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[RP] Venez, on va faire un p'tit tour...

Christabella
Montoise depuis peu, et récemment nommée à la charge d’ambassadrice, Bella se familiarisait avec la politique Gasconne, en lisant rapports, affichages publics, en discutant en taverne. De retour de Dax, elle se fit convoquer par le chancelier – qui se trouvait être le jeune homme charmant pour qui elle avait un sérieux coup de cœur, par le plus grand des hasards – et elle se hâta de ranger son bureau, de classer les dossiers avant de refermer la porte. Voulait-il se pencher avec elle sur le sac de nœud Béarnais ? Au sens propre, ou au figuré ? Cette bonne excuse de la chancellerie permettait aux deux amants de multiplier les rencontres fortuites et moins fortuites, au nez et à la barbe de sa camériste rigoriste, et, croyaient-ils, à leurs proches, qui n’étaient pas au courant du sentiment qui les unissait, du moins pas officiellement. Le jeune homme lui sourit, et après avoir chastement posé ses lèvres sur les siennes, il lui remit une lettre portant le sceau officiel de la chancellerie.

Tenez, ma dame. Vous l’ouvrirez chez vous, devant le corbeau.
De quoi s’agit-il, Excellence ?
Je requiers de votre temps, afin de vous faire visiter chaque ville de Gascogne. Vous ne pouvez décemment pas être ambassadrice d’un duché sans avoir été à la rencontre de chacun de ses habitants. Évidemment, je serai du voyage...


Les derniers mots, susurrés à son oreille, la mirent en émoi. Grumpf, il avait le don pour attiser ses émotions... Puis, après quelques baisers voluptueux, ils reprirent leur sérieux à grand peine, et il toussota, entendant des pas dans les couloirs. Aussitôt ils reprirent leur conversation, l'air de rien.

Vous avez besoin d’un guide, je vous présenterai à mon cercle de connaissance, ainsi qu’aux autres ambassadeurs. Évidemment, il va de soi que notre excursion durera quelques jours, peut être une semaine, voire deux. Cela vous agrée ?
Oui, Excellence. Je me tiendrais à votre disposition.
Mais j’y compte bien, ma dame. Nuit et jour...
Quand ce voyage commencera-t-il ?
Nous partirons demain. Dussé-je vous arracher des griffes de votre chaperon. Votre formation d’ambassadrice est on ne peut plus importante, votre grandeur. Je tiens à m’impliquer personnellement dans votre formation.
Et moi donc... Mais ce chaperon risque de vouloir nous accompagner, mon cher... euh … cher chancelier.
Je compte sur votre intelligence pour nous en débarrasser...


La jeune femme ne put réprimer un sourire malicieux suite à leurs échanges badins, sous le ton de l’humour. La camériste n’y verrait que du feu, sauf qu’elle voudrait éventuellement être de la partie...
Ce qui fut le cas. La vieille carmélite ne s’opposait pas au voyage, mais tenait à surveiller la comtessa, une proie facile pour les malotrus de tout poil, surtout quand elle avait un coup dans le nez – Souvenez vous de Paris, votre grandeur, je ne veux plus jamais avoir à gérer une telle chose ! Votre réputation ! Pensez-y ! – une belle jeune femme, et un bon parti par-dessus le marché. Bella ne savait pas quel argument avancer sans que cela paraisse louche, car même en flattant son orgueil, la vieille femme tenait mordicus à la suivre. Jusqu’à que Imoen, la femme de chambre, lui fit un clin d’oeil. Apparemment, les relations entre la vieille camériste et la femme de chambre s’étaient améliorées. Disons, qu’elles se toléraient... La jeune femme de chambre amena donc un plateau avec des rafraîchissements, un samovar d’eau chaude, et des biscuits.


Votre grandeur, je vous ai amené votre limonade.
Ma …
Elle allait questionner la femme de chambre qui lui adressa un regard entendu, visiblement, elle tramait quelque chose. Ah oui, ma limonade. Mercé, Imoen.
Ma sœur, une limonade bien fraîche pour vous aussi ?
Humpf … Non, non le verjus m’agace les dents, vous savez pourtant. Je prendrai une camomille.
Tenez, ma sœur. Touillez bien, le miel est au fond.


Bella, l’air de rien, avait remarqué l’air triomphant de la femme de chambre, qui avait apporté une tasse de tisane à la camomille,agrémentée de miel... relevé avec une belle dose de ricine. ** Le miel, le vilain péché mignon de la vieille camériste....
Le lendemain matin, jour du voyage, la comtessa était prête, debout dans le vestibule avec une petite malle, attendant que le Beauharnais l’emmène pour faire le tour de la Gascogne. Pas de camériste à l'horizon... Un secret espoir la fit sourire, elle n osait pas croire à une telle chance!


Imoen, que fait la sœur ?
Votre grandeur, elle a … eu la colique toute la nuit. Je crains qu’elle ne puisse vous accompagner.
Ma chère, je compte sur vous pour bien vous occuper d’elle. Qu’elle évite le … miel.


La femme de chambre lui sourit de toutes ses dents, si amusant que la jeune comtessa réprima un éclat de rire. Sacrée Imoen...


** Laxatif naturel puissant

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Wallerand
Du nerf, Jehan... Bon sang, à deux on va encore trouver le moyen d'être en retard, c'est pas croyable...
Bah, m'sieur Wallerand, c'est qu'l'aut'roncin fait des siennes ! J'suis sûr qu'il est moins frais que c'que dit l'forgeron.
C'est pas la faute de celui qui ferre... Si j'attrape celui qui a constitué les écuries de la Chancellerie, je m'occupe moi-même de lui.


Le Beauharnais et le page qu'il s'était attaché au sein de la Chancellerie luttaient ce matin-là contre tout. Le fer d'un des chevaux battait la campagne et avait dû être changé. La vérification de la voiture qui devait servir aux transports, une sorte de caisse de bois montée sur essieux d'un confort assez rudimentaire, avait révélé la moisissure d'un des rares coussins qui la garnissaient, et il avait fallu en dénicher un autre. Certes, la Chancellerie ne manquait ni de ressources ni de moyens, mais ça avait encore retardé. Pour cette fois, Wallerand se maudissait d'avoir choisi la voiture pour moyen de transport. Idée stupide ! Tant Bella que lui étaient bons cavaliers, ça aurait été tellement plus simple... Et tellement plus voyant aussi. Dans un soupir, il regarda Jehan se hisser sur le siège rudimentaire qui surplombait la caisse, fier comme Artaban.

Rassure-moi, tu sais te débrouiller avec un attelage ?
Oui, m'sieur Wallerand ! Mon pay f'sait ça pour un seigneur ! Et j'peux vous dire que celle-là, c'est une voiture qu'elle est bien pour la conduire.
Bon, vogue la galère alors... Et arrête de m'appeler comme ça, s'il te plait.
Oui, m'sieur Wallerand !


Petite bourrique, conclut in petto le Beauharnais. Comme il était d'usage en Gascogne, il avait tenté de faire comprendre au page que vu le temps qu'ils passaient ensemble au quotidien, il pouvait bien l'appeler juste Wallerand, comme il appelait le Duc Guillaume dans le secret du Conseil ou dans les tavernes. Rien n'y faisait. Il demeurait "m'sieur Wallerand". C'était bien essayé, mais c'était raté !
Un regard critique parcourut la voiture alors que le jeune homme installait sous les sièges le petit sac qui contenait tout ce que Jehan avait décidé d'emmener et celui, largement plus gros, qui contenait ses propres affaires. Forcément, quand on ajoutait un nécessaire d'écriture, des feuillets en relative abondance, sans parler de quelques habits - forcément - de rechange et autres joyeusetés, ça finissait par prendre de la place.

L’attelage, tiré par deux solides chevaux, finit par se mettre en branle, suivi par l’Acrobate, attaché à l’arrière de la caisse par une longe de manière à lui laisser un certain mou. Présenter la Gascogne à un nouvel ambassadeur était sûrement la meilleure idée que Wallerand ait eue pour se ménager quelques jours de tranquillité – ou plus ! – avec sa maîtresse. Calme à l’extérieur, il bouillonnait sous la surface. Et plus ils approchaient de la demeure montoise de Bella, plus son cœur accélérait… Et plus il redoutait un esclandre lié au chaperon. Si elle le reconnaissait au moment de partir, la scène risquait d’être mémorable.

Cependant, arrivé sur place, il eut le soulagement de voir une silhouette qu’il ne connaissait pas aux côtés d’une certaine autre qu’il avait appris à reconnaître sous bien des angles. Un sourire s’étira au moment où il avait compris qu'il pourrait continuer de porter son double chapeau de prédateur parisien et de Chancelier de Gascogne. La couverture était préservée ! Le corbeau ne comprendrait pas ce jour-là que l'un était l'autre. Le répit était assuré ! Du moins, jusqu'à officialisation de la relation de la Jauzac avec le Beauharnais. Ensuite, par contre, ça risquait de devenir une autre paire de manches. Quand il ramènerait le livre d’heures, il s’attendait à vivre un moment rocambolesque. Serait-il accueilli à coups de balai, par un lancer vengeur d’un seau d’eau destiné à calmer préventivement ses ardeurs ? Par un appel à la maréchaussée ? A coup sûr, cette solution serait amusante, puisqu’il était le lieutenant local.

Le baise-main usuel, en public, fut évidemment quelque peu appuyé une fois que Wallerand se fut extrait de la caisse avec un plaisir évident. Il aurait préféré chevaucher, mais… Difficile d’envoyer des bagages en croupe. Surtout pour une durée indéterminée. Jehan avait également sauté de son siège et se chargeait de l’installation du bagage de la Comtesse sous un siège. Sur un sourire à Bella, son amant se tourna vers l’inconnue et entama :


Demoiselle Imoen, je présume ? Votre maîtresse m'a dit beaucoup de bien de vous. Dois-je en conclure que vous êtes du voyage ? Ce serait toujours mieux que le corbeau...
Eh bien, non... Soeur Marie-Clarence devait vous accompagner, Votre Excellence, mais elle est indisposée et ne pourra se joindre à vous. Nul doute qu'une lettre de temps à autre l'apaisera.
Fort bien, j'y veillerai personnellement.


Peut-être l'amusement mal dissimulé du jeune homme mit-il la puce à l'oreille de la femme de chambre. Ou bien ce fut le fait qu’il l’avait reconnue pour ne pas être la camériste. Ou alors, ce fut simplement le salut joyeux adressé par Jehan à Tibedaud, probablement les deux personnes qui couvraient le plus régulièrement les "portes verrouillées pour cause d’absence du bureau pour cause de déplacement diplomatique" et autres "travaux dans une pièce fermée à clef" de ceux qui les employaient (comment ça, ils se comportaient bizarrement ? Non. C'était en dehors des horaires de travail, de toute façon), les deux garçons se croisant régulièrement dans les couloirs de la Chancellerie. Se retournant vers sa maîtresse avec un regard sans équivoque, le jeune homme reprit :

Y allons-nous, Votre Excellence ? La route jusqu'à Dax est longue.

Tu parles. Tu veux juste l'avoir pour toi tout seul, avoue ! D’ailleurs, dès que l’attelage eut quitté l’enceinte de la ville et qu’il devint inenvisageable que des regards curieux se portent à l’intérieur, la distance se réduisit brusquement entre les deux occupants. Et la conversation, fort professionnelle au départ, vira de même. La bonne allure promettait une pause réjouissante
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Christabella
Cacher son impatience, alors qu'elle attendait l'arrivée du chancelier et accessoirement amant. Il était en retard, aussi, elle luttait pour ne pas montrer son impatience. Imaginons que le corbeau se remette de sa colique et finisse par être du voyage ? Ce serait tout bonnement une catastrophe !
Mais bientôt, la voiture du chancelier arriva, tirée par quelques chevaux. Ils auraient pu chevaucher jusque là bas, mais pas simple pour les bagages... Et Bella voyageait rarement léger, surtout sachant qu'elle allait être en représentation. Mais évidemment, en public, rien ne paraîtrait, comme de coutume. Elle ne put s'empêcher de sourire, lorsque Imoen avoua au Beauharnais que la camériste était indisposée...

Y allons-nous, Votre Excellence ? La route jusqu'à Dax est longue.

Oui, allons y, Chancelier. Si nous voulons arriver avant la nuit, ne perdons pas de temps


Ils cheminaient à bonne allure, et, tandis que les cahots de la route amenait Bella à se rapprocher du Beauharnais, elle en profitait parfois pour poser sa tête contre son épaule. L'histoire du miel au ricin fit éclater de rire Wallerand, La mi journée arriva vite, avec la promesse d'une balade postprandiale. Jehan devait rester avec les chevaux qui paissaient, tandis que le chancelier voulait absolument montrer à l'ambassadrice une jolie cascade non loin de la route, juste derrière un bosquet épais.

Après un dernier regard tendre, ils mirent fin à la balade, retournant auprès de Jehan, qui semblait bien ennuyé. Un des chevaux de l'attelage semblait dormir, et ne pas avoir envie de se réveiller. Justement le cheval qui semblait mal en point... Bella s'y connaissait en chevaux, possédant un haras qui élevait notamment des destriers, pour les joutes.


Hum … On dirait qu'il est prêt à rejoindre le paradis solaire équestre... Comment s'appelle t-il?
Il s'appelle Martoni. Euh comtessa... Avec tout le respect que je vous dois, il dort. Hein ! Tu bluffes Martoni ! Il bluffe.
Pas sûr.
Si si il bluffe, ça se voit tout de suite.
Il a pas l’air de bluffer là quand même
La jeune femme ouvrit une paupière de la pauvre bête, qui respirait de plus en plus laborieusement. *
Siiii, il bluffe là
Moi je suis de l’avis de Jehan là, il bluffe. On vote ? On vote. Moi je vote et je dis il bluffe. Il a juste perdu un fer, c'est tout.
Je vous dit qu'il crève. Il va falloir le changer.
Je vous dit qu’il a mal au genou...
Je vois pas le rapport. Il a perdu un fer, et il va crever. On ne peut pas tirer l'attelage si on a un cheval crevé.
Pff, et on a pas de cheval de secours... Bien not' veine, ça.
Bon … Jehan, nous n'avons pas le choix. J'emmène la comtesse avec moi sur l'Acrobate, on t'enverra de l'aide de Dax. Ma dame ? Cela vous sied ? Je refuse que vous passiez la nuit sur les routes, dans le froid, sans confort.
Nous n'avons pas le choix, Wallerand. Je m’accommoderai de cet imprévu. Je ne supporterai jamais une nuit à la belle étoile, c'est au dessus de mes forces. Hum.


Elle arbora une mine contrite, presque ennuyée, alors qu'au fond, cette occasion rêvée de chevaucher avec lui sur la même monture l'emplissait d'une secrète joie. Et puis, ils iraient encore plus vite sans la voiture, et ainsi pourraient s'octroyer une autre pause, histoire de ménager l'Acrobate. Voyager ainsi, si proches l'un de l'autre, était une expérience assez grisante. Bella se mit à penser à la prochaine pause... qui ne tarda pas à arriver. L'oeil pétillant, tandis qu'il attachait l'acrobate à un arbre, la comtesse lui glissa à l'oreille.

Une autre cascade à visiter, je présume ?

Aucun cheval n'a été blessé pendant le tournage.

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En deuil ( signature en cours de modification)
Wallerand
Le choix du déplacement à cheval, contraint et forcé, avait malgré tout des charmes auxquels le Beauharnais n'était pas insensible, loin s'en fallait. Certes, il y avait quelques petits inconforts, comme l'écritoire portatif sur les genoux de Bella et le sac jeté en travers du dos de Wallerand, calé en partie par l'arrière de la selle. Il n'avait pas forcément été facile de faire du tri dans les affaires combinées des deux amants, et de déterminer ce qui resterait avec Jehan en attendant la rescousse et ce qui devait les accompagner dans le reste de leur voyage. Le page était demeuré avec l'attelage, le cheval vivant, la dépouille de l'autre, qui avait été dégagée de l'attelage, et la promesse de faire envoyer du renfort. Le tout en espérant qu'il ne se gèle pas trop à la tombée de la nuit si le cheval de rechange mettait du temps à arriver...

Bref, le Chancelier avait donc l'honneur et le plaisir de voyager dans une proximité extrême avec son ambassadeur, bien que la chose n'ait pas exactement été prévue ainsi. Bouleversé aussi, le trajet ! Car, si la voiture avait imposé d'emprunter des voies larges et relativement bien entretenues, l'Acrobate permettait d'envisager des routes plus directes et plus rapides, tout autant que des détours imprévus qui auraient le mérite d’allier le charme de la Gascogne à l’isolement presque parfait de ses campagnes.

Le chemin qu’avait choisi Wallerand avait ceci de particulier qu’il longeait une crête, au-dessus du vallon dans lequel roulait paisiblement une rivière. Pas n’importe laquelle… Tel était l’avantage de rechercher des fiefs pour le compte du Héraut de Gascogne : il finissait par connaître un certain nombre de lieux en général méconnus, dont les archives présentaient des intérêts divers et variés, si bien qu’au bout du compte, de fouilles en exhumations de documents divers, il finissait par assez correctement se représenter la Gascogne et ses curiosités. Et le hasard faisait à merveille les choses, à part le cheval mort qu’il faudrait remplacer, car il avait placé une certaine ville en plein milieu de leur itinéraire du jour. Aussi, alors qu’il accrochait la bride de l’Acrobate à une branche basse, le Beauharnais répondit à Bella :


Beaucoup mieux qu'une cascade, vous allez voir.

Le chemin, à vrai dire, ne fut guère long pour offrir à la vue ce qui motivait la halte. Au détour de la crête apparut, nichée le long de la Midouze, une petite bourgade flanquée au Nord-Est d'un port. Peut-être étaient-ce deux hameaux, en réalité, mais on en venait à les confondre. Un peu plus loin, une motte supportait la silhouette pataude d'un château de bois et de pierre. Plus loin encore, une véritable forteresse se dressait, vigilante sentinelle des environs.

C'est Carcarès-Sainte-Croix. Le chemin le plus court de Mont-de-Marsan à Dax y passe. Au retour, nous y ferons une halte, si vous voulez. Alvira y sera peut-être. Ah, tenez, vous savez ce qu'on raconte sur la forteresse, là-bas ? Une châtelaine infidèle y aurait été emmurée vivante, dans la tour carrée. Les Gascons sont doux comme des agneaux, n'est-ce pas ?

Croyez-vous que, malgré cette considération absolument charmante (qui n’en conviendrait pas ?), les deux diplomates en vadrouille seraient restés sages ? Que nenni. Car les urgences arrivaient à toute heure, et la proximité jusqu’alors inédite entre eux produisait ses effets. De légers effleurements furent plus appuyés, avant que de véritables caresses ne s’échangent. Et… Et ! Bref, de fil en aiguille, l’urgence assouvie, ils avaient retrouvé la tranquille compagnie de l’Acrobate. Et des deux, ils avaient piqué vers Dax. De Dax, ensuite, ils avaient poursuivi vers Bayonne…

Du moins, c’était ce qui avait initialement été prévu. Mais le Beauharnais, au moment de reprendre la route, subissait les incroyables effets secondaires d’un grand nombre de chopes de bière (au-delà de quatre ou cinq, de toute façon, il ne comptait plus)… Tout occupé qu’il avait été par une colonne de fourmis qui avaient l’air bien décidées, dès la sortie de la taverne, à entamer l’ascension de ses bottes, il avait focalisé son attention sur le fait que les griller était une bonne manière de s’en débarrasser, proférant un étrange « Meurs, pourriture communiste ! » qu’il fut bien en peine d’expliquer à sa maîtresse, qui fit montre une nouvelle fois de sa grande patience. Ainsi n’eut-il pas la présence d’esprit nécessaire pour prendre la bonne route. Au lieu de se diriger vers le Sud-Ouest, il avait obliqué plein Ouest. Comme s’il y avait eu un appel qu’il ne pouvait pas ignorer plus longtemps. Une fois engagé sur le chemin, perdu dans son bavardage aux allures badines, ou l’inverse, il n’y avait guère prêté attention alors que la Lune se levait.

Ce ne fut qu’un bruit sourd, lointain encore, qui lui fit prendre conscience de son erreur. L’heure de faire découvrir son autre grand amour sonnait, apparemment. Alors l’amant heureux souffla le changement de destination dans des mèches blondes. La côte était proche, il le savait, il était déjà venu là… Mais toujours seul. Cette fois-là, ça allait changer. Bientôt, il invita Bella à mettre pied à terre, l’aidant de son mieux. Ils devenaient presque aussi bons à cette gymnastique que dans une autre (notons au passage qu’ils avaient été sages depuis trois bonnes heures, ce qui n’est pas négligeable).

Une fois l’Acrobate solidement attaché, Wallerand ouvrit le chemin vers une petite crique. La Lune avait le bon goût de leur dévoiler les racines traîtresses et les cailloux instables, et ils arrivèrent ainsi en bas. L’océan était calme, et pourtant… L’air iodé emplit les poumons du jeune homme. C’était comme s’il se régénérait à proximité de ces rouleaux qui s’étendaient à perte de vue, moutonnés par un vent qui se sentait à peine de la terre ferme. Perdant son regard sur l’immensité, il ne put que passer un bras autour de sa maîtresse et murmurer :


Vous comprenez ?

Vous comprenez que cette chose dont on ne voit pas la fin, cette sorte de miracle en perpétuel mouvement et pourtant toujours reconnaissable, marbré de veines lumineuses par la Lune comme il est moiré par le Soleil en plein jour, changeant selon le vent, la marée, les nuages, les saisons, immuable dans sa puissance incontrôlable, cette chose que j’aime de manière tout aussi incontrôlable, c’est ce que vous m’avez évoqué dès notre première rencontre ?

Mais il n’était pas homme d’éloquence en matière de sentiment. Alors il se borna à ces deux simples mots… Avant de souffler, une nouvelle fois :
Je vous aime.
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Christabella
C'est Carcarès-Sainte-Croix. Le chemin le plus court de Mont-de-Marsan à Dax y passe. Au retour, nous y ferons une halte, si vous voulez. Alvira y sera peut-être. Ah, tenez, vous savez ce qu'on raconte sur la forteresse, là-bas ? Une châtelaine infidèle y aurait été emmurée vivante, dans la tour carrée. Les Gascons sont doux comme des agneaux, n'est-ce pas ?

Emmurée vivante ? Quel destin affreux ! Vous vous moquez !

Oh non ma dame, je ne me le permettrai pas. Il s'agit juste d'une légende...


Elle sourit, sachant que c'était le fief de sa tante Vivi. Bella n'était pas mécontente de découvrir la Gascogne de cette manière, d'autant plus que le chevaucheur avait mille et une anecdote à lui conter, entre autres activités. Le Beauharnais lui avait-il fait le fameux « coup de la panne », en toute connaissance de cause, en choisissant le cheval le plus faiblard ? Machiavélique, n'est ce pas ? Vrai ou pas, elle ne s'en plaignait absolument pas. L'acrobate prenait les chemins de traverses, raccourcis, permettant d'apercevoir différents domaines, ruines, castels et curiosités. Et puis la proximité avec Wallerand était déconcertante pour la jeune femme, peu habituée à cela. Bella goûtait de sentir à chaque instant les bras de son amant autour d'elle, les baisers qui ponctuait son cou, sa nuque, ou ses cheveux. Et, et... ! Ah ça, comment voulez vous rester sage, vous ! Elle put découvrir Bayonne et ses habitants, une soirée très agréable, et très arrosée. Elle commençait à se demander s'il serait sage de reprendre la route... Bella tenait bien l'alcool, du moins un peu mieux que le Beauharnais croyait-elle, sauf qu'elle ne connaissait pas la route. Elle fronça les sourcils, alors qu'il lui semblait que Dax ne se situait pas plein Ouest.

Bientôt, elle perçut un lointain grondement, rythmique, et la saveur de l'air, iodé, sans qu'elle puisse identifier. Il lui murmura au creux de l'oreille que bientôt, elle comprendrait. Bientôt quoi ? Un détour pour une autre anecdote ? La nuit tombait, et ils n'étaient pas encore arrivés à Dax, et trop loin de Bayonne... A son invitation, elle mit pied à terre, tandis qu'il accrochait la longe de l'acrobate à un arbre. Wallerand semblait très bien connaître le chemin, et elle marchait dans ses pas, sentant le sol traître sous ses pas, remplis de cailloux, de racines et autres joyeusetés. Et là, elle le vit. L'océan. Eclairé par la lune presque pleine, en perpétuel mouvement, grondement doux, délassant. Apaisant. Fort et doux à la fois, immuable, immense.


Vous comprenez ?

Il lui avait dit, lors du dîner gage, qu'elle comprendrait vraiment ce qu'elle représentait pour lui quand elle verrait l'océan. Bouche bée, la jeune femme émue, passa son bras autour de sa taille pour l'étreindre plus fort. L'océan, les vagues éclairées par la lumière cireuse de la lune, l'écume...Alors il se pencha de nouveau sur son oreille.

Je vous aime.

Bella, émue devant ce spectacle, touchée par les mots, était subjuguée. Elle ne savait plus quoi dire, les mots lui manquaient à son tout. Les mots semblaient inutiles, terriblement futile, édulcorés... Alors elle attira sa nuque pour l'embrasser tendrement, avant de lui susurrer à l'oreille.

Je vous aime. Restons icilieu... Jamais je ne lasserai de ce spectacle.

Il était inutile de continuer pour la nuit, d'autant plus que la lune finirait à son tour par se coucher. A défait d'un coucher de soleil sur la mer, ils observaient un coucher de lune. Assis sur le sable sec, l'un contre l'autre, le Beauharnais l'entourait de ses bras. Pour des raisons de budget, la fin du poste sera bruité à la bouche. Le silence uniquement perturbé par le grondement du ressac, les deux amants profitaient d'une nuit en plein air. La sentant frissonner, il la frictionna, l'embrassa, et... et ! Et non. Loupé ! Car des bruits de galop la firent sursauter. Alarmée, elle se tendit immédiatement. Des cavaliers, l'acrobate qui s'était détaché et les narguait – non tu m'auras pas euh -, des brigands ? Mais Wallerand la rassura d'un geste.

Que sont ces... animaux ? des chevaux?

Des vaches marines, ma dame.


C'était une blague ? Si c'était des bovins, ils lui paraissaient bien chétifs ! De là, elle ne voyait pas très bien, la comtessa. Peu à peu, elle distingua des paires de cornes en forme de lyre, et entendit un meuglement. Son amant lui expliqua l'existence de ces troupeaux particuliers, qui paissaient en libertés le long du littoral, cheminant dans les marais, les sous bois, et les dunes, libres, à l'état sauvage....
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