pourrait-on se sentir triste ? Comment imaginer un instant qu'elle ait pu abandonner quelqu'un de son propre sang, elle qui avait tant donné ?
Si tu savais, ragazza, comme ta mère pouvait aimer les siens. Comme elle aurait aimer voir absolument toutes les personnes de son Clan réunies et unies pour un même projet, comme elle y était presque arrivée, puisqu'ils avaient été nombreux à se relever pour montrer aux yeux du monde qui est Corleone. Nous étions parvenus à son objectif premier : être connus, et être craints. Nous avions poursuivi son œuvre, après sa mort, et nous continuerons encore longtemps.
Alors pourquoi te morfonds-tu, cousine ? Est-ce le fait que ta madre nous ait quitté ? Mais pourtant, elle vit en chacun de nous, elle a laissé sa flamme en partant, un héritage qu'il nous revient de faire prospérer.

« - Azurine.. ? »

L'échange de regard est intense. Je sais ce à quoi elle pense, car je l'ai moi-même ressenti, à mon arrivée. Pièce rapportée au Clan, débarqué dans une famille dont je ne connaissais rien. Je ne m'y étais pas senti à ma place, et j'avais voulu partir également.
Ma main, auparavant sur l'épaule de la petite Stella, vint se poser sur l'épaule de la jeune femme, ferme mais dégageant pourtant une sensation de chaleur, qui m'est propre. Mon Clan est tout pour moi, ma famiglia, mon sang, a maintenant une importance primordiale à mes yeux. Cette jeune femme est de mon sang, la fille de la Matriarche, et je ne peux pas la laisser baisser les bras.
Corleone n'abandonne pas, jamais.
A nouveau, j'essaie d'accrocher mon regard au sien.

« - Sei un Corleone. Il tuo posto è con noi. »*

Reste. Per favore.

*Tu es une Corleone. Ta place est avec nous.
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Pour toute réclamation, merci de vous adresser à LJD Tigist
Azurine
    La main masculine qui vint se poser sur son épaule la raidit. Elles étaient rares les personnes ayant la possibilité et pris le risque de poser une main sur elle. Toujours distante, la brune n’aimait pas les effusions de sentiments, ni les contacts avec d’autres gens. Depuis l’abandon de sa mère et départ de son frère jumeau, Azurine préférait éviter de s’attacher, de parler à qui que ce soit sous peine de souffrir. Et elle avait déjà eu son compte. Elle n’avait plus envie de pleurer pour quelqu’un, plus envie d’attendre ou d’espérer ; à sa demande, son oncle lui avait donc appris à avoir du recul et à fermer son cœur aux éventuelles intrusions. Elle n’avait donc jamais connu l’amour, sous quelque forme que ce soit, pas même avec Aevil qu’elle considérait comme son mentor plutôt que son oncle bien-aimé. Même lui, elle se refusait à ça.

    Alors lorsque Gabriele la retint par sa prise, Azurine fronça les sourcils, sur le qui-vive. Elle se redressa, et tenta en vain de ravaler sa peine. Etrangement, lorsqu’elle regardait ce brun-là, elle ne pouvait pas remettre son masque ; elle lui avait déjà montré sa plus grande faiblesse, en quelques minutes, et il était trop tard pour tout cacher. Si elle restait avec eux, elle savait pertinemment que Gabriele saurait tout, qu’il pourrait lire en elle comme dans un livre ouvert. Azurine soupira donc. Il avait peut être raison, mais comment l’accepter ? Comment être intégrée à une famille qui ne connait même pas son existence…

    « Hai ragione. Ma… »
    Tu as raison. Mais…

    Son regard se perdit sur la petite. Elle n’avait pas prononcé un mot depuis que la nouvelle était tombée. La vie avec les Corleone n’allait pas être facile les premiers temps : chacun devait accepter que Rodrielle avait eu une vie avant eux, dans laquelle elle avait été mariée et avait eu des jumeaux. Puis il fallait qu’ils l’intègrent, qu’ils comprennent et, surtout, qu’ils l’acceptent comme l’une des leurs. Car Gabriele avait beau le comprendre, ils n’étaient peut être pas tous aussi conciliants… L’enfant la première. Toutes les deux allaient devoir s’accepter comme filles de la Matriarche et comme… demies-sœurs…

    Azurine se rassit sur son tabouret et soupira de nouveau. Perdue. Elle ne pensait pas que cette rencontre allait se passer de la sorte. Mais était-ce prévisible, d’ailleurs ? C’était si difficile pour elle, mentalement, de retrouver une famille inconnue pour s’y greffer. Mais elle devait prendre son courage à deux mains, agir comme une Corleone. Elle releva donc le visage et esquissa un sourire, timide.

    « D’accordo. Ma devo sapere più su voi »
    D’accord. Mais je dois en savoir plus sur vous…

    Et pour montrer qu’elle avait tout son temps, elle commanda deux verres de vins et un verre de lait pour l’Enfant. Puis son attention retourna vers Gabriele qu’elle était prête à écouter.

    Racontes-moi, s’il te plait, ce que je ne sais pas. Sur vous, sur ma Famiglia, sur ma mère. Dis-moi tout.

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Lililith
Please I know you're in there,
People are asking where you've been,
They say "have courage";
And I'm trying to,
I'm right out here for you
Just let me in
We only have each other
It's just you and me
What are we gonna do?

“Do you wanna built a snowman” - Frozen.

S'il te plaît, je sais que tu es là à l'intérieur,
Les gens se demandent où tu es,
Ils disent « aie courage »
Et j'essaie,
Je suis là au-dehors pour toi
Laisse-moi juste entrer
On n'a que l'autre
Juste toi et moi
Que va-t-on faire ?


Rodrielle.

Le nom tombe. Les deux Grands viennent sans le savoir de perdre Lili. Lili qui se revoit partir dans la neige, pieds nus, pour ne plus parler à Jeanne, fuyant l'orphelinat. Une rencontre avec Elouan, sous un étal de marché. Un vol de couteau. Un combat, son premier, entre la Matriarche et elle. Fralis, brièvement. Le Parasite. L'amour qu'ils se portaient entre eux, malgré leurs innombrables disputes. Rodrielle, encore et toujours. Elle était à jamais son Étoile, et pour toujours. La Matriarche les avait peut-être rejoint mais si l'enfant se décidait à briller encore, c'était pour elle seule, non pour leurs consœurs.

Son silence. Son silence qui avait marqué plus durablement les esprits que si elle avait parlé. Elle en sortait quelquefois. Rarement. C'était plus drôle de les voir désemparés. Ils ne savaient pas toujours quoi faire d'elle et elle préférait cet état à une décision définitive. Elle savait qu'ils ne la chasseraient jamais, mais se sentir inutile lui aurait été insupportable.

Rien que la mort, rien que le silence. La Minusculissime ne bouge toujours pas, cherchant à se raccrocher à ce qu'elle connaissait de la Tatouée. Dans le fond, rien. Comment peut-on aimer quelqu'un dont on ignore tout ? Peut-être était-ce plus facile alors de se cacher les défauts de l'autre. Peut-être était-ce plus facile de nier ses vices. Peut-être était-ce plus facile de l'aimer tout court : on ignorait le plus profond de son essence. De deuxième, elle devenait troisième. La Matriarche ne lui avait jamais dit qu'elle avait une autre fille, et ce que l'enfant savait de la vie antérieure à leur rencontre, c'était les autres qui lui avaient raconté, à demi-mots parce qu'ils n'en connaissaient que la trame la plus générale.

L'Étoile relève ses yeux, enfin, vers Azurine. Elle ne dit rien, l'observe mieux, cherchant à déceler la Matriarche dans le moindre de ses traits. Elle farfouille dans sa poche, en sort un dessin qu'elle a fait le lendemain de la mort de sa Mamma. Elle le déplie lentement, se recule pour ne pas que Gabriele le voie. Elle ne l'a montré à personne. Elle seule a posé les yeux dessus. C'est la Matriarche, couchée sur un parterre de fleur, les yeux fermés. Ainsi qu'elle l'a perçue ce jour-là, alors qu'elle était emmenée au cimetière. L'enfant relève ses prunelles vers Azurine, puis le dessin. Elles ont bien un lien de parenté, c'est indéniable.

Et puis son visage s'illumine. Peut-être que cette fille-là à la Réponse. Peut-être qu'elle Sait. Et alors l'accepter devient une évidence. La fillette tente un sourire avant de s'installer sur une chaise du mieux qu'elle peut. Toutefois, ses petits doigts repoussent le verre de lait. Elle n'en veut pas. Elle se tourne vers Gabriele pour lui faire comprendre qu'elle ne parlera pas. Pas tout de suite.
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Gabriele.
Je la sens se raidir, mais je prends le risque. Elle est de ma famille, c'est la fille de celle que j'ai considéré comme une mère. On peut donc dire qu'elle est comme ma sœur, tout comme la petite Lili que j'ai toujours mis un point d'honneur à protéger. Si on peut m'accuser de bien des choses, ne pas aimer mon sang n'en fait pas partie. Il m'était arrivé oui, d'en venir aux mains et même aux lames avec une de mes sœurs, mais Arsène avait ceci d'impressionnant qu'elle parvenait toujours à me faire sortir de mes gonds ; encore que depuis ce fâcheux accident, je m'étais relativement calmé, et elle aussi, du moins il me semblait.

Je tente un nouveau sourire pour ma cousine. Je veux l'apaiser, qu'elle se sente en confiance. La famille est ce qui a de plus important, cugina, et tu en fais partie, tu n'as donc rien à craindre dans cette taverne qui est notre fief. Je suis passé par là, aussi, mais tu te rendras vite compte que sous leurs airs froids et distants, tous sans exception s'arrangeront pour veiller sur toi, même si tu ne le vois pas. J'ai mis du temps à le comprendre, mais notre ancienne Matriarche, Enjoy, aura fini par me faire entrer ça dans la tête.

Maintenant, moi aussi je veille.

Mon regard est capté par l'Enfant qui recule de mon étreinte, et que je laisse faire. Étrangement, quelque chose semble avoir tilté dans son esprit, et le sourire qui prend place sur son visage me rassure. Elle ne semble pas mal réagir à l'idée que cette femme, sûrement un peu plus âgée que moi, soit sa sœur. Demie-soeur, mais qu'importe. Le sang est le sang. Elles sont sœurs, et c'est tout. Je n'ai jamais fais de différences entre mon jumeau, mon Alessandro, avec qui je partage père et mère, et le reste de ma fratrie. Ça ne change rien.
Vois, je considère même mes cousines comme mes propres sœurs, et toi, Azurine, tu ne feras pas exception à la règle. Je sens même un quelque chose...Un quelque chose de plus, entre toi et moi. Comme une compréhension sous-jacente, sans que nous n'ayons besoin de nous exprimer pour savoir ce que l'autre pense. Assez perturbant, au demeurant, puisque nous ne nous connaissons pas, pas encore, et que j'ai déjà l'impression qu'il existe un lien profond entre elle et moi.

« - Bene. »

Lili est d'accord, Azurine s'installe, je fais donc de même, prenant place entre elles deux, ma main saisissant le verre de vin pour m'en délecter après l'avoir légèrement levé pour mes cousines. Aux Corleone. Toast silencieux, avant de reporter mon regard sur la jeune femme, toujours aussi frappé par les airs de Rodrielle que je retrouvais en elle.
Lui raconter. Lui dire quoi ? Commencer par où ? C'était une histoire plutôt longue, que celle des Corleone, et j'étais loin de la connaître entièrement. Il y avait eu l'événement marquant, le Régicide, et puis, la perte de puissance. Et le regain. Mais de tout ça, je ne connaissais que ce que j'avais moi-même vécu depuis mon arrivée au sein du Clan. Croisant les jambes, je bois encore une gorgée, avant de commencer mon récit, dans un italien parfait.

« - Je suis comme toi. J'ai débarqué dans la famille un jour, sans que l'on ne m'attende. Mon père fréquentait fréquemment les bordels, et un jour, il a engrossé ma mère, une catin de Vérone. Je n'ai retrouvé la Famille que quinze ans plus tard. Je cherchais mon père, et j'ai trouvé en plus de lui, vraiment beaucoup de gens. Des sœurs, déjà. Elizabetha, Arsène et Agnesina. Rodrielle était à ce moment là, la Matriarche du Clan, mais...Elle commençait à décliner. La maladie a pris possession d'elle. Mon père, Amalio, le fils d'Aevil donc, est le Médecin du Clan. Il a fait tout ce qu'il a pu...Il n'a pas pu la sauver.
Après sa mort...C'est Enjoy et papà qui ont été désignés pour nous mener, mais mon père...il n'est pas très présent. C'est Enjoy qui a tout géré, et mes sœurs Arsène et Ina se sont mises à l'aider...Maintenant, ce sont elles les meneuses. On a fait beaucoup de choses, on a parfois été blessés, mais on s'est toujours relevés. »

Puis, désignant le lieu d'un geste, j'ajoute :

« - Ici, c'est chez nous. Si un jour tu te perds, tu ne sais pas où nous sommes, il te suffira de revenir ici. Nous serons toujours là. »

N.B : Pour plus de facilités, le texte est écris directement en français. Néanmoins, Gabriele s'exprime bien en italien.
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Pour toute réclamation, merci de vous adresser à LJD Tigist
Azurine
    Son doigt fin glissait sur le rebord de son verre. Geste machinal qui prouvait sa concentration sur la conversation familiale. Elle entrait donc dans un nouvel univers, allait apprendre tout ce qu’elle ne savait pas, découvrir un monde qui allait bientôt être le sien. La vie avec les Corleone, avec le clan de sa mère, son clan, elle n’arrivait pas à saisir l’importance de cet instant, l’enjeu de ce moment précis. Le premier pas était fait.

    L’Enfant avait enfin réagit, reculé devant elle pour mieux l’observer. Ce regard la gêne, la déstabilise. Elle se sent scrutée dans les moindres détails, sachant pertinemment ce que la petite recherche… La feuille qu’elle sort de sa poche et qu’elle regarde avec persistance l’intrigue. Qu’est-ce donc pour qu’elle compare ce qu’il y a dessus avec elle ? Un dernier mot de la Madre ? Un souvenir ? Un signe de reconnaissance, peut-être… Puis l’Enfant se redresse, sourit. L’Azurine est acceptée, elle le sait. Et ce geste de la part de la jeune fille la soulage, lui fait comprendre qu’elle aura peut-être, finalement, sa place dans leur vie, qu’elle pourra peut-être avoir un rôle important à jouer auprès d’eux. Elle n’avait plus qu’à accepter le fait qu’Aldaric et elle ne soient pas les enfants uniques de la Tatouée, qu’il existe une autre progéniture, peut-être plusieurs, avec lesquels elle partage le même sang. Accepter de partager.

    « - Bene. »

    Le Mâle avait parlé. L’attention d’Azurine revint donc sur son cousin qui allait, enfin, lui faire les premières confidences sur le clan qui allait être le sien. Toute ouïe, Az’ attendait, buvant une gorgée de vin, recommençant ensuite son nouveau rituel, impatiente. Il commença alors à lui expliquer… Alors elle n’était pas la seule à arriver ici comme un cheveu sur la soupe, sans connaître personne et sans savoir quoi devenir. Lorsqu’il parla de sa mère, son cœur se serra. Elle avait su trop tard que Rodrielle était malade, n’avait pas daigné suivre son oncle pour lui dire au revoir ; la colère était encore trop grande à cette époque, la rancœur également. Et aujourd’hui, il s’agissait de son premier regret. Ou second, le premier étant d’être partis lorsqu’ils étaient jeunes, son frère et elle.

    Les révélations furent courtes, laissant la brune sur sa faim. Elle voulait en savoir plus ; comment était Rodrielle avait eux ? Qu’avait-elle fait pour mériter autant de respect ? Qu’avait-elle fait de sa vie ? Puis d’autres questions concernant le clan, leur nombre, leurs actes, leur force… Elle voulait tout savoir mais comprenait qu’une seule soirée ne suffirait pas. Qu’elle avait toute la vie pour en apprendre encore plus. Elle fit un signe de tête lorsqu’il eut terminé, lui faisant comprendre de ce fait qu’elle assimilait ce qu’il disait. Elle suivit son geste en regardant la taverne et fut une nouvelle fois soulagée. Elle avait donc un lieu où se réfugier. Elle était acceptée.

    « Grazie »

    Elle attendit quelques instants avant de prendre la parole à son tour. Son regard s’était une nouvelle fois posée sur l’Enfant. Quand avait-elle été adoptée ? A présent qu’elles étaient demies-sœurs, qu’Azurine était acceptée au sein du clan, c’était à elle de fournir quelques explications… Elle leur devait bien cela. Elle leur fit un mince sourire, grand effort de sa part, avant de leur dire qui elle était. Ce qui la poussait à parler, notamment, était cette discussion en italien, lui rappelant son pays, ses origines. En parlant cette langue, elle se sentait un peu comme à la maison…

    « Je ne comprends pas pourquoi Mamma n’a jamais parlé de nous. Car je ne suis pas seule… » - son regard se pencha sur Lili qui aurait une encore nouvelle à digérer – « j’ai un frère jumeau, Aldaric. Qui est parti de son côté il y a déjà quelques années pour vivre sa propre vie. Moi je suis restée au Pays avec mon oncle, Aevil. Il ne m’a jamais poussée à venir, je ne voulais pas. »

    Elle soupira puis commença à donner ses propres révélations. Retour sur un passé douloureux…

    « On vivait en Bourgogne à l’époque. Mon père s’appelait Jacknight. Ils étaient mariés ensemble. Papà est parti parce que trop occupé avec la politique, mort peu de temps après… Mamma nous élevait seule. Quant on a eu une dizaine d’années, elle a commencé à partir, souvent. Maintenant je sais que c’était pour des contrats d’assassinat… A l’époque, on croyait qu’elle nous abandonnait, en nous laissant plusieurs semaines seuls. On a fini par partir, retrouver notre oncle en Italie. Je lui en voulais encore jusqu’il y a quelques mois. Elle n’a jamais cherché à nous retrouver, à nous écrire… Aevil ne nous parlait pas d’elle, il savait que je ne voulais plus. »

    Elle haussa les épaules et baissa les yeux. La colère s’évanouissait lentement, mais en reparlant, elle savait qu’au fond d’elle-même ses regrets persisteraient toujours. Elle avait grandie loin de sa mère qui, à l’occasion, l’avait oubliée.

    « Je regrette un peu, aujourd’hui. Aevil a insisté pour que je vienne ici, que je vous retrouve. Il dit que ça m’aidera… Il m’a appris à combattre, à être forte. Il dit que je lui ressemble beaucoup. »

    Elle s’arrêta de parler, ne pouvant plus continuer pour l’instant. Remuer tout cela était éprouvant pour elle, même si elle ne souhaitait pas le montrer. Elle soupira, termina son verre et regarda Gabriele.

    « Combien êtes-vous ? Penses-tu, pensez-vous qu’ils m’accepteront tous ? »





hrp : paroles en italien aussi. Az' apprendra plus le français bientôt.
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Lililith
La Minusculissime penche la tête. Si elle parle l'italien, elle n'en comprend pas encore toutes les subtilités, et leur conversation lui échappe un peu. Elle ne comprend pas quand Gabriele parle de sa mère ; elle éclaircira ce point-là avec lui plus tard, peut-être. Elle écoute, attentive : il ne faudrait pas qu'elle rate le moindre détail, même si c'est un peu compliqué.

Et quand l'italien désigne la taverne, elle hoche la tête. Elle est d'accord : Azurine a toute sa place ici, Corleone oblige.

Les mots de cette dernière atteignent son esprit : elle n'est pas seule. De troisième, elle passe à quatrième. Elle serre les dents, n'aimant pas sa position qui change trop vite, pour se raisonner ; si elle a ce statut de presque dernière, c'est peut-être mieux : elle a plus de chances de se faire chouchouter. Elle a donc un frère aîné. Aldaric. Quelqu'un d'autre qui la protégera, ou bien, quelqu'un d'autre à protéger.

L'Étoile comprend qu'Azurine a souffert de ce départ, et si elle est encore touchée de la mort de la Matriarche, sa demie-sœur n'a jamais eu l'occasion de la connaître vraiment. Du moins, pas comme Lili. Et la vague de regrets qui peut toucher sa sœur la touche désormais, par empathie. Cette Corleone n'a pas eu de chance, mais c'est, semble-t-il, un trait de leur Famiglia d'être atteints par les coups du sort : chaque membre en est plus ou moins touché, à plus ou moins grande échelle. Normal : c'est la vie de brigand. Et la Minusculissime ne s'en plaint pas, parce que même si elle peut déplorer la perte des siens, elle aime cette vie-là.

Finalement, l'enfant se décide à lui répondre, en italien :

- Beaucoup. Et ils t'accepteront.

Elle n'est pas sûre de cette dernière affirmation, mais on peut lire dans son regard toute la détermination dont elle fera preuve pour que ce soit le cas. Elle va se battre pour qu'elle vienne avec eux. Elle retrouve alors le but qu'elle s'était fixé, et sur lequel elle avait parfois échoué avant même d'avoir commencé. Le clan devait resté soudé, coûte que coûte.
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Gabriele.
Le point d'orgue se trouve ici. Il est évident, transparent. Je ne peux m'empêcher de sourire à cette idée. A notre instar, à mes sœurs et moi, voici deux jeunes filles qui feraient la fierté du Clan, qui sauraient se battre pour lui, jusqu'à la mort si c'était nécessaire, j'en avais l'intime conviction. De toute façon, le sang qui coulait dans leurs veines – dans les miennes – ne pouvait pas mentir. Porter le sang de ce que l'Italie fait de plus beau et de plus grand n'est pas anodin. Il implique certains devoirs pour l'honorer, il est gourmand de tout cela même. Nous devons nous gorger du sang de nos ennemis en sacrifiant le moins possible le nôtre, infiniment plus précieux ; nous en avons conscience, j'en ai conscience, et l'air supérieur que j'arbore bien souvent aux dires de ma sœur n'est sans doute pas étranger à ce fait.
Ma cousine semblait avoir une pointe de déception dans le regard alors que je finissais de parler. Elle en voulait plus, je le voyais bien, mais ce n'était là que l'introduction, et il fallait bien commencer par quelque part, sans compter que si je lui disais tout, qu'est-ce qu'il lui resterait à découvrir ? Alors que là, une place de choix était laissée au mystère, à la découverte de cette famille aux caractères aussi éclectiques qu'imprévisibles.

Dans la série Corleone, il y avait les plus visibles, Arsène, la roussette au caractère de merde qui, si elle pouvait se montrer désagréable avec tout le monde – en particulier avec moi -, n'en montrait pas moins une abnégation sans failles pour le Clan. Sainte Ina, l'arrogance et la patience à l'état pur ; un rôle qui lui collait à la peau, et qui lui allait parfaitement. Pas besoin pour elle de s'énerver, une réplique placée au bon moment et bien acide suffisait amplement.
On pourrait parler des heures des Corleone. Il y avait le froid Amalio, passionné uniquement lorsqu'il s'agissait de médecine ou d'Elwenn, la discrète Elizabetha qui était loin de posséder le même caractère affirmé que ses sœurs, l'énergique et curieux Leandro. Tant d'autres, tant de différences réunies sous un seul point commun : le sang. Ce sang qui véhiculait une fierté sans pareille, un ego qui ne pouvait être mis de côté que pour ceux qui partageaient le même. Jamais on ne me verrait m'écraser devant une autre personne qu'un Corleone, encore que même avec eux j'ai souvent du mal à reconnaître quand j'ai tort.
Mon regard passe de l'une à l'autre des deux sœurs, avant que l'aînée ne reprenne la parole et n'ait à nouveau toute mon attention.

A bien y réfléchir, je ne comprends pas non plus pourquoi Rodrielle a eu ce désir de cacher sa vie antérieure. Avait-elle voulu protéger ses premiers enfants, ou bien avait-elle simplement voulu tourner la page et repartir de zéro ? De toute façon, personne ne pourrait plus le savoir à présent, à moins qu'elle n'ait confié son secret à mon grand-père avant de mourir. Aevil. Il faudrait que je le vois, je n'avais pu que l'apercevoir lors de la mort de la Matriarche, et j'avais de très nombreuses questions à lui poser. Ce n'est pas tous les jours que l'on peut rencontrer son grand-père, surtout lorsqu'on porte un nom comme le nôtre, on a une légère tendance à ne pas faire de vieux os. En sachant que mon padre n'était pas bien loin de la quarantaine...oui, en effet, très vieux os même.
En songeant à eux, je ne pouvais que me rassurer : l'âge n'avait rien enlevé à la beauté de mon padre, qui restait l'homme le plus parfait qui soit, le modèle à suivre pour moi. Après ces considérations esthétiques, j'en reviens à Azurine, au récit de sa vie. Je n'avais jamais entendu parler de ce Jacknight, ni par Rodrielle ni par une autre personne.

A nouveau, un sourire reprend place sur mon visage. Je m'adresse aux deux filles lorsque je prends la parole une fois encore.

« - Vous ne comprenez pas les filles. Vous pensez toutes les deux que Rodrielle vous a caché des choses, vous a menti peut-être, vous a abandonné. Mais ce n'est pas vrai. Regardez autour de vous. Malgré les épreuves, vous êtes ici, réunies, toutes les deux, et je suis sûr que votre frère nous rejoindra aussi un jour. Rodrielle ne vous a rien caché. Elle attendait que vous soyez prêtes à entendre ce qu'elle avait à vous dire, à assumer la place de choix qu'elle voulait pour ses enfants. Rodrielle vous a laissé une preuve de son amour, à tous les trois une part égale : Son Clan, qu'elle a défendu corps et âme, qu'elle n'a jamais abandonné, qu'elle voulait mener toujours plus loin. Vous faites parties de ce Clan, mieux, vous êtes ce Clan, comme nous tous. Elle a toujours été là pour nous, même si elle n'a pas toujours été présente physiquement. Il n'y a pas de temps perdu, il n'y a que du temps à rattraper. »

Et d'ajouter, cette fois pour Az' uniquement :

« - Ils t'accepteront tous. Peu importe leur nombre. Parce que tu es Corleone et que tu sauras parfaitement prendre ta place. »
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Pour toute réclamation, merci de vous adresser à LJD Tigist
Azurine
L’Etoile parle en premier. Et c’est tout un monde qui s’ouvre aux yeux de l’Azurine. Elle comprend alors qu’elle n’est réellement plus seule, que sa famille s’agrandit à une plus forte échelle encore que celle du clan. En parlant, enfin, grâce à ces quatre mots l’Enfant lui fait comprendre qu’elle l’accepte en tant que sœur, en tant qu’aînée d’une fratrie inconnue. Et c’est alors que les paroles de Gabriele prirent tous leurs sens. Etait-ce donc cela que Rodrielle avait cherché ? Réunir ses enfants, un jour, pour célébrer l’avenir des Corleone ? Avait-elle prévu tout cela ou était-ce le fait d’un hasard, finalement, bienheureux ? L’arrivée d’Azurine dans le clan n’était donc pas une nouvelle mais simplement une suite logique à la vie Corleonienne. Tout était donc écrit.

Devait-elle donc la remercier, cette mère qui n’était absente que physiquement ? Cette mère qui ne l’avait peut-être pas oublié mais qui lui avait simplement laissé le temps de prendre ses décisions par soi-même… Parce qu’elle aurait pu revenir plus tôt, elle aurait pu donner des nouvelles. « Buongiorno Mamma. Sono con Aevil. Sto bene. Azurine ». Quelques mots simples qui auraient pu tout changer. Elle n’avait pas écrit, avait demandé à son oncle de la garder cachée, sous silence. Ne parle jamais de moi, ou je partirais pour toujours. Il avait craint, l’avait écouté. Azurine et son frère n’avaient été que des ombres, des spectres. Et aujourd’hui ils revivaient.

Elle revivait.

Les yeux rivés tour à tour dans le regard des deux italiens, Azurine ne savait quoi dire. Elle n’avait donc plus le choix que de les suivre, que de prendre sa place dans le clan. Et quelle place ; celle de la fille de Rodrielle. Y croiront-ils ? Ils auraient certainement du mal au départ, croiraient en une imposture pour récupérer une place de choix qu’elle ne voulait finalement pas.

« Je ne souhaite que d’être intégrée. Je ne veux en aucun cas prendre la place de quelqu’un dans la gestion de ce clan, comme Rod… comme Mamma. Je n’en ai ni l’envie, ni l’ambition. »

Elle souhaitait poser les bases au moins avec eux, qu’ils soient des appuis solides dans son intégration. Elle finit enfin par leur sourire. Un sourire sincère. Elle sentait enfin qu’elle allait pouvoir exister réellement.

« Que dois-je donc faire ? Ou dois-je aller ? »

Elle voulait les rencontrer tous, tout de suite. Elle voulait apprendre à connaitre sa sœur et son cousin, rattraper le temps perdu. Elle voulait tout. Vite, vite, il y a tellement d’années passées. Dites-moi tout, montrez-moi, emmenez-moi où il faut. Elle réussit tout de même à se poser, soupirer devant tant d’émotions nouvelles.

« Grazie. »

Un unique mot qui exprimer une infinie gratitude.
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