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[RP] La nuit de plus.

Kye
Alors qu'ils étaient sur la route pour enfin emménager à Montpellier. Le couple fut prévenu que des brigands pourraient potentiellement les attendre sur la route entre Nîmes et Montpellier. Par mesure de sécurité, il fut décidé de tout laisser à Nîmes et qu'ils reviendraient plus tard pour reprendre les affaires. Visiblement le Lyonnais-Dauphiné ne voulait pas les laisser partir aussi facilement et il voulait leur laisser un petit souvenir. Par chance, il n'y avait eu personne sur les routes qui séparaient les deux villes.
En plus d'être un homme dépourvu d'attributs selon Kye, il était aussi bête que ses pieds. A l'entendre parler c'est comme s'il avait préféré qu'ils soient attendu sur les routes. Faut dire que d'après Elisa, ils allaient être attendu avec des catins et du vin. Bref, l'ambiance promet d'être festive mais rien. Dommage, tant pis, tant mieux.

Ce soir-là, ils étaient enfin revenus de Nîmes. Leur ancienne vie était réellement derrière eux maintenant qu'ils avaient tout ramené ici à Montpellier. Ils pouvaient enfin se tourner vers l'avenir et se construire un futur comme ils le voulaient.
Une partie des affaires était restée dans l'appartement d'Elisa en ville. Il n'y habitait plus depuis que Kye avait décidé de lui faire visiter l'ancienne demeure d'été de ses parents et qu'il avait proposé à la femme qu'il aimait d'y emménager avec toute la famille. Enfants, serviteurs, gardes, tous logèrent dans la demeure Noircastel. Logement qui devint rapidement trop petit pour tout le monde. Une chambre pour le couple, une pour chaque enfant, une pour chaque serviteur et pour les gardes. Aussi petites soient-elles pour les dernières, il n'y en avait pas assez.
En effet, rapidement il était question de pouvoir inviter de la famille. Toute la famille, si l'occasion s'y prêtait. Bien que beaucoup de Malemort ne voudraient surement jamais quitter Limoges et Ségur, il fallait quand même prévoir. Au cas où. Alors, des travaux commencèrent pour agrandir l'endroit. On y ajouta deux ailes. Une pour les gardes, séparé du bâtiment principal, mais tout de même relié par un couloir extérieur couvert par un pré-haut et une pour les invités avec tout le nécessaire en bureau et salle de bain.
Bien entendu, le jardin n'était pas en reste. Karwen, la défunte mère de Kye avait passé de nombreuses heures à commander les jardiniers pour qu'ils fassent un jardin à la hauteur de ceux du Louvre. Avec le temps, les aménagements avaient disparu et les fleurs n'étaient plus. L'hiver approchant, il était difficile de faire fleurir l'endroit alors des graines furent planter avec la promesse de rendre l'endroit aussi beau et agréable au nez qu'avant.

Le repas terminé, les enfants couchés. Kye et Elisa s'étaient rendus en ville comme chaque soir pratiquement pour aller en taverne. Ils rejoignaient toujours le même groupe d'amis, agréable au premier abord ils en devenaient parfois ennuyant. Avec le temps, ils devenaient peu bavard et le couple écourtait souvent les soirées, de ce fait. Pour autant, le vieux loup n'avait pas envie de rentrer. Il voulait rester avec la belle brune ce soir, rester seul avec elle, profiter de la nuit en quelque sorte.
Alors qu'ils se dirigeaient vers la voiture, un bras autour des hanches d'Elisa, Kye s'arrêta et la retint ce qui la fit légèrement pivoter. Il la regarda longuement, esquisse un sourire mystérieux comme il a l'habitude de lui faire et fini par dire :


- Je ne me sens pas l'envie de rentrer chez nous, pas maintenant. Et si nous allions à l'appartement plutôt ? Juste vous et moi. Demain s'il fait suffisamment chaud nous pourrions faire une petite balade autour du lac avant de rentrer et s'il fait froid alors nous pourrions profiter de la cheminée à deux, quelques nougats en guise de petit-déjeuné.


Elisa posa sa main sur sa joue, caressant ses lèvres du pouce et elle lui sourit avant de venir doucement l'embrasser.

- C'est une excellente idée mon tendre.

Conclut-elle.

Content que l'idée lui plaise aussi, Kye agrandit son sourire pour soutenir celui d'Elisa et ils reprirent la route vers la voiture. La Malemort rentra en première suivie de Kye qui annonça juste avant au coché de se rendre à l'appartement. Il connaissait la route, il n'y avait nul besoin d'en dire plus à ce dernier.

Quelques minutes plus tard, ils étaient arrivés à l'appartement. L'endroit était établi sur deux bâtiments entiers et comportait deux étages sans compter le rez-de-chaussé. Inutile de dire que c'était beaucoup trop grand pour eux deux, mais c'est ce qui en faisait le charme justement. Ils pouvaient profiter de chaque pièce comme ils le voulaient. Ils pouvaient y passer une semaine entière sans tout en dormant chaque jour dans une chambre différente qu'ils ne seraient pas revenus à la première fois. Mais bon, le couple dormait toujours dans leur chambre. Immense, le lit semblait minuscule alors qu'il faisait partie des plus grands du marché, dans cette chambre il y avait tout. Tout ce dont Elisa avait besoin le matin pour se préparer sans avoir à quitter la chambre. Parfois, Kye se demandait si c'était nécessaire d'avoir tout cela dans la chambre, mais lorsqu'il pouvait profiter de la vue du bain de sa compagne depuis le lit, il ne se posait plus cette question. Il profitait tout simplement.
Lorsque la porte se referma derrière eux. Kye attira Elisa vers lui pour l'embrasser passionnément et longuement comme s'il ne l'avait pas depuis des siècles. A chaque fois qu'il l'embrassait, il donnait cette impression, pourtant il savait donner à chacun de ses baisers quelque chose de légèrement différent surprenant un peu la Duchesse à chaque fois. Surprise qui se traduisait bien souvent par un soupire d'aise ou un frissonnement.
Comment s'y prenait-il ? Comment y arrivait-il à chaque fois ? Étaient deux questions qui revenaient souvent après chez la brunette. Deux questions qui restaient à chaque fois sans réponse et une promesse qu'elle ne tenait jamais. Ne pas se faire avoir la fois d'après. Énervant, au point de s'en mordre la lèvre inférieure de plaisir, elle appréciait toujours ses baisers et à chaque fois un peu plus même.

- Il fait froid ici, vous ne trouvez pas ?

Il ne faisait pas particulièrement froid dans l'appartement mais quelques degrés de plus ne seraient pas de refus. Surtout s'ils comptaient dormir. Kye la laissa donc là un instant et se dirigea vers la chambre pour y allumer un feu. Elisa n'avait pas eu le temps de lui répondre qu'il était déjà parti, le bougre. Maraud qu'il était, il l'avait laissé sur sa faim, ce genre de baiser ne la laissant que peu indifférente. Elle en vint à le détester de lui donner ce sourire aux lèvres de cette façon. Diable qu'il était doué.

Lorsqu'elle finie par entrer dans la chambre. Kye n'y était plus, enfin en apparence seulement. Il attendait simplement qu'elle rentre.

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Elisa.malemort
    « Je voudrais que tu viennes au bord de moi reprendre tout ce qui t'appartient, que tu me rendes tous ces bouts d'amour que j'ai laissés dans ta barbe, que l'on ferme une à une toutes les portes que l'on avait ouvertes, que l'on prenne le temps de se devenir un peu moins familiers, un peu plus étrangers,...»

        Anonyme




Une nouvelle famille. Voilà comment l’on pouvait désormais appeler ce petit cercle qui s’était fait entre les Malemort-Baccard-Noircastel. Une mère, un père par procuration et des enfants. Ils s’étaient désormais installés à Montpellier, ville d’enfance du Noircastel, ville qui avait su accueillir la famille après son exil du Lyonnais Dauphiné. Cette petite maison découverte lors d’une après-midi, laissé comme tel après tant d’année. La Malemort y avait vu une multitude de bonheur, de joie, de rire et même des larmes. Alors elle s’était mise à sourire. J’imaginant Kye plus jeune et tentant de se dessiner le visage de ses parents… Quand Kye lui proposa de venir vivre ici, elle ne put donc pas refuser. Cela était comme une évidence, ses enfants devaient grandir là, c’était inévitable. La maison était certes petite, elle n’avait de prime abord pas la possibilité d’offrir de la place pour toute la famille actuelle et future, les domestiques, les gardes et les invités… Alors la Malemort s’était occupé de l’agrandir, menant les travaux lorsque le propriétaire des lieux était occupé ailleurs. Cela lui passait ses journées et les travaux avancés finalement à grand rythme. Une nouvelle aile fut construire afin d’accueillir les domestiques et les gardes. Et une autre pour les invités. Le pavillon central, et cœur de la maison de l’époque resta pour le noyau de la famille. Elisa et Kye vivait dans la chambre la plus grande, les enfants avaient eux-mêmes leur propre chambre, même les jumeaux. Les jardins avaient également étaient aménagés. La Malemort fit planter des fleurs pour redonner couleur et vie à celui-ci. Des roses blanches spécifiquement furent plantées dans un coin du jardin avec une petite stèle gravé dessus « à notre étoile »… C’est ici que la Duchesse avait pris l’habitude de venir se recueillir lorsque son cœur était lourd et les larmes trop nombreuses. Un lieu isolé et calme où elle pouvait se retrouver seule avec cet enfant qu’elle avait perdu il y a de cela quelques mois.

Une journée comme les autres s’étaient déroulés, la Malemort avait suivi l’homme qui lui avait volé –au sens propre- son cœur voilà plus d’une année. A dire vrai, elle avait du mal à se séparer de lui. Trouvant déjà que ses absences à Paris étaient trop fréquentes, nombreuses et longues. Lorsqu’il était sur Montpellier, elle ne voulait pas gâcher les instants par des éloignements, des disputes et autres futilités. Il faut dire que depuis leur retrouvaille, le couple n’avait jamais été aussi fusionnel. La Malemort ne s’imaginait pas sans lui et elle espérait que cela été réciproque.
La soirée fut finalement courte, et le couple décida de se retirer plus rapidement qu’à l’accoutumé. Un bras autour des hanches, signe protecteur qui venait souvent –et là encore- annoncer un rapprochement de leur corps, l’un contre l’autre. La chair de son pouce sur ses lèvres, un regard noir terriblement amoureux…


C’est une excellente idée mon tendre.

L’appartement se trouvait dans le centre-ville. Sur les hauteurs de la grande ville de Montpellier. La Malemort l’avait choisi grand pour laisser à ses enfants l’aisance qu’ils avaient toujours connue dans leur Duché en Lyonnais Dauphiné. Quelques idées farfelues par-ci et par-là, pour convenir à des moments, des idées, des plaisirs, des lubies… Mais finalement, rien d’extravagant pour la jeune femme… Un petit peu plus pour le Noircastel…
Finalement le pallier passé, la Duchesse n’eut même pas le temps de dire ouf, qu’elle se retrouvait déjà dans les bras de son tendre compagnon. Leurs lèvres viennent se rejoindre. S’enveloppant l’une contre l’autre, s’embrassant fiévreusement à s’en couper le souffle. Elle adorait ce genre de baisers, elle adorait lorsqu’il venait la prendre tout contre lui, elle adorait même lorsqu’il venait simplement passer un bras autour de son frêle corps ou une main sur la sienne. Elle adorait cette attention qu’il lui apportait qu’importe les regards autour, qu’importe les dires, qu’importe les idées, qu’importe la situation. Elle l’adorait tout simplement et entièrement. Mais nul le temps de se remettre de ce baiser passionné et passionnant, qu’il avait déjà mis fin au baiser, laissant la malemort sur sa faim, tandis qu’elle mordillait sa lèvre inférieure, terriblement insatisfaite.


Il n…..

Le bougre s’était déjà enfuit vers l’étage pour faire allumer les cheminées… La belle marmonna, abandonnée ici-bas dans cet appartement désormais trop froid pour elle toute seule… Elle décida donc de ne pas attendre plus longtemps pour retrouver son corps brûlant.

Montant les marches comme si elles étaient infinies, la distance se diminuait de plus en plus, tandis que le corps de la Duchesse brûlait de plus en plus à l’idée de le retrouver. La séparation avait déjà été trop longue… Entrant dans leur chambre, très grande de toute évidence, trop grand même… Car Kye n’était pas là… Les yeux noirs de la jeune femme parcourent la totalité de la pièce, les moindres recoins, s’avançant dans la chambre pour mieux voir… Ses doigts traînent d’abord sur le marbre du secrétaire, puis sur les draps de soie sur le lit…


Mon tendre ? Où êtes-vous ? Comment pouvez-vous m’abandonner ainsi ? Moi si seule… Si triste…

Jouer la carte sentimentale ? C’est fait. Cela marchait la plupart du temps… Mais Kye était joueur, trop joueur même parfois… Et ce soir, il semblait avoir les cartes en main… Et le maraud avait sûrement tiré les quatre as… Le chanceux.
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Kye
Si les ancêtres de Kye étaient de haut-noble par le passé, lui aujourd'hui était un riche bourgeois. Il n'avait rien à envier à la noblesse si ce n'est le fait qu'il ne pût épouser Elisa dans l'immédiat sans qu'elle n'en perde son prestige aux yeux des autres. Car à ces heures sombres de notre histoire, on ne faisait pas la différence entre un riche bourgeois et un simple gueux, bien que le bruit ne fût pas le même lorsqu'ils marchaient. Ce n'était pas l'envie qui manquait à Kye pourtant d'épouser cette femme parfaite en tout point, le problème pour le vieux loup, c'est qu'il refusait qu'elle ne perde quelque chose pour lui et il refusait de prendre le chemin de la facilité en allant se faire vassaliser chez un ami comme certains. Non, s'il devait devenir noble un jour, ce serait à force d'acharnement et pour un travail et non une amitié reconnue. En attendant, il supportait tant bien que mal les remarques sur le fait qu'il ne fût pas son époux alors que tout amenait à le penser.


En riche bourgeois, Kye était aussi très joueur. Parfois trop, à tord ou à raison. Il pouvait jouer à propos de tout en allant de l'argent jusqu'à des biens mobiliers et parfois même jusqu'à sa vie. Elisa était aussi joueuse, moins que Kye, mais elle l'était. Certains diront que leur relation a commencé sur un jeu de questions réponses. Un flot de vérité pour noyer les mensonges, les faire oublier. Et puis au final, les voilà tous les deux dans cette même chambre, les yeux pétillant de bonheur.
La Malemort, malgré son jeun âge, était très douée dans certains jeux, trop selon le Noircastel. Si elle perdait facilement aux jeux de cartes, elle savait s'y prendre avec le loup. Elle connaissait les mots qui pouvaient l'atteindre et savaient les manier avec précaution. Dans sa cachette Kye se mordait les lèvres, il essayait de se persuader qu'elle n'était pas triste, que c'était faux, qu'elle se jouait de lui. Il aurait pu jouer sur les mots en lui disant qu'elle n'était pas seule dans la chambre, qu'il était là, quelque part

Finalement, il sortit de son terrier, la belle brune était encore de dos lorsqu'il se glissa jusqu'à elle et coula ses bras entre ses coudes et ses flancs pour ensuite poser ses mains sur son bas ventre, il vint nicher son visage dans le cou et il murmura d'une voix presque enfantine :


- C’est vrai…? Vous êtes triste…?

Sans attendre de réponse, il commençait déjà à embrasser le cou de la femme, remontant vers l'oreille et serrant un peu plus le corps féminin contre le sien.
Si Kye n'avait pas changé en privé, toujours aussi joueur, toujours aussi proche d'Elisa. En public, c'était presque le jour et la nuit pour le couple. Autrefois, un simple regard, un léger sourire et quelques doigts entrelacés étaient les limites lorsqu'ils étaient en présence d'autres personnes. Enfin c'était surtout la limite d'Elisa, mais Kye voulait plus, bien que cela déplaise à la Malemort. Parfois il bravait l'interdit, lorsqu'il ne pouvait plus. Aujourd'hui, c'était bien différent. Ils affichaient clairement leur amour, un bras autour de l'être aimée, corps collés, baisers volés. Les limites s'étaient envolées pour le plus grand bien de Kye, mais aussi d'Elisa qui semblait s'épanouir comme jamais. Cela était surement dû à la perte de leur enfant, chacun des gestes de Kye étaient devenus plus protecteur envers Elisa quand ils étaient en public et elle cherchait toujours le réconfort des bras de Kye de son côté comme s'il s'agissait de l'armure qu'elle ne pouvait porter de part sa condition de femme. Ou alors, cherchait-elle la chaleur du corps de Kye à cause de l'hiver ?

Le vieux loup les fit doucement chuter sur le lit. Elisa était encore blessée et même si sa condition s'améliorait, une mauvaise chute pourrait lui être douloureuse. Tous les deux allongés dans le lit, Kye tenant la Malemort entre ses bras encore il restait ainsi pendant quelques instants avant de se recroqueviller les mettant ainsi tous les deux en position de foetus. Le vieil homme changea la position des bras, serpentant la main gauche vers la poitrine d'Elisa, passa entre les seins et serrant du poing la robe alors que le droit ceinturait la taille.


- Je ne veux pas que vous soyez triste…

Lâcha-t-il, cette fois-ci de sa voix d'homme. Il faisait tout pour qu'elle soit heureuse ici, tout pour qu'elle, et plus simplement, ils ne manquent de rien. Il voulait que les sombres abysses qui servaient d'yeux à la Malemort s'illuminent d'un incendie sans fin. Il y mettait toute son énergie, pour qu'ils soient tous heureux ici, ce n'était pas tous les jours faciles car il portait encore en lui la plaie que présente la perte d'un enfant. C'était une plaie qu'il partageait avec Elisa, ils essayaient tous les deux de la refermer, petit à petit, mais c'était chose impossible. Aucun des deux ne pourraient jamais oublier ce petit être qui n'a pas eu le temps de vivre.

Le lit était presque chaud maintenant. Trop grand pour le couple, ils étaient perdus dans son immensité. Trop confortable aussi, la couche donnait l'impression d'être sur un petit nuage et dans le silence de la chambre, c'était comme s'ils étaient haut dans le ciel, loin de la ville, loin de tout, au plus proche de leur étoile.
Et dans cet endroit isolé de la ville, isolé des autres, dans cette chambre presque hors du temps, deux corps fusionnèrent, deux souffles devinrent un, deux personnes se découvrirent à nouveau.

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Elisa.malemort
    « C'est ce que font les gens. Ils se jettent. En priant le ciel de les faire voler. Vu que sans un miracle on est sûr de se ramasser en beauté. Alors on se demande, tout le temps que dure la chute : « Bon sang, qu'est-ce qui m'a pris de sauter ? » regarde moi, je viens de sauter. Il n'y a qu'une personne qui me donne l'impression d'avoir des ailes et de planer. Toi…»

        Hitch, expert en séduction




Où pouvait-il bien être ? La chambre était grande, certes, mais pas assez pour lui permettre de se cacher indéfiniment sans être vu par les onyx qui observent le moindre recoin. Un frisson lui parcourut la totalité de l’échine lorsqu’elle senti ses mains glisser le long de son corps et ses bras l’encercler pour ne faire plus qu’un contre lui… Lorsqu’il parla, elle répondit tout de suite... Sans lui laisser le temps de réfléchir, sans se laisser le temps de perdre pied, là nicher dans ses bras.

Le mot est même trop faible, tellement je suis malheureuse…

Ses lèvres avaient déjà réussi à s’immiscer dans son cou tandis qu’elle parlait… Bon sang ces lèvres… Bon sang ces mains… Oh bon sang ces bras… Elle était folle. Folle de lui, folle de leurs étreintes, folle de tout ce qu’il lui offrait alors qu’ils partageaient des moments intimes. Et des moins intimes aussi d’ailleurs. Elle ne pouvait plus imaginer aujourd’hui une vie loin de lui. Ils s’étaient créé ensemble un petit nid avec les enfants. Oh bien sûr ils n’étaient pas parfaits. Certains s’amusaient même à leur rappeler qu’ils ne vivaient que de péchés en n’étant même pas mariés… Mais la Malemort n’en avait que faire. Etait-ce réellement le mariage qui faisait le bonheur et la vie ? Oh non, le Très-Haut ne lui en voudrait pas, elle l’espérait du moins, car même si elle ne portait pas le nom de celui qu’elle aimait désormais plus que tout… Elle n’en gardait pas moins les principes d’une bonne épouse, usant de ses devoirs et de ses droits. Elle avait le devoir de l’aimer, le chérir, l’accompagner dans le bonheur et la difficulté et lui rester à tout jamais fidèle. Elle ne l’imaginait pas autrement de toute manière. Les autres hommes n’avaient aucun intérêt pour elle, fade, plat, lisse… Ils n’apportaient rien… Alors que lui, lui apportait tout… Oh bien sûr, elle n’était pas femme parfaite. Elle s’en voulait parfois de ses mouvements d’humeur qu’il encaissait sans rien dire, la plupart du temps. Elle s’en voulait terriblement d’avoir rendu leur enfant tel un ange désormais. Et pour sûr, même si elle gardait le plus souvent sous silence sa tristesse et son mal-être, celui-ci était présent tous les jours. Certains plus que d’autres, mais ses silences venaient souvent refléter sa douleur. Aujourd’hui, elle aurait dû avoir le ventre bien portant vivant au même rythme que ce petit être qui s’y était logé. Elle aurait pu y déposer sa main pour le sentir telle une petite crevette s’adonner à des coups de pieds aussi violents les uns que les autres. Il aurait sûrement réagit aux paroles de son père… Cette idée la mina quelque peu…

Son sourire s’évanouit tout à coup mais se fut sans compter sur l’esprit malin de son compagnon. Ils se retrouvèrent tout doucement allongés sur ce grand lit qui était leur. Il fit preuve d’une extrême douceur, sentant son corps blottit tout le long du sien. Emboités l’un contre l’autre, la Malemort cala sa respiration contre la sienne. Elle ferma les yeux un instant, sentant ses mains l’agripper, elle vint poser les siennes par-dessus. Répondant tout bas…


Restons ainsi toute notre vie, et je ne serais plus jamais triste…

Si seulement cela était possible… Mais ce n’est qu’un rêve… Un doux rêve qui ne deviendra jamais réalité. Car même s’ils prenaient le temps de se retrouver tous les deux, la vie les rattrapaient toujours et si ça n’était pas un ami qui venait les rejoindre… C’était souvent les enfants qui venaient se rejoindre à leur étreinte ou un domestique qui avait besoin d’une décision. Mais pas ce soir… Non. Ce soir ils ne feraient qu’un, ce soir était leur soir… Ce soir était la nuit de plus…

Ils restèrent ainsi, sans bouger, sans parler durant un moment. La chaleur des bras du Noircastel avait comblé de bonheur la Malemort. Mais il fallait bien bouger… La nuit s’était bien avancée déjà, mais cela ne les empêcherait pas de continuer à ne faire qu’un jusqu’au lever du soleil… Le vieux se disait performant et bien cette nuit, il pourra le montrer… le prouver… Et ainsi, la Duchesse n’aurait plus la possibilité de le taquiner sur ce point-là… Mais la connaissant, elle en trouverait un autre. Les jeux étaient infinis avec eux.
La belle se redressa, brisant l’étreinte pour s’asseoir sur la couche, se retournant pour trouver les prunelles bleues, elle se mit à sourire.


N’allons pas nous endormir ainsi, préparons-nous pour la nuit.

Elle décida de se passer de sa dame de compagnie pour ce soir. Et si elle avait besoin d’aide, elle se permettrait de demander à Kye. Après tout, il l’a déjà fait, il peut bien recommencer pour ce soir… Et puis, il accepterait sans doute pour éviter la présence de Suzanne dans leur chambre…
La Malemort se leva donc du lit pour rejoindre sa coiffeuse, s’installant devant, la Duchesse ôta le collier de la mère de Kye qu’elle portait à longueur de temps, le déposant dans un écrin de soie. Elle prit ensuite son peigne pour commencer à le passer dans ses cheveux regroupés en une mèche sur son épaule. Se tournant vers le lit, et donc vers Kye, elle vit qu’il l’observait et se mit à sourire.


Pourquoi me regardez-vous ainsi ? Qui y’a-t-il ?

La belle pencha légèrement la tête sur le côté en attendant la réponse, se demandant bien à quoi il pensait en cet instant…
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Kye
    « Du bonheur à l’état pur, brut, natif, volcanique, quel pied ! C’était mieux que tout, mieux que la drogue, mieux que l’héro, mieux que la dope, coke, crack, fitj, joint, Excrement, shoot, snif, pét’, ganja, marie-jeanne, cannabis, beuh, péyotl, buvard, acide, LSD, extasy. Mieux que le sexe, mieux que la exercise, soixante-neuf, partouze, exercise, tantrisme, kama-sutra, brouette thaïlandaise. Mieux que le Nutella au beurre de cacahuète et le milk-shake banane. Mieux que toutes les trilogies de George Lucas, l’intégrale des muppets-show, la fin de 2001. Mieux que le déhanché d’Emma Peel, Marilyn, la schtroumpfette, Lara Croft, Naomi Campbell et le grain de beauté de Cindy Crawford. Mieux que la face B d’Abbey Road, les CD d’Hendrix, qu’le p’tit pas de Neil Armstrong sur la lune. Le Space-Mountain, la ronde du Père-Noël, la fortune de Bill Gates, les transes du Dalaï-Lama, les NDE, la résurrection de Lazare, toutes les piquouzes de testostérone de Schwarzy, le collagène dans les lèvres de Pamela Anderson. Mieux que Woodstock et les rave-party les plus orgasmiques. Mieux que la défonce de Sade, Rimbaud, Morisson et Castaneda. Mieux que la liberté. Mieux que la vie...»


      Jeu d'enfants



Kye était resté allongé, regardant depuis le lit, la belle brune prendre soin d'elle. Sa main gauche était cachée dans sa chevelure, le coude était planté dans le lit et ce petit perchoir permettait à ses yeux de mieux observer la scène, de mieux détailler cette femme dont le titre le plus important à ses yeux, était «Reyne de mon coeur».
Le Noircastel observait chaque courbe comme on apprécie un chef-d'oeuvre de Dali. La chambre était devenue la scène d'un tableau dont Elisa était le personnage centrale. Le dos tourné face à son admirateur, elle en offrait chaque courbe pudiquement voilée par une robe d'hiver. Quand bien même elles lui étaient totalement cachées, il pouvait les dessiner les yeux fermés. La sombre chevelure coulait le long du cou, finissant par chuter d'un seul côté de la gorge, on pouvait en deviner la longueur par le bruit du peigne qui en parcourait les rapides. Ses yeux continuaient de parcourir le verso de la femme, voyant poindre parfois à l'horizon l'autre côté, mais lorsque Kye espérait pouvoir en apercevoir plus, il retournait se cacher derrière le bras. Remontant son regard le long de la nuque pour se perdre dans l'obscurité il en vint à s'égarer dans ses pensées. A quoi pouvait-elle bien penser ? Que regardait-elle ? Où était son esprit ? Etait-il avec le sien, quelque part dans cette chambre ? Ou bien étaient-ils plus haut, trop aériens pour le monde des humains, comme porté par un petit nuage ?

Dans ce musée de la beauté, Kye passa au tableau suivant. Cette fois-ci, Elisa faisait face, elle avait légèrement pivoté offrant son visage souriant aux yeux du spectateur. Nul doute que si Kye n'en était pas déjà follement amoureux qu'il serait tombé sous le charme de ce regard scintillant comme une nuit d'été étoilée, de ce visage rayonnant de bonheur et de ce sourire pétillant. Il profita de chaque paillette qui brillaient dans les yeux de la Malemort et dont les saphirs de Kye lui rendaient bien la beauté, avant de réagir. Surpris par cette beauté singulière qui était sienne, il venait de se faire prendre la main dans le sac et il lui fut impossible d'empêcher ses joues de rosir légèrement.
A chaque fois qu'il la regardait, le Noircastel ne pouvait s'empêcher de la dévorer des yeux. Il pouvait passer des heures juste à la regarder, perdant toute notion du temps et de l'espace. Et il le faisait. Le soir, lorsqu'ils dînaient ensemble, Kye ne touchait pas son assiette pendant de longues minutes, la laissant refroidir et profitant de la vue des doigts fins qui fendaient l'air pour glisser entre les lèvres flamboyantes de La Duchesse un morceau de pain, lèvres qui étaient parfois brièvement humidifiées par cette langue si sensuelle. En général ce qui finissait par le faire réagir, c'était soit Eli qui lui faisait remarquer que sa viande allait être froide -oui, même à 49 ans il se faisait encore materner par cette vieille femme- soit les enfants qui faisaient leur intéressant. Cependant, ce soir il n'y avait personne, pas d'Eli, pas d'enfants, juste eux deux dans cette chambre.

L'homme pivota dans le lit, collant son dos contre le matelas pour regarder le plafond, se mordilla lèvre inférieure avant de tourner la tête à nouveau vers Elisa pour la regarder avec un sourire, les joues toujours légèrement colorées.

- Ma belle Elisa, je t'aime tellement.

Le tutoiement était quelque chose de très rare entre les deux. Pour Kye, c'était quelque chose qu'il utilisait uniquement pour parler de ses sentiments, c'était la seule raison où elle était tutoyée par lui. Il pouvait tutoyer d'autres personnes, mais lorsqu'il le faisait pour Elisa, c'était quelque chose de totalement différent. Il l'utilisait vraiment pour les rapprocher encore plus, lorsque physiquement ce n'était plus possible, les mots prenaient la relève.
Ah, qu'ils étaient bien tous les deux. Elle lui faisait tourner la tête, c'était son manège à lui. Il pouvait parcourir la terre et passer de l'autre côté que ça ne tournerait pas plus que ça. La terre était bien trop plate pour l'étourdir autant que lui. Kye était doué pour lire les autres personnes, comprendre leurs réactions, les prédire même, mais lorsqu'il s'agissait d'Elisa, c'était tout un mystère. Avec le temps, il y avait un peu, mais il se faisait encore surprendre. Le loup se remit sur le dos, les mains sous la tête en guise d'oreiller et il pensa à haute voix :


- Un an et demi plus tard, tu m'es toujours tellement mystérieuse...je me demande comme tu fais...
Il tourne la tête vers elle, parles-moi de toi un peu comme je l'ai fait à une fois.


Cette nuit, c'était elle qui allait lui parler de sa vie, dans son intégralité. Et contrairement à la fois où il l'avait fait, cette nuit n'allait pas être déterminante dans leur histoire, c'était juste une nuit de plus. Une nuit de plus où ils s'offraient l'un à l'autre, se découvraient à nouveau, où ils partageaient des souvenirs différents pour en construire des communs.

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Elisa.malemort
    « Elle peint son visage pour cacher son visage, ses yeux sont une eau profonde, la geisha est l'artiste d'un monde flottant, elle danse, elle chante, elle vous diverti, tout ce que vous voulez, le reste ce sont des ombres, le reste c'est un secret.... »

        Mémoire d'une Geisha



« Tu » : Pronom personnel sujet de la deuxième personne du singulier… Mais surtout ces moment si privilégiés où un Noircastel et une Malemort, seuls, profitaient pour ce dire tant avec pourtant si peu. Un tutoiement qui chamboulait quelques peu leur habitude mais qui pourtant plaisait à la jeune femme. C’est d’ailleurs, elle, qui l’avait employé pour la première fois car elle avait la sensation que cela les rapprochaient d’autant plus. Cela n’était plus « vous », c’était désormais « toi »… Toi mon seul et tendre amour.
Elle l’observait, lui, si beau mais qui semblait si transit à cet instant. Les yeux noirs virent même à se poser sur la lèvre mordillée du Loup. Elle buvait ses paroles, et ne s’en lasserait jamais. Chaque mot était comme prononcé pour la première fois, comme un aveu à qui attend réaction… Oh mon Dieu, comme elle aurait aimé soulever ses jupons, se jeter sur ce grand lit pour venir s’allonger sur le corps de son compagnon, se lovant tout contre lui pour ne faire qu’un et restée ainsi prise pendant un long moment. S’imaginant entrain d’embrasser son cou, le découvrant toujours un peu plus, jusqu’à ce petit grain de beauté qui s’était niché juste en bas de son lobe… à cette idée, la Malemort se mit à rougir. Et c’est les mouvements de son corps qui vient se rallonger entièrement sur le lit qui la sortie de sa rêverie…

Parler d’elle… Mais qu’y avait-il à dire ? Elle n’avait pas son passé, elle n’avait pas d’histoires extraordinaire à raconter. Elle n’était qu’une noble, fille de Reyne, vivant comme une Princesse depuis sa naissance, entourée de personnes tout aussi aimantes et d’autres autant détestables les unes que les autres...


Je ne suis pas si mystérieuse que vous pourriez le penser…

Trop facile… Il ne s’en contentera pas. Il veut savoir, il a même toujours voulu savoir…

Il est tard et si je vous raconte ma charmante vie de fille de Reyne, vous allez sans aucun doute vous endormir dès le début….

Elle le regarde, et les yeux bleus semblent aussi tristes que ceux d’un enfant à qui on aurait enlevé sa sucrerie…. Et puis comment lui résister en prime… Le peigne continue de se perdre dans la chevelure d’ébène, tandis qu’elle lui tourne de nouveau le dos, faisant face au miroir face à elle, lui permettant de toujours le voir, sur le lit…

Par où commencer… Je suis née en Limousin & Marche il y a… vingt-six années désormais… Ma mère était alors promise à mon père, Duc Tourangeaux de son état… Mais peu après ma naissance ils se sont séparés, me laissant pour fille bâtarde… Ma mère n’était pas beaucoup présente, mais j’avais la chance d’avoir deux grandes sœurs, Alinéaure et Lunedor, et un grand frère, Barahir, à l’époque. Barahir était déjà grand et ma mère l’avait envoyé en Alençon géré les terres qu’elle possédait là-bas. Je vivais donc à Ségur avec mes sœurs. Aliénaure était toujours derrière nous à vérifier que nous apprenions bien nos leçons de latin… Mais Lune et moi n’en avions que faire… C’est à cette époque que j’ai appris à parler l’occitan. En faisant des comédies à mes nourrices et me cachant de ma plus grande sœur… Pour sûr, Emelyne tient cela de moi…

Elle se mit à sourire en évoquant sa fille qui marchait petit à petit sur ses traces, telle une Malemort.

Et puis mon frère a disparu, j’étais encore jeune à l’époque et j’ai eu l’impression que mon cœur se brisait en un millier de morceaux… Il a fait beaucoup pour moi, il m’a même accueillit, un temps, chez lui en Alençon… Je l’aimais plus que tout, il était mon seul repère masculin et il était tout simplement parfait… Il m’a offert ma première robe de dame… Pour sur si j’ai le goût des belles toilettes, c’est de sa faute. Quelques semaines plus tard, ce fut au tour de mon père de s’éteindre, en Touraine, dans ses terres. J’ai été triste, bien évidemment… Mais il n’avait jamais pris soins de prendre de mes nouvelles, oubliant mes anniversaires, oubliant de m’écrire, m’oubliant entièrement… Et pourtant, je suis allé le voir bon nombre de fois en Touraine… Il n’a jamais pris le temps d’être un père… Comme il n’avait pas pris le temps d’être un époux pour ma mère. Mais grâce à lui, j’ai rencontré l’homme qui a été mon presque père, mon presque… tout… Il est devenu mon précepteur, il m’a emmené partout dans ses voyages, il s’en voulait de me faire dormir à la belle étoile mais j’étais heureuse d’être tout près de lui… Je me souviens encore un voyage en Anjou avec ses amis et lui… Lorsque le Duc de l’époque avait appris que j’étais la fille de Nebisa de Malemort, il a voulu me kidnapper mais Hiji ne l’a pas laissé faire et nous sommes vite repartis… Je me souviens avoir dit à l’époque « Mais je n’ai pas peur de lui…. ». Je mentais… J’avais une frousse horrible…

Se tournant sur son siège, elle vint refaire face à Kye, un sombre sourire sur ses lèvres à l’évocation de cet homme qui a tant compté pour elle.

Et pourtant, je savais que je ne risquais rien avec lui… C’est, d’ailleurs, de lui que je tiens cet anneau… C’est la seule chose qu’il me reste de lui avec son souvenir… Depuis sa disparition. Il vient de son mariage, il la portait autour de son cou. Je l’aimais sincèrement, peut-être un peu trop même…

Sa voix se fait légèrement plus faible à ce souvenir, tandis que ses doigts avaient glissés sur l’anneau dont elle parlait, en argent, abandonnant, de ce fait, un peu le peigne sur sa coiffeuse…
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Kye
Au premier abord triste, Kye avait fini par gagner un sourire lorsqu'elle commença son récit. Il s'était confortablement installé dans le lit, allongé sur le ventre, les mains tenant son visage, il était prêt à tout entendre de l'histoire de la femme qui partageait désormais sa vie. Ainsi, il pouvait l'écouter jusqu'au petit matin sans fatiguer. Enfin, surement qu'il devrait changer de position à un moment ou un autre, les bras finiraient par lâcher, mais lui non. Elle pouvait le tenir en haleine pendant des heures avec ses mots. Lorsqu'elle parlait, il l'écoutait tout simplement, regardant ses lèvres bouger et donnant sens aux sons qui en sortaient.
Là, le sujet l'intéressait complètement, elle allait parler une bonne partie de la nuit, car même jeune Elisa avait déjà beaucoup vécu. Pour sûr qu'il allait écouter l'histoire dans son intégralité et n'en perdre aucune miette. Il n'y avait aucun doute là-dessus. Kye était un enfant parfois et là, l'enfant qu'il était n'allait pas se coucher de si tôt, trop excité par l'histoire qu'il allait entendre.


Le vieux loup ne put s'empêcher de sourire aussi lorsqu'elle évoqua le fait qu'Emelyne marchait dans ses pas. Ah, ça, c'était sûr, c'était bien la fille de sa mère. Il n'y avait aucun doute sur cela et Kye le subissait parfois. La petite Malemort savait déjà se faire entendre du haut de ses six ans et elle savait surtout le faire plier, parfois. Elisa y arrivait parfaitement, mais pour Emelyne, il y avait encore du chemin à parcourir. Elle était trop jeune et heureusement pour le Noircastel, car sinon, il serait totalement perdu, il avait déjà du mal à lui dire non lorsqu'elle le regardait toute triste avec ses yeux de biches, voyant en elle sa magnifique mère.
Kye aimait beaucoup les enfants d'Elisa. Enfants qu'il considérait désormais comme les siens, bien qu'ils ne fussent pas de son sang, il n'avait aucune honte à les appeler devant tout le monde comme les siens. C'était peut-être surprenant lorsque l'on connait la froideur et la distance qu'il peut mettre entre lui et les personnes de manière générale. Pourtant, il les considérait tous comme les siens et la plus vieille, Lizzie le lui rendait bien en l'appelant parfois « papa ». C'était surprenant, mais agréable à chaque fois.
Bien entendu, il ne comptait pas remplacer leur père, pour certains il était encore en vie, pour d'autre il avait disparu depuis un moment, mais il était hors de question pour le Noircastel de les remplacer totalement. Il voulait juste leur offrir une figure paternelle. Alors, oui, viendra un jour où ils comprendront qu'il n'est pas leur vrai père, il a peur de ce jour où lui cracheront dessus qu'il n'était pas leur vrai père. Ce jour, lui brisera surement le coeur, il n'y a aucun doute avoir sur ceci, mais lorsque ce jour viendra, il y aura Elisa pour le réconforter. Et ça, c'est bien plus que nécessaire.


Et ce sourire qui était apparu sur les lèvres de Kye disparu aussi vite lorsqu'il aperçue le triste qui s'était niché sur les lèvres d'Elisa, lorsqu'il entendit sa petite voix.
Il descendit alors du lit et se dirigea vers elle, lentement comme à son habitude. Il passa ses bras de chaque côté de son cou et posa sa main droite sur son bras gauche et la gauche sur le droit avant de déposer un baiser sur sa joue et de nicher son visage dans son cou pour lui murmurer :

- J’ai toujours pensé que cette bague venait d’un de tes mariages précédent…Tu vois que je ne connais pas tout de toi et que tu m’es encore très mystérieuse…

Kye avait pris pour habitude de prendre la Malemort dans ses bras. Non seulement en public, pour la rassurer, mais aussi et surtout lorsqu'il voyait qu'elle allait mal. Même si elle ne voulait pas en parler, il le faisait et rester silencieux, car il savait que dans ses bras, elle se sentait bien, en sécurité, au calme. Il la tenait dans ses bras, attendant que ce soit elle qui se retire, car il ne savait pas de combien de temps elle avait besoin de rester là, ainsi dans ses bras.
Lorsqu'il comprit qu'elle n'avait plus besoin de ce câlin, plutôt que de retourner s'allonger dans le lit, il préféra s'installer à côté d'elle, dos à la coiffeuse et il prit le peigne d'une main, les cheveux de l'autre et se mit à caresser l'ébène avec les dents en bois attendant qu'elle reprenne son récit.
Kye détestait de manière générale les anneaux qu'Elisa portait encore à ses mains. Il était plus rare de trouver une femme qui porte l'anneau de mariage d'un homme qu'elle n'a pas elle-même épousé. Mais, Elisa était une femme exceptionnelle alors, il était normal qu'elle fasse ce genre de choses. Pour lui, cependant, elle faisait beaucoup d'effort, elle avait retiré les anneaux de Bel, donné un des anneaux de Rotule à leur fille, Lizzie. L'anneau dont elle venait de parler était toujours resté un mystère pour lui, mystère qui venait de s'envoler et qui lui permettait de ne plus le voir d'un mauvais oeil.

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Elisa.baccard.


    « Aimer sans avoir le choix, sans même se résoudre à un espace pour lui, si infinitésimal qu'il puisse être. Une dictature de coeur. Une force allègre.... »

        J'abandonne aux chiens l'exploit de nous juger


Il avait toujours cette façon de la prendre dans ses bras. Cette manière si délicate, si douce, qui permettait à la Duchesse de venir se nicher contre lui et de profiter de son torse pour poser son visage. Parfois même, elle reprenait ce réflexe qu’elle avait acquit quelques années plus tôt : celui de venir froisser le tissu d’une chemise dans son poing. La belle avait prit l’habitude de le faire lorsqu’elle venait se blottir dans les bras de son vieux quand elle était enfant. Elle avait peur qu’il parte, peur de ne plus le revoir, peur qu’il l’abandonne et pire… Peur qu’il l’oublie. Alors, lorsqu’elle avait la chance d’être dans ses bras, elle ne se gênait pas pour profiter de lui.
Cette peur la trahissait encore aujourd’hui. Elle n’avait jamais eu beaucoup de chance avec les hommes. D’abord son père qui l’abandonne, puis son frère qui rejoint le Très-Haut, suivi de son père. Sans compter les hommes qu’elle avait connu, certains s’étaient joués d’elle, d’autres, l’avaient fait souffrir plus que de rigueur. Et pourtant, elle était encore là, dans les bras d’un homme, lui ayant offert son cœur et sa vie sans penser qu’un jour il pourrait la briser. Elle releva le nez pour le regarder.


Et bien tu vois, chaque objet ne représente pas toujours ce qu’on croit. Cet anneau représente surtout cet homme qui a tant compté pour moi et qui a disparu bien trop tôt. Il me manque, très souvent. J’aurais aimé que tu le rencontres. Il t’aurait détesté.

Elle se mit à sourire légèrement en coin. Retrouvant une pointe de taquinerie… Quoi que… Les gens qui ne le détestaient pas au premier abord étaient rares… Même elle, l’avait détesté lors de leur première rencontre…
Tandis qu’il s’occupait de peigner ses cheveux, la Malemort reprit son histoire.


J’ai finalement rejoint le Limousin, où j’ai commencé à m’investir comme ambassadrice. J’ai été bien évidemment nommée en charge de la Touraine, quoi de plus logique pour une mi-limousine mi-tourangelle. Et puis, ma mère avait un écuyer, Pierre Louis… Qui venait justement de Touraine, de Vendôme plus précisément. Il a accepté de m’accueillir un temps chez lui, lorsque j’étais en mission en Touraine. Il m’a fait découvrir la province comme je ne la connaissais pas… Finalement mes missions étaient toujours plus longues les unes que les autres. Et mes visites chez lui n’en étaient finalement plus… Sans m’en rendre compte, j’étais désormais la fiancée d’un Vicomte Tourangeau…

Elle laissa un blanc d’un court instant. Se remémorant les souvenirs qu’elle évita de dire. Tout n’était pas bon à entendre, tout n’était pas bon à connaître. Et certaines de ses actions passées étaient très bien dans le passé et n’avait plus rien à faire dans son présent. Elle reprit donc en prenant soins de sauter plusieurs détails… Jusqu’à arriver à cette période des plus douloureuses… Kye était déjà au courant de cette histoire, elle décida donc d’être assez évasive sur cette période.

Jusqu’à la rencontre avec le Prince Bâtard Breton… Et nos fiançailles se sont rompues… Nous étions à Limoges à ce moment là. J’étais passée Chancelière… Il est parti et je me retrouvais seule… J’ai oublié cette vie que j’aurais pu avoir et je me suis noyée dans le travail que réclamait le Pavillon ainsi que celui de conseillère comtale pour le Limousin. J’ai appris, aimé et détesté parfois. Une mobilisation s’est faite dans le Comté, l’armée que je menais s’est transformée en armée royale… Et c’est à ce moment là que j’ai rencontré mon premier époux Bel… Il faisait parti des Lames d’Amahir, et il nous aidait à défendre la capitale….

Elle passa de nouveau sur les détails de cette rencontre qui n’était finalement pas des plus intéressant pour Kye. Et qui pourtant restait gravés dans les moindres détails dans l’esprit de la Malemort.

Un jour, il a demandé une audience à ma Royale mère qui se trouvait à ce moment là en Limousin… Je n’étais au courant de rien… Il a trouvé le courage de lui demander ma main, et ma mère a bien entendu accepté. Quelques jours plus tard, nous nous trouvions dans mes terres, et il m’a fait sa demande… J’ai dis oui, sans hésiter une seule seconde. Je l’aimais tellement, il était si différent de tout ce que j’avais pu connaître jusque là… Et à quelques jours de la noce… Ma mère a trépassé…

La tête de la Malemort se baisse de nouveau à ce souvenir. Comme si la douleur était toujours la même malgré les années.

Bien évidemment, j’ai annulé les noces. Je ne voulais plus entendre parler de ce mariage. Il n’était certainement pas question que j’épouse un homme si ma mère n’était pas présente. J’étais si malheureuse. Bel a accepté, comprenant ma souffrance, j’imagine qu’il espérait tout de même que je change d’avis… Il m’a laissé tout le temps dont j’avais besoin, jusqu’au jour où il m’en a reparlait. A force de persuasion, j’ai fini par l’épouser et quelques mois plus tard, Emelyne naissait… Un rayon de soleil qui éblouissait ma vie devenue terne. J’étais une jeune mère, orpheline, et une épouse délaissée. Il n’y avait que Emelyne pour me donner la force d’avancer chaque matin. A force de journées, seule, j’ai démissionné du poste de Chancelière et j’ai quitté le Limousin…
J’ai pris la route du Dauphiné avec ma sœur, Aldraien. Où j’ai retrouvé notre ami Rotule qui était alors Duc de la province à l’époque. Il nous a accueillit chez lui, le temps de notre visite… Mais ma visite s’est finalement éternisée…


Finalement, c’est un sourire qui apparut sur ses lèvres à l’évocation de ce souvenir. Rotule était complètement fou. Et il avait tout fait pour elle. Il aurait tué la terre entière s’il avait fallu simplement pour son bonheur.

Finalement, j’ai demandé l’annulation de mon mariage avec Bel pour cause d’abandon… Ce qui a été retenu avec les différents témoignages que j’ai obtenus. Rotule et moi avons commencé notre idylle… Il m’a demandé sept fois de l’épouser… J’ai dis non six fois… Et la septième a été la bonne… Ce fut un jour magnifique, j’en conviens. Ce genre de jour qui nous fait oublier toutes les blessures et toutes la douleur que l’on a pu connaître jusque là. Nous avions perdu un enfant quelques mois plus tôt, et j’étais enceinte de Emery… Il est né quelques semaines après notre mariage. Un fils. Notre premier fils à tous les deux. Cet homme m’a traité comme une princesse, comme un diamant pourtant indestructible mais si fragile à la fois. Il savait deviner la moindre de mes envies et de mes peurs… Et pourtant ce jour là, il n’a pas su deviner combien j’allais avoir mal… La mer l’a emporté et j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps, pour la première fois devant d’autres personnes. J’ai eu la sensation que l’on m’arrachait le cœur de ma poitrine. J’aurais voulu mourir à cet instant précis où je l’ai vu allongé sur le sable…

Ses yeux viennent se noircirent un peu plus, sa vue troublée par des larmes qui ne demandaient qu’à couler, c'était la première fois qu'elle avouait tout cela à quelqu'un. A qui aurait-elle pu dire ouvertement qu'elle avait voulu mourir ? Elle aurait sans doute fini brûlée... Mais avec lui, la belle savait qu'elle ne craignait rien... Qu'elle pouvait être franche.

Cela fait si mal… Je ne veux plus jamais revivre cette douleur. Cela devrait interdit… Promet le moi…

Elle avait failli le perdre, lui aussi, quelques jours plus tôt. Comme elle avait perdu leur petit ange. Elle avait senti son cœur se fissurer un peu plus. Des fissures qui ne se comblent jamais. Qui reste là, ouvertes, pour toujours. Pour que jamais on n’oublie ce moment… Remontant ses jambes sur le bord de sa chaise, ses bras entourant ses jambes… La Malemort s’était recroquevillée sur elle. Rien qu’aux souvenirs, son corps s’était simplement glacé au sens propre comme au figuré.


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