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[RP - ouvert] Envoie donc un choc à cette loque !

Niallan
[Tu es partie et je dois rester défoncé
Tout le temps
Défoncé tout le temps
[…]
Pour te garder hors de ma tête*]


Je farfouille maladroitement dans mes poches sous l’œil suspicieux du tavernier. Il exige que je paie avant qu’il ne me serve ce énième verre de « ce que vous avez de plus fort ». J’ai des thunes, je suis sûr qu’il me reste des thunes. J’ai couché avec une noble y’a pas si longtemps, elle m’a bien payé et je lui ai piqué des bijoux, il doit me rester… J’ai dû chercher avec un peu trop d’entrain, plus que ce que mes jambes ne pouvaient supporter. Et je suis tombé. J’ai même pas essayé de me rattraper et lorsque j’ai heurté le sol j’ai souri. Ce qu’il y a de bien avec l’alcool c’est qu’il atténue tellement la douleur que je ne sens pas les morceaux de chopes cassées qui s’enfoncent dans mon dos, je ne sens pas non plus les puissantes mains du tavernier me soulever du sol pour me plaquer contre le comptoir. Je souris.

J’crois qu’t’as eu ton compte alors t’vas gentiment fout’ le camp ‘vant que j’m’énerve.
Attends, attends…

Nullement impressionné par ce poing qui se rapproche dangereusement de mon tarin, je passe une main derrière ma nuque pour détacher une cordelette de cuir à laquelle est accrochée une bague. Mon alliance. Celle qu’Alicina aurait dû me passer au doigt hier, celle qui aurait fait de moi son époux. Ça aurait dû se passer dans le bocage normand en compagnie de mes amis et des siens. La nuit de noces aurait été fabuleuse et, quelques mois plus tard, elle aurait mis au monde notre enfant.
Le crochet envoyé par le tavernier me projette à nouveau au sol et, alors que ma tête cogne le sol, j’esquisse un nouveau sourire. Ça ne s’est pas passé comme ça, ça n’arrivera jamais. Elle est partie, je l’ai laissée partir. Au milieu du mois d’août Maryah l’avait enlevée pour lui faire payer la mort de ma fille. Elle l’avait enfermée avec des putois, secouée un peu et puis l’avait relâchée. Mais pas avant de lui avoir dit qui j’étais et comment je l’étais devenu. Ali pensait que je pouvais changer, devenir quelqu’un de bien avec elle. Pour elle. Elle se plantait. L’Epicée est, au final, la seule qui me connaisse vraiment comme si elle m’avait fait. Ah mais attendez : elle m’a fait. C’est elle qui m’a montré comment séduire, manipuler et détruire. C’est elle qui m’a fait Champion. Aujourd’hui, j’applique avec un talent indéniable ses enseignements. Ne pas s’attacher, ne pas rester…

Tenez, ça paie largement une bonne bouteille, ça.

L’alliance change de propriétaire, le nouveau aide l’ancien à se relever et l’assoit plus ou moins rudement sur une chaise avant de lui apporter la fameuse bouteille. Cette dernière est immédiatement débouchée et sa descente entamée. J’étais fou amoureux d’elle. Je l’aimais tellement que je l’avais demandée en mariage, que j’avais commencé à économiser pour nous construire une jolie maison au bord d’un lac. J’aurais pu pêcher dans ce lac et pendant ce temps, elle, elle aurait lu une histoire à la tripotée d’enfants qu’on aurait eu. J’avais des projets plein la tête, des étoiles plein les yeux. Et il y avait eu l’enlèvement. Les jours suivants j’avais compris. J’avais compris que jamais je ne pourrai démarrer une nouvelle vie en foutant des coups de pompes à mon passé pour le faire dégager. J’avais compris que, tôt ou tard, je finirai par merder et qu’elle, elle en souffrirait. Alors j’avais arrêté de venir la voir, de répondre à ses courriers. Je m’enfermais dans mon silence et elle dans une colère mêlée de tristesse.

Je bascule la tête en arrière histoire que l’alcool brûle plus rapidement le fond de ma gorge. Un soir, elle était partie. Elle m’avait laissé derrière elle. C’est ce que je voulais et pourtant à partir de ce jour-là j’ai pas arrêté de morfler. Chaque jour qui passe je me demande ce qu’elle fait, où elle est et avec qui. A la fin du mois d’août, j’avais eu une réponse à mes questions. Septembre. Le prénom, pas le mois. Elle disait retomber amoureuse de lui, ne plus savoir quoi faire, douter. Elle écrivait qu’elle avait besoin que je revienne pour que je chasse le fameux Septembre de son cœur. Je ne l’avais pas fait. J’avais lentement déchiré la lettre et je l’avais regardée brûler.
Ce mec-là, Septembre, je le sentais bien. Il allait l’épouser, lui faire des enfants et surtout, il la rendrait heureuse parce que lui resterait. Les traits de mon visage commenceront bientôt à s’effacer de sa mémoire et puis un jour elle se réveillera et ne pourra apposer sur mon prénom qu’une ombre aux contours indistincts et puis…

Et puis l’alcool remplit enfin son rôle. J’oublie Ali et mes conneries.
J’oublie mon prénom et mes surnoms.
J’oublie de tenir la bouteille, elle s’écrase au sol. J’oublie de tenir sur la chaise, je m’écrase au sol.
Mes yeux se ferment, je souris. Doucereux oubli…


*Traduction paroles Tove Lo - Stay High (Habits Remix) ft. Hippie Sabotage

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Fleur_des_pois
| Le puits de tes emmerdes n'a pas de fond |

Gaia aimait prendre des bains. Se prélasser dans l'eau chaude lui procurait un plaisir simple et agréable. Elle frottait son corps et ses cheveux à l'aide de saponaire, avant d'enduire l'un et l'autre d'huiles parfumées aux vertus diverses et variées. Après une si longue marche en solitaire, la Fée massait ses jambes galbées de fleur d'oranger. Elle aimait cette odeur plus que toutes les autres. Elle s'était d'ailleurs assurée que les langes de son fils en soient parfumés.
La grossesse, loin de l'enlaidir, avait fait s'arrondir sa poitrine déjà joliment dessinée. Sa taille redevenue fine n'avait pas subi les séquelles de l'empâtement. En un mot, sa silhouette n'en était que plus attrayante.

Lorsqu'elle sortit du baquet, elle essuya peau et chevelure avec soin. La Fée dédaigna la chemise qu'elle portait habituellement. Le vêtement avait besoin d'un bain, lui aussi. En revanche, pour ne pas sortir entièrement nue de la pièce d'eau, elle passa sa robe. Il s'agissait d'une tenue de soie, légère et aérienne. Verte bien sûre, elle épousait merveilleusement les formes de son buste, et s'évasait en nombreux plis au niveau des hanches, pour tomber jusqu'à ses petits pieds chaussés de satin noir. Des fils d'ébène dessinaient sur la robe des oiseaux et des plantes.
Le Lutin hésita un instant, avant de décider de ne pas arranger ses cheveux en une coiffure compliquée. Elle les laissa tout simplement flotter librement dans son dos.
Elle capta son reflet dans un miroir, et s'adressa un sourire. Etait-il utile de préciser que Gaia était magnifique ? Tant par sa mise que par la beauté spectaculaire de son minois.

La Fée avait soif. Elle avait envie d'un verre de vin. Et peut-être d'un peu de compagnie, aussi. Elle poussa la porte de la buanderie, jeta un regard alentours, et ouvrit une bouche toute ronde de stupéfaction. Un homme venait de s'effondrer. Un homme qu'elle connaissait. Un homme qu'elle méprisait. Qu'elle avait envie de faire souffrir. Qui était sans défense. Niallan.
Fleur éclata d'un grand rire, légèrement inquiétant. Le ciel la récompensait de son attente. Elle allait pouvoir accomplir ses projets. Enfin. Depuis le temps qu'elle attendait cette occasion...
Fleur leva une main, claqua des doigts. Le tavernier serrait quelque chose dans son poing massif. Le paiement du blond stupide affalé devant elle. A ses pieds. Là où était sa vraie place.


Donne, exigea l'Ortie en tendant le bras vers l'aubergiste.
Mais...
J'ai dit... Donne. Tu veux vraiment m'obliger à le répéter une troisième fois ?

Le tavernier déglutit, et donna la bague. Une bague simple. Une alliance. La rumeur disait donc vrai. Ce bougre d'âne bâté allait se remarier. Gaia gratifia l'homme d'un bref sourire, et vida sur le comptoir le contenu de sa bourse. En tomba plus d'une trentaine d'écus. C'était plus que suffisant pour payer ses services.
Un instant plus tard, le tavernier portait le blond évanoui sur une chaise. Il lui lia les poings et les chevilles, avant de s'écarter, tête basse, vers son comptoir où l'attendait son petit tas d'or. La suite ? Gaia s'en chargerait. Seule.
Elle souleva sans trop de peine le seau d'eau glacée à moitié empli, et jeta le contenu au visage de Niallan.


Réveille-toi mon chou, chantonna l'exécrable Lutin en s'agenouillant devant lui. Reviens parmi nous.

Elle pouffa de rire, planta ses ongles dans la nuque de Niallan, et l'embrassa. Gaia allait enfin pouvoir s'amuser.
Niallan
[Marcher sur l'eau semble périlleux à présent,
Tu avais ma confiance
Et ça ressemble, ça ressemble à du sabotage*]


A vrai dire, marcher tout court est risqué en ce moment. Même ramper, je le sens pas. Du coup, c’est avec un sourire béat que j’accueille ces gens qui sont venus me soulever. Je ne sais pas qui ils sont, je ne les vois pas. Mais me rasseoir, quand même, c’est sympa. M’attacher ça l’est un peu moins. Quoiqu’ils doivent avoir raison : ça m’empêchera de retomber. Je continue à sourire, tout heureux que je suis. « Merci. Je peux avoir un autre verre ? » est la phrase que je pense avoir sortie. En vérité, je n’ai pas prononcé un seul mot qui ne ressemble pas à un marmonnement, j’ai la bouche pâteuse et les muscles de mes joues ne fonctionnent plus. Je suis une loque, en somme. Tant pis. Il me reste encore quelques heures hors du temps, complètement défoncé. Ensuite, je redescendrai et me souviendrai que ma vie est clairement à chier. Mais pas tout de suite.
Je me mets à rire, dodelinant de la tête en avant puis en arrière. Sur le côté aussi un peu. Je ne sais pas ce qui est drôle mais ça l’est franchement.

Soif…

Le volume sonore était extrêmement bas, le timbre tout à fait fragile. Y n’empêche que ces gentilles personnes qui m’ont aidé à me relever l’ont quand même entendu. Le seul problème c’est qu’on ne doit pas avoir les mêmes coutumes concernant le breuvage. Quand je disais avoir soif (de façon plus ou moins bien formulée), j’imaginais un verre de whisky ou d’absinthe enfin, qu’importe tant que c’était assez fort pour me brûler la gorge et me retourner la tête. A la place, j’ai eu le contenu d’un seau d’eau en pleine tronche. Mais vous savez quoi ? Ça ne m’a même pas mis en colère. J’ai continué à sourire, tentant sans y parvenir d’ouvrir les yeux. J’aurais pu rester dans cet état comateux que j’affectionne tout particulièrement si une voix ô combien familière ne s’était pas faite entendre. Sous les effets de l’alcool j’ai failli ne pas la reconnaître, cette putain de voix que j’avais entendue pendant des semaines. C’est le « mon chou » qui m’a glacé le sang pourtant bien réchauffé. J’ai ouvert à moitié un œil pour ne distinguer qu’une forme verte et noire. Verte en bas, noire en haut. Elle aimait tellement les robes vertes…

Et puis le baiser. Ces ongles qui s’enfoncent dans ma nuque, cette bouche qui s’écrase contre la mienne. Ça faisait quoi, quatre, cinq mois que je ne l’avais pas vue ? Il y avait eu quelques lettres et plus rien. Je la pensais morte. Ou remariée. Dans les deux cas, ça revenait au même pour moi. J’étais persuadé qu’elle avait tué notre enfant avant même qu’il ne pousse son premier cri. Moi, elle m’avait pourri la vie et failli me la prendre alors croyez-moi, je ne pensais plus jamais la revoir. Le Royaume est vaste, non ? Honnêtement, quelle était la probabilité qu’en me murgeant le groin pour oublier ma seconde femme, la première se ramène ? Je n’ai aucune notion d’arithmétique (je sais juste me démerder pour mes finances) mais je n’ai pas peur d’affirmer qu’elle était infime. Presque nulle, en fait. Et pourtant…

Fleur…

Ce prénom. Bordel. J’aurais tout donné pour ne jamais plus le prononcer. L’œil qui, péniblement, avait fini de s’ouvrir se referme. Je ne veux pas la voir, plus jamais.

Barre-toi d’ici.

Un sifflement entre mes dents, un ordre.


*Traduction paroles One Republic - Tyrant

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Fleur_des_pois
Nous pensions que rien ne pourrait jamais nous séparer
Ton nom tatoué sur mon cœur
Oh, qui aurait pu croire que ça se finirait ainsi ?


Il n'avait pas l'air très content de la voir. Après l'avoir regardé rire comme un bossu durant quelques minutes, voilà qu'elle l'observait lui cracher quasiment à la figure. La tête penchée sur le côté, elle ne le quittait pas des yeux, un petit sourire flottant sur son visage. Comment en étaient-ils arrivés là, se demanda-t-elle, non sans éprouver une certaine peine à cette interrogation. Pourquoi, alors qu'ils avaient tout pour être parfaitement heureux, s'étaient-ils laissé rattraper par la rancœur ?
Gaia s'agenouilla devant lui, ses mains aux doigts fins venant se loger avec un naturel peut-être un peu déroutant, sur les genoux de l'homme qui lui avait si bien brisé le cœur, que certains morceaux manquaient encore. Elle avait tellement eu envie de lui faire du mal... De lui rendre au centuple chaque coup qu'il lui avait porté. Mais maintenant... Le voir là, si impuissant, si faible... Pauvre Niallan, songea-t-elle en tâchant, sans grand succès, d'éprouver une peine sincère pour lui.


Tu voudrais que je m'en aille ? Déjà ? As-tu un message à transmettre à ton fils ? Le nôtre. Notre bébé.

La corde sensible. Gaia le savait parfaitement. Elle connaissait ses faiblesses, et celle-ci était probablement celle qui avait le plus d'influence sur lui. La mort de Lexianne avait dû empirer le phénomène. La Fée, vicieuse, venait de trouver l'idée qu'il lui fallait. L'arme parfaite. Utiliser le fils pour atteindre le père ne lui posait aucun soucis. Elle comptait élever Drago dans la haine absolue de son géniteur. Alors manipuler les deux parties un peu plus tôt que prévue n'était pas si dérangeant, après tout.
L'Ortie s'agenouilla devant lui, se glissant entre ses genoux, les mains remontant jusqu'en haut des cuisses. Elle n'était pas particulièrement décidée à le provoquer ni à lui plaire d'une quelconque façon, mais elle se souvenait qu'autrefois, elle aimait le toucher. Sentir sa peau sous ses doigts. Sentir son corps frémir contre sa paume. Elle avait aimé cela, fut un temps.


Si tu savais comme il est beau... Le mettre au monde fut douloureux, mais magique. Son premier cri, Niallan, son premier cri. J'ai pleuré toute la nuit. Il est né à minuit. La cloche de l'église sonnait au même moment. C'était grandiose, Niallan. Grandiose.

Son visage donnait l'impression d'être baigné par le plus pur rayon de soleil. Elle en semblait presque transformée. Quand elle parlait de Drago, son sourire se faisait tendre, sincère. Son regard brillait d'amour et d'adoration. Drago était son monde, sa vie, et cela se lisait sur son minois de Lutin.
Elle sembla se reprendre, secouant légèrement sa tête, faisant onduler dans son dos sa chevelure de soie noire.


C'est tellement triste que tu n'ais pas pu assister à ça. La naissance de ton fils... Tu as préféré aller t'envoyer en l'air avec d'autres que moi, et tu as raté la naissance de ton enfant. Je me demande... Verras-tu un jour les premiers pas de l'un de tes enfants ? Ou préféreras-tu toujours ton insipide petite vie sans intérêt ?

Gaia leva une main vers le visage du blond. Elle passa la main sur son visage, avant de l'égarer dans ses cheveux. Un sourire narquois étirait ses lèvres roses. Il y avait un temps pour subir, et un autre pour faire subir. Et c'était son tour, maintenant.


The Script - Before the Worst
Niallan
Notre bébé... C'est comme ça qu'elle l'avait appelé. Elle l'avait gardé cet enfant de nous, elle ne s'en était pas débarrassée contrairement à ce que promettaient ses menaces. L'espace d'un instant, j'ai eu envie de lui dire à quel point je lui en étais reconnaissant, à quel point j'étais heureux. A quel point je l'avais aimée, aussi. J'avais commencé à sourire et puis je me suis souvenu. De tous ses mensonges, de toutes ces fois où elle m'avait manipulé pour se servir de moi comme elle se servait des autres. J'ai posé les yeux sur ses mains qui pouvaient aussi bien caresser que gifler. Là elles caressent mais je sais très bien que d'ici quelques minutes ce sont ses ongles qui s'enfonceront et qu'elle me regardera avec mépris et colère. Elle n'est que haine et c'est ça qui nous a détruit, lentement mais sûrement. Elle ne sait pas aimer. Alors oui, j'ai bien un message à faire passer à notre fils.

Dis-lui que je suis désolé. Désolé d'avoir mis en cloque une femme qui ne peut aimer qu'elle et ses poisons, désolé de ne pas être resté pour lui. Dis-lui aussi que lorsque sa mère lui dira « je t'aime », quand elle demandera pardon en pleurant, ce ne seront que des putains de mensonges, qu'elle recommencera. Dis-lui de se barrer dès qu'il sera en âge de le faire, dis-lui que moi, je l'attendrai. Et si tu pouvais ajouter que les Corleone ne constituent qu'un ramassis de connards égocentriques, je t'en saurais gré.

N'étant pas tout à fait stupide, je savais qu'elle ne lui dirait rien de tout cela. Si les mois que j'avais passé en tant qu'époux de Gaia Corleone m'avaient bien appris une chose c'est qu'elle ne reconnaissait ses erreurs que lorsqu'elle s'apprêtait à perdre. Combien de fois avais-je cru qu'enfin elle allait changer, qu'elle allait finir par nous laisser une chance d'être heureux, de mettre un terme à nos engueulades ? A chaque fois qu'elle pleurait, je pardonnais. A chaque fois qu'elle disait m'aimer, j'y croyais. A chaque fois qu'elle me disait que c'était « fini », qu'elle ne voulait plus être une sale garce, je lui faisais confiance. Et à chaque fois j'étais déçu, à chaque fois c'était la même histoire. Pendant quelques jours tout allait bien : elle était tendre, elle était aimante. Et le jour suivant les coups de gueule revenaient aussi vite que la rancœur. Oui, je connaissais Gaia Corleone. Parce que je l'avais aimée, parce que j'aurais été prêt à crever pour elle. Plus maintenant.
Si je n'avais pas eu les mains liées, j'aurais repoussé les siennes avec véhémence. Par le passé, j'aurais tout donné pour une caresse, un effleurement. Je ne me souvenais que trop bien de la force de nos étreintes, du désir qu'elle allumait en moi rien qu'en entrant dans la pièce. Je savais qu'il me suffirait de faire un pas pour retomber dans ce précipice que j'avais peiné à remonter et croyez-moi, ce pas, je ne le ferai pas, jamais. A la place...

Vire tes mains de là. Tu l'as vue, non ? T'as vu avec quoi j'ai payé ma bouteille. L'alliance. Elle était pour Ali, j'étais à elle et je le suis toujours alors ne me touche pas, plus jamais. Va donc te faire sauter par ton cousin pour perpétuer la consanguinité Corleonienne.

J'avais envie de la frapper, de la tuer même, pour qu'elle se taise. Qu'elle la ferme. Je ne voulais pas savoir à quel point la naissance de notre enfant avait été magique, à quel point elle avait été heureuse. Je me foutais de ce qu'elle avait pu ressentir et du son de la cloche de l'église.

Tais-toi. Ferme-la. Ferme ta putain de...

Et puis le coup de grâce, ça y est, on y était. Elle me renvoyait en pleine tronche tous les moments que j'avais raté avec mes gosses. Elle savait. Elle connaissait mes faiblesses aussi bien que je connaissais ses vices. Les premiers pas, ce grand moment dont les parents se délectaient, ce grand moment dont j'avais toujours été privé. Par ma faute ? Pas totalement. Je n'avais découvert l'existence de Lexi et Percy que respectivement dix et cinq ans après leur naissance. Et cet enfant de Fleur...je le pensais mort sans avoir poussé son premier cri.
Les tremblements agitant mon corps ne sont pas dus à l'ivresse mais bien à cette constatation et à cette main qui s'égare de ma joue à mes cheveux. Sa main. Si j'avais été un pauvre fou, je me serais contenté de fermer les yeux et de savourer mais fou je ne l'étais plus que d'Alicina. J'ai inspiré un grand coup et je l'ai regardée droit dans les yeux, sans faillir.

Qu'est-ce que tu veux de moi, Fleur ? Si tu es venue me dire que je ne verrai jamais mon fils, tu t'es déplacée pour rien. Je me doute bien que tu comptes te servir de lui pour m'atteindre alors je ne veux rien savoir de lui. Ni son prénom ni à quoi il ressemble, je ne veux pas savoir quel sera son premier mot et à quel âge il fera ses premiers pas. Je ne me mêlerai pas de sa vie, pas plus de la tienne. Mais laisse-moi, va-t-en, laisse-moi l'oublier en paix...

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