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[RP] La noble, l'Errant et les bas-fonds.

Soldaar
C'était une mauvaise idée.
Bien mauvaise.
Certainement la pire qu'il n'ai jamais eu.
Mais était-ce la sienne ? Ou avait-il simplement cédé à une demande qu'il aurait du ignorer ?
A-t-on déjà vue un chien de berger mené le troupeau à la tanière des loups ? Non. Jamais ! Pour la simple raison qu'il est censé faire tout l'inverse.
Alors pourquoi lui, garde du corps de la Duchesse la menait-il à travers les rues les moins fréquentables de la capitale ?

Ici derrière chaque ombre pouvait se cacher une lame, derrière chaque recoin une bande de malfrats. Il le savait parfaitement, lui. Cela faisait bien dix ans à présent qu'il arpentait ce genre d'endroits. Chaque grande ville avait sont quartier "mal famé". Là où le paysan et le petit commerçant vient boire ses maigres économies pour oublier la rudesse de sa vie et où les femmes vendent une marchandise qu'aucun homme ne pourra jamais proposer.
Dans ce type de lieu il se sentait bien. Ici personne ne lui demandait jamais rien. Ici il croisait le regard d'hommes et de femmes aussi perdu que lui. Ici il était un-peu tout le monde et tout le monde était un-peu lui.
Et puis surtout il n'avait pas les moyens de s'offrir un ailleurs. "Les merdeux restent dans la fange" lui avait dit un jour un homme en charge de filtrer la clientèle d'une taverne. Ce jour là sa tenue sale et puante n'avaient pas convaincue.

Ici c'était son monde...
... Et c'est justement cela que la sang bleu était venu découvrir.


"- Allons ne trainons pas. La rue est souvent bien plus meurtrière que la pire des tavernes."


Ils avançaient d'un pas rapide. Enfin surtout lui. Sa main droite tenait le poignet de la tête couronné pour lui donner le rythme alors que sa gauche tenait la garde d'Expiation.
Ce qui devait être une découverte prenait l'allure d'une simple traversée. Mais il réalisait à chaque pas combien il faisait prendre de risque inconsidéré à la femme à ses côtés. Pour qu'elle raison ? Aucune si ce n'est de satisfaire une curiosité. De se découvrir un-peu plus.
Si ce n'était pendant la guerre Angevine il ne se souvenait pas s'être soucié autant de la sécurité de celle la payant justement pour l'assurer.

Si elle voulait découvrir la vie de l'Errant qu'elle avait embauché voilà plusieurs mois maintenant c'était le garde du corps et uniquement lui qui était présent en cet instant.
Il s'en rendit compte brutalement.
Mais c'était comme voir son enfant se promener en haut des remparts. Quand on le fait sois-même on ne ressent aucune crainte. Mais quand on regarde une personne à qui l'on tiens et qui peut-être ne réalise pas le danger entrain de s'y aventurer on craint pour elle.
C'était précisément ce sentiment là qui lui faisait perdre son flegme habituel. Il ne s'en était plus fait pour quiconque depuis... bien longtemps. Sa dernière responsabilité avait été celle de père et au vue de la manière dont il s'était acquitter de la tâche ne plus avoir la responsabilité de qui que ce soit était une facilité de vie qu'il n'avait eu de cesse de rechercher. Maintenant cette femme qu'il appelait Duchesse avait rebattu les cartes et changer la donne.
"Soit toi. Ne lui transmet pas tes craintes. Soit celui que tu as toujours été. Celui qui est entré au château d'Allègre un jour d'hiver." se disait-il.

Sa main lâcha alors soudainement celle de la brune lui faisant signe de s'arrêter alors que penchant sa tête à l'angle d'une ruelle il s'assure qu'aucun danger n'est en vue. Et tout en faisant cela il brise enfin le silence.


"- Après tout vous êtes assez grande et de toute manière vous n'aimez pas plus que moi être prise par la main. Si vous êtes toujours décidé alors cette fois nous marcherons côte à côte. D'égale à égale." Il se retourna enfin vers Mathilde, son visage salie ça et là volontairement pour ne pas éveiller trop de soupçon avec une toilette trop parfaite était redevenu celui de l'homme sûre de lui et impassible qu'il était. "Au-moins pour ce soir vous n'êtez plus Duchesse.... Duchesse. Ce qui signifie également que c'est moi qui vous offrira à boire."

Il fit alors voler en l'air un écu. Ou plus précisément "L'écu". Ce n'était plus celui qu'ils avaient échanger à Mimizan alors que leurs paroles les avaient mener sur le terrain de l'incompréhension mais ce n'en était pas moins tout un symbole.
Pour lui en tout cas.
.mathilde.
Il lui avait proposé. Elle avait accepté. Le découvrir, lui, son monde, elle en était impatiente. La proposition avait été faite de bon coeur, pour redonner le sourire et divertir, une duchesse nostalgique qui s'ennuyait de plus en plus. Tout, était parti de là.

La journée du même type, s'était "parfaitement" déroulée. A dire vrai, elle s'était déroulée très différemment, de ce qu'elle avait imaginé. Lui, la nature, et des jambes pour marcher, un regard pour observer l'horizon, et une tête pour songer. Ou oublier.
Elle l'imaginait, tellement différent. S'en était presque étrange. Agréablement étrange.

Du coup, elle imaginait cette nuit aussi douce. Les étoiles, tout ça. Mais, c'est à Paris qu'ils se retrouvèrent. Dans un lieu méconnu, à l'opposé de ce que la duchesse connaissait de la capitale : le Louvre. Ici, il faisait humide, sombre, et l'odeur forçait à replier sa respiration. Elle qui était passée des monts de l’Auvergne avec ses senteurs d'hêtres, de pins, de forêt et de fleurs, à l'écume, le sable, l'air iodé et le vent marin, se retrouvait comme coupée de tout.
A regarder autour d'elle, elle aurait cru un regroupement des tous les pauvres du royaume, réunis là, dans la capitale. Elle n'avait jamais vu autant de misère, jamais. Car si elle avait grandit comme une paysanne, pour des raisons de sécurité, jusqu'à sa majorité, jamais elle n'avait vécu en ville. Et, elle avait surtout connu le labeur de l'agriculture, la tonte des moutons pour elle, le filage de la laine, ce genre de choses. Rien de comparable à ce tableau marécageux et nauséeux.

Elle était tellement dépaysée, qu'elle s'y serait perdue. A regarder de façon curieuse, les gens, les détails, les rats, le sang, la sueur, la crasse. D'ailleurs, à cet instant, elle ne marchait plus. Elle ne se rendit même plus compte, qu'elle traînait. C'est le contact autour de son poignet, qui l'empêchait de sombrer dans ce monde. Mais comment faisait il pour survivre là dedans ? comment pouvait on vivre, ici ? D'ailleurs, était ce vraiment une vie ? mais, c'était évidemment des vies, des âmes, des êtres.
Elle se signa de la main gauche, alors que Soldaar la tirait derrière lui, de près. Pour peu, il l'aurait poussé au derrière pour être sûre qu'elle soit toujours là, et la faire se bouger en même temps.
Heureusement, qu'il était là. Et elle qui pensait se montrer guillerette en mode balade au son des étoiles, se retrouva muée dans un silence lointain. Le regard perdu. C'était ça. Elle était ailleurs. Là, sans être là. Son poignet, dans sa main, pour seule respiration. Son souffle de vie, était au creux de sa paume.

Il lui parle, elle le regarde, hagarde. Elle aurait pu regarder ses lèvres bouger, sans rien entendre, mais l'étreinte à son poignet, la sortie de sa torpeur.
Ne pas traîner, se dépêcher. C'est tout ce qu'elle retint de ses mots. Le reste ne lui faisant ni chaud ni froid, depuis qu'elle avait pensé sa dernière heure arrivée, la mort, ne l'effrayait plus.

Puis soudain, il la lâche. Effet de surprise, elle remonte à la surface, et le regarde, l'air de dire "euh, se passe quoi ? tu me fais quoi là ? " . Et voilà pas qu'il lui parle d'égal à égal, qu'elle est grande. Tin, mais je t'en foutrait bien une si je pouvais. D'ailleurs, dans ce monde, on peut ? Quoi que, peut être est ce plus les hommes qui frappent les femmes, que l'inverse. De toute façon, elle n'aimait pas la violence, mais quand même quoi !
Égal à égal ... comme si ils étaient égaux. Encore plus dans un endroit pareil. Ici, elle est un fantôme errant, perdu. Sans repère, sans lumière. Ici il ne gardait pas son corps, il guidait ses pas. D'un garde du corps, à un ange gardien. Non pas que Soldaar ai la tête d'un être céleste, faut pas pousser, mais sur le principe ça correspondait plutôt bien à ce que la duchesse abandonnait en lui.
Elle se remettait complètement à son jugement et ses compétences. Son savoir et ses sens. Voilà, c'est ça. Il était devenu ses cinq sens, avec un sixième en prime je dirais même. Il commençait à la connaître, et pour sure, ça leur serait utile.

Du coup, le couplet et la tirade sur l'égalité, l'énerva assez pour qu'elle quitte sa léthargie et réagisse enfin ! Sans réfléchir, elle glissa sa main dans celle de Soldaar, et s'y accrocha comme au mat d'un bateau. Seul point fixe parmi les eaux. Comme un phare à la jetée du monde, que l'on tiendrait entre ses doigts, pour être certaine, de ne pas le perdre, et finir engloutie par les profondeurs aquatiques, dans le noir total.


Je vous suit.


Pas un mot de plus, ses aigues marine vinrent s'attacher au pupilles de l'errant, pour rester dans l'instant présent, et qu'il voit, que son esprit avait retrouvé sa place.
Mais puisqu'il semblait avoir envie de parler, et qu'il semblait fanfaronner avec son écu, elle répondit. Tac au tac, Mathilde, est revenue.


Nous ne sommes pas égaux. Nous ne le serons jamais.

Et pour éviter les malentendus, genre, t'es qu'un garde, et moi je suis sang bleue, même si elle osait croire qu'il la connaissait au moins un peu, pour ne pas avoir à penser ça, elle ajouta.

Ici, vous êtes mon guide, je vous obéit.

Et, contrairement à ce qu'il semblait penser, Mathilde s'était déjà vue offrir bon nombre de verres. La galanterie, et la cour, cela s'appelait par chez elle. Aussi donc, le fait qu'il veuille à tout prix, lui payer son verre, ne lui parut pas si déconcertant. Et si, ici, c'était normal. Chez elle, c'était un geste charmant. Elle ne le laissait juste pas faire, car il était son employé, et que ça rentrait dans ses frais de travail, si l'on peut dire. Le contrat étant nourrit logé en plus de la solde. Ils seraient dans un autre contexte, quelque chose de moins conventionnel, elle l'aurait laissé faire par chez elle depuis longtemps, ce genre de choses.

Elle lui sourit, et fit mine de faire comme lui, regarder autour d'elle, alerte. Même si à ce stade, elle aurait pu recevoir un pavé dans la gueule visible à 10 km. Trop nulle. Ou trop âgée et pas assez violente ou craintive, pour avoir des réflexes exacerbés. Pas assez pour survivre ici quoi.

Et puis pour la parenthèse, ce soir, elle s'était vêtue d'une cape encapuchonnée, qu'elle mettait sur les camps militaire en temps de guerre. Un truc lourd mais simple, qui te masque du froid, et des curieux trop bourrés. Une longue tresse, ressortait sur le côté de la capuche, jusqu'à son coude. La coiffure était ample, la tresse souple mais bien faite. Il avait insisté pour qu'elle se fasse la moins noble possible, alors, elle avait salit ses vêtements, mais, hors de question pour elle de salir ses cheveux ou son visage. Et son corps étant recouvert, ça n'aurait eu aucun intérêt. Sa chevelure ébène sentait le lys blanc, un parfum délicat et printaniers, mais il fallait être tout près d'elle, pour le sentir. Car elle avait quand même fait en sorte de ne pas les parfumer depuis des jours, mais bon, elle ne pouvait pas retirer ce qui était déjà imprégné. Et souvent attachés, ils ne prenaient ni la crasse ni les odeurs facilement. Sa peau quand à elle, sentait un mélange épicé de cannelle et de clou de girofle. Mais ça, il aurait fallut l'embrasser dans le cou, pour le savoir. Cou recouvert d'un foulard.
Elle pensait avoir bien fait, mais, quand elle senti la fange autour d'elle, il était évident, qu'elle sentait beaucoup trop bon, pour que ça ne se démarque pas, au moins un peu. Comme un linge propre qui revient des lavandières.
Ses bottes elles, sont dégueulasses, et, elle ne s'est même pas forcée ! Souvenir du front d'Anjou, elle avait appris ce qu'était des souliers boueux. Sa tenue était composée de braies beige, d'une chemise blanche, et du foulard... bleu. Le tout bien dissimulé sous la cape épaisse en tissu marron.

Elle n'avait aucun bijoux, si ce n'est une chaîne en or, dans son corsage et contre son coeur, avec un médaillon frappé du visage de ses enfants disparus. Merlin 5 ans, d'un côté, Esméralda 17 ans, de l'autre.

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        En l'honneur de ceux qui à jamais ont gagné mon respect et ma confiance. Je vous aime.
Soldaar
Quand la Duchesse s'accroche à sa main il s'étonne d'abord alors son regard la scrute.
Puis il réalise qu'elle est ici loin de tout ses repères alors sa réaction est certainement normal. Elle est perdu. Pourtant le pire reste surement à venir car jusqu'à maintenant ils n'ont croisé que ruelle sombre à l'odeur d'urine et autres rats glissant entre leurs pas.
Subitement il lui sourit franchement, peut-être garderait t'elle cette image quand la misère marquera ses pupilles.

"- Alors reprenons notre route, restez simplement près de moi Mathilde."

Et déjà il se détourne et fronce les sourcils sans qu'elle ne puisse le voir. Mathilde ? Ne l'appeler que par son prénom lui donnait l'impression d'un inachevé. Il n'était même pas certains de l'avoir déjà appelé "Votre Grace Mathilde" alors Mathilde uniquement... C'était étrange bien que voulu ! Autant prendre le bon réflexe immédiatement car si par erreur il devait l'appeler "Duchesse" ou par tout autre manière de nommer la noble qu'elle était les regards risquaient de se tourner vers eux.

La marche reprise le pas fut rapide immédiatement, la ruelle qu'ils devaient traverser ne lui inspirait aucune confiance. Elle se terminait sur une rue visiblement bien plus grande d'où parvenait les bruits de la vie humaine. Aussi les dernières mètres furent parcouru dans une enjambé à la limite de la course rejoignant enfin la clarté de l'artère principale. Débouchant subitement l'Errant s'immobilisa en plein milieu, la Duchesse à qui il tenait la main tout juste derrière lui.
Ses yeux se fermèrent. La rue large permettait une meilleur aération aussi les odeurs nauséabondes des venelles était bien moins prononcé ici. Sa vue éteinte il se concentra sur son ouïe. Il entendait les passant qui allait ou venaient, le gémissement plaintif d'un pauvre assis au sol au pied d'une bâtisse visiblement abandonné et demandant la charité.
Puis une forte odeur d'alcool lui envahit les narines et le mit en alerte. Ses yeux s'ouvrirent et il repéra en même temps qu'il l'entendit un ivrogne s'approchant deux.


"- Nous y allons."

Annonça t'il alors que son regard était rivé sur l'alcoolique. Malheureusement la route qu'il devait emprunter les faisaient passer tout à côté de lui.
Arriver à sa hauteur l'odeur de bière semblait encore plus forte que celle régnant dans un fut à peine vidé. L'homme qui tenait difficilement sur ses jambes leur adressa quelques mots que seul quelqu'un dans son état pouvait comprendre. Il était prêt à l'ignorer jusqu'à ce qu'il comète la faute de poser sa main sur celles de l'Errant et de la Duchesse. Il menaçait par là leur liens, il menaçait par là celle dont il avait la protection.
Il fit volte face saisissant la main de l'impudent avant de le plaquer face au mur le plus proche. La main fautive était retourné et le garde semblait vouloir la placer entre les omoplates de son propriétaire tant il forçait sur cette torsion peu naturel.
Il détestait tout particulièrement les ivrognes. Ils avaient le don de lui faire perdre toute maitrise de lui.
Presque autant que les bandits, les voleurs, les menteurs, les lâches, les païens, les hérétiques, les violeurs.... Il n'y avait guère que les chevaux qu'il détestait moins que ces videurs de tonneaux.


"- Rentre chez toi et surtout ne t'avise plus jamais de la regarder où alors se sera la dernière chose qu'il te sera donner de voir."

Et n'attendant pas la réponse il poussa l'homme dans la direction opposé à leur route. Celui-ci tituba, trébucha puis s'étala au sol.
Impassible il invita la brune a reprendre le chemin remonta la rue principale.

Quelques mètres plus loin ils croisèrent une femme qui hélais chaque passant les invitants à profiter de ses charmes pour un tarif défiant toute concurrence.


"- Hey mon mignon ! Pour toi et ta donzelle je suis prête a te faire moitié prix. A moins que tu ne veuille que nous regarder nous amuser moi et elle ?"


Lui l'avait à peine regardé. De la femme émanai l'odeur de la maladie et de la mort. Ses vêtements étaient sales de toute sorte de chose quand ils n'étaient pas déchirés. Sa poitrine en était visible pour moitié.
Son visage donnait le ton, un œil où subsistai un hématome trace certainement d'une réclamation de l'un de ses clients, et une commissure des lèvres envahit par un bouton purulent. Elle était plus proche du châtiment de luxure que d'une promesse de paradis.

Soldaar était malgré tout un-peu plus détendu qu'à leur arrivé. Il retrouvait ce qu'il avait toujours connu. L'impression de renouer avec une partie de ses racines. Et dans les grandes rues l'ont craignait moins les assassins et autre voleurs.
Même si nul part ils pouvaient être à l'abri, ce que lui rappela rapidement 2 jeunes filles venues sautiller autour d'eux, leur posant toute sortes de questions. La plus grande devait approcher les 10 printemps alors que la seconde n'en avait pas plus de 6 ou 7 à son actifs.
Il marqua alors une nouvelle halte, cette fois il extirpa sa main de celle de Mathilde mais demeurait tout à coté. Se baissant il se fit à peine plus grand que les 2 fillettes.
Dans sa main qu'il ouvrit l'éclat de 10 écus éclaira le visage des gamines.


"- Je vous les vends si vous promettez d'aller faire balader vos mains loin de mes poches de celles de mon amie.
- Nous les vendre ? s'interrogea la plus grande
- Oui je vous les vends contre ce vous avez de plus chers.
- Mon couteau ? continua la grande.
- Ma poupée ? conclu la plus petite.
- Non votre parole les filles. Celle de me promettre que vous utiliserez ses écus pour vous nourrir et que vous ne volerez plus rien tant que vous aurez encore de cet argent."


La filles se regardèrent. La plus jeune ne comprenait pas vraiment tandis que la plus grande se méfiait. Était-ce un piège ? Où était l'astuce semblait-elle se demander. Ça ne pouvait pas être sincère c'était bien trop simple. Et pourtant les écus étaient à portée de main!
Alors d'un geste rapide elle osa les saisir accompagné d'un "D'accord !" avant de tirer sa comparse loin du couple en courant.
Il se redressa et sa main retrouva celle de la noble femme.


"- Cela ne vaut certainement rien je sais. Je ne me fais aucune illusion..."

Mais qui sait ? Peut-être que cela pourrait provoquer un changement en elle ? Si au-moins il pouvait espérer qu'elles ne finisse pas comme la femme de joie croisé précédemment 10 écus ce n'était pas chers payer.
Puis il n'en avait plus besoin maintenant que son travail lui assurait un repas et un toit. Il n'avait besoin que d'un écu pour cette soirée.

La rue bifurqua et une fois l'angle passé les tintement de cloches leur parvint. Ses pas les firent s'éloigner du milieu du passage tant dis que devant une procession d'hommes, femmes et quelques enfants s'avançait. Ils étaient tous couvert d'un épais manteau. Leur visage, quand il n'était pas couvert de pansement de fortune sale depuis trop longtemps, offrait un spectacle de désolation.
A quoi pouvaient-ils s'accrocher encore ? Alors que la maladie ravageait leurs corps vers une mort inéluctable ? Qu'elle espoir pouvaient-ils encore entretenir ?
Il l'ignorait mais remercia silencieusement le Très-Haut pour ne l'avoir jamais accablé d'un tel mal. Quand l’attroupement qui avançait lentement passa à côté d'eux il retint sa respiration. La prudence n'était jamais un excès.

Ce fut là les derniers errent qu'ils devaient croiser car à peine plus loin une pancarte indiquait "Au maitre d'arme", leur destination.
Il appréciait pouvoir lire l'écriteau, savoir qu'il devait à la femme qui l'accompagnait.
Prêt à pousser la porte à travers laquelle filtrait toutes sortes d'odeur à défaut des vitres qui ne semblaient pas avoir été lavé une seule fois depuis son dernier passage il y a plusieurs années il se tourna vers celle qui découvrait tout ou presque.


"- Nous sommes arrivés. Vous avez découvert mes journées, vous venez de découvrir mon milieu à présent ce sont mes nuits en villes. Ce n'étaient pas mes préférés. Je vais passer en premier car ici les règles de bienséance n'ont pas court aussi certains hommes... et femmes... risquent de vous dévisager d'une manière peu convenable. Ne vous en offusquez pas.
Toujours prête Mathilde ?"


Une dernière révision avant de sauter à nouveau dans la fange.
.mathilde.
Sous son regard rassurant, et son charisme naturel en ces lieux, la brune acquiesça. Elle avait parfaitement compris les indications et consignes de Soldaar, qui s'avéraient très claires. Elle ne le lâche pas. Pas d'une semelle. Pas même de ses pupilles. Rien. Elle devait rester à ses côtés, pour le meilleur et pour le pire, dans ces ruelles sombres et inquiétantes.

Elle s'était faite à l'idée de l'odeur pestilentielle, ces bruits de fonds qui masquaient ce qui aurait été chez elle, cris de loups, chants de criquets et hululement de chouettes. Et à mesure qu'ils avançaient, ce chahut de fond devenait plus fort, plus présent, presque comme une faucheuse qui venait te murmurer l'heure de ta mort au creux de ton cou. Fourbe, sensuelle et morbide. Qui vous attire pour mieux pour achever. C'était indéniable, dans un tel contexte, il devait être bien difficile de garder un semblant de dignité ou d'amour propre. Comment ne pas se laisser happer par ces tentateurs de toutes sortes, ou tout simplement ne pas se laisser perdre pieds face aux abus de l'alcool à outrance, ou même s'abandonner à des plaisirs qui pouvaient vous faire sentir, l'espace d'une seconde, en pleine extase ? Elle ne le savait pas. Elle était même persuadée que cette vie, était contagieuse. Que quiconque traînait ici quelques jours, sans espoir d'un autre jour, ou quelques semaines, n'en revenait pas indemne. Que le sans nom se glissait dans ta couche et embrumait ton regard dès que tu rouvrais les yeux sur ce monde devenu tient. Celui que nul n'a choisi mais qui serait celui auquel tu serais voué. Impossible. Personne ne pouvait survivre à autant de misère. Pas dans des conditions aussi.... difficiles. Et le mot était faible.

A mesure qu'elle observait -car elle était avant tout et surtout là pour ça - elle sentait qu'elle se rapprochait de Soldaar. Non pas parce que tout ceci lui faisait l'imaginer comme ça avant, mais simplement par le contact de sa main, dans la sienne. Chose à laquelle elle ne songeait pas directement, mais qui inconsciemment, la canalisait.
Arriva un clochard ivre jusqu'à la moelle. Qui au delà des cheveux gras, des dents grisonnantes tintées de jaune tartre, d'un sourire déchaussée à l'haleine de tripes de porcs en dégueulis de cervelle, de point noirs qui viraient à la verrues plantaire, et de lèvres crevassées jusqu'au sang qui s'était coagulé sur les gerçures, semblait les regarder. Et alors que la tension et le qui-vive de Soldaar semblait s'accroître tel l'instinct d'un chasseur qui guette une proie prêt à lui sauter à la gorge pour lui arracher les artères à dents nues, le soiffard leur adressa la parole. Elle qui n'avait rien compris, mais s'apprêtait à répondre poliment - mais répondre quand même - qu'ils étaient pressés, fut coupée par son garde qui entra dans le vif du problème, à l'instant même où le déchet humain qui titubait devant eux, posa sa main sur les leurs. Dieu du ciel. Qu'avait il pas fait. Soldaar lâcha alors la main de la duchesse pour expédier le malotru tel on éjecte un insecte qui nous indispose sur le dos de notre main. Sans grande surprise l'ivrogne s'écrasa comme une mouche à merde sur le mur qui suppurait de crasse, d'humidité, et de reste de souvenirs de nuits d'abomination qui se succèdent indéfiniment dans ce lieu et place. Mais Soldaar se montra très ferme et très clair. Le malheureux n'avait plus intérêt à l'approcher. Ni lui, ni Mathilde. Et qu'il avait plutôt intérêt à dégager de sa vue si il tenait à la vie. Tout du moins c'est ainsi que Mathilde le comprenait. Cependant, même si la duchesse, par une excitation qu'elle ne se connaissait pas, presque malsaine, ne rata pas une seconde de cette scène, lui procurant une profonde fierté d'avoir l'Errant pour la protéger, humble fillette dans ce monde de brutes, elle ne manqua pas de regarder autour d'elle, entre inquiète et sur ses gardes. Comme si elle faisait le gai d'une action inconvenante qui portait à conséquence dans un lieu réputé. Ah pour sûr, les rues de la capitales étaient réputées. Bien au delà des frontières de la ville ou même des terres alentours. Mais, certainement pas sous cet aspect là. Avec un milliers moins de détails que tous ceux que Mathilde pouvait percevoir en cet instant. La mise au point sur les i étant achevée, il revint auprès d'elle. Alors elle glissa de nouveau sa main dans la sienne, sans chercher à se fondre dans son regard qu'elle savait bien occupé par ailleurs, pour leur propre protection. Elle se contenta donc d'enserrer juste une seconde d'avantage la main au moment du contact, en traduction d'un profond merci.

Leur "balade" se poursuivit. Un vrai lieu de rencontre ici dit donc. Et quelles rencontres ! A peine eut-ils fait quelques mètres qu'une nouvelle personne leur adressait la parole. Décidément, ils sont loquaces dans le coin ! Une femme de l'âge de Mathilde à peu près, qui proposait ses charmes à Soldaar... et Mathilde ! Décidément les filles n'ont pas froid aux yeux ici. Proposer des relations intimes avec une autre femme... elle n'en revenait pas. A dire vrai, elle en aurait presque été admirative, si celle-ci n'avait pas l'apparence du sans nom recouvert de misère et de châtiment divin, embaumé par un parfum nauséabond de reflux masculins. Légère grimace en tournant la tête. Elle avait déjà observé des esclaves étrangères, en tenues légères d'orient, faire des danses plus que sulfureuses à des grands seigneurs qui exhibaient leurs richesses et leur virilité tel on exhibe ses attributs pour montrer que l'on est bien un homme. Elle avait toujours trouvé le concept très présomptueux et.... très masculin. Mais, dans un recoin sinueux de ses désirs très profonds et totalement effacés de sa conscience première, ces femmes ne la laissaient pas indifférente. Elle semblaient douces, délicates, aux petits soins. Tout ce dont Mathilde manquait depuis des années et dont l'absence avait fini par rendre distante du reste du monde. Des caresses emplies de tendresse, des regards presque complices, des baisers délibérément langoureux. La liste étant bien plus longue encore. Etre libre d'aimer pleinement. Aussi pleinement que tous les sens d'un corps pouvaient le permettre.

Et alors que Soldaar lui passait son chemin sans aucune émotion, Mathilde, encore plongée dans ses pensées de femmes égyptiennes lancinantes dont la peau dorée respirait le soleil et l'invitation au voyage, se noyait dans un autre monde. Mais sa main n'ayant pas quitté son poste, elle fut rapidement replacée dans la réalité de l'instant quand il la lâcha de nouveau pour parler à deux fillettes. La rupture de contact avec lui était décidément un rappel à l'ordre inexorablement efficace. Alors qu'elle l'observe, son regard s'attendrit. A le voir ainsi, elle le voyait en père ludique et bienveillant. Un rôle qu'elle n'avait jusque là alors jamais vraiment imaginé le concernant, et se rappela de son passé. Alors le visage de la fillette pris celui d'un air de famille Soldaarien. Ca aurait pu etre ses filles. Et elle n'en doutait pas, il s'en serait sorti à merveilles. Les chipies déjà s'en allaient. Car oui, l'instinct maternel de Mathilde, et l’existence de ses propres enfants, la rendait totalement incapable de se méfier de fillettes aussi mignonnes, et semble t il rusées. Vive t elle vraiment dans la rue là comme ça toutes les deux ? ne peut elle pas les emmener avec eux et les prendre sous son aile ? Et alors que l'Errant se redressait et que les gamines filaient parmi les ombres de ruelles tournantes, la duchesse cette fois ci interrogea le regard de son garde. Oui, elle souhaitait les adopter, les éloigner de la misère. Et en un sens, Soldaar venait de traduire ce qu'elle aurait elle même fait, et bien plus encore si celles ci n'avaient pas disparues aussi vite. Son regard quasi implorant était alors inutile, mais elle savait qu'il capterait ses émotions et comprendrait ses intentions premières, aussi vaines soient elles à présent. A la phrase qu'il lui adressa, elle ne dit rien. Elle lui retourne simplement un doux sourire approbateur, les aigue-marine bien en vue.

Le lieu de chute arriva enfin. A peine 3 rues passées et elle avait l'impression d'avoir vécu l'aventure de toute une vie. Ou en y pensant plus sérieusement, de toute une année. Et depuis le début de leur traversée, elle n'avait plus parlé. Seul l'apaisement que Soldaar avait introduit en elle après son premier état de stress, subsistait. Elle n'observait plus son monde à lui, mais lui dans son monde. Et si elle y était déjà attachée, tout ceci ne faisait qu'accroître ce sentiment.

Il lui parla à nouveau. Et le "Mathilde", vint faire mouche. Non, elle ne s'y ferait jamais. Mais comme c'était déjà la seconde fois, en quelques minutes, il n'y avait plus d'effets de surprise.
L'éclaboussement de la fange sur sa tenue jusqu'à son visage dû à un trou peu prévisible, lui remit les idées en place. Il était son garde. Peut être, son protecteur. Il lui faisait découvrir son monde, elle se devait d'être attentive. Par respect et par intérêt. Le reste, elle devait l'effacer de ses pensées furtives mais pas moins invasives, qui lui prenait en l'instant.

Je suis prête !

Et finalement le ton était presque enjoué. Car si ça ne serait définitivement pas son lieu favoris, soyez-en certain, elle appréciait cette découverte.
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        En l'honneur de ceux qui à jamais ont gagné mon respect et ma confiance. Je vous aime.
Soldaar
Le sourire qu’il lança à la Duchesse fut sa seule réponse avant de pousser la porte de la taverne.

Le lieu était encore un univers différent que celui de la rue. On y retrouvait bien entendu les mêmes personnes mais si dans la rue c’étaient des passants ou des malfrats à l’œuvre, dans cette immense sale ils étaient des consommateurs, des joueurs, des parieurs. Des hommes et plus rarement des femmes, en quête de plaisir et d’oubli.
Et puis l’odeur n’était également plus la même quoi que pas moins agressive. Les vapeurs d’alcools qui existaient ici sous bien des formes avaient totalement imprégné les murs et les table. Chaque bouffée d’air était une noyade dans une choppe pleine.

A présent il ne tenait plus la quadra par la main mais par la taille se positionnant tout à côté d’elle. Dans un tel lieu il ne voulait pas qu’elle soit dans son dos hors de vue ou la faire passer devant l’empêchant alors de voir une menace arriver. Et cette proximité qu’il avait créé devait également servir à dissuader toute main trop baladeuse de la part d’un client s’imaginant que « la place est libre ».
Ils avancèrent ainsi foulant le sol recouvert de paille de leurs bottes sales jusqu’à croise le chemin d’une serveuse. Cette dernière, une petite blonde au physique peu avenant ne sourcilla pas quand Soldaar lui demanda 2 verres de laits. Certainement était-elle trop occupé pour s’intriguer de la présence d’un couple dont même l’homme ne consomme aucun alcool. Il est vrai que la grande salle était animé, dans un coin l’on entendait de la musique, surement une troupe de musiciens en quête de quelques écus facile en offrant aux client un fond sonore qui couvrait tout juste les rires gras et les insultes usuelles entre ivrogne.

Partant s’installer au bout d’une grande table ils passèrent à côté d’une plus petite, ronde, autour de laquelle s’amassait de nombreuses personnes entourant 2 hommes assis. Le premier regardait le second qui avait une main posé au centre de la surface et qui de l’autre plantait dans un rythme de plus en plus soutenu la pointe de son couteau entre ses doigts. L’Errant ne put s’empêcher d’y attarder un regard distrait tant il avait gagné de choppes à ce jeu à qui il devait en partie son habilité au maniement de la dague. Mais il en avait arrêté la pratique tout comme l’alcool où les parie qui vont avec.

Finalement ils arrivent au bout de la longue table, lui se plaçant face à la Duchesse afin de garder une vue d’ensemble. A côté de chacun d’eux des hommes qui discutent ensemble et ne leur prêtaient aucune attention.


« - Je te parie que cette fois il ne s’en sortira pas comme ça !
- Sûre ! Voler le mendiant dans une ruelle c’est quelque chose mais essayer de voler toute un chargement d’arme destiné aux gardes ça !
- Surement qu’maintenant ils vont les essayer sur son cul leurs nouvelles armes ! »


Ne prêtant aucune attention aux propos échangés il balaya du regard le voisinage directe. Si ce n’était le petit groupe d’homme toujours à discuter de la malchance de leur ami a une table un-peu en retrait dans une alcôve de la salle 3 hommes étaient assis avec entre chacun d’eux une femme à la tenue légère. Si elles avaient un physique bien plus engageant que celui de la prostitué malade croisé dehors aucun doute ne subsistait sur la similitude de leur travail. Tâche qui semblait déjà fort engagé puisque l’une des mains s’était perdu dans le corsage ouvert de l’une d’elle alors que la seconde après avoir descendu le reste de sa bière provoquant l’hilarité des autres jetait à l’un des hommes un regard prometteur pour la suite.
Les lèvres de l’Errant se pincèrent d’une manière réprobatrice tandis qu’il détournait son regard de la scène. Le romantisme n’avait jamais fait partie de son caractère mais il avait toujours dédaigné ce type de rapport. S’il pouvait concevoir qu’on puisse se marier sans amour il n’imaginait pouvoir partager les plaisirs charnelles sans. C’était une question de respect de soi.
Peut-être sa mère était-elle aussi pour quelque chose dans son jugement elle qui sans avoir été une professionnelle du domaine avait des mœurs pour lesquelles même le Très Haut dans son amour pour ses brebis égarés accorderait difficilement son pardon.
Il s’enfonçait trop profondément dans ses souvenir, il lui fallait reprendre une bouffée d’oxygène ce qu’il fit aisément en cherchant leur regard de « Mathilde ». Il voulait s’assurer que tout allait pour elle bien entendu mais à cet instant elle restait pour lui une lueur dans les ténèbres tel une luciole virevoltant dans la nuit sombre. S’en rendait-elle compte ? S’en rendait-il lui-même compte ? Car il ne faisait pas que lui faire découvrir son univers, la vie qu’il avait eu avant que leurs routes ne se joignent non. Il confrontait ce qu’il avait été avant a ce qu’il était devenu, incarné par la présence de la sang bleu. Il prenait toute la mesure de ce qu’il avait perdu et gagné à faire le choix d’entrer au service d’une Duchesse. Lui, l’Errant des routes sans attaches.

Libre, et seul.

Des cris d’exclamation lui firent quitter les aigues-marines à nouveau sur le qui-vive et l’arme prête à sortir mais heureusement ce n’était que les sons de joie ou de plainte des parieurs indiquant que la partie de couteau prenait fin. L’un des joueurs fourrant son index dans bouche et l’autre ramassant ses gains.
A cet instant leur commande fut déposé devant eux et rapidement il paya la serveuse qui sentant que ces clients-là ne lui rapporteraient rien de plus se rendit auprès des 3 hommes en charmante compagnie qui représentaient certainement une manne financière plus intéressante.


« - C’est souvent plus simple quand on boit avant d’en regarder le contenu. »

Puis il noya son sourire naissant dans une gorgée de lait. Le goût n’était pas le meilleur mais il s’avait que peu était à craindre d’un tel breuvage. Peut-être aurait-elle préféré un alcool plus local mais ici ils étaient souvent coupés à de l’eau au mieux et la qualité était bien loin de ce à quoi elle devait être habitué.
Quand il reposa son gobelet sur la table une marque du liquide qu’il venait de boire surlignait sa lèvre supérieur s’agrippant à sa barbe naissante sans qu’il ne s’en aperçoive.
Mathilde.de.vaucanson
A l'instant même où elle s'apprêtait à découvrir derrière cette porte, un autre monde comme on tomberait à pieds joints dans un univers parallèle où le temps s'arrête tant la vision que l'on a nous paraît irréelle, il glissa sa main autour de sa taille en l'enserrant contre lui pour assurer au mieux son rôle de protection rapprochée. Le pied de la duchesse marqua un frein presque net mais qui ne tint pas. Elle failli d'ailleurs, en tomber. Son corps abandonné de longue date par son époux, plusieurs années au moins, n'était plus du tout habitué à de tels contacts physiques. Et en dehors de son mari, nul n'avait glissé sa main à cet endroit qu'elle ressentait comme intime, depuis fort longtemps. Vingt ans peut être ? même plus. Seuls ses enfants hauts comme trois pouces, qui venaient lui faire des câlins pleins de véhémence, le visage enfouit dans son ventre et qui l'enlaçaient autour de sa taille, le pouvaient. Mais, d'eux elle ne se méfiait jamais, et leur contact lui était bien trop chère pour qu'elle fisse sa chatouilleuse en de tels instants de bonheur magique. Et alors que la dextre de l'errant venait mourir contre son corps frêle, sa main à elle, vint la rejoindre, tel un garde fou qui veillait à ce que cette prise de position ne bouge de place. L'effet de chaleur que créait cette connexion aux abords de son ventre la perturba. Elle sentait en elle l'éveil d'un aimant magnétique qu'elle avait oublié depuis longtemps. Ou qu'elle n'avait peut être même, jamais connu. Pas de cette manière en tout cas.

Cette nouvelle liaison physique entamée, son regard chercha le sien dans une certaine gêne, manquant de demander si c'était vraiment nécessaire. Mais celui ci était en pleines évaluation des menaces et reconnaissance des lieux, alors elle ne le trouva pas. Elle se contenta de le suivre sans trop oser elle, poser ses yeux curieux autour d'eux.
Il n'y a qu'en passant à hauteur des hommes qui jouaient du couteau qu'elle les écarquilla en grand. Instinctivement sa main serra celle de Soldaar telle une femme enceinte sous le coup de la douleur. En un peu plus modéré, mais tout aussi bien agrippée. Ce jeu était... captivant ! effrayant en fait. A la fois son coeur était rythmé par les éclats de coups de poignards dans le bois brut de la table, qui la faisaient sans exception, systématiquement sursauter, et à la fois sa fascination pour une telle dextérité l'empêchait de détourner son regard. Ces hommes étaient fous ! Et Soldaar qui était si proche d'elle pouvait sentir sous ses doigts chaque respiration coupée de la duchesse, ainsi que la crispation qui la gagnait. Face à l'intense suspense de ce jeu - pour elle tout du moins - , elle aurait pu rester des heures en attendant l'esprit corrompu, le geste de trop. Mais Soldaar poursuivit sa route, non sans y avoir lui aussi accordé quelques secondes d'attention à ce jeu pervers, ce qui n’échappa guère à Mathilde.

Arrivés en bout de table, il relâcha son emprise pour la laisser s’installer. Un soupire de soulagement libéra la poitrine oppressée de la duchesse qui le réalisa immédiatement, non sans une certaine confusion de peur qu'il l'eut remarqué. Mince. Elle espérait qu'il n'en était rien, de peur d'un terrible mal-entendu.
Ils prirent place assise et elle se mit alors à observer chaque détail alentour, chose qu'elle s'était retenue de faire jusqu'ici,de peur de croiser le regard cru d'un homme ou d'une femme, et de risquer de faire naître une confrontation. Ainsi à cette place, elle se sentait plus libre jauger ce à quoi elle faisait face, fondue dans la masse. Ici, les gens étaient tellement pris par leurs occupations, qu'à moins d'une fixette vraiment insistante, ils ne le remarquaient pas. Tout du moins, c'est ce qu'elle pensait.

Quelques instants s'écoulèrent ainsi entre sa contemplation en coin de l'Errant, et iris curieuses qui se dérobaient devant toutes ces personnes non sans s'attarder sur leurs attitudes ou leurs paroles. Un échange de regard avec son gardien vint, et les aigues-marines de la brune cessèrent leur activié. Celui ci c'était assombri, et semblait la chercher du regard. Alors en cet instant, elle lui répondit dans un langage qui leur allait si bien, et se laissa glisser à sans mesure dans fin fond de ses yeux. Rapidement elle lui insuffla une lueur imperceptible, le soutenant à la manière d'un phare qui guiderait son marin en plein naufrage sous des cieux courroucés par la tempête jusqu'à ce qu'il retrouve la terre ferme. Et quand elle eu trouvé la vie dans son regard, ceux là ne faisaient plus qu'un, expédiant dans l'oubli total les bailleurs alentours. Lui tenant ainsi la main à la force de l'esprit, elle lui sourit. De ce sourire si doux qu'elle pouvait parfois adresser à ses enfants pour faire fuir leurs pires cauchemars. Un visage rempli d'attention qui lui disait : hey, je suis là. En lui souriant deux fois plus encore.

Et alors qu'il se raccrochait tout juste aux branches, Soldaar fut de nouveau happé par un cri alerte. Ce même cri qui fit tourner la tête à la brune en laissant s'échapper un drôle de bruit entre ses dents. Elles se serrèrent en compatissant à la douleur de l'homme décharné du doigt qui semblait relativement souffrir. Aïe, ça devait faire mal. Avait-il gagné ? perdu ? le concept était étrange. Si bien que Mathilde n'arrivait pas à prendre position. Les deux points de vue étant tout à fait discutables. Et alors qu'elle était partie dans une gymnastique tortueuse du cerveau, tandis qu'un remue-ménage de bruit de chaises prenait place pour les changements de joueurs, annonçant un nouveau pari, leurs verres furent déposés devant eux. Et Mathilde qui jusque là n'avait pas du tout prêté attention à la serveuse, la remercia, sans trop savoir si c'était de coutume dans le coin ou non.
Son regard s'arrêta alors sur les deux breuvages. Et là, un éclat de rire incontrôlé la fit s'émanciper. Si fort qu'elle s'en mit les mains sur la bouche. Bien que seuls leurs voisins pilleurs d'armes pouvaient réellement en être dérangés. Ce sont alors des pommettes rougies par la confusion d'une timidité palpable, et un sourire jusqu'aux oreilles encore bien caché, que trahissaient les petites rides légères aux bords de ses yeux, qui vinrent égayer son visage déjà bien plus expressif que d'accoutumé.
Elle défia Soldaar de ses précieuses fenêtres océanes. Il n'allait tout de même pas lui faire boire ça ?! Pas ici ! C'est que le lait pour peu qu'il ne soit pas d'une fraîcheur absolue, pouvait vous plier en deux de courbatures intestines et vous handicaper quelques jours durant, si l'on puis dire. Elle l'épingla d'un tendre regard.

Vous alors ...

Oui, il avait un côté attendrissant avec son fanatisme lacté. Non pas qu'elle le prenait pour un grand bébé : il en avait ni la carrure, ni le caractère, ni l'ignorance, mais ça la surprenait encore souvent son goût prononcé pour la nourriture infantile. Surtout en de telles occasions. Ceci étant, comme elle, n'avait rien contre le fait que son garde se démarque par des goûts originaux, elle, ne se sentit pas contrainte de s'interdire de boire de l'alcool, surtout que pour une fois, c'était un trait d'union très clair entre leurs deux mondes. Elle lui demanda respectueusement :

Pensez vous qu'il y aurait du vin par ici ?

Au moins se dernier se bonifiait avec l'âge, contrairement au lait. Et au risque que les boissons proposées eurent purent été oubliées quelque part, par les tenanciers dans un coin poussiéreux, ainsi, elle en serait épargnée. Et cela collait bien plus à son envie de fête actuel.
Tandis qu'elle, continuait de rire gentiment, Soldaar plongea son nez dans son verre, pour descendre de quelques gorgées. Dieu qu'il avait l'air sérieux.. Et, même si elle aussi aurait dû l'être avec toute cette ambiance délétère qui leur effleurait la peau, étrangement, elle se sentait bien. Les odeurs fortes alcoolisées virant au vinaigre, les bruits marteleurs à vous en faire éclater les tympans, les railleries entre hommes qui d'un battement de cil pouvaient virer à l'anarchie et l'atmosphère presque étouffante de toutes ses impuretés, n'y changeaient rien. Elle, était dans sa bulle, et l'observait avec attention, dans une joyeuseté qu'elle n'avait pas connu depuis fort longtemps. Et plus elle se perdait à le dévisager, plus le monde autour d'elle se noyait dans des abysses profondes loin de son esprit tel on étoufferait un bruit dérangeant en l’asphyxiant de plusieurs couches de torchons empoisonnés. On aurait pu l'espace d'un instant penser qu'elle avait perdu le plus clair de ses sens. Ouïe et Odorat s'étaient égarés au creux d'une vague qui l'avait emporté loin de chez elle, pour venir la déposer sous la protection de l'Errant, dans un cadre "original ". Les tavernes parisiennes n'avaient aucun rapport avec celles de la campagne presque vides de monde. Ici on avait l'impression que toute la ville s'étaient retrouvée. Tout du moins c'était l'image d'une Mathilde n'ayant aucune idée de ce que pouvait représenter la densité de population dans la capitale à l'époque.

Il reposa son verre. Car oui, tout ceci n'avait duré que quelques secondes. Mais absorbée par l'instant, ce fut pour elle un moment immortel gravé dans sa mémoire à jamais. Lui & elle, dans un endroit aussi louche que galvanisant, et cet entrain de fond...

...oh oui ! la musique !!

Elle aimait danser. Jadis. Dans sa jeunesse. Libre comme l'air de toute contrainte et responsabilité, elle riait dans les bals et tournait à une allure folle, à en perdre l'équilibre, dans les bras d'un cavalier. La vie quoi ! Une vie passée qui à son tour, venait de rattraper la duchesse, qui se teintait déjà de nostalgie. Et alors qu'elle voulut laisser s'exprimer son regard affublé de tristesse, à l'homme qui veillait sur elle, elle secoua la tête pour la garder haute et digne, et éviter de fondre en larme dans un lieu très peu approprié. Tout ceci sur-réaliste.
De nouveau elle allait s'aventurer à corps perdu dans les écorces brunes de son "ami" ? - car elle peinait grandement à savoir ce qu'il représentait pour elle en cet instant - que ci fut interloquée par sa blanche moustache laitière. Elle se fendit d'un sourire mutin. Après tout le lieu était plutôt bien approprié à ce genre de taquineries.
Alors les iris emplies de malice, une étincelle débordante de joie décuplant la portée de perles marines, d'un naturel déjà bien saisissantes - quand aucune méfiance n'y fait entrave, bien entendu - , elle se leva subitement, se pencha par dessus la table en manquant de l'escalader, s'appuyant sur ses coudes pour atteindre l'oreille de son Soldaar. Elle lui murmura sur un ton de confidence absolue, d'une voix lutine.


Je crois que vous avez la moustache, mon cher.

Puis de se mordre les lèvres amusée, en reprenant sagement sa place, et l'observant à nouveau, sans équivoque - mais sans provocation aucune, ce n'est pas un regard charnel, hein - .
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        En l'honneur de ceux qui à jamais ont gagné mon respect et ma confiance. Je vous aime.
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