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RP - Le rêve d'une vie, c'est l'amour...

Fleur_des_pois
... Ou pas.

Le soleil brillait ce matin-là. Le vent ne soufflait pas, et l'atmosphère était étonnement douce pour une fin de Décembre. Les chalands se bousculaient devant les étals des marchands. Les porteurs d'eau passaient devant les fenêtres des résidents de la ville en braillant à qui mieux mieux. Les charrettes débordant de petits pains chauds occupaient la majeure partie des rues, obligeant les promeneurs à les contourner en grommelant. Les enfants couraient, les chevaux trottaient, les dames de la haute société relevaient le bas de leur robe bordée de fourrure pour ne les point salir...
Un matin parisien sous le soleil.

Gaia était d'humeur joyeuse. Le temps agréable et la foule compacte, tous ces éléments étaient bons pour les affaires. Ses petites mains baladeuses se chargeaient de soulager une ceinture tendue sous le poids d'une bourse bien remplie. Chantonnant un air gai, elle sautillait de place en place, sa robe verte toute neuve dansant autour de ses jambes protégées par des bas rayés d'écru et de marron. Sa longue chevelure laissée libre flottait sur ses épaules et dans son dos. Ravissant petit Lutin déambulant dans les rues de cette ville qui l'avait accueilli quelques six ans auparavant.

Délaissant les artères trop fréquentées, le pas gracieux de Fleur se posa sur le pavé d'une ruelle moins animée et plus sombre. La petite Fée ne se promenait pas sans raison. Elle se rendait chez l'Asiatique, son fournisseur de plantes orientales. Le gingembre allait bientôt manquer dans ses réserves.
Son regard se posa sur les deux seules autres personnes présentes à cet endroit. Deux hommes. Un blond à la mine attrayante, et un autre, hideux et qui ne devait pas avoir connu le savon depuis plusieurs mois. Ce dernier tentait visiblement de vendre quelque chose au premier. Il tendait des sortes de petites boules verdâtres, que l'Ortie reconnut comme étant du pavot. Elle s'approcha d'un bond léger, s'en saisit d'une, et l'examina attentivement.


Tu vends ça combien, le drôle ?
Trente écus la boule, m'dame.

Gaia afficha une moue de mépris, et rendit son bien au marchand.

C'est du vol, ton affaire. Ca ne vaut même pas dix écus. Se tournant vers le blond : Si t'achètes ça, mon vieux, tu seras le dernier des blaireaux.
T'es qui pour m'foutre en l'air ma vente ? s'emporta le vendeur en levant le poing, menaçant.

Un sourire amusé passa sur le visage parfait de la Fée. Répondant à la promesse de coups par une courbette ironique, la jeune fille planta son regard brun dans celui de son vis-à-vis.

Fleur-des-Pois, enchantée. Et moi, ajouta-t-elle à l'attention du chaland, je vends autre chose que de la saleté.

Sur un dernier salut, la sautillante brune s'éloignait déjà, reprenant sa chanson plus joyeusement que jamais.

Cendrillon - Tendre rêve
Niallan
Je rêve de femmes sauvages qui ne seraient qu’à moi.
Je rêve de retrouver mon meilleur pote et d’effacer les horreurs que j’ai pu balancer en apprenant son attirance pour les hommes.
Je rêve de revoir Léan et de la faire mienne.
Je rêve d’avoir assez de fric pour me noyer dedans.
J’ai besoin d’opium. J’ai toujours dit que je prenais cette saloperie uniquement parce que j’en avais envie, parce que ça me plaisait. Moi, Niallan, dépendant ? Non, pas possible. Et pourtant, c’est parce que je n’arrivais pas à pioncer sans ça que j’ai trainé ma compagne de voyage jusque dans la capitale. Bien évidemment, je suis fauché. Même pas dix écus. On m’a dit de me pointer chez un certain Asiatique, ce que j’ai fait. Sauf que le gars n’était pas là, à la place il y avait une espèce de loque humaine empestant… Non, l’odeur qu’il dégage n’est pas identifiable. C’est quoi ce mec ? Ça fait trois plombes qu’il me bassine avec sa marchandise. J’ai pas le blé pour payer et lui, il ne me fera pas crédit. Soupirant, je me tourne vers la porte dans l’espoir que l’Asiatique débarque enfin.

Et puis là, une femme. Des traits pas franchement asiatiques, plutôt italiens. Une vraie beauté. Le type continue à déblatérer sur les bienfaits de ses boules (comprenez les boules de pavot, hein) mais je ne l’écoute déjà plus. J’ai mieux à faire. Elle est tout ce que je recherche chez une femme. Brune, beau visage, courbes harmonieuses. Elle me plait, elle m’attire. Mais pas de la même façon que Léan. Elles sont diamétralement opposées et…rha merde ! La flemme de faire le tri dans mes émotions, surtout dans une telle séance de matage.

Et la voilà qui s’avance, merveilleux ! Je me prépare à prendre l’une de mes poses les plus avantageuses, le sourire qui va bien avec, la p’tite mèche sur le côté. Sauf qu’elle ne me regarde même pas, s’intéressant plus aux boules de notre homme. Non, non, toujours les boules de pavot, bande de pervers ! Sourcils froncés, j’attends qu’elle ait fini son inspection pour tenter ma chance et c’est là qu’elle m’épate. L’honnêteté piquée d’insolence ? J’adore. Surtout si elle est maniée par une sublime créature. Et si la sublime créature insolente s’y connait en plantes, je peux m’estimer comblé. Même si elle m’appelle « mon vieux » et sous-entend que je pourrai être « le dernier des blaireaux ».
Je me contente d’un sourire dans sa direction. En revanche, quand le Puant lève le poing je tique sérieusement. Frapper une femme c’est naz, ouais, ça fait partie des trucs qu’on m’a plus ou moins appris. Du coup, je me racle la gorge pour attirer l’attention de l’excité de la journée.

Ça va mon gars, pas la peine de te mettre en rogne. Ta vente était déjà foutue en l’air avant que…

Elle se présente, magnifique, je peux finir ma phrase comme il se doit.

…Fleur-des-Pois n’étale sa science.

Attendez une minute. Pause.
Fleur-des-Pois, j’ai déjà entendu ce nom. Est-ce que j’ai couché avec elle ? Un bref regard à sa silhouette suffit à m’offrir une réponse négative. Non, si je l’avais sautée je m’en souviendrai. Bordel mais c’est qui ? Je n’ai pas de famille, pas d’amies… En réalité c’est la référence à ses talents commerciaux qui me fait tilter. Fleur-des-Pois…l’Empoisonneuse !
Allez, un petit sprint parce qu’en ce moment on dirait que je me suis fixé pour objectif d’être le fumeur le plus sportif de tout le Royaume.

Eh attends !

Une fois à sa hauteur, je me fends d’un sourire amusé.

Navré de te couper en pleine chansonnette mais j’aimerai en savoir plus sur ce que tu as à vendre, Fleur-des-Pois l’Empoisonneuse…
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Fleur_des_pois
Il la rattrapa alors qu'elle était de retour dans la ruelle, partagée entre l'amusement et l'agacement. Il lui fallait trouver un autre fournisseur, celui-ci ne pouvant décemment plus convenir. Cependant, qu'il lui courut après lui arracha un sourire radieux. Il avait entendu parler d'elle, ce qui ne gâchait rien. La Fée lui jeta un regard malicieux, prenant soin au passage de noter qu'il était vraiment bel homme. Typiquement le genre avec qui elle aurait pu passer une nuit ou deux. Sauf qu'il rompit le charme lorsqu'il lui demanda plus amples informations sur ce qu'elle avait à vendre. S'il était bien une chose que Gaia s'était promis, c'était de n'entretenir aucune relation - charnelle du moins - avec un client. Cela apportait toujours son petit lot de contrariété, et rendait difficile les négociations, l'acheteur s'imaginant avoir payé en nature. Une règle s'était donc détachée de ces petites mésaventures : ne jamais mélanger travail et plaisir. Bien qu'elle trouvât du plaisir à travailler. Tout était dans la nuance.
Elle stoppa sa marche rapide et légère, et posa la main sur la porte d'une taverne.


Tu sembles savoir qui je suis, puisque tu m'appelles l'Empoisonneuse. Tu sais donc le principal. Après, si tu veux rentrer dans les détails... L'Ortie s'adossa contre le battant de bois, et plongea son regard espiègle dans l'azur des yeux de son interlocuteur. On peut toujours en discuter.

Poussant le vantail, le Lutin pénétra dans la pièce principale d'une taverne bondée. Se glissant souplement entre les consommateurs, elle finit par trouver une table de libre, en fond de salle et prêt d'une fenêtre plus ou moins propre. La fille de taverne eut à peine le temps d'arriver que déjà, l'Ortie commandait un pichet de vin et deux verres. Dandelion, ayant comme toujours suivi sa maîtresse dans chacun de ses déplacements, s'allongea sur les pieds de Gaia. Caressant tendrement son chien estropié, la Fée se redressa et posa les coudes sur la table sans plus de cérémonie.

Tout d'abord... Comment tu t'appelles ? Et ensuite... Je crois pouvoir affirmer sans trop m'avancer que ce que tu souhaites m'acheter... ce serait de l'opium ? Fumeur, donc. Dépendant ? Aucune importance. Tu sais le préparer toi-même ? Dis-moi tout, mon chou, et je te donnerai mon prix. Que tu auras intérêt à payer, puisqu'à cause de toi je dois me trouver un autre fournisseur de plantes asiatiques, j'ai horreur d'acheter de la médiocre qualité.

La commanda arriva, et Gaia emplit les deux godets de vin. Puis, se penchant en avant juste assez pour faire deviner encore un peu plus les rondeurs qui se cachaient sous son décolleté, Fleur ajouta d'une voix suave :

Alors, messire... que désires-tu ?

Questions à doubles interprétations ? Bien entendu.
Niallan
Une taverne ? Ça me va. J’aurais peut-être préféré un endroit plus tranquille mais l’Italienne a l’air de savoir où elle va. Le genre de femme déterminée que rien n’arrête. Sauf qu’elle n’entre pas, moui, juste devant la taverne pourquoi pas… Elle parle de détails, je m’apprête à en demander sauf qu’avant que j’ai eu le temps de parler fumette, la brunette pousse enfin la porte de la taverne. Ce qui me laisse comme un idiot avec la bouche ouverte façon carpe. Mais bon, passons. Je me suis lancé à sa poursuite alors je me dois d’assumer. Et puis, une entrevue avec cette femme ça doit être foutrement passionnant. Et donc, ça se mérite.
Entrant à sa suite, je prends quelques secondes pour observer les lieux. Pouah, trop de monde, ça me saoule déjà. Je n’ai pas le temps de soumettre à l’Empoisonneuse mon idée consistant à se tirer de ce bouge vite fait bien fait, madame étant déjà presque arrivée à destination. A ce propos, son aisance me fait légèrement tiquer. Ce n’est pas en partant à la recherche de plantes, aussi rares fussent-elles qu’on apprend à se mouvoir de la sorte. Elle n’est pas « juste » Fleur-des-Pois l’Empoisonneuse. Mercenaire ? Brigande ? Acrobate ? Pilleuse ?... Nan, pis sans déconner c’est quoi la bestiole qu’elle trimballe ? De un j’aime pas franchement les chiens, de deux je ne vois aucune utilité à celui-ci. M’enfin, maintenant que j’y suis… D’une façon beaucoup moins souple et gracieuse je me faufile entre les clients.

Pardon, excusez-moi, pardon… Pousse-toi.

Je la laisse commander sans sourciller. Pourtant, je crève d’envie de lui dire que je ne veux pas de vin, plutôt du whisky et que dans tous les cas, je ne comptais pas dépenser mes maigres écus restants en boisson. Très rapidement, elle se met à parler. Première question, premier début de réponse :

Nia…

En fait, j’ai comme l’impression qu’elle se fiche pas mal de mon prénom tout comme elle se fiche des réponses à ses autres questions. Elle les a déjà. Du coup, je croise les bras en attendant qu’elle ait fini de blablater toute seule. Même que j’évite de tirer la gueule au « mon chou », ce qui est assez étonnant. En effet, lorsque ma compagne de voyage s’était laissée aller à m’appeler « mon chéri » en plein ébats, ça m’avait…comment dire ? Refroidi.
Je profite du fait qu’elle serve les deux godets pour rebondir sur ses phrases précédentes.

Ouais, donc, je m’appelle Niallan et oui c’est de l’opium que je veux. Sachant que je sais le préparer depuis le temps… Pour ce qui est du prix, par contre, ça risque de coincer. Je n’ai même pas dix écus et avec ce vin commandé par tes soins, je n’en aurai peut-être plus du tout. Loin de moi l’idée de pleurnicher, hein, ça craint d’être pauvre mais j’ai toujours su me démmerder. J’empruntais sans jamais rembourser, du coup je crois qu’on appelle ça du vol. Mais on va pas s’arrêter sur les mots, pas vrai ?
Le seul problème c’est que je crois que toi, tu ne me feras pas crédit. Alors dis-moi, que veux-tu en échange de l’excellente qualité de tes marchandises ?

J’entame la descente du godet dans l’attente d’une réponse qui se traduit par une autre question. Et de rondeurs sacrément bien mises en valeur. Hahum. Ce que je désire, là, maintenant ?

Toi. Et ton opium.
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Fleur_des_pois
Ne t'inquiètes pas pour le vin. Personne n'aura besoin de débourser quoi que ce soit.

Un léger sourire amusé flotta sur le visage de la Fée. Elle trempa les lèvres dans le verre de vin, regrettant qu'il ne soit pas meilleur. Peut-être aurait-elle mieux fait de commander une liqueur. Rien ne valait ce qui était sucré.
Ainsi donc, songea-t-elle, il savait préparer lui-même son opium. Niallan... Preuve était faite qu'il était un consommateur régulier. Sans aucun doute dépendant. Voilà qui s'avérait intéressant. Terriblement intéressant pour elle.


Tu n'as pas d'argent... Aucune importance.

Le Lutin laissa planer un léger silence, le temps d'observer les alentours plus attentivement. Le lieu était bruyant, mais cela n'était pas si gênant. Elle pouvait s'en accommoder sans mal. Cela faciliterait même sa sortie. L'ennui, c'était qu'elle ne pouvait pas exhiber sa marchandise sans attirer tôt ou tard l'œil d'un importun. Cependant, il fallait bien apprendre à connaître le client, et un endroit tel que celui-ci était l'un dans l'autre, plutôt idéal.
Reportant finalement son regard sur Niallan, elle lui décocha un sourire quelque peu aguicheur avant de boire une nouvelle gorgée et de reposer son godet.


Tu ne peux pas me payer. Fâcheux, mais pas rédhibitoire. Ce qui est bien, avec moi... c'est que j'accepte toutes formes de paiements. Et l'une de mes spécialités... ce sont les dettes. Je te donne mon produit, mais tu me devras quelque chose. N'importe quoi, n'importe quand. Je décide où, quoi, comment, avec qui, pourquoi. J'ai une excellente mémoire et ceux qui ont trouvé plus malin de ne pas honorer leur dette envers moi sont actuellement en train de servir de repas aux vers de terre.

Les derniers mots furent prononcés dans un sourire. Le regard démentait toutefois la chaleur dudit sourire. Un regard froid, décidé. Le regard d'une empoisonneuse passée maître dans l'art de distiller la mort dans un verre de vin, au moment où ses victimes se croyaient hors de portée.
Sans plus de cérémonie, Gaia se leva. Il était temps de conclure cette affaire et de fournir la marchandise promise. Dandelion la suivant aussitôt, la Fée se glissa derrière le blond. Posant les mains sur ses épaules, elle se pencha vers lui, laissant ses doigts courir sur son torse, s'aventurant aux limites du raisonnable. La bouche à quelques millimètres de l'oreille de Niallan, la brune lui susurra d'une voix suave :


Tu dis me désirer ? Je crains cependant... être au-dessus de tes moyens. Bien au-dessus de tes moyens.

Ne s'embarrassant pas de gêne ni de pudeur, l'Ortie se pencha plus en avant et déposa ses lèvres sur celles de Niallan. Une esquisse de baiser qui promettait la possibilité de bien d'autres délices autrement plus brûlants que celui qu'elle lui offrait.

Je vais payer. Dirige-toi vers la sortie le plus tôt possible. Le spectacle n'attend pas.

L'abandonnant à son sort, Gaia se redressa tout à fait. Choisissant dans la foule l'homme qui lui parut le plus grand et le plus susceptible, elle lui tapota l'épaule en se haussant sur la pointe de ses petits pieds.

Eh, c'est vrai ce qu'il dit, l'autre gars, là-bas ? Elle désigna un homme au hasard dans la foule, l'un de ceux qui parvenait à combiner l'air rêveur et attentif. Il dit que t'as tripoté ta mère, que la seule fille que t'as vu toute nue c'était ta sœur quand elle avait trois ans, et que de toute façon, y'a rien du tout dans tes braies, que ça n'a jamais grandi parce que t'es malformé ?
Oh bordel ! EH ABRUTI ! Tu cherches les emmerdes ? T'viens d'les trouver, tête de blatte !

Le géant quitta la table où il déjeunait tranquillement, renversant tables et chaises sur son passage, pour aller trouver un parfait innocent qui ne pensait pas qu'il existât de plus grand plaisir au monde que de chanter les psaumes du Livre des Vertus en buvant du lait de chèvre.

Allez mon grand, fit Gaia en riant à l'adresse de Niallan. On sort !

Personne en effet - pas même me tavernier - n'aurait eut l'idée de lui demander de payer. Chacun désormais cognait sur son voisin, et il régnait une telle zizanie que deux personnes en moins ne se remarquaient pas. La porte fut ouverte à la volée tandis que résonnait dans la salle un « PAS MAMAN ! » des plus révélateurs.
La Fée sortit, riant toujours, et se mit à courir à toutes jambes vers les Halles, vérifiant de temps en temps que son client la suivait toujours. Direction l'auberge de la Mère Lablanche, mais peut-être avant pourraient-ils en profiter pour longer tranquillement les quais.
Niallan
Les surprises s’enchaînent, si bien que j’ai l’impression d’avoir fumé un peu trop et d’être parti dans l’un de mes trips. Dès le début, elle me fait froncer les sourcils. Et elle compte s’y prendre comment pour le vin si elle ne le paye pas ? S’enfuir, probablement. Un art que je maîtrise plus ou moins bien mais certainement pas dans la discrétion. Mais ça, ce n’est pas ce qui me fait le plus tiquer. Le « Tu n'as pas d'argent... Aucune importance. » manque de me faire m’étouffer avec le contenu de mon godet, ç’aurait été dommage, je le trouve pas si mal moi ce vin. J’ai du mal à la suivre : pas plus tard que tout à l’heure elle me dit que j’ai tout intérêt à payer et là elle se transforme en une jemenfoutiste. C’est quoi cette nana ?
Elle en vient à parler de la dette. Nous y voilà : voilà pourquoi il faudrait que je me barre et ce, pas plus tard que tout de suite. Voilà pour quelle raison il faudrait que je l’envoie promener et que je m’arrache sans débourser le moindre écu. Cette histoire je la sens pas du tout. La référence aux vers de terre me coupe l’envie de picoler, après tout, elle peut très bien avoir fait mettre je ne sais quel poison dans mon verre. Il faut que je me casse. Elle pourrait exiger n’importe quoi : la mort de quelqu’un que j’aime, ma propre mort, plus de fric que je ne pourrai jamais en avoir, un cobaye pour tester ses poisons… Ou pire, l’odieux : « ta dette est d’en avoir cent autres », dans ce cas de figure, c’est évidemment le fiasco total, l’horreur absolue. Oui, elle pourrait exiger tout ça et pourtant…

D’accord. Marché conclu.

Et la fin du godet d’être bue d’une traite.
Des fois j’ai envie de me foutre de grosses claques, là c’est carrément un coup d’épée que je voudrai. Niallan, j’ai nommé l’aimant à emmerdes et plans foireux vient encore de procéder à un plantage dans les règles de l’art. Malgré tout ça, je continue à sourire parce qu’elle va me le donner mon opium. La preuve : elle se lève. Assis devant elle, je m’attends à ce qu’elle me glisse discrètement la marchandise voulue sauf qu’encore une fois, elle me surprend. Ses mains, ces mêmes mains que j’avais envie de sentir sur mon corps s’y baladent justement. Je frissonne. Le visage de Léan s’impose à moi. C’est débile : elle est partie, je n’ai rien fait pour l’obliger à rester. Nous ne sommes même pas ensemble et pourtant j’ai l’impression de la tromper. Avant, même lorsque j’avais une compagne plus ou moins officielle, je ne me gênais pas pour aller voir ailleurs et tout ça, sans aucun remord. Là, c’est différent.

Cependant, je ne la repousse pas. Parce qu’elle m’attire mais aussi parce qu’elle vient de me lancer un défi : celui de lui montrer qu’elle est parfaitement dans mes moyens. J’ai mis en cloque la fille du Baron alors pour quelle fichue raison ne pourrai-je pas mettre une Empoisonneuse dans mon lit ? Cette même Empoisonneuse qui vient de m’embrasser après m’avoir clairement dit que je ne la méritais pas. C’est à n’y rien comprendre mais je m’en tape : quand elle me dit de me diriger vers la sortie, je m’exécute. Juste à temps pour découvrir ses talents de manipulatrice. Contre toute attente, j’éclate de rire et me lance dans une course folle pour rester sur les talons de cette brune aux mille facettes.
Elle semble ralentir au niveau des quais, aussi, j’accélère pour me retrouver à sa hauteur et l’arrêter à la volée, enlaçant sans aucune gêne sa taille. Légèrement essoufflé mais toujours hilare, j’admire les traits de son visage. Elle est vraiment jolie, je ne peux pas dire le contraire. Mais toujours aussi dangereuse. J’effleure de mon pouce son menton avec le petit sourire en coin qui va bien.

Dis-moi, Fleur, où as-tu appris tout ça… ?

Le pouce s’aventure jusqu’à la lippe inférieure sans que je ne me départisse de mon sourire.

Je parle de ton aptitude à te déplacer avec une aisance pas croyable et de celle à mener ton petit monde par le bout du nez. Plus tous tes autres talents que je n’ai pas encore découverts. Et ne me dis pas que c’est le métier d’Empoisonneuse qui confère tout ça, je ne te croirai pas.

Allez, surprends-moi encore une fois.
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Fleur_des_pois
Tell me what you want to hear
[...]
So I'm gonna give all my secrets away


Les quais offraient toujours une promenade agréable. Ce jour-là malgré le froid, il faisait beau, ce qui permettait d'admirer l'île de la Cité et les hautes tours de Nostre-Dame. Et s'il y avait moins de monde qu'à proximité des halles, les badauds se pressaient en nombre le long de la Seine. Qui n'appréciait pas le spectacle du fleuve serpentant au cœur de la ville, se scindant en deux autour de l'île, et se rejoignant un peu plus loin ? Lorsqu'elle était seule, Gaia aimait à se retrouver là. Elle admirait les reflets du soleil sur les eaux calmes. Ou les myriades de petits creux que formait la pluie qui s'y abattait.

Ce n'était pas l'heure d'admirer quoi que ce soit. Niallan venait de poser les mains sur sa taille, et de ce fait, il lui arracha un sourire espiègle. Le rapprochement inattendu ne la gênait pas, tout au contraire. La tactile petite Fée savait apprécier le contact du pouce du potentiel client sur sa joue. Les questions en revanche, s'approchaient dangereusement du domaine privé. Le halo de mystère la nimbant disparaitrait bientôt si elle se livrait. Et à qui Fleur s'était-elle jamais vraiment livrée, si ce n'était à Adryan ? Même à Tynop, elle n'avait pas dévoilé la moitié de qu'elle était, ou avait été.


Tu en poses, des questions, dis-moi. Tu es bien curieux, pour un simple acheteur d'opium.

Gaia se dégagea de son étreinte. Était-il ce qu'il prétendait ? Après tout, le royaume tout entier partait à la chasse à la sorcière aussi régulièrement que le rythme des saisons. Combien de femmes avaient ainsi été pendues ou brûlées, parce qu'on les jugeait comme fricotant avec le Sans-Nom ? Peut-être était-il parent d'une victime de l'un de ses poisons ? Peut-être venait-il se venger, tout comme elle s'était vengée de l'affront de Tynop ? Méfiance était mère de sûreté, prétendait-on.
Mais la prudence n'était pas amusante. Et l'Ortie aimait jouer. Elle s'éloigna de quelques pas, l'invitant à la suivre.


Quand on atterrit ici gamine, on apprend à se débrouiller, répondit-elle en souriant en coin. Ca fait six ans que je vis à Paris. Dont quatre à me débrouiller par mes propres moyens. J'ai simplement appris que dans la vie, il y a ceux qui mangent, ceux qui sont mangés, et ceux qui profitent des deux. Je suis de cette catégorie. Se faufiler entre les pièges à loups et les troupeaux d'agneaux ne s'apprend que par soi-même et lorsqu'on est livré à nos seules ressources.

Le Lutin lui décocha un petit sourire et quitta les quais pour s'enfoncer de nouveau dans une ruelle. S'il aspirait à la faire passer de vie à trépas, le mieux était encore de le mener à l'auberge de la Mère Lablanche. Sur son territoire. Elle serait alors pleinement maîtresse de la situation. Tout en le guidant à travers les rues et les venelles parisiennes, la Fée s'empara de sa main tout en poursuivant :

Et Fleur-des-Pois... Disons que ce n'est pas ainsi que m'ont baptisé mes parents, même si c'est par ce prénom que j'ai été appelé toute ma vie. On me connait aussi sous le nom de Gaia Corleone. Et en général, quand on allège les coffres des mairies, il vaut mieux savoir se déplacer rapidement et ne pas avoir de rochers dans les bottes. Nous y sommes.

Fleur poussa la porte d'une auberge d'apparence miteuse. Et si l'extérieur ne laissait pas présager une demeure royale, l'intérieur était encore plus effroyable. Il y faisait sombre, et la paille couvrant le sol était jonchée de détritus divers dont il valait mieux ignorer la provenance. Les nappes couvrant les quelques tables étaient raides de saletés et grises de n'avoir jamais été lavées. Les carreaux minuscules des fenêtres laissaient à peine filtrer la lumière sous l'épaisseur de graisse et de poussière conjuguées. Et pour compléter un tableau déjà fort peu reluisant, il y régnait une forte odeur de chou trop cuit.
Cela, encore, aurait pu aller, s'il n'y avait pas eu la propriétaire des lieux. Elle s'extirpa de son fauteuil mité en poussant un grognement étonné. Son visage à lui seul était repoussant. Ridée comme une vieille pomme, complètement édentée, ses cheveux blancs mousseux étaient maladroitement retenus par un fichu rougeâtre noué sous son menton en galoche. Sa robe usée était trouée aux coudes et aux ourlets, et de la poche du tablier qui autrefois avait dû être blanc, dépassait le manche d'une cuillère en bois.


Niallan, je te présente la Mère Lablanche, fit Fleur avec un sourire amusé. Et toi, poursuivit-elle à l'attention de la vieille femme, ne t'inquiète pas. C'est un client.

La présence de l'Ortie en ces lieux sinistres était des plus étrange. Ce n'était pas le plus bel endroit pour y loger une demoiselle au si beau visage, mais pour y abriter une empoisonneuse, cela convenait plutôt bien.
Sans attendre, la Fée escalada les escaliers. Parvenu au premier et unique étage, Gaia longea le couloir qui desservait cinq chambres. La sienne était la dernière. La poussant d'un coup d'épaule pour l'ouvrir, Gaia pénétra enfin dans la pièce.
Ici, point d'odeur de chou, mais celle des plantes, entêtantes, suspendues au-dessus de la fenêtre. Le lit était fait et couvert d'une courtepointe colorée. Le feu, dans l'âtre, se mourait, et l'Ortie y ajouta une bûche. Le chaudron était vide et posé dans un coin de la pièce. La table était couverte de plantes séchées, de racines, de feuilles et de sachets en toile. Un grimoire était ouvert en bout de tablée, ainsi qu'un herbier. Des rouleaux de parchemins trainaient un peu partout, et une plume de cygne trempait encore dans un pot d'encre violette.


Bien ! s'exclama Gaia en prenant place sur le banc. De l'opium. Très bien. Mais avant... La reconnaissance de dette, cela te va-t-il ? Tu as des questions ? Je t'en prie, assieds-toi ! Tu as soif, encore ? De la gnôle d'orties, ça te dit ?

Fleur tapota le banc, à sa gauche. Elle le voulait près de lui. Son sourire, moitié aguicheur, moitié espiègle, suffisait à l'inviter.

Pour ce qui est des autres talents dont tu faisais mention tout à l'heure... Il ne tient qu'à toi de les découvrir. Mais d'abord le marché. Donc. Toi, Niallan, reconnais me devoir une dette contre de l'opium que je te fournis dès maintenant.

Crachant dans la paume de sa main gauche, l'Ortie la tendit vers Niallan.

Affaire conclue ?


OneRepublic - Secrets
Dis-moi ce que tu as envie d'entendre
...
Alors je vais révéler tous mes secrets
Niallan
[I feel something so right
By doing the wrong thing*]



L’italienne n’était pas la seule à admirer la beauté des quais, j’aimais Paris. Toutes ses facettes. De la Cour des Miracles aux tours de Nostre-Dame ; des miséreux aux richissimes bourgeois. Il y avait tant à raconter ici, tant d’histoires qui s’étaient écrites. Des amants qui s’enlacent alors que d’autres se disent adieu. Des mercenaires qui côtoient des nobles véreux ou des prêtres puritains. C’est à Paris que Léan et moi nous nous étions séparés mais c’est aussi à Paris que j’avais retrouvé ma fille. Pour être franc, nombreux sont les moments importants de ma vie qui se sont déroulés ici. Et ça me fait sourire, me rendant peut-être un peu nostalgique aussi. Lorsque la brune du sud se dérobe à mon étreinte, j’esquisse un sourire amusé.

Fleur-des-pois, la femme qui a poussé tous les consommateurs d’une taverne à se taper dessus aurait-elle peur d’un simple acheteur d’opium ?

Mais non, elle n’a pas peur. Elle joue, imposant ses règles au gré de ses envies. Avec ce genre de femme, tu n’as pas le choix. Si tu veux avoir une chance de gagner, il faut que tu acceptes les règles et que tu essaies de les tourner à ton avantage. Ça tombe bien, j’aime jouer. C’est donc sans marquer le moindre temps d’hésitation que je la suis, écoutant avec attention son récit. Réel ou pas ? Aucune importance, ce que j’entends me plaît. Je ne risque pas de l’avouer mais j’aime les histoires, surtout celles qui impliquent une vie différente, hors normes.

Et t’est-il déjà arrivé de ne pas réussir à te faufiler ? La faute à un piège plus vicieux qu’un autre ou à un troupeau qui t’a donné envie de t’attarder ?

Nouveau sourire, espiègle. Elle est déjà partie et c’est en riant que je la rattrape. Une ruelle ? Vague froncement de sourcils. Si elle décidait de m’attaquer de manière frontale, il y aurait de grandes chances que je l’emporte mais si elle m’entrainait dans un piège, j’aurais peu de chances d’en réchapper. Contrairement à tous les hommes du Royaume, je ne suis pas une réplique Moyenâgeuse de Stallone et encore plus étrange : je n’ai jamais tué personne. Distribué quelques peignées, oui. Mais disons que ça s’est limité dans le pire des cas à quelques fractures. Faut dire que je n’ai jamais eu de réelles raisons de me battre, j’étais seul, pas possessif pour deux sous et trop accro à ma tranquillité pour m’embarquer dans des embrouilles qui n’étaient pas les miennes. Tout ça pour vous dire que si des types me tombent dessus, je ne ferai pas long feu. Et pourtant je continue d’avancer, esquissant un sourire amusé au contact de sa main dans la mienne.
Se laisser guider par une Empoisonneuse qui a peut-être décidé de vous faire tuer n’est pas une preuve de bon sens mais se laisser guider par une Empoisonneuse Corleonne est tout à fait irresponsable. Choix cornélien qui s’impose : faire comme si j’ignorais la lourde signification de ce nom de famille et lui fausser compagnie à la première occasion ou faire preuve d’imprudence quitte à jouer la carte de l’impudence ?

Corleone, ce nom qui fait trembler les bourgmestres du haut de leur mairie, hum oui, je l’ai déjà entendu. Mais dis-moi jolie Gaia, que fais-tu si loin des tiens ?

Je me désintéresse momentanément de la réponse en avisant la bâtisse. Houla. Tout à l’heure c’était déjà suspect mais là ça fait vraiment guet-apens. Me raclant la gorge, je fais seulement quelques pas dans l’auberge, prêt à dire à l’italienne que je renonce à mon opium. Et puis y’a un truc qui m’interpelle. La femme présente dans la pièce. Laide, carrément moche même ; l’amabilité n’a pas l’air de l’étouffer, pas plus que la gentillesse. Alors pourquoi ? Avec un nom de famille comme le sien, Gaia pouvait se permettre bien plus que ce bouge miteux aux odeurs écœurantes de chou. Mais il y avait quelque chose chez cette femme. Quelque chose d’envoutant, de délirant. Je ne dirai pas qu’elle est bizarre, non, juste délicieusement différente. C’est une pilleuse mais au lieu de se servir de la force brute, elle ruse. C’est une femme dangereuse mais ses menaces sont glissées avec une subtilité qui me laisse frémissant de peur et d’envie. Et puis, elle pourrait vivre dans une auberge luxueuse entourée de beaux mâles mais elle a choisi cette auberge-là. Avec une vieille édentée à la mine patibulaire et un chien à trois pattes.

Plus question de doute lorsque je la suis dans l’escalier, encore subjugué par ce dont je viens de me rendre compte. Cette femme est définitivement incroyable.
Une fois la porte poussée, je ne peux m’empêcher d’analyser les lieux. Cet endroit me plaisait autant que la locataire. Ici, personne ne devait venir la déranger. C’est pour ça qu’elle avait choisi cet endroit plutôt qu’un autre, c’était son Royaume. Son repaire à elle et, étrangement, l’idée que je viens d’y pénétrer m’arrache un sourire réjoui. Sourire qui s’élargit lorsqu’elle m’invite à m’asseoir à ses côtés, me proposant dans le même temps une boisson que je n’ai encore jamais eu l’occasion de goûter.

Va pour la gnôle d’orties, en espérant qu’elle ne conduise pas à une autre dette.

En parlant de dette, je n’ai aucune foutue idée de ce que peut bien signifier « reconnaissance de dette » mais la suite du marché, en revanche, est on ne peut plus claire. Un pacte par la bave ? Ma foi, ça peut le faire… Crachant à mon tour dans ma paume, je lui serre la main.

Affaire conclue.

Je n’aurais surement pas dit ça si je savais dans quoi j’étais en train de m’embarquer. Sauf que je ne le sais pas. Tiens, d’ailleurs, en parlant de savoir, ça pourrait être pas mal si…

Et tu as une idée de ce que tu vas exiger de moi ? Autant te prévenir tout de suite, si c’est un assassinat que tu envisages, je risque de ne pas être très brillant. Ou alors il faudra que tu m’enseignes tes talents avant.

Léger sourire en coin tandis que mes yeux brillent d’un amusement certain.

*OneRepublic - Counting Stars
Je me sens tellement bien
A ne pas me comporter comme il faut

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Fleur_des_pois
    You've never seem so tense, love
    I've never seen you fall so hard,
    Do you know where you are ?


Ce qu'elle faisait si loin des siens. Fleur avait momentanément remit la réponse à plus tard. Peut-être le temps qu'elle en trouve une ? Il y avait bien des raisons à son éloignement. La Fée ne s'était jamais vraiment posée la question. Agissant au gré de ses envies, elle allait où elle avait envie de se rendre. Enjoy, sa cousine, l'avait très bien compris. La seule façon de faire revenir Gaia auprès des Corleone n'était pas de l'y contraindre, mais d'attendre qu'elle le désire. Alors son implication ne s'en ferait que plus profonde. L'obliger à agir selon un désir qui n'était pas le sien la rendrait inattentive et insouciante. D'ailleurs, songea l'Ortie en fronçant légèrement les sourcils, le temps s'écoulait et Enjoy lui manquait chaque jour davantage. Il faudrait bien qu'un jour, elle quitte Paris pour arpenter les routes en sa compagnie.

Je suis peut-être fille de Corleone, mais je suis aussi fille des fées. Mais c'est une longue histoire, riche en rebondissements insolites, et je ne suis pas certaine que tu sois homme à écouter une femme parler sans tenter de la déshabiller au milieu de son récit. Léger clin d'œil doublé d'un sourire en coin. Et pour moi, les histoires sont sacrées. Donc le jour où tu seras prêt à m'entendre narrer mes folles aventures de jeunesse en gardant les mains dans tes poches, je me ferai un plaisir de tout te dire.

Il acceptait la gnôle, ce qui arracha un sourire ravi au Lutin. Bien entendu, elle passerait sous silence le fait que cet alcool était si fort qu'il servait aussi parfois à nettoyer les plaies, récurer les surfaces trop sales pour le simple savon noir, ou encore nettoyer à l'occasion des latrines à l'hygiène douteuse. Non, Gaia se contenta de se lever pour attraper sur une étagère une bouteille en verre coloré de rouge, en provenance immédiate de Murano, la célèbre île proche de Venise, réputée pour son travail extraordinaire sur le verre. Le contenu était préparé par les soins de Gaia, qui appréciait peu l'alcool, et presque uniquement celui-là. Attrapant au passage deux chopes en étain, elle les emplit toutes deux à moitié avant de donner la sienne à son invité. Gaia glissa un peu plus près de lui, jusqu'à ce que leurs cuisses se frôlent. La petite Fée était tactile, et aimait bien provoquer.

Ne t'en fais pas. Une dette à la fois. Ca, c'est gratuit.

Le Lutin trempa les lèvres dans le breuvage, grimaçant à peine sous l'effet de la brûlure. L'habitude conférait quelques privilèges.
La dette. De quelle manière pourrait-il bien l'honorer ? Gaia n'avait pas besoin de tester ses poisons pour le moment. Elle n'avait pas besoin qu'on lui vole quelque chose. Ni qu'il donne l'une de ses fioles à quelqu'un. Et puisqu'elle n'avait besoin de rien... De quoi avait-elle envie ?
Une large sourire étira les lèvres pleines de l'Empoisonneuse. Cela faisait longtemps qu'elle y songeait. Elle avait déjà un chien, en Dandelion. Elle avait une monture, avec son âne Colchique. Elle avait plusieurs lieux de résidence. Elle avait même un amant. Ce qui lui manquait maintenant, c'était...


Epouse-moi.

Gaia laissa planer les mots quelques secondes dans la pièce. Le temps qu'elle en savoure le sens, et qu'il en mesure l'ampleur.
Un époux. Oui, cela lui manquait. Un autre trophée à ajouter à sa collection hétéroclite d'objets bizarres. Elle possédait bien un caillou étrange, un coquillage rose, et un morceau de bois flotté rendu blanc par le sel. Elle avait aussi un chien estropié et un petit âne boiteux. Alors vraiment, pourquoi pas un mari ? Celui-ci ferait l'affaire. Beau, grand, drogué et alcoolique. Elle en ferait ce qu'elle voudrait.
Gaia retint un grand éclat de rire, trahi seulement par un frémissement de lèvres. Elle s'imaginait déjà, resplendissante dans sa robe de mariée. Pénétrant dans un édifice magnifique, unique, presque conçu pour elle. Nostre-Dame de Paris.


La seule façon dont tu peux payer ta dette, c'est en devenant mon époux. On se mariera à Nostre-Dame. Tu devras te vêtir de la plus belle façon. D'ailleurs, je viendrai avec toi, lorsque tu iras chez le tailleur. Je veux que tu sois parfait. Et en échange...

De nouveau, le Lutin se leva. Il ne lui fallut qu'une poignée de secondes pour se saisir de la marchandise. Déposant devant Niallan une huitaine de boules de pavot, Fleur plongea les yeux dans les siens.

N'oublies pas à qui tu vas te marier. Ceci n'est que l'avant goût d'un mariage qui pourrait t'être très, très profitable.

Et, d'un geste vague Gaia désigna le lit. Comme pour parachever son discours, pour mettre encore une cerise sur un gâteau qui en débordait déjà.

Toi et moi... Rien avant la nuit de noces, bien entendu.

Infernale, vous dites ? Ce n'était que le début.



Gives you hell - The All American Rejects
Tu n'as jamais semblé si tendue, mon amour
Je ne t'ai jamais vue tomber de si haut
Sais-tu où tu es ?
Niallan
Fille des fées… Le sourire qui étire mes lèvres est un mélange d’amusement et de curiosité. Captivante italienne, mystérieuse Empoisonneuse. Quant à moi Ennemi des fées, ou amoureux des fées ? Ou juste avide de découvrir quels sont les rebondissements qui font d’une fille de Corleone une fille des fées ? Elle ne me connaît pas. Si j’étais un peu plus nostalgique, je me mettrai à souhaiter que ma mère m’ait lu des histoires le soir avant de m’endormir. Mais les seules histoires que j’ai entendu sont celles qui se sont échappées des bouches désireuses la nuit et bavardes le matin. Je n’ai rien oublié des secrets confiés et de toutes ces petites anecdotes qui font une vie. Connais une personne et tu pourras la détruire. Est-ce que j’avais envie de détruire cette femme ? Non. Pas pour l’instant. Sourire en coin dont je suis le seul à connaître la signification et je m’attaque à la gnôle.

Ah ouais, quand même.

Etouffant un rire, je soulève la chope à hauteur d’yeux. Si ça se trouve elle a ajouté certaines de ses créations empoisonnées pour les tester. Haussant un sourcil, je la regarde. Elle boit. Alors si elle boit… Deux nouvelles gorgées qui m’arrachent moins la gorge que la première. Et c’est là qu’elle lâche une bombe. Je manque d’échapper mon godet, oubliant totalement le frôlement de cette cuisse qui, juste avant me donnait envie d’envoyer valser chope et opium le temps d’un corps à corps. Muet, je la regarde. Du genre « t’es sérieuse là ? ». Elle l’est tout à fait, sérieuse.
Elle a beau me laisser quelques secondes pour que la totalité des données atteigne mon cerveau enfumé, lorsqu’elle reprend la parole je suis toujours sous le choc. Je n’entends pas grand-chose de ce qui suit, retenant juste le fait qu’elle compte me trainer dans la plus grande église que je connaisse après m’avoir déguisé en parfait petit mari. Mari… Putain. C’est tellement bizarre ce mot. A la limite, je m’imaginais me marier dans une nuit d’ivresse pour rompre ce serment le lendemain mais c’est loin d’être ce qu’elle veut vraisemblablement. Elle veut un mariage de rêve. Pourquoi ? Une vengeance contre un amant qui l’a repoussée ? Un moyen de couvrir ses illicites métiers ? Et puis qu’est-ce que je viens foutre dans tout ça moi ?

Pourquoi moi ?

Le ton est étrangement neutre. Pas de peur, pas de déception, même pas une once de colère ou de dépit. Le céruléen s’accroche au brun dans l’attente d’une réponse. Comprendre même si ça ne sert plus à rien. Je la connais ma réponse. Je vais merder, encore. Mais au moins je saurai pourquoi.

Tu pourrais avoir tous les types que tu veux mais tu choisis celui qui ne peut se passer d’alcool et d’opium. Et qui, accessoirement n’est qu’un bâtard. Pas de terres, pas de nom. Pourquoi ?

Je ne lui parlerai pas de Léan, cette histoire n’appartient qu’à moi. Mais va quand même falloir que j’en parle à ma conscience qui demande un rendez-vous imminent. Le soir de son départ, je lui ai dit qu’on se retrouverait et que je l’attendrai. Oh, bien sûr, elle devait se douter qu’il y aurait d’autres femmes et il y en a eu d’autres. Mais que je me marie ? Moi, Niallan ? Si je la revois, je lui dis quoi ? « Eh salut, tu m’as manqué. D’ailleurs tu m’as tellement manqué que j’en ai épousé une autre. Mais ne t’en fais pas, c’est toi que j’aime. ». Je vais vraiment être ce genre de type ? Tromper, d’accord. Quoiqu’avec Léan j’aurais de gros remords. Mais me marier avec une autre femme, n’offrir à Léan que le statut de maîtresse ? Non. Elle allait en souffrir. Je pouvais toujours le lui cacher mais elle le découvrirait, ne serait-ce que parce que je n’arriverai pas à fermer ma gueule en la voyant me sourire.

Avec lenteur, je porte la chope à mes lèvres et la termine d’un coup. Est-ce que j’ai vraiment le choix ? J’ai dit oui pour la dette, la voilà ma dette. Et j’ai besoin d’opium comme j’ai besoin de respirer. Avoir la certitude de toujours en avoir, de me tirer des emmerdes dans lesquelles je me suis foutu… C’est peut-être ce qu’il y a de mieux à faire. Pour ma fille, mes filles. Ah oui parce que ça non plus je ne lui en ai pas parlé. Sur les deux, l’une n’est peut-être qu’une vaste plaisanterie puisque depuis cette lettre en décembre je n’ai pas eu de nouvelles mais l’autre était bien réelle. Lexi. Elle méritait mieux qu’un père qui passait son temps à fuir ses fournisseurs d’opium et à écumer les endroits glauques d’en l’espoir de planer pour pas trop cher. Ce mariage pouvait être une bonne idée et, définitivement, c’était une meilleure idée que celle de me faire empoisonner.
Il me fallait juste un peu de temps. Pour digérer ma nouvelle connerie.

Rien avant la nuit de noces, c’est noté.

De toute façon, je n’avais pas la tête à argumenter.
Portant les boulettes de pavot jusqu’à hauteur d’yeux, j’esquisse un mince sourire.

Ça te dit ?
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Fleur_des_pois
    They'll be the Kings of Hearts, and you're the Queen of Spades
    And we'll fight for you like we were your soldiers


La question était justifiée. Pourquoi lui ? Pourquoi Gaia irait-elle se perdre dans un mariage sans amour ? Ce n'était même pas un mariage d'intérêt. Cela n'aurait-il pas des accents de comédie ? Pourtant, la Fée était décidée. Ce serait lui, Niallan, le fils de personne, qui deviendrait son époux.
Par deux fois, Gaia s'était laissée séduire par les promesses de l'amour. Et tout cela n'avait été que mensonge, trahison, douleur, larmes. Le secret d'un mariage heureux résidait dans l'absence de sentiments. Tel était son opinion, désormais. Et la douceur des sentiments, le Lutin savait où la trouver. Accoudé derrière le bar de l'Aphrodite.
Cependant, un mariage sans amour ne justifiait pas un mariage sans intérêt. Qu'avait à lui apporter cet homme ? Il n'avait visiblement rien de l'homme épris qu'avait été Symon. N'exerçait pas cette inexplicable attraction que possédait Tynop. Et ne semblait pas avoir voyagé, ni avoir vécu milles aventures comme Adryan. Il avait tout de même quelque chose d'intéressant, pour elle. Il était dépendant.
Dépendant de l'opium, et visiblement de l'alcool. Et un homme dépendant était un homme maniable. Et Gaia avait toujours eu besoin d'exercer une emprise sur les gens.
Il semblait attendre une réponse, qui se faisait désirer. Fleur reposa sa chope, et répondit, sans le quitter des yeux :


Nous pourrions imaginer qu'en te voyant, j'ai tout de suite été séduite par ta prestance et ton charisme. Ou que je suis follement et irrémédiablement tombée amoureuse de toi en croisant ton regard. Ou que j'ai été touchée par ta naïveté, tout à l'heure devant ce marchand de saletés. Ou que j'ai trouvé en toi mon égal. L'Ortie se pencha un peu en avant, et poursuivit sur un ton de conspiratrice. Mais toi et moi, on sait que tout ça est faux, n'est-ce pas ?

La Fée se recula, un sourire mi amusé mi ironique sur les lèvres. Elle prit le temps de boire une nouvelle gorgée de gnôle, tout en l'observant. Il était bien révolu, le temps où elle se cachait dans les grottes. Terminée, l'époque où elle se laissait guider par l'amour qu'elle pouvait ressentir. Elle avait appris de ses erreurs. Et surtout, l'Ortie s'était souvenue de qui elle était. Gaia Corleone. Fleur-des-Pois. Fille de mercenaires sans scrupule, et de fées malignes. Désormais, le temps était venu de se comporter comme elle n'aurait jamais dû cessé de le faire. « Ecrase ton prochain avant qu'il ne t'écrase. » Ne lui avait-on pas appris cela, il y avait des années, lorsqu'elle apprenait les poisons auprès des femmes du métier ?

Parce que tu n'es rien, Niallan le Bâtard. Précisément parce que tu n'es personne. Tu n'as pas de nom, et ça tombe bien, le mien me suffit. Tu ne sembles avoir aucun talent particulier, si ce n'est celui d'être débrouillard. Tu n'as pas d'argent, et mon coffre en est rempli. Tu es drogué et alcoolique. Tu dépendras intégralement de moi, et c'est ce que je veux.

Insolente, provocatrice, Gaia quitta le banc pour s'assoir à califourchon sur les genoux du blond. Posant les mains sur ses épaules, elle approcha son minois du sien, un léger sourire sur les lèvres.

Tu seras mon mari, Niallan. Si tu t'avises de me quitter un jour, je ferai en sorte que plus jamais tu ne puisses mettre la main sur l'opium que tu aimes tant. J'en ai les moyens, tu dois t'en douter. Personne n'a envie d'aider l'ennemi d'une Corleone. Et si tu me quittes, cher Niallan, tu passeras ta vie à te demander si le verre et la nourriture que tu t'apprêtes à consommer ne dégorgera pas de poison. Si la femme avec qui tu batifoles ne te plantera pas un poignard dans le dos au moment où tu seras le plus vulnérable. Tu comprends ce que je veux dire, n'est-ce pas ?

Parce qu'elle en éprouva soudain l'envie irrépressible, Fleur se pencha plus avant, jusqu'à ce que ses lèvres effleurent celles de Niallan. Esquisse de baiser. Elle remettait le reste à plus tard.

Tu passes tes journées comme tu l'entends, Niallan. Mais la nuit, c'est avec moi que tu es. Chaque nuit que le Bon Dieu fera, tu seras à mes côtés. Et si tu dois aller voir ailleurs, sois discret, au moins. J'ai horreur que l'on me ridiculise. Et si je me sens bafouée, j'ai les moyens de te couper l'envie de soulever d'autres draps que les miens. Tu as bien compris ça aussi ?

Mais tout cela méritait qu'on l'adoucisse. Cette fois, aucun retenue. L'Ortie l'embrassa à pleine bouche, mélange de sensualité et de fougue, tout en enfouissant les doigts dans sa chevelure blonde. Il fallait bien, songea-t-elle, qu'il ait quelques petites compensations, après tout cela.

Non, fit-elle en se redressant. Je ne consomme pas. Il faut avoir les idées claires en toutes circonstances.

Quittant ses genoux, la Fée prit cette fois place sur le fil de la table. Le bras croisés, elle le regardait en souriant. Qui aurait pu croire alors, devant ce sourire charmant, qu'elle venait d'emprisonner la vie d'un homme au creux de sa main ?

Je ne te raccompagne pas. Je suis sûre que tu sauras retrouvé ta route. Nous nous reverrons avant le mariage. J'ai hâte de te revoir, cher, cher Niallan.



Suite au prochain épisode...



OneRepublic - All the right moves
Ils seront les Rois de Cœur, et tu seras la Dame de Pique
Et nous nous battrons pour toi comme si nous étions tes soldats
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