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[RP] La Nuit des Pommes

Anaon
 ↬ Anjou, Nuit du Mariage

      Fruit qui a fait couler ô combien d'encre. Originel du monothéisme, en vérité copie de cultes encore plus anciens. Pomme, fruit de la femme choyée chez les celtes et les scandinaves. Jus de la connaissance chez les uns, garant d'immortalité et de jeunesse chez les autres. Une rondeur de suc décidément précieuse, qui a su redonner fécondité et appétit à la Reyne Vara, mortelle maudite par le courroux d'une Ase bafouée. La main l'astique pour lui donner tout son éclat, avant de poser religieusement le bijoux organique et son rouge vif au centre de la table. Bien en évidence, là, sur son petit coussin qui lui fait comme un écrin. Ses poings rejoignent ses hanches pour admirer le tout d'un œil satisfait, cherchant néanmoins à repérer la moindre petite contrariété visuelle. Entourant la pomme mise en évidence, hypocras à la châtaigne, Saumur, prune, calvados et encore gnôles forment une corolle de verre et de grès. L'index pousse maniaquement l'anse d'une aiguière pour lui donner un meilleur angle. Les doigts époussettent précieusement le galbe d'une fiole sous le lequel coincé un vélin minuscule précise «  Au mâle s'il n'y arrive pas. On sait jamais !! ». On a pris soin d'éviter les mignardises sucrées qui pourraient détourner bien trop facilement l'attention de l'objectif de cette nuit. Seul le grand lit a vu ses fourrures se piquer de quelques chouquettes afin d'associer immédiatement à l'esprit candide le plumard à une « bonne chose ».

    C'est vers cette couche qu'elle se tourne. Au milieu des trois ou quatre petits choux abandonnés, les pétales d'hellébores s'alanguissent çà et là, clairsemant sur le lit un doux parfum capiteux. A défaut de véritables roses, les violines font parfaitement l'affaire, et alors qu'elle charme ses narines d'une lente bouffée encensée, elle se dit qu'elle aimerait bien s'y vautrer elle-même si elle le pouvait. Sur la table de chevet, elle a pris soin de disposer bougies qui chauffent doucement les flancs des flacons d'huiles qui patientent dans leurs carcans. Délice gourmand des effluves des fruits rouges, énergisant des agrumes et fragrance plus exotiques, voilà là un cocktail qui saurait ravir les sens et le corps du plus frigide des moinillons.

    L'Anaon claque dans ses mains, élargissant ses lèvres d'un sourire satisfait. Oh oui ! C'est parfait. C'est... machiavéliquement parfait ! La lippe se fait carnassière. Comploteuse. Oui... Ce soir, elle ne fait pas là qu'une bonne et généreuse action exemptée d'arrière-pensée. Elle plante le décor de son plan réfléchi, perfide, fourbe, diabolique ! Une idée de génie quoi ! Les mains se frottent entre elles, un dernier regard est lancé à la chambre et ses délicats jeux d'ombres. Puis une main se saisit d'un bougeoir et elle quitte la pièce.

    Elle parcoure les couloirs d'un pas vif, lissant d'une main les pans de sa robe. Elle a troqué le velours du mariage pour le bleu d'une robe plus légère, cousue par les divines mains d'Alatariel. Déboulant dans la grand-salle, la mercenaire souffle la bougie qu'elle abandonne dans un coin. Il se fait tard, Amadeus est couché depuis longtemps, mais le cœur de Brissac s'anime encore de rires et de musiques enjouées. On a fait un sort au banquet de noce depuis un moment, mais puisque la France entière semble avoir choisie de faire un siège au duché, il a bien fallu trouver de quoi engraisser encore cette hilare troupe de fêtards. On a donc trouvé de quoi toujours se goinfrer, et alors que les un cherchent une place pour glisser une énième cuisse de poulet, les autres tentent de boire un godet de plus sans se faire crever la panse d'un trop plein de liquide. Certains ont un coup dans le nez, parfois deux, souvent plus, et c'est ce joyeux petit monde que la sicaire traverse pour rejoindre une tablée bien précise. D'une œillade, elle guette le retour de la complice Cerdanne chargée de porter coussins, alcools et opium qui va bien dans un petit bureau à l'écart de la salle. Un regard est lancé au Renard tout près.

    C'est là que tout commence.

    Ses mains se posent sur deux épaules différentes, et la tête se penche entre le couple.

    _ Dites-moi tout le monde semble bien joyeux ici ! Ne serait-il pas temps de lancer d'autres genres de.. festivités ?

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       | © Image Avatar : Eve Ventrue | © Image Signature : Cristina Otero | Anaon se prononce "Anaonne" |
Sabaude
La danse des plats n'a guère ému son estomac resté stoïque face aux aguicheurs mets en sauce, du gibier à la bête d'élevage en passant par la palombe. Pas un n'a eu son attention sauf à lui faire plisser le nez et retrousser les lèvres dans un rictus de dégoût, le haut-le cœur guettant l'occasion.
Si Renard a l'appétit coupé, fait rare s'il en est pour lui vorace et gourmand, ce n'est pas à cause de ses voisins de tablée, fripouilles, brigands, scélérats, gros bras et autres aigrefins. Si Renard est de marbre devant le mignon porcelet au groin grossi d'une pomme qui le regarde de ses yeux morts suppliants ce n'est pas en raison du mariage auquel les étranges nouveaux époux ont eu la délicatesse de le soustraire pour ne lui offrir que le meilleur à savoir les ripailles. Non ! Si le jeune Renard boude l’écuelle c'est qu'il a les entrailles, la gorge, les orteils, les cheveux, tout ce qui a longueur, noués !

Diabolique et pernicieux, voilà ce qu'est le duo Cerdanne-Anaon. L'idée du Chardon et de la sicaire l'a accueilli en terre angevine comme un coup de fouet cueille le dos du galérien. Car c'est bel et bien dans une galère qu'il se sent, étourdi par l'audace, chahuté à droite par la crainte, à gauche par l'envie, apeuré par des conséquences qu'il n'est pas certain d'avoir toutes listées et pesées. Et pourtant...il lui suffit de la regarder pour que s'envolent peurs et réticences et ignorer qu'elles ne se sont posées qu'un peu plus loin sur une branche basse de l'arbre Sort.

Et là tandis que tous s'enivrent et s'empiffrent, il pousse timidement de l'ongle quelques miettes de pain parvenues jusqu'à lui, le palpitant lancé au galop, les joues confuses du signal donné par les prunelles de la presque mère. Un rire nerveux ébranle son corps raidi, soupçonnant que la pas si Roide serait capable de les accompagner pour les guider et veiller si elle n'avait une toute autre mission.

Au passage d'un serviteur une plume de faisan vient chatouiller ses narines, c'en est trop. Ce soir c'est Canard et ventre creux pour qu'un autre rebondisse dans quelques mois. Souplement et silencieusement le vicomte quitte son siège et se fond dans les ombres vacillantes, évitant toute rencontre, une goutte de sueur froide traçant son chemin le long de son échine alors qu'il passe près du mari pour se diriger vers un couloir dont la bouche sombre l'avale.

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Calyce
Bang, font les timbales d'étain en s'entrechoquant.
Vassale-mariée et Suzeraine trinquent, la larme à l’œil d'avoir trop ri.
Rire parce qu'au jeu des sept erreurs à trouver en comparant les bœufs du Salmo-Salar à la Comtesse Mainoise, elles n'en n'ont trouvée aucune. Jeu qu'elles auraient fait durer encore jusqu'à l'aube si la main d'Anaon n'avait pas été là, posée sur une épaule, pour annoncer le passage au plan.

Plan avec un grand P...
...Portenawak.
On a le droit, on est en Anjou.

Calyce ou l'adepte du grand n'importe quoi. Foncer d'abord, réfléchir ensuite, ou pas du tout. Conséquences que pourraient avoir ses actes ? Des fautes ? Boarf. Les assumer si possible ou, trouver un bon dos bien large à charger ou derrière lequel se cacher. Habituée des plans foireux, même pas peur, elle a dit oui ! Et puis, Anaon a dit que tout irait bien. Mais alors pourquoi le retour de cette foutue boule dans la gorge quand elle tourne la tête vers celle de la Sicaire, plantée là, entre elle et l’Époux ? Et ce sourire crispé qu'elle offre alors qu'elle abandonne son gobelet sur la table sans avoir pris la peine de le vider, la main tremblante ? Et ce réflexe idiot qu'elle a d'éviter le regard mort de Cartel en s'adressant à lui :


-Anaon a raison... il est temps. Je...hum, je vais vous devancer, hein...des trucs de filles à préparer tout ça, tout ça...


Gloups. Déglutir. Chasser cette boule qui donne l'impression de forcir dans la gorge, alimentée par le mensonge que vient de débiter Calyce. Et si elle grossissait au point de retenir l'Archiduchesse clouée à sa chaise ? Non, hein ! Il lui faut juste une petite dose de courage. Le puiser dans son godet de vin ou, mieux, le chercher dans les yeux du duo Cerdanno-Anaonnien. Et elle le trouve ! Fou ce qu'elles peuvent être convaincantes les deux sœurs instigatrices du complot dans lequel Dénéré s'est laissé volontairement embringuer.

Zou. Elle a quitté la tablée après s'être excusée auprès des invités. Auprès de Katina surtout , lui glissant une demande à l'oreille:
-Je vous laisse veiller à ce que personne ne bouffe de canard, siouplé. Ne jamais perdre le nord,même en étant porté par des jambes flageolantes et en ayant le palpitant qui menace de se carapater de sa cage pour aller remplacer le faisan sur le buffet. Jamais.

A son tour donc de s'éloigner jusqu'à ce que le brouhaha ambiant de la fête ne devienne qu'un lointain bourdonnement. Mimine refermée sur un pan de jupon trop long qu'elle relève légèrement, les pensées occupées par le nœud qui a quitté la gorge pour descendre d'un étage et s'installer au creux de son ventre. Ventre sur lequel se pose une paire d'émeraudes contrites. Oust le nœud, t'es en avance. Beaucoup trop en avance. Du balai, vite, elle approche du lieu du crime.

Il est là, à la porte de sa chambre. C'est pas comme si il n'y était jamais venu mais là, elle est toute chose la Dame Canard qui s'approche. Elle a son sourire tout niais spécial Renard, les joues rosies, les cils qui battent et le regard qui brille mais elle a perdu sa langue...ou presque :


Han, vous êtes là.

Perspicace, hein.
...
Se gratter la tête, c'est bien ça quand on ne sait pas quoi dire. Alors elle lève la main et s'apprête à le faire quand les mirettes sont attirées par autre chose que sa tignasse. Là, son ombre projetée par une chandelle posée sur une console histoire d'éclairer un minimum le long couloir. Il n'en faut pas plus pour faire le vide dans la caboche calycienne. Place est faite à l'insouciance habituelle et sa lubie ombromaniaque. Les doigts d'une menottes se plient avec application devant la flamme et l'autre main de pointer du doigt la silhouette qui prend forme sur le mur en face :


-Vous avez vu ? C'est un Renard !

On était là pourquoi déjà ?
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Sabaude
[Coté chambre - jeux d'ombres ]



Je suis là.

Inutile de tenir tout un discours devant une porte, si encore elle reflechissait comme un miroir il pourrait se montrer brillant pour l'éblouir deux fois plus! Certains diraient que cela le changerait....Mais non, il a les jambes en coton et le palpitant qui fait des bonds depuis qu'il se tient devant cette foutue entrée.
Alors il inspire et la regarde, il ne voit plus qu'elle - faute à sa tignasse qui vient de s'échapper du lacet et fait oeillères- elle est .... en train de faire des ombres avec sa main et une chandelle, et c'est un goupil! Ou un chat, ou une belette, à moins que... peu importe, il craque, c'est trop Calyce!

Tout fier, tout enflammé, tout amoureux, ce qui était ramolli durcit et sans grand ramage, à la sauvage...


Un Renard qui va manger un Canard!

...il soulève la belle et l'entraine dans la chambre pour perdre l'équilibre devant le spectacle des bougies, du lit couvert de pétales, des douceurs laissées ça et là, et claquer la porte de son dos.

Humph.

Même pas mal et il n'a pas lâché le paquet, qu'il finit par reposer devant lui et enlacer, maintenant le petit corps gracile contre son torse, bras en arcs.

Regardez il y a assez de flammes de-ci de-là pour jouer toute la nuit avec nos mains et représenter toute la forêt!

Fichtre mais quel couillon! Pour un peu il se mettrait des baffes. Mais c'est qu'il est nerveux. Alors se reprenant il se déplace lentement, senestre caressant l'étoffe, suivant un angle du coude à l'épaule, d'une nuque à la taille en chute libre, puis un poignet est délicatement cueilli.

Venez.

Vers la table il les entraine pour leur servir à boire. Tremper leur lèvres dans un délicieux nectar, laisser le feu envahir leurs entrailles et les vapeurs embuer leurs pensées jusqu'à ce qu'ils ne soient plus qu'instinct peu sage.
Mais avant d'en arriver là...


Que désir mon adoptée? Ce soir je suis tout à elle.

Yeux dans les yeux, droit, poitrine bombée, la mirette charmeuse, la voix de velours, tout y est, même la pomme qu'il croque et lui présente renardement pour qu'elle fasse de même.
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Anaon

↬ Côté Falco ↫

      Le regard ne se relève pas pour accrocher le départ Renard, se contentant de percevoir le mouvement du coin de sa vision, surprise qu'il se soit exécuté aussi vite et avec si peu d'hésitation. Une bien bonne chose sans doute ! L'attention est toute vouée aux mirettes Calyciennes, face auxquelles elle sourit de connivence, se faisant pourtant la plus douce et rassurante possible. Sans mal elle imagine son angoisse et certainement les doutes intempestifs qui doivent la tenailler d'une myriade de remords. Néanmoins, c'est avec satisfaction qu'elle voit la Canarde se lever sans se faire prier pour disparaître. Elle comptait demander au Chardon de bien vouloir l'accompagner mais... Chose inutile apparemment. C'est que le monde semble décidé !

    La main toujours gardée sur l'épaule de l'époux, l'Anaon se plie un instant au silence, prunelles tournées vers la disparition de la jeune Archiduchesse.

    _ On n'a même pas eu besoin de l'y traîner ! Si c'est pas beau ça ! Je vais quand même aller m'assurer qu'elle soit bien allée prier ou au moins se préparer... Ce serait bien con qu'elle en profite pour se carapater dans le jardin où se cloitrer toute la nuit dans le garde-chouquettes...

    Moue légère sur les lèvres balafrées. La sicaire craint réellement une fuite de dernière minute de l'élément capital de ce plan machiavélique.

    _ Mais ! Je vous annonce que nous avons pensé à vous, Falco. En attendant, on ne va pas vous laisser moisir dans un fond de vin sur votre chaise ! On vous a préparé de quoi vous requinquer en patientant. Autant mettre toutes les chances de votre côté après tout. Vous allez être aux petits oignons !

    La tête se penche, les lèvres se perdent près de l'oreille.

    _ Et je vous ai préparé un petit mélange juste pour vous. Je vous garantis qu'avec ça, j'en ferai bander une statue eunuque...

    Une petite tape amicale sur l'épaule du bonhomme et l'aînée se redresse, sourire goguenard aux lippes.

    _ Cerdanne je te le confie ! Mène-donc notre homme dans son espace privé ! Moi, je vous rejoins au plus vite.

    Regard complice, et la balafrée disparaît sans attendre dans un froissement de jupons. Car oui, si la mercenaire ne compte pas lire la bible des galipettes pour guider les ébats des tourtereaux, elle craint tout de même que ces deux puceaux d'un soir ne se soient dégonflés devant la porte de la chambre. S'ils se contentent de se regarder dans le blanc des yeux comme deux truites timides, Cerdanne et Anaon auront œuvré pour rien... même s'il faut avouer qu'une bonne cuite ne soit jamais perdue.

    Le jeu en vaut la chandelle ; il n'en est pas moins risqué. Jamais sans doute n'a-t-on vu complot si sérieusement élaboré pour permettre à l'adultère de se commettre sans heurt dans un couple par trop frigide. L'Anaon n'en a pas moins de la morale, capitonnée dans ses mœurs et ses principes, nuancée pourtant pas les pensées Druidiques. La mercenaire prône la fidélité plus que tout, et dans le mariage, qu'il soit d'amour ou d'intérêt, c'est bien plus qu'un devoir. C'est le dogme de la femme. Mais de voir ces deux énamourés se tourner mièvrement autour, de constater la virginité de Calyce malgré ces années de mariages et de savoir que si on attendait que Falco se bouge les roubignoles, l'Anaon aurait le temps de crever quatre fois avant de voir un héritier à Brissac... Il avait donc été décidé qu'il fallait faire quelque chose, et les sœurs avaient décrété que ce mensonge-là ferait le bonheur de tout le monde. Calyce aura eu la joie de goûter au plaisir de devenir femme, Sabaude sera aussi euphorique qu'un gosse après sa première et Falco n'aura plus besoin d'attendre que sa femme se décompose pour commencer à la désirer. Si la chance est de leur côté, le ménage aura un enfant dans l'année. On ne célèbrera plus l'impuissance du mâle qui aura aux yeux de tous enfin rempli son devoir conjugal. Et dieu si c'est une fille ! Une jolie petite fille, on aura une prétendante pour Kenan plus tard.

    La mercenaire s'en frotterait les mains si elle ne préférait pas les garder en garde-fou alors qu'elle trottine dans le noir des couloirs. La bougie illuminant la porte de la chambre apparaît dans les ténèbres. Nul silhouettes pour faire le pet devant le chambranle. La balafrée avance à pas de loup, posant le plus discrètement le monde l'oreille sur le bois du battant. L'esgourde perçoit un vague timbre Renard. Il lui faut s'assurer que Calyce soit bien là-dedans aussi avant de rejoindre Cerdanne pour la mission de beuverie du mari.

    L'Anaon y reste encore quelques secondes, pour s'assurer et se rassurer. Et faire barrière au passage si jamais la Canarde avait l'envie soudaine de décarrer de sa chambre de noce.
    Elle le promet, plus tard, elle l'en remerciera.

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