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[RP ouvert ] Le dernier (t)repas

--Judas_vf
[Ripailles angevines. Piques assiettes, troubles fêtes, invité surprise bienvenus!]



- Ecris : " Mes chers amis ..."

Regard oblique du jeune Hugo.


- Quoi, "amis" est surjoué ? Il y en a bien un ou deux dans le lot qui me portent encore affection...

Il fait un geste nerveux de la main pour chasser la remarque impertinente que n'a pas fait Hugo.

- Donc, "Mes chers amis, c'est avec plaisir que..."

Toussotement du jeune limier. Le seigneur lui jette un regard plein de dédain. La tête blonde reçoit un taquet sur la nuque. Frayner se râcle la gorge et d'une traite, ou presque:

- "C'est avec plaisir que vous êtes conviés aux ripailles de printemps du seigneur de Courceriers, qui se tiendront en lieu et place de la seigneurie de Denée , en le duché de Brissac, tenu à l'écart des tumultes territoriaux que nous savons. Le seigneur offrira à ses convives la dernière cuvée de ses terres ..."


Il fallait bien décider Rose à venir en Anjou...

-" et mettra à l'honneur des épices rares rapportées du sud. Une partie de chasse sera organisée à l'issue des festivités pour les plus aguerris..."


Et d'ajouter d'un ton cynique :

- Si leur digestion le leur permet.

La main maitresse vient saisir et étirer le vélin, tandis que les yeux noirs vérifient l'exactitude de l'écrit qui apparait sans fautes, pour sa plus grande satisfaction. Instruire le jeune homme n'avait pas été une sinécure, mais au moins il commençait à en récolter les fruits.

- Bien ! Tu copies l'écrit et le fais parvenir au vicomte Sabaude Renard...

Judas s'adosse mollement à son siège et ajoute, un brin amusé:

- Charlyelle... Rosalinde et June.


Il faut bien que l'on s'amuse un peu lors de ce banquet, après tout. Les doigts s'ouvrent un à un, au fur et à mesure qu'il fait l'épilogue de sa liste d'invités.


- Calyce, pour montrer que nous sommes reconnaissants d'inviter chez elle sans le lui demander des gens pour manger et boire plus que de raison ... Et pour attester que nous ne sommes pas rancunier à celle qui nous tient par les c... La vassalité... Invitons Erwelyn. Ajoute Alphonse, s'il est encore en vie. Astana et Scath, pour montrer que nous sommes ouverts. Et pour faire croire que nous avons pléthore de gens, convie toute la valetaille et les marchands qui auront acheminé pain, viande et vin à rester un peu.


Judas imaginait sans peine les aristos et les réformés, les ex-amantes ou épouses païennes et l'Anaon à la même table. Copieusement arrosées de vin et chauffées par les épices. C'est un peu comme s'il fêtait son anniversaire !


___________________
Sabaude
Novembre avait confirmé sa paternité, une petite Faüna, fruit d'une angevine canarde et d'un alençonnais goupil, de quoi faire retourner les morts dans leurs tombes.
Décembre lui avait apporté un duc dans sa couche et dans son cœur, son Joli renard, étoile à son ciel trop sombre.
Janvier l'avait trouvé fatigué des affaires du royaume et d'un peu tout, puis poussé à rencontrer une petite bretonne pour causer mariage arrangé.
Février l'avait couché nu et bandé sous le moignon d'un cocu aveugle fétichiste. Heureusement pour lui le tocsin avait sonné avant que cela ne devienne trop inconvenant.
Mars l'avait vu entretenir une correspondance avec l'archi chouquette Choovansky, en compétition avec un Carys tatoueur de crânes sur chute de reins.
Et Avril l'avait laissé sur le cul !


Par les burnes de saint coyote ! Mais c'est que l'animal est encore en vie !

Juron et fauteuil renversé avaient ameuté la valetaille de Moulicent.


Qu'on selle mon cheval, qu'on remplisse mes fontes, qu'on …..

Tels des chouettes perchées ils le fixaient tous, à tel point que cela en devenait gênant et oppressant.

Qu'on... rien..... Je …. Du vent ! Caryssssssssssssssssssssssssssssssssssssssssssssssssssssssss !




Bon, ça urge d'aller en Anjou là !
Là tout de suite maintenant comme une envie de pisser ?
C'est ça et ne te fous pas de moi. Ce vieil empaffé de Courceriers s'est réveillé et n'a rien trouvé de mieux que de faire un gueuleton à... Brissac......
Vous êtes conscient que c'est la folie douce de vous rendre là-bas ?
Crois-tu que je ne le sache pas, Carys? J'ai aussi une fille et sa mère à voir ! Faisons la liste des points négatifs, nous y verrons plus clair. Vas y.
Soit. Le conflit Couronne/Anjou.
Mouis.
L'archichouquette qui veut vous étouffer avec son oreiller senteur pets. Vous noterez que j'ai du céder aux croûtons dans du bouillon pour vous éviter la pendaison.
Merci....
Falco. Je ne suis pas certain qu'il soit revenu à de meilleurs dispositions à votre sujet.
Cravant vit sa vie, il a mieux à faire que de s'occuper de moi. Et s'il yoyote comme il tricote il m'a déjà oublié, crois-moi. Suivant !
L'Hôte ! Vous savez mieux que moi qu'il réserve souvent des surprises qui indisposent.
Bah c'est Judas.... je me suis fait au caractère du bougre. Puis j'ai déjà fini en tenue de soubrette à astiquer sa chariote suite à un pari perdu, je ne vois pas ce qui peut être pire... Et les points positifs ?
Il n'y en a pas.
Mais si ! C'est Brissac ! BRISSAC. Cela veut dire Calyce, notre enfant, Naon, et plein à se mettre dans l'estomac !
Vous feriez vraiment n'importe quoi dès qu'on parle de bouffe....
Tssss. Carys.....Sors les costumes....
Ah non !
Ah si !
Hors de question. Vous avez un laissez-passer à vie, pas besoin de vous déguiser et moi par la même occasion.
On sait ce que ca veut dire... je peux entrer, mais ça ne garantit ni le séjour ni la sortie... Je n'ai pas envie de finir en geôle à compter les bandelettes de la momie.
Non.
Pense à la chute de reins de Katina...
C'est déloyal.

_________________
Rosalinde
Générique.

Starring

In Alphabetical Order

June Sidjéno

Rosalinde Wolback-Carrann

in

MILF sexy fait golo-golo dans les bois avec son étalon blond


Déso les pervers, c'était le générique de fin !

- Finalement, c'était une très bonne idée, de venir en Anjou.

Introducing Rosa, rouge comme un coq après tant d'exercice, qui remet en place sa coiffure démolie dans le feu de l'action. Après la coiffure, les bas sont correctement rattachés, et puis les plis de la robe lissés.

- Je suis prête. Denée n'est plus qu'à quelques minutes maintenant je crois.

Elle se retourne, et considère son époux, un petit sourire aux lèvres.

- Cette pause était une excellente idée, je vous félicite, Lord Huntington.

Oui oui. C'était son nom de code. Ici ils étaient in-co-gni-to. Lord et Lady Huntington, membres de la gentry anglaise, retournés temporairement en Guyenne pour régler une histoire d'héritage. Lady Isabella. Elle adorait cet espèce de nom de chagasse version roman Harlequin. Et puis c'était mieux que de se présenter avec son petit blaze d'officier royal aux premiers couillons qui les arrêteraient, autant se faire tatouer trois lis d'or au milieu du front. Il n'y avait bien que le Von Frayner pour trouver que c'était une super idée de les inviter au milieu d'une espèce d'énième guerre à la con.

Mais Lord et Lady Huntington ne sont pas que des bêtes assoiffées de stupre qui aiment jouer à frotti-frotta contre un arbre.

Oh non.

Lord et Lady Huntington sont aussi des parents.

Des parents éthiques et responsables. Des parents qui, bien sûr, pour bien emmerder tout le monde, se pointent aux repas entre amis avec leurs rejetons adorés. En l'occurrence, l'oreille acérée de Madame perçut quelque miaulement strident de la mouffette qui leur servait de fille, signe d'un tout proche carnage lacrymal. Ne vous y trompez pas, l'heureux rôti Sidjéno était sous surveillance de sa nourrice et non totalement abandonnée à son propre sort, n'empêche que ça voulait dire que la fin du trajet allait se faire avec moult grincements de dents, jusqu'à ce qu'enfin ils puissent coucher la petite dans un endroit calme.


- Je hais Judas. On y va ?
_________________

Milite pour la pénalisation de l'emploi du mot « pantine »
--Judas_vf
Jour attendu arriva, bruyant, vivant, en les murs désignés.

Ici et là se déchargeaient le produit des boulangers, non loin la rôtissoire improvisée voyait tourner sur la broche son porc le plus gras, copieusement arrosé au vin par un boucher qui aurait pu lui aussi servir de repas.

Quelques enfants courraient sous la grande table dressée, et par les portes ouvertes la fraicheur du printemps se mêlait à sa douceur naissante.

Frayner siégeait en bout de table, campé dans ses bottes les plus cirées et sa chemise la plus immaculée. Chaque ripailles avaient vu cette dernière lamentablement souillée, saccagée, comme si les convives au fait de la maniaquerie de l'hôte avaient pris un malin plaisir à l'éprouver. Aussi, dans la main droite, un pique à viande, dressé là pour passer l'envie à un clampin maladroit de renverser une goutte de gras sur sa mise proprette. Non loin, le vivier, pas pour la laver non, mais plutôt pour y faire explorer le fond si l'offense se produisait. Toutes les dispositions étaient prises, la fête pouvait commencer.

Judas Von Frayner avait obligé toute la valetaille à se lever dans la nuit pour paufiner l'évènement, et promis qu'il couperait la tête à qui piquerait du nez pendant le service. Le ballet des casserons et des plats semblaient de fait, en fin de matinée, un peu mécanique. Qu'importe, tant que tout le monde mangeait à sa faim. Depuis qu'Isaure n'était plus, Judas n'avait plus à se soucier de ses dépenses, aussi le satrape mettait un point d'honneur à dilapider sa fortune dans les tripots, dans ses accoutrements et en ce jour particulier, dans le faste d'un baquet trop important proportionnellement au petit nombre de convives attendus.

Il fit un signe à Hugo, occupé à observer pensivement la fourmilière qu'était Denée, pour annoncer l'ouverture des réjouissances. Le jeune homme se dressa sur ses longues jambes, annonçant que le premier service allait être apporté à table et invitant les convives à prendre place. Une nuée de petites suivantes disparurent en coulisses pour en revenir les mains occupées par des plats aux fumets envoûtants, qu'elles disposèrent ça et là, suivies par les préposés au service du vin avec leurs cruchons remplis.

Judas attrapa au vol la menotte potelée d'un Amadeus trop excité pour s'occuper autrement qu'en se faufilant entre les sièges, bruyant, avec les autres enfants, le stoppant net dans sa course et son jeu.


- Va chercher Anaon.

___________________
Chimera
[Morte-agne – Trois jours avant les ripailles annoncées]

In-spire
Ex-pire. Quand on est ça, on compte un peu, non ? Vois, foutue renarde, il nous reste finalement peut-être encore quelque chose en commun.
Ex-soeur, aussi? Toujours aucune nouvelle.


"- Tu penses encore à … cet homme ?"

Adenora prévenante n'avait pas invoqué. Evoqué, à peine, mais le fait savait suffit à priver le cœur Dénéré d'un battement.
Il avait voulu lui apprendre à chasser. Echec cuisant. Infoutue elle était de faire mouche avec un simple souvenir. Simple. Pas si.

Von Frayner avait évoqué la tenue d'un banquet. Il n'est jamais plus vrai, au final, qu'en représentation. Là, au moins, on sait. Lanterne à papillons y serait sans doute aucun, ainsi que les quelques rares qu'elle avait pu rencontrer lors qu’eux ou elle n'étaient pas sous le couvert de quelque dissimulation, annoncée ou non. Sa maîtresse aussi. Étrange dualité, dans le statut canin/coquin. Oh elle s'y était vue, lors de leurs d-ébats enfantins, à ses côtés pour la grand messe. Mais non, allons, elle est celle de la nuit. Elle est celle du carnaval, garde malade caduque quand le mal s'évanouit. Elle en avait causé, de fait, et délibérément. Un peu de sel sur plaie ouverte. Souvenir persistant, à défaut d'être bon.

Mais il avait sommé, aussi. Il avait sonné, après.
« Il te faut rentrer en Alençon »
Et, docile, rarement congédiée, en Alençon elle était rentrée, parée d'une dignité empruntée. L'histoire, comme les modes, est faite pour se répéter. Mode a donc rejoint famille et foyer, qui a pris compte le dernier avis en date -cachet de la poste faisant foi. Point de festin, donc. Attendait-il qu'elle lutte ? Certes Dénéré rime avec Lucha Libre, mais il sait qu'elle n'est pas de ceux qui bataillent pour être. Folie, sans doute. Ces mots, il les a couchés là -piteuse excuse pour avoir découché?- en connaissance de cause. Comme il ne l'avait pas prise ainsi, il ne ferait pas exception.

Elle passe sa rage sur plus sage qu'elle, et le tronc passe un mauvais moment. Brave Sylvestre, il est partageur. Malgré lui, mais quand même. A défaut d'une futaie, elle s'en serait sûrement prise -pas futée- aux troncs lui servant de jambes. Voilà qui aurait mis fin à son dilemme. Les gants de cuir ont été remisés, écho d'un avant maudit. Elle est si obstinée qu'elle se mettra les chairs à vif à force de manier la hache plutôt que de s'abriter dans le souvenir de lui.
Aurait-elle du faire preuve du même entêtement, là ? Pas quand c'est important. Hum ?
A chaque coup furieux, l'impact fait onde, et une nouvelle question vient échouer dans l'esprit tourmenté.
Faire parvenir une bûche ?
Pour réchauffer leur foyer ? Plutôt crever, elle n'est pas si magnanime.
Pour les faire tous assommer ? … Il est certaines idées qui sont faites, chez elle, pour le rester.

A son doigt, pourtant, le jais offert, malmené par l'activité. Cet œil, qu'elle lui aurait bien arraché pour qu'il la regarde encore, malgré lui et à jamais. Jusqu'à pourrir. Il en a deux, après tout.

« Je t'ai fait suivre, aussi. »

Elle y pose ses mirettes, sur la précieuse, et la considère sous un jour nouveau. Elle se penche sur le reflet d'un rayon, sans faire l'aveu qu'elle attendrait presque y trouver ses traits espions l'observant en retour. Mais non. Ce présent -quelle ironie, pour un duo sans avenir- avait été fait sans préméditation. Oui? Il avait voulu lui apprendre à chasser. Était-ce pour qu'elle fasse de l'Autre sa proie, solution lâche à problème insoluble ? Pouah. Elle ne ferait pas le ménage pour lui. Ils savaient tous, du reste, que liquider l'une serait la mort de l'autre. Quel(le) que soit l'auteur(e).

Expédier une salière ? Piquer, encore, pour être ?
Allons, Chimera, le jeu a assez duré. Retourne donc a ton bûcher.

_________________
June
Le grand blond ne se doutait pas que l'un des moments les plus forts de ce délicieux voyage en Anjou serait le rattrapage des neuf mois de presque abstinence sexuelle de sa charmante et délicieuse épouse, Rosalinde Wolback-Carrann. Enfin, Isabella, dite Lady Huntington. Il soupira, en y repensant. Quelle idée de se donner des surnoms ! Il fallait prendre en compte le fait qu'il n'étaient pas vraiment des inconnus en terres angevines, surtout lui, le berrichon qui y avait vécu plus d'un an, il n'y avait pas si longtemps que cela. Enfin ! Il avait eu beau lui dire et lui répéter que cela ne servait à rien, l'idée de se cacher et de se faire prendre pour des notables anglais semblait gonfler encore plus la libido déjà débordante de la rouquine, et ce n'était pas le grand blond qui allait s'en plaindre. Lui qui pensait s'ennuyer sexuellement dans son couple marié, venait maintenant à se demander s'il était assez de lui tout seul pour contenter Madame.

"Oui, je trouve également l'Anjou très... Énergique. Et puis, à notre âge, il faut savoir faire des pauses et s'économiser."

Souriant en coin à sa compagne, lui prenant la main pour rejoindre leur carrosse.

"Si jamais vous aviez besoin d'une autre pause, n'hésitez pas. Je suis persuadé qu'un autre bois tel que celui-ci saura nous accueillir à bras ouverts pour le repos qui nous siéra."

Il regagnèrent le véhicule alors que leur charmante et boudinante fille hurlait à pleins poumons. Ouvrant la portière à Rosalinde, il l'aida à grimper dans le coche avec une main fort bien placée, en plein sur le séant, puis choisit d'aller s'asseoir au côté du cocher, prétextant le besoin de prendre l'air et de laisser les femmes entre elles pour faire leur travail de mère et de nourrice.

"Allons-y, mon brave." intima-t-il au conducteur, et il partirent vers leur destination.
_________________

(JD complètement absent du 2 au 5 juin)
Charlyelle
D'habitude, elle était ponctuelle. Toujours. Et surtout lorsqu'il s'agissait de cet homme là. Sauf qu'aujourd'hui, elle ne l'était pas.
Ce n'est pas pour autant qu'elle avait fait presser l'allure à son étalon, les lieues avaient été avalées, à un rythme soutenu, mais pas au rythme d'enfer auquel elle aurait pu se laisser aller.
Elle avait accouché, il y a peu de semaines encore, de cet Héritier qui ferait sans nul doute, toute la fierté de son grand-père. Celle de son père aussi sans doute, quoique, elle n'en savait trop rien.
Contrairement aux apparences, voeux n'avaient pas été renouvellés au bout des un an et un jour et aujourd'hui, elle se dirigeait vers celui par qui tout finirait. Du moins dans sa tête, dans son esprit, dans son âme, il en était ainsi.

Et si elle avait été surprise par cette invitation qui lui était parvenue quelques jours après avoir reçu une autre missive émanant du même interlocuteur, la Dentelière avait finalement pris la décision de répondre, par sa présence, au second pli qui lui avait été adressé.

Le petit Héritier mâle était resté sous la garde non pas du Danois, mais d'une petite cohorte des meilleurs hommes de la garde de son père. Finalement. Son princier de père l'avait tellement désiré cet héritier, qu'elle savait que l'enfant ne pourrait pas plus se trouver en sécurité qu'auprès de son grand-père à l'heure actuelle. Même si c'était à son détriment à elle.
Peu importe ce qui arriverait. Elle avait laissé le Danois quelque part au fond d'une campagne périgourdine. Son fils, sous la garde du joug de son propre père. Tout cela pour se rendre à l'invitation de celui sur lequel, même de loin, elle continuait de veiller. Parce que quoi qu'il dise, quoi qu'il fasse, il en serait toujours ainsi. Parce que c'est par lui, que tout finirait.

Les journées viraient au beau et il y avait déjà des semaines qu'elle se baladait de nouveau les chevilles emperlées de ses joyaux noirs, sans nulles entraves. Ce n'est pas pour un banquet qu'elle changerait ses habitudes. Elle était revêtue de blanc et de gris, qui épousaient à merveille les Tempêtueux de ses yeux. Les boucles brunes étaient lâchées, indisciplinées, le long de l'échine féminine. Un simple col ornait son cou, seule empreinte des peaux que lui avaient offert Judas Gabryel, et qui sur sa peau toujours était là, pour rappeller à celle qui n'aurait pourtant pu l'oublier, qu'il y a des choses qui restent immuables dans une vie. Qu'il est des personnes qui peuvent vous marquer à vie.

Pour cette marque, elle a fait le déplacement. Pour cette marque, voeux n'ont pas été renouvellés.
Pour cette marque et parce que c'est lui.

Parce que pour Judas Gabryel, elle sera toujours présente, la Pallikare venait de pénétrer dans son antre.
--Judas_vf


    "La chute d'un homme n'intéresse personne; les châtiments passionnent tout le monde."
    - Gilbert Langevin -


L'enfant avait disparu, bon petit page à son père, petit seigneur en son absence. Les enfants prennent toujours le visage qui plaît à leurs parents... Judas avait observé sa fuite empressée, adossé à son siège, l'air lointain. Anaon n'aimait pas les effervescences. Et lorsque se tenaient des banquets, des soirées à festoyer, souvent la présence Roide manquait. Solitaire difficile à convaincre du bien fondé de se montrer, et de faire semblant de se réjouir des interminables soirées. Surtout celles à boire et à refaire un monde voué à ne jamais changer.

Pourtant le seigneur exigeait sa présence ce soir. N'était-elle pas porteuse de la plus inattendue nouvelle? N'apprécierait-elle pas de constater qu'il avait fait un effort, en rassemblant un groupe de personnes qu'il avait délaissées ces dernières années? Rassembler sa jeunesse. Anaon devait honorer la première soirée publique depuis leur dernière tempête. Là, non loin de son siège, le Satrape avait fait parer celui de l'Anaon de grandes fourrures sombres et pour l'heure, l'assise restait désespérément vide. Il détourna les yeux, piquant un morceau de viande d'une senestre carnassière qu'il tendit à la gueule opportuniste d'un lévrier. Il l'avait choisie, il attendait de fait beaucoup d'elle.

Le repas avait commencé. Certaines absences commençaient à se faire remarquer. Mais presque moins que certaines présences. Les jais accrochèrent la silhouette familière de Charlyelle. Apparition éclipsant ses moroses pensées.

La lettre froide contre réponse chaude. C'était là toute l'ambivalence de la Pallikare. Lorsqu'il la bousculait de ses mots, durs comme des poings, elle répondait par un sourire. Tendre l'autre joue, désarmante. Pourtant elle avait fait silence à sa dernière claque. Frayner était orgueilleux, mais pas fou. Il détestait l'idée de perdre une femme. Judas les voulait toutes garder. La seconde lettre avait trouvé le chemin de sa destinataire, espérant tout de même provoquer une réaction, quitte à se radoucir. Et mieux que des mots, sa venue. Révélatrice face aux questions qu'il se gardait de poser.

Il renvoya d'un geste le chien quémandeur, se levant sans la quitter des yeux. Finalement, discret, la naissance d'un sourire. Elle était venue seule. Sans le cacher, Judas avait toujours su qu'il aurait l'avantage sur Seurn. Et que tout n'était qu'une question de temps et d'habile manoeuvre. Fin du jeu.

Il vint à sa rencontre, tandis qu'une jeune servante suivant les yeux de son Maître amenait déjà un siège à la nouvelle arrivée. Il embrassa chastement la main de l'étrangère. Un murmure.


- Tu vois. Les voeux ne sont pas faits pour les âmes libres. Et lorsque le vent souffle, il n'est fait que pour faire avancer les navires.


La senestre baguée saisit son hanap rempli qu'elle porta aux lèvres du Frayner. Une gorgée, puis deux. Puis finalement, il but à grandes lampées tout le contenu jusqu'à renverser sa tête en arrière. On dit qu'il sourit avant de reposer le contenant sur la table, désaltéré.

- Je suis heureux de ta venue.

On ne sait pas ce que nous réserve la vie. Judas l'avait consommée plus que de raison. Il claqua des mains signifiant que les réjouissances pouvaient continuer, marquant l'entrée de jongleurs et d'un ours , lié de chaine à son dresseur . Le sourire de Judas s'étira. Rien de comparable aux spectacles de troupes itinérantes ... Leurs apparitions ne laissaient jamais personne indifférent. Effrayantes, surprenantes... Spectaculaires. Les cracheurs de feu, les diseuses de bonne aventure. Friand de ce genre d'amusement, il observa l'animal sauvage maté pour les apparences. Ses yeux vinrent saisir ceux de la Dentellière, cherchant à y lire ses réactions. Il passa sa main sur sa gorge, gratta légèrement.

Un enfant le bouscula, le sortant de sa posture contemplative. Ce n'était pas son fils; et Anaon n'était toujours pas là. La senestre vint tirer un peu son col. Il faisait chaud aujourd'hui ... Il ne put s'empêcher de penser à Chimera, comme un éclair fugace parasitant cette... Parfaite... Journée. Où était-elle , là. Maintenant. La peau du cou avait rougi, rouge comme les cheveux de Chimera. Judas toussa. Oppressé. Réflexe malheureux, il saisit une seconde coupe de vin pour apaiser le feu de sa gorge. Qu'est-ce que faisait Sabaude...? Et où était Rose? Etait-ce lui ou ce vin était imbuvable? Frayner s'assit.

Il leva la main pour houspiller une servante, le regard déjà austère, et le geste sec. Il cria quelque chose. Mais ce qui sortit de sa bouche, à défaut de son habituel ton rauque et autoritaire, fut un toussotement sanglant, éclaboussant sa belle chemise vierge... Judas porta la main à ses lèvres pour les dissimuler, contrarié.

    Dieu... Jamais il ne réussirait à garder une chemise indemne pendant des ripailles...


La douleur hameçonna ses tripes, comme le meilleur tord boyau. La coupe tomba parterre dans un bruit métallique. Frayner se fit un collier de ses belles mains de chat, cherchant l'air qui venait à lui manquer. De fines mains tremblantes, pour faire une parure à un col devenu carmin. C'était une parfaite Journée.

    Oh oui... Parfaite pour mourir. Il le lui avait dit. Il n'y a pas de hasards, que des rendez-vous.


Qui? Pourquoi? Maintenant, vraiment ? Ses yeux fous , changés par la suffocation semblèrent chercher quelque chose ou quelqu'un du regard. Judas savait qu'il mourrait seul. Mais jamais, non jamais, il n'avait pensé mourir seul ainsi, entouré. D'étrangers. D'inconnus. Comme le clou du spectacle. L'inattendue surprise. Déjà à la vue de l'ichor, quelques uns s'étaient arrêtés. Des conversations peu à peu, s'étaient suspendues, les unes après les autres, comme le vent soufflant dans l'encre de la nuit sur des candélabres, éclipsant leurs lueurs. Les enfants crièrent, et les chiens aboyèrent. Les ongles de Judas s'étaient enfoncés dans la pomme d'Adam, comme pour l'arracher. Et les beaux noirs, séducteurs, manipulateurs, les beaux yeux sombres avaient viré au rouge, sous la dentelle des vaisseaux sanguins éclatés.


D'entre les lèvres, toussotement devint immonde flot de mort, massacrant au rouge le tableau austère qu'offrait habituellement l'homme. Frayner avait perdu de sa superbe, Frayner avait perdu tout court face à l'invisible ennemi qui avait empoisonné son vin. Il ne fallut pas longtemps pour que le seigneur tombe de son assise, contorsionné d'agonie, offrant à ses invités le minable spectacle d'un homme qui meurt de s'être cru intouchable. Une maitresse éconduite? Un ami jaloux? Une amante rancunière...? La liste des raisons pour lesquelles quelqu'un, ou quelqu'une aurait voulu tuer Judas était infinie, et dans son dernier spasme étouffé, le sybarite crut à la réalité de ses hallucinations coupables où se mêlaient des enfants noyés, des servants décapités, des chambrières violées, une épouse assassinée... La mort emporta comme une vague ses remords, ses regrets, et l'infinie liste de ses rancunes. La mort n'attend jamais les absents. Comme un Judas, elle prend, elle vole, elle viole. Elle ne fait rien mais elle prend tout. Elle avait surpris son hôte, le visitant à l'improviste, comme il aimait se pointer chez les autres. Elle avait décidé d'être sa dernière amante, l'unique qui le possèderait vraiment. L'unique qui se le garderait pour elle. Fin du jeu.

On raconte que la mort nous déleste de 21 grammes... 21 grammes d'âme lorsqu'elle nous fauche. Pour Judas, la mort lui donnait son baiser au terme de 21 chapitres de vies tumultueux, de passions ardentes et de vengeances, de manigances et de conquêtes. Même ses chiens n'osèrent s'approcher du corps tordu et recroquevillé de Judas, araignée touchée par le feu, l'odeur amère du poison décelable à leurs fins museaux. Sur le sol, éparpillés, les cheveux fous lui firent une drôle d'auréole sombre... Offerts malgré lui, comme pour dire ....

Vas-y. Cette fois, tu peux les prendre. Apres tout, nous sommes nés pour mourir.

Tout finit dans un regard. Tout s'exprime dans un regard. Masculin et chaud, pourtant muet et froid, celui dans lequel on ne sait que lire. *

* Premier RP de Judas, chapitre 1 " I am beyond repentance "
___________________
Chimera
    « Le remords, c'est l'horreur d'avoir douté.»
    Thérèse Tardif, Désespoir de vieille fille


La hache est restée là, adossée contre un tronc, tranchant dormeur du val, quand l'Aubépine a enfin opté pour la fin de ses lâchetés. Elle a déjà par le passé maudit son orgueil, froid compagnon de tant de nuits sans tendresses, celui là qui avant poussé son duc, père de ses aînés, vers un Est lointain, marche fuite sans autre raison valable que le besoin d'un renouveau plus simple à planter qu'à entretenir, plus simple, évidemment qu'à reconquérir. La graine nouvelle avait donc été cette fille de Lorraine, laissée elle aussi pour aller mieux crever de ses remords futiles sous le pommier d'un verger sur le chemin piteux du retour. A qui d'elle-même ou de lui -l'autre n'était rien, comment s'appelait-elle, déjà ?- n'avait-elle jamais pardonné ? Les deux, sans doute, mais c'est sur sa part qu'elle avait longtemps ruminé. Aurait-elle du le suivre, et souffler elle même sur les braises presque froides dans l'espoir de les voir à nouveau s'émouvoir ? Butée, elle était partie du principe -trop pratique?- qu'il ne le souhaitait pas, et que c'était sans doute mieux ainsi. L'annonce du trépas, pourtant, parvenue après quelques échanges de courriers penauds tissés de reproches et de regrets confus, avait heurté plus qu'escompté. Bien plus. Encore aujourd'hui, comme l'écho sourd qui vous martèle les tempes les jours de grande fatigue. Trépas. Trop radical pour la diplomate. Trop définitif. Trop irrémédiable. Trop, d'être trop peu. Trop, de n'être plus du tout. La marque est restée, soigneusement tenue sous silence, et plus jamais Chimera n'est allée au bout d'un engagement matrimonial. Trop convenu, malgré l'aspiration. Trop, malgré l'envie irrépressible -on est classe-ique ou on ne l'est pas- d'officiel et d'établi.
Comme à l'heure des morts -elle ne croit pas si bien penser, Chimera s'est remémoré tous les actes manqués de sa riche et pourtant si pauvre -ou est-ce l'inverse?- existence. Promesses fébriles, dans la forme surtout, puis finalement souvent dans le fond tout autant, passions débiles, revirements enivrants, négociations assourdissantes d'avoir été trop virulentes.

«  Je n'aime pas devoir lutter pour exister. », lui avait-elle soufflé.
Pour les autres comme pour toi. Ni pour, ni contre, d'ailleurs.
Orgueil, orgueil.
Mais...


    « La seule liberté que nous concède la vie, c'est de choisir nos remords.»
    Jean Rostand


« Il te faut rentrer en Alençon.»
Il ne lui avait pas dit d'y rester. Dénéré a toujours eu le mot pour jouer. Elle a donc, contre l'avis de ses deux blondes consciences, lancé l'Epona jusqu'au lieu dit des festivités, décidée qu'elle ne le laissera pas lui imposer le poids de remords dictés et subis. Ce faisant, elle lui refusera le droit, lâchement exercé par voie de courrier, de la priver de sa liberté de choisir.
Elle a, on ne se refait pas, troqué écus pour sel, et c'est l'acide grain des luttes perdues -ou éperdues- qui pend donc ainsi à sa ceinture. Sorcière ne va jamais sans sa potion, parait-il. Solution des au-cas-ou. Si seulement c'était un simple sort. Focalisée sur les paroles décidées qu'il lui faudra prononcer en terrain hostile, chimère ne prend pas dans l'instant note des regards effarés, des serviteurs ahuris au pas pressé, des quelques cris en rien festifs.
- Judas.... J'ai décidé de...
Elle répète les mots si longtemps . Oh elle sait bien qu'une fois les jais croisés, le spontané balaiera toutes ses préméditations, mais malgré tout. S'abriter derrière des préparatifs, c'est ne pas remettre en question. Des questions, il y en eut trop.
A peine entrée, sur ces terres désormais honnies d'avoir encore une fois résonné d'un assourdissant silence, azurs se mettent en quête de celui qu'elle a trop repoussé jusqu'à autoriser ce futile retournement de situation. Elle l'a laissé la repousser.
Mais le fauteuil de l'hôte est...
... vide.
La cruche est trop allée à l'eau, et Judas se brise. Dénéré fait abstraction de la moindre âme, assiette, pierre qui ne serait pas Von Frayner, et tombe à genoux près de l'informe amant. L'autour à laissé faire, on n'arrête pas le brasier des regrets. Est-ce son démon qui s'empare de son corps, retors fatigué de se draper de ses atours trop doux ? Elle l'aimerait ainsi aussi, mais non. Il étouffe, il agonise. La cause ne l'effleure pas, ironique ou non. L'abominable conséquence seule réclame la vedette, sans souffrir les protestations vaines d'une aubépine qui refuse, cramponnée à l'anse d'un bras crispé.
Le mal est en lui. Elle est piètre ovate, elle n'aura rien de plus à lui apporter dans l'agonie qu'elle n'en avait -pensait-elle- avant. Elle, comme tous autour, ne peut que constater qu'il s'échappe.
Peut-être le mal était-il tout simplement lui. Démon, prends moi pour hôte et cesse de tourmenter cette âme. Tu l'as assez eue. Je la réclame. Je te réclame, si je peux l'avoir ainsi, un peu. Les azurs scannent frénétiquement le corps perclus de douleur. Les mots qui lui échappent -adieu les résolutions solides du voyage- sont si naïfs...


- JUDAS ! Ne m'échappe pas ! Reste avec moi !!

«  Je trouverai une solution ».

La décision toujours trop tardive se fraiera-t-elle un chemin vers le cœur, l'âme, ou toute autre partie, fut-ce un orteil- encore en état de vivre, d'aimer, ou à défaut, de recevoir? Se fraiera-t-elle un chemin vers son seigneur déjà en chemin vers cet ailleurs ou la solution mettrait tout le monde d'accord. Échapper à la terre pour échapper à ses dilemmes. Trouvée à son insu? Il serait bientôt de nouveau l'heure des questions. Là, c'est l'heure des pleurs des beaux jours. La tentative est paniquée, mais elle est eux. La pique qui fait (se) battre. Elle le secoue. Elle le gifle. Aveu d'impuissance.


- Embrasse moi avant ton départ ! Judas !
_________________
--Judas_vf
    You take the wheel
    I don't wanna do this anymore
    It's so surreal, I can't survive
    If this is all that's real*



Mais il est trop tard pour un énième délétère baiser. Folle que tu es, celui-là pourrait bien t'emporter aussi, et ne dis pas oui. Ce n'est pas ton tour.

Et pour une fois, pour cette fois, nulle vengeance; nulle préméditation. L'âme pourrait parler, que le corps resterait aussi silencieux. Abasourdi. Et pourtant. Ce n'est plus à lui de démêler le vrai du faux, le piège et le coupable.

Les préoccupations sont ailleurs. Dans une sphère intouchable des Autres. Mortels éphémères. "Le seigneur offrira à ses convives la dernière cuvée de ses terres ..." Fallait-il en retenir une leçon?

Vivre, vivre, et partir avec autant de souvenirs. Les bons, les pires. Fallait-il compter les points? Qu'en résultait-il, de la grande partie? Le match. Les résultats comptent-ils vraiment plus que la passion, que leur spéculation à suscitée?

    All I wanna do is get high by the beach
    Get high by the beach, get high
    All I wanna do is get by by the beach
    Get high, baby, bye bye **


L'homme, même avec un grand H, est-il vraiment si important que cela? Ou ce qu'il laisse a-t-il plus de sens, haine ou amour ? Remords ou regrets?

Beaucoup de questions, autant de réponses qu'il n'était plus en mesure de donner. Là résidait la grande leçon de la vie. Partir, tôt ou tard et emporter avec soi les Réponses. Les promesses.

Les solutions.

Mêmes illusoires. Le pire des un est toujours le meilleur des autres. Ainsi va la vie, et le juste équilibre des choses.

Frayner ne restait-il pas Frayner? A laisser l'enveloppe , et à emporter avec lui, se garder; le coeur? Chevauchée funeste, gardez-tout, gardez-la. Rien ne manque qui n'était pas déjà absent , avant. Judas est parti conquérir d'autres sphères. Votre partie de chasse sera forcément plus palpitante que prévue. Cachez les yeux de mes enfants... Et ne vous trompez-pas de coupable.


    Everyone can start again
    Not through love but through revenge
    Through the fire, we're born again ***



* Tu veux sauver notre histoire
Je ne veux plus continuer
C'est si surréaliste, je ne peux survivre
Si je suis face à la vérité

** Tout ce que je désire c'est être ivre sur la plage
Etre ivre sur la plage, être ivre
Tout ce que je désire c'est être ivre sur la plage
Etre ivre, bébé, bye bye

*** Tout le monde peut recommencer
Non pas grâce à l'amour mais grâce à la revanche
Dans les flammes, on renaît de nos cendres



___________________
Anaon
    "Darling, darling, oh, turn the lights back on now
    Watching, watching, as the credits all roll down
    Crying, crying, you know we're playing to a full house, house
    No heroes, villains, one to blame
    While wilted roses filled the stage
    And the thrill, the thrill is gone
    Our debut was a masterpiece
    But in the end for you and me
    Oh, the show, it can't go on

    We used to have it all, but now's our curtain call
    So hold for the applause, oh
    And wave out to the crowd, and take our final bow
    Oh, it's our time to go, but at least we stole the show
      At least we stole the show... "


      La main se love dans la douceur, là où la clameur des ripailles parvient feutrée contre les murs lourdement drapés. Le pouce flâne sur le poing minuscule refermé sur son doigt et un sourire discret nimbe son visage fatigué d'une aura sereine et inespérée. Les azurites ne cillent pas une seule fois en contemplant les petits visages assoupis. Trésors de quelques menues semaines, le miracle des années qui se tarissent, et la preuve, là, dans deux corps jumeaux, des renaissances après les hivers délétères et les nuits meurtrières. L'Anaon a à nouveau donné vie, difficilement, à deux garçons, collant sous les traits éreintés par l'épreuve et les nuits trop courtes une allégresse qui n'y avait plus siégé depuis longtemps. Leur père excité tenait à les présenter en cette soirée, mais la mercenaire avait bien du mal à se séparer de ce lit chéri.

      " Elle est offensive. Il est offensé. Elle n'a pas froid aux yeux cette reyne froide, et ça lui réchauffe les tripes comme un coup de sang, une écorchure. Tantôt jouant de l'affront, tantôt se pliant aux exigences de son hôte, l'Anaon est conciliante en dent de scie. Cette permanente oscillation frustre, comme la main enfantine qui n'atteint jamais le criquet. L'envie de se saisir de l'objet du désir n'est est que décuplée, à vif. Elle déçoit, elle ravit, pour de nouveau jouer sur le fil du protocole. Entendu, fi des convenances ma Mie."

    Pour les contrats, la sicaire brillait toujours par son avance, mais dès lors qu'il n'était pas question de vie ou de mort, elle se faisait feutrée. Aux banquets, toujours elle se parait de retard, arrivant quand on ne l'attendait pas, où qu'on ne l'attendait plus. Ombre qui n'aimait bien que les foules d'anonymes, où elle se sentait à sa place, forte de la distance qui la séparait du parterre de quidam et lui inspirait autant d'indifférence que de réconfort.

      " Il se redresse, suivant la progression odieusement tranquille de l'inconnue qui respire son air et boit à son calice. Punaise, arriviste, étrange... Beauté froide. Que l'on dirait presque hautaine parce que ses yeux glacés peinent à se poser sur vous, à vous porter un intérêt. "

    Mais le temps qui s'écoule sans compter reprend sa mesure sur la note d'un gond qui grince discrètement. Le nez de la Roide se relève sur l'enfant nerveux d'impatience, trop pressé de délivrer son message pour retourner aux festivités, venant agripper sa manche et ses oreilles de murmures empressés. Un sourire et un mot breton. Et l'Anaon se lève pour prendre le temps d'emmailloter convenablement les petits endormis qui soulèvent à peine une paupière. Les voilà qui seront parfaitement présentables quand Judas décidera qu'il sera temps. Une lèvre qui s'appose sur chaque petit front, et la sicaire se laisse entraîner par la main d'Amadeus qui piétine et ronchonne de cette nonchalance.

    De brouhaha, l'ambiance devient fête, frappant la porte de ses oreilles de toutes ses réjouissances. La petite main est lâchée et s'envole sans un regard vers d'autres jeux, laissant sa mère sur le seuil de la porte où elle trouve l'appui de l'embrasure. Discrète encore, elle s'octroie le temps de découvrir l'animation qui fait gonfler les murs de sa maison. L'opulence, les saltimbanques et ces visages connus et reconnus qui se parsèment d'un coin à l'autre de sa vison. C'est l'apparition Renarde qui lui tire le plus franc sourire, jusqu'à ce que les yeux retournent chercher le joyau phare de cette soirée. Les azurites se rivent sur la chaise du seigneur d'où elle voit émerger une part de son profil. La pensée, se pose, là, muette d'une longue contemplation.

      " Il lui arrivait bien souvent de se perdre dans ces moments de pleine vérité, autour d'une conversation où elle écoute, d'une silencieuse contemplation souvent... Ces moments, où elle regarde à nouveau Judas comme si elle le voyait pour la première fois. Elle ne revoit ni les instants douloureux, ni les blessures. Ni même les souvenirs de jouissances et de béatitudes. Elle le voit simplement Lui, et alors le prégnant lui claque au visage comme une évidence et son crâne résonne toujours d'une simple et unique phrase qui la met pourtant en émoi : « Qu'il est beau ».

    Il est de ses choses qui jamais ne lasseront. Comme la quête l'animant perpétuellement au détour d'une taverne ou de quelques échanges enjoués. Elle croit l'avoir dit à Sabaude. A moins que ce ne soit Calyce, peut-être. Ou alors un autre. Qu'aimait-elle le plus chez le Von Frayner ? Ce n'était surprenamment pas ses cheveux qui la rendaient aussi folle qu'un pénitent mené une dernière fois à une femme en transe avant la potence... mais son rire. Précieux d'être tellement rare... L'Aria de l'allégresse qui lui réchauffe les tripes, elle, qui ne sait pas vivre par elle-même, ni être heureuse, seule, sans le miroir de l'Autre. L'entendra-t-elle ce soir ? Elle le veut.
    Le corps aimé quitte l'assise, elle le laisse voguer vers une rencontre du Périgord pour retourner chercher la présence de leur trublion de fils.

      " Elle met les rancœurs en sourdine quand la main vient tracer l'encre. Étouffer l'amertume qui point encore comme un abcès au cœur. Puisque que les mots liment les épines, puisqu'elle croit qu'elle peut y croire, encore. Puisque cet enfant peu avoir la chance d'avoir un père. Absent, peut être. Illicite, certes. Mais un père tout de même. Un père qu'elle aime.
      Alors pour Lui, elle serait prête à avaler toutes les couleuvres du monde. Pour un jour, entendre rire cet enfant, pour un jour voir sourire son amant. Leur offrir, ce jour-là, un peu de bonheur... »

    Au fil de la recherche, les yeux divaguent et accrochent, dans ses sens qui soudain s'embrochent, l'apparition Rousse ahurissante et inattendue. Là voilà, Acharnée Désespérée, qui ose perpétrer l'offense jusque sous son propre toit. Mais c'est pourtant parce que cette dernière se rue et s'alarme que l'Anaon tourne les yeux.

      "Que les dieux la blâme pour ce temple qu’elle profane. Qu’ils maudissent l’étreinte qui se joue sur la pierre qui a vu milles chandelles embrasées de prière. Qu’importe la damnation, si c’est pour le sentir se livrer sous elle, s’exaucer dans ce corps qu’elle lui offre un fois encore. Qu’ils la vouent aux enfers d’une existence sans résurrection s‘ils le veulent, tant que Lui continue de la damner avec la même application. "

    Tant de fois, la terre s'est éventrée sous ses pieds. Tant de fois, le monde s'est écoulé. Tellement de tant, que le corps n'a plus le réflexe de tendre la main pour s'accrocher aux dernières prises. Aux falaises qui s'effritent.

      " Graver encore, ce qu'elle a déjà scellé maintes fois dans les tréfonds de son âme. Le souvenir par chaque sens de cet être qu'elle adule. La peau frémit et se marque de la morsure. Les narines se plissent et s'enivrent de son odeur. Dénaturée, par les ablutions récentes qu'elle devine. «Elle hume la saveur du Von Frayner comme on savourerait la fragrance d’une fleur sauvage.» Retenir un geste, sa douceur, sa brutalité. S'imprimer d'un contact comme s'il était le dernier... "

    Les cris. Les aboiements. Se heurtent à sa tête comme des acouphènes. Le son du cardiogramme qui ne voit plus de battements.

      « Le refrain lui est toujours le même. Von Frayner Judas Gabryel possède L'Anaon, il la possède aussi cruellement qu'implacablement, éperdument déterminé à la garder pour lui jusqu'à son dernier souffle. Et plus encore. Il l'aime. Il l'haine, il l'aime, c'est la haine qui aime, il aime cette folie qu'elle sème en lui. Il n'aime qu'elle. Depuis Marie. Depuis toujours. C'est insensé les loi de l'amour. Injuste et déraisonné. ça rend con et léger, mais surtout, ça fait des fous. Des morts et des enfants. Une pauvre ballerine qui tourne en dedans quand dehors plus rien ne tourne rond.

    Pantin. Qui ne comprend rien.
    Le sang revient, électrique, comme un flux douloureux bourrant le passage trop étroit des veines recroquevillées. Gelé. Acide.
    Le pied s'ébranle. Puis l'autre.
    Des ombres. Elle marche parmi des ombres. Elle ne perçoit pas ses propres gestes. Sa main qui les chasse de son passage, ferme d'une froideur fébrile. Sa conscience s'est mise en suspens. Le monde, ses murmures, ses respirations, n'est devenu qu'un ronflement assourdissant. Les cris désespérés dansent, muets, sur la bouche rousse qu'elle ne voit pas.

    Le genou ploie. Tombe. S'effondre. Les doigts s'enroulent dans un calme qui ne souffre d'aucun refus sur le poignet breton qui malmène. Ordonne le silence. Puis les mains viennent au cou, se mêlent au sang pour lui faire un col d'une douceur sans nom. La mâchoire crispée maquillée de purpurin.

    Le corps est tiré à elle, posé sur ses genoux. Et sous ses paumes, le macabre silence... La pulsation du Rien.

      " La première fois, il avait du la retenir aussi pour ne pas qu'elle s'en aille. D'un éclat de voix, pour ne pas qu'elle lui échappe . Elle n'a plus eu depuis le droit de s'enfuir. Le visage plus jeune d'Ann au travers de cette fenêtre de Petit Bolchen, prête à remonter en selle semblait revenir du fond des âges dans l'esprit de Judas. Il avait été si dur avec elle, tant de fois. Inflexible et changeant comme les lunes, il l'avait malmenée. Ils s'étaient acceptés. Et le temps n'avait rien effacé, juste signé l'accalmie, une sagesse meurtrière. "

    Ne me laisses pas...
    Vois, je te retiens pour une fois.
    Tu n'as pas le droit !

    La vision se brode de rouge. Le visage si pâle et racé entaché, jusqu'au regard noyé d'un macabre contraste. Le Rouge et le Noir. Ce mariage a toujours si bien marché.
    Des genoux, elle le porte à sa poitrine. Elle le serre. Cherche la réponse, le cillement, la repartie au battement de son propre palpitant qui s'amenuise, s'enterre à chaque seconde d'immobilisme.

    Réveilles-toi... Comme moi.
      Je suis restée pour voir si tu avais envie de commencer à être heureux.

    Reviens-moi. Une dernière fois.
    Laisses le drame pour les histoires. Et les tragédies pour le Théâtre.

    La froideur du Cytraul.
    Judas ne se réveille pas. Réalité cataclysmique. Jamais Frayner n'aura été aussi calme. L'Anaon relève le visage vers ces convives qu'elle voit sans voir. Avec le regard des aliénés, qui précède la crise. Terriblement perçant dans les abysses hagards. La conscience qui s'effrite. Se décompose. Morcelée. Implose. Les larmes comme rouges qui percent ses paupières. Affolée dans son silence. Perdue, le seul contact encore chaud de son Autre sur sa poitrine pour empêcher la conscience de tourner de l'œil.

      "Les membres qui s'entrelacent se murmurent qu'il ne faut plus se séparer, tout du moins plus ainsi et que jamais ne veulent revivre les nuits sans paupières. L'amour est bien trop éphémère pour cela. Mais l'amour est faible, et toujours le taire use sans jamais apaiser. Sans trop réfléchir pour l'avoir trop fait depuis la première fois où il posséda Anaon, Judas exprima simplement l'ultime besoin. Marquer son territoire.

      Ne pars plus. Je t'aime.


    Ne pars pas...

    Qui ? Pourquoi ? Ça aurait pu être elle. Si souvent, dès le premier jour, la première nuit. Tant de raisons et d'occasions. Si souvent bafouée, mais toujours rattrapée. Officieuse Unique. Épouse des nuits sans serments et clandestines. Maîtresse des poisons qui déjà avait puni, dans un coffre piégé, l'Amour trop insolent. Anaon qui s'est écrit dans les fils de Judas, tatouée de ses dérives. L'Un et l'Autre, incapables de se tenir tranquilles, fuyards à leur façon. Incapables non plus de se tenir trop loin, trop longtemps. Et aux mots doux, la préférence des griffures et des morsures pour agripper et faire revenir.
    La sempiternelle histoire des séparations et des retrouvailles.

    Qui ? Pourquoi ? Elle pour la vengeance. Et l'orgueil du dernier Maux. Mais on ne tue pas le père de ses enfants. On ne tue pas à l'aube du bonheur. On ne tue pas quand on peut enfin reconstruire et redresser les ruines. Quand obstacle il n'y a plus. On ne tue pas ce qui nous fait tenir en vie.
    Ce qui nous a ressuscité.

    Tu n'as pas le droit Judas de me faire souffrir une dernière fois. Pas comme ça. Reviens... Nous devions être vieux ensembles. Nous avions un mariage, et des fils à avoir, encore, tant que la nature le permet, c'est ce que tu as dit. Reviens. Apprends-leur à désirer les femmes quant j'essaierais de leur apprendre à ne pas les faire pleurer. On ne part pas comme ça quand on a trop à vivre.


    J'ai pris ta vie, à la Mort je ne veux pas l'offrir.

    Les azurites appellent la foule. Les azurites accusent. Les azurites hurlent. Les azurites tuent. Le coupable.
    Celui qui vient d'Anéantir.

    Rendez-le moi. Rendez-le moi... Vous. Dieu, païens, étrangers, amis, amantes, invités, tous, Satan et Camarde. Rendez-moi mon homme. Vous n'avez pas le droit. Ankou, tu n'as pas fait grincer ta charrette pour t'annoncer ce soir ! Tu ne peux m'avoir refusé tes bras, moi qui t'ai appelé tant de fois jusqu'à m'entailler de tes lames, pour l'emporter, lui, qui n'a jamais voulu mourir. Ironie, Fatalité catin. Dieux, démons, charlatans et fervents, vous n'avez pas le droit de le laisser me sauver pour me le retirer. Rendez-le moi, je vous ai déjà trop sacrifié ! Mon fiancé, ma fille, mon fils, mon passé, mes petits pas encore nés. Ne me le prenez pas, Lui.
    Je ne lui survivrai pas.

    J'implore, je me damne, me condamne ! Me baptise à toutes vos églises, moi qui ne priais que son nom. Je vous convertirais le monde si vous me rendez, mon Autre, mon Âme, mon Homme. Ma religion.

      " Dans ce monde ou dans l'autre, tous savent que tu m'as rendu fou.
      Et Idiot. Et faible. Parfois fébrile. Indélébile. Des falaises Bretonnes aux castels désertés, des Paris à Angers, des bateaux aux voitures, de la paille à la soie d'une couche bien dressée... Nus, jouant sous l'oeil d'un peintre voyeur. Judas aime Anaon. Anaon aime Judas. Ainsi a été écrit leur histoire, ainsi se terminera-t-elle. Peut-être bien, peut-être mal. Peut-être dans le stupre, peut-être dans la romance. Le tombé de rideau vaudra son pesant d'or. On pourra alors dans l'épilogue compter les écarts, mais ne pourra reconnaitre qu'un début, et qu'une chute. Fil rouge étranglant l'un, menottant l'autre. Malgré qu'il y ait eu un Avant, et un Après Rousse. N'y aura eu qu'un Judas/Anaon."

    Laissez-le moi...
    Ma c'harantez c'est ensemble que nous irons mourir.



Musiques : " Stole te Show", de Kygo, traduction => ici
"Young and Beautiful" de Lana Del Rey, pour "The Great Gatsby"
"My Love" de Sia

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    | © Image Avatar : Eve Ventrue | © Image Signature : Cristina Otero | Anaon se prononce "Anaonne" |
Charlyelle



Là. Il était là. A quelques encablures d'elle et la Pallikare le voyait se rapprocher. Un peu. Un peu plus encore. Jusqu'à sentir la fine peau de sa main sous ses lèvres, voir ce regard si familier plonger dans le sien. Jusqu'à entendre ce murmure triomphateur, distillé par les lippes Juda-esques.
Combien de fois avait-elle secrètement espéré le revoir depuis que ses pas s'étaient éloignés des siens ? Une année auparavant. Elle savait exactement le nombre de jours. Le sablier du temps qui s'écoule ne lui a rien épargné à la Dentellière.
Une année qu'elle vit loin de Lui. Qu'elle survit. Qu'elle le veille. De loin.

Mais aujourd'hui. Judas-Gabryel est devant elle. Tout près. Si près qu'elle peut sentir son souffle sur son visage. Qu'elle peut voir le jeu de sa pomme d'Adam frémir alors qu'il vient d'engloutir tout le contenu d'un hanap. Et elle profite de ce spectacle, la fille des Balkans.
Elle n'a rien oublié de Lui. D'Eux. Du tout premier jour. Jusqu'à sa si surprenante et inattendue visite dans le Périgord, se faisant annoncer de manière bien peu conventionnelle.
Irait-elle alors jusqu'à dire que ce sont là, les plus beaux jours qu'il lui ait offert ? Certainement. Les plus beaux mais les plus douloureux aussi. Mais de celà, il n'en avait jamais rien su et n'en saurait jamais rien. Le gibier déposé à ses pieds ce jour là, avait depuis fini par orner le cou de la Pallikare. Et ce col là était Sacré.

Elle se souvient également de cette étrange rencontre quelques semaines plus tard avec cette femme, qui selon Judas-Gabryel lui ressemble de bien des manières. Ce sentiment de tranquillité auprès d'elle, les mots échangés, et elle avait su la Pallikare, à qui elle avait affaire bien avant que l'inconnue, qui était resté des heures auprès d'elle et du Danois arrivé plus tard, ne s'en aille en ayant ce geste fou, révélant un joyau que seule Charlyelle pouvait formellement identifier.
Quant la porte s'était refermée derrière Anaon, elle se souvient de cette larme qui avait glissé sur sa joue. L'unique larme venue étayer le magnifique sourire qui avait alors fleuri sur ses lèvres.

Et puis les Tempêtueux se rivent à ceux de son hôte. Elle réalise que quelque chose ne va pas. Elle est druidesse, elle connait la médecine et les poisons mais il est déjà trop tard. Elle sait.
Le plus horrible, c'est que la Pallikare ne se serait jamais abaissée à un tel acte. On n'enlève pas un père à un enfant. On n'arrache pas un mari à sa femme.

Elle donnerait sa propre vie pour cet homme là. Si elle pouvait aspirer ce poison en lui pour le sauver, elle le ferait. Mais même ce geste là n'aurait pas suffit à le sauver.

Mais tout son être reste fasciné par ce qu'elle regarde, alors qu'elle entend encore dans ses esgourdes le son de la voix de celui dont elle s'est promis, que par Lui, tout finirait.
Rien ne lui échappe. Quand bien même l'eut-elle fait, elle sait que cela n'aurait rien changé. Il est des poisons foudroyants contre lesquels il est inutile de lutter.

Cette main qui gratte sa gorge, geste qu'elle ne lui connait pas, lui a arraché un haussement de sourcils.

Le cou qui devient rouge. Et la Dentellière rougit aussi.

Cette toux. Terrible. Elle n'a pas le temps d'avoir ce geste pour renverser cette coupe qu'il reprend alors que tout son être lui hurle silencieusement de la lâcher. Et ce sang qui gicle de la bouche. Cette main portée à ses lèvres.

Elle se tétanise quand elle entend le choc sourd mais qui résonne encore et encore dans sa tête, de cette coupe lâchée au sol. Elle voudrait courir à lui alors qu'il manque d'air. Lui inspirer le sien. Elle la fille du vent, elle sait faire cela comme personne.

Et pourtant. Elle ne bouge pas. Elle sait que même son souffle ne peut plus le sauver.

Un éclair roux nauséabond qui lui passe sous le nez et déjà, elle ne voit plus Judas-Gabryel. Caché à sa vue par cette entrée désolante, qui court vers un homme qui n'est déjà plus.

La Pallikare vient de prendre conscience de ce qu'elle vient de recueillir.

Ses derniers regards.
Ses dernières paroles.
Son dernier baiser, chaste, sur sa main.
Ses derniers murmures.
Ses derniers sourires qui lui sont toujours précieux tellement ils sont rares et beaux.

Et elle a entendu quelques minutes auparavant, ses derniers râles.

Et puis Anaon est là. Belle. Terriblement. Même dans les plus fatidiques moments de sa vie.

Clouée au sol, la Pallikare assiste à toute la scène. Mais de panique et de cris, elle n'en entend rien. Absolument rien. Les aboiements des chiens lui restent muets.

La douleur. Elle ne la sent pas. Pas encore.

Elle n'entend plus que le son de Sa voix quelques minutes auparavant. Ses derniers mots.


- Je suis heureux de ta venue.

Son corps hurle silencieusement, alors que le coeur se broie. Les Tempêtueux restent secs et sont figés sur Anaon. Les Azurites et les Gris se croisent fugacement. Dans une même douleur. Dans une même certitude également.

Ce ne sont pas elles.

Et puis la voix du Satrape se fait alors entendre comme une ritournelle dans sa tête, chantonnant d'un air moqueur.


Elle est bien jolie cette dague que vous avez-là.

La Kallipare tourne alors les talons. Nus et emperlés de Noir. Qui chevillés à son âme vont la porter dans ses dernières heures et dans un ailleurs plus intimiste.

Parce que tout finirait par Lui.


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