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[RP] De Eriksen à MacFadyen. A la recherche de soi

Soren
Hoy, Helsingør, Périgord. Un fil ténu relie ces trois lieux symboliques de ma vie. La naissance, l'enfance, la découverte.

Hoy... Un village planté sur un caillou venteux au milieu de la mer du Nord. Une terre presque inhospitalière où faire pousser quelque chose relève de la sorcellerie. Je n'y suis jamais allé. Tout ce que j'en sais, je l'ai appris dans un livre que j'ai survolé après avoir appris que j'y étais né. Hoy m'est aussi étrangère que la plupart des villes de France, Paris y compris. La seule différence, c'est qu'elle exerce en moi une fascination morbide. J'aime refermer les boucles. Si j'ai le choix du lieu de ma mort, alors c'est là-bas que je veux respirer ma dernière bouffée d'air. Simplement parce que j'y suis né et que je n'ai aucun souvenir de cet endroit. Je l'ai quitté alors que j'étais un marmot qui devait encore souiller ses langes. Lorsque j'y retournerai, je sais que je ne serais pas encore assez vieux pour salir mes braies. La mort me fauchera bien avant... et je finirais ma vie seul.

Helsingør... Le Jutland, les îles, le Danemark. Toute ma vie. Enfin...presque. Des souvenirs à foison... que je désire oublier pour certains. Et pourtant, un pays dans lequel je voudrais retourner avant d'atteindre les Orcades. Vie, mort, souffrance. Rideau sur un passé qui a fait de moi ce que je suis aujourd'hui.

Périgord... Terre inconnue. J'y aurai passé deux ans parait-il. Oui, terre inconnue. Des visages qui semblent unilatéralement familiers. De eux vers moi. Des tas de personnes qui en savent trop sur moi. Tous des anonymes. Ce pays n'est qu'un tas de surprises pour moi. Je ne m'y sens pas à l'aise. Je puis tout assumer... mais je déteste cette impression de ne pouvoir discerner le vrai du faux au sujet des mes actes. A cela s'ajoute que ce pays est le lieu de résidence de ma famille maternelle qui m'est tout aussi inconnue que les autres. Une soeur, une mère, un frère... et qui sait, d'autres personnes encore? Ah oui! Un frère aussi. Un frère qui ne l'est pas vraiment...et qui justement pourrait être un lien vers cette terre. Un lien...pour un jour y revenir?


Citation:

    Jehan,

    Je t'écris parce que je te sais proche de ma soeur et que je n'ai pas de nouvelles d'elle. J'espère qu'elle va bien et que tu as réussi à la sortir de son imbroglio judiciaire. Puisque tu m'as conseillé de ne pas écrire à ma mère, je me suis abstenu. Tu seras donc le dépositaire des dernières informations sur ma personne. Comme ça, si je meurs, Les MacFadyen auront une petit idée de ce qui s'est passé pour moi entre temps.

    En quittant Bergerac, j'ai passé presque deux mois complets au prieuré de Ste-Illinda en Guyenne. J'avais besoin de me retrouver au calme pour réfléchir à tout ce qui s'est passé dans ma vie. Le croirais-tu si je te disais qu'un prieuré est poutant un lieu fourmillant de vie? Enfin...à part évidemment si l'on chercher à coucher une ou deux dames dans son lit. Ça pour ça, tu t'en doutes, ça a été on ne peut plus calme! A part ça, j'ai appris à faire de la bière, j'ai découvert un passage secret qui conduit de la bibliothèque au cimetière. Comme quoi, lire dans un prieuré est d'un ennui mortel! J'ai aussi intercepté un étrange échange épistolaire entre un résident des lieux et une jeune femme en détresse. Je suis parti en exploration dans les caves du prieuré où j'ai découvert l'or de Guyenne. Ça m'a couté un ensemble complet de vêtements totalement tâchés. Ah, et accessoirement aussi, je me suis fait exorcisé (J'ai bien dit exorcisé et pas excisé.)!

    Ah! Il faut aussi que tu saches qu'avant de partir pour Bergerac, je suis passé à Sarlat. je comptais voir ma Mère à l'auberge qu'elle tient en compagnie d'un certain Atana-gore. Peine perdue. Le soir, j'ai cherché un endroit pour dormir et je suis tombé sur une compagnie bien étrange de guyennais en balade. L'une des personnes de ce groupe m'a même donné la clé de sa chambre. Elle est devenue mon médecin personnel. Enfin...Médecin... J'ai appris bien des semaines plus tard qu'elle n'avait point étudié l'art des soins et qu'en réalité elle compilait plus des remèdes de grand-mère. Parait que ce sont les meilleurs.

    Ma retraite terminée, ce petit groupe est venu me chercher à Ste-Illinda. Après avoir fait un tour en Guyenne, nous sommes repassés par Sarlat. J'espérais y croiser Mère. En vain une deuxième fois. Sans doute m'évite t-elle. Tu me diras, si toi aussi tu récupérais un mioche après tant d'années, tu ferais sans doute de même. A Sarlat, je suis passé à la taverne des Amazones. J'y ai croisé une tribu bien étrange composé d'une plume, d'une patt, et d'un seigneur dont j'ai oublié le nom. Ils m'ont tous raconté des histoires abracadabrantes sur mon passé, les fonctions que j'aurais tenues et les activités que j'aurais eu Périgord. A les croire, j'aurais aussi passé mon temps à embrasser des femmes au point que je me suis demandé si j'avais connu le gout de chaque paire de lèvres qui entrait dans la taverne.

    Depuis j'ai entrepris un voyage à travers le royaume. Nous sommes remontés vers le Nord du Royaume. Je suis passé par le Maine dans lequel j'y ai des amis. Cela a permis de se remémorer quelques souvenirs mais rien que je n'avais oublié. Malgré le fait que mes jambes ne me portent plus, on m'a invité à un mariage. Enfin...Disons plutôt que j'y accompagne mon médecin. C'est elle qui est invitée. Enfin, il est prévu une pêche à la raie-je-ne-sais-plus-comment. Parait que ce poisson a la faculté de réveiller les morts! Et comme de mon côté, c'est simplement les jambes qui sont mortes, je garde bon espoir dans les prédictions de mon médecin. De toute façon, entre ça ou rien, mieux vaut s'accrocher à un espoir si mince soit-il.

    Passe le bonjour à ma soeur et à ma mère.

    J'aurais envie de dire "Je t'embrasse" mais tu es encore trop masculin pour moi malgré quelques petites touches de féminité dans ton comportement.

    Fait en Alençon, le 28 Mai 1462

    Ton frère Søren.

_________________
Jehan_le_blond
- J'ai dit trois soles !!!
- Et moi, j'ai dit que je demand'rais à un aut' drôle la prochaine fois... T's'ras obligé d'aller travailler au champ avec ton père...
- ... Alors deux soles !
- Rien du tout... T'as volé un poney à la patronne... T'sais c'que ça fait un voleur de poney quand on y vole un poney ?
- ...
- Ca y arrache à un oeil avec les dents, pis ça y attache un pied à une poutre comme ça, à l'envers, en attendant qu'y s'vide... comme une galine. C'est la loi ancêstrale qui dit "qui vole un poney, vaut un poulet !"


A partir de là, il t'a fallu deux secondes pour récupérer la missive, et sans dépenser le douzième d'un denier. De l'avantage de dire le mot "loi" quand on est avocat. C'est mal, c'est très mal, hou que c'est mal ! Mais c'est pratique voire économique.

De la lire calmement malgré l'excitation d'avoir des nouvelles de la famille autrement que par un procureur débile interposé.

Mathurin, tu peux rester ici cette nuit et manger avec moi... demain, je te louerais une autre monture... et je te donnerais un écu... Tu iras... porter cette lettre au fils de la patronne !
Deux écus...
Poney, poulet...
D'accord, un écu...


De couper du pain dur et de faire couler du bouillon chaud dans le bol.
Tiens... mange... Pendant ce temps, je vais écrire...

C'était assez difficile de décrypter Soren. Son écriture était nerveuse, outrageusement penchée, parfois vers l'avant comme cette fuite impérieuse vers un ailleurs qui le tenaillait sans cesse, parfois vers l'arrière, comme s'il freinait soudain des quatre fers pour tenter de s'ancrer dans un sol trop mou. Finalement, tu aimais vraiment Soren. Vous vous ressembliez sur de nombreux points. Sauf que lui avait dû apprendre à écrire depuis très jeune, ce qui n'était pas ton cas. Ces D majuscules étaient parfaitement carrés, presque comme un livre, quand les tiens ressemblaient plus au cul de Lubna... diantre ! QUelle comparaison...

Sur une face du parchemin :


Citation:
A Soren Erikssen


Sur l'autre :

Citation:

    A toi, mon frère.

    Je suis bien content que tu m'écrives, car la vie à Paris est un peu morose. Le prix des catins est devenu exorbitant et leur bière sent la vieille chaussette. Quant aux vins, les bateliers qui remontent jusqu'à Orléans nous abreuvent d'une piquette acide qui m'aide à nettoyer ma plaque de Dragon, mais me troue la panse si je tente d'en boire. Je crains par ailleurs que le nouveau bâtonnier des Dragons ne suspecte déjà mes incursions dans la cave de l'Ordre.

    N'hésite pas à m'adresser tes missives directement à Volpone car c'est ici que tu pourras me trouver la plupart du temps. J'ai en effet quitté le Périgord dans la contrariété et me sens plus enclin à exercer en dehors de mon foyer pour l'instant : je reviens de Gascogne où j'étais partie défendre une des gueuses qui ont pris Sarlat, l'an dernier. Ne m'en veux pas. Le roi ne veut pas de justice privée, alors il faut se conformer aux usages policés de la justice de tribunal ce qui lui confère le droit à un avocat, elle aussi. J'ai aussi fait un tour en Champagne, pour y défendre deux canailles qui pissent certainement encore dans leurs braies : ils ressemblaient à ce que j'aurais été certainement, si la Mère n'avait pas été là pour me sauver de moi-même. Je reste perturbé de cette rencontre. J'ai pensé à toi aussi et à Una, qui avez grandi sans elle. Ce procès m'a sans doute filé un coup sur la caboche. Va falloir pas mal picoler pour m'en remettre.

    Pour tes visites à Sarlat, je te dirais de ne pas écouter les crétins et surtout pas les pochtrons que l'on croise en taverne. La Mère n'a jamais tenu de taverne à Sarlat, encore moins avec le patron. Ils ne mettent jamais les pieds au village. Si tu veux les trouver, il faut remonter sur Périgueux, et t'arrêter sur le chemin, là où tu t'es réveillé : Aux Cordeliers. Cependant actuellement, les patrons n'y sont pas. Ils sont partis s'approvisionner dans les comtés avoisinants car les ressources de leur "royaume indépendant" ne leur permettent pas encore de vivre en autarcie, même s'ils le souhaiteraient.

    Quant à ta soeur, depuis qu'elle est revenue, contrainte et forcée de Bergerac, trempée jusqu'aux os et fiévreuse, je ne l'ai point revue. Passer aux Cordeliers, savoir qu'elle y est, et ne pouvoir la voir, contribue à ma fureur. Alors, je n'y mets plus vraiment les pieds non plus même si j'en crève. Mais tu es certainement l'avant-dernière personne à qui je devrais dire cela.

    Je suis content pour toi que tu aies pu te faire de nouveaux amis. J'espère que cela contribuera à te rendre ta joie de vivre. Tes jambes ne sont pas mortes, Soren. Si tu avais des souvenirs, tu te rappelerais que les soeurs avaient diagnostiqué que tu pouvais marcher. Faut juste ne pas abandonner. C'est sûrement ce que laa Mère te dirait, après ou avant de te coller une volée.

    Je t'embrasse, moi, virilement, espèce de norse à la manque.

    J.
Soren
- Jehan de Sarlat.

- Pardon?

- Sarlat.... Jehan de..

- Parlez plus fort, je suis un peu dur de la feuille

- SARLAT !!!!

- Sale race? Non mais dites jeune homme, soyez un poli tout de même! Personne ne vous a jamais appris le respect?

- Rhaaaa....Je n'ai pas dit Sale race! J'ai dit...SAR...LAT....SARLAT...SARLAT....SARLAT!

- Sarlat? Dans le Périgord? Ah mais sieur, vous tombez mal! Je n'ai plus de locataire du pigeonnier de Sarlat. C'est mort par là! Plus personne n'écrit là-bas! Alors j'ai décidé de couper dans mes frais et ne plus entretenir de pigeons sarladais.

- Noooon! Je ne vous ai pas demandé de l'expédier à Sarlat. Vous me demandiez à qui il était destiné! Alors je vous réponds : à Jehan de Sarlat!

- Jeune homme, ce n'est pas en insistant plus je vais vous pondre des pigeons de Sarlat! Ça ne se fait pas comme ça! Roucouler ne suffit pas vous savez...Bon! Et à qui vous voulez à l'envoyer ce message?

- A Jehan... Aaaaah! Laissez tomber! À Paris! Chez les dragons! Volpone ou un truc comme ça!

- Oh! Oh! Oh! Non, non jeune homme, rassurez-vous! Mes pigeons ne se font pas harponner par des dragons du parvis! Vous savez, ce sont des légendes tout ce que l'on raconte sur les Dragons. Ils n'existent pas!

Eh bien! Si avec tout ça, Jehan arrive à lire cette missive, c'est qu'il y a quelque part un bon Dieu qui veille sur les danois!


Citation:
    A Jehan de Sarlat, dragon et faux blond,

    Salutations à toi le fils de famille,

    Ainsi donc, c'est là-bas que tu te caches? Dans la vieille capitale? J'imagine aisément que la vie doit être assez différente que dans ton Périgord natal. C'est dommage: j'ai reçu ta lettre trop tard. J'ai moi-même fait un bref séjour à Paris. Figure-toi que j'ai reçu une invitation à assister au baptême de sa Majesté Richard de Cetzes, fils du Roy actuel et d'une dame que j'ai pendant un moment pris pour la Reyne. Qu'est-ce que je faisais là? C'est une trop longue histoire à te conter: la longueur de mon vélin n'y suffirait pas et l'encre est rare et chère par ici. Sache juste que cela à un rapport avec une de mes fréquentations du temps où je vivais encore en Périgord. Rien que pour voir la tête que faisait la noblesse du royaume à cette cérémonie, cela valait le coup du déplacement depuis le Maine. Il est regrettable qu'aucun journaliste de l'AAP n'ait été présent pour couvrir un tel évènement.

    Ainsi donc, le prix des catins a monté en flèche à Paris? Compte-toi heureux: dans le Maine, c'est la pénurie qui sévit. Si les premiers mois après mon réveil auprès de ma soeur au couvent des cordeliers, je n'avais pas trop la tête aux ébats charnels, il faut bien avouer qu'après au moins quatre mois d'abstinence total, les humeurs masculines commencent à devenir sérieusement corrosives. Cela t'étonnera peut-être mais c'est même la première fois que j'ai sérieusement envisagé de fréquenter une maison close. Je m'en suis ouvert à la chancelière du Maine, une de mes amies, qui après s'être informé, m'a signalé que le Maine n'en disposait pas. Foutu royaume! Mais toi? Ne m'as-tu pas dit que tu avais un faible pour ma soeur? J'imagine que l'intérêt pour les catins est de nature professionnelle. Les filles de joie de Paris font--elles partie de ta clientèle? Te spécialises-tu dans les dossiers liés aux troubles à l'ordre pudique? Il parait que c'est un domaine très éprouvant, très éreintant pour les avocats.

    Tu me parles du patron. Est-ce lui qui se prénomme Arth? Une des personnes avec qui je voyage actuellement m'a dit qu'elle l'a croisé à quelques occasions au hasard de ses pérégrinations. Il parait qu'il serait celui qui partage la couche de ma mère, qu'il aurait tendance à bougonner de temps à autre, et qu'il lui en voudrait parce qu'elle lui aurait fait perdre un joueur de soule, un certain Bartho. Passe-lui mon bonjour tiens! Peut-être que je lui manque.

    Una est-elle malade? Pourquoi ne peux-tu la voir? Tu ne vas pas me dire que quelques nonnes vont t'empêcher de voir celle que tu aimes? Mais dis-moi, t'aime t-elle au moins? Plus ou moins que le Très-Haut? Tiens-moi informé de son état de santé veux-tu? Je lui suis grandement redevable de ce qu'elle a fait pour ma personne.

    Tiens! J'ai enfin une utilité: je vais enseigner au petit de la Bulle (La Bulle, c'est la meneuse du petit groupe auquel je me suis joint) le maniement de l'épée. Ça me fera patienter en attendant que je puisse de nouveau combattre. J'en ai assez de me trainer comme un limace. C'est tout juste si je ne laisse pas derrière moi une trainée humide. Comme tu peux le constater, le moral est fluctuant. Il faut que je fasse avec. Je n'arrive pas à imaginer ma vie cloué dans un fauteuil ou dans les bras d'un bucheron qui sent la sueur et l'humus. Dans trois jours j'accompagne mon médecin personnel au mariage, et ensuite nous filons à la pêche. Souhaite-moi bonne chance. Je ne sais pas quand je rentrerai au pays pour ma part. Si le miracle de la ventée fonctionne, je lui ai promis de l'accompagner dans son pays pour qu'elle y fasse un premier retour aux sources depuis fort longtemps.

    Amuse-toi bien avec ton bâtonnier mais n'oublie que celle qui t'est dévolue par le Très-Haut se trouve au couvent des cordeliers.

    Fait à Rennes le 11 Juin 1462




_________________
Jehan_le_blond
Il a toujours beaucoup parlé. Ils sont tous bavards, tous. Le p'tit Hadrien, la Mère... Una moins. Encore que. Non, pas vraiment. C'est même pour ça qu'elle a loupé l'examen aux Dragons. Ce que mestre Gaultier a pris pour un manque de travail, c'est juste qu'elle s'exprime avec une avarice de mots. Toi, tu le savais, sauf que tu ne pouvais pas le dire au vieux. T'étais qu'un Dragon débutant lorsqu'elle s'est plantée. Pis, t'façons, elle t'avait rien demandé... Pourquoi parler d'elle autant ? Parce qu'il n'arrête pas de t'en parler, tout au long de sa lettre.

Mathurin te coutait trop cher, il te fallait trouver un autre moyen. Le pigeonnier de Volpone. Dyvina allait piquer une crise mais tant pis.



Citation:
    Faux frère,

    Pourquoi ne saurais-tu baisser ta garde un instant ? Et quand je parle de garde, je ne parle pas de celle que tu présentes aux joyeuses du Maine. Je te parle simplement de prendre le temps comme moi, de te satisfaire de choses simples, comme le plaisir de ne rien faire et de contempler les nuages ? Je suis avocat, certes, mais contrairement à la Mère, je n'ai aucune joie à m'enterrer dans quelques bibliothèques à décortiquer des articles de codex éculés.

    En parlant des joyeuses du Maine, j'avoue que je suis heureux pour toi que tu aies à nouveau des "humeurs" sous la taille. C'est sans doute très bon signe. Quant à celles de Paris, ce sont elles qui ont quand même la meilleure bibine, les meilleures tables de carte et même les meilleurs bains de la capitale. Je ne saurais m'en priver. Pour le reste, je trouve vraiment trop étrange d'en discuter avec toi. L'idée même que tu me parles de ta soeur et tes catins dans le même courrier, me plonge dans la plus grande des confusions.

    A son sujet, je ne saurais répondre à tes questions. Voilà des semaines qu'elle se terre au couvent. Je pense qu'elle n'a pas apprécié que tu quittes les Cordeliers si vite après ton rétablissement. Comme toi, je crois qu'elle recherche des réponses, même si elle pose rarement les questions.

    Je crois aussi que l'état de la Mère lui est insupportable. Ce n'est que mon opinion, mais je dois t'avouer que je m'inquiète aussi. Nous n'en avons pas parlé parce que toi-même, tu te débats avec tes souvenirs. Sache seulement que tu n'es pas seul à le faire : à l'annonce de ta mort, ta Mère a perdu l'Esprit, oublié les années qui se sont écoulées depuis la mort de ton Père. Elle se souvient de toi et d'Una, sans pour autant se rappeler qu'elle ne vous a pas élevés. Initialement, elle pensait avoir pris le voile après la mort de ton père. Elle sait désormais qu'il n'en est rien mais ce n'est pas pour autant qu'elle se souvient de toutes ses années. Elle ne se rappelle plus qui je suis. Elle ne se rappelle plus ses autres enfants, ni même celui qui fait plus que partager sa couche. Le patron, en effet, c'est son époux.

    Contrairement à toi, le souci c'est qu'elle ne pose pas de questions. Elle se mure derrière ses illusions ou bien sa déception. Je sais que sa mère est morte folle, ne reconnaissant plus personne. Elle m'en a parlé, il y a longtemps, pour m'expliquer qu'il faut toujours entretenir sa mémoire, en apprenant et apprenant. Je sais qu'elle a peur d'être comme sa mère mais je ne sais pas quoi faire en attendant. Je doute que le patron soit d'une grande utilité non plus. Il ne reste que toi et ta soeur. Mais aucun de vous ne la connait vraiment.

    Cela te parait absurde sans doute mais vous êtes ma seule famille et il me fait mal de savoir que ma famille est aux quatre vents.

    Dans l'attente de connaitre la suite de ton périple et de ton questionnement.

    Jehan
Soren
Étrange ville que Tréguier. Oh, on ne peut pas dire qu’elle soit morte non et même si on compare à d’autres villes que l’on a traversées, elle est plutôt active. N’empêche… Tréguier me laisse l’impression d’irréalité. Vous savez, ce genre de village où vous pourriez voir un squelette traverser la rue pour passer du cimetière à l’église sans que cela ne vous étonne le moins du monde! Ajoutez à cela que Zephyre vient de me dire que des brumes viennent de se dissiper dans son esprit, qu’une danoise rencontrée il y a peu prie encore Odin, que la corde que l’on vend aux pendus est de piètre qualité et vous comprendrez pourquoi que je commence à croire que Tréguier est la porte d’entrée pour les limbes! Sans compter que trouver de la bière ici relève presque du défi du siècle… Mais des pigeons, ça, il y en a encore! Ils regardent d’un œil mauvais, sont un peu décharnés et font un bruit un vous glacer le sang à chaque fois qu’ils roucoulent mais il parait qu’ils sont aptes à aller porter un message à Paris.

Citation:

    Mon cher Dragon,

    Je suis content de voir que tu as bien reçu ma missive. J'avoue que j'avais un doute. On voit que l'économie du royaume de France ne va pas bien. Les budgets des services royaux sont coupés partout, même à la POSTE. J'ai bien cru que je devrais faire le voyage moi-même pour te porter ma missive en mains propres. Quand on pense que la POSTE est classée comme un service essentiel à rendre à la population, je ne veux même pas imaginer ce que deviennent les services de priorité moindre.

    Baisser la garde? Eh bien, on voit que la tactique et la stratégie militaire ne font pas partie de tes loisirs. Je n'ai pas de garde à baisser car il n'y a rien à garder Jehan. Un grabataire comme moi ne sert à rien: mes compétences martiales sont totalement inutiles et mon oncle n'était pas du genre à m'apprendre les secrets d'un quelconque artisanat qui, de toute façon ne m'intéresse que peu. Quant aux femmes, tu dois bien imaginer que mon pouvoir d'attirance n'est guère au plus haut en ce moment. Vois-tu, je dois bien t'avouer que, depuis mon réveil aux cordeliers, j'ai bien eu envie d'embrasser une dame ou de passer mes mains sur son corps, mais je n'ai jamais franchi le pont. Ça me fatigue tout ça Jehan! Hercule pouvait bien avoir sa force dans ses cheveux, la mienne aujourd'hui est dans mes membres inférieurs. Quand à ta proposition de contempler les nuages, je l'ai déjà fait à Ste-Illinda et puis, dans les nuages, on voit toujours des tas de choses! Et ça, ça me fait cogiter trop! Beaucoup trop!

    Je suis enfin arrivé à Tréguier pour ce mariage auquel mon médecin doit assister. Je croyais que la France était un pays de fou mais la Bretagne, c'est pire: figure-toi qu'en arrivant, on apprend d'un certain Thranduil qui doit officier au mariage, que les époux se sont pendus. Ne me demande pas pourquoi, je n'ai strictement rien compris à son discours d'alcoolique. Je croyais que les prêtres avaient fait vœu d'abstinence, mais visiblement ça ne doit pas concerner l'alcool de sardines et autres joyeusetés de ce genre. Et puis, ne voilà t-il pas que la future épousée fait son entrée en taverne. Peu de temps après, c'est le futur époux! Ajoute à celui que des tas de personnes (toi inclus d'ailleurs) prétendent que je suis mort, et tu avais là, un bel échantillon d'âmes en peine auxquelles à la fois le Très-Haut et le Sans-Nom auraient refusé l'accès à leur lieu de villégiature. Finalement, le mariage a eu lieu. Je n'y ai même pas participé. Il n'a même pas été célébré par Thranduil mais par...mon médecin. Oui, je sais, c'est étrange! Moi-même, je ne cherche plus à comprendre! D'ailleurs, ce matin j'ai ouïe dire que les mariés pensaient déjà à se séparer. De ce fait, Treguier c’est fini! Plus rien à faire ici! Nous allons repartir pour Brest. C'est de là que nous partirons à la pêche à la raie. Tiens, au fait, le curé Thranduil prétend qu'il connait Mère! Il trouve même qu'entre être paralysé et avoir Bryn MacFadyen comme mère, le moins pire c'est que mes jambes soient mortes. Elle est vraiment si terrible que ça Mère?

    En parlant d'elle, tu dis que Mère a perdu l'esprit? Qui prend soin d'elle alors qu'Una est aussi malade et que toi tu trouves à Paris? Cet Arth, son époux? A t-elle besoin d'un médecin? Veux-tu que j'en parle au mien? Elle pourrait avoir une idée. Si elle est capable de rendre la vie dans mes jambes, elle doit bien être capable de faire revenir Mère à la raison. Tu m'as dit à Périgueux de ne pas lui écrire. Penses-tu toujours qu'il soit sain que je m'abstienne d'entrer en contact avec elle? Sinon, je pourrais écrire au patron. Il pourrait lui lire une de mes lettres et escamoter ou ajouter ce qu'il estime être bien pour elle… Ou encore je pourrais passer la voir après ma guérison : je n'ai pas envie qu'elle me voit dans cet état, je ne suis pas sûr de pouvoir lui être d'une quelconque utilité de visu tant que moi je n'ai pas résolu mes propres problèmes. Une lettre par contre peut plus aisément masquer ces difficultés.

    Dis-moi, j'ai besoin de tes services. Pourrais-tu te renseigner sur un certain Coguin. Il serait de la famille d'une personne nommée Nevgerel. Je crois qu'ils habitent du côté des Flandres. Coguin serait un artiste-peintre. J'aimerais savoir si ces gens ont déjà été condamnés, s'ils sont soupçonnés de certains méfaits ou d'être en relation avec des groupes de truands organisés. J'imagine qu'avec tout le monde que tu fréquentes des deux côtés de la barrière, ça doit être un jeu d'enfant pour toi.

    Ton frère d'âme,

    Fait à Tréguier, duché de Bretagne, le 16 Juin 1462



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Soren
Tout est dit. Il n'y a plus qu'à y aller. Ça fait des mois que j'attends ça. Des mois! J'espère simplement, Jehan, que cette lettre n'est pas une lettre d'adieu.

Citation:

    Jehan,

    Voilà, j'y suis et je vais faire court. Je t'écris alors que le soleil ne s'est pas encore levé. Le coq lui-même n'a pas encore daigné monter sur son tas de fumier. On m'a dit de bien me reposer après la nuit passée en mer à chasser la raie et je n'ai pas fermé l'œil de celle-là non plus. Si j'ai peur? Non. Ça ne sert à rien. Je prends cette étape de ma vie comme une énième bataille. Mis à part lors de mon baptême du feu, je n'ai jamais eu peur d'aller au combat. Disons que si j'ai fini par déroulé l'ensemble de l'écheveau de ma vie, j'aurais simplement manqué de temps pour montrer au très-haut que je puis être quelqu'un de différent que ce que les apparences renvoient comme image de moi. Mon médecin croit que le choc que ces raies pourraient m'infliger serait susceptible de me rendre l'usage de mes jambes ou de me tuer. Voilà pourquoi, elle a tenu à attraper des raies de différentes tailles. Moi, je crois que je dois passer par là. Il suffit juste de tomber sur la bonne face de la pièce en espérant que celle qui sera lancée n'est pas truquée comme les miennes.

    Allez! Droit au but: je te nomme mon exécuteur testamentaire et ne va surtout pas m'embêter avec tes histoires de légalité ou de validité de la procédure, le temps me manque pour faire autrement. A toi d'être convaincu que n'importe quel gueux n'est pas capable d'écrire avec ce ton-là, que seul moi le suis. Je n'ai pas amassé grande richesse en France. Quand à celles qui se trouvent au Danemark, elles ont trouvé propriétaire depuis bien longtemps déjà. Mais si le hasard veut que quelqu'un se pose la question de savoir à qui donner tel ou tel objet, ne te tracasse pas: envoie ça à Una, la sœur que je n'ai pas eu le temps de découvrir. Je te demande juste une exception: j'ai trouvé dans ma demeure à Bergerac, une vieille canne sur laquelle sont gravées toutes les villes du Périgord et de l'Angoumois: celle-là, mets-la de côté et garde-là pour celle que je n'ai jamais vu (ou n'ai pas souvenance): ma mère.

    Si jamais quelqu'un se plaint d'avoir été lésé par moi, dis-lui de venir me demander directement des comptes. Précise-lui que selon toute vraisemblance, je serais du côté de l'enfer lunaire. Et s'il ne trouve pas, qu'il aille voir dans le coin de l'ancienne religion scandinave, qui sait? Si ça se trouve, ce sont eux qui avaient raison...même si je n'y crois guère.

    Si une femme se présente en disant qu'elle a eu un enfant de moi, dis-toi qu'il y a beaucoup de chances qu'elle mente, que la dernière dame qui a partagé ma couche était une rousse à l'accent écossais, que j'aurais marié et qui serait morte.

    Enfin, si quelqu'un vient me proposer le couronne danoise, dis-lui qu'il est trop tard, que de toute façon, je n'avais pas de monture pour la lui échanger et qu'en plus je n'avais pas spécialement le temps de m'occuper de ça.

    Voilà, tout est dit: préviens juste le patron que si cette expérience médicale se passe mal, c'est une frimousse connue de lui qui lui rapportera mon corps...Enfin...si elle s'est doublement trompée! Oui, je sais c'est nébuleux.

    Promis: désormais, je te laisse vaquer à tes occupations. Ne reluque pas trop les donzelles qui trémoussent leurs fesses dans les couloirs des palais de justice ou alors fais ça discrètement: c'est bien plus poli et joli.

    Fait à Brest, le 28 Juin 1462



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