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[RP] La corde sensible

Orian
[ Te souviens tu de cet enfant ? ]

C'est l'histoire d'un petit garçon qui s'ennuyait constamment, il avait d'abord tenté de retrouver sa famille en allant au Berry. Il y avait trouvé deux frères un père et une mère malade qui ne tarda pas à mourir. Il devint jaloux de ses frères et amoureux d'une catin (Lindor) dont son père tenta de l'en éloigner. Puis il rencontra son cousin fou qui lui apprit à faire disparaître toute trace d’innocence et de gentillesse en lui.

C'est l'histoire d'un jeune homme qui s'ennuyait toujours, son père voulait lui faire épouser une femme dont il ignorait l'identité, la guerre faisait rage en Anjou et le Berry ne voulait pas envoyer d'hommes, alors le jeune homme prit ses affaires et s'en alla pour l'Anjou. Il était plein de rêves et d'utopie, il criait à qui voulait l'entendre qu'il était là pour faire respecter l'amitié historique entre l'Anjou et le Berry et que si son père tenait tant à lui faire épouser une femme il finirait par la tuer ! Il rencontra Abondance qui devait être mariée de force aussi, ils firent un pacte pour tuer chacuns de leurs époux respectifs, sans savoir que les époux étaient l'une et l'autre.
Il fit la connaissance des angevins, un peu fou, mais au moins avec eux il ne s'ennuyait pas, et puis il y avait Cerdanne et son nectar qui faisait s'envoler votre tête pour ne plus penser à rien. Et Cerdanne disparut avec la recette, Orian passa des mois à tenter de retrouver le bon mélange pour reproduire cette drogue, son gout et ses effets, mais il se ruina la tête, perdant la mémoire un coup sur deux.


*C'est bien compliqué de ne pas se souvenir quand on est du genre à toujours chercher les ennuis,
il arrive ensuite de recroiser des personnes qui nous détestent sans savoir pourquoi.
Un jour, une brute m'a volé mes bottes, mais je ne me souviens ni de son nom, ni de sa tête, ni de pourquoi l'a t-il fait.


C'est l'histoire d'un homme qui s'ennuyait. Il s'était marié et son épouse avait pondu une petite fille et adopté un de ses bâtard. Elle n'était plus douce et innocente comme au premier jour et c'était transformée en espèce de harpie dévoreuse de chouquette comme ces amies. Tandis que lui, qui avait été froid et calculateur redevenait une sorte de grosse chose flasque qui ne savait plus se défendre, qui passait son temps à se plaindre que ça vie est dure, qu'il s'ennui.

* L'ennui nous pousse à faire des choses que nous regrettons par la suite,
j'ai trompé ma femme, qui était duchesse, par ennui,
et lorsque l'affaire et devenue publique que tout un tas de problème me sont tombés dessus j'ai ressenti une forme de plaisir malsain.
J'avais de quoi m'occuper.


L'homme était devenu Duc Consort, s'était prit la tête avec ses amis les plus proches pour une raison qu'il ignorait ou dont il ne se souvenait plus. Et pour la première fois il regrettait d'être occupé. Allessandro qui lui avait fait aimer l'Anjou lui tournait le dos et sans calculs aucuns la perte de son ami lui faisait détester ce duché et ces habitants, sans se l'expliquer il aurait aimé les voir tous brûler, mais il fallait protéger sa famille de ses coups de sang.

*Quand Abondance à proposé de laisser les enfants au Berry chez June j'ai tout de suite sauté sur l'occasion,
cela me permettrait de voyager et donc de m'apaiser et aussi de mettre en sûreté les enfants si jamais je venais a ne pas me contrôler.


C'est l'histoire d'un homme qui s'ennui et qui pour s'occuper joue sur la corde sensible. Son passe temps favori est de faire craquer nerveusement les gens en face de lui quitte à prendre des coups à perdre un doigts ou a se faire brûler.

*Jouer sur la corde sensible, c'est drôle comme expression, une corde.

*extrait d'un journal de bord.

_________________
Orian
[ La vie c'est pas des chouquettes ! ]

C'est l'histoire d'un petit garçon qui aimait. Il avait aimé, dans sa campagne frontalière teutonne, son ami, garçon de ferme, comment s'appelait-il déjà ? Mais il avait aussi aimé son père, cet homme droit et sur de lui, il lui avait semblé que rien ne pourrait jamais lui arriver tant qu'il restait près de lui, mais il s'en était éloigné par amour. Par amour pour Lindor, cette fille des rues, sale et vulgaire qui lui avait volé son premier baisé.

*Comment pouvons nous faire confiance à un homme qui n'a rien fait de plus pour nous que de gicler dans le con d'une femme ?
J'ai cru pouvoir avoir confiance en June mais il a tué Lindor par orgueil, son fils ne pouvait pas suivre une telle racaille.
Si tu savais ce que j'ai fait et avec qui j'ai traîné, Gobelin était bien plus crade que Lindor.
Elle m'a toujours répugné mais ça faisait bien trop chier Abondance pour que j'arrête de la voir.


C'est l'histoire d'un jeune homme qui n'aimait plus. Il avait aimé et même envié son cousin Zelgius qui était si grand et si confiant, il l'avait suivit, lorsque ce dernier lui avait dit de venir prendre des cours pour devenir un homme. Mais Zelgius l'avait laissé seul dans ce boui-boui ou les enfants n'avait de place que dans des cages.

*Le problème quand on aime à s'en rendre aveugle,
c'est qu'on donne également une confiance aveugle à l'être aimé qui lui fera tout pour vous casser en deux et vous rappeler votre place sur cette terre, au sol.


C'est l'histoire d'un homme qui n'aime pas. Il avait aimé Abondance, enfin il l'ignorait, bien sur elle le faisait rire et il serait devenu enragé si quelqu'un lui avait fait du mal, mais surement par orgueil ou par sentiment de propriété, il en aurait été de même que si quelqu'un avait abîmé un de ses livres. Désormais il ne voulait plus avoir confiance, il ne voulait plus prendre le risque d'être trahit ou rejeté.
Après tout ne le méritait-il pas ? N'était-il pas un homme de sac et de corde ?

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Orian
[C'est toujours quand tu dors que j'ai envie de te parler.]

Le cahier légèrement noirci du Sidjéno se referma d'un coup sec, et l'homme sortit d'un tiroir une pile de parchemin qu'il commença à griffonner du bout de sa plume.



Abondance,

Pardonnez ma lâcheté mais ce que j'ai fait n'est autre que de respecter notre promesse de jeunes idiots. Vous m'aviez demandé de vous aider à tuer la personne à qui Calyce voulait vous marier, c'est chose faite.
Je vous laisse bien seule entourée de cons, seule pour élever Espérance et Octave si vous ne souhaitez plus vous occuper du bâtard laissez le à June. Comme je vous disais l'autre soir en taverne vous serez toujours la bienvenue chez June si l'Anjou vous lasse vous pourrez toujours vous réfugier là bas.

Je vous laisse dans cette guerre, une de plus. Ah ce que je les ai aimées les guerres, mais elles n'ont jamais eu le goût de celle du Fou qui savait nous mener, peut importe si nous gagnions ou perdions nous étions heureux de le faire. L'Anjou n'est jamais meilleur que les premiers jours, les jours ou nous le découvrons en surface. Je ne fuis pas la guerre mais l'existence comme j'ai tenté de la fuir depuis des mois déjà en m'enfermant dans différents monastères ou bien planqué au fond du Lude, mais voilà l'existence est bien pire qu'une amante un peu collante, elle vous rattrape toujours pour vous rappeler que vous êtes vivant, et si cela peut rassurer la plupart des badauds moi ça m’oppresse, ça me comprime la poitrine et me vrille le crane.

Mon crane parlons en, il est vide, je deviens idiot Abondance ! Je ne me souviens de rien, ni des personnes que j'ai eu le plaisir d'emmerder ni de mes amis (ils ne sont pourtant pas nombreux). Ce matin au réveil j'avais oublié les enfants. Je préfère partir que d'être invalide !

Ne me pleurez pas ou alors à moitié, juste pour le coté qui n'est pas brûlé.

Orian.


Il jeta un œil à la lettre en la trouvant plutôt amusante, Abondance ne méritait pas une lettre d'adieu barbante il fallait la ponctuer de blagues ! Il enroula le parchemine le scella avant de pose un fromage de brebis dessus. Puis s'attaqua à la seconde.



June,

J'arrive par ce geste à t'emmerder une fois de plus, je vais retrouver Lindor, je n'en ai aucune envie mais si je me dit que ça peut te faire chier alors ça me met un peu de baume au cœur.

Non ce n'est pas pour cette ribaude que je meurs, on quitte un endroit quand on ne souhaite plus y être, mais comment fait-on quand ne souhaite être nul part ? Mes bonnes manières m'oblige à ne pas faire supporter bien longtemps la présence d'un petit bonhomme ronchon et rabougris sans envie aux autres.

Mais là je te raconte encore des immondices, c'est dingue ! Même dans un dernier courrier d'adieu je n'arrive pas à retirer mon masque et à être sincère avec toi.

A vrai dire j'ai peur, j'ai peur d'avoir mal et que la corde prenne son temps pour faire son œuvre, j'ai peur qu'il n'y ai rien après, rien que du vide ou alors un grand brasier ! J'ai peur que tu rejette Abondance et mes enfants après la fin de mon existence. Et egoistement j'ai peur que Wyllas ou Nathan s'en fichent, ah ce que j'aimerais voir leurs têtes blondes quand ils apprendront la nouvelle !
J'aurais été plus fin de m'organiser une fausse mort !

Au fait j'ai appris que l'adoptée t'avait foutu dans une sacrée merde au Berry, je t'avais dit qu'elle était une idiote et que tu avais fait une grosse connerie en l'adoptant ! N'as tu pas assez de bâtards pour combler ton envie d'être père ? Sans compter les cuisses de Rosalinde !

Je suis désolé de partir comme ça sans te visiter une dernière fois mais je ne peux plus tenir.

Dis à Korai que je m'excuse !

Allez adieu « père »

Orian


Après avoir retiré son demi masque il scella la seconde lettre en écrivant June à coté de la cire encore chaude.

Serais-je un plus gros connard si je n'écrivais rien du tout ? A vrai dire cela m'aurais facilité la tache.

La dernière n'était pas longue, mais il n'imaginait pas s'en aller sans emmerder une dernière fois les gens.



A tous !

A ceux qui voulait me tuer, sachez que j'ai toujours eu un pas d'avance sur vous, je sentais l'étau se resserrer alors je l'ai fait moi même pour ne pas vous laisser se plaisir !

Il doit y avoir parmi les lecteurs de ce courrier des gens que j'ai vraiment appréciés (Melchiore, Merlain, Raknor, Mumia, Calyce, Katina oui vous aussi, Alatariel, Cool,Canard) J'en oublis sûrement, pardonnez moi si je vous ai oubliés je perds la tête.

Juste ce courrier est surtout pour les autres, je vous emmerde, et j'espère très fort qu'il y a une sorte de vie après pour que je puisse revenir vous faire chier un peu plus chaque jour !

C'est fini les petits sourires de façade et la bonne humeur, je vous souhaite de crever, limite si les français pouvaient tous vous tuer je serais capable de trouver la force de revivre pour venir pisser sur vos cadavres !

Orian


Non ce n'était vraiment pas correct, et puis Abondance risquait d'en pâtir. Il froissa se parchemin avant de le jeter dans la cheminé et de le voir se consumer entièrement avant de ranger les deux autres dans un tiroir et d'y sortir une belle corde neuve. Avec ce dernier courrier c'est un peu comme s'il avait parlé de corde dans la maison d'un pendu. Alors qu'il s’apprêtait à installer sa potence il se tourna vivement vers la fenêtre du bureau. D'un geste rapide il rangea la corde, quelqu'un l'observait.

[Bien sur Orian n'est pas encore mort, l'arrivé de l'observateur est prévue et vos persos n'ont pas pu lire les courrier, celui qui est brûlé ne pourra jamais être lu. Vous pourrez intervenir dans le RP quand il sera mort ou sur accord par mp. ]

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Nigel


Ne jamais abandonner.

Ne jamais abandonner sa mission.

Là était le commandement qui lui avait été fait lorsqu'il avait juré. Nigel était un protecteur, une sorte d'ange gardien. Ainsi était l'histoire familiale : la première branche devait perpétuer le sang des Loups, la seconde devait protéger la première afin qu'elle atteigne son but. Chacun des membres de cette seconde branche se voyait assigné à l'âge de la majorité une personne à protéger, en général proche de son âge. Dans l'histoire de la famille, c'était une tradition, qui hélas s'oubliait un peu. Mais le jeune homme, attaché à cela, avait demandé à être Gardien, et le plus proche de son âge était le fils du chef de la famille. Quel honneur c'était de protéger l'un des héritiers du sang ! Et quelle peur il avait de mal faire son office ! Mais le brun s'y était accroché, il s'était battu pour avoir ce statut de protecteur et il s'y tiendrait. Ainsi, sans que son protégé soit au courant de son existence, il avait commencé à lui éviter toutes sortes de déconvenues, à le protéger de nombre d'agresseurs, mais c'est que l'Orian les attirait plus que quiconque. Nigel avait du, un jour, se présenter devant lui et lui avouer qui il était. Depuis, histoire de lui pourrir la vie comme il savait si bien le faire, le blond avait évité le brun, l'avait provoqué, l'avait mis dans bien des situations où il avait réussi - ou pas - à les en sortir tant bien que mal.

Des années étaient passées depuis ce temps-là. Mais Nigel ne lâchait pas. Il avait juré, et il remplirait jusqu'au bout sa mission. Orian était plus calme, depuis un certain temps. Apaisé. Ou apathique. Car un Orian apaisé, cela n'existait sûrement pas. Nigel s'inquiétait pour lui. Il le voyait rôder sans but, ne plus sourire, ne plus profiter de la vie. Lui, de vie, il n'en avait pas vraiment. Sa vie était Orian.

Ce jour-là, il l'avait suivi, comme d'habitude. Il attendait au dehors en faisant son activité préférée, mâchonner des feuilles de menthe. Ca sentait bon, et ça passait le temps. De temps en temps, il je tait un regard par la fenêtre, surveillait le Sidjéno blond. Il rangeait son bouquin. Il écrivait. Il reprit une feuille de menthe et regarda un oiseau passer. Puis, il eut un mauvais pressentiment, comme il n'en avait jamais eu. Cela ne faisait que quelques minutes qu'il n'avait pas observé Orian, mais une voix dans sa tête lui intima de le faire de nouveau. Il tourna la tête vers la fenêtre, et en cracha sa menthe. Le blond venait de prendre une corde, et s'apprêtait à l'attacher. A qui allait-il encore faire du mal ? Qui était sa nouvelle proie, sa nouvelle victime, qui cette fois allait en pâtir plus que les autres ? Il resta, l'air interdit, devant la fenêtre, quitte à se faire une nouvelle fois remarquer de son protégé.

Et une pensée, horrible, vint se mettre doucement dans l'esprit du brun.

Et une question.

Il pouvait protéger Orian des autres. Il pouvait protéger les autres d'Orian. Mais pouvait-il le sauver de lui-même ?
Orian
[ Et toi que j'aime que j'ai aimé, compagnon d'un jour ou d'une année.]

Je sais que c'est toi, je m'y attendais. Tu ne me laissera donc jamais en paix ?

Sourcils froncés Orian s'approche de la fenêtre pour y laisser entrer l'intrus. Nigel, il avait toujours été là à l'épier de loin mais Orian ne s'était aperçut de sa présence que lorsqu'il était venu vivre en Anjou, enfin pour la première guerre. Korai lui avait présenté Nigel et ses amis qui étaient soit disant venu combattre eux aussi pour l'Anjou, ils étaient jeunes et semblaient s'aimer, Orian avait vite jalousé leur relation, alors que dans le même temps il soupçonnait Nigel de jalouser sa situation, sa naissance.
Bien sur ça doit être chiant de n'avoir pour but dans la vie que de protéger un con qui ne pense qu'à se mettre en danger, et ce pour une vieille tradition familiale. Le brun ne pouvait-il pas lui aussi s'amuser, se marier, tromper sa femme, insulter les gens et se faire ensuite casser la gueule ? Et ça il semblait le reprocher au blond.

Orian avait déjà tenté de le libérer, lorsqu'il avait enfin compris pourquoi ce jeune homme le suivait tout le temps, plus ou moins discrètement d'ailleurs, il l'avait attrapé contre un mur et lui avait ordonné de partir et de ne plus se préoccuper de lui, il avait même mimé de se donner la mort pour mettre Nigel face à ses contradictions. Nigel avait fini sans trop de peine à le désarmer vu qu'il était saoul comme jamais.


Tu n'as jamais voulu être libre ? Fonder une famille ? Je sais pas faire quelque chose de ta vie. Autre que de me saouler à me surveiller tout le temps ? De toute façon tu es bientôt libre.

Il était tenté de reprendre son carnet pour y inscrire une nouvelle idée. "Il y a des gens que l'on aime détester, je crois que Nigel en fait partie. Je passe mon temps à le rejeter et à me plaindre de lui mais je reste certain que s'il partait il finirait par me manquer." Mais il serait vraiment impoli d'écrire dans un carnet lorsque quelqu'un s’apprête à rentrer chez vous. Nigel allait une fois de plus tenter de l'empêcher de "vivre" sa vie comme il l'entendait, et il se retrouvait une nouvelle fois la corde au cou. Mais cette fois ci Orian ne comptait pas se laisser emmerder par ce brun de sous naissance.

[Avec du sang plein les orbites, et même du plastique sur la b*te je vais sûrement être recalé a l'examen du grand sage mais j'en profiterai quand même pour lui dire ce que j'en pense de l'existence, cette engeance, et s'il ne voit pas que je suis un ange alors qu'il change de boulot...
Et s'il veut , moi je prend sa place.]

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Nigel


Le brun enjambe la fenêtre et rentre dans la pièce une fois qu'Orian lui ouvrit pour le laisser venir. Ce réflexe de le laisser entrer était récent - le blond avait fini par comprendre que Nigel le suivrait toujours et arriverait toujours à se rapprocher de lui -, mais le brun était toujours autant étonné que son protégé s'y conforme. Il avait toujours cru qu'il combattrait toujours corps et âme le fait d'être protégé et qu'il passerait son temps à mettre des bâtons dans les roues de son protecteur. Mais parfois, il se laissait faire, comme cette fois. Était-ce deux neurones qui enfin se connectaient dans le vide encéphalique du jeune Sidjéno, ou une soudaine lumière divine qui l'éclairait soudain de sa grâce ? Nigel n'avait jamais osé poser la question.

Et à l'interrogation d'Orian, qu'il ne regarda pas quand il parla - il était surtout en train de se demander ce qui se tramait ici -, il répondit :


"Non."

Bien sûr que la réponse était négative. Le blond devait sûrement le savoir avant même de poser la question. Et il n'y avait pas besoin de justifier, tous deux savaient le pourquoi de la présence de Nigel dans cet endroit, à ce moment précis. Et puis, en paix, pour Orian... C'était un bien grand mot. Mais le Sidjéno avait une soudaine envie de discuter, et il essaya une nouvelle fois d'orienter le brun vers une autre voie que celle qu'il avait choisie depuis des années déjà. Les yeux noirs se posèrent dans les yeux bleus.

"Je n'ai pas besoin de fonder une famille, j'en ai déjà une, une que je sers. Et je suis libre. Libre de choisir ce que je veux pour ma vie, libre de jurer de te protéger. Tu serais déjà mort trente fois sans moi, et tu le sais."

A la remarque qu'il allait bientôt être libre, Nigel leva un sourcil, jaugeant Orian d'un air railleur.

"Que vas-tu encore faire ? Tu vas encore avaler toutes sortes de choses de manière à essayer de mourir de l'intérieur ? Tu vas encore participer à une bagarre ? Essayer de te tuer ?"

Il soupire, las.

"A quoi tout cela sert-il ? Tu ne remarquerais même pas ma présence si tu ne passais pas ta vie à essayer d'empoisonner celle des autres. Je devrais être invisible à tes yeux et je n'ai jamais été autant présent en personne dans ta vie. Je ne devrais même pas être là."

Il balaya la pièce d'un geste et regarda de nouveau Orian.

"Orian, j'ai juré de te garder en vie et je ne suis pas homme à revenir sur mes promesses. Et je n'ai pas juré que de te protéger. Ma vie..." Il hésita. "Ma vie dépend de la tienne."

Car le contrat n'était pas aussi simple qu'il l'avait laissé croire. Lorsqu'il avait prêté serment devant les armoiries familiales, lorsqu'il avait fait promesse de protéger Orian, il avait pensé au fait qu'un jour, peut-être, Orian mourrait. Et qu'à ce moment-là, il se verrait attribuer un autre protégé, un autre enfant, ou qui que ce soit d'autre. Mais non. June, assis dans l'ombre de la pièce où s'était fait le serment, s'était tout à coup levé et avait refusé cette clause. Il avait posé son regard de glace sur le jeune Nigel et lui avait ordonné de protéger Orian au péril de sa vie, et qu'à partir d'aujourd'hui, la vie d'Orian était la sienne. Autrement dit, si Orian mourrait, son protecteur devait, lui aussi, y laisser son dernier souffle. La raison de cela, Nigel ne l'avait apprise qu'après, et c'était Korai qui l'avait renseigné lors des batailles en Anjou : Orian était le fils du plus grand amour de June : Oufette. Et aussi la dernière oeuvre d'elle sur cette terre, elle qui semblait avoir disparu sans laisser de traces. Car par amour, June était prêt à aller loin, même s'il n'y gagnait rien. Par amour, le Sidjéno était prêt à tuer.
Orian
[Tous mes amis m'ont dit que c'était moi mon pire ennemi.
Je marche seul, avec plus personne à qui faire la gueule...]


Il n'y a plus d’intérêt à avaler quoi que ce soit, les promesses de Cerdanne sur sa boisson n'étaient que des paroles en l'air et je sais que je n'aurais plus jamais l'occasion d'en boire.

Orian observe le brun répondre à ses questions dans un silence presque religieux. Pourquoi fallait-il toujours qu'il vienne l'emmerder quand il avait besoin d'être seul. Nigel ne faisait que le ralentir et poser des obstacles le long du chemin vers la délivrance, mais le blond c'était juré de ne plus se laisser emmerder par des obstacles.

En effet tu ne devrais pas être là, tu ne respecte pas ton contrat alors dégage de mon bureau et laisse les choses se faire !

Les poings serrés Orian lui lance un regard de défis. Pourquoi avaient-ils à se subir pour les bonnes mœurs d'une famille qui n'en valait pas la peine ? Il avait du épouser une femme pour plaire à son père, bien sur Abondance n'était pas la pire femme du monde mais il ne pouvait s'empêcher de se demander ce qu'aurait été sa vie s'il avait eu l'occasion de faire ses propres choix ? Est-ce que Lindor serait devenu moins sauvage et une bonne épouse ? Est-ce qu'il serait resté au Berry détestant les Angevins comme tous ces benêts ?

Oh voyons ! Quel est ce chantage affectif ? Ce que tu oublis c'est que je me fiche de savoir si tu vis ou non. Alors maintenant hors de mon chemin !

Sur ses paroles il empoigne la dague à sa ceinture et la lance en direction de Nigel. S'il devait le tuer pour se tuer en toute tranquillité il n'hésiterait pas un seul instant. Orian était certes sur la corde raide mais il voyait une issue à tout cela, et elle finirait par être nouée à cette poutre au dessus de sa tête.
_________________
Nigel


Etant d'un naturel prudent, Nigel était resté à distance d'Orian. Devoir rester à distance de la personne que l'on est sensé protéger, quel paradoxe. Mais le blond n'était pas n'importe qui. De la boisson du Chardon au contrat - qu'il ne connaissait pourtant - pas du Sidjéno, le fils de June partait encore dans ses délires incompréhensibles pour la plupart des vivants. Et après s'être moqué de son Gardien, il ne laissa pas à Nigel le loisir de lui répondre et lui envoya sa dague, laquelle fut éviter de justesse par le destinataire. Ce dernier tourna la tête et regarda la lame se ficher dans un sac de toile posé là, puis revint sur Orian. Quitte à devoir se faire agresser, autant surveiller le blond pour pouvoir éviter les coups. Il serra les dents.

"Je ne te fais aucun chantage. Je sais bien que tu n'as pas de coeur, tu n'en as plus depuis longtemps. Tu en as eu il fut un temps, mais tu étais quelqu'un d'autre. Quant à moi, je fais ce que je dois faire, c'est tout."

Il obéissait sans faillir à son engagement, et ce jusqu'à ce qu'il en soit libéré, d'une manière ou d'une autre. June pouvait faire terminer cette mission. L'échec, aussi, même s'il n'osait pas y penser : cela voudrait dire qu'Orian serait mort, et il ne pourrait se le pardonner. Il savait combien la vie d'Orian, ce qu'il représentait et non pas le fils lui-même, était important pour son père.

"Bon. Donne-moi cette corde. Ca t'évitera de te pendre tout seul alors que tu dois encore avoir moins de sang que d'alcool dans le corps."

Il tendit la main, comme pour faire signe à son protégé de lui donner l'instrument de torture.
Orian
"Strange things did happen here
No stranger would it be
If we met at midnight
In the hanging tree."


Je n'ai pas de cœur en effet. Il ne me semble pas que l'on puisse vivre sans cœur, considère moi comme mort.
Ton contrat est fini, vas t'en !
Et ne joue pas à celui qui me connais, tu ne me connais pas et tu ne peux pas prétendre que j'ai été quelqu'un d'autre dans un autre temps !


Sans porter la moindre attention à la main tendu, Orian s’avança de l'autre coté du bureau et grimpa sur une chaise, il passe un bout de la corde par dessus une poutre et fit un bon gros nœud. Il se souvenait avoir apprit les nœuds marins sur un bateau normand lorsqu'il devait partir chez les Angloys avec Korai. La mer avait été très agitée et ces idiots de normands avaient pensé que c'était Korai qui portait malheur, car elle avait eu le toupet d'être une femme et rousse qui plus est ! Alors ils les avaient jetés par dessus bord, après cela Orian était tombés malade durant de longs mois et avait perdu tant de poids que son propre frère Nathan ne l'avait pas reconnu lorsqu'il était de retour au Berry.

J'imagine que tu ne dois pas voir cela dans ton contrat, ça ne ferait pas propre, tu pourrais être la lie de ta branche.
Est-il possible d'être considéré comme un raté par des ratés ?


Aussi étrange que cela puisse paraître, et d'ailleurs ça avait eu le mérite de dérouter le Sidjéno, Nigel ne faisait rien pour l'empêcher d'arriver à ses fins, il le regardait mains sur les hanches installer sa dernière provocation envers le monde. Les deux pieds sur la chaise et le nœud coulant ajusté Orian passa la corde autour de son propre cou, mais voilà le rêve ne pouvait pas durer éternellement les sourcils froncés Nigel lui fonça dessus pour interrompre son dernier voyage. Alors que le brun courait dans la direction du suicidaire ce dernier lui envoya un violent coup de pied au thorax, il retira la corde de son cou avant de sauter sur le brun.

Existera t-il un moment dans ma vie ou l'on me fichera la paix ? Il me semble t'avoir déjà demander de foutre le camp d'ici !
_________________
Nigel


Tout alla très vite. D'un ton mauvais, Orian lui répondit et s'affaira à finir ce qu'il avait commencé : accrocher sa corde à la poutre du plafond. Si, au début, Nigel crut que c'était une énième mauvaise plaisanterie de la part du Sidjéno pour le provoquer, la détermination qu'il avait pour cette tâche troubla le brun. Et s'il se trompait ? Orian avait-il réellement l'intention d'en finir ? En tant que son gardien, il devait l'empêcher de mourir. C'était relativement simple à mettre en oeuvre lorsqu'il s'agissait de protéger une personne d'une ou plusieurs autres. Mais rien n'avait été dit lors de son serment pour protéger Orian contre lui-même. Nigel hésita un instant, et se rappela la dernière parole de June.

"Tu protégeras la vie de mon fils au péril de la tienne, Gardien. Son existence est ton existence. La tienne ne perdurera que par la sienne. Il sera ton seul et unique protégé, ton alter ego ; et si tu dois mourir, c'est parce que tu seras mort en le protégeant, ou que tu devras te donner la mort pour avoir failli à ta mission. Tu seras son dernier rempart à abattre face à la mort."

Il s'était alors jeté sur Orian lorsque celui-ci s'était passé la corde au cou, et avait essuyé en retour un violent coup de pied dans la poitrine qui l'avait projeté à terre et lui avait coupé la respiration durant un court moment. Et, à son tour, le blond s'était jeté sur son Gardien en hurlant. Les yeux bruns apeurés du brun s'accrochèrent à ceux, bleus, fous, du blond. Et il lut l'évidence dans le regard du Sidjéno. Son heure, leur heure à tous les deux était arrivée. Orian allait le tuer, et se donner la mort ensuite. Nigel choisit de ne pas se débattre, pour éviter d'accélérer la chose. Il tremblait violemment, incapable de faire quoi que ce soit pour les sortir tous deux de là. La gorge nouée par la vision néfaste de la fin de son existence qui semblait arriver à grands pas, il se contenta de reprendre sa respiration et de chuchoter.

"J'ai promis..."

Il ferma les yeux un instant, et des larmes coulèrent lentement le long de ses tempes.

"... J'ai promis de te protéger au péril de ma vie. Si tu y passes, moi aussi."

Il rouvrit les yeux et regarda le blond.

"Je sais que tu n'as aucune pitié pour moi. Je ne te demanderai jamais d'en avoir, car je n'en veux pas. Et je sais aussi que tu avais raison. Je ne suis pas libre. Je suis lié à toi pour tout. Je n'ai même pas le droit de mourir librement. Je dois être mort en t'ayant protégé, ou me donner la mort si je n'ai pas réussi à te garder en vie. Ainsi est la seule règle que je dois suivre pour respecter le serment fait à ton père. Mais je promets que je n'ai jamais fait ça pour moi, ni pour lui. La seule chose que j'ai pu choisir dans ma vie, c'est d'accepter cette mission. Je voyais en toi le frère que je n'avais plus, le mien étant parti ; c'est pour cela que j'ai juré. J'ai espéré trouver en toi celui qui serait mon meilleur ami, mon double, sur le modèle de nos deux grands-pères. Mais j'ai eu tort. Tu étais déjà perdu depuis longtemps, à cause de ce que t'a fait subir ton père."

Une pause. Orian semblait l'écouter. Sans bouger davantage, il continua.

"Car oui, je peux jouer à celui qui te connaît. J'ai suivi la moindre minute de ton existence depuis des années, j'ai vu ta descente aux enfers, j'ai vu le jeune Orian Sidjéno partir de ce monde au profit de celui que tu es aujourd'hui. Tu veux te tuer aujourd'hui, mais tu es déjà mort, et tu le sais. Quant à moi..."

Ses yeux se fermèrent de nouveau, et il pleura en silence. Il n'était pas difficile de deviner le chemin à prendre pour le jeune Gardien. La mort ou la mort. Lorsqu'il rouvrit les yeux, une lueur de détermination semblait y vivre encore.

"Je suis aussi mort que toi. Condamné pour toujours à devoir calquer mon existence sur la tienne. Si je m'échappe, ils me retrouveront et me feront partir de ce monde dans les pires souffrances. Je n'ai pas assez de courage pour tenter l'exploit, car ce serait du suicide programmé. Et je n'ai pas assez de courage pour me tuer. Même pour toi, qui est pourtant l'unique raison de mon existence. La fuite elle-même ne serait pas la seule solution, car tu n'as plus rien à faire dans ce monde et, sans toi, moi non plus. Alors si ta décision est prise, et puisqu'elle semble l'être vraiment, cette fois, tue-moi. Je ne pourrai pas obéir à ton père en me donnant la mort si la tienne doit arriver. Et je ne veux pas jeter le déshonneur sur ma vie alors que je l'ai passée à remplir ma mission. Je ne veux pas que l'on dise que j'ai failli. Même si je n'ai ni femme ni enfants, je veux garder intact ce dernier pan de moi-même : mon honneur. Parce qu'à part toi, c'est tout ce qu'il me reste."
Orian
"Je serai pendu demain matin
Ma vie n'était pas faite
Pour les châteaux "



Orian n'avait pas prévu d'écouter les jérémiades de son adversaire, il lui assénât quelques coups de poings sans que ce dernier ne se défende, à vrai dire ça il s'y attendait. La famille lui avait fait promettre de le protéger alors ce n'était pas pour le frapper. Il était en colère, en colère après Nigel qui continuait de l'empêcher de vivre comme bon lui semblait, ou plutôt de mourir comme bon lui semblait. En colère contre June qui avait sans doute détruit la vie de ce jeune homme en lui faisant promettre de le protéger. Mais la meilleur protection dont Orian aurait eu besoin n'était pas celle là, pour le protéger il aurait fallu éliminer June. Quand celui qui tire les ficelles pour vous garder en vie est aussi celui qui vous détruit comment êtes vous censé faire ?
Son poing en l'air prêt à donner un nouveau coup resta suspendu, Orian était interpellé par les paroles de l'autre. Il resta quelques instant bête à le regarder.


Si tu avais voulut être mon ami tu aurais du venir me parler plutôt que de m'épier au loin comme un idiot.
Je me souviens de notre première rencontre, je venais d'arriver en Anjou, tu étais au campement avec Korai et tu disais être un Sidjéno, directement je t'ai provoqué, mais c'est ma façon à moi de montrer de l’intérêt pour quelqu'un !
Et toi non, tu es resté avec tes amis à me regarder de haut comme si tout le savoir vous étiez réservés ! Alors oui je ne suis plus qu'une ombre sans cœur ni pitié, c'est possible mais à qui la faute ?
Est-ce que tu sais seulement ce que ça fait que d'être rejeté ? Bien sur que non toi tu ne tente jamais tu reste en retrait sans jamais essayer de t'ouvrir !


Il fit une pause le temps de boire le contenu d'une bouteille posée non loin.

J'aurais bien eu besoin d'un ami comme toi lorsque Nathan montrait plus d’intérêt à la bête folle qu'était Zelgius qu'à moi ! Qu'il se donnait tant d'importance alors que merde il n'était qu'une pièce rapportée après moi !
Et pourquoi tu es allé te foutre dans une situation pareil ? Pourquoi avoir écouté June ? Quelle idiotie...
Et maintenant tu me demande de te tuer. Je te déteste, tu ne peux pas m'offrir un passé agréable et inatteignable et ensuite me demander de te tuer, je pourrais te tuer pour ça !


Ces derniers temps alors qu'il était décidé d'en finir tout semblait s'ouvrir enfin à lui. Alatariel lui avait parlé d'un projet qui aurait pu l’intéresser, mais bien sur qu'il l'intéressait, n'auraient-ils pu lui proposer cela il y a un an ou deux ? Il pourrait tuer pour cela, de chagrin mais il pourrait, il devait. Il fallait faire ça vite il ne voulait pas qu'il souffre mais il devait le faire ou Nigel devrait le faire lui même. Sans accorder un seul regarde à l'homme afin de ne pas faire marche arrière, le blond se saisit de la dague tombée au sol et d'un geste vif trancha la gorge de son cousin.

Je ne pense pas te rejoindre là haut, ma place est en enfer, mais si l'inverse se produit nous boirons les bières que nous n'avons pas su partager plus tôt.

Par la fenêtre les premières lueurs du jour semblaient chasser les étoiles. Orian était fatigué il lui semblait avoir vécu quatre vingts ans avec le poids du monde sur le épaules tendis qu'avec de léger glapissement Nigel se vidait de son sang sur les planches du bureau. Et ce n'est pas comme un homme neuf comme il se l'était imaginé qu'il se dirigea vers la corde mais comme un condamné.
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Nigel


Il écouta son protégé. C'est vrai, ça : pourquoi avait-il accepté cette dure mission qu'était la sienne ? Il ne le savait pas vraiment. Peut-être était-ce par le respect de la tradition, tout simplement. Ou peut-être que le départ de son frère, fuyant son destin de Gardien la veille de la cérémonie de son propre serment, ne l'avait pas aidé à y échapper aussi. Elios aurait du protéger Nathan comme Nigel protégeait Orian, mais il en avait décidé autrement. Il n'aspirait qu'à la liberté, celle de choisir son destin et même, en allant plus loin, son propre nom. Alors, lorsque l'ombre avait pris la place du destin de son frère, les regards des Loups s'étaient tournés vers lui, et il avait pris la responsabilité de rétablir l'honneur de la fratrie en prenant son rôle à coeur. Le cadet rétablirait l'équilibre que son aîné avait voulu détruire. Peut-être encore était-ce cette envie si forte d'une amitié fusionnelle avec son protégé comme avait pu l'être la relation entre leurs deux grands-pères ; à défaut d'un frère présent, uni avec lui envers et contre tout, il aurait un autre compagnon de route. Enfin, c'était probablement tout cela à la fois. Il n'y avait pas à choisir. C'était son destin, alors il l'avait suivi.

Orian s'arrêta un instant pour boire le contenu d'une bouteille que le brun devina être de l'alcool fort. Nigel suivit ses gestes du regard. Depuis plusieurs mois, il avait remarqué que le blond buvait beaucoup. Lorsque ce dernier revint à lui, les yeux noirs se plongèrent à nouveau dans les bleus, et il continua de l'écouter. Malgré lui, il sourit, amusé, lorsque le Sidjéno menaça de le tuer pour lui avoir demander de le faire. Nonobstant sa lente et progressive descente aux enfers, il avait su garder ce sens de l'humour narquois, ironisant sur les épreuves de la vie. Un trait qu'il avait, sans jamais le vouloir, hérité de son foutu paternel : June, éternel sarcastique, savait manier les mots et les tourner à son avantage.

Puis, ce fut l'adieu. Rien de solennel, rien de très enviable, à vrai dire. Mais, au moins, le dernier souffle du jeune garçon s'était échappé de lèvres souriantes. Nigel regarda une dernière fois Orian lorsque celui-ci se saisit de la dague puis, pour éviter au blond comme à lui-même un dernier regard échangé qui pourrait les faire douter tous deux du bien-fondé de leur décision, il tourna la tête et regarda, par la vitre, les dernières lueurs du jour qui partaient vers une nouvelle journée. Puis, ce fut la fin. La faible lumière tenta de le happer, l'emportant lui aussi vers un nouveau jour qu'il espérait meilleur. Paradis ou enfer, s'il existaient, quel intérêt ? Le meilleur choix était de continuer sa mission jusque dans l'au-delà, et il espérait secrètement que son âme accompagnerait pour toujours celle d'Orian.

Le sang des Sidjéno coulait ce soir, sur le pavé d'une salle du château du Lude, colorant d'un carmin éteint les joints entre les dalles de pierre. Après avoir donné la mort au brun, le blond s'était dirigé vers la corde pour obtenir la même sentence, laissant choir le corps de son Gardien sans plus de cérémonie. Nigel s'éteignait ainsi peu à peu, emporté par une douce leur, oubliant le reste du monde. Et alors que sa tête était tournée vers la fenêtre où venait s'accrocher la brume, ses yeux restèrent à jamais fixés sur la lune.
Orian
" Je suis mort qui, qui dit mieux
J'ai perdu mon âme en chemin
Qui qui la retrouve la jette aux chiens "


Les deux pieds étaient sur la chaise et la corde autour du cou. Cette journée avait sans doute été la plus longue de son existence. Plus longue encore que les journées de guerres passées à se battre ou a ramassé les blessés, ou les deux. D'ailleurs ils étaient en pleine guerre en ce moment mais Orian avait été blessé quelques jours plus tôt il n'était plus bon à grand chose, et ce soir là avant de repartir vers le Lude il avait eu le temps de croiser Rosalinde qui était venue avec les français envahir l'Anjou. Rosalinde il ne l'avait pas aimée la première fois qu'il l'avait rencontrée, et maintenant il prenait un plaisir malsain à lui faire honte devant ses amis parisiens en l'appelant "mère". Ce soir là les jugements n'avaient pas tarder à fuser : "tu es mariée avec un berrichon qui a un fils angevin ?!". Ce plaisir de foutre la merde risquait de lui manquer, mais qui sait ? Peut être à la surprise générale finirait-il au paradis pour continuer d'embrouiller dieu le père d'une façon plus directe.

Les pieds basculent et font tomber la chaise.

La mort n'avait pas été soudaine comme il l'avait imaginée ou vu les fois ou il avait participé à des pendaisons, en effet la chute n'était pas assez franche pour lui rompre les vertèbres cervicales, aussi sa langue commença à sortir de sa bouche. Les personnes qui retrouveront son cadavre auront le plaisir de le voir une dernière fois leur tirer la langue, comme un dernier "je vous emmerde" et malgré la douleur intense de l’œdème et du manque d'oxygène un fin sourire se dessinât sur le visage du Sidjéno. La dernière expression qui resta figée sur son visage devenu bleuté à cause de la cyanose. Ces yeux bleu grand ouvert venait de perdre l'éclat de malice qui les teintait accompagné de se sourire narquois présent malgré la langue pendue.

Le silence venait d'être rompu au Lude par cette matinée d'hiver, à présent un grincement inquiétant se répétait depuis le bureau du Sidjéno tendis qu'une marre du sang de Nigel tentait d'emplir le parquet.

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Khaleb
La nuit commençait doucement à tomber. Il regardait la lune arriver peu à peu pour s'installer dans le ciel noir d'Angers. Il faisait froid, mais le temps était relativement sec, ce qui était agréable pour les campeurs bretons des Bonnets Rouges qui s'étaient installés là, autour de ce feu. Lui, assis sur une pierre, attendait que le temps passe. Pas qu'il s'ennuyait, non, mais il avait un rendez-vous qui devait se dérouler discrètement, et l'obscurité était donc une très bonne chose pour cela. En attendant que l'heure arrive, il relut à la lueur des flammes l'une des nombreuses lettres qu'il gardait dans sa sacoche.

Nigel a écrit:

    Frère,

    Je ne sais pas si cette lettre te trouvera un jour, mais si, par miracle, tu poses tes yeux sur ces lignes, alors j'en serai heureux.

    Je sais que tu es parti depuis longtemps, malgré toi. Je voulais que tu saches que, contrairement à toi, je n'ai pas abandonné mes obligations. Voilà plusieurs années que je suis le Gardien d'Orian, le frère de Nathan. Jusque là, ça s'est toujours bien passé, malgré qu'il semble ne pas m'apprécier depuis qu'il a découvert mon existence et ma fonction. Il sait que je suis là en permanence, mais bon, il s'y fait, j'imagine. Ca fait longtemps qu'on ne s'est pas parlé, lui et moi, mais je remplis mon office. Je l'ai déjà sauvé de deux ou trois gros pétrins dans lesquels il a la bonne idée de se fourrer sans vraiment savoir comme il le fait. Ca a au moins le mérite de pimenter un peu mon existence. Mais je suis fier de servir les Sidjéno.

    J'espère que tu vas bien là où tu es. Et que tu n'es pas parti pour rien.

    Ton frère,
    Nigel

    1462


Bien sûr qu'il n'était pas parti pour rien. Il s'était échappé de ce schéma déjà arrêté que l'on faisait de sa vie : lui, le garde du corps, le discret, l'invisible ? C'était méconnaître le brun qui n'aimait pas franchement être mis à part. S'il ne se voyait pas comme un grand chef d'armée, il savait que son ascension militaire et sociale était sur la pente montante et ne saurait en redescendre. Et il avait bien l'intention de briller un jour par son travail ou sa fidélité.

Il savait que Nigel aimait cette mission, au fond de lui. Il l'avait quand même un peu choisie, tout de même, pour s'y donner autant ! Et tout cela pour ressembler au tandem si célèbre formé par leurs arrières-grands-pères : Kezan et Lykaos. Kezan, grand et large d'épaules, possédait une épaisse chevelure blonde tirant sur le blanc, une barbe bien fournie assortie et une paire d'yeux perçants donc le bleu jurait avec la pâleur de sa peau. Vêtu d'un élégant et confortable manteau de couleur ocre, qui avait l'air de très bonne facture, il marchait d'un air fier dans les rues où tout le monde s'écartait pour le laisser passer. Il avait l'assurance et l'arrogance d'un grand homme que tous respectent. Sa stature, sa façon de se mouvoir, de regarder les gens, tout en lui inspirait à la fois le respect et la crainte. Mais chacun qui le croisait savait parfaitement que l'homme était un faux honnête et un très - trop ? - habile marchand. Et si personne ne venait lui chercher des noises, c'était d'une part grâce à cette assurance affichée, et d'autre part à la présence d'un autre homme, tout aussi grand que lui. Vêtu de façon plus sombre, il était bien plus discret que celui qu'il accompagnait en permanence. La plupart des gens pensaient qu'il était un garde du corps engagé par Kezan et payé à prix d'or pour assurer sa survie à tout moment, mais le dénommé Lykaos était là de son plein gré.
Ceux qui déjà à l'époque connaissaient l'histoire de la famille Sidjéno savaient qu'il était là gratuitement et de son plein gré : la génération de Kezan et Lykaos avait remis au goût du jour la vieille et désuette tradition ancestrale. Car ces deux-là étaient frères : frères de sang, frères d'armes et de parole, frères en tout point, sauf que l'un était aussi blond que l'autre était brun. Cette coutume ancienne voulait que l'héritier du sang, de la première branche - dont était issu Kezan - devait être à tout pris protégé pour transmettre le sang afin que la famille jamais ne s'éteigne. Pour cela, les héritiers étaient protégés par les membres de la seconde branche - celle de Lykaos - dès leur plus jeune âge. On leur attribuait à chacun un Gardien proche de leur âge afin d'avoir une protection la plus durable possible.
Ainsi, chaque membre de la seconde branche - la branche "noire" - était formé par l'un de ses prédecesseurs pour protéger l'un des membres de la première branche - la branche "blanche" - et jurait de protéger l'autre. Lykaos avait ainsi juré de protéger pour toujours son frère au péril de sa propre existence, et il avait tenu parole. Et Nigel avait fait pareil, pour protéger Orian.

Le breton soupira. Il sortit de ses pensées et regarda la lune ; il n'était pas déjà temps d'y aller. Afin de patienter encore, il prit une autre lettre.


Nigel a écrit:

    Frère,

    J'espère que tout va bien pour toi. Ca va, la Bretagne ? Il paraît que c'est relativement calme, depuis quelques années, contrairement à l'Anjou qui ne cesse d'être en ébullition. Tu me disais que tu servais le Marquis de Dol, j'ai trouvé ça un peu ironique, je te l'avoue : tu pars d'une famille pour éviter de protéger quelqu'un et te voilà engagé pour en protéger un autre. Mais je sais ce que tu vas encore me dire : c'est ton choix propre, et puis ce n'est pas pareil, tu restes libre de partir. Mais quand même, je trouvais ça amusant. Mais je te l'accorde d'avance : effectivement, moi, je n'ai pas choisi.

    Il est vrai, je l'ai longtemps détesté. Car si je m'étais engagé à servir les Sidjéno, j'ai vu au début qu'on me donnait à protéger Orian, et je me demandais ce que je ferais, affublé d'un cornichon pareil. A l'époque, son père m'avait donné ma mission, et c'était à lui que j'avais donné mon allégeance. C'était June qui était sympathique, et Orian qui me semblait rude à vivre. Je l'ai longtemps surveillé à contrecœur, car je pensais que c'était simplement un idiot notoire qui ne valait pas le sang qui coulait dans ses veines. Il était mis en avant, chouchouté par Koraï, et moi j'étais jaloux. Jaloux de sa petite vie tranquille, de l'amour qui lui était porté ; je le voyais faire tout pour porter préjudice à son père, son père qui semblait faire tant pour lui. Mais je pense aujourd'hui que je m'étais trompé. Je m'étais mis le doigt dans l’œil, jusqu'au coude.

    Je ne sais pas si j'aurais préféré protéger Nathan, ou Wyllas, ou encore un autre Sidjéno. Ma vie aurait-elle été radicalement différente ? Peut-être. Je ne saurai jamais. Je n'ai pas l'impression que June a changé, simplement qu'il se révèle de jour en jour comme celui qu'il est vraiment. Orian, lui, a changé. Du blond timide, gentil, garnement, il est devenu un homme dur, sans pitié, avec ce regard glacial qui, dans l'obscurité, ferait presque croire à celui de son arrière-grand-père Kezan sur le portrait qui est dans la grande salle de la Maison Sidjéno. En fait, je crois qu'on a échangé nos façons d'être. J'ai appris à l'apprécier, et lui à me détester.

    Donne-moi de tes nouvelles.

    Ton frère,
    Nigel

    1463


Il sourit à l'évocation de la ressemblance de leur mission. En effet, cela impliquait de protéger quelqu'un. Mais si Nigel protégeait Orian, lui était plus au service armé de Lemerco, comme le ferait n'importe quel Chevalier pour son suzerain. Aussi, si c'était un peu comparable car tous deux avaient prêté serment, le breton n'allait pas être mis à mort s'il refusait ou abandonnait sa mission. Nigel si. Il se rappelait très bien des mots choisis depuis la nuit des temps pour le serment des Gardiens chez les Sidjéno. Et il revoyait les yeux de glace posés sur lui et cette voix suave qui lui ordonnait de protéger Nathan.

"Tu protégeras la vie de mon fils au péril de la tienne, Gardien. Son existence est ton existence. La tienne ne perdurera que par la sienne. Il sera ton seul et unique protégé, ton alter ego ; et si tu dois mourir, c'est parce que tu seras mort en le protégeant, ou que tu devras te donner la mort pour avoir failli à ta mission. Tu seras son dernier rempart à abattre face à la mort."

Ainsi, il avait ployé le genou et juré. Mais dans sa voix s'entendait ce refus évident de la sentence, et le chef de famille l'avait fait répéter trois fois jusqu'à paraître à peu près satisfait du serment du brun. Mais lui avait tout prévu pour la suite. Et aujourd'hui, il souriait encore de sa machiavélique débandade pour échapper à ce destin vicieux qui consistait à oublier sa propre vie pour protéger celle de quelqu'un d'autre. Une troisième lettre.

Nigel a écrit:

    Frère,

    Je m'inquiète pour Orian. Je sais ce que tu vas penser : d'habitude, dans mes lettres, je parle de la pluie et du beau temps, je dis où je suis allé. Mais justement : je ne vais plus nulle part, car Orian non plus. Il s'enferme dans son château en attendant quelque chose. Et vu comme il attend, je doute que ce soit les jours meilleurs qu'il espère voir arriver. Il ère d'une pièce à l'autre en buvant de l'alcool et en mangeant des plantes qui, j'imagine, doivent lui faire du bien à court terme et le contraire à long terme. J'ai choisi de ne plus me laisser voir pour l'instant ; il entre dans une colère noire à chaque fois qu'il entend un pas, qu'il voit une ombre. Il me déteste de plus en plus chaque jour, m'invectivant même quand je ne me montre pas.
    J'avoue ne pas savoir quoi faire. Il ne voit plus grand-monde. Qu'aurais-tu fait ?

    Ton frère,
    Nigel

    1464


Ce qu'il aurait fait ? Rien. Il s'était barré depuis bien longtemps de cette vie dont il n'aurait pas choisi le destin. Il avait ainsi évité de devoir se creuser la tête pour régler des problèmes qui n'étaient pas les siens. Le soir du serment, après avoir défié June du regard, il était parti se coucher. Mais, sous sa couche, tout était prêt. Son éternelle sacoche, remplie de ses maigres effets personnels, un manteau chaud, sa paire de bottes. Il avait payé l'un des jeunes palefreniers pour que celui-ci l'accompagne dans son périple. En pleine nuit, il était parvenu à sortir discrètement de sa chambre, avait rejoint les écuries de la Maison Sidjéno où l'attendait le jeune garçon, accompagné de deux vigoureuses montures déjà harnachées. Tout se déroulait comme prévu. Ils étaient tous deux montés sur leurs chevaux, et avaient galopé jusqu'au portail. Là, alors que le garçon l'attendait plus loin sur le chemin, il s'était retourné et avait pris un long instant pour admirer la grande et vieille dame de pierre qu'il quittait ce jour et pour toujours. Sa demeure familiale lui manquerait, mais elle serait bien la seule. Il avait simplement laissé un mot à son jeune frère Nigel, expliquant son départ malgré le refus de celui-ci de le suivre, et s'en était allé. Ainsi s'était fanée la maigre existence qu'il avait décidé de quitter. Il avait disparu.

Et il posa les yeux sur la dernière lettre. Un sourire se dessina sur les lèvres du breton, car demain matin il reverrait son frère. Il avait accepté l'invitation de Nigel.


Nigel a écrit:

    Frère,

    Je t'ai vu à Angers aujourd'hui. Tu m'avais dit que tu viendrais bientôt, mais je ne savais pas si on pourrait se voir. Orian ne quitte pas le Lude, et je ne peux quitter Orian, du coup ce n'est pas simple pour arriver à te voir. Je sais que les batailles vont être un peu en pause bientôt, les armées royales doivent aller reprendre des forces et vous allez être tranquilles deux ou trois jours. Viens donc au Lude me rendre visite, cela fait tant d'années que l'on ne s'est pas vus. Viens donc après-demain ; prends la direction du Lude, et retrouve moi à l'aube sous le grand hêtre près de l'entrée. Si je n'y suis pas pour diverses raisons, prends le chemin à droite de l'arbre, suis-le et tu trouveras la porte d'un tunnel qui mène jusqu'au château. Je te retrouverai là.

    J'ai hâte.

    Ton frère,
    Nigel

    1464


Il était temps d'y aller. Il rangea les lettres dans sa sacoche et se leva puis se dirigea vers la ville. A un des gars du camp qui lui demanda où il allait, il prétexta qu'il allait passer la soirée en charmante compagnie. L'autre sourit et lui tapa dans le dos en l'encourageant à prendre son pied et il lui sourit en retour. Arrivé à la ville, il retrouve un marchand de chevaux avec qui il avait rendez-vous et qui lui tendit les rênes d'un jeune hongre en échange d'une lourde bourse. Une fois juché sur sa monture, il prit la direction du Lude, le château indiqué par Nigel. Il en avait pour une certaine partie de la nuit, mais ils devaient se retrouver au petit matin près d'un grand hêtre.

Le voyage fait, il attacha son destrier à un arbre près d'un bosquet et se rendit discrètement à l'endroit indiqué. Il attendit quelques minutes, puis passa au plan B. Nigel avait écrit que s'il n'était pas sous le grand hêtre comme prévu, c'est qu'il serait à l'intérieur du château, et le Chevalier prit le chemin indiqué, passa la porte et suivit le tunnel jusqu'à arriver à une lourde porte de bois. Il écouta afin de savoir s'il y avait du bruit, et pensa qu'il n'avait vu personne jusque là, ce qui était vraiment étrange. Orian vivait-il vraiment comme un ermite, seulement accompagné par sa conscience et l'ombre de Nigel ? C'était étrange. Khaleb pinça les lèvres, embêté. Il espérait rester discret, mais comment pouvait-il l'être s'il ne savait pas où pouvaient être les éventuels observateurs de son passage dans le château ? Haussant les épaules, il décida d'improviser et poussa doucement le pan de bois qui grinça timidement. Jetant un oeil dans la pièce, il s'aperçut que c'était une cuisine. Vide, comme prévu. Il ouvrit complètement la porte et entra dans la pièce. Aucun bruit. Aucune odeur, si ce n'était celle du renfermé. Prudent, il traversa le lieu et se rendit à l'autre porte, ouverte celle-là, qui donnait sur une sorte de grande salle à manger, pourvue de décorations comme on pouvait se les imaginer dans un grand château de l'époque. Traversant encore cette pièce, il en découvrit d'autres, vides aussi de toute présence humaine ou animale, comme venant d'être abandonnées.

A force de découverte, il arriva devant un grand escalier de bois qui le menait dans les étages. Puisqu'il ne semblait rien y avoir au rez-de-chaussée, il se décida à poser un pied sur les marches grinçantes et, arrivé en haut, ouvrit la première porte.

Ce qu'il fit en premier ? Lever les yeux. Car si l'action - ou plutôt l'inaction - se passait aussi sur le plancher, le premier rôle était accroché par une corde à la poutre du plafond, laissant la vision de sa langue pendante aux yeux du monde et du brun venu rendre visite. Les yeux accrochés à la silhouette sombre du pendu, il reconnut avec peine les traits fatigués du visage, jusqu'à croire que c'était là le père, et non le fils. Il détailla le visage, les yeux bleus fatigués, vidés de toute vie, la peau pâle. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas vu Orian.


"Ainsi, tu as mis ton plan à exécution."

Car Nigel avait su lui faire sentir qu'Orian cherchait la mort. Et s'il n'arrivait pas toute seule, il était largement capable de se la donner. Voire de la donner à ceux qui se mettraient sur son passage. Et qui d'autre que son éternel Gardien pouvait se mettre entre le blond et la fin ? Le Chevalier tourna la tête, vit qu'un deuxième homme était là. Il ferma les yeux un instant, juste le temps de s'entendre dire la funeste sentence : il était arrivé trop tard. Son frère était parti. Il inspira longuement, humant au passage l'odeur désagréable des fins de vie, et s'approcha du corps laissé sur le sol. Posant un genou à terre, il regarda avec bienveillance les yeux éteints du Gardien, laissa son regard parcourir son visage, sa gorge blessée d'où s'écoulait avant un filet de sang séché. Il posa une main sur le front du Sidjéno, caressa tendrement la peau froide et laissa malgré lui s'échapper quelques larmes. Que pouvait-il faire, à présent, à part continuer son existence ? Son idée première de repartir d'ici avec son frère venait de s'éteindre et de se faire oublier.

"Je suis désolé."

Il fit une pause, comme si le cadavre allait se réveiller pour le regarder et l'écouter parler. Il continua de caresser avec douceur le front tout en reprenant la parole avec difficulté, la gorge serrée.

"... Je suis désolé de ne pas t'avoir pris avec moi il y a tant d'années maintenant. Tu avais refusé de me suivre, invoquant un utopique honneur familial. Vois ce qu'il t'a fait. Je sais aujourd'hui que j'aurais du te prendre avec moi par la force."

Il déglutit.

"Repose-toi, mon frère. Prends pour toi tout le temps que tu as donné pour lui depuis que tu as juré. Tu aurais mérité une vie meilleure."

Laissant là Nigel, il se releva et vit sur le bureau les lettres laissées par Orian. Laissant celle destinée à Abondance, il lut la lettre à June, et ne sait quoi en penser. Il la prend, et regarde autour de lui. Que faire, à présent, à part respecter la volonté d'Orian et de faire envoyer cette lettre à son père ?

Alors que rien ne semblait lui donner envie à ce moment précis, alors qu'il ne savait pas où aller à présent que sa résolution de sauver son frère était avortée, il trouva sur le sol, tombés du bureau, une plume, un flacon d'encre et un parchemin. Prenant le matériel, s'asseyant un instant sur le plancher, il écrivit à celui qu'il estimait être responsable de tous les malheurs du monde. A sa lettre, il joignit celle qu'Orian avait écrite pour son père. Prenant les deux parchemins, il se dirigea vers la porte et s'arrêta avant de mettre la main sur le pan de bois. Et il revit, un instant, ce moment où il s'était arrêté, puis retourné pour regarder une dernière fois la Maison Sidjéno. Mais cette fois, ce n'était pas la grande et fière dame de pierre qu'il regardait. C'était les mèches sombres de son frère qui s'étaient évanouies sur le plancher, sa main inerte laissée sur le sol. Il eut la même réaction qu'autrefois.


"A Dieu, mon frère."

Et il partit loin, donnant au passage à un messager d'Angers les lettres à destination de la maison Sidjéno.

Citation:

    June,

    Ton fils est mort. Mon frère est mort.

    Mais tandis que certains partent vers le destin que tu leur avais donné, tel un divin décideur, un autre qui avait un jour décidé de se soustraire à ton funeste projet est vivant. Plus que jamais.

    Une partie de moi s'en est allée il y a peu. Pleure donc ce lien qui vient de se recréer entre nous, alors qu'un pan de ton existence s'effondre à son tour.

    Un jour, la Mort te rappellera à tes obligations. Je me chargerai de lui prêter main forte.

    Ton éternel Antéchrist,
    Elios Sidjéno

    1464





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