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[RP] La parade des éléphants roses.

Arnauld
[Journal de rêves]


🐑🐑🐑

    L'armoire est énorme. Pourtant, au départ, elle était toute petite, minuscule, invisible. Mais qu'est-ce qu'elle est grosse ! Et jamais elle ne pourra être prête. Ses portes sont toutes gonflées, qui a déjà vu une armoire gonflée ? Il ne peut pas l'envoyer à Morwène von Frayner, elle poussera de hauts cris et il n'aura plus de travail. Et puis il est beaucoup trop petit pour la déplacer, de toute façon.

    L'armoire enfle, enfle. Ou bien est-ce lui qui rétrécit ? Il garde son marteau à la main, son inutile petit marteau, et il essaye d'ouvrir les portes coincées de l'armoire en tapant sur les jointures. Il va l'abîmer. C'est horrible, il ne faut pas abîmer son armoire. Il doit la cajoler, la peindre en de jolies couleurs, et lui donner à manger. Il faut qu'elle soit heureuse. Qu'elle pousse des ronronnements d'armoire. Une nouvelle robe, peut-être ? Mais comment lui mettre une robe, puisqu'elle grossit sans arrêt ?

    L'armoire agite ses pieds sculptés. Qu'ils sont mignons, ses petits pieds sculptés ! Mais ils sont tout nus, sans chaussures. Elle va attraper froid. Panique. Il tourne le dos à l'armoire, qui fait battre ses portes en causant un tintamarre de tous les diables. Ouvertes, fermées, ouvertes, fermées – tac ! tac ! tac ! tac ! Il ne peut pas voir à l'intérieur, puisqu'il lui tourne le dos. Il faut qu'il trouve des chaussons. Il va demander à l'aubergiste. Il n'y a pas d'aubergiste. Comment faire ? Soudain, ses bras sont remplis de petits chaussons roses, avec des rubans de toutes les couleurs. Il veut se retourner pour les mettre au pied de son armoire, mais il renverse tout, et il se retrouve à nager dans un océan de pantoufles à froufrous. Il n'arrive plus à respirer correctement, il va se noyer. Dans tout ce rose, il ne distingue plus que les rubans, qui ont chacun une couleur différente. Céladon. Aubergine. Lavande. Fuchsia. Lapis-lazuli. Garance. Saumon. Groseille. Zinzolin. Laquelle choisir ? Laquelle choisir ? Le tac-tac a cessé, les portes sont refermées. Mais l'armoire s'agite toujours. Ses pieds nus remuent, ça fait criss-criss sur le plancher.

    Horreur ! Son armoire se fait la malle !

    *
    **


    Arnauld se réveille, haletant. Actyss est endormie, la joue contre son torse. Elle a l'air si paisible. Dans l'ombre, au fond de la roulotte, l'armoire sur laquelle il travaille depuis des semaines semble dormir aussi, les portes qu'il n'a pas terminé de sculpter et qui ne sont pas encore fixées posées à l'intérieur, masquant le fond, comme deux paupières closes. Tout va bien. Tout le monde dort.

    Mais il est sûrement le seul à faire des rêves aussi cons.
Arnauld

    - Alors ? C'est une fille ou un garçon ?

    - Une mouette !

    - Oh.


    Parfois, il est vraiment bête. Comment a-t-il pu oublier l'existence des mouettes ?

    Cassandre, sa belle-mère, le regarde en souriant. Elle est très contente d'avoir un petit-enfant mouette. Arnauld, lui, veut surtout voir Actyss : il ne se souvient plus de la dernière fois qu'il l'a vue, tant cela fait longtemps qu'elle est en train d'accoucher.

    - Elle se repose. Ce n'était pas facile, à cause des ailes.

    - Mais les mouettes naissent d'abord dans des œufs !

    - Tout à fait.


    Quelque chose lui échappe. Son bébé mouette est donc sorti les ailes écartées ? Mais il ne comprend rien, où est donc passé l’œuf ? En tout cas, le fait que la grossesse ait été si courte s'explique, maintenant. Actyss n'allait pas mettre neuf mois pour faire une mouette, cela tombe sous le sens.

    Le voilà assis au bord du lit dans lequel est couchée sa femme. Leur mouette est emmitouflée dans les couvertures, appuyée contre la poitrine de sa mère. Tout est merveilleux. Ils sont parents. Ils s'aiment. Il y a juste quelque chose d'un peu étrange, un léger malaise, il n'arrive pas à mettre le doigt dessus.

    - Tu as vu, mon trésor, comme il te ressemble ?

    Arnauld regarde sa petite mouette, les plumes de sa tête toutes ébouriffées. C'est son bébé. Ce qui est troublant, c'est qu'il a beau fouiller dans sa mémoire, il ne se rappelle pas avoir déjà rencontré le moindre bébé mouette. Pourtant il y en a, évidemment ! Il y a des filles, comme les enfants d'Alicina, il y a des garçons, comme le petit Thomas, et il y a des mouettes, comme leur bébé. C'est comme ça que va la vie, c'est normal. Seulement, les mouettes sont plus rares.

    Il ne veut pas se l'avouer, mais il est un peu déçu. Il ne pourra pas lui mettre les tuniques que leur ont envoyées Pépin et Hélona. C'est une mouette. Ils ne pourront sûrement pas chevaucher ensemble, elle préférera voler, et puis avec ses pattes elle ne tiendra jamais sur une selle. Elle ne dira sans doute jamais « Papa ! ». Et puis elle sera toute faible, on lui marchera dessus, comment une mouette peut-elle jouer avec les autres enfants ?

    Oh, mais pourquoi a-t-il fallu que ce soit une mouette ?

    *
    **


    En se retournant, Actyss le frappe au visage, et Arnauld se réveille d'un coup. Il met quelques secondes avant de comprendre où il se trouve. Sa femme, couchée sur le dos, bras écartés, est profondément endormie, et elle a rejeté les draps sur le bord du lit. Il regarde son corps nu, qui semble briller dans la nuit. Sans réfléchir, il se couche contre elle, la joue sur son ventre encore plat, où dort paisiblement leur bébé. Il a dû la réveiller en faisant cela, car elle s'est mise à lui caresser les cheveux. Arnauld se met à sourire. Rien ne pourrait être plus parfait.

    Quelques minutes plus tard, il s'est déjà rendormi.
Arnauld
    - C'est comme ça.
    - …
    - C'est à cause de tes bottes.
    - …
    - Moi je ne peux pas, les bottes, tu le sais bien.
    - …
    - D'ailleurs tu n'as plus de genoux.
    - …
    - T'es pas un mari, si tu n'as pas de genoux. Je ne veux pas de toi.
    - …
    - Tu es énervant.
    - …
    - Un prince d'Aragon m'a embrassée, je vais lui faire des enfants sur la plage. On annule mon ventre, on se démarie.
    - …!
    - Bien sûr qu'on se démarie, tu es tout à fait démariable. Le mariage ça se démarie, sauf quand c'est avec un autre que toi.
    - …
    - Je vais sûrement mourir. Je suis fatiguée ! Enlève donc tes bottes et assieds-toi normalement.
    - …
    -Tu es un crétin. Tu poses des questions stupides.
    - …?
    - J'ai pris du bon temps, tu fais bien l'amour, mais j'en ai marre à présent. Tu ne sers à rien, tu es démariable, tu n'as pas de genoux et je ne suis pas une poupée. Je suis lasse.
    - …
    - Idiot.
    - …
    - Tu m'énerves avec tes palabres. Espèce d'ingrat !
    - …
    - Je suis aux petits soins pour toi, t'es chouchouté, et tu trouves encore le moyen de réclamer des cerises confites.
    - …
    - Je ne suis pas ta chose, te dis-je.
    - …
    - Tu es si banal.
    - …
    - Va vivre ta vie, je m'en vais ! Adieu !
    - … AA
             AA
                AA
                    AAA
                           AAA

    *
    **

                                              AAAH !

    Ou comment réveiller la moitié d'une auberge. C'est bien joué, Arnauld, très bien joué. Ça ne va pas de hurler comme ça en pleine nuit ?
    En sueur, il s'est redressé d'un coup, et il essaye de distinguer quelque chose dans la pénombre. Il est tout seul. Sa gorge se noue, et d'un coup, il a envie de pleurer.
    Les draps remuent, un marmonnement se fait entendre. Actyss ! Il se remet à respirer. Elle s'était simplement retournée dans son sommeil et avait quitté ses bras. En guise d'explication, il lâche un laconique « Cauchemar », suivi d'un « Je t'aime » qui sonne presque comme un « S'il te plaît », tandis qu'il se blottit contre elle comme s'il mourait de froid et qu'elle était la seule source de chaleur sur terre.
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