Afficher le menu
Information and comments (0)

Info:
Unfortunately no additional information has been added for this RP.

[RP] Chateau de Brumes

Judicael.
[IL EST UN ENDROIT PERDU
IL EST UN ENDROIT TU SAIS
OU JE RECUEILLE EN PASSANT
MES DEUILS ET MES TOURMENTS
]

- Saez -




Il avait laissé sa dégaine de rengaine mal peignée, ses manières sans manières dans l'autre Paris. De Miracles, elle n'en faisait pas. Cette cour odieuse où il aimait se fondre, enivré de l'odeur de trépas. Du vin. Des puutes. De la crasse qui ternissait ses cheveux. Des courses poursuite dans les ruelles aux pavés déchaussés, les venelles escarpées, glissantes d'être trop sales, bruyantes d'être trop étroites. Une charogne. Miracles était telle, gonflée de mouches, dont la vie était plus grouillante morte qu'elle ne l'était vivante. Ce Paris déchu qui l'avait vu grandir, pousser, tordu.

Au filet d'eau claire d'une amie de bordel convertie en Marie, Judicael avait laissé ses cheveux carmins se faire laver par les douces mains aguerries . Si roux vif qu'ont les eut crus légués de la patte du Diable lui-même. Si ruisselants de crasse qu'ont eut pu croire qu'ils dégorgeaient d'hémoglobine. Un entrelacs de noeuds, nids à toute vermine, que la putain avait patiemment dénoués. Chantonnant pour elle-même un air triste à mourir. Les mains tremblantes du brigand s'étaient posées alors sur les siennes, en guise de tout merci, sa protection. Sa mauvaise réputation, pour éloigner d'elle mieux que personne les fous plus fous que lui voulant lui faire offense.

La jeune femme avait demandé:
" Où vas-tu ainsi Judicael? Beau et propre, de frais vêtu?"

"Nourrir mon âme" avait-il répondu. D'aucuns pensaient pourtant qu'il l'avait depuis longtemps vendue. Perdue. Egarée, sur son chemin de vie disloqué. Il avait traversé la seine, sa démarche lente racontait que personne ne l'attendait, comme un pied de nez à l'excitation qui en réalité rongeait son âme, l'étranglait d'insomnie. Menteuse. Les gants habillant la fébrilité des gestes. L'épaisseur des cuirs contrastant avec la douleur des muscles. Et sous le rouge des cheveux long, les idées noires, passant et repassant dans les engrenages de sa mémoire. Cael avait rendez-vous. Mais son état, pour la première fois, l'empêchait d'être cohérent. Ralentissant son pas, pesant, alors qu'il réclamait de courir.

Les affres du manque semblaient avoir pris possession de l'homme, réputé imperturbable. Quelques nuits à l'Opium en compagnie de la tentatrice Azur, trop de nuits à fumer, s'entrainer. Voilà que Cael était en passe de devenir dépendant. Quelle ironie, pour un tel animal. Si libre et si meneur. Etait-ce pour cela qu'il se rendait à Paris, à l'appel d'une autre succube? Au delà des tensions du corps, les tourments de l'âme eux ne prenaient-ils pas le dessus? Ou les seconds faisaient-ils naitre les premières? Sa gorge était sèche, ses yeux un peu cernés. Déambulant dans la ville, il ne se posait pas tant de questions.

Il n'avait pas répondu à sa dernière lettre. Piqué sans doute qu'elle ne daigne pas accepter de piquer ses cheveux de son présent. Qu'elle lui avait renvoyé, d'ailleurs. Joueur, goupil avait son égo. Rouquin avait ses limites. S'il ne daignait pas baiser toutes les femmes qu'il fréquentait, n'était-ce pas pour garder un certain idéal? Un certain gout de l'obsession ? Obtenir ce qu'il convoitait, y puisant la patience qu'il n'avait pour nulle autre chose. Gysèle semblait alors être aussi patiente que lui, puisqu'elle l'avait sommé de se manifester. Quelle était alors la nature de leur relation? Complexe, assurément. Gysèle lui plaisait lorsqu'elle était là. Physiquement palpable. Perceptible. Agrippable... Pourtant son esprit lui se tournait vers l'insaisissable. L'indéfinissable. Hel. Cette roide inaccessible qu'il n'arrivait ni ne voulait s'arracher de la tête, mauvaise épine. On connait la propension de l'homme à désirer ce qu'il ne peut obtenir...

Alors... Si Judicael se rendait à l'invitation de la rousse ce jour, ses raisons n'étaient pas forcément celles qu'elle imaginait. Grignoté par cette sensation nouvelle que les opiacées exacerbaient en lui, n'avait-il pas envie de vérifier qu'elle puisse être capable de lui faire oublier cette Hel des enfers, que sa mémoire ramenait sans cesse, comme un perpétuel ressac?

_________________

Viens jouer...
Gysele


Paris, sa puanteur, ses vices, ses nuits, ses folies. Je la fuis mais j’y reviens toujours. Je crois que je suis trop étroitement liée à elle pour la quitter définitivement. C’est après tout elle qui m’a éduquée, portée, façonnée. J’en connais beaucoup de recoins, j’ai dormi dans beaucoup de ses rues et j’ai baisé dans bien trop de ses murs pour que je puisse m’en détacher. Paris, ma toile. Moi, petit insecte parmi tant d’autres, prise au piège d’une capitale à deux faces. L’une est belle, pleine de faste, débordante de richesses, dégoulinante d’hypocrisie, un peu à l’image de l’Aphrodite où je travaille, où les masques et apparences comptent tellement que je me sens dédoublée après chaque nuit. Et l’autre… L’autre est laide, franche, dure et nauséabonde. L’autre, c’est mon nid, c’est dans ce Paris là que je suis née et dans celui-là que je mourrai certainement. Mère de nombreuses âmes perdues, la ville berce différentes étapes de ma vie, attentive au cheminement de son enfant ainsi qu’à ses écarts.

Ce soir, je ne travaille pas, car ce soir je le vois lui. Mère Paris sait bien de qui je parle. Elle a suivi le fil de mes pensées depuis quelques semaines déjà. Judicaël, insaisissable Pique qui me file entre les doigts à chaque rapprochement. Il m’échappe, je prends ça pour un défi, pas habituée à ce que l’on me dise « non ». Mais l’insolent roux ose tout. Jusqu’à ne pas daigner répondre à mon courrier. L’avais-je froissé en refusant son cadeau ? J’espère bien. Si je le vexe, c’est qu’il n’est pas si indifférent. Témoin de mes réflexions, la ville l’est depuis que le jeu a commencé. Elle, spectatrice passive de mes bêtises, servira de bulle où le retrouver. Car, fierté mise de côté, j’avais écrit à nouveau et cette fois j’imposais un lieu de rendez-vous.

Un bordel. Inutile de faire dans l’originalité, autant que nous soyons en terrain connu l’un comme l’autre. Et les lupanars ont l’avantage de permettre la discussion sans oreilles qui traînent. Celui du Saint-des-Seins n’est pas un lieu recommandable, la racaille s’y plait mais je connais le patron à qui j’ai rendu quelques services, aussi me laisse-t-il une alcôve discrète pour l’occasion. Je fais tomber la capuche de ma capeline et la retire en m’installant sur une banquette. Ici règne une chaleur presque étouffante, entre les feux de cheminé déjà lancés, les vapeurs d’alcool et les fumées diverses qui se mélangent dans l’air ambiant et font office de préliminaires pour les plus mijaurées. Je commande à boire et le temps qu’on vienne me servir, mon paquet de chanvre est déjà apparu dans mes mains ainsi que ma pipe à mes lèvres. Caël se fait attendre, très bien. Je ne suis pas de celles qui ne savent pas occuper leur temps.


* Oh Charlie Chéri - Brigitte

_________________
Judicael.
Judicael fit son entrée. Il avait trainé à la porte, discutant avec le portier de la clientèle, des habitués, de l'allure du bouge et des putains recommandées. Une manière de repousser l'élan qui l'attirait inextricablement. Le manque. Pas celui du stupre, mais celui des drogues qui commençaient à entériner leur union avec ce rouquin aux allures de bête nerveuse. Elle était dedans... Elle l'attendait. Les portiers étaient des entités bavardes, eux qui, forcés de rester seuls au dehors la plupart du temps ne parlaient qu'aux murs.

Et lui se voulait épeire sur la toile de Paris, mâle chasseur plutôt que chassé. Pourtant sérieusement en proie aux doutes quant à sa capacité de chasser autrement que par le mal, ce mal qui l'accablait. " Gysèle, donne moi ta main que je ne la prenne pas". C'est ce que répétait sans cesse, son allure droite et déterminée. Ses mains sous le cuir, cachant leurs convulsions. Son regard froid et vif, qui se posait sur les ombres hantant l'endroit. Dans sa poche , l'objet de contrariété. Les doigts dansaient à son contact, roulant, glissant. Elle l'attendait. N'était-ce pas une capacité dont il était dénué? Impatient d'obtenir, tout de suite, intensément...

On lui indiqua sans peine l'alcôve du rendez-vous, où il s'introduit sans un bruit, défaisant lui aussi son bliaud avant de s'assurer d'un coup d'oeil, enfin, que la puterelle qui patientait était bien celle qu'il connaissait. Dans la foulée, désinvolte, Brigand vint s'asseoir à son contact et en guise de salut délogea le pique à cheveux de sa poche.


- C'est un agrément de femme. Il appartenait à une noble d'Armagnac. Elle est morte pendant la prise de sa ville. Je l'ai offert à une ribaude, mais elle me l'a rendu. Ne reste que toi, personne n'en veut. Il t'irait bien, l'idée me plaît, tu me plais. Mets ça dans tes cheveux.


Bonjour... S'il te plait? Des opportunités dont il ne s'embarrassait pas.

la senestre s'empara de ces derniers, Les verts accrochèrent leur vis à vis, le geste lent, calme, ne souffrit d'aucune hésitation. Il intima à ce visage de s'approcher, jusqu'à ce que ses lèvres puissent embrasser les siennes. Jusqu'à ce que Gysèle, malgré elle, cède au voleur contrarié.

Refuser ses présents? Quel vilain affront. Lui qui en était si peu coutumier.

_________________

Viens jouer...
Gysele
Mon cœur s'accélère ou ralentit ? Est-ce la proximité du roux ou les bienfaits du chanvre qui jouent sur mon palpitant ? Je ne saurais le dire. Je ne regarde pas l'objet, je sais ce dont il est question et ses paroles m'arrachent un sourire. Une morte, moi la ribaude, un cadeau délaissé de tous, mais qui me revient comme un présent empoisonné qui vient peser dans mes mains comme si mon destin tout entier y reposait. Accepter ? Soit. L'objet est joli et même si je ne suis pas coquette, il donne un éclat intéressant dans ma crinière rousse. Je l'y loge d'une main, tandis qu'il se penche toujours plus près à m'en faire perdre le souffle. Ne pas céder non. Ne pas lui faire ce plaisir, puisqu'il aime tant me décontenancer, moi. Mais l'éclat de mes yeux indiquent clairement à mon vis-à-vis qu'il ne restera pas Maître de ce jeu sans que je tente au moins de le retourner. Les lèvres effleurées, mon minois se tourne très légèrement et la lippe, au lieu de répondre aux siennes, s'empare une nouvelle fois de la pipe et libèrent au visage masculin un nuage de fumée, avant de lui tendre la bouffarde.

    - Tiens, bonsoir à toi aussi.

Un fin sourire s'esquisse sur mon visage et je tends ma main libre pour effleurer la longue chevelure rousse du bout des doigts. La lueur des chandelles semble la rendre vivante, mouvante. Elle me fascine à chaque fois et si je la regarde un peu trop longtemps, je sais que je ne refuserai plus son baiser. Je me force donc à m'en décrocher pour m'adosser à un coussin. Cet homme là, c'est ma came, mon chanvre. Je ne réalise peut-être pas encore que j'ai besoin d'un peu de ses oui ou non pour me donner l'envie de me surpasser, de chercher plus loin les frontières encore.

    - Je ne te dis pas merci, je ne sais pas encore contre quoi j'ai accepté ce pic. Que demandes-tu ?

Voilà pourquoi je n'aime pas les cadeaux. Ils sous-entendent trop souvent une contrepartie et je ne m'embarrasse pas de suspense. Si Caël veut quelque chose de moi, il sait comment demander. Je profite qu'on nous rapporte une cruche de vin pour servir deux coupes et lui en tendre une. Chanvre, alcool. Il ne manque plus grand chose pour faire de cette soirée un moment réussi.
_________________
Judicael.
Elle a ce vilain regard, aiguisé, paraphrasé silencieux. Gysèle a cette expression qui annonce déjà ce qui va se passer. N-a-t-il pas le temps de ne prendre plus que la pulpe des lèvres carmines qu'elle se dérobe à son baiser comme une adolescente. Il se fige mollement, dédaignant la pipe. N'avait-il pas la sienne? N'était-ce pas le bon moment pour y fumer, d'ailleurs, face à tous les contre courants rencontrés? Calme et pas si éploré, il arque ses lèvres vers le sol dans une moue significative. Soit. Gysèle n'en finirait jamais de le contrer, la partie n'en était bien entendu que plus trépidante, mais ... Son état de nervosité latente revenait cogner à sa tempe. La nuée dont elle le baptisait attisait. Catalyseur d'humeur que la rousse aurait tort d'exacerber.

Et tandis qu'elle joue dans ses mèches rousses, brigand s'éloigne mentalement. Vers les opportunités qui lui sont offertes. Les doigts viennent déloger sa part et sa pipe, assurant rapidement à ses sens excités de quoi s'apaiser.

    Oh Gysèle... Laisse-moi arriver... Laisse moi décanter.


L'entrée d'une personne interrompt le fil de ses pensées à moudre, les verts en profitent pour se fixer en coin sur cette rousse qui mine de rien, aime à le secouer. Le vin est servi, mais cael, au lieu de saisir le godet lui préfère la cruche. Lui rendant ainsi la brise légère qu'elle a fait souffler sur ses lèvres, sans vouloir les effleurer. Son regard n'est pas sans reproches. Mais son sourire lui, temporise.


- Ce n'était qu'un présent. Rien de plus ni rien de moins que ce que je t'ai fait écrire. Que tu es belle aujourd'hui...



Et qu'avait-il écrit dejà? De bien l'ajuster, qu'il puisse venir le retirer la prochaine fois qu'il croiserai sa route. Il but à même le cruchon. Alcool salvateur. Voilà qui ne savait qu'échauffer ses sens d'une façon qui ne savait le contrarier... Judicael ne l'avouerait pas, mais après son récent passage à l'Opium où l'Owenra lui avait fait découvrir les joies douloureuses du poison, il avait passé trois jours et trois nuits à cauchemarder. Des nuits entrecoupées de réveils brusques, où la nausée venait lui retourner l'estomac. Un contrecoup terrible auquel le novice n'était pas préparé... Et auquel il avait répondu par d'autres poisons . Infini tourbillon.






________

Samael. : je n'aime pas te voir fumer ça. ça te change.
Judicael. : ça? C'est de la pisse de chat. ça me détend. Tu ne m'aimes pas détendu?
Samael. : non. ça vole ton âme.

________

_________________

Viens jouer...
Gysele
[ J'ai pris trop de drogue à la menthe
Moi la fille la plus décadente
Mais si je dis trop de conneries
Je veux bien me taire rien que pour te plaire
Pour te plaire
Je veux bien me taire
pour tes yeux verts, tes yeux verts
Je veux bien me taire*]


Mais je te laisse, Caël. Je ne compte pas te courir après toute ma vie. Même si j'ai ce petit quelque chose, cette curiosité malsaine qui me pousse vers toi encore et encore. Serait-ce de l'impatience que je trouve à ton regard ? Ou une pointe d'agacement ? Tu me trouves belle, oui, mais tu n'as pas daigné m'honorer jusqu'au bout ce soir là. Le chanvre aura eu raison de toi et à présent tu ne peux m'en vouloir d'être méfiante. Car tu sembles changé Judicaël. Un je ne sais quoi danse dans ton regard qui me ramène parfois à l'expression de ma propre mère. Un point sur lequel je ne mets pas encore le doigt mais qui me rappelle mes propres démons quand moi-même je consumais à l'excès lors de mes passes parisiennes.

Tu es calme, rouquin. Trop. J'observe ton manège sans détacher mes iris de toi et quand tu ignores la main qui te tend ton godet, j'esquisse un sourire amusé. A quel jeux jouons-nous ? Foutu ego qui nous pousse l'un comme l'autre à avoir le dernier mot, quitte à ne pas profiter, à ne pas savourer ce que nous pourrions nous offrir l'un l'autre. Tu es têtu Caël, mais tu as trouvé pire que toi, ou au moins ton égale. Je ramène ma pipe à mes lèvres et me détends d'une nouvelle bouffée, mes yeux se plissent quand la fumée envahit l'alcôve et que le serviteur referme les lourds rideaux derrière lui. Nous voilà seuls à nouveau et dans cet amas brumeux je scrute ta silhouette. D'une impulsion je me redresse dans les coussins, attentive. Qu'aurais-je à rajouter à tes propos ? Je verrai bien de mes propres yeux si rien n'est demandé et pour l'heure ce pic rassemble ma crinière courte de manière si serrée qu'il tire douloureusement quelques cheveux à chaque mouvement. Qu'importe, ça me rappellera qu'un cadeau peut-être doux et piquant à la fois, à ton image.

Le chanvre fait son effet, doucement mais sûrement. Déjà, je ressens moins le besoin de parler pour combler ce vide entre nous. Un long soupir s'échappe de mes lèvres et mon esprit s'égare un instant vers Samaël. Que devient-il ? Est-il heureux ? La dernière fois que je l'ai vu il était en piteux état et toi, Caël, tu étais au centre de ses tourments. Voyons si ce jumeau là sera plus bavard bien que j'ai quelques doutes à ce sujet.


    - Parle-moi de toi. Je sais que tu écris à Hel.

Oui parce que les coïncidences sont bien faites. J'ignore tout de ce que tu cherches à oublier avec moi, mais je connais celle qui ronge tes pensées sans le savoir. J'aspire au bec, après avoir bu une gorgée, suave mélange qui m'étire un sourire, car jusque là, tout est bien, tout est bon. Raconte-moi, brigand. Donne-moi un peu de matière sur toi au lieu de me filer entre les doigts aussi insaisissable que le vent, l'eau ou plutôt du sable, me laissant quelques grains dorés parfois, pour me donner l'impression que je n'ai pas juste perdu du temps à te découvrir.

*Mademoiselle K et Zazie - Me Taire Te Plaire -

_________________
Judicael.
Judicel a changé. Depuis Limoges. Depuis la rixe qui l'a vu mourir sur l'herbe fraiche. Depuis ce soir où pour sauver son frère de la mort, il a préféré danser avec elle. La suite ne la connait-on pas? Les nuits à trainer avec Vulpes, à apaiser les douleurs comme il pouvait. Avec les moyens du bord... Forts.

Alors oui, sa main est tremblante, sa gorge sèche et ses pensées abscondes. Parasitées. Mais à la seconde où il sent qu'elle cède un peu son attention ailleurs, sur ses cheveux, le jeune chien n'hésite pas à saisir cette opportunité de se créer une nouvelle addiction pour en chasser une autre. La chair de sa rousse. Cette parcelle tendre dans laquelle il n'a jamais vraiment planté de drapeau. La main vient caresser, pensive, la rondeur d'une épaule. Est-ce que même ce soir là dans l'intimité la plus totale, il ne l'avait pas possédée par esprit de contrariété? Où s'était-il réfugié dans une autre torpeur... Pour être spectateur de ces choses qui doivent se faire et se défaire sans qu'il n'ait le droit de les briser?

Bien vite, le cruchon est assiégé. Asséché. Judicael a la descente facile. Trop facile. Renard serait presque à ça de dénuder cette clavicule ... Jusqu'à la question qui fait tressaillir sa main et les tréfonds de ses pensées. Foutre... Il aurait presque sursauté. Presque. Quelle brutale introduction à leur tête à tête.


- Hel?

La mine se renfrogne. Le regard se rembrunit. Rousse apparait soudain plus dangereuse. Trop de mystère rend tout toujours dangereux. Se connaissent-elles? Comment sait-elle sa correspondance si secrète?
Il se redresse, soudain moins avachi. La pousse ducement du doigt. Le ton est suspicieux.


- Dis donc, Gysèle... Te voilà bien informée...


Il leur prépare une pipe nouvelle, réfléchissant à sa réponse. Voilà une conversation peu prudente. Parler d'une fille à une autre est toujours un terrain glissant. Judicael le sait bien. Il ne s'y aventure pas. Peu désireux de créer du drame, et surtout, toujours aussi enclin à oublier le spectre d'une Hel qui semble le suivre jusque dans les bordels parisiens ...


- Tu es fascinante. Tu invites souvent les hommes pour leur parler d'autres femmes?

Et de sourire, terminant d'une main virtuose une pipe nouvelle. Il vient l'embrasser doucement. Comme une capitulation. Comme un " Ne fais pas ça". Gysèle est après tout bien plus accueillante que la froide Hel. Ses lèvres bien plus douces. Et son corps moins mystérieux. Rassurante plus que de raison.



___________

Samael : Tu es détendu un peu... Et après tu changes... jusqu au moment où tu en reprends.
Judicael : Tu te fais des idées.
Samael : Non. C'est comme si nous étions trois.
Judicael : Elle n'est pas si monstrueuse.
Samael : Elle devient monstrueuse quand elle n'est plus là.
____________

_________________

Viens jouer...
Gysele
C'est ce qu'on appelle "faire mouche". Mais quel est donc ce mystère qui t'entoure Judicaël ? Ta simple réaction au prénom de la Blanche me fait comprendre que cette personne ne te laisse pas indifférent. Quelque soit ta curiosité au sujet de Hel, moi au fond, je me moque bien de tout ça, je cherchais juste à gratter un peu ta vie par la seule porte d'entrée que j'ai à disposition. Mais, bien sûr, tu détournes le sujet, t'empressant d'occuper tes mains à la préparation d'une autre pipe dont je ne rate rien. J'observe ses gestes et m'interroge. Étais-tu aussi consommateur la fois dernière ? Je sens pour ma part déjà les effets de l'alcool et du chanvre, un fin soupir filant à mes lèvres quand tu viens y poser les tiennes. Le sujet est détourné habilement, me voilà reléguée à la place de la femme qui fait des ragots sur sa concurrente. Ah si tu savais combien je me fous de ce que tu peux lui vouloir, Caël. Sauf si tu lui veux du mal, étrangement. J'apprécie cette femme et je ne tolérerai pas que toi, tu la blesses. Mais tu es loin d'imaginer le fil de mes pensées, persuadé que tu es, dans ton orgueil, que je puisse peut-être jalouser cette froide nordique.

    - Je n'invite jamais les hommes, ce sont eux qui m'invitent. Je fais... un petit écart à mes principes avec toi.

Mon sourire mutin revient se dessiner sur mon minois, ce sourire que je maîtrise depuis si longtemps qu'il vient presque naturellement habiller mon visage et l'égayer d'un rictus insolent. A mes lèvres pourtant, un goût de trop peu nécessite un deuxième baiser que je viens déposer aux tiennes, avec une faim que je ne réalisais pas si présente avant que tu ne m'embrasses. A moins que mes sens ne soient juste exacerbés par ce mélange fumette/boisson qui semble détacher toutes mes barrières. Et la pipe que tu prépares commence à me faire de l'oeil. Mon regard ne reste plus fixé à tes yeux et se tourne régulièrement vers l'objet qui, je le sais, pourrait me faire sombrer bien plus bas. Je résiste pourtant encore, connaissant que trop bien les affres d'une telle consommation. Je ME connais trop bien, sachant pertinemment que je ne serai pas raisonnable. Je réalise alors que c'est peut-être ça, la nouveauté chez toi. Le chanvre ne te suffit donc plus Judicaël et te voici prisonnier d'une toute autre drogue. Je m'écarte, plus pour échapper à la vue de ta nouvelle pipe que pour m'éloigner de toi et je reprends la mienne, plus sage que je replace à mes lèvres avec la ferme intention de m'y tenir. L'anthracite t'observe longuement. Je réalise alors que toi, je n'ai pas envie de te sauver, peut-être simplement parce que tu ne me donnes pas l'impression d'être en détresse. Tu es toujours si insondable que je suis souvent perdue sur la nature de notre relation. Existe-t-il seulement de l'amitié entre-nous ? Ou est-ce une simple attirance auto-destructrice qui nous pousse l'un vers l'autre ? Pulsion qui n'a rien de saine et dont j'ai la désagréable impression d'être celle qui en pâtit le plus. Tu vas tout me voler Brigand. Jusqu'à ma raison.

    - Ce n'est pas de femmes que je voulais parler, mais de toi.

- AM -
Dans quoi me suis-je encore fourrée.
- STRAM - Tu vas me faire du mal, je le sens et je fonce tête baissée.
- GRAM - C'est mon âme qui va y rester.


    -Donne-m'en un peu..


[Am-Stram-Gram
Pique et pique
Encore un gramme
Et j'perds ton âme *]


*L'Héroïne - Zazie

_________________
Judicael.
[Absorbé par une drogue absurde
J'pense qu'à fuir le monde
Sur les courbes, j'me réfugie
J'pense qu'au fond, j'ai peur d'être sobre*]



Les yeux sourient. Rare fait que seules les femmes ont l'honneur de saisir.

-Quel honneur... Un petit écart pour moi...

Répète-t-il. Il aime. Bien sûr qu'il aime. Il se mord la lèvre en venant contre elle, agrippant le tissus de ses vêtements, balayant du bout du museau le fil de la peau de Gysèle. Un baiser en appelle un autre, en quelques mots et en quelques gestes, la rousse l'a échauffé. Réchauffé. Réveillé.

Il boit encore, apaisé d'être là. Ainsi repu de ces plaisirs artificiels. Sa main a cessé de trembler. Voilà qu'il étend ses doigts qu'il laisse trainer sur les hanches de la rousse. Cael n'est pas qu'un introverti en démonstration de testostérone. Il sait être tendre parfois, et se laisser aller à quelques démonstrations d'affection. Est-ce l'ivresse qui facilite cela? Est-ce Gysèle? Un peu des deux sans doute. Gysèle est accessible. Gysèle est une putain. Et l'homme ne les connait que trop bien, pour ne saigner souvent ne vouloir qu'elles. Faciles, sans contreparties sentimentales. Né d'une putain sans une once de fibre maternelle, que pouvait-il faire de mieux que de rechercher en chacune d'elle ce qu'il n'avait jamais eu? Que pouvait-il de mieux que d'infliger à chacune d'elles, ce qu'il avait toujours connu?


- Toi tu veux parler de moi.

Le sourire s'agrandit, sans montrer pour autant les dents. Elles, objets usés jusqu'à la corde à leur âge le plus avancé. Vingt cinq années, tout au plus. Elles, utilisées jusqu'au dégout, jusqu'à ne plus savoir le gout salé des larmes, taries. Judicael aime les putain pour y ramener ses habitudes. Elles si rassurantes. Judicael n'aime pas se confronter à l'inconnu d'une femme qu'il désire sans pouvoir l'obtenir. Une de celle qui porte l'insoutenable part de mystère des femmes qui ne servent pas les hommes. Parce qu'il n'avait jamais connu que cela.

La torpeur de l'alcool. La facilité d'une putain. Un plaisir pour un autre. Deux plaisirs similaires. L'un pour l'autre, échappatoires. Oublier le froid et la faim de dehors, la violence en réponse à tous les besoins vitaux. Vivre ou survire? La problématique s'évanouissait instantanément lorsqu'il se perdait dans les substances les plus diverses, ou entre les cuisses d'une Gysèle.


- Viens plutôt contre moi. Là...

Voilà. Elle est belle Gysèle. Diable qu'elle est bonne. Elle panse les plaies mieux que la plus pieuse des nones. La pipe est portée à ses lèvres, plus fort que celle qu'elle a préparée. Les deux silhouettes se sont rapprochées, Judicael a fini par l'enlacer. Peut-être pour se retenir mutuellement? Pour s'éviter de tomber? Car l'alcool dans les cruchons diminue fortement, et l'alcôve s'est embrumée. Ne sont-ils pas bien là, dans leur monde anesthésié? Dans leur château de brumes...



Samael : C'est comme... tu sais ces gens qui doivent se rendre à tout prix à l'office.
Quand ils n'y vont pas ils sont mal, agressifs et pensent qu'un malheur va leur arriver.


Judicael durcit un peu son regard, adepte de sourde oreille.
Samael claque sa langue au palais, prend sa main et l'observe.
Judicael finit par sourire.


Judicael : Je vais bien. Ne t'en fais pas.


* Damso
_________________

Viens jouer...
Gysele
[L'armure de tes silences sous ma blessure se balance
Grandir avec l'absence d'une imposture qui danse
Mais pourtant dans mes gestes, il y a ton écho
Je te ressemble tant, je te ressemble trop ]


Quel jour sommes-nous ? Est-il tard ou bien tôt ? Mes paupières clignent, sur mes pupilles dilatées. L'anthracite est recouvert par l'onyx et je le pose sur toi, mon reflet masculin. Lovée contre ton corps, j'ai baissé les armes, je me fais ta putain, ta fille de tout, ta fille de rien, car c'est bien tout ce que je sais faire moi. Vous, les hommes, je vous connais par cœur, mais je ne sais rien de vous. Je sais faire vibrer vos braies, parfois faire battre vos cœurs, mais je ne sais pas donner autre chose que mon corps. Formatée par ma catin de mère, façonnée par les désirs des mâles, je n'ai pas d'identité. Je suis toutes les femmes, mais moi là dedans, qui suis-je ? Je veux mon frère, je veux l'épouser, est-ce seulement de l'amour ou de la possession ? Incapable de faire la différence entre le bien et le mal, je n'ai plus aucune limites et cette absence me laisse totalement paumée dans un monde bourré de principes et de règles.

Alanguie tout contre toi, je laisse traîner ma main sous ta chemise entrouverte. Quand l'ai-je délacée ? Était-ce avant ou après avoir ouvert mon corset ? Je laisse échapper un rire et me penche tout près de tes lèvres pour reprendre une bouffée à ta pipe. L'alcôve opacifiée par la fumée, j'y perds quelques pensées distraites, inspirant cet air vicié par tous les pores. La tête me tourne un peu et je me retiens à toi, mes lèvres jouant sur ta mâchoire comme pour mieux s'ancrer à une réalité dans ce décor vaporeux et instable. Ma tête est un vrai capharnaüm, une bouillie de pensées sans aucun sens qui m'oblige parfois à la secouer pour en chasser une idée oppressante. Un verre s'approche de ma bouche et je ne sais plus si c'est toi ou moi qui le tient, je sais juste que j'ai envie de partager ce vin que je viens distiller à ta lippe entrouverte.

Le temps file différemment, je suis à présent à l'opposé de toi. Que s'est-il passé ? J'agite mes doigts nerveusement les uns contre les autres, je les malmène, les tords un peu. Une sorte de silence s'est fait dans ma tête, assourdissant vide qui me semble trop bruyant et m'oblige à me recroqueviller. D'un saut dans le temps, avant ou après, je ne sais plus, mais je danse, je ris sur cette table qui me sert de piste et sur laquelle je te dévoile mes jambes en soulevant mes jupons. Tu t'es penché sur moi pour tirer sur ce pic, libérant à nouveau ma crinière que j'agite et décoiffe d'une main sensuelle. Aimes-tu ce que tu vois alors ? Puis, un clignement d'yeux m'étourdit à nouveau, je suis assise entre tes jambes, dos appuyé contre toi, te laissant me placer encore cette maudite pipe entre mes lèvres. Est-ce que je réalise seulement que tu me fais sombrer ?


[Je te reconnais dans chacun de mes poisons
Et dis-moi qu'est-ce que tu viens faire dans mes chansons ?
J'ai hérité de quelques lacunes en garçon
Je me fais mal comme le scorpion *]



* Mon intime étranger - Brigitte -

_________________
Judicael.
Une réalité, deux dimensions parralèles. Car ce que l'un ressent, l'autre le perçoit-il? Et ce que l'un s'imagine, l'autre le vit-il? Tout cela est-il réélement entrain de se passer? Ils sont ivres. Ils sont drogués. Leurs bouches sèches cherchent pourtant toujours à s'abreuver. Les doigts viennent jouer dans les mèches rousses, où le présent manque à l'appel. Il passe deux doigts trempés dans l'alcool sur les lèvres de la jeune femme, murmurant à son oreille.

- As-tu déjà aimé et souffert Gysèle ? As-tu déjà aimé la jouissance à en hurler de douleur ?


La main court sur le corps de la puterelle pour rejoindre la main où se tient comme une promesse le pic , qui change de propriétaire. Les lèvres se collent de nouveau à l'oreille alors que le bel objet, lentement, vient dénouer le corsage qui n'a été défait que dans les songes de la rousse. Le froid métallique qui la sortira de sa langueur, serpentant dans le creux de sa poitrine comme un collier peau à peau, doux et froid à la fois. Elle le veut. Depuis longtemps. Elle le désire et il le sait. Il 'aime cela. Même ses délires semblent aller au devant de ce que son corps réclame. La possession. Pleine et souveraine. La possession. Même pour une nuit. Libérer le terrible assouvissement. Posséder l'homme pour en saisir peut-être, les secrets. Ce jour, il s'est mis à pleuvoir sur Paris, et Judicael est un Maitre qui accepte de se donner.


- A moins que ça ne soit l'inverse, j'hésite encore entre te faire jouir ou souffrir, tu es si femme...


Les derniers mots sont éructés comme si le fait même d'évoquer la chose le répugnait. N'en joue-t-il pas ouvertement? Caresser les plus belles filles du royaume et ne daigner en posséder aucune? Et la main qui se presse sur la gorge, affirme terriblement que pourtant la manoeuvre est à sa portée. Les doigts de sa jumelle tirent le lacet du corsage comme on détisse une toile d'araignée, avec délicatesse, pour ne pas faire se croiser un filin qui viendrait enrayer le bel ouvrage... Et tout briser.

- Choisis Roussette, ou je choisis pour toi.

Et quel choix... Au moment où il se voit passer le lacet autour de sa gorge, à ce moment où il s'imagine entrain de la prendre, de la posséder, elle, la seule femme à avoir affirmé sa détermination à jouer sans faillir, alors dans les braies de laine grossière, il se sent à l'étroit. Et l'alcool ne le fait pas défaillir. Et le chanvre ne le fait pas s'avachir. Ho non... Là, contre elle, rien n'est moins assoupi qu'un désir immédiat.

- Vite.

Mâle l'a tirée de sa somnolence, remplaçant par le vif et brûlant la douce chaleur alcoolisée, ces vagues lentes, les paroles floues . La main qui délivre la poitrine ne souffre d'aucune hésitation, prenant son temps. Caressant l'éveil d'un désir latent depuis cette fois où ils s'étaient vus dans la foule, Si la gorge est pressée, l'empêchant de répondre, Gysèle semble dire oui avec la chair. Les prédateurs ne fondent pas toujours sur les plus belles proies, laissant l'admiration prendre le pas sur l'action. Aussi d'un adieu est fait un au revoir, pour qu'à la prochaine rencontre le temps ai sublimé l'intensité d'une attirance, la faim attisée un besoin charnel que le goût du défi et la peur de la facilité aura rendu plus extatique. Ils sont ivres. Est-ce l'ivresse qui rend leurs gestes plus magnétiques? Judicael aurait-il daigné jouer cette partie s'il avait été sobre, tremblant d'une toute autre faim? Quelle importance?

Les effleurements deviennent griffure cinglante, l'esprit seul est le Dieu des hommes... La chair seule, c'est la brute. La chair et l'esprit réunis sont l'homme, un dieu qui a des instincts de brute.

Il n’y a plus de bordel, il n’y en a jamais eu. Il y a leur environnement. Il y a une place, un éclat furtif sanglant, une fuite amusée, et un échange de regards. Il y a une catin qui donne son corps à un tueur. Ce qu'elle a réclamé, elle l'a obtenu. Cael capitulera bien lorsque les ongles de la jeune rousse viendront labourer son dos étonnamment vierge. Lorsqu'il prend le dessus, la tenant entre ses bras comme un piège à ours vient mettre fin à une longue cavale, le corps n'appelle qu'à la bestialité brute de l'étreinte. Quelques pans de tissus craquent sous la poigne renarde, alors que la bouche remonte vers le cou qui se tend, les dents viennent mordre dedans. Leur tête tourne peut-être un peu, d'ailleurs, les corps dégringolent au sol dans une chute lente autant qu'écrite d'avance.

Etre femme est une douleur. Devenir jeune fille fait mal. devenir amante fait mal. Devenir mère fait mal. Mais le plus intolérable, c'est d'être une femme qui n'a pas connu toutes ces douleurs.

Elles sont les seules vérités et il n'est pas si fou de ne chercher à les consoler. Ce qu'il désire, c'est que Gysèle quitte le bordel drapée dans sa cape comme pour se protéger d'une réalité qu'ils ont renié le temps de quelques heures. Humant contre le tissus qui recouvrira son nez l'odeur fauve de son amant fugace. Ce qu'il veut, c'est qu'elle chancelle encore de cet instant hors du temps et des règles, où il aura marqué sa chair de lui, balayant pour quelques heures les marques des autres.





_______________________________


Samael. : quand tu souffres, je ne peux rien manger,
j'ai les boyaux qui se tordent et je vomis. C'est ma punition.


Samael fronce les sourcils, concentré sur les lignes de la main.
Judicael regarde le feu sans dire un mot. Peut-être qu'il a raison.
Mais Cael n'est pas prêt à l'avouer.
Samael est bouffé par le remord, ça le rend encore plus fou que d'habitude.


Samael : Tu m'en veux?
Judicael : De quoi t'en voudrais-je?
Samael. : Je ne suis pas con. Je réfléchis et je déduis.
Tu as failli mourir. C'est moi qui aurais dû être battu.
Depuis que tu t'es réveillé tu es... Différent... Cassé..
Et tu fumes plus que de raison.


Judicael caresse les cheveux de son frère en fumant tranquillement sa pipe,
et d'un ton qui ne laisserait pas de place au doute au plus sceptique,
rassurant, il répond:


-Tout redeviendra comment avant bientôt. Tu verras.

_________________

Viens jouer...
Gysele
[Like fire beneath the ice
An inevitable demise
Standing on the edge jumping into hurt
Time and time again I will never learn *]


    Volutes de fumée, alcôve embrumée. Les gestes sont plus assurés chez l'un, plus flous chez l'autre. Les yeux se plissent, les sens s'exacerbent ou s'engourdissent. Corps s'abandonne à l'étreinte renarde et la raison a déjà quitté ces lieux. L'esprit sombre, recouvert par un voile noir épais.

Laisse-moi dormir, Caël. Tes mots sonnent à mes oreilles comme des paroles éloignées et incompréhensibles d'un cerveau endormi. Je ne comprends pas, quel est le sens de tout ceci. Est-ce si important au final ? Que sont ces questions que je n’assimile pas et auxquelles je ne réponds pas. Car si j'ai aimé, ce n'est pas à toi que je le dirai, si j'ai souffert, ce n'est pas à toi que je le confierai et si j'ai aimé cette jouissance, je crois que ma présence près de toi répond à ta question. Tu me fais mal Judicaël, mal de manque. Je manque de ton mal surtout. Droguée au danger que tu représentes, je me jette dans ta fosse où toi seul, serpent, tu me guettes.
Déshabille-moi, Caël. Effeuille mon corps, mon âme, tu n'auras pas mon cœur. En mode automatique, mon corps sait ce qu'il doit faire, même quand ma tête n'est plus présente. Judicaël, Maître. Tu l'as été dès que tu as posé ta main sur ma gorge cette nuit-là à Bordeaux. Sinon, pourquoi serai-je allée te retrouver. Mais ce pouvoir-là, tu le détiens parce que je veux bien te le donner. Es-tu conscient qu'un bourreau n'est rien sans le condamné ? Jouir ou souffrir là est ta question. Tu veux me faire mal, à moi, la fille de rien ? Qu'espères-tu tirer de cette douleur ? Que crois-tu me faire que je n'ai pas déjà subi par d'autres mains que les tiennes ? L'orgueil des hommes est incroyable en leur capacité de croire qu'ils feront mieux/pire que leurs congénères. Femme, je suis, c'est ainsi que j'ai attiré ton attention et aujourd'hui ça sonne à tes lèvres comme la pire des insultes. Mon cou gracile tombe aux mains renardes, j'ai perdu la notion du temps, de l'espace et celle du danger aussi.
Ne me réveille pas si vite, Caël. Tu me presses, m'oppresses, j'aime ça, cette soudaine faim que ces drogues te donnent et tant pis si demain tout s'oublie, tant pis si demain tu nies. Ce soir, tu veux de moi et ça me suffit à satisfaire une toute petite part de mon égo à moi. Je ne réponds pas puisque tu m'en empêches, jouant sur mon souffle comme un musicien sur son instrument. Je n'ai rien à perdre ce soir, même le souvenir vaporeux d'une Elise, d'un Louis-Marie, d'un Pierre, s'embrume dans le peu qu'il me reste de conscience.
Embrasse-moi, Caël. Tu t'abreuves à mes lèvres et j'ai faim de toi. Tu éveilles une ombre sous mes paupières, un frémissement sous ma peau, une contraction dans mon ventre. La chute est longue avant d'atteindre le sol, avant de prendre ma dose de toi comme je prends une dose de came. Et dans cette bulle cotonneuse où nos corps se mêlent, où mes cris s'estompent, le temps semble suspendu, diffracté, insensé.


    Battements effrénés d'un palpitant survolté. Gysèle cligne des yeux, déplie ses doigts agités. L’œil, incertain papillonne, découvre les plafonds de l'alcôve, ne la reconnaît pas. Où est-elle ? Une pulsation est manquée et un hoquet. Un corps est appuyé sur elle, un bras négligemment passé sur son ventre et une chevelure rousse éparpillée ci et là. Qui est-ce ? Mémoire vacille. Pensées passent à toute vitesse, la caboche cherche à rafistoler l'histoire. Elle étouffe. Lippe cherche son oxygène, s'ouvrant comme un poisson hors de l'eau. Les doigts tremblent, s'approchent d'une mèche rousse et de l'étirer pour l'observer. Elle reconnaît. Sama...Non ! Judicaël. Paupières s'abattent à plusieurs reprises et chassent le tourbillon d'images qui affluent. Main abandonne la mèche et tâtonne, cherche une pipe, un verre, quelque chose pour remettre de l'ordre dans le crâne dispersé. Les sons des autres alcôves sonnent comme dans de l'eau, amoindris, comme si les rideaux épais pouvaient couper le son. Il suffirait d'un rien pour que le voile auditif ne se rompe. Rousse fébrile se redresse, repousse le roux délicatement et vide une grande gorgée de vin comme si elle mourrait de soif. Sa bouche essuyée d'un revers de la main, elle attrape une pipe délaissée dans l'action, l'allume et tire. Une, deux, trois bouffées, les lèvres aspirent le poison avec hâte et l'ingère, l'inhale, l'absorbe. Le pouls ralentit, l'impatience s'apaise, les pensées semblent plus claires ou juste moins importantes. Un soupir et elle revient contre le corps délaissé, dextre possessive glisse sur le flanc brigand.

Ce que je veux, moi. C'est que tu continues de m'entraîner vers le fond...

[I know I’m dancing with the devil
Ain’t no chance of heaven
Going straight to hell
I know I’m dancing with the devil
Darken up my heaven
Brighten up my hell**]



*Comme le feu sous la glace
Une fin inévitable
Debout sur le bord, sauter vers la douleur

**Je sais que je danse avec le Diable
Aucun espoir de paradis
Je vais droit en Enfer
Je sais que je danse avec le Diable
J'assombris mon paradis
J'illumine mon enfer
Encore et encore, je n'apprendrai jamais

- Dancing With The Devil - Marina Kaye

_________________
See the RP information
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)