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[RP] D'un instant à l'autre

Nikkita
Le soir tombe insensiblement sur la clairière perdue dans la forêt bretonne. Les rayons rasants du couchant dorent les feuilles, comme un automne précoce, démenti par la douceur de l'air. L'épiderme encore frais de la baignade, Nikkita s'étire longuement, souple comme un chat, le visage renversé vers les frondaisons où la lumière joue en éclairs poudreux. Dans cet élan qui la dresse, menue silhouette entre les hautes futaies, elle embrasse l'instant à pleins bras.

Elle étreint son éclat, sa déchirante fragilité aussi, les grave et les cisèle en elle, précieusement.

Vagabonde devenue femme, n'oubliant pas les enseignements d'une vie d'errance...
L'oubli est un confort trop facile, trop dangereux aussi. Façonnée de la pierre dure des routes, de l'humus tendre des sous-bois, l'épouse emporte dans sa musette, sans même y penser, ce bagage vagabond, fait d'attention, d'éblouissements, de blessures aussi, d'instants éphémères et précieux glanés, pas après pas.
Un enseignement à l'invariable finalité, dure et limpide, brute, simple et belle comme un éclat de quartz.

Pensif, son regard se pose d'une caresse sur la haute et fière silhouette de son époux, détaille doucement ses lignes fines, puissantes, animales. Chat auprès du loup, elle lui a dit oui sans l'ombre d'une hésitation, au cœur de l'hiver...
Au creux de l'été, elle n'a pas plus hésité à suivre ses traces, où qu'elles les mènent.
Se faisant chamoise aux côtés du montagnard, reconnaissant les failles, et ne les refusant pas...

Creusant l'échine au terme de son étirement, la brune ouvre ses bras et sourit au présent, sans arrière-pensée, s'en laisse silencieusement immerger, comme dans l'eau claire de la vasque murmurante qui allume ses yeux d'un éclat aussi secret qu'intense.
Musaraigne
Debout et nu, se laissant sécher au vent, il regarde d'un œil attendri le petit chat se faire chatte...
L'échine souple, ondule telle le serpent. Il devine sous l'épiderme fin et soyeux, le petit empilement d'osselets sur lesquels ses longs doigts aiment à composer des musiques rien que pour elle...
Il part d'un léger rire en la voyant s'étirer et s'ouvrir au soleil dans une invite muette à traquer les ultimes gouttelettes d'eau de ses recoins les plus secrets et joue un instant avec l'idée de remplacer l'astre "indécandescent"...
Ses yeux caressent d'un regard rapide la plastique de sa jeune épouse, Nikk, 21 ans, toutes ses dents, débarquée un soir de janvier chez lui, s'est nichée dans un fauteuil du ponton pour ne plus jamais en déloger...
Il n'y a que lui encore pour voir la petite poitrine tendue comme deux grenades au soleil, les tétons durcis en permanence, la ligne de la taille qui lentement s'efface... Le ventre encore joue à la sole, ce n'est qu'à la main que la ligne bombée du pubis se détecte...
Nikk est pleine de vie, au propre comme au figuré... Le loup soupire légèrement.
Une nouvelle "cellule familiale " se met en place - la première qui dans sa vie ne se met pas en place totalement par hasard - il pense ici aux loups, à son mentor, à Cael et même à Hélène, oui... Quoique celle ci créée avec Nikk, n'est-elle pas encore plus hasardeuse que toutes les autres? Un coup de poker, mû par la seule envie de "gagner", un mariage de raison pour juguler l'intranquillité, la course en avant du loup efflanqué qu'il se fait la sensation d'être quand il est en roue libre...?
Pour l'instant tout va bien, il peut se dire qu'il a eût "du nez", que cette vagabonde inconnue lui convient mieux que quiconque... Mais est ce encore à dire qu'il saura totalement maîtriser sa nature? L'appel du bois, de la liberté, de l'immense solitude ne se fera t il pas un jour à nouveau sentir dans son âme, le pousser à faire exploser le cadre et tout ce qui a été patiemment construit...?
Il l'a dit à Nikk hier. Il n'a pas la clé. De rien. Il peut juste leur promettre à tous deux une sincérité sans faille, ou tout du moins ce qui y ressemblerait le plus...
Il s'ébroue lentement, réalise que son regard s'est échappé pour s'enfouir en lui même, très loin dans ses zones les plus sombres.
Son épouse tout à l'heure si rieuse, le regarde en silence.
Il lui sourit avec douceur et se contente d'un
: Je pensais...
Nikkita
[Quelques jours plus tard...
Auberge de la plage, Saint Brieuc]



La chambre est bien rangée. Très. Trop, peut-être. La brune s'immobilise sur le seuil, la paume de sa main étroitement fermée, elle enfonce profondément ses ongles dans le petit tas rêche du fin lacet de chanvre qu'elle vient tout juste de dégoter au marché. Dans ce port s'ouvrant sur la Manche, elle a eu du mal à le dénicher, caché dans la foison d'épais cordages destinés à mettre les voiles. La lèvre doucement mordue, elle pose son regard sur sa besace discrètement poussée dans un coin, encore gonflée des quelques affaires emportées... Seul indice indiquant une présence.

Elle ne l'a pas encore défaite.
Ne la défera probablement pas...

Les bois et leurs eaux claires sont déjà hier, les terres briochines déjà aujourd'hui. Instinctivement, Nikkita redresse son dos, ses épaules. Pour rester droite, solide, bien que certainement pas infaillible, avec le curieux garde-fou d'un mariage initié par la raison, avec son épaule de compagne, avec sa tendresse d'amante... Avec aussi cette troublante essence de vie que Musaraigne a offerte à son corps consentant, elle a besoin de ne considérer Saint-Brieuc que comme un passage, aussi attrayante soit cette chambre toute parfumée d'iode. Une chambre où les rideaux blancs ondulent et se gonflent sous le vent marin, comme un appel de sirènes à prendre le large...

Elle n'est dans ce lieu que par un choix assumé. De cette étape, elle a évidemment compris et accepté la nécessité, et même le possible étirement dans le temps. Partie prenante de la nature et des chemins de la vie, elle ne s'en formalise pas, n'obéit dans cette libre acceptation à aucune convenance autre que celles intimes de sa tête, de son coeur, mais aussi, et sans doute bien plus profondément, de son âme vagabonde.

Mais l'écho bien qu'affaibli, déformé, distordu, est douloureux, de ces sables qui ont bien failli l'engloutir, moins d'une année auparavant, sur une lointaine plage catalane... Les iris troublés traversent les rideaux, la terrasse, se promènent, se perdent, errent sur le littoral. Ses lèvres, doucement, laissent échapper un soupir, comme pour repousser d'un souffle fragile les ombres qu'elle sait tapies dans les grains de sable autant que dans ses propres profondeurs. Les cils battent rapidement, chassent, refusent l'hypnotique vision, son regard se pose sur la besace, s'y accroche, délaisse les lointaines contrées, revient à la vie.

Demain est un jour inconnu, ne possédant ni clé, ni serrure.

Le lien de chanvre, fractionné en menus morceaux, liera par essence les différents végétaux grappillés en chemin. D'un mouvement résolu, Nikkita se détourne des sables et ouvre sa besace, en laissant jaillir les senteurs des sous-bois qui se mêlent à l'iode, les saisit à pleines poignées et enfouit son visage, s'enfuyant aveuglément dans leurs fragrances familières.
Nikkita
Le parfum caractéristique de la chandelle à peine soufflée flotte encore dans l'air, son éclat remplacé par celui plus lointain de la lune et des étoiles jouant à cache-cache. A cette faible lueur, Nikkita tâtonne, soulève un pan de couverture, se faufile dans la fraîcheur des draps.

Le grand corps souple de Musaraigne y diffuse déjà sa chaleur et l'invite au sommeil. Elle se glisse contre son dos, l'épouse d'un seul mouvement doux, giron lové au creux soyeux des reins, protectrice, protégée. Un sourire léger affleure ses lèvres alors qu'elle se laisse glisser dans les bras de la nuit, dernières bribes de pensée s'emmêlant paresseusement.

Elle peint sous ses paupières closes, de touches contrastées, de teintes ondoyantes, les battements des vagues et les saveurs salines, les soifs subtiles et les fringales voraces, les sables et les ombres, la courbe des mots et l'enveloppe des corps. Le rideau blanc se détache et vient se poser comme un voile sur l'esquisse, tandis que le vent des rêves emporte la brune chaudement nichée dans l'ailleurs profond d'un sommeil confiant.
Nikkita
[Tréguier]


Elle a suivi le sentier qui l'éloigne de la ville, et se retrouve là, au confluent des deux rivières. Là où leurs eaux douces se mélangent à celles amères de la Manche. Ce brassage donne un cocktail trouble, complexe, où rien n'est vraiment tel qu'il semble l'être.
Peu adepte des mixtions saumâtres, à l'affût de ses battements profonds, instinctifs, la vagabonde qui cherchait le soleil s'en remet au vent, le laisse s'engouffrer et faire battre la mince jupe estivale sur ses cuisses, batailler dans les mèches brunes, caresser ses pommettes avivées. Tendue vers le soleil couchant, elle évade son esprit à défaut de son corps.
Sage errante, l'a nommée pour son plus vif amusement, une rousse et incandescente Trécorroise. Si elle avait trouvé la sagesse, tendrait-elle ainsi tout son corps vers l'ailleurs ?

L'ailleurs.
Où se trouve l'ailleurs ? Les eaux claires de la sérénité sont-elles au bout de ce chemin ?
Ou bien les bois et leurs profondeurs sombres, et la tentation de se fondre comme une ombre entre leurs troncs ?

Le temps d'un battement de cils, le présent s'efface, laissant place à un instant tout à la fois fragile et puissant où une vasque limpide, murmurante, nichée au creux des bois, lui arrache un sourire plein, vrai... Vibrant d'une note aussi pure que le chant d'une harpe sous des doigts musiciens...

Si sa nature la porte foncièrement vers l'élément liquide, la vagabonde n'en a qu'une conscience plus affûtée encore, que tout ne coule pas de source. Elle a appris dans les failles profondément imprimées, que la source traverse les durs filtres d'un long chemin de roche, avant de finir sa course en jaillissant telle une évidence cristalline. Mais elle a aussi appris que si la roche est par trop friable, l'eau s'en écoulera boueuse dès sa résurgence.
Un sourire lointain traverse ses lèvres, fugace. Boueux comme une eau de source... Il faut oser.
Pourtant cette eau existe.
Une eau où les plaies ne se lavent pas, ne guérissent pas, mais s'entretiennent, mais se creusent... Mais s'enveniment.

Elle soupire doucement, le regard perdu vers l'ouest. Là se trouvent des plages neuves sur lesquelles inscrire leurs empreintes, des pages neuves sur lesquelles écrire à leur plume.
Elle tressaille, une fois encore cruellement mordue par cette pensée que l'encre de la blessure s'est décelée en même temps que l'ancre de la vie...
Elle a accueilli l'une comme l'autre au sein menu de sa substance. Mais l'intégralité de ses trois pommes, trognons et pépins compris, sait intimement, fondamentalement, que l'une ne peut s'épanouir que si l'autre cicatrise.

Une ondée courte vient cueillir la brune immobile, absorbée dans les méandres des chemins lointains qui sont siens. Avec une douceur curieuse, la fine menotte se pose, légère, comme pour abriter la vie à elle confiée. Son visage renversé, yeux clos, elle accueille et s'offre à cette eau littéralement tombée du ciel, lui ouvre ses lèvres dans un souffle abandonné :

Baigne-moi... Baigne-nous...
Musaraigne
Une chambre d'auberge à Tréguier

Il la voit revenir trempée comme une soupe...
Umh... Vous êtes allée taquiner le temps breton ma doucette...?

Lentement il se lève et va vers elle, cueille une serviette de lin frais abandonnée au dossier d'une chaise...
Vous avez fâché le ciel? Vous lui avez balancé des insanités? Il faisait beau quand vous êtes partie...
Doucement la serviette vient essuyer les cheveux bruns, le bout du nez, tamponner avec délicatesse les yeux clairs emperlés de gouttelettes... Descend plus bas, caresse la nuque, le décolleté luisant d'eau...

Le brun rit doucement, scrutant les yeux de son épouse :
N'essayez surtout pas de me faire croire que vous avez cherché un abri...
Vu l'état de la chemisette, mouillée de fond en comble, même en dessous des bras, il devine le corps offert, bras levés au ciel dans une muette prière...

Sa bouche lentement vient sécher ses lèvres des siennes tandis que la serviette glisse tout aussi lentement de ses mains qui elles viennent musarder sur les petits boutons du corsage, les font sauter comme un rien - mains habiles de tisserand - pour se glisser, chaudes et sèches sur la peau moite, légèrement frissonnante...
Déjà le corsage suit le même chemin que la serviette, fatale attraction terrestre, tandis que les petits seins durcis de plaisir et de froid viennent se frotter au torse sec et musculeux de l'helvète qui leur en libère l'accès dans un nouveau jeu de boutons...

Le baiser se fait plus exigeant alors que la maritale main glisse maintenant sous la jupe collée à la rencontre des cuisses, gluantes de pluie elles aussi...
Un nouveau léger rire passe la barrière des lèvres minces :
Non mais rassurez moi... Vous n'êtes pas tombées dans une mare au moins...?
Un nouveau jeu de liens fait aussitôt tomber la jupe au sol...

Vous allez choper la mort Nikk... La voix cette fois ci semble penser ce qu'elle dit...
La grande silhouette se penche tendrement sur la silhouette toute menue de son épouse, la serre et la fait disparaître contre lui, puis chuchote tout en faisant glisser la petite culotte de coton fin, dernier rempart avant la nudité totale :
Que préconisez vous pour vous réchauffer ? Votre époux ou un thé bouillant?
Nikkita
Elle doit offrir un tableau piteux, avec ses mèches folles, collées aux joues, accrochées aux épaules, ses vêtements qui ont rejeté très loin dans les oubliettes leur forme initiale, pour adhérer en plaques hasardeuses sur son corps frissonnant...

Ce n'est qu'au premier contact, doux et sec, de la serviette, aux gestes délicats et attentifs de son époux, qu'elle réalise qu'elle est non seulement trempée jusqu'aux os, mais aussi transie de froid. Et elle rit à ses questions, se réchauffe à ses effleurements, s'émeut de ses attentions ; incline son visage, offre sa nuque...


M'en parlerez, du temps breton... L'y a d'quoi y passer d'longues soirées d'hiver...

Sous le marmonnement amusé, sans dérobade, les yeux clairs se mêlent aux yeux sombres, leur livrent dans leurs profondeurs, les paysages encore inscrits dans ses prunelles, le parfum sauvage du vent, l'eau des rivières et puis celle des sources, et enfin celle du ciel. Les étoffes glissent, petit tas détrempé, à terre, la brune vient puiser souffle et chaleur à la source du brun, sa peau engourdie s'éveille, se réveille, s'anime, s'agace, s'épanouit...

Emue aussi bien par son rire, que par la tendresse pudique pointant sous les mots, que par les longues mains qui la mettent à nu, pour aussi vite la recouvrir de leur chaude enveloppe... Elle se presse, frissonne, frémit, hume ses parfums, se trouble et s'y noie... Enfouit voluptueusement ses menottes encore humides à la chevelure corbeau, sourit tendrement malicieuse au creux chaud de son cou, là où le grain de l'épiderme se fait le plus fin, le plus chaud, le plus odorant :


Tout bien réfléchi... J'crois bien qu'mon bouillant époux serait l'plus indiqué...
Musaraigne
L'épiderme séché par les bons soins de son époux, Nikk réfléchit, plisse joliment son petit nez avant de faire un mix bien à elle des deux choix proposés...
Citation:
Tout bien réfléchi... J'crois bien qu'mon bouillant époux serait l'plus indiqué...

Musaraigne rit doucement et murmure : le beurre et l'argent du beurre, je vois... Vous ne perdez pas le Nord, petit chat..
Se redressant et disant à la cantonade à un tavernier imaginaire - Et un époux bouillant, un! - il saisit son épouse, la jette faussement négligemment sur le lit et entreprend de l'ensevelir sous toutes les couettes et oreillers qui trainent dans la chambre et décrète fermement, couvrant les rires de sa femme :
Contre un début de rhume rien de tel qu'une bonne sudation...

Se déssapant à son tour, il se glisse grommelant sous la montagne de couettes: J'vous jure... qu'est ce qu'il ne faut pas faire...
Mais déjà ses bras prennent possession d'elle, aquatique il remonte le long de son corps, les bouches ses rencontrent, gourmandes, les jambes se nouent intimement, s'enroulent tandis que la chaude et sombre antre se met à résonner de soupirs alourdis par le poids des couvrantes et de doux bruits mouillés racontant le désir brut, immédiat de deux épidermes glissant et s'interpénétrant, alors que l'air tout autour devient électrique, les souffles brûlants se cherchent, les doigts se nouent s'accrochent aux épaules moites, le lit geint, les couettes glissent, les corps se cabrent, hoquettent, gémissent plus fort que le lit, puis lentement l'improbable édifice retombe dans un fouillis innommable...

Musaraigne émerge, cheveux en bataille, soufflant, en eau, de son dos va chercher le frais du drap, puis murmure, voix éteinte :
j'espère avoir réussi à enrayer votre rhume...
Nikkita
[Brest...]


La méthode semble porter ses fruits...
Rhume efficacement enrayé, affrontant à présent le temps Brestois. Nikkita sourit doucement, le regard traversé d'une brève flamme malicieuse. Le frisson zébrant lentement son échine en cet instant ne doit rien à un quelconque refroidissement. Les traitements de Musaraigne sont bien plus goûteux que le plus brûlant des thés...

La brosse glisse dans la chevelure brune, les iris d'eau claire glissent par la fenêtre. Les mâts se balancent doucement, voiles au repos, dans l'abri du port. A les voir ainsi tranquilles dans la lumière du petit matin, il serait facile d'oublier les puissants courants gonflant l'océan par-delà la digue.

Mais comment pourrait-elle les oublier, elle qui a grandi -si peu- sur les bords de la Manche ?
Elle a joué avec, a pataugé, a dérivé, s'en est laissée porter aussi. S'est faite piéger un jour sur un banc de sable.
Ce jour-là, elle a appris à nager.
La mer a été clémente, a choisi de la relâcher. Hagarde, exténuée... Vivante.

La brosse plonge inlassablement dans les mèches à nouveau emmêlées, qui volettent indisciplinées sous la brise traversant la chambre, comme si ses murs s'étaient effacés et que ne restait qu'une seule et large fenêtre, ouverte sur les roches granitiques s'enfonçant durement dans l'océan. Le regard vagabond effleure avec délicatesse l'esquisse qui frémit, étendue devant elle sur la table de toilette, vélin recourbé encore à ses extrémités, comme pour ajouter un mouvement supplémentaire à un trait indigo qui pourtant, vibre déjà de sa propre vie.
C'est un regard, qui est posé là, devant elle...
Un regard, un instant...Une perception...
Elle, elle ne sait que mettre des couleurs...

Est-ce à elle-même, qu'elle parle, à son époux, au vent, au tout ensemble, à bien plus peut-être ? Elle ne le sait pas elle-même, alors que ses lèvres laissent filer, quasi-inaudible sous le bruissement régulier de la brosse, le bourdonnement du vent :


J'voudrais bien voir c'dessin...
Musaraigne
Musaraigne, allongé sur le lit après l'amour de fin de matinée...
La main vagabondant légère sur son torse se rafraichissant sous les caresses du vent, une jambe négligemment repliée, le regard un peu absent jouant avec l'ombre des rideaux, tourne doucement les yeux vers son épouse qui tente de remettre en ordre la chevelure que les assauts amoureux ont savamment emmêlés...
Son regard à elle effleure un des quelques vélins qu'il a hier utilisé pour tracer - une fois n'est pas coutume - la baie et les falaises qui alors lui faisaient face lors d'une promenade solitaire.

Citation:
J'voudrais bien voir c'dessin...


Umh..?
Musaraigne passe sur le coude et se soulève un peu.
De quoi parle t elle? Ne le voit elle pas? A moins que c'est le paysage qui les a suscités qu'elle aimerait à voir...
Un bref instant Musaraigne pense à celui qui manque à la série, le premier.... Pas le plus réussi nécessairement. Juste le plus spontané...
Se pourrait-il que sa femme en sente l'absence...?


Le regard sombre et calme se pose sur elle, essayant de comprendre.
De quoi parlez vous ma douce?
Nikkita
Elle délaisse la brosse, les yeux attachés sur l'esquisse. De simples traits ne suffisent pas à l'émouvoir, fussent-ils d'une technicité absolue. Non, c'est la vie qu'elle aime, ce qu'elle raconte, ce qui la tend, de quoi elle vibre...

Elle se retourne, un instant perdue par la question. C'est vers le calme de ce regard qu'elle s'approche, mêlant doucement ses eaux claires aux flots sombres alors qu'elle se pose sur le lit, le laissant lire en elle, librement, à mesure de ses mots :


J'sais pas dessiner...


La belle affaire... Et pourtant, c'est bien ce dont il s'agit, aussi.

Il y a d'la vie dans vot'dessin... C'n'est pas simplement une reproduction, sans âme. C'est vot'façon d'voir un moment, à c'moment-là...


En est-elle plus claire pour autant ? Elle fouille doucement le regard sombre pour s'en assurer :

C'est cela, qu'j'aimerais voir... C'paysage, oui, bien sûr. Mais pas seulement c'paysage...

Elle se mord la lèvre et lui sourit doucement, effleure son torse du bout des doigts, hausse l'épaule :


Mais c't'idiot aussi... N'pourriez pas voir la façon dont j'les grave en moi, même si j'essayais d'vous en faire l'récit l'plus fidèle.
C'finalement très intime, un paysage...
Nikkita
[Rohan]


Le sifflement traverse la nuit.
Avec un bruit mat, l'épée vient de se ficher dans le mur, à quelques pouces à peine de son oreille. Une coulée de sueur inonde son dos d'un frisson glacé.
Elle ouvre les yeux.
C'est la nuit, seulement la nuit. Un rêve, seulement un rêve.

La lune proche de son premier quartier découpe faiblement le feuillage du vieux chêne qui s'invite à jouer de son clair-obscur dans la chambre. Pupilles dilatées par la pénombre, Nikkita émerge à la conscience. Un nouveau spasme glacial vient secouer son échine.

C'est bien la nuit. Mais ce n'est pas qu'un rêve.

Elle se presse doucement dans la chaleur et le parfum du grand corps emmêlé autour du sien, enfouit son visage contre les battements du torse vibrant d'un souffle à peine perceptible à l'oreille. Quelques heures d'un oubli fragile dont elle ne veut déranger le cours. Qui protège qui ? Elle ne le sait plus, à cette heure, dans ces terres où le métal froidement acéré des épées siffle aux oreilles, ou bien se suspend au-dessus des têtes.
Son corps même qui devrait s'emplir de joie, ne lui apparaît en cette nuit qui s'annonce aussi longue que la lune, que comme une entrave, involontairement refermée à la cheville de celui qui partage cette couche, cette nuit, cette vie. Chaîne bien plus que lien. Elle étouffe un gémissement, se raidit imperceptiblement au creux du lit, révulsée par l'idée.

Bien plus encore que ne l'avait révulsée la conscience brutale que l'épée sifflant à son oreille l'avait prise au dépourvu.
Et même si ce soir-là ses mots avaient cinglé, même si elle est restée droite, même si elle sait son poignard habile à voler bien plus rapidement, bien plus précisément qu'une épée... Prise par surprise, elle n'a pas su protéger. Se protéger, les protéger.
Son instinct l'avait prévenue. Ses réflexes lui ont fait défaut.
Involontairement, elle crispe les mâchoires, se ramasse un peu plus sur elle-même.

La nuit, en cette troisième lune bretonne, est encore douce, mais la glace s'insinue lentement dans les veines de la brune. Gangue sans doute nécessaire pour rester proche de l'essentiel, cet essentiel qui se joue, si proche.
Epouse autant que compagne, elle dépose ses lèvres sur la peau chaude et vivante, empreinte légère, impalpable caresse pour accompagner les heures oublieuses du sommeil...

Puis sans un bruit se recule, et se boule étroitement sur elle-même.
Si en cette nuit son coeur se disloque d'enchaîner le loup à une vie, quand les ombres rôdent... Cette peine-là lui appartient.
Nikkita
[Au coeur des marais]


L'île s'avance au rythme clapotant des minuscules vaguelettes froissées sous la coque à fond plat. Ecrin de verdure foisonnante, opulente de vies striant le silence alentours, où dominent à son plus haut point, le chaume à peine vieilli d'un toit, les rondins soigneusement ajustés des façades. Comme un oeil unique, la large fenêtre, ouvrant sur la terrasse pudiquement dissimulée dans l'enchevêtrement sauvagement échevelé des joncs, observe leur venue.
La barque a à peine accosté que déjà Nikkita saute à terre, prenant à peine le temps de récupérer sa besace. Musette comme poulaines échouent aussi vite quelques pas plus loin. Les pieds nus libérés s'enfoncent avec un plaisir primitif, sensuel, dans la végétation humide et profonde, tiédie par les rayons du soleil perçant à travers les grands aulnes. Visage renversé cherchant leur cime, les iris sans ombre de la brune clignent doucement dans le cache-cache aveuglant. Un soupir de bien-être brut, purement animal, emplit sa poitrine alors que les herbes un instant écrasées reprennent leur droit et viennent jouer sur ses chevilles.

Elle boit l'instant.

Puis se retourne, et son regard fuse d'un long trait vers la longiligne silhouette de Musaraigne. Elle ne s'explique pas, ne cherche pas à s'expliquer cette émotion toujours renouvelée à le détailler, comme si chaque fois était la première, seulement approfondie, sous la lumière changeante des lunes et des saisons...

Quelques menus pas remontent le fil de son regard, pour le rejoindre...
Musaraigne
Il s'approche d'elle lentement comme hélitreuillé par son regard plus bleu encore au milieu de tout ce vert... Il ne fait rien craquer ni gémir sous ses pas, comme si ces derniers ne pesaient rien... Les sourires se rencontrent, se mélangent...
C'est que vous avez réussi à dénicher un petit ponton bis ma douce...
Le bras puissant et fluide ceint la taille de son épouse tandis que sa main vient doucement cajoler le petit bombé dur de son ventre qui va bientôt entamer son 4ème mois.
Vous me faites les honneurs de la visite?
Nikkita
Elle se presse doucement dans l'étreinte, tout entière enveloppée, disparaissant presque au creux familier de son corps...
Un ponton bis...
Ses lèvres s'incurvent avec tendresse, la fine main glisse lentement, entrelace les longs doigts sous lesquels la vie s'épanouit...
Venez...
Le mot est soufflé.

La porte frotte un peu, bois travaillé par l'humidité ambiante, mais une large cheminée leur fait face, encadrée de deux fenêtres déposant leurs flaques de lumière tremblante à leurs pieds. De là, le regard plonge directement sur la rivière sinuant paresseusement sous les souples branches des saules.
Cabane de chasseur ou bien de pêcheur, le lieu, de dimensions modestes, offre vue aussi bien sur les bois que sur l'eau. Sur leur gauche la cuisine où une large pierre à évier raconte qu'ici, l'eau claire est omniprésente, s'ouvre sur un coin repas encadré par un banc rudimentaire, et deux chaises paillées. Des étagères occupent les pans libres des murs, supportant ici quelques pièces de vaisselle, là bougeoirs et chandelles. Un unique fauteuil large fait face à la cheminée, devant laquelle, luxe suprême, les précédents occupants ont pris soin de déposer un tapis à la laine épaisse et douce.
Sur leur droite, une simple tenture abrite l'alcôve où se niche le lit, isolé lui aussi par un tapis de cette même laine, entouré de deux grands coffres de bois. Un baquet dont la facture récente tranche curieusement avec l'habitat patiné, complète l'agencement, casé à l'angle des murs. Sûrement une attention de dernière minute de la part des propriétaires... Elle sourit légèrement en notant sa présence.


C'est tout p'tit...
Mais la lumière dans le regard et dans le sourire qu'elle pose sur les traits fins de son époux, raconte bien plus que ces quelques mots...
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