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[RP] Les éccueils

Judas_vf
Sous l’effet de la passion, on cesse de se nourrir, de dormir, de travailler, d’être en paix. Beaucoup de gens sont effrayés parce qu’elle anéantit sur son passage tout ce qui relève du passé. Personne n’aime à voir son univers désorganisé. C'est ainsi que certains parviennent à contrôler cette menace et à maintenir debout une structure qui a pris la poussière.

D’autres s’abandonnent sans réfléchir, espérant trouver dans la passion la solution à tous leurs problèmes. Ils placent dans l’autre toute la responsabilité de leur bonheur et le rendent coupable de leur éventuel malheur. Ils sont en perpétuelle euphorie parce que quelque chose de merveilleux leur est arrivé, ou déprimés parce qu’un événement auquel ils ne s’attendaient pas a fini par tout détruire.

Se préserver de la passion ou s’y abandonner aveuglément, laquelle de ces deux attitudes est la moins destructrice ?

Virée nocturne en ville. Judas joue et gagne de l'argent aux cartes avec quelques inconnus, boit plus que de raison . Croise Calyce, au bon souvenir du Renard. Le vicomte lui manque. Le seigneur s'alcoolise encore un peu à cette pensée. A cette situation d'exil dans laquelle il s'est muré. A l'inextricable conjoncture qui finira sans doute par le rendre schyzophrène. L'éternel jeu des Maitresses.

Il rit fort, il allonge l'écu, arrosant tout Saumur. La nuit ne fait que commencer. Le profil d'Anaon interpelle ses prunelles noires, l'alcool aidant, Von Frayner ne réagit pas. Elle l'entraine dans une taverne.

Le piège se referme. Le seigneur s'assoit, sans lâcher des yeux ce mauvais présage. Elle s'est déplacée. Elle fait dos à la porte, mains crispées sur le comptoir. Il reste muet, méfiant de l'eau qui dort, parcours sa silhouette de dos, d'un oeil averti, finit par heurter des noirs le poignard. Celui qu'elle tient dans une main, avec un pli qu'il reconnait.


- L'Anjou, toujours a porté des parfums qui n'étaient pas de chez lui... Des embruns de sel. Des embruns d'auburn. Si souvent.


Judas sent son pouls s'accélérer sensiblement, il contre le prélude d'un sifflement mauvais .

- L'anjou est stupide...

Il reste la senestre au gant figée sur sa coupe.

- L'Anjou n'est pas stupide... L' Anjou est détestable de ne jamais parvenir à garder pour lui aucun secret.

Anaon prend une inspiration difficile et ose le volte face. Il croise ses yeux bleus, marine
.

- Tu n'as jamais su me mentir... Tu as toujours essayé mais tu n'as jamais su.


Elle tremble plus encore de crispation face à son silence, lui qui reste étonnement mutique. Attendant le couperet. Il sait qu'elle sait. Elle est venue lui faire payer son escapade Chimérique. Il sait qu'il ne peut plus mentir. Plus dissimuler.

- Alors parle .

Il est stupide, à tenter de savoir à quoi s'en tenir.

- *hips* Que me reproches tu?

Judas n'aime pas la présence de la lame, échaudé déjà .

- Je sais qu'elle est là... Je la vois sous mes paupières. Et je crois sentir son parfum brûler sans cesse mes narines.

L'inflexible lâche sa coupe, et tend la main vers elle.

- Donne.

Anaon lâche un bref pouffement nerveux, gardant un calme mêlé à une extrême tension, ses doigts gantés pincés sur la lame nue.

- De moi tu ne crains que cela ?
- Donne...

Judas la fixe, pendu à ses gestes. La Roide laisse le poignard dans sa main à plat sans pour autant le lui tendre.

- Je t'ai donné... beaucoup. Alors laisse moi au moins les contacts qui rassurent.
- Arrête ça..

Judas se redresse et se lève, le pas le plus assuré possible malgré sa blessure , et vient contre elle pour lui arracher le poignard litigieux. Dans un geste sec, elle resserre son poing fermement pour ne pas se le faire dérober, et attrape vivement Judas au menton de l'autre main.

- Ne joue pas avec moi !

Judas serre les mâchoires, zygomatiques frémissants. Elle persifle dents serrées, poigne vibrante d'un désespoir violent mais contenu:


- ELLE est là. Là quand toi tu n'es plus là !

Il se dérobe à son joug et arrache de force la lame.

- Oui ! ... Elle est là ...

Que peut-il dire de plus, au pied du mur ? Elle est là. Là depuis longtemps. Trop longtemps sans doute pour que la Roide ne le supporte encore.


___________________
Anaon
    L'Anaon sursaute vaguement au cuir de son gant qui se coupe sous le poignard volé. Judas ne cherche pas d'excuses, vu l'état de l'Anaon. Rarement il l'a vue aussi furieuse, aussi dangereuse, ou... aussi désespérée. Il immisce la lame dans sa ceinture, loin des élans de la mercenaire. Elle comprend bien que ce silence est un aveu.

    _Qu'ai-je fait...

    Judas sent de la colère l'envahir aussi. Contre lui même, contre la terre entière. Il lâche l'Anaon pour aller vider cul sec sa coupe, qu'il fait claquer sur la table. La mercenaire se perd dans quelques petits pas raides, ne sachant plus quoi faire de ses mains.

    _Qu'ai-je fais pour mériter ta rencontre !

    Judas se prend la tête entre les mains, avec l'envie d'envoyer valdinguer le premier truc qui lui passe sous la jambe valide.

    _ Ne dis pas ça...

    L'Anaon sent l'acide lui brûler l'estomac d'imaginer malgré elle ces étreintes avec cette autre. Judas revient sur elle, l'emprisonne dans ses bras. Aimerait qu'elle se taise. Aimerait la serrer plus fort pour qu'elle se taise. Et elle se sent comme touchée au fer blanc à son contact.

    _ Arrête !
    _Calme-toi...

    Elle se fait violente pour s'en défaire, laissant tous les sceaux craquer sous l'insupportable étreinte... qu'elle vient briser hors-d'elle même d'un poing dans sa mâchoire.

    _ ARRETE !

    Judas essuie le coup, inattendu, dans un mouvement de recul, portant sa main de cuir à sa joue, incrédule. Geste qui la surprend elle-même de ne l'avoir jamais osé, et qui pourtant ne la fait pas désemplir.

    _ Pourquoi ELLE !
    _ C'est ce que tu veux ? Qu'on se frappe. Qu'on se déchire ?
    _ C'est ce que tu as toujours fait ! Me chercher et me reprendre pour toujours me crever plus encore !

    Elle entend les échos d'une lointaine Bretagne qu'elle avait cherché à enterrés, sans jamais parvenir à l'oublier. Judas revient à sa rencontre, la ceinture, le coup ayant éveillé sa hargne.

    _ Arrête... J'ai pas voulu...

    La mercenaire se crispe à nouveau, s'agrippe à son col en griffant son cou. Le seigneur pousse un cri bref, éloignant les mains qui le meurtrissent.

    _ Tu n'as pas voulu ? Tu n'as pas voulu la prendre ? Menteur... Tu as toujours été menteur !

    Il tente de la calmer en l'immobilisant, peine perdue. Écœurée, elle recule la tête, les yeux fermés.

    _ Je ne veux pas sentir son odeur sur toi !

    Judas souffle comme un buffle, secouant la tête qui lui tourne un peu.

    _ Tu aurais dû me frapper plus fort le jour de ton mariage ! Et tu aurais dû me laisser dans mon bain parisien !
Judas_vf
Judas serre son étreinte, l'endroit n'est que chaos, les amants ont fait fuir les rares badauds. Il sent les griffure lui bruler la gorge comme le feu, et la Roide ne l'est plus, ho non... Elle est brulante, incandescente face à lui.

- Ne dis pas ça ! Je t'interdis ! Tu n'es plus seule... Pour décider...

Elle a les yeux et la gorge qui lui brule, mais aucune larme ne vient border les remparts de ses paupières. La réplique fuse aussitôt. Morsure .


- J'ai toujours été seule ! Toujours !

Le seigneur sent l'alcool plus que tout autre parfum, et la gorge nouée , accuse le coup. Anaon vient se fixer dans ses yeux, la voix plus mesurée mais amère.


- Quand je portais ton fils déjà tu la courrais sous mes yeux. Quand tu me l'a pris et m'a délaissée tu l'as épousée.

Il ferme les yeux. La vérité fait mal. Mais la vérité est là. Il voudrait ne pas l'entendre.


- Dis-moi pourquoi ! Ce qu'elle t'a donné de plus que moi !


Le seigneur la lâche, et s'éloigne d'elle comme du feu. Elle crie.

- Cette druidesse parjure, insulte et sans honneur, cette coureuse qui a cherché à coucher même le fiancé de sa soeur !

Raide, il envoie valser ce qui reste sur une table. Ne veut pas entendre. La brune trouve l'appui du comptoir. Dans la bouche de judas, l'écorchure, difficile à admettre. La corde à son cou depuis quelques années, serrée, un peu plus à chaque fois.

- Elle... Elle me fait perdre l'esprit.

Anaon ferme les yeux, acide, l'estomac en vrac.


- Et moi... moi je ne suis devenue que l'épouse conquise que l'on épouse même pas...


Frayner s'appuie au mur, ne sachant plus quoi faire. Plus quoi dire.


- Celle qui n'éveille plus rien d'avoir été trop là.


La Roide crispe une main contre son ventre, comme pour en calmer le feu. Quelques mots amers s'échappent des minces lèvres de Judas.

- J'ai perdu la tête... Je ne voulais pas te blesser.

- Aime... Chimera, si tu veux aimer Chimera... Prends Chimera si tu veux prendre Chimera, je t'ai dis... Pourquoi ce jour là ne m'as-tu pas laissée...


Judas pose son front contre la pierre fraiche. Marée descendante. Tout semble redevenir calme après le chaos. Il aimerait que tout cela cesse. Qu'y comprendra-t-elle, ou l'autre, à ce que lui ne peut pas contrôler? Face à cette situation qui lui échappe, seigneur a les jambes coupées. Et une sourde colère inextinguible.


- Parce que tu Es. Et moi *hips* sans toi ne je suis rien. Je suis égoïste. Je ne pense qu'à moi. Je n'accepterai jamais que tu partes. Ou que tu te noies dans ton foutu bain!


Il se retourne, usé. Nuque à plat, adossé, et ses yeux la scrutent, à demi clos sur leur vis à vis.


- Tu es à moi Anaon. ça ne peut pas être autrement...

- C'est elle qui nous a tué. C'est elle qui t'as arraché à moi. Loin des soirs de Petit Bolchen.

Judas tiraillé, refuse qu'elle descende la rousse. Au jeu de qui aime qui, personne ne choisit. Et tout le monde est faible. Anaon se laisse glisser au sol, dos au comptoir. Les mains crispées contre elle. Ils sont fourbus, deux combattants sans gloire, et pas de vainqueur à l'issue de l'affrontement. Elle murmure.


- Je suis à toi. Mais toi tu ne m'as jamais appartenu.

- Ce n'est pas Elle. C'est moi qui ait fauté.
- Je la maudis. Elle et toutes ces autres. Je me maudis... Et toi aussi. J'ai aimé un seigneur volage, qui faisait toujours le partage de ses faveurs. Je me suis faite à toutes ses Maries, à ses blondes, à ses rousses.

- Tais-toi!
- Mais je préfère ne rien avoir qu'avoir la moitié de ton amour.


Il tressaille à ce ton comme un couperet. Anaon a le goût du définitif ce soir. Et il s'y refuse tout entier. Il la regarde, ayant pris dix ans dans la nuit.


- Que dis tu là... Hein, que dis tu?


Elle ne répond pas, les yeux clos. Concentrée à ravaler les ires trop violentes, et les mots rasoirs.


    Que dis tu Anaon... Que tu me quittes c'est ça? Te souviens tu, la première fois ...? Te souviens tu... Les remords. Et les coups. Et le temps. Assassin.


___________________
Anaon
    Et sur les questions sans réponse : l'entrée. La Némésis qui sur le seuil s'immobilise. L'Anaon sent l'acide lui détruire les poumons, la percer de mille et un bris de verre. Judas adossé est livide. Chimera doucement sourit et passe la main dans sa nuque.

    Silence de chiens de faïence.

    _ Je ne vais pas rester. Je passais, seulement...

    La mercenaire se relève avec difficulté. Moral contusionné. Muscles fourbus de s'être trop crispés. Sciée devant l'apparition maudite.

    _ Je crois avoir dit à Sabaude de vous dire... que la prochaine fois ou le « hasard » vous mènerait malencontreusement devant moi... ce n'est pas la courtoisie qui vous accueillerait.

    Menace édulcorée quand elle avait promis la tête sur une pique à la prochaine rencontre. Anaon n'est pas un chien qui aime aboyer avant de mordre.

    _Soit.

    Judas quitte son mur, se mettant face à Chimera, barrant la route d'une Anaon qui s'immobilise devant le geste. Devant... l'affront. Comme un choix qui s'est fait. La Rousse hausse une épaule, croisant les prunelles de jais. Le Brun ferme les yeux. Chimera glisse simplement une main sur le bras Von Frayner, apaisante, et fait demi tour. Sans un mot, courtoisie n'ayant pas lieu d'être. La porte se referme, l'Anaon s'effondre à nouveau sur le sol, contre son comptoir, comme si le sol, soudain, se dérobait. Judas s'accroupit, la retenant, la ramenant à lui.

    _ Pardonne-moi...
    _ Je ne peux pas te pardonner quelque chose que tu ne regrettes pas.

    La Roide se recroqueville sur elle-même, pour fuir, n'ayant pas la force de le repousser. Morte à l'intérieur.

    _Je t'avais dis... que si tu te remettais encore une fois entre une femme et moi c'est toi que je tuerai...
    _Je regrette de t'avoir fait du mal. Je regrette d'être allé trop loin... Ça me ronge. Dis-moi... dis-moi ce que je dois faire pour que tu me pardonnes. Je ferai n'importe quoi...

    Elle se renferme plus encore. Dans ses colères froides. Trop calme de ne plus avoir la force de s'emporter.

    _ Rien... tu ne feras rien. Puisque tu tiens à elle au point de t'interposer encore entre elle et moi...

    Elle redresse le nez dans son cou, comme on voudrait y trouver une odeur, une dernière fois. En faire un souvenir, avant le dernier adieu. Et il s'en veut de la voir ainsi, de la mettre à terre à chaque fois qu'elle se remplume.

    _Je ne pouvais pas te laisser... Faire quelque chose qui...

    Elle esquisse un sourire aigre, fébrile... éphémère. Il prend son menton dans sa main.

    _ Ça n'aurait rien réglé.
    _ Un jour j'aurai sa tête... Puisque que jamais tu ne me l'apporteras. Ça ne te ramènera pas à moi... mais j'aurai au moins eu une satisfaction éphémère.

    Il murmure :

    _ Qu'est-ce que j'ai fait... de toi. Que dois-je faire... Pour que tu me pardonnes.
    _ Une petite fiole... pleine de poison, que tu as éclaté sous ton talon... Je ne suis rien d'autre qu'une petite fiole...

    Judas embrasse ses lèvres. Il veut qu'elle cesse. Et elle ne bronche pas, incapable de volonté ou de riposte.

    _ Arrête, ne dis pas cela. Ne dis pas cela. Je ne la verrais plus...

    Menteur. Anaon connait bien trop les mots parjures et les injures. Les promesses-poussières qui reviennent sans cesse. Ce qu'elle veut, c'est le choix de l'impossible.

    _ Je veux que tu arrêtes de l'aimer. Ou que tu arrêtes de me torturer. Je veux qu'elle n'ait jamais existé pour toi.
    Ou alors oublier qu'un petit matin d'Avril tu aies pu me dire "Ne pars plus... je t'aime "…

    Vois. Je te laisse le choix.

    Une inspiration qui fait mal.

    _ Pourquoi as-tu un jour croisé sa route ?

      Et la mienne...
Judas_vf
- Viens... viens là.

Judas l'attire à lui, Anaon murmure comme l'on couine, sans offrir de résistance:

- Je te hais tellement...

Et plus bas encore:

- C'est moi qui devait te tuer... pas toi. "Un jour mes doigts seront ta corde et mon corps ta potence"...

Anaon se sent d'une vieillesse extrême en se remémorant ces souvenirs.


- rentrons ...

Anaon le retient un instant.

- Tu iras la voir... Tu iras la voir une dernière fois. Si le doute te prends tu partiras avec elle.
- Je...
- Tu iras.
- Elle va aller voir sa *hips* soeur à Brissac. Alors, je ne la reverrai pas avant...
- Il n'y a pas plus humiliant que d'être le fruit d'un doute.
- Je ne t'humilierai pas.

Lentement, elle s'aide de Judas pour se relever, avec l'impression de n'avoir jamais été aussi rompue qu'en ce jour . La roide s'immobilise un instant... Attend, inquiète en regardant ses jambes. Il s'apprête à laisser la taverne et son chaos , passant outre toutes les douleurs qui se sont réveillées en lui, et celles à venir. Jusqu'à la phrase fatidique.


- Je n'ai pas saigné depuis longtemps... Si cet enfant vient à mourir ce ne sera pas de ma faute.

Moment suspendu. Judas le prend en plein coeur. Violent. Ses yeux s'accrochent à elle, qui reste crispée sur son ventre, épuisée. Renversé de cette nouvelle, comme un signe inattendu, il garde contenance, le ton se fait bas.


- ... Cet enfant ne mourra pas. Personne ne mourra.


Anaon ne dit rien, pessimiste d'en avoir bien trop perdu . Judas pose une main sur son ventre, fébrile. Puis lentement ploie genoux, et d'un geste fébrile l'embrasse chastement, désireux malgré tout d'avoir ce second fils qu'elle n'a pas réussi à lui donner. Les doigts de cuir froissent les vêtements de la Roide, elle frôle d'une main retenue et encore trop blessée les cheveux noirs. Il défait sa cape épaisse par la fibule renarde, et en se relevant vient la poser sur les épaules Roides.



- Je t'aime quand même... Encore. Toujours...Ma malédiction sans que je n'y puisse rien, et n'y pourrais jamais. Demain, tu me diras si tu m'aimes encore.


Le seigneur l'entraine dehors, d'une main sur ses reins.
___________________
Anaon
↬ Au surlendemain ↫

    « Je sais qu’il est trop tard. Je le sais parce que je t’aime comme une vague qui n’a ni plage ni roc ni falaise pour mourir. »
      - Pierre Labrie -


    Le carcan d'un bain, pour jouer les réceptacles, quand l'alcool ne baisait plus sa bouche en délétère amant depuis longtemps. Les secondes immobiles sur le bloc liquide. Lieu qu'elle fuyait parfois comme une phobie, quand d'autres jours elle y restait des heures jusqu'à ce que le froid de l'eau ne lui morde plus la peau. La nuque brisée sur le rebord, les bras appuyés sur le pourtour de bois. Comme ce jour où elle avait voulu se donner la mort. Elle se remémore... Cet instant macabre nimbé de tant de drame, durant lequel elle avait éprouvé le dernier lâcher-prise et la plénitude absolue, que de son vivant elle ne ressentirait jamais plus. Malsaine réminiscence, sans aucun regret. Manège muet qui se tait quand les pas du seigneur viennent à elle, dans le discret changement de posture, des bras voilant les éraflures.

    L'azurite s'ouvre sur Amadeus contre son ventre, qui joue dans l'insouciance du monde et de ce qu'il se trame chez ses parents. Puis le regard bleu embrasse l'entrant, avec l'œil du soldat désabusé des guerres qu'il lui faudra toujours mener. Aux sens, le parfum de tout ce qu'ils ont été et tout ce qu'ils sont, des regrets qui se partagent la nostalgie et l'envie de revivre.
    L'Anaon est assez sage pour accepter l'inacceptable. Ne plus être l'amante incontestable d'un Petit Bolchen tombé en poussière, une évidente passion, une envie unique parmi un millier de Marie. L'exception au cœur Bourguignon, celle qui n'a qu'un geste à faire pour anéantir toutes celles qui se trouvent autour. Sage Madone qui n'aime pas se perdre aux bras des décevantes chimères, contrainte, pourtant, à ne vivre que de cela, trop éprise encore pour accepter la pleine résignation et écraser même les espoirs les plus insensés.
    L'œil interroge, dans ces silences qui attendent la sentence, l'aveu qui la mènera à la potence. Le calme comme camisole, muselée de ses coutumières latences, quand il lui faudrait peut-être empoigner cette chevelure adulée pour prendre comme l'on viole ce qu'elle veut encore.

    Agripper ces armes qu'elles n'a jamais voulues prendre.
    Ce faire plus Judas qu'elle n'est Anaon...

    Alors dis-moi...
    Si tu l'as revue.
    Si tu l'as trouvée belle. Si ton cœur s'est déchiré. Si tu le regrettes.
    Te manque-t-elle ?
    Dis-moi si je demeure pour toi. Un passé ou un avenir. Le voile poussiéreux à chasser des souvenirs.
    Ne me mens pas.
    J'ai fait de mon ventre un nid de vipère d'avoir avalé tant de couleuvres.
    Ne me trompes pas, cette fois ça ne marchera pas.
    Tranche-moi la tête, mais tranche net. Arrête de serrer à ma gorge le nœud de la trahison. Les couteaux font toujours moins mal que les poisons.
    Je préfère l'arrêt à l'agonie. Ton départ à notre torture. La mort, si pour toi elle existe encore. La fuite, si je ne peux régner sans diviser. A tes faveurs dilapidées, je peux résister. A un cœur partager, je ne peux supporter.

    Je veux être l'unique objet de tes douleurs et tes délires.
    Ta souffrance par mon absence, non par ma présence.
    Porter mon chagrin comme fardeau. Pas le tien comme fléau.

    Sois enfin mien ou deviens sien.

    Je ne veux pas être un poids dans une balance. Une fiole rangée sur l'étagère. La prise conquise qui n'a plus rien d'exquise. Celle qui lasse d'en connaître par cœur tous les rebords et toutes les saveurs. A qui l'on promet les épousailles comme l'on sert une excuse d'or. J'ai tant aimé, ces temps d'amant sans amour, que j'en ai savouré jusqu'aux déchirures que l'on se soignait à grand coup de haine dans nos « je t'aime ». J'en viens à désirer l'ultime blessure à l'éternelle lassitude.

    Je veux entendre ce que j'ai trop peu dit. Ce qui en fait rire certain et moquer d'autre de le trouver trop naïf quand il n'en est rien. L'amour, j'ai préféré le faire que te le dire. Trop pudique de ces mots fragiles. Effrayée qu'à trop les prononcer leur essence se brise et n'ait plus de sens.
    Dis-le-moi si c'est une évidence. Je veux l'entendre, sans doute et sans remords.
    Les espoirs et les « encore ».

    Et si tu viens me dire « Adieu »... S'il te plait...

    Les lèvres qui éclosent, de la voix calme des condamnés acceptant le chemin du gibet.

    _ M'aimes-tu encore ? Où sommes-nous enfin mort...

      Cette fois... que reste-t-il encore ?



Musique : "Summertime Sadness" de Lana Del Rey. Parole et Traduction [url=http://www.lacoccinelle.net/645520.htmlici.[/url]
Judas_vf
    " C'est l'heure des aveux. Rien ne vaudra jamais l'ivresse des premiers instants. Si ce n'est la déchirure des tous derniers. "
    Pensée Anaonienne - RP "Que reste-il?", Livre de Judas, Chapitre 5.


Les chiens se sont arrêtés sur le seuil, laissant le seigneur entrer seul, craignant le courroux ou la pesanteur de l'endroit. Dans l'atmosphère humide, l'homme s'est fait silencieux, pas absorbés par le feutré de l'eau. Les mains sont venues jouer un instant sur la nuque brune de l'enfant, avant de s'en saisir, le chassant du bain dans sa nudité la plus parfaite et innocente, vers la nourrice avertie et patiente, là, habituée à la meute. Les truffes humides sont venues chatouiller le petit homme, les langues râpeuses laper les gouttelettes sur la peau fraîche tirant d'Amadeus un rire rayonnant, avant que le grand lange clair ne s'abatte sur la frêle silhouette, l'emportant, colérique, loin du huis clos réclamé.

Telle est la vie des hommes. Quelques joies très vite effacées par d'inoubliables chagrins. Il n'est pas nécessaire de le dire aux enfants.*


Judas a progressé lentement vers un siège abandonné à un angle de mur, posé là pour lui permettre, parfois, souvent dans le passé, de se faire voyeur d'ondines lascives, baigneuses abandonnées. Maitresse des lieux, amante de passage, petite bonne peu sage... Toute femme nue devant lui a toujours perdu ses titres, et gagné en intérêt. L'abandon, tel qu'il le volait, brutal, avant. Celui qu'il chérissait, précieux car rare, désormais.

D'abord, Il ne se soumet pas au regard inquisiteur qui lui fait face, non par réticence comme la veille, mais par assurance. Montrer sur l'échafaud sa faiblesse n'a jamais sauvé un un homme. Anaon saurait lire dans ces yeux des instants qui ne lui appartiennent pas. Les insultes et les cris. L'amertume, non encore partie. A l'impossible nul n'est tenu. Puis finalement... Judas redevient Judas. Le port de tête se redresse, et la stature se fait austère dans sa réflexion longue et continue, ses yeux de suie croisent le corps nu d'Anaon, puis leurs homologues azurins, adeptes de communications non verbales. Il la fixe ainsi longuement, dans son monologue muet. La botte vient se poser sur la cuisse voisine, encore éprouvée.


    Oui, je l'ai vue. J'étais assis là, perdu dans des pensées qui m'échappent, je ne savais pas qui j'attendais , ni qui j'allais découvrir, mais je savais que j'étais venu en rendez-vous, comme la première fois où je l'ai vue, comme la première fois où je t'ai vue. Je savais que j'avais un combat à mener, contre moi-même et le monde entier, un de ceux que l'on entame déjà perdant pour garder l'honneur fuyant. S'éprendre ou quitter, finalement le combat est le même, il étrangle et bouleverse, et nous laisse ombre de nous même.

    Oui, je l'ai trouvée belle, dans sa véhémente provocation. Dans sa douleur mal dissimulée. Je l'ai trouvée belle de me trouver méprisable.

    Et laisse mon coeur où il est. Je ne suis pas réputé pour en user. Je regretterai toujours le jour où j'aurais cédé, le premier ou le dernier, ton avis sera éclairé.

    Et je t'aimerai encore, et je t'en voudrai encore, d'avoir choisi un seule fois dans ta vie ton bonheur contre le mien. Car je n'ai pas vécu ainsi, altruiste, à ménager les autres. A faire attention à ne pas blesser les égos, pantin de moralité. Dans tes eaux troubles, je t'ai repêchée, ne t'y trompes pas... Je savais que c'était là où enfin, tu aurais été apaisée. Mais je n'ai pensé qu'à moi. A ma vie sans tes cotés.

    Que crois tu que sans les siens, ma vie me fasse? Je me sens déséquilibré. Cette fois je ne te tromperai pas. Je t'ai dit que je ne la verrai plus. Tu vois, je fais vraiment n'importe-quoi pour trouver ton pardon. Je marcherai sur la tête . Et tu me feras un autre fils, un empire peuplé de garçons, qui à leurs tours prendrons des coeurs, je revivrai par procuration. Pour toi je la quitte, et ne me dis pas comment je dois le faire. Et ne me dis plus jamais que je suis ton enfer, vois, je reste dans ton giron.
    Tu dis "enfin" comme une délivrance, mais de nous deux, aucun ne trouvera le repos.


Il se souvient de son second séjour en Bretagne, traversant les bois d'un Bubry giboyant, fier et jeune, arrogant.
Il se souvient avoir parcouru les courbes de l'une et de l'autre, comme une seule femme, lorsqu'elles étaient habitées par les enfants d'autres.
Il se souvient avoir pardonné à l'une ce qu'il n'aurait jamais pardonné à l'autre, et sait que ce que l'une lui a pardonné des années durant, l'autre ne l'aurait pas fait.
Judas se souvient, et sait qu'il n'est que les amnésiques pour prendre des décisions trop sérieuses sans les regretter. Une question vient tenailler son esprit. Quand a-t-il perdu le contrôle ?

Quand il a vieilli, ou quand il a aimé? Les deux sans doute, l'un apportant une prétendue sagesse et l'autre une déraison certaine. Emulsion intime que l'on se plait à nommer la Vie. Tout l'art de vivre, résiderait donc en un savant dosage de lâcher prise et de tenir bon.

Faire un choix, dit-on, c'est renoncer. Jamais la maxime n'a eu plus de sens qu'en ce jour. Chaque décision apportera son lot de malheur, son lot de tourments. L'une ou l'autre, s'amputer d'un choix de jeunesse n'est pas sans douleur. Et puis il est trop tard. Le mâle a fait. Et si l'Anaon est assez sage pour accepter, Judas lui, ne l'a jamais été pour se laisser emprisonner. Comme Salomon, l'enfant sera partagé, mais ne criera plus. Une autre question s'en vient. Quand Anaon a-t-elle cessé de le laisser libre?

Quand il a vieilli, ou quand il a aimé? Les deux sans doute, l'un emportant le droit de jouer avec l'insouciance et l'insolence du diable, et l'autre , le droit de l'afficher. Car l'ultimatum en est un, aimer ou perdre, comme une ligne invisible qu'il ne fallait pas franchir.



- C'est toi, la reyne pour défier la mort. Je ne l'ai jamais invoquée. Plutôt crever.


Pointe d'agacement, légitime à un Judas venu à reculons rendre des comptes, et pourtant prêt à prouver ce qu'il ne pensait pas devoir prouver un jour.




* Marcel Pagnol, Le château de ma mère.


___________________
Anaon
    « Un temps viendra où tu te croiras heureuse et tu n’auras plus peur. Ce temps de sérénité aura soudain un goût de cendres. »
      - Game of Thrones -

      Quand d'autres bras viennent poser un linge sur le dos de son fils, la mère se redresse faiblement et se perd dans une crispation tangible. Les yeux comme des poignards qui jamais ne s'y feront de voir son petit entre les mains d'une autre. L'échine se détend, à peine, quand la porte se referme estompant la vision. Et c'est vers d'autres tensions que les yeux bleus se tendent.

    Vers cette rudesse. Ce rehaussement de menton. Bien vite, l'oeil Anaon change, circonspect, devant cette attitude radicalement différente de celle qu'il avait pu adopter l'avant-veille. Imperceptiblement, les sourcils se froncent, la ride du lion se pince. Elle voit face à elle un Judas qu'elle n'avait pas revu depuis bien longtemps. Bouffi d'assurance. D'arrogance. La mercenaire reste immobile devant le cinglant surprenant de cette présence. Elle attend. Elle soutient. Cherche en silence à soutirer l'explication. Celle qui n'augure sûrement rien de bon. L'insistance judéenne prend alors à ses yeux un air de provocation, déplacée. Offense. Et en réponse à ce heurt muet et inattendu, la sicaire reprend la glace de son armure.
    L'Anaon a toujours été un papier buvard.

    Sa réponse est tranchante. Trop sibylline pour que l'Anaon la comprenne pleinement et sans doute. Mais le reproche de son suicide est perceptible. Et ça résonne comme une claque en plein museau. Et qu'était-ce ? De l'exaspération ? Cela... l'agace ? La balafrée ne bouge pas d'un iota. Une narine tressaute une brève seconde. Puis elle tourne la tête, hésite un instant, avant de tirer brusquement du bain ce monceau de cicatrices qui lui sert de carcasse. Dos au seigneur, elle agrippe un drap, s'en éponge pour la forme, avant de remonter sur ses jambes encore mouillées les chausses qu'elles nouent à ses hanches. Elle empoigne sèchement sa chemise et fait volte-face. Le corps se plante devant le seigneur et la main libre vient une fois de plus lui empoigner la mâchoire. Cette fois elle ne lui permettra pas de se dégager. Elle ne lui cédera pas, comme elle l'a fait en taverne. Elle est mercenaire. Elle a tenu tête à un Eikorc en colère, ce n'est pas le Von Frayner qui lui fera lâcher ce qu'elle ne veut céder. Si des femelles ont pu aimer la provoquer, même les autres sicaires, toujours, ont eu la jugeote de ne pas la contrarier. A croire que les histoires de lits rendent plus hardis. S'il bronche, elle serrera jusqu'à lui imprimer ses doigts et éclater sa mâchoire comme une ampoule de verre.

    Comprends enfin ce que je suis.

    Je ne t'ai pas pris ta liberté. Ni tiré sur le collet où tout seul tu t'es piégé. Tu t'es proposé la corde au cou et la bague au doigt. Un an de passé et vois, je ne te l'ai même pas rabâché. Être libre, c'est pouvoir choisir. J'ai fait le choix de toi. Mais je suis altruiste, pas une imbécile.

    Tu as toujours pu partir et vivre à ta guise. Je ne t'ai interdit ni les amantes ni les bordels. As-tu toi-même pu supporter Sergueï ? Quand je ne l'ai ni couché, ni épousé, pas même aimé comme j'ai pu t'aimer. Si tu la perds, c'est de ta faute, toi qui n'as pas su te taire. Ce jour, quand Sabaude m'a dit que tu venais en Breizh pour un plaisir bien précis. Tu as fait le mariole, quand je t'ai dit que je savais. Tu aurais pu la boucler et je n'aurai rien dit. Ni cherché à savoir comme je l'ai toujours fait. Mais en réponse à ton orgueil touché, « Je lui suis marié » c'est ce que tu m'as lancé.

    Il était bien plus simple de m'achever que de ravaler ta fierté.

    Ce jour-là elle avait pleuré. Comme une pitoyable fontaine incapable de se tarir. Quand a-t-elle perdue sa hargne ? Quand elle a vieilli, ou quand elle a aimé? Quand elle a perdu le dernier de ses enfants premiers ? Non, bien avant déjà. Quand elle a décidé de ravaler ses amour-propres pour ne plus jamais partir. Comme une femme déjà mariée soumise à sa fidélité. Muselée, elle s'était faite. Impuissante et humiliée, quand il lui a dit vouloir mourir d'avoir eu à la quitter. Et quand il n'a plus voulu la toucher...

    N'avons-nous donc été que deux imbéciles ? A vouloir se fondre à un moment ou à un autre dans le moule de l'autre. A vouloir faire cohabiter le chien et le chat dans le clapier du lapin. Toi à dévorer ma complaisance, moi à grignoter tes appétences.
    Tu avais bien moins d'obstacles avec elle. Sa jalousie peut-être.
    Et mon existence surtout.

    Que sont-ils devenus ? Plus ils se sont acharnés à prouver leur affection et plus ils se sont affaiblis, ramollis. Détruis.

    Oui, tu as raison. Mieux vaut ne rien dire.

    Le vrai du faux, elle ne veut plus le trier. Tout a l'arrière goût du pastiche et du vérolé. Les doigts toujours en joug, elle approche le visage, à deux doigts de ce souffle qu'elle n'embrasse pas.

    _ Certain ont murmuré... que la première fois où je t'ai quitté, tu as pleuré.

    Les dents serrées. Souvenir d'une éternité. Et de persifler, encore...

    _ Gardes Denée.

    Ça ne me servira à rien. J'ai toujours préféré les trous à rats et les galetas. Tu te débrouilleras pour en faire un héritage.

    L'Anaon n'est pas réputé pour faire des vagues. Elle arrive en silence, et repart sans un bruit. Et l'on compte derrière elle les morts et les absents. Furtive, comme une dernière plaie d'Égypte.
    La mâchoire est lâchée. Et elle s'éloigne pour gagner la porte en enfilant sa chemise.
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Senestre attrape au vol, avant de la laisser migrer, la main impertinente, ne pouvant rhabiller.

- Ne me provoques pas sur ce terrain là...

J'ai gardé mon calme, mais tu réveilles le volcan. C'est ça que tu cherches hein? C'est ça que tu voulais... Nous sentir vivants.

Si la roide s'enfuit de l'avoir trouvé sans doute trop abrupt, n'est rien comparable à l'abrupt que la poigne sur sa main, ni ses yeux assassins juges de sa désertion. Alors quoi? Tout ça pour ça? Se croit-elle au dessus des lois quelle a elle même érigées? Le ton est emporté, presque outré.

- Hier, je me suis fais mal pour nous! Je me suis fais mal pour toi!


Que me reproches tu ? Crois-tu que je puisse effacer des années de clandestinité, par ta simple volonté, en un claquement de doigt ? En un craquement de doigts. Te crois tu quelconque divinité, à exiger l'amnésie de mes amours clandestines? Si tel est le cas, au moins, exauce-toi, tu me libéreras. Et si tu crois que tout cela me fait t'aimer moins fort, tu n'as rien compris.

- Crois tu que je reste pour quatre murs et un enfant que je n'aurais qu'à prendre dans mes bras pour l'emmener avec moi?


Judas est blessé. La réplique est cinglante. Le combat sans merci. L'orgueil ou l'organe, qu'importe, elle l'a touché au mauvais endroit. Il la tire comme un enfant que l'on gronderait, emporté, jouant injustement de l'inégalité des forces à l'intimider.

Moi aussi je sais faire mâle.

Crois tu que je reste par habitude? Par peur de partir? Es tu sotte ou bornée, à vouloir que je prononce trois mots pour te rassurer alors que je viens de faire plus que beaucoup n'oseraient le faire? Et où vas-tu à te rhabiller comme cela? C'est toi qui me rends fou. Dégages ce bout de tissu, c'est ta peau, pas ton masque, que je veux écorcher. Ton rendez-vous à le gout de l'injustice, tu n'as pas le droit de t'en aller.

- J'ai toujours été tel que tu me vois, je ne t'ai jamais récité de pamphlets, et aujourd'hui, cela ne te conviens plus?

Senestre lâche la main, prend la gorge, rageuse, et tout le corps de Judas se tend contre l'Ann, muscles crispés, refoulant son avantage contre la pierre où il vient la frôler de son nez. Murmurer pour épancher, l'infection n'est pas encore généralisée.

- Toi... Tu n'as pas eu une pensée pour nous lorsque tu as décidé de partir. Je n'ai pas eu l'audace de te le rappeler jusqu'ici.

Il agrippe entre deux rangées d'émaux le lobe tendre, martyr de son égarement. Le murmure est bref, l'homme redevient Maitre. Le palpitant tambour battant assourdissant l'esgourde, la mâchoire tressaillant de se retenir de mordre au sang. Sang-timent fouettant ses veines.

- Pourtant, donner de l'indifférence est pire que d'avoir partagé son amour. Et ne me parles pas de moment de faiblesse... Ou tu me reproches ce que toi même tu as fait. Je l'ai reniée pour toi. Alors cesse de chercher à m'extirper des mots que je n'ai jamais eu. S'il fallait prouver quelque chose, c'est fait.



Ici et maintenant.

Dextre agrippe les cheveux, lippes accrochent leurs voisines, messagères de leur sordide jeu.


__________________
Anaon

      L'étau qui claque l'arrêt brutal. L'Anaon se retourne comme un bloque de marbre. Elle tire sèchement sur son poignet, mais la poigne résiste avec la sévérité d'un piège à ours.
    Et ses mâchoires se font de pierres.

    Alors l'emportement.

    Tout son corps se bande, récalcitrant à la soudaine fureur Judéenne. Les mois de faiblesse encore trop proches n'ont pas été éradiqué, elle se fait traîner contre son gré. La force vainc mais l'intimidation ne marche pas. On n'impressionne pas l'Anaon. C'est une peur qui ne prend pas. Au contraire, ça la gorge de mépris et de rébellion.

    Le souffle qui se coupe à la main qui fauche la gorge. Le dos qui claque contre la pierre, froide comme les remparts de Decize. La scène a le goût du déjà vu et les orages qui grondent dans l'air, le roulement fatal d'un jour de mariage. L'Anaon grogne et plus encore quand Judas la plante de son trait le plus violent. Les yeux se ferment férocement, le visage se crispe sous ces reproches qu'elle ne veut pas entendre.
    Sa mort manquée.
    Elle n'a que des explications et aucune excuse. Aucun mot qui pourrait la gracier. Elle est coupable, elle n'a rien à en redire. Mais elle ne supporte pas les accusations qui en découlent. Elle ne le regrette pas. Mais ne l'assume pas plus. Aimer ses enfants plus qu'un homme, voilà ce qu'elle a toujours clamé haut et fort... mais c'est aussi un petit qu'elle allait délaisser. Et cela, elle veut continuer à s'en voiler.

    Avec mépris, elle vilipende, bouffie de ce besoin viscérale de ne pas laisser à Judas la grâce du dernier mot.

    _ Aimer plus que toi-même. Aimer à en crever, tu ne sais pas ce que c'est !

    Les dents qui soudain agrippent éveillent les torrents contraires. Répugnance et dépendance. Les vieux jeux des « je t'haime » disloqués. La corrosion sillonne ses veines qui de glace deviennent fusion. Le venin de ses murmures la ronge par tous les pores. Et ce baiser qui scelle le goût du sel l'embrase et l'exalte. Il lui faut quelques secondes pour qu'elle percute.

    Le choc et l'ire.

    Les doigts empoignent les crins avec violence pour arracher cette bouche à la sienne. Tant pis s'il mord, tant pis s'il arrache cette chair jusqu'en faire perler le sang. L'Anaon n'a toujours vécu que de garance.

    _ Que tu n'as jamais eu ?! Tu te désavoues ? Ces mots-là, c'est toi qui les as eus le premier et à la bouche bien plus souvent que moi ! Alors abjure-le encore une fois, et je fais de cet instant un cauchemar avant de réduire ton existence à néant !

    N'assumes-tu plus ? Où oses-tu me dire que tu m'as prise pour une idiote pendant tant d'années ?

    _ Qu'est-ce que tu as cru ? Que j'étais une péronnelle ? Une pauvre petite pucelle que l'on ballade et berne en lui crachant du sentiment ? Moi, je n'ai jamais eu honte de ressentir. Aurais-tu eu pitié de moi pour me mentir ? Je préfère l'indifférence à tes mensonges ! Le silence à tes trahisons ! On ne peut pas aimer deux personnes à la fois !

    On dit bien souvent que l'on ne choisit pas qui l'on aime. L'Anaon n'en a jamais rien cru. La passion on ne la décide pas, mais l'amour on choisit de s'y livrer. Comme le déluge contenu derrière la vanne. C'est avec conscience que l'on en descelle l'écluse. La Balafrée n'a jamais été femme à se laisser mener par ses sentiments. Elle en décide la libération ou la réclusion. Et si Judas n'avait pas ouvert la voie le premier, une chose est sûre... jamais elle ne se serait laissée l'aimer.

    Putain de Von Frayner.

    Prise entre chair et pierre, elle le bouscule. De corps, elle est plus faible, mais pas amorphe. Les doigts dans les corbeaux qui se faisaient violence virent au possessif. La chemise est lâchée, main libre s'en vient claquer ce menton, le pouce froisser cette lèvre qu'elle malmène sans vergogne.

    _ Avant, je voulais pouvoir tout oublier de toi pour avoir le simple plaisir de te rencontrer à nouveau dans une bacchanale, monarque sur ton orgie. Maintenant... je voudrais juste tout oublier.

    A partir de quand ? De Chimera ? D'avant ?

    _ Enterrer toutes ces dernières années.

    Elle lui en veut. Elle lui en veut d'avoir fait ressurgir les espoirs réduits en charpie depuis belle lurette. Cette notion de famille qui lui a bouffé le cœur d'avoir toujours été amputée. Ses envies de mariages, ce besoin de foyer. Ce rêve aux tripes, sa moelle épinière. La voilà sa plus grande erreur. Avoir eu la bêtise d'espérer de ses promesses vérolées quand depuis longtemps, à tout cela, elle avait renoncé. Par lucidité plus que par fatalité. Lui avait tout enflammer.

    Judas avait ce chien, cette détestable ambivalence et cet art de se rendre méprisable derrière son goût de revient-y. On ne sait si on veut l'aimer, le détruire ou le jeter. Dans l'instant, les trois envies à la fois. Si le sybarite se retient, la sicaire, elle, vient gnaquer sans retenue. La bouche racée en fait les frais. La jambe plie. Le talon trouve l'appuie du mur.

    Judas brûle. L'Anaon y jette l'huile. Cherche le feu des blessures. L'envie de crever l'usure. Attiser encore. Jusqu'à tout emporter.

    _ J'aurai sans doute dû en céder à bien d'autres que toi.

    Anéantir.


" Il y a un adage qui dit qu'on fait toujours du mal à ceux qu'on aime. Mais il oublie de dire qu'on aime ceux qui nous font du mal. "    
- Fight Club -        



Musique : "Born to Die" de Lana Del Rey.[/url]
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Elle fait bloc. Ils débloquent. Il agrippe le tissu sur l'Habitant. Tout doux, celui-là, c'est son précieux. Il ne voudrait pas l'abimer. Frayner marque la trève, non sans desserrer son joug. Les mots éraillés se font l'écho de la fervente aux lèvres pas assez taillées. Encore trop vindicatives.

-Tu as très bien compris ce que je veux dire.

    J'ai eu les mots oui, parfois, dans des moments de faiblesse, d'abandon. J'ai eu les mots lorsque tout allait trop bien, ou trop mal. Mais ne fais pas d'une rivière un fleuve.


Si Judas savait dire les mots, et les ressentir aussi, il ne savait pas les assumer. Ni les trouver salutaires. Les mots qui avouent lui ont toujours été faiblesses, plaies ouvertes appelant à l'air libre les complications. Difficile pour un Judas d'aimer au grand jour, lui qui avait toujours comparé les sentiments qui abrutissent, engourdissent, rendent fous, à des infections de l'âme. Des affections, afflictions de l'âme. Voilà ce que lui, avait du mal à endosser. Sa maigre part d'humanité. Sa tiédeur dissimulée.


    Amour , nom masculin

    Sens 1:
    Sentiment d'affection, d'attirance sentimentale et sexuelle entre deux personnes. Arme que l'on pourrait retourner contre autrui.
    Exemple : Un amour éternel. Un amour fou. Un amour impossible. Des amours tumultueuses (féminin pluriel)
    Synonymes : adoration. maladie auto immune.


Combien de fois avait-il maudit ses gestes et mots pour une Chimera qui lui avait fait un enfant dans le dos? C'était bien le regret cuisant de s'être épanché qui avait fait durer guerre froide de cent ans... Combien de fois s'était-il détesté d'aimer une Roide qui le laissait pour Paris? Judas était un incompris. Prisonnier de ses propres fiertés. Fuguer avant que ne fugue l'autre, écouter, ne rien dire, récolter le sentiment d'autrui. Cuirasse épaisse dont il redoutait de s'alléger et qu'il perdait parfois, au prix de sa violence. Au prix de sa personne. Il était peut-être alors bien vrai que dans l'incapacité de se laisser aimer quelqu'un pleinement, Judas n'aimait jamais plus que lui même. Homme de choix raisonnés, centrés plus vers son confort que vers celui des autres. Bourreau des heurts. Du fond de ses tripes, le sifflement alarme vient commenter le geste d'Anaon sur ses crins mâles.

    Attention... Il est un seuil des genres à ne pas outrepasser. Même si c'est moi qui porte la longueur, et toi qui porte l'épée. Femme.


Et la main répond à celle qui peigne drue, empoignant un sein, le ton s'afflige.


- Et bien sûr que l'on peut. On le fait différemment c'est tout. N'as tu donc que si peu vécu...


    Femme fidèle, de coeur et de corps? Femme d'unique, c'est donc ça toute la part de ta vie que je ne connais pas? N'as tu jamais pris de risques, de chemins contraires, sourde à tout chant de sirène? T'es tu toujours contentée de ça? De moi?


Mystère. Anaon en est. Entier. Le mysticisme impressionne toujours. Même un Judas. Surtout un Judas. Il ne ressent plus les flèches d'Anaon, elles filent contre lui, vrombissent lointainement à ses oreilles. Se battre est vain lorsque l'âge a passé. Judas s'est depuis longtemps résigné. Sans attendre l'autorisation, les mains ont désarmé, les lèvres se sont empourprées et emparées, dans leur épousailles au gout métallique. Le corps s'est laissé emmener. La provocation a cessé, après sa dernière ruade:


- Tu aurais dû, mais sans doute que tu n'aurais pas pu.


Il la retourne. Bandé.

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Anaon
        Tu vas me détruire.

      _ Non, je ne sais plus rien.

      Elle n'a su que trop bien appréhender les inconstances. Pas les revirements et les remises en question qui brûlent la gorge des relents de trahisons et d'humiliations. L'imbroglio est trop grand, le sol trop friable sous le pas de celle qui ne sait plus où poser le pied depuis longtemps. La caboche frôle l'hystérie. Embrasse la folie de ne savoir quelle facette exposer. Dérèglement des pensées. Coeur qui pleure, tête qui rejette. Corps qui se rebelle et concède.

    La rouille et le sucre.
    La langue comme le ferreux des poignards.

        Cet océan de passion
        Qui déferle dans mes veines
        Qui cause ma déraison
        Ma déroute et ma déveine

        Mon péché, mon obsession
        Désir fou qui me tourmente
        Qui me tourne en dérision
        Qui me déchire et me hante

    La pierre est froide. La voix est cuisante comme le fer chauffé à blanc et vient titiller les rares points de fierté d'une Anaon... qui ne peut que confirmer.

    _ Je ne suis pas faite pour aimer.

    Des tendres et des fripons. Des Merlins, des Eikorcs, de Sergueïs ou bien des Gades. Des mains qui baladent, des lèvres qui provoquent, des discrétions qui jalousent. Nombres qui avaient un jour tenté de s'attaquer aux marbres de l'Anaon sans parvenir à faire sauter les lanières de son armure. Pour grâce, la sicaire n'octroyait que la brève saveur d'un jeu, là où d'autres auraient relevés jupons en tombant en pâmoison. L'indifférence de la chair. Le désintérêt de la conquête. La sicaire savait contempler et apprécier les belles choses sans en éprouver le moindre désir de possession. Nulle envie. Nulle appétence. Les quelques embryons bien vite crevés par l'affection déjà offerte à un Autre unique.

    Pléthore de mâles qui ont un jour voulu la loger dans leurs couches. Un seul victorieux de ces guerres invisibles. Pourquoi lui ? On le lui a bien souvent demandé. Il y a des raisons et aucune explication. Des indicibles.
    L'Anaon est peut être plus insensée que sage.

    A l'heure où il fait Mâle, elle se souvient de son Duc du Limousin, aux arrières-pensées sans détour, mauvaise foi personnifiée qui aux yeux du monde aimait à la rabrouer, aînée balafrée, mais qui n'avait pas hésité à l'embrocher d'une morsure à la première seconde d'intimité. Crocs rendus avant le refus : mariage était prévu, rien ni personne ne viendrait faire couler cela.

    «   On ne peut sauver ce qui est déjà noyé ».

    La riposte avait été immédiate. Brutale. La petite ordure aurait-elle été sagace ?

    Oui, elle n'aurait pu. Et quand le dos nu s'imprègne du toucher du tissu et du cuir, elle se rappelle aussi l'Infâme qui ronge son dos. Une gloire qu'elle peut imputer à Judas sans aucun reproche. Celle de l'avoir faite plus femme que monstre. De lui avoir fait oublier bien souvent la honte de ses tortures, à jamais logée dans sa fierté comme une flèche dans une plaie infectée.

        Moi qui me croyais d'hiver
        Me voici un arbre vert
        Moi qui me croyais de fer
        Contre le feu de la chair

        Je m'enflamme et me consume...

    Au premier jour, Von Frayner avait joué les castrateurs. Comme on lui aurait plongé la tête dans sa plus grande peur pour l'annihiler.

    Au premier jour...
    Comme aujourd'hui elle n'était pas des plus dociles.

        Tu vas me détruire
        Tu vas me détruire
        Et je vais te maudire
        Jusqu'à la fin de ma vie

        Tu vas me détruire
        Tu vas me détruire
        J'aurais pu le prédire
        Dès le premier jour,
        Dès la première nuit

    Conciliante, flirtant jusqu'à la condescendance. Mais si elle aime lui laisser ses fiertés de mâle dominant, il est de bon ton de lui rappeler les nuances. Place de femme, place d'homme ne fait plus sens depuis qu'elle a dû prendre les armes pour combler les absents. Conquise, point soumise, jamais acquise. Il est des orgueils increvables, même pour celle qui n'a plus d'amour-propre.

    Le sang breton n'est jamais tranquille bien longtemps.

    Elle se cambre pour saisir la nuque de l'Insolent. Forcer l'approche de la tête pour gagner l'oreille sur un timbre brûlant. Et l'autre main prend en coupe la virilité exacerbée. Empoignade des fiertés.

    _ M'as-tu donc mérité ne serait-ce qu'une seule fois ?

Extraits paroles "Tu vas me détruire", interprétée par Daniel Lavoie, comédie musicale "Notre Dame de Paris "

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    | © Image Avatar : Eve Ventrue | © Image Signature : Cristina Otero | Anaon se prononce "Anaonne" |
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- Bien sûr que tu es faite pour aimer. Pour m'aimer moi. M'appartenir.

    Et tu pourras dire à qui veut l'entendre, que tu m'appartiens sans que je ne t'appartiennes... Tu sais au fond de toi que c'est faux. Tu sais que j'ai renoncé pour toi. Tu sais que j'ai tué pour toi. Et que cela vaut bien plus que les coucheries. Bien plus que les passagères.


Tu me tiens, je te tiens, par la queue et par le coeur. Le frisson et la sueur. La chair est mise à nue, dans un combat silencieux. Le tissus écartelé cède, dans un déchirant geste. Les mains empoignent cette poitrine adorée, les lèvres assassines s'abreuvent à la peau substantielle. Nourricière. De toutes ses saveurs et ses sucs. Les doigts serpentent, emprisonnent, attisent pour se faire indispensable. Pour éveiller l'envie qu'ils possèdent, s'immiscent, saillissent. Le mérite envie le succès , et le succès se prend pour le mérite.


- Si je m'en était tenu à ce que je mérite dans la vie...


    Tu ne serais sans doute pas là non. Je ne serais pas le Judas que tu aimes. Et qu'elles aiment toutes. On ne murmurerait plus sur mon passage, on ne m'inventerait plus de maitresses, de méfaits, on ne se méfierait plus de moi. L'essence même de ma personne serait fade de bienséance, et de ma vie bien remplie, je n'aurais fait qu'effleurer les possibilités. Mériterais-je seulement la vie?


Judas n'a jamais obtenu qu'en s'emparant. Maitre de coups d'états d'âmes, voleur, possessif, violant tous les verrous encombrants, parasitant l'essence même des choses. Des gens. Crapules sans scrupules, bien fagotée et pleine de grâce. Se faire aimer, se rendre indispensable, pour mieux conquérir et posséder, crédo maladif obsessionnel. Le seigneur se libère, étriqué, dans un soupir soulagé et prend la Roide dans un grognement sourd, fou de désir. Et l'accueil vaut la bataille. Roide est ruisseau, Judas l'écueil. L'envie elle, ne ment jamais. La lutte est belle, et sublime la victoire. De murmure à murmure, ponctués du claquement de la peau, quelques mots.
Anaon


      Le nimbe liquide resté du bain se pare d'autres chaleurs, perlent de saveurs, sueurs. Les mains empoignent, repoussent et freinent. Étreinte de fauves qui se grognent et montrent les crocs, quand chaque geste de refus appelle le suivant à être plus insistant encore. Les résistances veules et obstinées. Les dents mordent, crient la blessure et la colère, se retiennent par dévotion. La femme, si peu vindicative, crève l'envie de faire mal autant que le Désir, éternel présent, inaltérable besoin. Dépendance greffée aux visières, délétère, comme une bouteille pour l'Ethylique, qui presque mort y reviendra encore, même si la gorgée de plus doit lui être la dernière. La tombe, oui. Mais la tombe dans l'euphorie.

    La sicaire se fait plus rude, distille encore l'amer. Rageuse dans l'envie de se faire aimer, hargneuse dans la réponse aux gestes vandales. Nacres serrées sur les soupirs et le souffle percuté, comme l'on s'interdit d'avouer. La prise est sursaut. Le siège brise les derniers remparts de rebellions. L'assaillie se laisse investir tête haute dans le seul combat des respirations qui se percutent contre le choc des chairs enfiévrées.

    - Dis-moi que tu m'aimes...

    Culotté qui lui renvoie la balle. Le nez se fronce, teigneux, les yeux se ferment. Têtue.
    Celui-là, il va falloir me l'arracher et t'accrocher pour l'extirper.

    _ Tu le sais...

      «  Tu es ventre, cuisse, coeur, chair et damnation, tu es trop, souvent, pas assez parfois. Je n'arrive pas à te sortir de moi. Tu me révulses avec ta liberté, moi qui n'ai jamais que voulu que tu me la donnes. Je t'aime parce que tout l'univers a conspiré à me faire arriver jusqu'à toi, et je n'ai pas la clef de tous les pourquoi qui font ta serrure. »*


    Les doigts se mêlent aux siens, emprisonnent avec l'envie de ne plus laisser partir. Ils mènent comme l'on ordonne, incitent à crisper, serrer l'étreinte brutale. Ébat-écorchure, luxure de deux armures, trop fières, trop usées, trop aiguisées encor, qui se rencontrent comme l'on se télescope, le regain de deux chiens blessés qui ont toujours la force de s'empoigner plus fort. La douceur aujourd'hui aurait eu un goût de fiel. Sur les glissements d'une apogée, elle porte les doigts mâles là où la gorge saccade. Les syllabes se font effort pour ne pas s'entrecouper des plaintes de leur vice.

    _Serres. Serres pour de bon...

    Les mots pesés. Assumés.

    _ Ou alors...

    Donne-moi encore de tes « encore ».
    Fais-le moi entendre.
    Grave-le une bonne fois pour toute, que je n'ai plus à en douter. Marque le corps, marque l'âme, plus que tu ne l'as déjà fait.
    Et ne me laisses plus.

      Un jour tes doigts seront ma corde et ton corps ma potence.



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    | © Image Avatar : Eve Ventrue | © Image Signature : Cristina Otero | Anaon se prononce "Anaonne" |
Judas_vf
    « L'Anaon viendra. Peut-être ce soir, peut-être demain. Viendra-t-elle comme elle est? Comment est-elle l'Anaon? Comment est-elle quand elle répond Oui à la prière de Judas? Y a t-il un sentiment de toute puissance à posséder ce qui ne peut nous posséder? »*


Il serre. Il mord. La main emprisonnée chasse l'air pour insuffler le plaisir. Douloureux, dépravant. Bonne, tu as bien fait d'emporter les yeux innocents. Les échanges Anaon-Judas, quels qu'ils soient, n'ont jamais été pour les enfants. Sur la gorge, sollicitée, la main qui aime et qui déteste, celle qui écrase et qui flatte. Jamais l'on ne sait vraiment sous laquelle danser. Main inconstante, incontestablement main de maintes mésententes... Et de quelques paix conquises par la force. Caressante, pressante, sur les lèvres écartelées; main fait son chemin.

Corruptrice.



    « Elle, beauté froide, elle Hiver brûlant parvenue à lui communiquer en tout temps l'indéfectible Summertime Sadness. Liens mauvais qui écharpent et rappellent tout autant à quoi l'on se raccroche. En dessous le vide. Sans eux la chute.»*


- Ou alors quoi... Dans ce monde ou dans l'autre, tous savent que tu m'as rendu fou.


Et Idiot. Et faible. Parfois fébrile. Indélébile. Des falaises Bretonnes aux castels désertés, des Paris à Angers, des bateaux aux voitures, de la paille à la soie d'une couche bien dressée... Nus, jouant sous l'oeil d'un peintre voyeur. Judas aime Anaon. Anaon aime Judas. Ainsi a été écrit leur histoire, ainsi se terminera-t-elle. Peut-être bien, peut-être mal. Peut-être dans le stupre, peut-être dans la romance. Le tombé de rideau vaudra son pesant d'or. On pourra alors dans l'épilogue compter les écarts, mais ne pourra reconnaitre qu'un début, et qu'une chute. Fil rouge étranglant l'un, menottant l'autre. Malgré qu'il y ait eu un Avant, et un Après Rousse. N'y aura eu qu'un Judas/Anaon.


    « Peut-être qu'après ce soir, peut-être que lorsqu'elle ouvrirait les yeux demain elle aurait envie de faire perdurer la trompeuse éternelle genèse de leur histoire. Celle qu'il était prêt à lui dérouler sous les pieds, à grand coup de fastes frasques et de folies calculées. Peut-être demain le lâcher-prise. Le tant attendu. Les chevaux qui ne mènent qu'aux rendez-vous printaniers à l'abri des bois silencieux. Les portes qui ne sont poussées que d'une main impatiente de presque savoir quoi trouver derrière. Les messages aux sceaux illégitimes. Le jeu des amants, peut-être.»*


Il la griffe, bourrin, frappe à sa porte. Souvent leurs unions ont ressemblé à des combats. Ce matin, c'est une guerre. Le sexe est une histoire naturelle. Ce sont les hommes qui l'ont prohibé. Non, ce sont les dieux qui l'ont prohibé. Au fond les hommes n'ont jamais su s'en défaire, y résister. La censure a par tout temps, excité le plaisir censurable. Judas est chien, s'accouple avec la vie. Ainsi doit être, là, maintenant, au vu et au su de tous, comme toujours. Comme tout le temps avec Anaon.


    «Regarde-nous Judas,
    Sommes-nous seulement capable de faire l'amour en se donnant de l'amour ?
    Nos corps comme des oriflammes. Notre lit, un champ de bataille. Incapable de se frôler sans se graver d'écorchures, incapable de s'embrasser sans sortir les morsures. On s'agrippe l'un à l'autre du tranchant des canines. Ai-je fait le bon choix ? De dire oui encore une fois. Dis-le moi... Moi qui m'étais jurée de ne plus jamais te laisser me faire un enfant. De répondre par l'indifférence à toutes tes impertinences.

    Maudit et détestable Être que j'aime. Dis-moi... »*


- Dis-le.

* RP Les dessous d'Hiver


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